Couverture de PE_174

Article de revue

Sauver l’ordre libéral de lui-même

Pages 75 à 87

Notes

  • [1]
    G. J. Ikenberry, « The Illusion of Geopolitics : The Enduring Power of the Liberal Order », Foreign Affairs, mai-juin 2014, disponible sur : <www.foreignaffairs.com>.
  • [2]
    A. Tangel, « Trade’s Test Case: Your Washing Machine », The Wall Street Journal, 4 octobre 2017, disponible sur : <www.wsj.com>.
  • [3]
    D. Rodrik, « Why Do More Open Economies Have Bigger Governments ? », Journal of Political Economy, n° 106, 1998, p. 997-1032.
  • [4]
    M. Munro et C. Hendrickson, « Disrupting the Conservative Platform », The Boston Review, 5 octobre 2017, disponible sur : <http://bostonreview.net>.
  • [5]
    J. Weissmann, « Waking the Sleeping Dragon », Slate, 28 septembre 2016, disponible sur : <www.slate.com>.
  • [6]
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  • [7]
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  • [9]
    J. Zong et J. Batalova, « Frequently Requested Statistics on Immigrants and Immigration in the United States », Migration Policy Institute, 8 mars 2017 et « The Facts on Immigration Today : 2017 Edition », Center for American Progress, 20 avril 2017.
  • [10]
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  • [11]
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  • [14]
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  • [17]
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  • [22]
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    B. Schwarz, « Unmaking England », The American Conservative, 11 janvier 2016, disponible sur : <www.theamericanconservative.com>.
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    J. Hill, « German Election: Why so Many Voters in the East Chose AfD », BBC, 26 septembre 2017, disponible sur : <www.bbc.com>.
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  • [32]
    « Japan Grants Refugee Status to 28 out of over 10,000 Applicants », Mainichi Shimbun, 11 février 2017.
  • [33]
    J. McCurry, « Japan Says It Must Look after Its Own Before Allowing in Syrian Refugees », The Guardian, 30 septembre 2015, disponible sur : <www.theguardian.com>.
  • [34]
    Le renforcement de la participation des femmes à l’économie. (NdT.)
  • [35]
    « Japan: Improve Migrant Treatment, Accept Refugees », Human Rights Watch, 12 janvier 2017.
  • [36]
    J. Mischke et S. Saeed, « Leader Frauke Petry to Quit Alternative for Germany As More Splits Emerge », Politico, 26 septembre 2017, disponible sur : <www.politico.eu>.

1Le 9 novembre 2016 régnait au Dartmouth College un calme abasourdi. Pendant des mois, nous avions suivi avec amusement ou consternation déclarations et apparitions de Donald Trump, mais la conviction que son élection était impossible rassurait. Il venait pourtant d’être élu président des États-Unis. Le campus était en deuil. Pour beaucoup, ce jour signait l’arrêt de mort du rêve de l’ordre international libéral, que le candidat Trump promettait de démanteler : et depuis son entrée en fonction, il a de fait miné la confiance des alliés envers le leadership américain, retiré les États-Unis du Partenariat Trans-Pacifique (TPP), menacé de dénoncer l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) et l’accord de désarmement sur l’Iran.

2Si Trump est hostile à l’ordre international libéral, son accession au pouvoir n’est pas la cause mais le symptôme de ses difficultés. La plus grande menace sur cet ordre vient de l’intérieur, et des peuples qu’il a, ces dernières décennies, divisés et montés les uns contre les autres.

L’ordre libéral : le coût du libre-échange

3L’ordre international libéral renvoie à un ensemble d’idées et d’institutions nées après la Seconde Guerre mondiale [1]. Le libre-échange et la libre circulation des flux de capitaux ont encouragé l’externalisation de la production. Une plus grande ouverture des frontières a permis de grands mouvements migratoires, en particulier du Sud vers le Nord. Cet ordre repose aussi sur un ensemble de croyances, de valeurs universelles, et d’institutions, qui négocient des normes en matière de commerce, de finance et bien d’autres domaines, et relient ces idées entre elles.

4Ayant porté ses fruits, cet ordre s’est étendu. L’accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT) de 1947 a progressivement fait tomber les barrières commerciales. Après la guerre froide, les Alliés ont remodelé l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (OTAN) pour en faire une communauté de sécurité libérale englobant jusqu’à l’Europe de l’Est. Les traités protégeant les droits de l’homme ont évolué vers une « responsabilité de protéger » censée justifier l’intervention militaire dans des pays souverains. En Europe, la Communauté européenne du charbon et de l’acier (CECA) de 1951 s’est transformée en union douanière et monétaire, dotée d’une Cour de justice, et en chef de file en matière de protection de l’environnement et des droits de l’homme. En 1995, plusieurs membres de l’Union européenne (UE) ont, avec l’accord de Schengen, ouvert leurs frontières et adopté une politique d’asile commune.

5À Clyde (Ohio), 3 000 employés d’une usine de Whirlpool produisent 20 000 machines à laver par jour. Whirlpool est le plus grand employeur du comté. Ses employés fréquentent les restaurants locaux, assistent aux offices de St. Mary et de la First Presbyterian, leurs impôts financent l’entretien des parcs et des écoles. Whirlpool a demandé à l’administration Trump des mesures de protection commerciale, faisant valoir que son concurrent Samsung se livrait au dumping. Le PDG de Whirlpool affirme pouvoir créer plus d’un millier d’emplois si les règles du jeu sont respectées [2]. Samsung reproche en retour à Whirlpool de ne pas savoir innover et s’adapter aux attentes des consommateurs. L’une des avocates de Samsung compare la situation à celle créée par la concurrence japonaise dans le secteur automobile. « Les constructeurs américains sont devenus beaucoup plus compétitifs, les constructeurs étrangers se sont mis à produire aux États-Unis, créant ainsi des milliers d’emplois américains, et les consommateurs ont plus de choix et les produits sont de meilleure qualité. » Elle conclut : « En fin de compte, nous sommes tous gagnants. »

6Les défenseurs de l’ordre libéral ont compris les avantages du libre-échange. Les institutions multilatérales ont éliminé les obstacles à la circulation des capitaux, permettant aux entreprises de délocaliser leurs usines vers les pays en développement dont les coûts de main-d’œuvre et autres coûts d’exploitation sont réduits. Des tarifs douaniers bas (négociés dans des organisations telles que le GATT, puis l’Organisation mondiale du commerce – OMC) ont permis d’exporter dans le monde entier. Des innovations dans le transport (la conteneurisation) ont abaissé les coûts de fret. D’où une chute des prix des biens de consommation. Les consommateurs en ont bénéficié, et nombre de pays ont pu sortir de la pauvreté.

7Nul n’ignorait pourtant que le libre-échange avait un prix. Pendant des siècles, la classe ouvrière avait bénéficié d’un avantage géographique : les entreprises implantaient leurs usines à proximité des principaux marchés. Les travailleurs locaux étaient mieux rémunérés (avec l’aide de la syndicalisation). La mondialisation a balayé cet avantage. On pensait pourtant que les travailleurs licenciés profiteraient de biens de consommation moins chers, et qu’ils abandonneraient industries et espaces défaillants. Dans ce scénario, l’État-providence venait en aide aux travailleurs frappés par les délocalisations [3].

8Que s’est-il passé ? Beaucoup de pays ont bénéficié de la mondialisation. Toutefois, aux États-Unis au moins, l’État n’a pas respecté le pacte social du libre-échange, et les travailleurs ont eu bien plus de difficultés que prévu à s’adapter aux changements. Nombre de pays européens ont mis en place des programmes protégeant les travailleurs des effets des bouleversements commerciaux. Aux États-Unis, la libéralisation des échanges des dernières décennies s’est au contraire doublée d’une baisse des impôts et d’un recul des prestations sociales. L’un des principaux objectifs de Ronald Reagan était de réduire l’aide à l’ajustement commercial. Le Parti républicain considérait les programmes d’aide sociale comme hostiles à l’esprit d’entreprise et à l’innovation [4]. L’ironie est cruelle pour les libéraux : les Républicains ont abandonné les travailleurs américains, puis ont fait campagne et remporté les élections de 2016 sur un programme populiste soutenant que le monde politique avait abandonné ces mêmes travailleurs…

9Certains ont été particulièrement frappés par les effets du libre-échange avec la Chine. En 2001, Bill Clinton se félicitait de l’entrée de la Chine à l’OMC. De concert avec les élites internationalistes libérales, il avait un discours rassurant : nouer des rapports avec la Chine ferait émerger une classe moyenne chinoise qui exigerait la libéralisation. Les économistes prédisaient des avantages conséquents pour l’économie américaine, tandis que les coûts pour les travailleurs dont les emplois seraient délocalisés resteraient modestes [5].

10Il n’en fut pas ainsi. Certes, l’automatisation a constitué un facteur important. Mais les économistes n’en estiment pas moins que le « choc chinois » a coûté plus de 2 millions d’emplois à l’économie américaine : « Le consensus selon lequel le commerce pourrait en théorie modifier fortement la géographie de l’emploi mais s’avérer relativement bénin dans la pratique n’a pas résisté à ces nouveaux développements, pas plus que la croyance qui veut que l’ajustement commercial se fasse relativement sans friction [6]. »

11« Friction » est un euphémisme. Les fermetures d’usines se répercutent sur l’économie locale ; le recul des recettes fiscales signifie moins de ressources pour les écoles, les pompiers, la police, les services locaux. L’emploi perdu est souvent remplacé par un travail temporaire, ou plusieurs emplois à temps partiel. Jusqu’à récemment, la perte d’emploi s’accompagnait également souvent d’une perte de l’assurance santé. La perte de statut social générant dépression, toxicomanie, alcoolisme et suicide dans les groupes les plus durement frappés [7]. La « friction » s’est avérée une vraie catastrophe. Et quand un candidat a parlé à ces travailleurs de leur souffrance, et a fustigé les dirigeants américains pour avoir négocié de « mauvais accords », ils l’ont écouté et applaudi.

Frontières ouvertes et migrations

12À Saint-Denis (France), l’écrivain Ben Judah se promène dans une banlieue transformée par l’immigration, et parle à une femme sortant d’une église catholique : « L’immigration a tout changé », lui dit-elle. « Les gens ont changé. Les Français ont tous quitté Saint-Denis. Regardez autour de vous. » Judah note que « depuis 2012, l’actualité est régulièrement marquée par des coups de couteau, des fusillades et des attaques à la voiture bélier ; voire ensanglantée par des massacres tels que Charlie Hebdo et le Bataclan [8] ». Les immigrants eux-mêmes sont mécontents des réglementations qui maintiennent parmi eux un taux de chômage élevé ; ils subissent des discriminations et des violences, un harcèlement policier.

13Les États-Unis et l’Europe ont connu de récentes vagues d’immigration massives. En 1970, le nombre d’immigrés aux États-Unis était de 9,6 millions (environ 5 % de la population) ; en 2015, ce chiffre avait quadruplé pour atteindre 43,3 millions (13,5 %). Le nombre d’immigrés irréguliers sur le sol américain est passé de 3,5 millions en 1990 à environ 11 millions aujourd’hui [9]. L’Europe a également connu récemment « l’un des afflux les plus importants de migrants et de réfugiés de son histoire [10] ». Après 1997, le Royaume-Uni de Tony Blair a admis deux fois plus d’immigrés qu’au cours du demi-siècle précédent – dont de nombreux Européens de l’Est. L’Europe a accueilli des millions de migrants fuyant la pauvreté et les conflits (d’Afghanistan, d’Irak et de Syrie). En 2015, l’Allemagne a accueilli plus d’un million de migrants, soit près du double de l’année précédente. Pour la seule année 2015, la Suède (10 millions d’habitants) a admis 163 000 réfugiés.

14Les taux de criminalité nationaux restent généralement faibles. Mais les attentats et certains épisodes violents (comme les agressions sexuelles de Cologne à la Saint-Sylvestre 2016) nourrissent les inquiétudes. En Suède, « dans les banlieues de Stockholm, Göteborg et Malmö – les trois plus grandes villes du pays – les gangs s’affrontent, avec des fusillades, des voitures brûlent [11] ». Selon les données du Pew Research Center, une majorité d’Européens (76 % en Hongrie, 61 % en Allemagne, 52 % au Royaume-Uni) craignent que « l’arrivée de réfugiés n’augmente le nombre d’attentats dans [leur] pays [12] ».

15Les préoccupations sont également économiques. L’arrivée d’un grand nombre d’immigrants peu qualifiés tire les salaires vers le bas. Tandis que les partisans de l’ouverture soutiennent que les nouveaux venus créent des recettes fiscales, pour les opposants l’argument ne tient pas compte de la demande croissante de services sociaux et de la pression que ces arrivées feront peser sur le système de santé et de retraite [13]. Pour Frank Field, député travailliste britannique, la Grande-Bretagne doit travailler avec l’Union européenne (UE) pour freiner l’immigration, « faute de quoi, nous nous engagerons dans une économie de la folie [14] ».

16Les Européens sont également préoccupés par l’intégration. Les plus optimistes pensent que les migrants s’installant dans un pays adhèrent à sa culture et à ses valeurs (ou se les approprieront avec le temps) ; qu’ils y prendront racine et lui apporteront leurs talents et leur énergie ; leurs cultures d’origine venant enrichir l’identité française, suédoise ou allemande.

17On connaît la phrase d’Angela Merkel : le multiculturalisme aurait « complètement échoué » en Allemagne. Au Royaume-Uni, remarque le commentateur Benjamin Schwarz, des enquêtes montrent que les deux tiers des musulmans britanniques n’entretiennent de rapports sociaux qu’avec d’autres musulmans. Un rapport du Home Office a étudié les villes industrielles du nord, dont certains quartiers présentent une forte dominance pakistanaise et bengalie. On y constate l’existence « de dispositifs éducatifs, d’organismes de quartier, d’associations, d’emplois, de lieux de culte, de réseaux linguistiques, sociaux et culturels séparés ; ce qui signifie que de nombreuses communautés fonctionnent sur la base d’une série de vies parallèles [15] ».

18Les plus critiques redoutent en outre qu’en lieu et place d’une intégration réciproquement bénéfique, les immigrés n’importent des valeurs menaçant celles du pays d’accueil. Des sondages révèlent que 28 % des musulmans britanniques interrogés disent souhaiter que le Royaume-Uni devienne un État islamique fondamentaliste. La moitié estiment que l’homosexualité devrait être illégale, et un tiers se déclarent favorable à la légalisation de la polygamie pour les hommes musulmans. 37 % d’entre eux pensent que les juifs britanniques sont « une cible légitime dans le cadre de la lutte pour la justice au Moyen-Orient ». Environ un quart à un tiers sont convaincus que les attentats du 11 Septembre ont été perpétrés à l’instigation des gouvernements américain et israélien, et que les services de sécurité britanniques ont orchestré les attentats de Londres du 7 juillet 2005 [16]. Parmi les musulmans français, on relève également « une importante minorité qui nourrit des vues profondément conservatrices voire parfois hostiles vis-à-vis de l’État et de la société française. Plus d’un quart d’entre eux considèrent notamment que la charia prévaut sur les lois de la République [17] ».

19En Europe et aux États-Unis, ces préoccupations ont déclenché des contrecoups. Donald Trump l’a remporté après une campagne articulée autour de la promesse de construire un « grand et beau mur ». Des partis très à droite ont gagné en influence en France et en Suède. Aux récentes élections allemandes, le parti populiste Alternative für Deutschland (AfD), que beaucoup voient comme antisémite et anti-islamique, a fait son entrée au Bundestag. Dans les pays d’Europe centrale – les élections autrichiennes l’ont récemment montré –, « le sentiment politique dominant s’éloigne de plus en plus des idéaux libéraux et d’intégration de l’Union européenne, voire les méprise [18] ».

Élites et perdants de la mondialisation

20À Primrose Hill (Londres), des garçons – Américains, Britanniques, Japonais, Européens – jouent au foot. Alors que l’entraînement s’achève, les pères (et parfois les mères) arrivent et bavardent. La plupart d’entre eux travaillent dans la finance, certains dans la haute technologie ou le divertissement. Parmi eux, il y a parfois un journaliste égaré. La vie est belle. Nos enfants vont dans les mêmes écoles et fréquentent les mêmes colonies de vacances en Nouvelle-Angleterre. Nous avons étudié dans les mêmes universités. Mon amie Helen a fait Berkeley/Yale/Chicago. Allons boire un café quand vous rentrerez de Zurich et moi de Dubaï. Ce sont de bons parents, intelligents, ouverts sur le monde : le Brexit les effare, Trump les consterne.

21Ces gens sont les gagnants de l’ordre libéral international. La mondialisation a fait chuter leurs coûts de production, exploser leurs marchés, monter en flèche les profits de leurs secteurs d’activité. Depuis les années 1980, les revenus des 1 % de ménages américains les plus riches ont progressé de 275 % [19]. « Dans une économie mondialisée, les gens dotés de compétences rares […], que ce soit dans les services financiers, la technologie, le divertissement ou les médias, ont un plus grand rôle à jouer et sont récompensés en conséquence [20]. » Les universités peuvent être florissantes, leur propriété intellectuelle intéressant un marché plus important que jamais. À l’inverse, depuis 2000 le revenu réel de la classe moyenne américaine a baissé de 7,5 %. Les Américains les plus pauvres sont encore plus mal lotis : les revenus réels du quatrième quintile ont chuté de 10 %, et le quintile inférieur, le plus durement touché, enregistre un effondrement de 16 % [21].

22À l’université, les élites ont étudié l’ordre libéral éclairé qui a émergé du chaos de la dépression économique et de la guerre. On nous a enseigné les avantages du libre-échange, et nous l’avons défendu pour notre pays parce qu’on nous a dit qu’une marée montante portait tous les bateaux. Nous avons soutenu l’ordre libéral parce que nous étions intimement convaincus que la propagation de la liberté et des droits de l’homme bénéficiait à tous. Nous avons applaudi la diversité et encouragé le remplacement de la pensée nationaliste par une pensée cosmopolite. Au fil du temps, nous nous sommes isolés, toisant avec dédain les sceptiques du libéralisme.

23L’enthousiasme des élites cosmopolites à l’endroit de l’immigration est peut-être la preuve la plus patente de l’écart qui les sépare de l’opinion générale. Comme le souligne Ross Douthat, la plupart des électeurs américains veulent soit réduire l’immigration (35 %), soit la maintenir au même niveau (38 %). Pourtant, les dirigeants américains ont proposé des amnisties pour les sans-papiers et ont recommandé d’augmenter le nombre d’immigrants peu qualifiés [22]. Les élites britanniques ont été encore plus sourdes à l’opinion. Schwarz note que « les professions intellectuelles supérieures profitent des avantages apportés en Grande-Bretagne par l’immigration de masse tout en étant largement à l’abri de ses répercussions. La rapide transformation du paysage des quartiers traditionnels, la pression sur les salaires ou la concurrence féroce pour accéder aux services publics et au logement par exemple, sont supportées presque exclusivement par la classe moyenne inférieure et la classe ouvrière ». Et « pas moins de 71 % de la population en âge de voter pense que l’immigration est le problème le plus urgent auquel le pays est confronté, 76 % souhaitant une réduction de l’immigration [23]. » Dominic Sandbrook souligne « [qu’] il n’y a pas d’autre exemple de sujet sur lequel la classe politique ait aussi systématiquement ignoré la volonté du peuple britannique [24] ».

24Ceux qui préfèrent le protectionnisme commercial, déplorent les élites, ne comprennent pas les marées montantes et les bateaux. Et les opposants à l’immigration sont des racistes. Pour le député Clive Lewis, l’opposition britannique à la migration « se résume au racisme. En fin de compte, il s’agit de racisme » [25]. En Suède, note Fraser Nelson, les débats sur l’immigration se limitent à un « couloir d’opinion » : « Ceux qui s’en écartent et parlent des problèmes d’immigration courent le risque d’être accusés d’intolérance [26]. » Ignorées et méprisées des cosmopolites, les masses ont répondu avec rage : Trump a gagné sur un discours liguant « les “patriotes nationalistes” contre les “vendus de la mondialisation” [27] », et le Royaume-Uni a voté pour le Brexit. Comme l’explique la politologue Leslie Vinjamuri, les partisans du Leave ont semblé plus remontés contre Londres que contre Bruxelles. Michael Gove, militant du Leave, résume : « Les gens de ce pays en ont assez des experts [28]. » En Allemagne, les électeurs ont voté AfD parce qu’ils « sont en colère. Leur colère est dirigée contre les partis politiques dominants qui leur donnent l’impression de ne pas se soucier d’eux [29] ». Il ne s’agit pas simplement d’électeurs marquant un désaccord avec leurs dirigeants ; mais d’électeurs pensant que ces dirigeants ne les représentent plus, qu’ils donnent la priorité à l’ordre libéral plutôt qu’à leurs propres compatriotes.

25La propagation du libéralisme joue depuis plusieurs siècles un rôle de moteur du progrès humain. Son renversement serait sans nul doute désastreux. « Des mesures anti-mondialisation à grande échelle seraient extrêmement dommageables. Certaines entreprises protégées et leurs travailleurs pourraient y gagner, mais d’autres entreprises, privées d’accès aux importations à bas prix, seraient moins rentables. Cela entraînerait un recul de la production qui se traduirait par des licenciements. Si ces entreprises faisaient au contraire le choix de répercuter l’augmentation des coûts des intrants sur les prix, ce sont les consommateurs qui en subiraient les conséquences [30]. » Le protectionnisme et les représailles réduiraient la prospérité et accroîtraient la concurrence entre les pays. Cette tendance serait particulièrement dangereuse compte tenu des rapports de concurrence entre les États-Unis et une Chine en plein essor – une rivalité jusqu’à présent tempérée par l’interdépendance économique entre les deux pays.

26Heureusement, la réaction contre l’ordre libéral porte moins sur le libéralisme que sur « l’ordre » lui-même, c’est-à-dire l’ensemble des règles et des normes structurant l’expression du libéralisme. Au fil du temps, cet ordre particulier a rassemblé de nombreuses doctrines libérales – libre circulation des biens, libre circulation des personnes, recul de la souveraineté – et a imposé leur acceptation. Face aux oppositions, les responsables politiques doivent désormais permettre aux pays de choisir les éléments acceptables par leurs populations. Il est entendu que pour participer au volet « libre-échange » du projet, les pays doivent ouvrir leurs marchés aux importations. Mais l’adoption du libre-échange n’exige pas nécessairement que les sociétés acceptent d’autres aspects, en particulier l’ouverture à l’immigration. Les pays qui veulent accueillir les réfugiés devraient être en mesure de le faire mais, on l’a compris, de nombreux pays européens n’acceptent pas qu’on le leur impose à l’échelle de l’Union européenne.

Sauver les nations ?

27À Toranomon (Tokyo), dîner après une longue conférence sur la politique étrangère japonaise. D’invisibles serveurs ont disposé avec art des petites bouchées sur des morceaux de bois patiné. La rumeur d’une cascade chante dans le jardin. Les collègues américains et européens, professeurs d’université eux aussi, tancent nos hôtes sur le refus de Tokyo d’accueillir des réfugiés syriens. Un diplomate rappelle avec tact que l’aide du Japon aux réfugiés est la deuxième au monde après celle des États-Unis ; il récolte un sermon sur les droits de l’homme et le devoir de chacun de prendre sa part. Le haut fonctionnaire qui nous accueille écoute attentivement mais ses yeux sont las : il est lui aussi partagé.

28Les Japonais ont adopté, après la Seconde Guerre mondiale, les principes de la libre concurrence et ont fait de leur entrée dans le régime commercial et financier libéral le moteur du relèvement du pays. Leurs conglomérats ont donné au pays une place centrale dans la finance, l’industrie et l’innovation mondiales. Aujourd’hui, les Japonais figurent parmi les peuples les plus libres, en meilleure santé et les plus riches du monde. Le pays prospérant, son peuple a généreusement donné et participé à la gouvernance de l’ordre libéral. Ce libéralisme a certes transformé le Japon, mais cette transformation a toujours obéi aux conditions de Tokyo qui, sur le menu libéral, a toujours commandé à la carte. Le modèle économique japonais a, par exemple, régulièrement suscité la controverse pour son adoption de principes profondément mercantilistes : protection des industries naissantes, subventions et capitalisation par l’État d’industries privilégiées. Alors que les partenaires libéraux du Japon sont aux prises avec des révolutions populistes, le Japon reste calme. Pourquoi ?

29D’abord parce que les dirigeants japonais ont honoré le pacte social du libre-échange. À une époque d’ajustements structurels massifs liés au commerce et à l’automatisation, « le gouvernement japonais s’est peu ou prou acheté une stabilité politique », écrit le commentateur Yoichi Funabashi. « Le budget de la sécurité sociale a presque doublé depuis 1990 [31]. » En outre, alors que les élites japonaises adoptaient le projet international libéral, les préoccupations nationales restaient prioritaires. L’inégalité pose moins problème au Japon. Il n’y a pas de « Japon profond » considéré avec condescendance par les élites. Il n’y a pas non plus d’affrontement entre « vieux » et « nouveau » Japon. En fait, comme le souligne Funabashi, le système politique japonais donne aux électeurs ruraux (du « vieux Japon ») un pouvoir politique disproportionné.

30Les élites cosmopolites d’Europe et des États-Unis ont en outre ignoré la volonté populaire de freiner l’immigration, alors qu’au Japon le scepticisme de l’opinion s’est traduit en politique nationale. Des lois migratoires strictes imposent un seuil maximal de seulement 1,5 % de personnes nées à l’étranger (dont la plupart sont originaires de pays asiatiques proches linguistiquement et culturellement). Quant aux réfugiés, le Japon n’a accepté en 2016 que 28 réfugiés sur 11 000 demandes [32]. La culture japonaise est attachée à l’harmonie sociale. Les dirigeants craignent que les immigrants ne rencontrent des difficultés à s’intégrer, du fait du caractère unique de la culture japonaise et de la difficulté de la langue. Ces responsables savent que le faible taux de fécondité et le vieillissement de la population préfigurent une catastrophe démographique, ce qui n’a pas désarmé leur prudence vis-à-vis de la solution de l’immigration. Selon les termes du Premier ministre Shinzo Abe : « Je dirais que, avant d’accepter des immigrants ou des réfugiés, nous avons besoin de plus d’activités pour les femmes, les personnes âgées, et que nous devons élever notre taux de natalité [33]. »

31Les profonds obstacles structurels et culturels au changement ne devraient pas permettre aux « womenomics [34] » de résoudre les problèmes démographiques du Japon, du moins pas avant plusieurs décennies. Du cœur même du Japon, des voix cosmopolites s’élèvent pour défendre plus d’immigration. Kanae Doi, directrice de Human Rights Watch au Japon, affirme que le pays devrait accueillir davantage de réfugiés syriens : « Alors que le Japon est une démocratie solide en Asie, il ne fait pas preuve d’un leadership éthique international en matière de droits de l’homme [35]. » La politique japonaise pourrait donc évoluer vers plus de cosmopolitisme. Mais en attendant, le Japon offre un exemple prometteur de libéralisme à la carte, et d’un pays qui défend à la fois les valeurs libérales et le maintien de sa souveraineté.

32***

33Alors que les cosmopolites Américains faisaient le 9 novembre 2016 le deuil de l’ordre international libéral, ce dernier était déjà accablé du poids de ses propres ambitions. Trump et d’autres leaders nationalistes pourraient paradoxalement assurer la survie de cet ordre en jetant le discrédit sur le nationalisme. Marine Le Pen pourrait échouer à dissocier le Front national des opinions antisémites et racistes de son père. L’AfD allemand a emporté l’adhésion de nombreux électeurs modérés, séduits par son programme anti-cosmopolite mais qui ont néanmoins dû passer outre leur dégoût de son discours raciste et islamophobe. À mesure que le parti s’affermira, son aile extrémiste pourrait gagner du terrain et faire fuir les modérés qui se refusent (nonobstant leur colère contre les élites) à porter au pouvoir une extrême droite raciste [36].

34Aux États-Unis, les bévues et la toxicité de l’administration Trump pourraient entamer le soutien au programme nationaliste. Pour être juste, Trump a su identifier le marché pour son produit, qu’il l’a intelligemment développé, mis en avant et vendu (tout comme les steaks, les hôtels, les terrains de golf et les sacs à main d’Ivanka). Le nationalisme à la Trump est néanmoins mâtiné de racisme et de sexisme, ce qui a rebuté nombre d’électeurs qui auraient pu, sans cela, être des clients intéressés.

35Ne pas prendre au sérieux les idées qui sous-tendent cette révolution, ou d’autres phénomènes nationalistes ou populistes, ne conduirait qu’à nourrir une nouvelle vague de réactions, venant notamment d’une génération plus aguerrie qui pourrait faire peser une menace encore plus sérieuse sur le projet libéral. Après tout, peut-être Ivanka évincera-t-elle un jour (comme Marine Le Pen) son encombrant géniteur. En attendant, la meilleure façon pour l’ordre libéral d’assurer sa survie est d’écouter ceux qui le composent, et qui sont fatigués des élites qui en récoltent tous les fruits et les regardent de haut.


Mots-clés éditeurs : Migrations, États-Unis, Mondialisation, Ordre libéral

Date de mise en ligne : 13/12/2017

https://doi.org/10.3917/pe.174.0075

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