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Article de revue

La victoire aujourd’hui, de l'évanescence au dépassement

Pages 25 à 37

Notes

  • [1]
    K. Dupuy et S. Aas Rustad, « Trends in Armed Conflict, 1946-2017 », PRIO Conflict Trends, 2018, disponible sur : <www.prio.org>.
  • [2]
    100 ans après 1918. Vaincre au XXIe siècle, Paris, Centre de doctrine et d’enseignement du commandement, 2018.
  • [3]
    B. H. Liddell Hart, Stratégie, Paris, Perrin, 1998, p. 411.
  • [4]
    E. N. Luttwak, Le Paradoxe de la stratégie, Paris, Odile Jacob, 1989.
  • [5]
    A. Beaufre, Introduction à la stratégie, Paris, Pluriel, 1998, p. 34.
  • [6]
    F. Géré, « Victoire », in T. de Montbrial et J. Klein (dir.), Dictionnaire de stratégie, Paris, Presses Universitaires de France, 2000, p. 596.
  • [7]
    On parlera ainsi moins de victoire que de succès pour les niveaux tactique et opératif.
  • [8]
    A. Beaufre, Introduction à la stratégie, op. cit., p. 35.
  • [9]
    C. von Clausewitz, De la guerre, Paris, Éditions de Minuit, 1955, p. 70-72.
  • [10]
    Ibid., p. 53.
  • [11]
    R. Aron, Penser la guerre, Clausewitz. Tome 1. L’âge européen, Paris, Gallimard, 1976, p. 120-121.
  • [12]
    F. C. Iklé, Every War Must End, New York, Columbia University Press, 2005.
  • [13]
    M. R. Gordon et B. E. Trainor, The Generals’ War. The Inside Story of the Conflict in the Gulf, Boston, Little, Brown & Co, 1995.
  • [14]
    G. Blainey, The Causes of War, New York, Free Press, 1988, p. 115-118.
  • [15]
    J. Boone Bartholomees, « Theory of Victory », Parameters, été 2008, p. 30.
  • [16]
    B. Heuser, « Victory, Peace, and Justice. The Neglected Trinity », Joint Force Quarterly, n° 69, p. 6-12, disponible sur : <http://ndupress.ndu.edu>.
  • [17]
    M. Howard, « When Are Wars Decisive? », Survival, vol. 41, n° 1, printemps 1999, p. 126-135.
  • [18]
    A. Beaufre, Introduction à la stratégie, op. cit., p. 73-75.
  • [19]
    Type de fortification apparu à partir du XVe siècle afin de répondre aux progrès de l’artillerie.
  • [20]
    B. Brodie et F. Brodie, From Crossbow to H-Bomb, Bloomington, Indiana University Press, 1973.
  • [21]
    É. de Durand, « Europe : d’une démilitarisation l’autre », Politique étrangère, vol. 79, n° 1, 2014, p. 112-115, disponible sur :<www.cairn.info>.
  • [22]
    E. N. Luttwak, « On the Meaning of Victory », The Washington Quarterly, vol. 5, n° 4, automne 1982, p. 17-24, disponible sur : <www.tandfonline.com>.
  • [23]
    Sur le lien entre victoire et moralité, voir R. Mandel, The Meaning of Military Victory, Boulder, Lynne Rienner, 2006, p. 53-70.
  • [24]
    C. S. Gray, « Moral Advantage, Strategic Advantage? », Journal of Strategic Studies, vol. 33, n° 3, 2010, p. 333-365, disponible sur : <www.tandfonline.com>.
  • [25]
    R. Jervis, The Meaning of the Nuclear Revolution, Ithaca, Cornell University Press, 1989, p. 4-8.
  • [26]
    M. Quinlan, Thinking about Nuclear Weapons. Principles, Problems, Prospects, Oxford, Oxford University Press, 2008, p. 30.
  • [27]
    Ronald Reagan prononçait ainsi dans son discours sur l’état de l’Union de 1984 une formule toujours utilisée aujourd’hui : « Une guerre nucléaire ne peut être gagnée et ne devrait jamais être livrée. »
  • [28]
    C. S. Gray, « Nuclear Strategy: The Case for a Theory of Victory », International Security, vol. 4, n° 1, été 1979, p. 54-87, disponible sur : <www.jstor.org>.
  • [29]
    B. Roberts, The Case for U.S. Nuclear Weapons in the 21st Century, Stanford, Stanford University Press, 2015.
  • [30]
    C. von Clausewitz, De la guerre, op. cit., p. 57.
  • [31]
    B. Brodie, War and Politics, New York, MacMillan, 1973, p. 106-107.
  • [32]
    H. Strachan, « Strategy and the Limitation of War », Survival, vol. 50, n° 1, février-mars 2008, p. 31-54, disponible sur : <www.tandfonline.com>.
  • [33]
    C. S. Gray, Defining and Achieving Decisive Victory, Carlisle, Strategic Studies Institute, 2002, p. 7 et suivantes, disponible sur : <http://ssi.armywarcollege.edu>.
  • [34]
    S. Caplain, « Penser son ennemi. Modélisations de l’adversaire dans les forces armées », Focus stratégique, Ifri, n° 82, juillet 2018, disponible sur : <www.ifri.org>.

1Au cours des dernières années, les conflits armés de tous types se sont multipliés à travers le monde, de manière inédite depuis la fin de la guerre froide [1], mais ne connaissent que rarement des issues décisives. Les combats réapparaissent après une accalmie plus ou moins longue, alors que les conflits s’éternisent en s’éloignant progressivement de leurs raisons d’être initiales, rappelant que la violence alimente toute guerre de sa dynamique propre.

2Pour la France, s’interroger sur la notion de victoire est d’autant plus nécessaire que le pays est engagé sur de multiples théâtres d’affrontement, et que les armées françaises connaissent une activité opérationnelle intense. En Libye, au Mali ou en République centrafricaine, les démonstrations de force initiales génèrent avec le temps un doute grandissant quant à notre aptitude à « gagner la paix ». La récurrence des guerres, et leur caractère indécis, amènent ainsi à questionner jusqu’à l’utilité même de l’emploi de la force armée.

3Un siècle après la fin de la Première Guerre mondiale, la réflexion sur la victoire doit être renouvelée, et prendre la mesure des inflexions politiques, normatives, stratégiques ou opérationnelles survenues ces dernières décennies, et des conditions de l’emploi de la force aujourd’hui [2]. La victoire est un concept central, mais demeure une réalité fuyante. Des désaccords profonds et récurrents surviennent dès lors qu’il s’agit de qualifier de victoire l’issue d’une guerre, que celle-ci soit survenue des siècles auparavant ou, a fortiori, que les violences n’aient que récemment perdu en intensité. À bien des égards, les conceptions de la victoire semblent être longtemps restées otages d’une focalisation excessive sur les seules campagnes classiques de grande ampleur, telles les guerres d’Irak de 1991 et 2003, et plus encore les guerres mondiales et autres campagnes napoléoniennes. Avant d’étudier les facteurs contribuant aujourd’hui à la rareté des victoires, le concept même de victoire doit être analysé.

Qu’est-ce que la victoire ?

4Toute guerre a une fin, mais ne s’achève pas nécessairement par la victoire de l’un des belligérants. Reflet de la qualité des chefs de guerre en même temps que de l’efficience d’un système militaire, la victoire tient une place unique dans la théorie stratégique, comme dans l’histoire. Elle s’y distingue en particulier par sa nature stratégique, sa portée décisive et par la force de son symbole.

La décision de faire la paix, un événement stratégique

5Le terme de stratégie a subi, depuis de nombreuses années, un glissement sémantique, qui l’a sorti du champ militaire pour qualifier dans le langage courant toute forme de plan d’action finalisé, quel qu’en soit le domaine. Si le concept de victoire est aussi communément employé sans référence à l’action militaire, ses différents usages partagent au minimum l’idée initiale d’un succès décisif, d’une césure transformant l’existant de manière potentiellement durable.

6Le fondement de la stratégie est l’exploitation de la force ou de la menace d’emploi de la force à des fins politiques. Elle consiste pour un acteur à concevoir et à mettre en œuvre un plan permettant de prendre l’ascendant sur un adversaire afin d’atteindre l’objectif convoité. Ainsi, une première acception de la victoire s’appliquerait à la situation où l’un des belligérants atteint par la force le but qu’il s’était fixé – conquête d’une portion de territoire afin de gagner en profondeur stratégique, affaiblissement du potentiel militaire d’un voisin devenant trop puissant, etc. En ce sens, la victoire traduirait l’aptitude à résoudre l’une des difficultés inhérentes à la stratégie : la mise en cohérence de la conduite des opérations et de la construction d’une « meilleure situation de paix [3] ».

7La stratégie n’est toutefois pas seulement une action finalisée : elle implique d’atteindre un but de guerre spécifique face aux manœuvres d’un adversaire agissant, poursuivant ses propres objectifs et interdisant toute certitude [4]. Dans cette logique, le général Beaufre définissait la stratégie comme étant « l’art de la dialectique des volontés employant la force pour résoudre leur conflit [5] ». La victoire prend ici une deuxième dimension : la fin de l’opposition entre deux adversaires par le succès de l’un d’eux. Celui-ci survenu, la tension inhérente au conflit armé se relâche, mettant un terme au cycle d’actions et de réactions qui l’animait, et permettant en théorie l’avènement d’une paix durable. La victoire peut ainsi se définir comme « la situation qui résulte de l’acquisition de la supériorité dans un conflit, et du renoncement de l’adversaire à prolonger toute résistance [6] ». Convertissant un effet militaire en résultat politique, elle relève avant tout du niveau stratégique de la conduite de la guerre [7].

8La guerre oppose toujours deux volontés, et s’achève lorsque l’un des belligérants décide d’abandonner la lutte et de faire la paix, convaincu que la poursuite des hostilités ne saurait servir ses intérêts. Provoquer cette décision chez un adversaire est la condition de la victoire, et le but de toute stratégie [8]. Pour comprendre ce qui peut précipiter chez des décideurs ce déclic psychologique amenant à cesser les hostilités, il faut en revenir à l’influence déterminante des buts politiques de chaque belligérant.

Le rôle primordial des buts politiques

9Lorsque Clausewitz théorisait la guerre, il distinguait son concept pur, qui n’existe que de manière abstraite, de ses formes réelles, déclinées dans l’histoire militaire sous les traits les plus variés. Selon le concept pur de guerre, la victoire requiert le désarmement de l’adversaire, c’est-à-dire une situation dans laquelle celui-ci est physiquement et moralement incapable de résister. Clausewitz distinguait néanmoins le but théorique de l’emploi de la violence de son but pratique, plus mesuré et adapté en fonction des considérations politiques propres à chaque conflit. La prédominance des guerres dites limitées, qui voient au minimum l’un des deux belligérants ne pas combattre pour sa survie, signifie que la fin des guerres prend en réalité des formes plus diverses – et modérées – que la seule victoire écrasante [9].

10Ainsi, la plupart des guerres ne s’achèvent pas par une soumission suivant une défaite militaire totale – comme ce fut le cas en 1815 ou en 1945 –, mais par un calcul rapportant l’enjeu de la lutte aux sacrifices qui devraient être consentis pour la poursuivre. Lors de la guerre de Corée par exemple, les deux camps passent une série de compromis qui aboutissent à la signature de l’armistice de Panmunjom en juillet 1953.

11En guerre toutefois, « chacun des adversaires fait la loi de l’autre [10] », et aucun des acteurs ne saurait ainsi être parfaitement maître de la dynamique ou de la nature plus ou moins limitée du conflit, puisque la détermination de l’un est aussi fonction des exigences de son adversaire. Un belligérant peut se trouver dans une logique de lutte totale après avoir adopté une stratégie extrêmement ambitieuse adossée à une idéologie de domination. Il peut aussi être précipité dans cette logique du fait des exigences extrêmes de son adversaire, qui ne lui laissent que l’alternative entre une résistance acharnée et la perte de son indépendance, de sa liberté ou de sa vie.

12L’image clausewitzienne de la guerre formant une trinité faite de passion, de raison et de chance éclaire la façon dont le type de guerre influence les possibilités de victoire. Une guerre limitée réduit l’implication des passions, alors qu’une guerre totale les libère. L’entrée – délibérée ou non – dans une logique d’affrontement total libère des énergies qui affaiblissent l’aptitude du politique à contrôler la guerre et à en faire un moyen utile pour la poursuite de ses objectifs. Surtout, la perte de ce contrôle rend plus difficile – voire impossible – la conclusion d’une paix négociée, et condamne les belligérants à atteindre une décision par l’usure des énergies, ou par la soumission totale de l’un d’entre eux [11]. Mais si, à l’origine, la majeure partie des guerres sont initiées par des États poursuivant des objectifs limités, ceux-ci sont affectés par la dynamique propre à la guerre. Les pertes et efforts consentis s’accumulent avec le temps, et alimentent des processus de polarisation politique, de radicalisation des exigences, et de montée de la violence, qui peuvent affecter en retour les buts de guerre, et repousser encore la perspective d’une victoire rapide [12].

La naissance d’une perception partagée de la victoire

13La décision étant un événement d’ordre psychologique, elle implique non seulement qu’un belligérant soit placé en situation d’infériorité, mais encore qu’il l’admette. Le caractère décisif d’une victoire réside ainsi moins dans la position avantageuse obtenue par les combats que dans l’ascendant psychologique et moral que celle-ci confère au vainqueur, et par la reconnaissance de son infériorité par celui qui a été défait.

14L’un des enjeux principaux de la victoire, pour le vainqueur d’une guerre, est donc de traduire sa position avantageuse en perception durable. La difficulté réside alors dans le besoin d’imprimer cette image aussi bien chez les dirigeants du vaincu que sur ses forces armées, sa population, ou des alliés éventuellement désireux d’alimenter le conflit depuis l’extérieur – une prouesse que Napoléon Bonaparte ne parvint jamais à concrétiser à l’issue de victoires illustres face aux cinq premières coalitions opposées à la France révolutionnaire, puis au Premier Empire. Le défi est d’autant plus délicat que, dans un conflit limité, les objectifs poursuivis par chaque belligérant peuvent ne pas être strictement opposés. À l’issue de l’opération Tempête du désert en 1991, Saddam Hussein atteint son principal objectif en évitant le renversement de son régime, peut ainsi s’estimer victorieux, et se présenter comme tel, et ce d’autant plus efficacement que, bien que la coalition n’ait jamais eu pour ambition de démettre le régime en place, des frappes aériennes avaient visé ses dirigeants [13].

15Selon la façon dont les hostilités s’achèvent, le rapport de force entre adversaires aura été plus ou moins bouleversé au bénéfice du vainqueur [14]. Parmi les différentes issues possibles des guerres, la victoire a ceci de spécifique qu’elle permet de dresser une évaluation plus nette, potentiellement mieux partagée, du nouveau rapport de force [15]. À l’inverse, une guerre qui s’achève sur des résultats indécis rend cette évaluation plus contestable, augmentant les risques de voir l’espoir perdurer, ou renaître à brève échéance, dans une partie du camp adverse, comme l’illustre la succession, en Europe, des guerres limitées et indécises du XVIIIe siècle.

16La question de la stabilité de l’après-guerre dépasse en réalité largement le seul rapport de force issu des combats. Pour qu’une victoire se traduise par une paix prolongée, les forces en présence doivent idéalement considérer leur nouvelle situation comme non seulement irréversible, mais ne s’opposant pas à leurs intérêts, voire honorable et juste [16]. Les succès militaires ne prennent leur sens que s’ils permettent la création d’une situation politique plus stable, avec le rétablissement d’une forme de normalité dans les rapports diplomatiques et économiques, le tout sans humilier les vaincus [17].

La victoire introuvable

17La multiplication des interventions militaires occidentales depuis la fin de la guerre froide, en dépit du déséquilibre de puissance qui les caractérisait, ne s’est pas traduite par un enchainement de victoires décisives. Au contraire, au sentiment d’impuissance qui a accompagné les opérations de maintien de la paix des années 1990 pourrait succéder une impression de futilité de l’emploi de la force, née de l’indécision de guerres sans fin où le succès militaire initial aboutit plus souvent à des guerres civiles qu’à des paix durables. Il serait toutefois erroné de voir dans ces difficultés une spécificité de l’après guerre froide : les sources de telles situations sont généralement profondes, bien qu’elles puissent être exacerbées par certaines caractéristiques des interventions occidentales, ou des conflits récents.

Une affaire de tendances

18Au fil des siècles, la capacité à remporter des victoires décisives a drastiquement évolué sous l’effet de certaines tendances structurelles qui les facilitent ou les rendent plus coûteuses et difficiles. Sans que leur poids sur les décisions des États puisse être considéré comme déterminant, des tendances d’ordres technologique et normatif ont pesé sur l’idée de centralité de la victoire, comme sur sa faisabilité, à travers l’histoire et de nos jours – de manières tantôt convergentes, tantôt contradictoires [18].

19Pour qu’une guerre limitée s’achève en victoire nette et rapide, encore faut-il que l’équilibre des forces, et l’art militaire, le permettent. Les guerres européennes conduites entre les traités de Westphalie et la Révolution française aboutissent bien souvent à des paix de compromis plutôt qu’à des victoires nettes. En conférant alternativement un avantage à l’attaque et à la défense, les innovations technologiques ont affecté la capacité à conduire des guerres décisives. Si la forme défensive de la guerre est, au moins dans le combat terrestre, considérée comme supérieure, les développements dans le domaine de la puissance de feu ou du choc, de la mobilité (chemins de fer, motorisation, logistique, etc.), des communications, ou de l’observation, combinés à des adaptations doctrinales et organisationnelles, ont rendu possibles des opérations plus fluides et plus décisives, au milieu du XVe siècle, au XVIIIe siècle ou dans les années 1930 et 1940. À l’inverse, les forteresses médiévales, le tracé à l’italienne [19] et la létalité des armes à feu individuelles et collectives à partir de la fin du XIXe siècle ont comparativement réduit la capacité à obtenir la décision par les armes [20].

20L’avantage relatif à l’attaque, ou à la défense, est toutefois difficile à mesurer, et la période actuelle ne fait pas exception. En première analyse, l’essor de la létalité des munitions classiques depuis les années 1970 et leur couplage à des réseaux de capteurs et à des systèmes de communication, ont été perçus comme conférant un avantage écrasant à l’attaquant, illustré par exemple par les opérations classiques rapides et victorieuses contre l’Irak en 1991 et 2003. Pourtant, ces succès semblent moins avoir été le fait d’un avantage à l’offensive que d’un équilibre des forces général qui avantageait de manière écrasante les adversaires de Saddam Hussein, ainsi que des choix erronés de ce dernier. En réalité, la démocratisation relative des moyens d’observation et de frappe classique à longue distance peut rétablir un équilibre et renforcer la défensive aux niveaux non seulement tactique, mais aussi opératif. On ne sait aujourd’hui si cette tendance aboutira à des situations de « blocage opératif » réduisant la probabilité de victoires décisives ou si, au contraire, elle favorisera des décisions rapides fondées sur le choc préemptif.

21Les effets des transformations normatives sont tout aussi hétérogènes que ceux des développements technologiques, et affectent fortement certaines parties du monde tout en en délaissant d’autres. En Occident, en Europe en particulier, la fin de la guerre froide a été suivie d’une accélération du processus de distanciation vis-à-vis de la guerre, et de rejet de la force comme moyen de règlement des différends [21]. L’adhésion à la Charte des Nations unies et à ses aspirations n’a anéanti ni l’efficacité militaire des États ni leur aptitude à remporter des victoires décisives – Israël en 1967, le Royaume-Uni en 1982, la coalition libérant le Koweït en 1991 en témoignent. Toutefois, sauf dans des contextes de menace sur des intérêts vitaux, une distanciation trop grande vis-à-vis de la guerre affecte de multiples manières (déclin budgétaire et capacitaire, règles d’engagement restrictives jusqu’à l’absurde, etc.) aussi bien la capacité à emporter la décision par les armes que la production, en appui au résultat des opérations, d’un discours pouvant marquer de manière durable les perceptions de l’acteur défait comme celles des observateurs. Dans un article polémique, Edward Luttwak critiquait ainsi en 1982 la propension du camp occidental à négliger la valeur de ses propres succès : la guerre étant inacceptable, la victoire ne saurait être qu’une coûteuse futilité [22].

22Pour autant, l’environnement normatif ne joue pas seulement au détriment du caractère décisif du recours aux armes. Malgré les contraintes qu’elle induit sur l’action militaire, l’importance accordée à la moralité de la guerre et dans la guerre peut être déterminante pour limiter l’intensité d’un conflit, le déchaînement de la violence contre les prisonniers ou les civils, et réduire les chances de se heurter, au sein des populations locales, à une opposition massive inscrivant l’affrontement dans le temps long [23]. Le respect de principes éthiques et de règles du jus in bello est une contrainte dont les belligérants étatiques ou non-étatiques s’accommodent de manière très inégale – ce que la guerre en Syrie rappelle encore quotidiennement –, mais qui peut se muer en avantage stratégique pour ceux qui s’y soumettent [24].

L’âge nucléaire : la victoire insensée ?

23L’apparition de l’arme nucléaire ouvre une ère dans laquelle le sens même de l’action militaire est, initialement au moins, mis en doute. La puissance destructrice de l’atome impose aux décideurs de réévaluer la pertinence de la recherche de la victoire comme fondement de toute stratégie [25]. La menace d’escalade nucléaire canalise l’emploi de la violence, impose une forme de retenue, dans les objectifs poursuivis comme dans les pratiques. Le risque de représailles réduit l’aptitude à prendre un avantage décisif sur un possesseur de l’arme nucléaire, en contraignant l’intensité des opérations classiques, et interdit d’exercer sur lui une pression maximale puisqu’on ne saurait « se permettre de [le] pousser au désespoir [26] ».

24De manière plus fondamentale encore, la perspective d’un emploi du feu nucléaire semble faire voler en éclat la stratégie comme construction rationnelle, comme projet raisonné permettant d’atteindre un objectif politique autre qu’un anéantissement mutuel. Après que le risque d’emploi de l’ « arme absolue » se soit concrétisé dans les crises des années 1950 et 1960, la prise de conscience de la nature particulière de l’arme atomique amène à rejeter l’idée que la victoire aurait encore un sens dans un monde dévasté par les frappes nucléaires [27].

25Pourtant, même à l’âge nucléaire, la victoire doit rester un but légitime et pertinent de la stratégie. Colin Gray soutient ainsi dès la fin des années 1970 que la dissuasion n’est pas en soi un objectif suffisant : la victoire doit rester un objectif, en complément de la dissuasion et en cas d’échec de celle-ci. Sans pour autant envisager une « victoire nucléaire », des victoires limitées restent possibles sous le seuil nucléaire [28]. Formuler sa propre théorie de la victoire, empêcher l’adversaire d’en concevoir une, pourrait crédibiliser la posture de dissuasion américaine, en combinant pour l’adversaire la menace de coûts inacceptables et l’impossibilité d’atteindre son objectif. Bien que ces conceptions aient perdu en visibilité à la fin de la guerre froide, elles ont refait leur apparition aux États-Unis depuis 2014, moins sous la forme d’une recommandation que de la crainte de voir la Russie et la Corée du Nord formuler des théories de la victoire adossées à la menace d’escalade nucléaire [29].

Stratégies irrégulières : la victoire impossible ?

26Il existe plusieurs liens entre la rareté des exemples récents de victoire et la prédominance des conflits dits « asymétriques », ou des modes de guerre irréguliers comme la guérilla ou le terrorisme ces dernières décennies. Qu’elle reflète l’existence de rapports de force très déséquilibrés entre belligérants (Irak après 2003), ou l’effondrement du pouvoir régalien et la contestation du monopole étatique de la violence (Libye depuis 2011), l’omniprésence du mode de guerre irrégulier est peu contestable. Or, cette irrégularité est avant tout mise au service de stratégies indirectes, c’est-à-dire misant sur l’usure de la volonté politique adverse plutôt que sur la victoire militaire. Si les belligérants en situation d’infériorité militaire recourent en priorité à la stratégie indirecte et au mode de guerre irrégulier, c’est précisément parce qu’un succès rapide et décisif des armes leur est inaccessible, ce qui les amène à privilégier une stratégie misant sur le temps long.

27À bien des égards, la conception classique de la victoire est décalée par rapport aux conditions dans lesquelles la fin des hostilités survient dans une guerre irrégulière ou asymétrique. De fait, les combats face aux adversaires irréguliers sont si morcelés spatialement et temporellement qu’ils sont peu aptes à produire une décision chez des acteurs particulièrement à même de refuser l’affrontement et de privilégier l’action politicoidéologique jusqu’à un moment jugé plus favorable. Si le sort de la guerre civile chinoise se décide par les armes en 1948-1949, c’est précisément parce que la durée du conflit a permis aux forces communistes de renverser le rapport de force face aux nationalistes, et d’abandonner leur stratégie indirecte fondée sur l’évitement et le harcèlement.

28La nature irrégulière des adversaires et leur organisation posent ainsi de multiples défis. Si l’État moderne ne constitue jamais un ensemble parfaitement monolithique, il l’est pourtant bien plus que des mouvements insurgés, ou des groupes terroristes multiples, ni unis par une structure de commandement politicomilitaire, ni nécessairement mûs par les mêmes ambitions. Le morcellement parfois extrême propre aux acteurs irréguliers – structuration en unités autonomes, allégeances complexes, alliances de circonstances entre groupes, etc. –, constitue un obstacle à une victoire par les armes, qui ne saurait affecter l’ensemble des forces adverses comme l’ont longtemps illustré les opérations en Afghanistan et en Irak. Ce morcellement représente en outre un handicap pour la conduite du dialogue politique devant mettre fin à la guerre, puisqu’il réduit la capacité à produire un discours de victoire trouvant, auprès de chaque partie adverse, l’équilibre entre peur, contrainte et promesses.

D’une méprise à l’autre

29Sur un strict plan conceptuel, une conception de la victoire trop étriquée est susceptible d’introduire des biais analytiques lourds de conséquence. L’importance accordée par les stratégistes à la victoire cache ainsi trop souvent une vision de la guerre qui pèche par sa linéarité et une approche trop binaire de la dualité entre guerre et politique. Dans cette conception, la victoire marquerait la fin de la guerre, et possiblement de la confrontation l’ayant provoquée, une rupture nette entre un état de tension et un état de paix. Or, « la guerre n’est jamais quelque chose d’absolu dans son résultat [30] ». Une victoire par les armes, aussi complète soit-elle, ne signifie pas nécessairement la fin d’un conflit : sauf lorsqu’elle voit l’écrasement d’une partie, elle ne marque qu’une étape dans une relation politique entre deux camps.

30L’apaisement des tensions peut être de très courte durée si le vainqueur ne parvient pas à réorienter la relation vers une coexistence mutuellement profitable et disposant de soutiens solides au sein même des populations et des structures étatiques défaites. Napoléon Bonaparte, Adolf Hitler ou George W. Bush, parmi d’autres, en ont à divers degrés fait l’expérience. Le contexte politique, économique et social, les rapports de force, les rivalités ayant donné naissance à la guerre peuvent perdurer en dépit de la victoire et ressurgir dans des délais parfois brefs, avec l’ouverture d’un nouveau front ou l’adaptation des modes d’action. Le calcul ou la faiblesse peuvent amener un acteur à offrir à son adversaire une victoire qu’il ne conçoit en réalité que comme un mal transitoire.

31Il est en outre aisé pour un belligérant qui a pris l’ascendant par la force de se méprendre sur les causes de la raréfaction des violences sur le théâtre d’opérations : que l’ambition adverse ait été profondément altérée par le fracas des armes, ou que seule sa capacité d’action ait été temporairement subjuguée, déclarer la victoire acquise est d’autant plus tentant du point de vue des dirigeants que cela participe de l’affirmation de la supériorité et de sa reconnaissance par la ou les parties défaites, façonnant ainsi les perceptions des belligérants comme des spectateurs.

32Seul le tarissement progressif des éventuelles sources de résistance adverses, au point de voir l’intensité des combats réduite à un niveau négligeable, permet de consolider une victoire. Mais l’aptitude à le faire dépend, en définitive, du degré de contrôle et d’implication du vainqueur dans la guerre et dans le règlement du conflit. La prédominance des guerres limitées ces dernières décennies ne doit pas masquer la persistance d’une forte asymétrie des enjeux entre belligérants, particulièrement lorsque le conflit voit l’intervention d’une puissance extérieure dans une guerre civile ou face à un adversaire régional [31]. La nature limitée des enjeux amène logiquement un État à adapter les risques qu’il prendra, son exposition politique, et les moyens militaires mis au service de l’objectif poursuivi. Les contraintes qui en découlent sur les opérations peuvent être anticipées et prises en compte, mais jouent un rôle plus grand encore à la fin du conflit, lorsqu’il s’agit de convertir les succès militaires en effets politiques durables.

33Achever une guerre limitée dans le contexte d’une intervention extérieure signifie n’exercer qu’un contrôle très relatif sur certains ressorts du conflit initial – existence d’institutions étatiques fortes, représentatives et responsables, répartition des richesses, cristallisations identitaires, idéologisation des masses, etc. En dépit de discours politiques cédant à l’hyperbole, en inscrivant leur action dans un conflit de valeurs et de civilisations ou une « guerre globale contre le terrorisme », la nature limitée des buts poursuivis et de l’implication nationale dans une intervention extérieure finit toujours par rejaillir, lorsqu’à domicile les populations rejettent subitement les sacrifices exigés pour espérer mettre un terme à un conflit prolongé [32].

34 ***

35En raison de facteurs normatifs, stratégiques et politiques, la capacité à convertir un succès par les armes en effets politiques durables s’est amenuisée au cours des dernières décennies. Rien n’indique qu’une inversion nette de tendance se prépare. Bien au contraire, tandis que réapparaît la logique du rapport de force entre puissances majeures, l’Occident pourrait à la fois être plus contraint que ses adversaires sur un plan normatif, et perdre une partie de sa marge de supériorité militaire du fait des progrès adverses.

36Toute conception de la victoire doit s’adapter à l’esprit du temps et aux types de guerres conduites. La prédominance des guerres limitées impose certes d’adapter nos objectifs, nos discours, nos pratiques, mais aussi et peut-être d’abord nos attentes quant aux types de résultats politiques qui peuvent être escomptés de succès militaires, et à leur durée. La victoire au XXIe siècle ne saurait correspondre au seul modèle d’une furie de destruction suivie d’une paix fondée sur la domination écrasante. Ce schéma peut cependant toujours séduire des États contestant les fondements d’un ordre international basé sur le respect de la règle de droit.

37Ce constat ne signifie pas que l’emploi de la force armée serait nécessairement vain. La guerre reste un duel, et si atteindre son objectif politique n’est ni suffisant ni même nécessaire pour produire une victoire, cela doit rester le principal critère pour évaluer l’utilité de la force. Dresser un constat d’impuissance militaire sur la base de l’incapacité des États occidentaux à atteindre des résultats durables en Afghanistan, dans le Levant ou dans le Sahel, revient à se méprendre profondément sur ce qu’est la puissance militaire, dont la première vocation est défensive.

38Une focalisation excessive sur le caractère plus ou moins durable des succès des interventions extérieures conduit à perdre de vue d’autres considérations tout aussi importantes : pour ceux qui cherchent à préserver le statu quo, la victoire consiste d’abord à refuser à un adversaire révisionniste d’atteindre les buts qu’il s’est fixés. La dissuasion y contribue de manière centrale, en décourageant dès le temps de paix des agresseurs potentiels de s’en prendre à nos intérêts vitaux. Même lors des guerres que la dissuasion n’a su prévenir, des résultats rétrospectivement présentés – à tort ou à raison – comme indécis ont permis d’éviter des situations bien pires [33], que l’on pense à la Première Guerre mondiale ou au coup d’arrêt donné par les forces françaises aux groupes armés djihadistes descendant du Nord-Mali en janvier 2013.

39C’est là sans doute le double point de départ d’une réflexion sur la nature de la victoire que la France devrait viser face à Daech ou à tout adversaire terroriste futur : la première des priorités face au terrorisme est d’empêcher l’adversaire d’atteindre l’objectif qu’il se fixe lorsqu’il cible la France – ce qui implique de bien lire ses intentions [34]. La seconde est de lui refuser la capacité à monter en puissance par la conquête non seulement de territoires, mais également des cœurs et des esprits des populations. Pour y parvenir, la force armée joue un rôle irremplaçable, mais dont les limites doivent être appréhendées avec justesse et modestie.


Mots-clés éditeurs : Conflits irréguliers, Stratégie, Guerre, Forces armées

Date de mise en ligne : 14/09/2018

https://doi.org/10.3917/pe.183.0025

Notes

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  • [7]
    On parlera ainsi moins de victoire que de succès pour les niveaux tactique et opératif.
  • [8]
    A. Beaufre, Introduction à la stratégie, op. cit., p. 35.
  • [9]
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  • [10]
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  • [18]
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  • [19]
    Type de fortification apparu à partir du XVe siècle afin de répondre aux progrès de l’artillerie.
  • [20]
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  • [23]
    Sur le lien entre victoire et moralité, voir R. Mandel, The Meaning of Military Victory, Boulder, Lynne Rienner, 2006, p. 53-70.
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  • [27]
    Ronald Reagan prononçait ainsi dans son discours sur l’état de l’Union de 1984 une formule toujours utilisée aujourd’hui : « Une guerre nucléaire ne peut être gagnée et ne devrait jamais être livrée. »
  • [28]
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  • [30]
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  • [34]
    S. Caplain, « Penser son ennemi. Modélisations de l’adversaire dans les forces armées », Focus stratégique, Ifri, n° 82, juillet 2018, disponible sur : <www.ifri.org>.

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