Notes
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[1]
Bulgarie, Chypre, Estonie, Irlande, Lettonie, Lituanie, Luxembourg, Malte, Slovénie, Finlande. Jusqu’en 2010, la Finlande abritait une seule région (Uusimaa de l’Est).
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[2]
Hongrie et Roumanie.
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[3]
Autriche, Croatie, Danemark, Grèce, Pays-Bas, République Tchèque, Slovaquie, Suède.
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[4]
Les trois niveaux peuvent correspondre à trois échelles territoriales clairement hiérarchisées en termes de taille (Allemagne, Espagne, France, Italie, Pologne), quand les Communautés et les Régions belges se distinguent essentiellement en termes de champs de compétences. Quant au Royaume-Uni, l’échelon intermédiaire des comtés n’a plus véritablement d’existence en termes de compétences, et le niveau le plus général correspond à des nations (Écosse, Irlande du Nord, Pays de Galles) dotées de Parlements.
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[5]
Cette Charte, signée à Strasbourg le 15 octobre 1985 dans le cadre du Conseil de l’Europe, fait de l’autonomie locale un principe garantissant l’indépendance politique, administrative et financière des collectivités locales, dotées d’une capacité effective à régler une partie significative des affaires publiques au profit de leur population.
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[6]
De manière tangible, les Provinces italiennes ont été affaiblies à la fois sur le plan des compétences (transferts aux collectivités locales ou régionales) et sur le plan électoral (le conseil provincial ne dispose plus que de dix à seize membres, désormais élus par les organes élus des communes situées dans la province concernée). En France, les Départements ont certes survécu au discours de politique générale de M. Valls, annonçant leur suppression à échéance de 2020, mais ressortent fragilisés par la loi NOTRe du 7 août 2015 (perte de la clause générale de compétences, interdiction nouvelle de conduire une action économique, transferts de compétences aux conseils régionaux (transports interurbains, ports) et aux métropoles).
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[7]
La fragilité dudit échelon intermédiaire, suscitant l’inquiétude du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe (Verrengia, 2012), présida à la création en 2008 de la Confédération européenne des pouvoirs locaux intermédiaires (CEPLI). Organisation à but non lucratif de droit belge, elle réunit neuf associations nationales et deux réseaux européens de pouvoirs locaux (Arco Latino, Partenalia).
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[8]
Source : site internet Vie publique.
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[9]
Sans compter que les communes ultramarines apparaissent comparativement extrêmement étendues, aussi bien dans des contextes de faible densité (communes guyanaises) que de forte densité (La Réunion).
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[10]
Il existe historiquement des zones d’habitat groupé en villages de tailles modestes (nord-est de la France, Rhénanie-Palatinat), des fermes isolées organisées autour de petites paroisses rurales (Normandie, Gascogne, vallées alpines - des Préalpes françaises au Tyrol autrichien), des régions d’habitat dispersé en hameaux et fermes isolées, au sein desquels la fréquence de bourgs-centres est plus rare (Bretagne, Massif central) ou au contraire des régions de tradition urbaine forte, avec un habitat est très centralisé autour de bourgs ou petites villes (Andalousie, Murcie, basse Provence, grande partie de l’Italie, Pays-Bas…) (Grison, 2016).
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[11]
Les communes nouvelles de moins de 10 000 habitants bénéficient d’un pacte de stabilité de la DGF, quand l’avantage est également octroyé aux communes nouvelles de plus de 10 000 habitants à la condition qu’elles correspondent à une transformation intégrale de l’EPCI en commune nouvelle. Pour la strate de 1 000 à 10 000 habitants s’ajoute la garantie de percevoir la DGF additionnée de chaque commune rejoignant la commune nouvelle, ainsi qu’une bonification de la DGF de 5 %.
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[12]
Recommandation est faite par le Centre d’étude pour la réforme de l’État de fusionner de manière obligatoire les communes de moins de 500 habitants, de manière facultative les communes comptant entre 500 et 1 000 habitants.
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[13]
Source : OCDE.
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[14]
Ce baromètre est publié par le CNFPT et l’Association Internationale des Écoles et Instituts d’Administration (AIEIA) avec l’appui du Conseil des Communes et Régions d’Europe (CCRE) et du Conseil de l’Europe.
-
[15]
La réforme reconnaît désormais aux autorités locales un pouvoir général pour développer le bien-être économique, social et environnemental de leur territoire.
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[16]
La réforme permet désormais aux autorités locales d’emprunter librement pour leurs dépenses en capital pour toute fonction qu’elles tiennent de la loi, sous réserve du respect de règles prudentielles.
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[17]
Aides du fonds de solidarité pour le logement, action sociale, programme départemental d’insertion, aide aux jeunes en difficulté, prévention spécialisée auprès des familles en difficulté, personnes âgées, tourisme (groupe de compétences incluant tourisme, culture et sport), et gestion des collèges.
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[18]
Rapport parlementaire de 1960 sur les problèmes de la politique régionale plaidant pour la mise sur pied d’un « comité consultatif des économies régionales », principalement chargé d’une fonction d’étude et d’analyse.
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[19]
7,8 % du budget communautaire en 1980, 17,6 % en 1986, 27,6 % en 1992, 36 % en 1999.
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[20]
Décision du Conseil, du 18 mars 1975, portant création d’un comité de politique régionale - 75/185/CEE.
-
[21]
L’extension de la fonction consultative est repérable dans le traité d’Amsterdam (1997 ainsi que dans le traité de Lisbonne (signé le 13 décembre 2007).
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[22]
La résolution du Parlement européen du 18 novembre 1998 invitait les États à régionaliser leurs structures internes et leur adressait une “Charte communautaire de la régionalisation” qui voulait en fixer les principes.
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[23]
La ville-État de Brême pèse environ 600 000 habitants, quand le Land de Rhénanie du Nord-Westphalie atteint près de 18 millions d’habitants. La fusion des petits Länder, évoquée de manière récurrente et décidée au niveau fédéré, n’a toujours pas abouti (échec référendaire de la proposition des gouvernements de Berlin et du Brandebourg en 1995 de fusionner les deux Länder).
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[24]
Le projet a été enterré suite à l’alternance politique de 2011 et du retour des conservateurs (Tories) au gouvernement.
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[25]
Entre Douro e Minho ; Trás‑os‑Montes e Alto Douro ; Beira Litoral ; Beira Interior ; Estremadura e Ribatejo ; Lisbonne et Setúbal ; Alentejo et Algarve.
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[26]
L’anticipation d’une victoire de la gauche aux élections régionales de 2004 aurait entamé la détermination de l’Exécutif national, et de sa majorité parlementaire, de renforcer cet échelon institutionnel.
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[27]
Décision inscrite dans la loi MAPTAM du 27 janvier 2014, et précisée par un décret du 3 juin 2014.
1 Alors que l’Union européenne (UE) impose une sorte de benchmarking permanent entre États membres, il est possible d’interroger sur un mode comparatif les systèmes territoriaux, soit la réalité évolutive des collectivités territoriales et de leurs établissements, indépendamment des terminologies nationales employées (autorités locales en Grande-Bretagne ; entités locales en Espagne ; corps ou institutions publics aux Pays-Bas…).
2 Conformément à la « logique de contraste » innervant l’approche comparative, il est possible de relever la diversité persistante des grands systèmes d’organisation administrative des États, inscrits dans des traditions historiques nationales, qui résiste à tout esprit de modélisation. L’hétérogénéité est assez peu surprenante au regard des contrastes tant spatiaux que démographiques séparant les États-membres : dix possèdent un seul niveau – communal – de décentralisation doté d’une autonomie politique [1] ; un pays – le Portugal – dispose au-dessus de ce niveau de deux régions dites autonomes (Madère et Açores) ; dix pays abritent alternativement un niveau de rang intermédiaire [2] ou régional [3] ; enfin, sept pays disposent de trois échelons territoriaux, avec des configurations nationales très contrastées [4] (voir tableau 1). Outre les niveaux d’organisation territoriale, la taille des collectivités considérées diffère fortement d’un pays à l’autre. Par ailleurs, les contrastes sont tout aussi marqués du côté de l’étendue des compétences infra-nationales, entendues au double sens des termes anglais de function (disposer de compétences matérielles) et de power (disposer des instruments juridiques et financiers de la « responsabilité » politique).
3 Si la variété des situations nationales observées condamne a priori l’hypothèse d’un modèle européen d’administration, elle ne saurait pour autant obérer toute idée de concordance - un même phénomène s’observant dans différents lieux -, et de convergence - définie, à la fois ou alternativement, comme un résultat ou un processus dynamique de rapprochement de politiques menées dans des territoires différents (Bennett, 1991, 219). Un processus qui peut être « dur », au sens où il renvoie à de véritables contraintes juridiques, budgétaires, institutionnelles s’imposant aux systèmes d’acteurs, mais peut aussi épouser une forme douce reposant sur des mécanismes de mimétisme ou de transferts de politiques publiques (Pasquier, 2016). Néanmoins, les transferts tels qu’ils sont appréhendés par le courant des policy transfer studies (Dolowitz, Marsh 2000) tendent à exposer des logiques de dissémination et d’emprunts selon une vision assez largement top-down (Bulmer et al., 2007). Holzinger et Knill (2005) ont identifié cinq mécanismes possibles de convergence : 1) l’imposition, découlant d’une asymétrie de pouvoir entre exportateur (un État ou une institution internationale) et importateur sur lequel s’exerce une contrainte importante ; 2) l’harmonisation internationale qui repose sur l’application de normes supra-nationales ; 3) la concurrence qui renvoie aux mécanismes incitatifs de la pression compétitive ; 4) la communication transnationale qui peut être liée au « lesson drawing », à l’émulation, à l’existence de réseaux transnationaux ou à la promotion de modèles par des institutions internationales ; 5) et enfin, l’« independent problem solving » qui correspond à des réponses similaires apportées de façon indépendante à des problèmes comparables.
4 Les quatre premiers mécanismes peuvent recouvrir une dynamique d’européanisation. Mais de quelle « européanisation » parlons-nous ? Dans une perspective top down, l’européanisation consiste à identifier les effets de l’UE, en prenant l’intégration européenne comme un préalable, sur les États et les politiques nationales (Radaelli, 2003). Dans une approche plus bottom-up et interactionniste, l’européanisation résulte d’une interaction entre niveaux européens et nationaux, étrangère à une quelconque relation d’autorité descendante de l’UE vers les États. L’européanisation peut intervenir par le biais du changement de cadres cognitifs et normatifs, une européanisation sans l’Europe, à l’image des politiques nationales de défense des années 1990 (Irondelle, 2003).
5 Au-delà du « bien commun » que représente le principe d’autonomie locale affirmé par la Charte européenne de l’autonomie locale [5], texte de référence à forte portée symbolique sans véritable densité normative (Belloubet-Frier, 2007), nous souhaitons ici comparer les systèmes territoriaux en nous centrant sur les blocs communal (en y intégrant les intercommunalités) et régional. Eu égard à leur plus grande rareté, nous laisserons de côté l’étude des échelons intermédiaires, même s’il convient de mentionner leur contexte de fragilisation [6], qui a pu nourrir la création d’une représentation européenne [7]. Au-delà de données synthétisables pour l’ensemble des pays (tableaux et cartes), notre comparaison mobilisera les cas nationaux de manière non exhaustive, en retenant ceux jugés les plus heuristiques et susceptibles d’illustrer, selon les cas, les configurations singulières, les concordances ou les rapprochements. Ces derniers peuvent concerner les processus de réforme, sans qu’ils emportent nécessairement une convergence des résultats. S’ils obéissent le cas échéant à une logique d’imposition, ils relèvent plus souvent d’une logique de résolution similaire mais indépendante. Si la comparaison du niveau communal privilégiera une comparaison terme à terme, celle des régions nous inclinera à accorder davantage d’importance aux configurations.
Convergence européenne et singularités nationales autour de la cellule de base communale
6 Cellule de base de toutes les démocraties (Vandelli, 2000), seule la commune est présente dans l’ensemble des États membres de l’UE, constituant même pour certains pays le seul échelon de collectivité territoriale (Bulgarie, Chypre, Estonie, Irlande, Lettonie, Lituanie, Luxembourg, Malte, Slovénie). Malgré des politiques fusionnelles partout observées, il s’agit là d’une cellule très hétérogène dont les différences de taille influencent le développement inégal des institutions coopératives. En revanche, le caractère électif, la vocation généraliste, ainsi que la différenciation institutionnelle observée à l’endroit des collectivités urbaines, esquissent un patrimoine commun.
Une réalité démographique hétérogène
7 La réalité démographique des communes européennes révèle une très forte hétérogénéité. Quand le Royaume-Uni fait figure de cas extrême, avec une population moyenne en 2008 de 152 680 habitants par autorité locale (territoire allant d’une région à un arrondissement londonien), celle d’une commune française ressort à 1 750 habitants seulement (contre 4 100 en Europe) [8]. Les moyennes nationales, généralement utilisées pour la comparaison, ne préjugent en aucun cas des superficies elles-mêmes, et ne sauraient davantage masquer les fortes variations régionales à l’image des zones de petites communes (Nord, Est et Sud-Ouest) et de grandes communes (Centre, Ouest, Sud-Est) en France (Meynier, 1945) [9]. Les différences internes aux États ont pu se renforcer en raison d’une inégale intensité des regroupements communaux, à l’image du cas allemand : outre le cas particulier de l’ancienne RDA, existent des stratégies régionales diverses d’un Land à l’autre qui s’expliquent par la différence entre les structures des agglomérations et de leur Land respectif, ainsi que par le contexte politico-idéologique de chaque Land. Si certains Länder abritent des communes de taille relativement élevée, suite à d’importants mouvements fusionnels (le Land de Saxe-Anhalt est passé, en 2010-2011, de 840 à 220 communes), d’autres conservent un maillage territorial très fin (la moyenne en Rhénanie-Palatinat est environ quatre fois moins importante qu’au plan national). Les différences peuvent par ailleurs être indexées au type de territoire à l’image du cas finnois, où la réforme « Nouvelles municipalités 2017 » programmait une organisation municipale à géométrie variable – possibilité d’organiser un échelon infra-municipal - selon la nature urbaine ou rurale des territoires considérés.
8 L’inégal degré de fragmentation remonte jusqu’aux origines de la constitution des États européens (Hintze, 1962). Dans certains territoires, l’absence ou la faiblesse de la féodalité, son caractère tardif, ont relégué la transmission héréditaire des bénéfices (aboutissant à la fragmentation des biens), maintenu les anciens grands territoires ruraux, et stimulé la naissance de collectivités territoriales supra communales (counties anglais, comitats hongrois, voïvodies polonaises) au détriment des unités de base municipales (Angleterre, Castille, Danemark, Hongrie, Italie du Sud, Norvège, Pologne, Suède). A contrario, dans les pays formant l’ancien empire carolingien (Aragon, partie Ouest de l’Allemagne, France, Centre et nord de l’Italie), les successions héréditaires inscrites dans le développement de la féodalité ont provoqué une « pulvérisation » des entités territoriales traditionnelles (comtés, provinces), favorisant un redécoupage complet opéré par les autorités seigneuriales et monarchiques sur la base de petites collectivités. Si les États-nations représentent des variables discriminantes du maillage communal, les contrastes s’observent également au plan infra-national avec des types d’habitat inégalement dispersés [10].
Un mouvement fusionnel assez largement partagé en Europe
9 Le legs historique du découpage communal a été plus ou moins fortement bousculé par les politiques de regroupement initiées en Europe à partir du xx e siècle (voir graphique 1), cherchant à mieux ajuster les institutions locales aux échelles fonctionnelles, où se posent et/ou doivent se gérer les problèmes.
Graphique 1 – Évolution (en %) du nombre de communes entre 1950 et 2007
Graphique 1 – Évolution (en %) du nombre de communes entre 1950 et 2007
10 Ces politiques fusionnelles ont existé sur un mode tantôt volontaire (Italie), tantôt autoritaire et obligatoire (Belgique), tantôt alternatif comme aux Pays-Bas. Alors que les municipalités concernées étaient simplement consultées au départ, le premier gouvernement Balkenende (2002) décida de ne plus imposer les regroupements d’en haut, répondant aux résistances locales qui s’étaient exprimées. Ces politiques fusionnelles ont pu tenir à l’écart la population, sous peine de nullité (Belgique, République Tchèque). D’autres pays ont au contraire autorisé, sans jamais imposer, les référendums locaux dès lors que les institutions le décidaient (Autriche, Danemark), ou que suffisamment de citoyens le réclamaient (Italie). En France, le référendum était apparu comme une option ouverte par la loi Marcellin (1971), en l’absence d’accord unanime des conseils municipaux. Véritable technique de déblocage en cas de résistance (Premat, 2008), le référendum pouvait alors être initié à la demande d’une majorité qualifiée des conseils municipaux (deux tiers représentant la moitié de la population ; la moitié représentant deux tiers de la population), ou proposé par le préfet (qui pouvait passer outre s’il obtenait l’accord du conseil général). Avec la réforme des communes nouvelles, issues de la loi RCT du 16 décembre 2010, deux tiers des conseils municipaux des communes membres d’un même EPCI à fiscalité propre, représentant plus des deux tiers de la population, peuvent décider du regroupement sans l’accord d’une autorité « supérieure », mais avec l’approbation référendaire. Dans les faits, la recherche d’unanimité reste la règle (Frinault, 2017). En Grèce, à défaut de majorité qualifiée des conseils municipaux (majorité des 3/5es), le projet de fusion doit réunir la majorité des votes des citoyens concernés.
11 L’intéressement budgétaire au regroupement est apparu comme une donnée largement partagée en Europe. En Allemagne, le remodelage communal été accompagné par des dotations spécifiques, qui ont été maintenues dans les nouveaux Länder de l’Est. En Grèce, les collectivités fusionnées ont pu bénéficier d’une allocation générale multipliée par le nombre de collectivités concernées par la fusion si la population de la nouvelle collectivité n’excède pas les 1 000 habitants. Entre 1 000 et 10 000, le chiffre se voit multiplié par deux. Au-delà, le chiffre est majoré en proportion du nombre d’habitants supplémentaires. Les collectivités fusionnées bénéficient par ailleurs d’un accès prioritaire à des prêts sans intérêt. En Italie, la loi de 1990 prévoyait l’attribution pour dix ans de subventions de l’État (complémentaires le cas échéant d’éventuelles subventions régionales), aux communes fusionnées excédant le seuil des 5 000 habitants. En Norvège, une ancienne pratique consistait à renforcer les dotations globales de manière à atténuer les conséquences de la fusion sur le montant alloué aux nouvelles communes. En Belgique, la loi du 23 juillet 1971 prévoyait des incitations financières et des garanties pour le personnel communal des communes fusionnées.
12 En France, la loi Marcellin (1971) promettait sans grand succès des dotations d’équipement accrues et des primes foncières. La loi promulguée le 16 mars 2015 relative à l’amélioration du régime de la commune nouvelle a permis aux regroupements d’échapper temporairement – pendant trois ans - à l’austérité [11]. Le contexte inédit de restriction des concours de l’État aux collectivités territoriales, associées malgré elles à la politique de maîtrise des déficits publics, semble avoir agi comme une fenêtre d’opportunité pour rendre cet intéressement budgétaire plus attractif que par le passé.
Un mouvement fusionnel précoce dans la partie septentrionale de l’Europe
13 Les pays d’Europe septentrionale ont, les premiers, promu des réformes fusionnelles. Parfois mises à l’agenda avant la Seconde guerre mondiale (dès 1937 en Belgique, avant que la question ne soit éclipsée par la guerre [12]), initiées au début des années 1950 (une réforme suédoise de 1952 abaissait le nombre de communes à 816, contre 2 532 en 1930), les réformes ont connu une ampleur inédite à partir des années 1960-1970, quitte à être prolongées par la suite. Au Danemark, la réforme de 1970 faisait passer le pays de 1 388 à 273 communes, avant qu’une seconde réforme (2007) fasse tomber le nombre à moins d’une centaine (pour une population moyenne au-dessus des 50 000 habitants). En Suède, la poursuite de la réforme engagée dès 1952 a fait tomber à seulement 278 le nombre de communes en 1974. Quelques cas de défusions stabilisent depuis le nombre en dessous de 300. En comparaison, le voisin finnois a attendu les années 2000 pour qu’une stratégie de réforme municipale d’ampleur voie le jour : le nombre de communes est ainsi passé de 416 en 2005 à 326 en 2012 [13]. En Belgique, les fusions prennent une ampleur inédite avec la loi du 30 décembre 1975. Dénoncée par les opposants comme un véritable coup de force, sa mise en œuvre a abaissé le nombre de communes de 2 739 – maximum – à 596 communes (aucun accord ne fut trouvé concernant les 19 communes bruxelloises). Chez le voisin néerlandais, l’incitation au regroupement intervient dans le contexte de décentralisation des compétences aux communes des années 1980. Le seuil minimal fut fixé à 5 000 habitants, avant d’être porté à 25 000 au cours des années 1990. Les communes néerlandaises abritaient en moyenne plus de 38 000 habitants en 2010. La réforme promue en 1970 en Allemagne de l’Ouest présente, comparativement, une moindre intensité, faisant tomber le nombre de communes (Gemeinden) d’environ 24 000 à 9 000. Chiffre qui est remonté à 14 865 après la réunification (octobre 1989 - octobre 1990), avant que la RDA, abritant pratiquement autant de communes que sa voisine, réduise de plus d’un tiers leur nombre. Entre 2007 et 2011, le nombre de communes a diminué de 7 %, passant de 12 456 à 11 553.
Une diffusion du mouvement à l’Europe méridionale
14 Les pays d’Europe du Sud se sont lancés de manière plus tardive dans ce type de réforme, à l’image de l’Italie. Après que le premier mouvement fusionnel imposé par le régime fasciste a été effacé immédiatement après la guerre, compromettant durablement toute nouvelle réforme, il fallut attendre une loi du 8 juin 1990 pour qu’une dynamique de regroupement, réservée à des ensembles populationnels de plus de 10 000 habitants, soit à nouveau observée avec les unions de communes. Purement volontaire, le regroupement est encouragé par des incitations de type financier et la préservation de l’identité originelle des communes à travers des mairies annexes (municipi). Ce qui n’a pas suffi puisque le nombre de communes (8 088 en 1990) a très légèrement augmenté au cours de la décennie pour monter à 8 103 (Vandelli, 2007).
15 Jusqu’à peu, l’Espagne n’avait connu aucune politique volontariste de regroupements. Mais elle ne comptait que 8 116 municipalités au recensement de 2011 (contre 8 077 en 2001), soit près de quatre fois et demie moins qu’en France, pour une superficie inférieure de seulement 10 %. En 2012, le gouvernement espagnol s’est lancé dans un plan visant aussi bien à fusionner qu’à renforcer les coopérations, pour les communes de moins de 5 000 habitants (84 % de l’ensemble des communes espagnoles). La région de Castille et Léon, qui comprend à elle seule 2 200 communes de moins de 5 000 habitants, était la première concernée. En renforçant les fonctions assumées par les Provinces, qui peuvent être chargées de coordonner un certain nombre de services publics minimaux pour les municipalités de moins de 20 000 habitants, la loi sur la rationalisation et la viabilité des collectivités locales favorisait le jeu du regroupement, seule manière de ne pas « se déshabiller » au profit de l’échelon territorial supérieur.
16 En Grèce, alors que l’encouragement aux fusions volontaires au milieu des années 1980 n’a eu qu’un impact très limité, malgré de généreuses incitations, l’afflux des fonds européens et la gestion partenariale sur le terrain ont poussé à repenser l’organisation locale. Le Plan Capodistrias (1997-2004), soutenu par l’Association nationale des municipalités (dominée par le parti socialiste et les maires urbains) et quelques figures de l’opposition (Hlepas, 2003), a brutalement fait passer le nombre de communes de 5 823 à 1 034 (contre 550 « consortiums de coopération » initialement envisagés par le réformateur). Le projet, qui ne concerne pas les grandes agglomérations, consiste à fusionner des kinotis (petites communautés qui réussissaient à se fondre dans les grandes aires urbaines) pour créer des dèmes (communautés composées au minimum de 10 000 habitants). Afin de garantir la réussite du plan, les compétences des kinotis reculent quand celles des dèmes se renforcent. En 2011, une seconde réforme a encore abaissé aux deux tiers le nombre de communes, pour ne plus compter que 325 entités abritant une population moyenne de 35 000 habitants.
17 Le baromètre des réformes institutionnelles locales en Europe (49 pays européens sont concernés) [14] montrait une baisse du nombre de communes, entre 2005 et 2016, de 14 % en Europe, et de 6 % au sein de l’Union européenne. Ce qui rappelle, au passage, combien cette dynamique n’est pas particulièrement indexée à l’influence de l’UE.
Une réforme française précoce mais sans lendemains
18 Du point de vue des résultats, la France n’a que très marginalement contribué au mouvement fusionnel, quand bien même elle eût rejoint l’ensemble septentrional européen sur le plan chronologique. Principale réforme ayant trait à l’objet, la loi Marcellin – ces questions étaient précédemment traitées sous forme de décrets - est en effet intervenue tôt, au lendemain des élections municipales de 1971. Conçue sans véritable concertation avec la puissante Association des Maires de France, cette réforme prévoyait l’établissement de plans départementaux de regroupement par des commissions d’élus sous le contrôle des préfets, censés poursuivre un objectif de cohérence et d’aménagement urbain, ainsi qu’une mutualisation efficace en milieu rural. Alors que les plans de fusion proposaient la substitution de 3 482 nouvelles communes à 9 761 communes existantes, plaçant les intentions réformatrices françaises en-deçà des réformes observées dans les pays nord-européens, seules 838 fusions concernant 2 045 communes sont intervenues entre 1971 et 1977 (moins de 10 communes fusionnées dans la plupart des départements). Les effets sont d’autant plus limités que la plupart des regroupements empruntèrent la forme très atténuée des fusions-associations, les anciennes communes étant maintenues et érigées en autant de sections électorales. Alors que de nombreux pays ont procédé à ce type de démarche en ayant recours à une réforme pilotée par le haut et impérative (Négrier, 2005), François Dupuy et Jean-Claude Thoenig y voient une « politique délibérément voulue comme symbolique dès le départ » (1983 : 153). En l’absence d’impérativité, les collusions entre les notables locaux et les préfets ont vite fait de reprendre le dessus, refusant d’entériner des fusions jugées trop contraignantes (De Kervasdoué et al., 1976). Si le « trop grand » nombre des communes, jugé inadapté aux réalités économiques et sociales, a sans cesse taraudé les esprits (Boulay et Le Bras, 2012, 144), c’est une situation de quasi statu quo communal qui l’emporte jusqu’au vote de la loi du 16 mars 2015 relative à l’amélioration du régime de la commune nouvelle,
19 La mise en œuvre de ce texte, porté par l’AMF par l’entremise de son président-député Jacques Pélissard, provoque un frémissement : le solde net des communes nouvelles de l’année 2015 (773 communes) représente en une seule année 70,33 % des quarante années de fusion comprises entre la loi Marcellin et la loi RCT du 16 décembre 2010. Concernant pour l’essentiel les petites communes rurales, le regroupement permet à la fois d’échapper à l’austérité des concours de l’État, et d’éviter une trop forte marginalisation des petites communes rurales au sein d’intercommunalités en voie d’agrandissement (Frinault, 2017).
Les faux-semblants des comparaisons nationales : prendre en compte l’intégralité du bloc local
20 Les comparaisons européennes en matière communale s’établissent spontanément à partir du niveau 1 des « Local Administrative Units » (LAU), niveau statistique d’enregistrement des municipalités retenu par l’UE qui risque de générer des conclusions trop hâtives quant à la structuration du bloc local.
21 En effet, la taille communale n’est pas sans exercer de puissants effets sur le développement des structures de coopération intercommunale. Là où les communes abritent plusieurs dizaines de milliers d’habitants, les États n’ont pas cherché à instituer de forts mécanismes coopératifs, à l’image de la Grande-Bretagne ou du Danemark. A contrario, le maintien du morcellement communal apparaît comme propice au développement des structures intercommunales. Ainsi, les Länder allemands ayant connu des fusions à grande échelle, comme en Rhénanie du Nord-Westphalie où la taille moyenne des communes atteint plusieurs dizaines de milliers d’habitants, ont renoncé à installer des établissements intercommunaux (Wollmann, 2012). A contrario, les coopérations intercommunales – comparables aux EPCI français, mais sans fiscalité propre - se sont fortement développées là où le morcellement communal perdure (certains Länder de l’Ouest, ex-RDA).
22 En matière de coopération intercommunale, la France fait figure de cas limite, l’intercommunalité s’étant progressivement muée en véritable « alternative douce aux fusions » (Eisenberg et Weltz, 1994, 54). Historiquement initiée sous la forme souple des formules syndicales, l’intercommunalité n’a cessé de se diffuser sur le plan territorial (jusqu’à ce que la loi RCT du 16 décembre 2010 oblige les communes isolées à se rattacher), sur le plan des compétences (transfert croissant de compétences obligatoires, optionnelles et facultatives), sur le plan fiscal (apparition d’une fiscalité propre en 1959 avec les districts), comme sur le plan des ressources humaines (mutualisation des services entre communes et EPCI). De manière tautologique, l’échec des fusions a nourri les progrès de l’intercommunalité, en même temps que ces derniers rendaient progressivement la perspective fusionnelle plus dispensable.
23 Alors que la grande taille des communes peut limiter le recours aux structures coopératives, elle peut au contraire favoriser une subdivision interne de l’échelon communal – enregistré au niveau LAU par l’UE – dotée d’un statut réduit (Grison, 2012). En 2007, plusieurs pays disposaient ainsi d’un échelon LAU 2, plus réduit que l’échelon LAU 1, s’approchant de la moyenne française établie à 1 733 habitants : 1 253 habitants en Irlande, 1 441 en Bulgarie, 1 646 en République Tchèque, 1 822 en Grèce, 1 871 en Slovaquie, 1 937 à Chypre, 2 499 au Portugal, 2 536 au Danemark (voir graphique 2 infra).
Graphique 2 – Population moyenne des unités administratives de base LAU 2 (2011)
Graphique 2 – Population moyenne des unités administratives de base LAU 2 (2011)
24 Prenons le cas limite de la Grande-Bretagne. En dessous des gigantesques autorités locales de plus de 150 000 habitants – niveau LAU 1 – prennent place des conseils de paroisse (Parish Councils) de quelques milliers d’habitants (6 635 en 2011). Leurs fonctions sont limitées essentiellement aux secteurs social, sportif, culturel, espaces verts et services à la communauté. Mais n’est-ce pas ce vers quoi semblent tendre des communes rurales françaises, préservées dans leurs frontières mais toujours plus recentrées sur des fonctions de proximité ? C’est en prêtant simultanément attention à ce que les autorités locales « concèdent » aux paroisses britanniques d’un côté, et à la paroissialisation rampante des communes rurales françaises de l’autre, qu’il devient possible de relativiser l’écart abyssal qui sépare les deux pays en matière communale.
D’une élection directe des assemblées aux élections distinctes des exécutifs municipaux
25 En Europe, si les assemblées municipales font partout l’objet d’une élection directe, la situation diffère d’un pays à l’autre pour ce qui concerne les chefs d’exécutifs locaux. Leur pouvoir sur l’institution elle-même connaît des variations. Le modèle du présidentialisme municipal dans lequel un élu détient l’essentiel des fonctions exécutives, caractéristique du cas français, ne se rencontre que dans une minorité d’États : Grèce, Espagne, certains Länder allemands. Dans une majorité de pays, l’exécutif local présentait une structure plus collégiale, avec un pouvoir de décision partagé avec des hauts fonctionnaires. Il faut néanmoins relever un phénomène de renforcement du pouvoir mayoral en Europe qui affecte désormais les systèmes de gouvernement municipal traditionnellement moins marqués par la domination de l’exécutif.
26 Concernant la désignation des chefs d’exécutif, quatre cas de figure sont observables. Dans de rares pays, le scrutin municipal lie l’élection du maire à celle de l’assemblée délibérante : le maire est directement élu sur le même bulletin de vote que le conseil municipal (Grèce, Italie). Parfois, l’organe exécutif de l’échelon communal est directement élu à l’occasion d’un scrutin parallèle à celui de l’assemblée délibérante (au Portugal dans les municipalités ou dans les paroisses de moins de 200 électeurs, en Allemagne, dans certains Länder autrichiens et en Angleterre). La France rejoint quant à elle la majorité des États dans lesquels l’organe exécutif de la commune voit ses membres se faire élire par l’assemblée délibérante elle-même (Belgique, Irlande, Pays-Bas, Suède, Danemark, Finlande, certains Länder autrichiens…). Enfin, la désignation remplace parfois l’élection, comme ce fut historiquement le cas en France jusqu’à la Troisième République. Aux Pays-Bas, le bourgmestre est ainsi nommé par le gouvernement pour un mandat de six ans renouvelable, sur la base d’une recommandation faite par le conseil municipal. Au Luxembourg, l’organe exécutif est désigné parmi les membres de l’assemblée délibérante, ou en dehors de celle-ci, par une autorité spéciale : le Grand-Duc si la commune correspond à une ville, ou le ministre de l’Intérieur pour les autres communes.
La vocation généraliste comme pilier du modèle communal européen
27 Si l’extrême variabilité de la taille communale (entre pays et au sein des pays) a une incidence directe sur la capacité à produire les politiques locales, une régularité forte du modèle communal en Europe réside dans le bénéfice d’une vocation généraliste, qui reçoit selon les pays différentes appellations : clause générale de compétence (France), « general competence » en Irlande (Callanan et Keogan, 2003), « allgemeine Zuständigkeitsvermutung » (Allemagne). Cette vocation est explicitement reconnue par la Charte européenne de l’autonomie locale, dont l’article 4, paragraphe 2 prévoit que « les collectivités locales ont, dans le cadre de la loi, toute latitude pour exercer leur initiative pour toute question qui n’est pas exclue de leur compétence ou attribuée à une autre autorité ». En France, la clause peut être définie comme l’« aptitude juridique reconnue, par la loi ou la Constitution, à une catégorie de collectivités territoriales pour connaître des affaires d’intérêt général ayant un rapport étroit avec leur territoire et leur population et pour prendre des décisions à leur égard, à l’exception de celles pour lesquelles un texte prévoit qu’elles relèvent de l’État, d’une autre collectivité territoriale ou d’un établissement public » (Lachaume, 1997, 107). Cette vocation fut initialement affirmée dans la loi de 1884 sur les communes afin de protéger le domaine de compétence du conseil municipal face aux pouvoirs du maire (Dantonel-Cor, 2011). La pleine reconnaissance de la clause est intervenue a posteriori et grâce au travail doctrinal d’interprétation généreuse du pouvoir des collectivités territoriales.
28 Objet d’une inégale codification juridique selon les pays, cette vocation généraliste représente une caractéristique de la tradition communale de l’Europe continentale à laquelle s’opposait historiquement la tradition communale anglaise, appelée ultra vires, selon laquelle les communes exerçaient les seules compétences qui leur étaient assignées. Mais les deux modèles se sont rapprochés au fil du temps (Wollmann, 2009) avec l’adoption du Local Government Act 2000 (et son équivalent dans la législation écossaise) [15], complété par Local Government Act 2003 [16].
Des institutions urbaines gigognes
29 Outre l’élection directe des assemblées et la vocation généraliste, il est possible de noter la régularité avec laquelle les ensembles urbains, parfois désignés par le vocable de « métropoles », font l’objet d’un traitement institutionnel séparé. Si la métropolisation n’a nullement besoin du droit pour exister, l’entrée de la métropole dans certaines sphères juridiques européennes revient à reconnaître et accompagner en droit cette nouvelle phase de développement urbain articulée à des dynamiques économiques contemporaines (Offner, 2011) liées à la globalisation (Lerique, 2013).
30 Dans un certain nombre de pays européens, les gouvernements urbains se substituent dans leur ressort territorial à d’autres institutions dont elles récupèrent les prérogatives. En Allemagne, trois villes (Berlin, Hambourg et Brême) cumulent les compétences des trois niveaux d’administration locale (Land, arrondissement et commune), quand 116 villes cumulent les compétences des communes et des arrondissements (kreisfreie Städte). En Autriche, 15 villes « à statut propre » (Statutarstadt) sont habilitées à assumer les compétences administratives du district, c’est-à-dire appliquer les règlements du Land et de l’État fédéral. La capitale Vienne est à la fois une ville dotée d’un statut propre et un Land. En Hongrie, certaines villes dites de droit comital cumulent, avec un corps de représentants distinct, les fonctions de la collectivité locale avec les compétences d’un comitat – subdivision intermédiaire souvent désignée en français par le terme de département - à l’échelle urbaine. En Pologne, les villes dites « autonomes » exercent simultanément les fonctions de commune et de district. La capitale Varsovie bénéficie pour sa part d’un statut législatif particulier reposant sur un groupement de communes obligatoire. En Italie, les villes métropolitaines créées par la loi Delrio du 7 avril 2014 se substituent sur leur territoire à la Province. La France s’est récemment rapprochée du cas italien, si on excepte le schéma urbain dérogatoire depuis longtemps observé pour la seule ville de Paris, à cette différence près qu’il ne s’agit pas de villes métropolitaines, mais d’institutions intercommunales métropolitaines. Depuis le vote de la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles (MAPTAM) s’observe un mouvement de substitution, total ou partiel, des métropoles aux conseils départementaux.
31 Dans le cas de la Métropole lyonnaise, il y a une substitution pleine au conseil départemental du Rhône, de sorte que le nombre de collectivités sur le territoire demeure inchangé. Ceci explique qu’elle se fasse reconnaître comme collectivité à statut particulier, là où toutes les autres intercommunalités françaises restent des établissements publics. La Métropole lyonnaise pouvait faire figure de prototype (au sens où elle expérimente) et de modèle (au sens où elle est exemplaire et pourrait être imitée). En 2018, l’Exécutif national a d’ailleurs bien tenté de convaincre certaines agglomérations (Bordeaux, Lille, Nantes, Nice, Toulouse) de travailler, dans un relatif secret (réunions de travail avec la DGCL), sur un projet d’extension du modèle lyonnais. La publicisation de l’entreprise a engendré une stratégie défensive et concertée de la part des cinq conseils départementaux concernés, qui a eu raison du projet. Il faut ici rappeler comment la « solution » lyonnaise inscrite dans la loi avait été précédée par un accord politique entre Gérard Collomb, maire de Lyon, et Michel Mercier, Président du conseil départemental. Ledit accord, qui façonnait le récit d’une success story, pouvait laisser espérer à Michel Mercier, qui ne se représentait pas, certains bénéfices électoraux (les cantons du Grand Lyon sont sortis du territoire institutionnel du conseil départemental) et économiques (transfert de charges supérieur aux ressources, et de l’endettement contracté pour le musée des Confluences), quand Gérard Collomb consolidait son image de grand réformateur et de grand féodal (Galimberti et al., 2014).
32 Pour les autres métropoles dites « ordinaires », la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (dite loi NOTRe) a dupliqué à l’étage supérieur le modèle des compétences optionnelles régissant les relations communes-intercommunalités, soit l’obligation de choisir un certain nombre de compétences dans un menu déroulant [17], en plus du transfèrement du domaine routier départemental déjà acté par la loi MAPTAM. Selon les bilans établis, une majorité d’accords se sont limités au minimum légal de trois compétences, souvent les moins lourdes, alors qu’aucun président de métropole n’a souhaité explorer l’option d’une prise en main de l’intégralité des compétences citées par la loi.
Les habits contrastés de la régionalisation en Europe
33 À la différence des institutions locales, ou de rang intermédiaire, la Région représente un espace politique directement – ou potentiellement – concurrent de l’État. Autrement dit, questionner le pouvoir régional revient simultanément à interroger une pièce du puzzle décentralisateur, ainsi que la nature même de l’État (fédéral, régionalisé, unitaire). La régionalisation est devenue une variable centrale de la comparaison invitant à repenser la typologie proposée par Michael Goldsmith et Edward Page (1987). Les différences ne passent plus tant entre les pays abritant des autorités locales fortement dotées en compétences (Europe du Nord) et ceux connaissant des collectivités locales peu dotées en responsabilités (Europe du Sud), qu’entre les pays connaissant une régionalisation marquée (dont l’Espagne et l’Italie) et ceux pour lesquels la décentralisation apparaît comparativement plus forte aux échelles infrarégionales. Par conséquent, il n’est pas possible d’inférer l’intensité décentralisatrice du degré de régionalisation stricto sensu.
34 Suivant une première approche légale-formelle, la régionalisation peut être envisagée sous le jour d’une institution formelle de gouvernement. Mais il ne s’agit évidemment là que d’une modalité particulière, si nous considérons qu’un espace politique s’institutionnalise, à l’image de l’Europe (Stone Sweet et al., 2001), à mesure que les relations politiques, économiques et sociales se multiplient et se densifient à son échelle, et que des acteurs orientent leur comportement en fonction de ces éléments. La régionalisation prend corps au travers de la construction d’une capacité d’action autonome ayant pour objet de promouvoir un territoire par la mobilisation de son tissu économique, et le cas échéant des ressorts identitaires de solidarités territorialisées (Marcou, 1999). Trois mécanismes d’institutionnalisation sont identifiables : l’ensemble des mobilisations (culturelles, sociales, économiques, politiques), qui font de la région un espace de mobilisation producteur de récits et de représentations territoriaux alternatifs à ceux de l’État-nation ; un espace fonctionnel investi par l’État et/ou par l’Union européenne qui entremêle diverses logiques de planification, de déconcentration et de décentralisation ; le déploiement d’un système de gouvernance régionale, au sens d’un espace investi par des logiques horizontales d’échanges entre acteurs aboutissant à créer des stratégies et à produire des politiques publiques (Pasquier, 2012).
L’Europe des Régions : une institutionnalisation en pointillé
35 Dès les années 1960, Denis de Rougemont développait une thèse sur l’Europe des Régions, l’articulant alors au projet de fédéralisme européen. L’expression a depuis fait florès. Une quarantaine d’années plus tard, Liesbet Hooghe et Gary Marks (2001) voyaient dans la montée en puissance du gouvernement régional, de plus en plus en situation de concurrence avec les États nationaux, le point ultime de l’intégration européenne. Quatre phénomènes empiriques liés à l’Europe seraient sources de confortement du pouvoir régional : la stratégie de la Commission européenne dans la construction d’un espace d’action politique pour les régions ; la mise en œuvre de la politique régionale ; l’institutionnalisation d’une représentation territoriale au niveau de l’UE ; et le développement de l’activité transnationale des régions (Pasquier, 2012).
36 Le projet d’insérer les collectivités territoriales dans la structure institutionnelle de l’Europe communautaire, mis à l’agenda dès les années 1960 [18], prit corps avec la création en 1975 du Fonds européen de développement régional (FEDER) [19] et l’introduction d’un comité de politique régionale auprès du Conseil et de la Commission chargé d’examiner les questions relatives au développement régional, à la coordination des politiques régionales des États membres [20]. Durant les années 1980, la Commission a cherché à s’affranchir autant que possible du contrôle de l’État sur les fonds, recherchant l’appui des collectivités régionales et locales (Smith, 1996). Avec l’introduction du volet « cohésion économique et sociale » par l’Acte unique européen de 1986, les politiques structurelles concernent de plus en plus directement les collectivités territoriales. L’association des collectivités infra-étatiques à l’élaboration et à la mise en œuvre de la politique régionale prend corps avec la création en 1988 du Conseil consultatif des collectivités régionales et locales auprès de la Commission, dont l’avis est recueilli sur les questions de développement régional. Le projet communautaire de création d’un organe représentatif des régions au sein de la Communauté se concrétise, le 7 février 1992, avec la création du Comité des régions par le Traité sur l’Union européenne (dit Traité de Maastricht). Cet organe consultatif, dont les fonctions seront renforcées [21], regroupe, malgré son intitulé, aussi bien des élus régionaux que des représentants de collectivités ou d’organisations territoriales propres à chaque pays. À côté des institutions impulsées par la Commission elle-même, prend aussi place une kyrielle d’associations régionales constituées comme autant de groupes de pression dont la Commission représente la principale cible (en particulier la DG 16). À l’image des associations communalistes françaises, se déploie une représentation plus catégorielle et corporatiste au sein du bloc régional, obéissant à des critères géographiques (association des régions périphériques, association des Régions des Alpes centrales, association des Régions de l’Arc atlantique), ou économiques (association des régions de vieille tradition industrielle, association des régions viticoles).
37 Si la régionalisation peut répondre le cas échéant et de manière fonctionnelle à la territorialisation de certaines politiques communautaires [22], on ne saurait surestimer l’influence communautaire. Les régionalisations les plus fortes sont d’abord redevables des évolutions politiques complexes et particulières aux pays concernés (Morel, 2006), quand les régionalisations les plus directement informées par l’intégration européenne connaissent le degré d’institutionnalisation politique le plus faible. La généralité de la tendance à la régionalisation contraste avec la diversité de ses manifestations institutionnelles (Marcou, 1999).
Une fédéralisation synonyme de régionalisation
38 Dans une minorité d’États européens, la régionalisation a pris les traits d’une fédéralisation étroitement liée à des facteurs historiques et politiques. Si la fédéralisation de l’État allemand à l’Ouest - loi fondamentale de 1949 – rétablissait la structure fédérale des Länder enracinée dans l’histoire du pays (tradition fédéraliste ancienne), cette « restauration » était intimement liée au contexte de la défaite et de l’occupation américaine qui l’a suivie. Il s’agissait alors de promouvoir un mode d’organisation centrifuge du pouvoir, répondant à l’expérience extrême d’unification des instruments de domination par le régime nazi. La fédéralisation/régionalisation fait ainsi écho aux craintes de dérives autoritaires d’un pouvoir central, aménageant un partage des éléments de souveraineté. Ceci aboutit alors à créer des Länder qui, au-delà des contrastes territoriaux et démographiques [23], sont puissamment dotés sur le plan institutionnel. Chacun dispose de sa propre Constitution (Verfassung), de son Parlement (Landtag) doté d’un pouvoir législatif, de son gouvernement (Landesregierung), ainsi que de son organisation judiciaire.
39 En Autriche, le fédéralisme introduit par la Loi constitutionnelle fédérale en 1920 fait suite au démembrement de l’Empire austro-hongrois et à l’émancipation de nations en nouveaux États. Dans ce pays de surface limitée, le fédéralisme répond alors au caractère multiculturel de l’ancien Empire austro-hongrois, et ressort comme un compromis institutionnel entre les partisans d’un État centralisé (socio-démocrates) et ceux favorables à l’autonomie des États (conservateurs). Au sortir de la Seconde Guerre mondiale – avec des zones d’occupation comme en Allemagne -, la Constitution de 1945 (Verfassungs-Überleitungsgesetz) rétablit l’ancien régime républicain, démocratique et fédéral autrichien. Les neuf Länder exercent un pouvoir législatif à partir des Diètes. Chaque Land autrichien possède un Parlement élu (le Landtag), un gouvernement (Landesregierung) et un gouverneur élu par le Landtag (Landeshauptmann ou Landeshauptfrau selon le sexe). Ces Länder possèdent néanmoins des compétences moins étendues que dans la plupart des systèmes fédéraux (l’éducation et la santé ressortissent au niveau fédéral), et ne disposent d’aucune compétence judiciaire.
40 En Belgique, dont la création du royaume en 1830 ne renfermait nulle logique fédérale, les tendances communautaristes centrifuges (fondées sur des considérations culturelles et économiques) ont eu raison de l’unité du pays. Alors que l’adoption en 1963 des lois linguistiques posaient les premiers jalons d’un fédéralisme de nature linguistique, une succession de lois entreprises à partir des années 1970 jusqu’à 1993 vont aménager la transition vers un État fédéral. Les nouveaux articles de la Constitution du 17 février 1994 sanctionnent un double fédéralisme, à la fois linguistique – avec des Communautés compétentes principalement dans les champs de l’éducation et de la culture, de la santé, de l’aide aux personnes et de l’emploi des langues - et régional – avec des Régions compétentes dans les domaines de l’économie, de l’emploi, de l’aménagement du territoire, de l’agriculture, des travaux publics, du logement, du tourisme, de l’énergie, de l’environnement, des voies navigables, des eaux et forêts, de la tutelle sur les pouvoirs subordonnés, de la politique familiale, des handicapés, du troisième âge… Alors que la fédéralisation a pu représenter le mode de réalisation du projet politique national (Allemagne, Suisse, États-Unis), elle est ici synonyme de désintégration de l’État unitaire.
Une autonomie régionale dans un cadre unitaire
41 Les antagonismes nationaux et culturels jouent également, de manière plus limitée, avec les régimes régionaux ou autonomistes en Italie ou en Espagne. En Italie, après la période mussolinienne, la nouvelle Constitution entrée en vigueur le 1er janvier 1948, avait institué une touche de fédéralisme au profit de quatre régions périphériques dites « autonomes » (pouvoirs législatifs et autonomie budgétaire). Ce qui devait simultanément prévenir le risque de séparatisme insulaire (Sardaigne et Sicile) et protéger des spécificités linguistiques (Trentin-Haut-Adige, Vallée d’Aoste). Un particularisme linguistique fut à l’origine de la création en 1963 d’une cinquième région autonome, Frioul-Vénétie Julienne. Mais c’est une réforme de 1972 qui créa les 15 régions dites ordinaires, dont les fonctions administratives furent renforcées par la loi "Nouvelle réglementation des autonomies locales" du 8 juin 1990. Elles disposent désormais de la faculté d’établir et de déterminer des fonctions dévolues aux provinces et aux communes. Ce processus de régionalisation s’affirme en 1999 avec l’élection d’un Conseil régional exerçant des pouvoirs législatifs régionaux, et d’un organe exécutif appelé Giunta Regionale dirigé par un président élu au suffrage universel direct (sauf si les statuts particuliers en décident autrement). Entre-temps, les lois dites Bassanini (1997/1999) avaient reconnu le principe de subsidiarité et mis en place un "fédéralisme administratif". Ces lois définissent un « noyau dur » de compétences de l’État, les autres étant transférées aux régions, à leur tour conduites à en transférer une partie aux provinces et aux communes. La réforme constitutionnelle de 2001 a introduit la législation concurrente en certaines matières - l’État fixe des principes de caractère général et les régions règlent les détails – que le gouvernement Matteo Renzi a tenté de faire disparaître – renationalisation complète de certains domaines – sans succès (échec référendaire du 4 décembre 2016). La principale limite au pouvoir des Régions italiennes tient à leur grande dépendance financière vis-à-vis de recettes largement arrêtées par l’État central.
42 L’Espagne se singularise par un système d’autonomie régionale différenciée, et sans fédéralisme. Son principe fut acté par la ratification de la Constitution le 6 décembre 1978, qui « reconnaît et garantit le droit à l’autonomie des nationalités et des régions qui la composent et la solidarité entre elles » (art. 2). Ce droit à l’autonomie aboutit à ce que « les provinces limitrophes présentant des caractéristiques historiques, culturelles et économiques communes, les territoires insulaires et les provinces constituant une entité régionale historique pourront accéder à l’autogouvernement et se constituer en communautés autonomes conformément aux dispositions du présent titre et de leurs statuts respectifs » (art. 143). Initialement, l’autonomie devait être accordée, selon un processus rapide et simplifié, aux seules « nationalités historiques » (Catalogne, Pays basque, Galice) qui s’étaient vu accorder le statut d’autonomie pendant la Seconde République espagnole (1931-1936). Mais l’Andalousie revendiqua également le droit à l’autonomie, droit finalement étendu aux autres régions qui le souhaitaient dès lors qu’elles satisfont l’un des trois critères énoncés dans la Constitution : plusieurs provinces adjacentes ayant des caractéristiques historiques, culturelles et économiques communes ; être des territoires insulaires ; avoir une identité régionale historique. Entre 1979 et 1983, toutes les régions espagnoles choisirent de devenir des Communautés autonomes, leurs territoires correspondant sensiblement à ceux des anciens royaumes et régions de la péninsule ibérique. Toutes dotées d’un Parlement, autonomes dans les aspects législatifs et exécutifs, ces Communautés se séparent sur les questions d’autonomie fiscale (réservée au Pays Basque et à la Navarre), et de fonction policière (autonome au Pays Basque et en Catalogne). La forte dévolution du pouvoir s’arrête au seuil de l’organisation judiciaire, nationale et unique, contrairement aux États fédéraux.
43 Alors que l’Italie, l’Espagne ou le Portugal (voir plus loin), ont pu connaître des systèmes d’autonomie régionale différenciée, le Royaume-Uni occupe une position très singulière de régionalisation asymétrique (Cole, 2015). La question régionale britannique y apparaît à la fois singulière et complexe pour une raison assez simple : l’Angleterre, de loin la nation britannique la plus peuplée, ne possède en son sein aucune subdivision régionale sur le plan institutionnel, alors que l’Écosse ou le Pays de Galles se vivent comme des nations (et non des régions). En 1997, une politique dite de « devolution » a concédé une autonomie forte et inédite aux trois « régions » périphériques (Écosse, Pays de Galles, Irlande du Nord), en réponse aux demandes d’autonomie ou d’indépendance. La réforme consiste alors à transférer à des institutions nouvellement élues, disposant de moyens politiques, administratifs et financiers, un pouvoir décisionnel en matière économique, sociale, de politique culturelle. Ce processus de devolution était également censé s’étendre à l’Angleterre - divisée en 9 régions en 1994 - sous une forme différente. La greffe en faveur d’institutions régionales n’y ayant finalement pas pris [24] – malgré quelques timides tentatives de régionalisation du côté de l’État - le Royaume-Uni abrite de fait une régionalisation asymétrique dotant les nations régionalisées de prérogatives étendues et comparables aux pays précédemment exposés.
44 Qu’il s’agisse des États fédéraux ou des États régionaux, les dynamiques de régionalisation, inscrites dans des histoires nationales singulières, semblent avant tout relever de l’« independant problem solving » (Holzinger et Knill, 2005). Reposant la question du cadre national, elles répondent tantôt au souci d’ériger un modèle centrifuge de pouvoir, tantôt à la volonté de reconnaître sur le plan institutionnel la diversité nationale et d’apaiser les conflits internes. Ces dynamiques de régionalisation ne trouvent pas leurs origines dans le projet européen, quand bien même elles semblent satisfaire le leitmotiv d’une Europe des Régions. Mais à l’idée première d’une affirmation du gouvernement régional entretenue par une Commission européenne en situation concurrentielle vis-à-vis des États, répond ici, le cas échéant, une perte de souveraineté régionale inhérente à l’intégration européenne elle-même. En effet, tout un ensemble de secteurs d’activité, sur lesquels les régions dotées de pouvoirs législatifs interviennent, ont été transférés vers Bruxelles (Weatherill, 2005), de sorte que les régions se voient elles-mêmes très encadrées par l’UE, dont les centres de décision se révèlent difficilement accessibles (Jeffery, 2005).
La région cantonnée au rôle d’espace essentiellement fonctionnel
45 À l’opposé des États fédéraux ou régionalisés, un nombre significatif de pays disposent d’un échelon régional sous la forme très atténuée d’un espace fonctionnel de programmation et de coordination, sans qu’y correspondent des assemblées élues dotées d’un pouvoir délibératif.
46 Cette régionalisation fonctionnelle peut parfois correspondre à l’échec d’une réforme nationale, à l’image du Portugal. Seules les Açores et Madère, qui ont acquis un statut spécial de régions insulaires autonomes, y disposent d’un exécutif propre et d’une assemblée législative régionale. Pour la partie continentale, les tentatives de « régionalisation administrative » ont été envisagées sans succès. Une révision constitutionnelle de 1997 rendait possible la création effective de régions. Une loi du 28 avril 1998 créait huit régions sur le papier [25]. Enfin, le référendum du 8 novembre 1998 invitait les électeurs à se prononcer sur l’opportunité de créer des régions administratives en général, et sur la création effective de la région administrative de leur zone de recensement électoral. Non seulement la faible participation (48,12 %) devait invalider le résultat, mais une nette majorité (63,52 %) se dégageait contre la régionalisation au niveau national. Aucune tentative sérieuse de relance ne fut imaginée par la suite, la crise économique et financière ayant éclipsé la question institutionnelle. Les régions administratives n’existent que dans le texte constitutionnel, alors que seules les commissions régionales de coordination et de développement régional existent dans les faits. Ces services périphériques de l’État, dotés d’autonomie administrative et financière, assurent la coordination et l’articulation des diverses politiques sectorielles de niveau régional, mettent en œuvre les politiques environnementales, d’aménagement du territoire et des villes, et apportent un soutien technique aux collectivités locales et à leurs syndicats (Alvés Correia, 2015).
47 Échelon de déploiement de l’État, la région peut aussi être conçue comme un prolongement des collectivités existantes, et/ou comme un cadre de coopération entre ces dernières. Aux Pays-Bas, le mot région est utilisé pour désigner des circonscriptions administratives infra-provinciales, ou pour caractériser un cadre de coopération intercommunale en milieu urbain, ou un espace de coopération plus large pouvant associer différents niveaux d’administration. En Suède, pays ne connaissant qu’un seul niveau de collectivité territoriale, il existe 8 régions (NUTS 2), à côté des 21 divisions administratives territoriales (NUTS 1), qui sont des organismes regroupant les communes dans le cadre du comté afin de conduire les politiques de développement régional.
48 Dans un certain nombre de pays, l’adhésion à l’UE et/ ou l’exécution des politiques communautaires de développement régional ont suscité, dans une logique d’imposition, la création de nouveaux périmètres territoriaux, plus vastes que les territoires institutionnels existants, obéissant à des fins de développement régional et statistique. Tout pays candidat à l’entrée dans l’UE doit ainsi se doter de régions, selon l’Acquis communautaire, l’Union laissant à chaque État candidat le soin d’en délimiter les frontières en conformité avec les seuils statistiques à la délimitation des NUTS (Nomenclature d’Unités Territoriales Statistiques, 3 niveaux selon la taille démographique). Sans adhésion à l’UE, le nouvel échelon régional, aucunement doté d’un organe politique élu directement, n’existerait probablement pas.
49 Les pays d’Europe centrale et orientale furent les plus fortement concernés par ces dynamiques descendantes de régionalisation fonctionnelle ou administrative (Pasquier et Perron, 2008). En Hongrie, l’intégration programmée à l’UE a conduit l’État à définir en 1999, cinq ans avant son entrée officielle, sept régions regroupant un ou plusieurs départements. Il s’agit là de simples échelles d’action et de coordination des pouvoirs publics en matière d’aménagement du territoire et de développement économique. En Bulgarie, la création de six régions de planification à la même période visait également à se conformer aux méthodes de l’UE et à bénéficier de la politique régionale. La Roumanie inaugurait une démarche semblable en définissant huit régions de développement, dépourvues de toute assemblée délibérative et d’organe exécutif, dans le but de coordonner la politique de développement régional conforme à l’intégration à l’UE, et d’établir des statistiques régionales. En Lettonie, la gestion des fonds structurels, à laquelle s’ajoutent quelques autres fonctions, a commandé la création de régions de planification administrées par des représentants des collectivités locales, sans qu’elles s’apparentent ni à des unités administratives, ni à des collectivités territoriales. En Irlande, les huit collectivités régionales créées en 1994 sont des instances en charge de l’aménagement et du développement en lien avec les programmes régionaux : coordination des services publics à l’échelle régionale ; élaboration de directives pour l’aménagement du territoire ; communication sur les programmes et les projets du gouvernement central ; gestion des programmes régionaux ; évaluation des programmes des autres Communautés à l’échelle régionale, notamment ceux concernant les Fonds structurels ; planification régionale ; supervision, contrôle de la mise en œuvre des Fonds structurels de l’UE. Parfois, la dynamique communautaire engendre la recréation d’un échelon régional temporairement effacé par des décennies de régime communiste : les 13 régions administratives tchèques (auxquelles s’ajoute la ville-capitale) devenues, depuis le 12 novembre 2001, des collectivités territoriales, avec une assemblée et un exécutif élus.
La régionalisation institutionnelle : une collectivité comme les autres
50 Après avoir été longtemps un absent de marque au regard d’autres pays européens, la régionalisation française ressort désormais comme l’exemple d’une régionalisation du milieu, intercalée entre une régionalisation de type fédéral ou autonomique, et une régionalisation purement fonctionnelle (ce qu’elle fut dans les années 1950 et 1960). Avec la loi du 2 mars 1982 (même s’il faudra attendre les premières élections de 1986 pour que les conseils s’établissent), la région est devenue pleinement politique. Collectivité territoriale de plein droit, elle se confond avec la présence d’assemblées élues, dotées d’un pouvoir délibératif, exerçant des compétences d’attribution et jouissant, jusqu’à la loi NOTRe d’août 2015, d’une vocation généraliste, bénéficiant de concours de l’État mais aussi de ressources propres. Si les budgets régionaux ont significativement augmenté, leur point de départ était particulièrement bas - en raison de l’absence de compétences gestionnaires lourdes – et leur point d’arrivée demeure comparativement très en-deçà d’autres pays. En 2013, l’ensemble des budgets régionaux s’élevait à 28 milliards d’euros (12,3 % du budget total des collectivités locales, contre 31 % pour les départements et 56,7 % pour les communes et les intercommunalités), quand le seul budget de la Lombardie ou de la Catalogne avoisinait les 23 milliards. La maigre consolation vient du fait qu’une part conséquente des budgets régionaux est consacrée à des dépenses d’investissement pour lesquelles existe une autonomie décisionnelle relativement forte.
51 Alors que la promesse primo-ministérielle de régionalisation ne fut pas au rendez-vous de l’Acte II de la décentralisation [26], la réforme territoriale inaugurée sous la mandature Sarkozy et prolongée sous la mandature Hollande offre un bilan en pointillé. Elle n’a en réalité fait que très peu de concessions de nature décentralisatrice de la part de l’État, à l’exception notable des fonds européens [27]. Les Régions sont ainsi devenues les autorités de gestion en lieu et place de l’État à la grande satisfaction de l’Association des Régions de France. Parallèlement, elles héritent de compétences départementales (ports, transports inter-urbains) en nombre plus réduit qu’envisagé initialement par le gouvernement Valls (collèges, voirie). Modestement renforcées dans leurs compétences matérielles, les régions ne disposent toujours pas des instruments juridiques et financiers de la « responsabilité » politique. Privés de tout pouvoir législatif en Métropole, les conseils régionaux se contentent d’un pouvoir réglementaire subordonné et de bout de chaîne. Si l’article que leur consacre spécifiquement la loi NOTRe leur reconnaît symboliquement une place à part, il ne change rien sur le fond : les Régions ont le loisir, comme les communes et départements, de formuler des propositions et des contre-projets, ou d’initier des amendements. Du côté des finances, l’amélioration apparente de l’autonomie financière régionale – soit le poids des ressources propres dans l’ensemble des ressources - dissimule mal la renationalisation rampante des ressources régionales. Les Régions furent les grandes perdantes de la loi de finances pour 2010, réservant au bloc communal le pouvoir de moduler le taux et l’assiette des impôts locaux. Dépossédées en 2001 de la taxe d’habitation, elles perdent le pouvoir de voter le taux de la taxe foncière sur les propriétés bâties. Il ne leur reste plus en définitive qu’une capacité réduite de modulation des taxes sur les cartes grises et sur les produits pétroliers.
52 Le changement le plus significatif doit sans doute être recherché du côté des rapports que les Régions entretiennent avec les institutions locales (davantage qu’avec l’État). Dans certains pays – fédérés ou autonomes - les régions jouent vis-à-vis des collectivités décentralisées, et sous réserve de garanties constitutionnelles, le rôle que l’État central exerce vis-à-vis de ces mêmes collectivités dans les États unitaires (fixer le statut de la collectivité décentralisée et encadrer l’action des collectivités de rang inférieur). En revanche, la France communie de manière fétichiste autour du principe de non-hiérarchie des collectivités entre elles, au nom d’une égalité et d’une autonomie réciproque des collectivités territoriales, ce qu’exprime l’interdiction constitutionnelle d’une tutelle exercée par une collectivité sur une autre. Autrement dit, l’ensemble des collectivités françaises sont traitées de manière égale, là où d’autres États ont clairement opté pour une hiérarchie. La crainte d’une tutelle des collectivités voisines et/ou de niveau supérieur a prolongé la crainte d’une tutelle de l’État sur les collectivités (Le Chatelier, 2014). Or la loi NOTRe a rénové la schématologie régionale, en dotant le nouveau schéma régional de développement économique d’innovation et d’internationalisation (SRDEII) d’une opposabilité inédite. Il fut d’abord envisagé par le gouvernement d’obliger les collectivités infrarégionales et leurs établissements à agir en conformité avec le schéma régional. Mais devant le risque d’inconstitutionnalité (violation du principe d’interdiction de tutelle), c’est finalement une version prescriptive minimale qui a été retenue avec la notion de « compatibilité » : les choix opérés par les collectivités et établissements infra-régionaux doivent être compatibles avec les schémas régionaux, quand les Métropoles, plus étroitement associées à l’élaboration du schéma, peuvent aussi s’en abstraire en cas de désaccord. Il leur est seulement imposé, de manière souple, de « prendre en compte ». Cette logique dérogatoire de franchise métropolitaine contribue à nourrir les concurrences croissantes qui s’observent entre institutions régionales et métropolitaines, tout en renforçant la singularité métropolitaine.
Conclusion
53 La comparaison des systèmes territoriaux en Europe ne permet pas de conclure de manière univoque par rapport à l’alternative « convergences versus spécificités nationales ». Du point de vue des trajectoires comme des résultats, il est manifeste que les pouvoirs infra-nationaux continuent d’être marqués par d’importantes différences : nombre d’échelons, taille des échelons, compétences matérielles, autonomie tant juridique que financière… Mais il est tout aussi manifeste qu’un raisonnement sur les seules tendances dévoile des directions communes, à défaut d’aboutir à des résultats semblables. La régionalisation, indépendamment de sa nature et de son intensité, apparaît comme un mouvement partagé, que l’intégration européenne a contribué à nourrir. Lorsque la politique régionale de l’UE ne crée pas directement un niveau régional purement fonctionnel (mais sans décentralisation), elle accroît indiscutablement la régionalisation des enjeux d’action publique dans des secteurs aussi variés que le développement économique, la recherche, l’environnement, le développement local ou le tourisme (une gouvernance régionale).
54 À un niveau plus local, les échelles fonctionnelles paraissent imposer leurs logiques subsidiaires, quelles que soient les architectures institutionnelles promues, à travers un double étagement. Elles sanctionnent un départage, de plus en plus apparent, entre l’exercice des fonctions de proximité, qu’il soit le fait de communes morcelées ou de niveaux infra-communaux, et des fonctions plus stratégiques, techniques et coûteuses prises en charge par des communes suffisamment grandes, ou des intercommunalités de plus en plus puissantes.
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Notes
-
[1]
Bulgarie, Chypre, Estonie, Irlande, Lettonie, Lituanie, Luxembourg, Malte, Slovénie, Finlande. Jusqu’en 2010, la Finlande abritait une seule région (Uusimaa de l’Est).
-
[2]
Hongrie et Roumanie.
-
[3]
Autriche, Croatie, Danemark, Grèce, Pays-Bas, République Tchèque, Slovaquie, Suède.
-
[4]
Les trois niveaux peuvent correspondre à trois échelles territoriales clairement hiérarchisées en termes de taille (Allemagne, Espagne, France, Italie, Pologne), quand les Communautés et les Régions belges se distinguent essentiellement en termes de champs de compétences. Quant au Royaume-Uni, l’échelon intermédiaire des comtés n’a plus véritablement d’existence en termes de compétences, et le niveau le plus général correspond à des nations (Écosse, Irlande du Nord, Pays de Galles) dotées de Parlements.
-
[5]
Cette Charte, signée à Strasbourg le 15 octobre 1985 dans le cadre du Conseil de l’Europe, fait de l’autonomie locale un principe garantissant l’indépendance politique, administrative et financière des collectivités locales, dotées d’une capacité effective à régler une partie significative des affaires publiques au profit de leur population.
-
[6]
De manière tangible, les Provinces italiennes ont été affaiblies à la fois sur le plan des compétences (transferts aux collectivités locales ou régionales) et sur le plan électoral (le conseil provincial ne dispose plus que de dix à seize membres, désormais élus par les organes élus des communes situées dans la province concernée). En France, les Départements ont certes survécu au discours de politique générale de M. Valls, annonçant leur suppression à échéance de 2020, mais ressortent fragilisés par la loi NOTRe du 7 août 2015 (perte de la clause générale de compétences, interdiction nouvelle de conduire une action économique, transferts de compétences aux conseils régionaux (transports interurbains, ports) et aux métropoles).
-
[7]
La fragilité dudit échelon intermédiaire, suscitant l’inquiétude du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe (Verrengia, 2012), présida à la création en 2008 de la Confédération européenne des pouvoirs locaux intermédiaires (CEPLI). Organisation à but non lucratif de droit belge, elle réunit neuf associations nationales et deux réseaux européens de pouvoirs locaux (Arco Latino, Partenalia).
-
[8]
Source : site internet Vie publique.
-
[9]
Sans compter que les communes ultramarines apparaissent comparativement extrêmement étendues, aussi bien dans des contextes de faible densité (communes guyanaises) que de forte densité (La Réunion).
-
[10]
Il existe historiquement des zones d’habitat groupé en villages de tailles modestes (nord-est de la France, Rhénanie-Palatinat), des fermes isolées organisées autour de petites paroisses rurales (Normandie, Gascogne, vallées alpines - des Préalpes françaises au Tyrol autrichien), des régions d’habitat dispersé en hameaux et fermes isolées, au sein desquels la fréquence de bourgs-centres est plus rare (Bretagne, Massif central) ou au contraire des régions de tradition urbaine forte, avec un habitat est très centralisé autour de bourgs ou petites villes (Andalousie, Murcie, basse Provence, grande partie de l’Italie, Pays-Bas…) (Grison, 2016).
-
[11]
Les communes nouvelles de moins de 10 000 habitants bénéficient d’un pacte de stabilité de la DGF, quand l’avantage est également octroyé aux communes nouvelles de plus de 10 000 habitants à la condition qu’elles correspondent à une transformation intégrale de l’EPCI en commune nouvelle. Pour la strate de 1 000 à 10 000 habitants s’ajoute la garantie de percevoir la DGF additionnée de chaque commune rejoignant la commune nouvelle, ainsi qu’une bonification de la DGF de 5 %.
-
[12]
Recommandation est faite par le Centre d’étude pour la réforme de l’État de fusionner de manière obligatoire les communes de moins de 500 habitants, de manière facultative les communes comptant entre 500 et 1 000 habitants.
-
[13]
Source : OCDE.
-
[14]
Ce baromètre est publié par le CNFPT et l’Association Internationale des Écoles et Instituts d’Administration (AIEIA) avec l’appui du Conseil des Communes et Régions d’Europe (CCRE) et du Conseil de l’Europe.
-
[15]
La réforme reconnaît désormais aux autorités locales un pouvoir général pour développer le bien-être économique, social et environnemental de leur territoire.
-
[16]
La réforme permet désormais aux autorités locales d’emprunter librement pour leurs dépenses en capital pour toute fonction qu’elles tiennent de la loi, sous réserve du respect de règles prudentielles.
-
[17]
Aides du fonds de solidarité pour le logement, action sociale, programme départemental d’insertion, aide aux jeunes en difficulté, prévention spécialisée auprès des familles en difficulté, personnes âgées, tourisme (groupe de compétences incluant tourisme, culture et sport), et gestion des collèges.
-
[18]
Rapport parlementaire de 1960 sur les problèmes de la politique régionale plaidant pour la mise sur pied d’un « comité consultatif des économies régionales », principalement chargé d’une fonction d’étude et d’analyse.
-
[19]
7,8 % du budget communautaire en 1980, 17,6 % en 1986, 27,6 % en 1992, 36 % en 1999.
-
[20]
Décision du Conseil, du 18 mars 1975, portant création d’un comité de politique régionale - 75/185/CEE.
-
[21]
L’extension de la fonction consultative est repérable dans le traité d’Amsterdam (1997 ainsi que dans le traité de Lisbonne (signé le 13 décembre 2007).
-
[22]
La résolution du Parlement européen du 18 novembre 1998 invitait les États à régionaliser leurs structures internes et leur adressait une “Charte communautaire de la régionalisation” qui voulait en fixer les principes.
-
[23]
La ville-État de Brême pèse environ 600 000 habitants, quand le Land de Rhénanie du Nord-Westphalie atteint près de 18 millions d’habitants. La fusion des petits Länder, évoquée de manière récurrente et décidée au niveau fédéré, n’a toujours pas abouti (échec référendaire de la proposition des gouvernements de Berlin et du Brandebourg en 1995 de fusionner les deux Länder).
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[24]
Le projet a été enterré suite à l’alternance politique de 2011 et du retour des conservateurs (Tories) au gouvernement.
-
[25]
Entre Douro e Minho ; Trás‑os‑Montes e Alto Douro ; Beira Litoral ; Beira Interior ; Estremadura e Ribatejo ; Lisbonne et Setúbal ; Alentejo et Algarve.
-
[26]
L’anticipation d’une victoire de la gauche aux élections régionales de 2004 aurait entamé la détermination de l’Exécutif national, et de sa majorité parlementaire, de renforcer cet échelon institutionnel.
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[27]
Décision inscrite dans la loi MAPTAM du 27 janvier 2014, et précisée par un décret du 3 juin 2014.