Notes
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Par exemple, une question fondamentale relative aux neurones miroirs, et encore ouverte à de futures investigations empiriques concerne la distinction entre le Soi et Autrui : si les neurones miroirs, en effet, permettent l’identification à autrui, quelles sont les bases neuropsychologiques d’une telle distinction ?
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Barbara L. Frederickson, « The Value of Positive Emotions » in American Scientist 91 (juillet-août 2003), p. 332.
I – Les émotions, pièce maîtresse de la motivation à agir
1Longtemps méprisées, parfois diabolisées, souvent incomprises, les émotions ont fait l’objet au sein de la tradition philosophique de vives discussions relatives à leur portée et à leur légitimité. Ainsi, selon certains auteurs, les émotions constituent un obstacle majeur au plein accomplissement de l’action : l’émotion, censée fausser la rectitude du jugement, susciter nombre de troubles comportementaux, brouiller le mécanisme décisionnel, constituerait en effet selon une telle optique une entrave aux processus délibératifs menant à l’action. L’action, comprise ici comme réalisation d’un projet établi par une volonté libre, à l’issue d’une médiation réflexive, s’avère avant tout dépendante selon cette perspective de facteurs cognitifs et rationnels. C’est ainsi que dans la tradition stoïcienne, la maîtrise, voire la suppression des émotions constitue un moyen fondamental pour atteindre l’ataraxie, état dans lequel la tranquillité de l’âme permet à l’action libre, consciente des limites du corps, de se déployer. Les émotions, en ce sens, doivent être restreintes, voire annihilées, afin de favoriser l’action. De même, comme le rappelle Descartes dans Le Discours de la Méthode, tout choix authentique ne peut s’effectuer qu’au moyen d’un entendement éclairé, capable de juger ce qui est vrai ou faux, et capable de faire passer au second plan les réactions affectives. C’est l’entendement, prenant appui sur les idées claires et distinctes, qui doit avant tout selon Descartes déterminer la volonté. Cette approche intellectualiste de l’action, par ailleurs, repose en grande partie sur une conception dualiste des phénomènes mentaux en vertu de laquelle l’action proprement dite (émanant d’un sujet libre et responsable) est avant tout déterminée par l’esprit, les réactions émotionnelles, impulsives et irréfléchies, étant quant à elles inféodées au tumulte désordonné des activités corporelles.
2D’autres auteurs, néanmoins, ont également mis l’accent sur le rôle majeur que peuvent revêtir les émotions quant au développement de l’action. Comme l’explique par exemple Aristote dans l’Ethique à Nicomaque, le déploiement de l’action vertueuse ne procède pas tant de la suppression des émotions que de la capacité pour le sujet agissant d’éprouver des émotions correctes et modérées. Ainsi, souligne Aristote, une émotion comme la colère, correctement utilisée, peut s’avérer utile à l’action morale, par exemple lorsqu’elle est suscitée par l’injustice. De même, Spinoza insiste t’il dans l’Ethique sur le fait que les passions tristes, comme la Haine, ne pouvaient être vaincues que par d’autres passions joyeuses plus fortes et non par la seule activité d’une raison privée de toute vie affective.
3De quelle manière les investigations empiriques s’appliquant à l’action, tout particulièrement dans le domaine psychologique, pourraient-elles éclairer le problème du rapport entre action et émotion ? C’est à cette question que nous souhaiterions ici répondre, au moyen tout particulièrement de recherches récentes concernant les causes et les modalités de l’action. Ces recherches, selon nous, tendent à atténuer considérablement l’importance accordée aux processus déductifs et cognitifs s’agissant du déclenchement et de la régulation de l’action. A contrario, les travaux auxquels nous ferons référence semblent tout au contraire suggérer que ce sont les émotions qui jouent un rôle prégnant au regard de l’action, que cette dernière s’effectue à l’échelle individuelle ou intersubjective.
4La raison à cela est que les conceptions philosophiques qui entreprennent de disjoindre émotion et action passent sous silence une composante fondamentale de notre vie pratique : la motivation. Pour agir, en effet, il ne suffit pas d’échafauder mentalement un projet, d’avoir une idée ou une représentation de ses actes. Encore faut-il être motivé à agir. Et la motivation, loin d’être le seul fruit de nos facultés rationnelles, s’avère bien au contraire intimement liée à l’émotion. Le langage courant, du reste, constitue un témoignage éloquent de cette étroite connexion entre action et émotion : n’affirmons-nous pas, par exemple, que nous « sentons » avoir pris la bonne décision, sans être nécessairement capable de rendre compte de cette intuition ?
5Au-delà de la traditionnelle dichotomie entre l’action libératrice et l’asservissement passionnel, il importe donc grandement de réhabiliter la fonction pratique des émotions, afin de saisir pleinement les modalités authentiques de l’action. Telle est la finalité des analyses empiriques que nous nous proposons de développer ici.
II – Quelles émotions pour quelles actions ?
6Afin de comprendre pleinement le rapport entre émotions et action, il convient au préalable de s’interroger sur la nature même de l’objet que nous étudions : en effet, qu’est-ce qu’une émotion ? Nombreuses sont les acceptions de ce terme, et le consensus définitionnel en la matière est loin d’être établi. Le terme « émotion », dans son acception contemporaine la plus courante, possède un sens identique au terme « passion » tel qu’il était utilisé au XVIIème siècle : il désigne un ensemble de réactions affectives, quelles que soient leur durée ou leur intensité. Dans un sens plus restreint, (celui dont fait usage par exemple Paul Ekman) les émotions « de base » correspondent à des états mentaux plus spécifiques, se caractérisant notamment par un déclenchement rapide, une durée limitée, et un surgissement involontaire. En ce sens, les émotions se distinguent des sentiments, tels que l’amour ou la jalousie (Le sentiment, en effet, peut s’établir progressivement, durer plus longtemps que l’émotion, et renvoie également à une perception consciente, ce qui n’est pas toujours le cas de l’émotion).
7Par ailleurs, de manière encore plus spécifique, il convient d’effectuer une distinction fondamentale entre deux catégories d’émotions : d’une part, les émotions les plus simples, se rattachant à l’évolution biologique, et pouvant exister au sein d’autres espèces, et d’autre part des émotions plus sophistiquées, nécessitant des capacités cognitives plus complexes, et faisant intervenir des facteurs socioculturels. C’est cette distinction qu’effectue par exemple le philosophe Paul Griffiths dans l’ouvrage What emotions really are, distinguant ce qu’il nomme les émotions liées à des « programmes affectifs » (affect program) et les émotions nécessitant des capacités intellectuelles plus développées, qu’il nomme « émotions cognitives supérieures » (Higher cognitive emotions). Ainsi, des émotions telles que le dégoût, la peur, la joie, ou encore la colère appartiennent à la catégorie des programmes affectifs. Ces émotions sont transculturelles, liées à des processus psychologiques simples, et s’accompagnent de réactions faciales, vocales ou musculaires spécifiques. A contrario, des émotions comme la culpabilité, la honte, ou l’envie sont bien davantage liées aux interactions sociales et exigent des aptitudes cognitives plus complexes (comme la conscience réflexive).
8A la lumière des analyses précédentes, il apparaît donc que les deux catégories d’émotions précédemment décrites ne se rattachent pas à l’action de la même manière : les émotions qui s’enracinent dans l’évolution biologique déclenchent le plus souvent l’action de manière immédiate, sans qu’il soit nécessaire à l’individu agissant d’effectuer une évaluation cognitive. Ainsi, une émotion telle que le dégoût est provoquée de manière spontanée au contact de certains objets (comme les excréments), suscitant par là même de manière immédiate une action de rejet. Cette immédiateté s’enracine dans des mécanismes physiologiques hérités de l’évolution, et qui ont permis à nos ancêtres d’éviter différentes pathologies qui auraient pu s’avérer fatales. Ce faisant, le dégoût a revêtu une valeur adaptative, nous permettant de survivre en évitant les objets susceptibles d’être dangereux sur le plan hygiénique et sanitaire. De manière similaire, des émotions comme la peur ou la colère ont été produites par l’évolution biologique afin de permettre le déclenchement immédiat d’actions favorables à la survie et la reproduction de notre espèce.
9A la différence de ces émotions immédiates, directement rattachées à des actions typiques, les émotions exigeant des capacités cognitives plus complexes s’avèrent davantage malléables en fonction de facteurs socioculturels, et ne donnent pas lieu à des actions typiques Ainsi, une émotion telle que la honte n’est pas nécessairement déclenchée par des objets similaires d’une culture à l’autre et peut produire une multiplicité d’actions (se dissimuler, réagir de manière agressive, pleurer, etc.).
10De quelle manière cette articulation entre action et émotions se manifeste-t-elle empiriquement, au regard des bases cérébrales et psychologiques du raisonnement pratique ? C’est ce qu’il convient à présent d’envisager, en étudiant un mécanisme fondamental pour le déclenchement de l’action : la décision.
III – Action, émotion et décision
11A contre-courant des approches cognitives et rationalistes de l’action, dominantes jusqu’à une période récente, différents auteurs de la tradition philosophique et scientifique s’étaient évertués à mettre l’accent sur le lien fondamental entre émotion et décision. C’est ainsi que Darwin, dans l’expression des émotions chez l’Homme et les animaux (1872) remarquait que la prise de décision s’accompagne d’un froncement de sourcils, indiquant un certain embarras et la présence d’émotions précédant l’action. Dans la lignée des hypothèses darwiniennes, différents travaux philosophiques ou psychologiques ont pareillement mis l’accent sur l’articulation entre action et réactions émotionnelles. Ainsi Sartre (dans une optique certes différente du naturalisme évolutionniste) insistait-il dans son Esquisse d’une théorie des émotions (1939) sur le fait que les émotions définissent la réalité humaine dans ses diverses modalités : la saisie objective de l’action, en tant qu’élément fondamental de la réalité humaine, s’avère donc selon cet auteur en étroite corrélation avec la compréhension des émotions. Scherer (1986) envisage quant à lui l’émotion comme un dispositif d’évaluation jouant un rôle intermédiaire entre l’évaluation cognitive d’une situation et l’action. Selon Lazarus (1991), l’émotion revêt différentes fonctions au regard de l’action, en permettant d’informer le sujet agissant sur la nature de l’action qu’il est en train d’accomplir, ou d’évaluer l’efficacité de son comportement. L’émotion, selon cet auteur, constituerait en quelque sorte un signal inconscient de la pertinence de nos choix, facilitant en outre la communication des intentions précédant l’action.
12Ces différentes positions mettant en exergue le rôle crucial exercé par l’émotion dans le processus décisionnel étaient toutefois éminemment spéculatives, et manquaient de confirmations empiriques. C’est surtout avec les travaux du neurobiologiste Antonio Damasio que les premières données expérimentales ont permis récemment de comprendre à quel point les émotions peuvent exercer une influence décisive sur le processus décisionnel.
13Il suffit pour se convaincre de ce point de songer au célèbre cas du patient nommé Elliot, étudié par Damasio et ses collaborateurs, et exposé dans L’Erreur de Descartes. Atteint d’une tumeur au cerveau, Elliot s’avérait incapable de prendre des décisions pratiques. Il prenait ainsi bien souvent des décisions catastrophiques, contraires à ses intérêts les plus évidents ; il s’avérait inapte à endosser la moindre responsabilité ou effectuer le moindre choix sans causer un désastre pour lui-même ou pour son entourage. (Elliot s’était par exemple lancé dans des spéculations financières hautement risquées qui lui avaient fait perdre toutes ses économies). Un scanner, ainsi que des examens prononcés au moyen de l’Imagerie par Résonance Magnétique révélèrent qu’Elliot souffrait de graves lésions aux lobes frontaux. Un tel comportement était t-il dû à un dysfonctionnement cognitif ? A la grande surprise de Damasio lui-même, tel ne semblait pas être le cas : malgré ces lésions, et de manière stupéfiante, les facultés strictement rationnelles de ce sujet étaient parfaitement conservées : ainsi, Elliot réussissait-il parfaitement à tous les tests d’intelligence ; sa mémoire à court terme et à long terme ainsi que sa mémoire de travail fonctionnait sans aucun accroc ; il pouvait retenir les nombres, manipuler les figures géométriques, ou se souvenir d’événements précis sans la moindre difficulté.
14Les dysfonctionnements d’Elliot pour le raisonnement pratique ne procédaient donc pas d’une défaillance intellectuelle et avaient une autre origine, que Damasio finit par débusquer au cours de ses recherches : Elliot souffrait d’une défaillance d’ordre émotionnel, qui l’empêchait de rattacher certaines réactions affectives aux situations appropriées. Ainsi, Elliot ne manifestait-il aucune réaction émotionnelle (comme l’indiquaient les tests de réaction cutanée ainsi que les IRM) lorsqu’on lui montrait des images de personnes agonisant ou éprouvant les pires souffrances. Il affirmait comprendre la nature des situations qui lui étaient présentées, mais être incapable de ressentir certaines émotions, comme la tristesse ou l’empathie. Selon Damasio, c’est précisément cette défaillance affective (ayant comme corrélat neurobiologique des lésions au niveau du cortex pré-fontal) qui entrave le processus de raisonnement pratique, rendant impossible tout choix, que ce soit sur le plan social ou moral : autrement dit, pour Damasio, les zones cérébrales associées aux émotions sont également associées au raisonnement pratique. Sans émotions, nous nous comporterions comme Elliot, naviguant ad libitum parmi une infinité de possibilités, ou effectuant des choix catastrophiques pour nos intérêts les plus immédiats.
15De nombreux travaux empiriques ont depuis corroboré les conclusions de Damasio : ainsi, comme le montrent les travaux de Joseph Ledoux, exposés dans Le cerveau des émotions, une émotion comme la peur détermine de manière cruciale l’émergence de certaines actions utiles à notre survie. Plus précisément, selon Ledoux, la peur est étroitement liée à une zone cérébrale particulière située au niveau du lobe temporal, et jouant un rôle capital dans le déclenchement des émotions de base : l’amygdale. Faisant partie du système limbique, (une des plus anciennes structures du cerveau sur le plan de l’évolution) l’amygdale conditionne en effet l’apparition de la peur ou de l’agressivité lorsque surgissent certains stimuli. Comme l’explique en effet Ledoux, la peur peut être déclenchée par l’entremise d’un « circuit court » ou d’un « circuit long : » le « circuit court » ne nécessite pas l’intervention du cortex, structure liée aux fonctions cognitives les plus sophistiquées. Il commence avec la perception sensorielle de l’objet, puis l’activation du thalamus (au sein du système nerveux central), et enfin celle de l’amygdale, ce qui permet de déclencher rapidement une action appropriée (comme la fuite). La voie « longue », en revanche, fait intervenir davantage d’étapes préalablement au déclenchement de l’action : à la différence du processus précédemment décrit, le cortex cérébral est activé, permettant ce faisant une analyse et une évaluation cognitive du stimulus, pouvant éventuellement inhiber un comportement émotionnellement produit.
16Prenons un cas classique pour illustrer cette idée : un homme déambule tranquillement en forêt, lorsqu’il aperçoit du coin de l’œil, furtivement, une forme qui ressemble à un serpent. Si seule la voie « courte » fonctionne, le circuit émotionnel joue alors un rôle prédominant : s’ensuivra alors une réaction quasi-immédiate de peur, déclenchant le plus souvent une action de fuite. En revanche, si la voie « longue » intervient, l’émotion de peur, et la réaction de fuite peuvent toutes deux être inhibées, grâce au traitement visuel et sémantique du stimulus par le cortex. Bien évidemment, il est souvent préférable, en termes de survie, que la réaction de peur soit déclenchée de manière immédiate, plutôt qu’elle ne soit trop longtemps retardée, l’inhibition de l’action pouvant alors s’avérer fatale…Un individu dont l’amygdale aurait été lésé ou enlevé aurait ainsi la capacité de reconnaître un serpent, (grâce aux fonctions du cortex) mais n’aurait néanmoins aucune manifestation somatique de la peur, ni aucune motivation à prendre la fuite, ce qui serait bien entendu plus que problématique pour sa survie.
17En bref, les travaux de Damasio et de Ledoux, parmi beaucoup d’autres, (par exemple ceux d’Alain Berthoz, exposés dans l’ouvrage La décision) confirment l’hypothèse selon laquelle les émotions, en influençant nos choix et en les motivant - souvent à notre insu - constituent un requisit fondamental au regard de l’action.
18En outre, il importe de souligner que les émotions ne jouent pas uniquement un rôle décisif en ce qui concerne le déclenchement de l’action : elles sont également cruciales pour l’inhibition et le contrôle de cette dernière. Ici encore, les théories rationalistes de l’action doivent renoncer à l’idée selon laquelle c’est avant tout à nos facultés déductives qu’il incombe de réguler l’action, en refrénant l’enthousiasme débordant des réactions émotionnelles. L’émotion, bien au contraire, constitue également un élément indispensable pour limiter l’action et certaines de ses conséquences.
19Ainsi, un nombre croissant de données empiriques tendent à indiquer que les individus souffrant de troubles du comportement social les poussant à transgresser les normes sociales et morales (ceux que Damasio nomme les « sociopathes du développement ») souffrent aussi de défaillances émotionnelles. Ainsi, dans une étude récente où étaient comparées des personnes en bonne santé et des personnes souffrant de troubles du comportement social, la psychologue Jennifer Beer et ses collaborateurs ont constaté que les déficiences se rapportant au comportement social chez les malades étaient étroitement liées à l’absence d’émotions se rattachant à la conscience de soi, comme la honte, l’embarras et la fierté. C’est l’absence de telles émotions, et non une série de déficits cognitifs, qui conduit donc certains individus à ne pas pouvoir contrôler ou limiter leurs actions. Il en est de même s’agissant des patients souffrant de lésions au lobe frontal. Dans la lignée des découvertes de Damasio, de nombreux travaux empiriques (Blair, 2001, Bechara et al. 1996, Gray et al. 2003), tendent ainsi à montrer que l’incapacité à inhiber certaines actions (comme le fait d’infliger de manière non accidentelle du mal à autrui), ne procède pas de défaillances strictement cognitives (aptitudes perceptuelles, linguistiques, motrices, etc.) mais bien de défaillances affectives, dues en particulier à des lésions localisées dans la partie ventro-médiane du cortex pré-fontal et au niveau de l’amygdale.
20Il semble bien, en somme, que l’inhibition de nombreuses actions ne peut s’effectuer en raison d’une incapacité à ressentir, et non d’une incapacité à comprendre la nature des situations. Ici encore, les approches excessivement intellectualistes de l’action ont trop souvent tendance à sous-estimer de manière hâtive cette fonction régulatrice des émotions.
IV – Actions collectives et synchronisation des émotions
21De surcroît, les émotions ne sont pas uniquement utiles à l’action individuelle. Elles contribuent en outre à l’action collective, en rendant possible différents phénomènes de synchronisation affective. Grâce aux émotions plus spécifiquement sociales, des paramètres communs d’action peuvent émerger et s’organiser. L’action collective, par conséquent, n’est pas uniquement issue de l’activité cognitive d’agents rationnels et calculateurs : elle émane également d’une coordination des émotions. Cela signifie que le lien entre émotions et actions n’est pas seulement tributaire de programmes innés issus de l’évolution biologique. D’autres émotions se rattachent à l’action par le biais d’interactions socioculturelles. Tel est le cas par exemple d’une émotion morale typique telle que la culpabilité, émotion dont fait mention le philosophe Allan Gibbard dans Sagesse des choix, justesse des sentiments. Le fait de ressentir de la culpabilité, (ou plus précisément, dans la théorie de Gibbard, le fait de juger qu’il est approprié de ressentir de la culpabilité dans certaines situations) favorise la coopération entre individus, permettant ce faisant l’action collective. Plus précisément, la culpabilité permet selon Gibbard la coordination des actions individuelles et la stabilisation des systèmes sociaux lorsqu’elle se synchronise à d’autres émotions, comme la colère ou le ressentiment. : sans une telle coordination émotionnelle, la coopération entre individus s’avèrerait sinon impossible, du moins extrêmement délicate. Même si Gibbard accorde sans doute trop d’importance à la culpabilité en tant qu’émotion morale primordiale, de nombreux travaux empiriques tendent toutefois à mettre l’accent sur l’importance de certaines émotions dans le déploiement de l’action collective.
22L’importance des émotions dans la régulation des interactions sociales peut en effet faire l’objet de tests expérimentaux, par exemple au moyen de simulations permettant de modéliser les rapports de coopération entre individus. Tel est le cas par exemple du « jeu du bien public », souvent utilisé en économie expérimentale : dans le cadre de ce jeu, quatre individus participent. Chacun des joueurs reçoit une certaine somme d’argent, et peut soit la conserver, soit la mettre dans une cagnotte commune. La somme contenue dans cette cagnotte est ensuite doublée, puis redistribuée de manière égale entre les joueurs. La stratégie la plus profitable (en tenant compte du fait que nul n’est forcé de mettre de l’argent dans la cagnotte) consisterait pour chaque individu à mettre le moins d’argent possible dans le pot commun, en espérant que les autres joueurs y mettent le plus d’argent possible. Pourtant, les tests menés en laboratoire indiquent que les individus n’adoptent pas cette stratégie : les participants, de fait, contribuent en misant entre 40 et 60 % de leur dotation initiale.
23Surtout, de manière encore plus intéressante, la plupart des joueurs (lorsqu’ils ont la possibilité de savoir quel comportement ont adopté les autres) sont même prêts à payer pour punir ceux qui ne contribuent pas. Il s’agit alors de ce que l’on nomme une « punition altruiste » car elle est coûteuse pour celui qui l’adopte et bénéficie à autrui.
24Dans un questionnaire adressé aux individus participant au jeu du Bien Public, les économistes Ernst Fehr et Simon Gachter ont demandé aux joueurs quelles étaient les causes de leur tendance à punir de manière altruiste, alors que ce comportement allait à l’encontre de leur intérêt rationnel. De manière certes peu surprenante, mais hautement significative, les participants ont répondu qu’il s’agissait de la colère. Ainsi, une émotion comme la colère peut avoir des répercussions sur la coordination de l’action collective, en suscitant des comportements punitifs, comportements qui ont pour finalité un renforcement coercitif de la coopération et un contrôle du comportement social.
25Cette corrélation entre émotion et action collective est d’autant plus importante qu’elle se rattache sans doute à un certain nombre de biais psychologiques récurrents, qui renforcent l’orientation des émotions. C’est ce qu’indiquent en effet de nombreuses recherches en psychologie sociale, comme celles portant sur le phénomènes de contagion émotionnelle (en particulier Hatfield et al., 1994) Selon Hatfield et ses collaborateurs, la contagion émotionnelle constitue une tendance automatique et inconsciente à imiter les expressions faciales, vocales et gestuelles adoptées par d’autres individus au cours d’interactions sociales réciproques. La contagion émotionnelle, à cet égard, se distingue de l’imitation, qui peut être basée sur un raisonnement conscient et stratégique. Le phénomène de contagion émotionnelle montre donc que les émotions renforcent la manière dont se structurent et s’orientent les interactions sociales, favorisant ce faisant l’action collective.
26A l’instar de la contagion émotionnelle, l’empathie joue également un rôle crucial dans la coordination des actions : cette émotion, en effet, permet la reproduction de certaines actions par le biais d’un processus de simulation mentale du comportement d’autrui. Les travaux récents sur les neurones miroirs, à ce titre, pourraient permettre de comprendre les bases cérébrales de ce processus émotionnel. Ces travaux semblent indiquer en effet que ce sont les mêmes aires neuronales qui s’activent lors de la perception émotionnelle d’une action (au moyen de l’empathie) et lors de l’exécution de cette dernière. Ainsi, les recherches du professeur Rizzolati sur les macaques indiquent que ce sont les mêmes configurations cérébrales qui s’activent lorsqu’un de ces primates perçoit par exemple la saisie d’un objet et lorsqu’il se saisit lui-même de l’objet. De manière tout à fait similaire, le neurobiologiste Jean Decety a démontré grâce aux techniques d’imagerie cérébrale, que le même phénomène semble bel et bien se produire également en ce qui concerne l’être humain : ici encore, les mêmes zones neuronales sont activées lorsqu’un individu exécute une action et lorsqu’il l’observe. Même si les travaux sur les neurones miroirs s’avèrent sans doute trop récents pour que des conclusions définitives puissent être effectuées, et même s’ils laissent pour le moment certaines questions en suspens [1], ils n’en proposent pas moins des pistes de réflexion intéressantes s’agissant des relations entre action et l’empathie, et plus généralement en ce qui concerne le rapport entre action et émotion.
V – Conséquences pratiques : l’éducation émotionnelle de l’action
27Le fait de réhabiliter la fonction pratique des émotions n’a pas uniquement pour but de théoriser et de modéliser les bases émotionnelles de l’action. Comprendre le rôle des émotions peut également conduire à un certain nombre d’applications, que ce soit dans la sphère sociale, morale, politique, ou économique. Ces applications éventuelles, du reste, n’ont pas échappé, à certains chercheurs, de sorte que l’étude des émotions a connu au cours des dernières décennies un regain d’intérêt croissant. C’est ainsi qu’un champ de recherches comme celui de la psychologie positive (Csikszentmihalyi, Seligman, Frederickson) s’efforce depuis plusieurs années de diminuer les états dépressifs et d’améliorer l’existence individuelle en étudiant les émotions censées permettre le développement de soi, émotions communément qualifiées de « positives ». Par exemple, Barbara Frederickson, travaillant à l’université du Michigan, a mis en évidence au cours d’expériences en laboratoire le fait que les émotions positives (respect, gratitude, élévation, joie, etc.) avait des conséquences bien particulières sur l’orientation de l’action : elles favorisent l’optimisme concernant les conséquences des décisions, favorisent la résilience, et permettent donc selon cette dernière, de « résoudre les problèmes de croissance et de développement personnels » [2].
28Prenons par exemple le cas de l’élévation, émotion tout particulièrement étudiée par le psychologue Jonathan Haidt, professeur de psychologie à l’Université de Virgine, et personnalité éminente dans le domaine de la psychologie positive. Comme l’explique Haidt, nous sommes en mesure de ressentir de l’élévation lorsque nous sommes confrontés à des actes exceptionnels de compassion ou de générosité. Cette émotion, du reste, se traduit par des réactions physiologiques spécifiques, comme un réchauffement au niveau de la poitrine, des larmes, et des frissons. Ainsi, nous sommes susceptibles d’éprouver une émotion comme l’élévation face à des comportements d’individus apportant de l’aide à des personnes en difficulté ou atteintes d’une maladie. A cet égard, des personnalités traditionnellement considérés comme des modèles de vertu (comme le Dalaï Lama, ou Sœur Teresa) produisent cette émotion de manière typique cette émotion.
29Or, comme l’ont indiqué les résultats obtenus sur les sujets participant aux expériences de Haidt, le fait d’éprouver l’émotion d’élévation a tendance à inciter les individus à agir pour améliorer leur sort et celui d’autrui, ainsi qu’à se rapprocher de la personne ou du groupe à l’origine de cette émotion. Autrement dit, les individus éprouvant l’élévation ont tendance à vouloir imiter les actes de compassion ou de générosité qui ont déclenché cette émotion. Une émotion telle que l’élévation, nous le voyons, constitue un moyen fondamental pour motiver l’action en créant un phénomène positif d’émulation morale. L’élévation, précise Haidt, remplirait ainsi une fonction diamétralement opposée à celle du dégoût : alors que le dégoût nous pousse à nous éloigner de certains objets ou de certains individus, l’élévation nous incite a contrario à nous en rapprocher. De sorte que l’élévation, à l’instar d’autres émotions, pourrait selon les tenants de la psychologie positive améliorer d’un point de vue moral l’action individuelle.
30Rappelons enfin qu’en dehors de la sphère morale, l’application pragmatique des données psychologiques relatives aux émotions progresse également de manière notable dans le monde des entreprises, dans la lignée en particulier des travaux du psychologue Daniel Goleman concernant l’ « intelligence émotionnelle » : ainsi, un nombre croissant d’articles et d’ouvrages sont ainsi publiés sur l’influence des émotions dans le monde du travail, s’agissant par exemple de la gestion des décisions, du travail en équipe, de la relation avec les clients, ou encore des innovations techniques ou conceptuelles. Ici encore, la fonction pratique des émotions est mise en avant, même si c’est dans une optique fort différente de celle prônée par la psychologie positive.
VI – L’action sans émotion
31A ce stade de notre réflexion, un dernier point doit cependant être impérativement précisé : affirmer que les émotions jouent un rôle considérable pour le déclenchement et le contrôle de l’action ne signifie nullement que l’action est réductible à nos réactions affectives : si un hyper-rationalisme ne faisant jouer aucun rôle pratique aux émotions ne saurait être soutenu, un émotivisme radical faisant entièrement dépendre l’action de l’émotion s’avère tout autant indéfendable, tant sur le plan psychologique qu’à un niveau prescriptif.
32S’agissant des mécanismes psychologiques qui sous-tendent le processus décisionnel, nombreuses en effet sont les situations dans lesquelles les émotions se trouvent canalisées par des mécanismes cognitifs plus complexes, faisant intervenir par exemple des mécanismes d’ordre inférentiel : en d’autres termes, le raisonnement pratique s’avère dans certaines circonstances à même de se déployer indépendamment de l’influence exercée par les émotions. Le cas des dilemmes moraux, à cet égard, est tout à fait révélateur de notre capacité à agir et à effectuer des raisonnements pratiques en faisant taire nos réactions affectives immédiates. Ainsi, le philosophe Joshua Greene, en collaboration avec Jonathan Haidt, a récemment soumis des sujets à un dilemme moral particulièrement épineux, illustrant en quelque sorte le « combat » entre réactions émotionnelles immédiates et processus déductifs. Dans le cadre de ce dilemme, l’histoire suivante était racontée aux participants : « En période de guerre, vous et d’autres personnes de votre village vous cachez des soldats dans un sous-sol. Votre bébé commence à pleurer et vous lui couvrez la bouche pour couvrir ce son. Si vous enlevez votre main, le bébé pleurera, les soldats l’entendront, ils vous trouveront ainsi que les autres, et tueront tous ceux qu’ils trouveront, y compris vous et votre bébé. Si vous n’enlevez pas votre main, votre bébé mourra étouffé. Est-il convenable d’étouffer votre bébé, afin de vous sauver et de sauver les autres villageois ? ».
33Les réponses apportées à ce genre de dilemme – réponses du reste souvent précédées d’une longue phase de réflexion- s’avèrent fort instructives : certains participants, se réclamant implicitement ou explicitement du principe kantien en vertu duquel il ne faut jamais considérer autrui comme un moyen, affirment qu’il ne faut en aucun cas tuer le bébé. D’autres, préférant adopter une position utilitariste, affirment qu’il est préférable de tuer le bébé, (et donc de sauver la vie des autres villageois) puisque dans les deux cas ce dernier finira par mourir. Joshua Greene, désirant comprendre les bases cognitives de ces réactions, décida d’étudier le cerveau des participants au moyen de l’IRM. Il constata que chez ceux qui avaient refusé de tuer le bébé, les zones cérébrales associées aux émotions (en particulier le complexe amygdalien) connaissaient une activité plus importante. En revanche, chez ceux qui « décidaient » (du moins mentalement !) de tuer le bébé, les zones cérébrales associées à des activités cognitives plus complexes (déduction, planification…) s’avéraient plus actives. Il constata également que le temps de réflexion chez ceux qui acceptaient le meurtre était sensiblement plus long que pour ceux qui le refusaient, ce qui semble ici encore indiquer l’opposition entre une réaction émotionnelle immédiate et un calcul coût / bénéfice froidement logique.
34Selon Greene, ce type de dilemme met en opposition un système intuitif, de type émotionnel et un système réflexif, davantage rattaché à une logique utilitariste : chez certains individus, le système réflexif prend le dessus sur le système intuitif, entraînant en l’occurrence la décision de tuer le bébé. Chez d’autres individus, c’est le système intuitif, rattaché aux émotions, (comme la peur, ou le dégoût) qui l’emporte, déclenchant ce faisant le refus catégorique de commettre un meurtre. En d’autres termes, on constate une sorte de « lutte » entre les zones cérébrales associées aux fonctions cognitives rationnelles, et celles se rattachant aux émotions. Il est intéressant à cet égard de remarquer que, selon les résultats de cette expérience, les principes déontologiques chers aux partisans de Kant semblent ici dépendre de manière paradoxale… des émotions ! Ironie du sort, qui pourrait laisser songeurs les défenseurs les plus acharnés du rationalisme moral …
35En dernière analyse, il importe donc de rappeler que même si l’évolution nous a dotés d’un répertoire de réactions émotionnelles nous prédisposant à agir selon des modalités spécifiques, il existe toutefois de nombreuses situations dans lesquelles l’action s’effectue bel et bien contre les réactions émotionnelles immédiates et les intuitions qui s’y rattachent.
36Cette limitation cognitive des émotions, du reste, ne constitue pas seulement une réalité psychologique : fort heureusement, elle s’avère aussi tout à fait souhaitable dès lors que nous l’envisageons sous un angle normatif. Car nos intuitions émotionnelles, il faut le garder à l’esprit, ne sont pas toujours fiables : elles risquent bien souvent de nous induire en erreur, d’orienter l’action vers des pistes dangereuses, inappropriées, ou moralement problématiques (Il suffit de songer par exemple aux effets négatifs du dégoût, à l’origine de comportements aussi peu défendables que la xénophobie ou l’homophobie, pour se convaincre de ce point). Si bien que l’action, en définitive, doit également être évaluée par des facultés cognitives ne faisant pas appel aux émotions. Substituer des émotions positives à d’autres émotions négatives ne constitue pas en effet le seul mode légitime de régulation de l’action. Encore faut-il, au moyen de nos facultés réflexives, juger du caractère pertinent de nos émotions, et de leur rapport légitime avec tel ou tel mode d’action. Et c’est à l’intellect, destituant pour une fois l’émotion à juste titre, qu’il incombe d’accomplir cette fonction.
VII – La modération des émotions comme fondement de l’action légitime
37Source fondamentale de l’action, rouage indispensable du raisonnement pratique, l’émotion façonne, oriente, structure nos décisions et les actions qui s’y rattachent. Sans elle, nous ne serions guère plus avantagés que le fameux âne de Buridan, mort de soif pour avoir indéfiniment hésité entre un seau d’avoine et un seau d’eau. Entre la réflexion, la décision et l’action proprement dite, il existe en effet un espace fondamental, occupé par la motivation. Et cet espace, il importe de le rappeler, s’avère grandement déterminé par nos réactions émotionnelles, véritable foyer de notre rapport pratique au monde. Comme nous l’avons souligné, de nombreuses données empiriques relatives à la psychologie du raisonnement pratique indiquent de manière éloquente que la connexion entre action et émotion s’avère bien plus étroite que ce qu’une tradition philosophique trop longtemps hégémonique n’a eu de cesse d’affirmer : loin de systématiquement paralyser ou perturber l’action, les émotions nous prédisposent tout au contraire à agir, nous épargnant bien souvent de longs raisonnements qui pourraient s’avérer (dans un monde regorgeant de dangers potentiels) au mieux inutiles, au pire dangereux ou mortels. A ce titre, l’émotion ouvre un espace considérable à l’expression de l’action individuelle ou collective, et ce sans que nous ayons besoin de faire usage de nos facultés réflexives.
38Ces dernières, pour autant, ne sauraient être tout bonnement bannies du champ de l’action. Car nos émotions, si utiles soient-elles à la motivation de l’action, ne sauraient être suivies aveuglément sans que nous puissions leur opposer une certaine distance critique : les émotions, comme toute expression de nos états intentionnels, courent en effet le risque de l’inadéquation ou de la démesure. C’est alors à la conscience réflexive qu’il revient d’évaluer leur pertinence, sans pour autant nier leur caractère indispensable. Composante majeure de nos actions, l’émotion n’échappe donc pas pour autant au contrôle rationnel, seul à même de circonscrire et de légitimer le champ d’extension de notre vie pratique.
Éléments Bibliographie
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- DARWIN C., L’Origine des Espèces, (1ère édition en 1859), Paris, GF, 1992.
- — L’ Expression des émotions chez l’homme et chez les animaux, (1ère édition en 1872 ), Paris, Rivages, 2001.
- — La descendance de l’homme et la sélection sexuelle, (1ère édition,
- 1871, Londres, John Murray), Paris, Editions Complexe, 1981.
- DAWKINS R., Le gène égoïste, Paris, Odile Jacob, 1996.
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- WILSON E.O., La sociobiologie, Monaco, Editions du Rocher, 1987.
- WRIGHT R., L’animal moral, Paris, PUF, 1996.
Notes
-
[1]
Par exemple, une question fondamentale relative aux neurones miroirs, et encore ouverte à de futures investigations empiriques concerne la distinction entre le Soi et Autrui : si les neurones miroirs, en effet, permettent l’identification à autrui, quelles sont les bases neuropsychologiques d’une telle distinction ?
-
[2]
Barbara L. Frederickson, « The Value of Positive Emotions » in American Scientist 91 (juillet-août 2003), p. 332.