La patience est, dit-on, un trait singulier du caractère de celui qui consent à la durée, ou encore à la temporalisation même de toute chose. Ainsi renvoie-t-elle, en elle-même, à ce sur quoi nous n’avons pas de prise : la temporalité. Le patient l’accepte ; l’impatient s’en agace, mais, à dire vrai, n’y change rien. Toutefois, si la patience est si originairement liée à la temporalisation même de toute chose, c’est-à-dire de ce qui est, de l’être même, il est permis de se demander si ce que nous nommons patience, révélant bien plus qu’un simple trait psychologique, ne fait pas signe vers une possible ressaisie ontologique du temps, et dès lors, vers une compréhension profondément temporelle de l’être même. Ne peut-on, en effet, soutenir que tout ce qui est, faisant l’épreuve de la durée, à sa façon patiente ?
Cette temporalisation, que l’idée de durée tente ici de formuler, un philosophe aussi spéculatif que Hegel a pu vouloir la rendre à partir de l’idée même du concept, ou plus précisément à partir du déploiement du concept ressaisissant l’être même de ce qui est. C’est là ce qu’il a nommé l’inquiétude (Unruhigkeit). En effet, dès la Phénoménologie de l’esprit, en 1807, l’inquiétude devient pour le philosophe un des noms propres du mouvement d’Aufhebung, ou encore de la négativité, lorsqu’elle se rapporte aux choses mêmes. « Le contenu dans sa diversité, écrit le philosophe, en tant qu’il est déterminé dans la relation, n’est pas en soi, et son inquiétude (seine Unruh…