Agriculture, alimentation
Contester l’Europe agricole. La Confédération paysanne à l’épreuve de la PAC, Élise Roullaud, Presses universitaires de Lyon, 2017, 232 p.
1L’Europe est-elle un espace de représentation et d’action politique incontournable ? En prenant pour objet la Confédération paysanne et ses représentants nationaux, cet ouvrage analyse la manière dont un syndicat se saisit (ou non) de l’Europe pour en contester la politique. Grâce à une enquête qui mêle archives, entretiens approfondis, observations sur le terrain et traitement d’un questionnaire, l’auteur invite à une plongée dans le travail de production et de représentation des positionnements syndicaux face à un défi majeur : la politique agricole commune (PAC).
2En questionnant les conditions sociales du passage à l’Europe, l’étude déploie aussi une sociologie de l’européanisation et bat en brèche la fausse évidence d’une scène ouverte à la défense de tous les intérêts et s’imposant comme nouvelle opportunité politique. L’Europe n’est toutefois pas sans effet sur l’organisation syndicale : les débats internes sur la PAC révèlent les tensions relatives aux modalités d’action ainsi qu’un processus de spécialisation du travail militant.
Les prix agricoles. Nouveau dialogue sur le commerce des bleds, Jean-Marc Boussard, L’Harmattan, 2017, 194 p.
3Dans tous les systèmes économiques, les prix servent de messagers entre les producteurs et les consommateurs, informant les premiers des désirs des seconds, et ces derniers de la difficulté de produire. Cependant, ces fonctions ne sont pas assurées correctement toujours et partout. Dans le secteur agroalimentaire, qui est l’objet de ce livre, ni les consommateurs ni les producteurs ne peuvent facilement s’adapter aux variations de prix. Dans ces conditions, les équilibres de marché sont instables, comme le serait une bille à la pointe d’un crayon. Les prix trop fluctuants transmettent des messages brouillés. Les consommateurs pauvres souffrent inutilement (parfois, jusqu’à la mort !) sans que les riches puissent réellement en profiter.
4À partir d’un survol de l’histoire des politiques agricoles depuis le néolithique, et en se basant sur les leçons des modèles économétriques les plus récents, ce livre propose quelques solutions pour rationaliser le commerce de produits agricoles, sans rien perdre des avantages liés aux échanges, mais en évitant les gaspillages associés à l’instabilité des prix.
5Il intéressera les étudiants des écoles d’agronomie, d’abord, mais aussi les esprits éclairés dans le monde des organisations professionnelles agricoles, des ONG, du développement, et du journalisme.
Sociologie des systèmes alimentaires alternatifs. Une promesse de différence, Ronan Le Velly, Presses des mines, 2017, 200 p.
6Produire, échanger et consommer autrement ! Tel pourrait être le slogan du commerce équitable, de l’agriculture biologique ou des circuits courts de proximité, que la recherche nomme les « systèmes alimentaires alternatifs ». Dans la pratique, qu’en est-il ? Ne voit-on pas plutôt se développer des formes d’industrialisation de l’agriculture biologique ? Que penser de l’introduction de produits locaux ou équitables dans les offres des multinationales de l’agroalimentaire et de la distribution ? Les chercheurs ne devraient-ils pas écarter le terme d’« alternative » qui oppose de manière binaire les initiatives alternatives et les initiatives conventionnelles ?
7Issu d’un cheminement de recherche d’une quinzaine d’années, cet ouvrage apporte des réponses précises et étayées à ces interrogations. En s’appuyant sur la sociologie des agencements marchands issue de la théorie de l’acteur-réseau et sur la sociologie de l’action organisée de Reynaud ou Friedberg, l’auteur définit un cadre d’analyse permettant de rendre compte des projets qui inspirent les systèmes alimentaires alternatifs et des activités de régulation qui leur donnent vie. À travers de nombreuses études de cas, issues d’enquêtes de terrain menées sur le commerce équitable et les circuits courts de proximité, il donne à voir la « promesse de différence » motrice de ces démarches, les réorganisations engagées pour la mettre en action, et le caractère inégalement transformateur des agencements établis.
Transformations agricoles et agroalimentaires. Entre écologie et capitalisme, Gilles Allaire, Benoît Daviron (Eds), Quæ, 2017, 432 p.
8À l’heure des robots et du numérique, la terre (habitat, agriculture, paysage, planète) et la nourriture (du corps et de l’âme) sont parmi les préoccupations majeures dans les espaces médiatiques et politiques. Le pétrole et l’abondance qui l’a accompagné nous avaient fait oublier qu’elles sont au fondement des sociétés humaines. La « crise alimentaire » de 2008, qui a secoué plusieurs continents, a rappelé aux gouvernements l’enjeu de la sécurité alimentaire.
9Après des décennies d’excédents, de baisse du prix des produits agricoles de base, la question de la valeur de la terre et de l’agriculture est de retour. La question de la santé et celle des droits humains prennent une place élargie tant dans les politiques publiques que dans la production de normes alimentaires. Des mouvements sociaux transnationaux s’emparent de la question de l’avenir de l’agriculture et de l’alimentation, et de celle de la « bonne vie ».
10Pour contribuer à cette réflexion sur l’avenir de la terre et de la nourriture, cet ouvrage étudie la socialisation de l’agriculture, c’est-à-dire sa prise en charge tant par les politiques agricoles (essentiellement nationales) que par l’organisation des marchés dans un cadre national et international. Il le fait en prenant un large recul et mobilise trois temporalités. La première est celle de la planète. La seconde, celle des régimes métaboliques, façons dont l’humanité à différents stades de développement, mobilise matériaux et énergie. La troisième est celle du capitalisme, avec la succession de systèmes hégémoniques (ce qui n’exclut pas de multiples polarités).
11Cet ouvrage réunit des recherches récentes d’économistes, de sociologues, d’historiens et d’agronomes, de différents pays, recherches qui ont en commun de concerner la place de l’agriculture dans l’évolution des capitalismes.
Changement climatique
Globalising the climate. COP21 and the climatisation of global debates, Stefan C. Aykut, Jean Foyer, Edouard Morena (Eds), Routledge, 2017, 198 p.
12Frequently presented as a historic last chance to set the world on a course to prevent catastrophic climate change, the 21st Conference of the Parties to the Climate convention (COP21) was a global summit of exceptional proportions. Bringing together negotiators, scientists, journalists and representatives of global civil society, it also constituted a privileged vantage point for the study of global environmental governance “in the making”.
13This volume offers readers an original account of the current state of play in the field of global climate governance. Building upon a collaborative research project on COP21 carried out by a multidisciplinary team of twenty academics with recognised experience in the field of environmental governance, the book takes COP21 as an entry point to analyse ongoing transformations of global climate politics, and to scrutinise the impact of climate change on global debates more generally. The book has three key objectives : to analyse global climate governance through a combination of long-term analysis and on-sight observation ; to identify and analyse the key spaces of participation in the global climate debate ; to examine the “climatisation” of a series of crosscutting themes, including development, energy, security and migration. This book will be of great interest to students, scholars and policymakers of climate politics and governance, international relations and environmental studies.
Développement durable et transitions
Des territoires vivants pour transformer le monde, Patrick Caron, Élodie Valette, Tom Wassenaar, Geo Coppens d’Eeckenbrugge, Vatché Papazian (Eds), Quæ, 2017, 280 p.
14Sur quelles ressources se fonde le développement d’un territoire ? Qu’est-ce qu’une gestion territoriale des ressources ? Quelles spécificités et opportunités présente l’organisation territoriale pour la production agricole, la régulation des filières, les services ? Comment se conçoivent et s’appliquent des politiques publiques territoriales ? Mais également, quelles sont les limites de l’approche territoriale ? En quoi la prise en compte des territoires rénove-t-elle les cadres d’intervention du développement ? Comment se mettent en œuvre et se réinventent les dispositifs d’accompagnement, de construction de compétences, d’appui à la production ou de gouvernance, les systèmes d’information et d’appréhension des dynamiques territoriales, la planification décentralisée ?
15À travers diverses études, l’ouvrage évoque la façon dont acteurs, échelles et périmètres d’intervention, dispositifs interagissent pour le développement des espaces ruraux dans les pays du Sud, tant à l’échelle locale que dans la perspective globale des objectifs du développement durable. Il regroupe les expériences et points de vue de plus de 150 chercheurs et experts du Cirad, de l’AFD ou de leurs partenaires. Il s’adresse autant aux chercheurs, aux ingénieurs, aux professionnels dans les pays du Sud, qu’aux étudiants et au grand public averti.
Jeux de pouvoir dans nos poubelles. Économies morales et politiques du recyclage au tournant du XXIe siècle, Nathalie Ortar, Élisabeth Anstett (Eds), Éditions Pétra, 2017, 226 p.
16Mettre ou ne pas mettre à la poubelle est devenu un geste moralement voire politiquement connoté. En effet, le déchet est toujours appréhendé à partir de systèmes de valeur qui assignent une valence positive ou négative au fait de se séparer ou au contraire de conserver des matériaux devenus inutiles. Bien plus, les notions de pureté et d’impureté comme celle de pollution, dont l’anthropologue Mary Douglas a contribué à montrer l’importance, sont fréquemment associées aux matières détritiques et contribuent à poser l’analyse des pratiques de recyclage et de récupération dans le champ de la morale.
17Jeux de pouvoir dans nos poubelles, qui rassemble des contributions d’anthropologues et de sociologues, mais aussi d’historiens, de géographes et de philosophes travaillant sur des terrains européens et latino-américains, se propose de questionner plus précisément les économies morales auxquelles sont adossées les pratiques de récupération ou de mise en circulation des déchets, dans l’objectif de mettre au jour leurs paradoxes et leurs contradictions internes, tout autant que leurs logiques politiques sous-jacentes.
Routledge handbook of ecological economics : nature and society, Clive L. Spash (Ed.), Routledge, 2017, 552 p.
18Since becoming formally established with an international academic society in the late 1980s, ecological economics has advanced understanding of the interactions between social and biophysical reality. It initially combined questioning of the basis of mainstream economics with a concern for environmental degradation and limits to growth, but has now advanced well beyond critique into theoretical, analytical and policy alternatives. Social ecological economics and transformation to an alternative future now form core ideas in an interdisciplinary approach combining insights from a range of disciplines including heterodox economics, political ecology, sociology, political science, social psychology, applied philosophy, environmental ethics and a range of natural sciences.
19This handbook, edited by a leading figure in the field, demonstrates the dynamism of ecological economics in a wide-ranging collection of state-of-the-art essays. Containing contributions from an array of international researchers who are pushing the boundaries of the field, the Routledge handbook of ecological economics showcases the diversity of the field and points the way forward. A critical analytical perspective is combined with realism about how economic systems operate and their essential connection to the natural world and society. This provides a rich understanding of how biophysical reality relates to and integrates with social reality. Chapters provide succinct overviews of the literature covering a range of subject areas including : heterodox thought on the environment ; society, power and politics, markets and consumption ; value and ethics ; science and society ; methods for evaluation and policy analysis ; policy challenges ; and the future post-growth society. The rich contents dispel the myth of there being no alternatives to current economic thought and the political economy it supports.
20The Routledge handbook of ecological economics provides a guide to the literature on ecological economics in an informative and easily accessible form. It is essential reading for those interested in exploring and understanding the interactions between the social, ecological and economic and is an important resource for those interested in fields such as : human ecology, political ecology, environmental politics, human geography, environmental management, environmental evaluation, future and transition studies, environmental policy, development studies and heterodox economics.
Énergie
Décarbonons ! 9 propositions pour que l’Europe change d’ère, The Shift Project, Zeynep Kahraman, André-Jean Guérin, Jean-Marc Jancovici, Odile Jacob, 2017, 192 p.
21Pour lutter contre le réchauffement climatique, tous les pays du monde se sont mis d’accord lors de la COP21 afin de ramener à zéro avant la fin du siècle leurs émissions de gaz à effet de serre, néfastes sous-produits de l’activité humaine. Reste à passer de l’accord à l’action : que faire exactement ? Et dans quel domaine ?
22Les ingénieurs et économistes du Shift Project, groupe de réflexion sur la transition énergétique, sont persuadés que l’Europe pourrait jouer un rôle de pionnier dans cette indispensable décarbonation. Ils ont identifié 9 domaines d’action prioritaires, des transports à l’industrie en passant par l’isolation des logements et l’agriculture, et ils donnent ici les chiffres précis et les clés de compréhension nécessaires pour que chacun devienne un acteur informé de la transition énergétique.
La France dans le noir. Les méfaits de l’idéologie en politique énergétique, Hervé Machenaud, Les Belles Lettres, 2017, 120 p.
23Cela a failli se produire cet hiver, mais un jour prochain, la France va se retrouver dans le noir, au sens propre du terme. Il n’y aura pas assez d’électricité pour faire rouler les trains, tourner les usines, chauffer les maisons, allumer les télévisions et les ordinateurs, recharger les téléphones portables…
24Le développement incontrôlé d’énergies éoliennes et solaires massivement subventionnées, dans un marché déjà sur capacitaire, conduit les « producteurs historiques » à la faillite ou à se réorienter vers la production de ces mêmes énergies !
25En Europe, la réglementation des domaines de l’environnement et de la concurrence tient lieu de politique énergétique. En Allemagne et en France, c’est la peur du nucléaire et le mirage des énergies renouvelables qui guide la fameuse transition énergétique. Et au fantasme du « tout renouvelable » s’ajoute celui, aussi pernicieux, du « tout marché ».
26L’électricité est un bien de première nécessité. Quelle nouvelle forme de service public faut-il mettre en place pour donner à tous les Français accès à une électricité stable et bon marché dans la durée ? C’est à cette question que ce livre tente de répondre.
Écologie, biodiversité, évolution
La biodiversité entre science et politique. La formation d’une institution internationale, Florian Charvolin, Guillaume Ollivier, Éditions Pétra, 2017, 302 p.
27La création d’une institution internationale est un fait rare. En 2012, l’IPBES, la Plateforme intergouvernementale science/politique sur la biodiversité et les services écosystémiques, voit officiellement le jour. Cet événement prolonge la mise à l’agenda politique et scientifique de la biodiversité amorcée dans les années 1980 et marquée par la signature, en 1992, de la Convention sur la diversité biologique ou encore la publication du Millennium Ecosystem Assessment en 2005. L’IPBES, discutée dès 2005, marque la volonté de combler un fossé entre science et politique estimé être à l’origine de l’échec de la gouvernance internationale face à la menace d’une 6e extinction des espèces.
28Ce livre étudie la période de formation de l’IPBES (2005-2012) caractérisée par une incertitude radicale sur ses contours et son existence même. Associant ethnographie, sociologie des pratiques documentaires et socio-informatique, les auteurs adoptent un regard pragmatiste orienté vers les modalités d’existence, sur de multiples scènes, de cette institution alors en devenir. L’ouvrage décrit les opérations de sa mise en visibilité sur le Web, suit l’évolution de ses relations avec les institutions préexistantes, met en lumière le rôle de ses archives documentaires, saisit la performance des négociateurs en face-à-face et les discussions sur la formulation des textes fondateurs.
29Objet de connaissances et d’appropriations multiples, parfois contradictoires, la biodiversité est au cœur de revendications politiques. Comment les négociations ont-elles pu aboutir, par-delà la variété des conceptions et des stratégies des différents protagonistes ? Comment les communautés scientifiques, les États, les instances internationales et les porteurs de causes environnementales sont-ils parvenus à surmonter les désaccords et les dissonances cognitives et politiques ? À travers son herméneutique d’une institution en formation, l’ouvrage contribue à relativiser l’idée d’une fracture irrévocable, souvent dénoncée, entre une diplomatie internationale et des acteurs de terrain.
Le souci de la nature. Apprendre, inventer, gouverner, Cynthia Fleury, Anne-Caroline Prévot (Eds), CNRS Éditions, 2017, 378 p.
30La nature nous relie les uns aux autres et à l’ensemble du vivant. Mais quelles expériences avons-nous aujourd’hui de la nature ? Celles-ci, ou leur absence, façonnent-elles nos façons de vivre et de penser, d’agir et de gouverner ? Existe-t-il une valeur ajoutée de l’expérience de nature pour l’éthique et la politique ? Il est urgent de préserver un « souci de la nature » qui soit au cœur des institutions, des politiques publiques, de nos dynamiques de transmission et d’apprentissage.
31Cet ouvrage, s’affranchissant des frontières disciplinaires, interroge, de l’enfance à l’âge vieillissant, de l’individu aux différents collectifs qui organisent nos vies, la spécificité des expériences de nature et de leur éventuelle extinction, l’hypothèse de l’amnésie environnementale, ou à l’inverse les nouveaux modes de partage et de reconnexion avec la nature et leur continuum avec notre humanisme. Une invitation à inventer un mode de partage.
Gestion des ressources
Prédateurs et résistants. Appropriation et réappropriation de la terre et des ressources naturelles (16e - 20e siècles), Pablo F. Luna, Niccolò Mignemi (Eds), Syllepse, 2017, 308 p.
32La nouvelle vague d’accaparements de terres et d’expulsions massives des paysans à l’échelle planétaire fait resurgir sous des formes renouvelées d’anciens questionnements. Depuis l’émergence du capitalisme, l’histoire des campagnes n’aurait-elle été qu’un processus plus ou moins accéléré de dépossession des paysans ? N’y a-t-il pas une « lame de fond » aboutissant à la prolétarisation inexorable des ruraux et à la fin de la petite et moyenne propriété paysanne ? Le landgrabbing – la saisie des terres – actuel ne serait-il pas tout simplement la poursuite des enclosures entamées depuis la fin du Moyen Âge, cette fois-ci sur le plan mondial ?
33Les auteurs réexaminent ces questions et aboutissent à des conclusions nuancées. Les mondes ruraux qu’ils ont approchés confirment l’offensive entreprise contre les terres, les hommes et les femmes et les ressources naturelles. Mais ils observent aussi la réaction et la riposte des campagnes, parfois d’une façon ouverte et visible, souvent de manière souterraine mais non moins efficace. Ils font état des victoires obtenues dans une dialectique où l’usurpation de la terre et des ressources peut être rapidement suivie par la réappropriation ou par la reprise de contrôle. Le processus apparaît ainsi complexe et moins définitif, avec une variété de moyens mis en œuvre d’où ressort l’image d’un combat inachevé qui se renouvelle en permanence.
34D’Amérique en Asie, d’Afrique en Europe, les auteurs nous invitent à parcourir le temps long de l’évolution de la question foncière alors que l’agriculture devra bientôt nourrir 10 milliards d’habitants et que la petite et la moyenne paysannerie continuent à fournir l’essentiel des aliments mondiaux.
Les rivières urbaines et leur pollution, Laurence Lestel, Catherine Carré (Eds), Quæ, 2017, 296 p.
35En deux siècles, les rivières traversant les villes européennes sont passées de réceptacle de tous leurs rejets à un milieu aquatique vivant, à préserver et à intégrer à la ville. Pour autant, ce retournement de perspective s’est produit alors que l’urbanisation et l’industrialisation conjointe des villes depuis le XIXe siècle avaient entraîné le sacrifice de leurs rivières. Les quatre métropoles de Bruxelles, Berlin, Milan et Paris ont été choisies car situées sur des rivières ayant un débit faible, voire très faible. Elles ont généré pendant longtemps des pressions telles que le fonctionnement des rivières s’en est trouvé modifié, au point de compromettre la préservation de leurs fonctionnalités.
36Avec un regard interdisciplinaire – entre écologie, hydrologie et sciences sociales – les auteurs reconstruisent ici la connaissance qu’ont eue les sociétés du fonctionnement de ces rivières, décrivent les techniques de surveillance des cours d’eau et énumèrent les actions menées pour améliorer leur état. Puis ils évaluent l’efficacité des réponses apportées, à travers l’évolution de l’état des rivières et de leurs populations piscicoles, utilisées ici comme traceur des pressions exercées et des réponses du milieu aquatique.
37Ces études de cas illustrent la diversité des trajectoires des couples ville-rivière et l’absence de causalité entre la connaissance de la qualité des cours d’eau, leur surveillance et les décisions prises. Elles révèlent l’importance des choix politiques pour ces quatre villes – indépendamment des moyens financiers et techniques disponibles – et fournissent un retour d’expérience pour les très grandes villes du monde qui se retrouvent, un siècle plus tard, confrontées aux mêmes défis.
Where the river flows. Scientific reflections on earth’s waterways, Sean W. Fleming, Princeton University Press, 2017, 216 p.
38Rivers are essential to civilization and even life itself, yet how many of us truly understand how they work ? Why do rivers run where they do ? Where do their waters actually come from ? How can the same river flood one year and then dry up the next ? Where the river flows takes you on a majestic journey along the planet’s waterways, providing a scientist’s reflections on the vital interconnections that rivers share with the land, the sky, and us.
39Sean Fleming draws on examples ranging from common backyard creeks to powerful and evocative rivers like the Mississippi, Yangtze, Thames, and Congo. Each chapter looks at a particular aspect of rivers through the lens of applied physics, using abundant graphics and intuitive analogies to explore the surprising connections between watershed hydrology and the world around us. Fleming explains how river flows fluctuate like stock markets, what “digital rainbows” can tell us about climate change and its effects on water supply, how building virtual watersheds in silicon may help avoid the predicted water wars of the twenty-first century, and much more. Along the way, you will learn what some of the most exciting ideas in science – such as communications theory, fractals, and even artificial life – reveal about the life of rivers.
40Where the river flows offers a new understanding of the profound interrelationships that rivers have with landscapes, ecosystems, and societies, and shows how startling new insights are possible when scientists are willing to think outside the disciplinary box.
Gestion et politiques de l’environnement
The battle for Yellowstone. Morality and the sacred roots of environmental conflict, Justin Farrell, Princeton University Press, 2017, 320 p.
41Yellowstone holds a special place in America’s heart. As the world’s first national park, it is globally recognized as the crown jewel of modern environmental preservation. But the park and its surrounding regions have recently become a lightning rod for environmental conflict, plagued by intense and intractable political struggles among the federal government, National Park Service, environmentalists, industry, local residents, and elected officials. The battle for Yellowstone asks why it is that, with the flood of expert scientific, economic, and legal efforts to resolve disagreements over Yellowstone, there is no improvement ? Why do even seemingly minor issues erupt into impassioned disputes ? What can Yellowstone teach us about the worsening environmental conflicts worldwide ?
42Justin Farrell argues that the battle for Yellowstone has deep moral, cultural, and spiritual roots that until now have been obscured by the supposedly rational and technical nature of the conflict. Tracing in unprecedented detail the moral causes and consequences of large-scale social change in the American West, he describes how a “new-west” social order has emerged that has devalued traditional American beliefs about manifest destiny and rugged individualism, and how morality and spirituality have influenced the most polarizing and techno-centric conflicts in Yellowstone’s history.
43This groundbreaking book shows how the unprecedented conflict over Yellowstone is not all about science, law, or economic interests, but more surprisingly, is about cultural upheaval and the construction of new moral and spiritual boundaries in the American West.
Environnement et développement durable dans les politiques de l’Union européenne. Actualités et défis, Gérard Brovelli, Mary Sancy (Eds), Presses universitaires de Rennes, 2017, 336 p.
44Alors qu’il est question depuis plusieurs mois de renouveler les bases du projet européen, au moins de redéfinir un socle de principes généraux afin de retisser le lien entre les citoyens des États membres, la place de l’environnement et du développement durable devra probablement être prééminente.
45Certes, les traités actuels font une place importante à l’objectif de développement durable mais dans le cadre de l’achèvement du marché intérieur. Les politiques sectorielles ici étudiées éclairent l’étendue des avancées et leurs insuffisances. Ce livre illustre la place que ces notions de développement durable et de protection de l’environnement ont prise dans la législation européenne ainsi que les limites de cette intégration dans une Europe d’abord tournée vers la construction d’un grand marché et d’une société où les relations sociales marchandes deviennent prépondérantes et tendent à happer toutes les autres dimensions.
46Les réflexions générales proposées montrent cette tension entre la volonté d’instituer une protection juridique des ressources naturelles et des services environnementaux afin d’assurer leur transmission aux générations futures, et la pression des intérêts pour leur intégration à la circulation marchande. L’effectivité de leur protection à long terme est alors incertaine.
47L’approche interdisciplinaire proposée se justifie car l’environnement met en mouvement trop de composantes de la vie sociale pour se laisser appréhender par un seul regard disciplinaire.
La naissance de l’écologie politique en France. Une nébuleuse au cœur des années 68, Alexis Vrignon, Presses universitaires de Rennes, 2017, 328 p.
48La nébuleuse des mouvements écologistes apparaît en France au cœur des années 68, ces quelque vingt ans à la fois marqués par une forte contestation sociale et d’importantes innovations politiques et culturelles. Animés par l’aspiration commune à redéfinir les rapports entre l’homme et la nature pour transformer la société, ces mouvements n’en sont pas moins fort divers dans leur positionnement politique, leur répertoire d’action et leur approche des enjeux environnementaux, bref, dans leur culture écologique. Au confluent de l’histoire politique et de l’histoire environnementale, mobilisant des archives inédites, cet ouvrage se penche sur la genèse et la construction de ces mouvements sur le terrain et dans les urnes. Tout au long des années soixante-dix, les militants de cette nébuleuse s’efforcent de donner forme à leur mouvement et d’en promouvoir l’unité. Après une période fructueuse entre 1974 et 1978, durant laquelle la contestation antinucléaire bat son plein, les écologistes sont confrontés à la fin de la décennie à un contexte politique, social et économique radicalement nouveau avec l’installation de la crise économique dans la durée et la banalisation relative des enjeux environnementaux. Ces sorties des années 68 constituent alors un temps de remise en cause et parfois de désengagement qui conduit certains militants à se rallier à l’idée d’une structure partidaire auparavant rejetée pour fonder les Verts en 1984.
La société écologique et ses ennemis. Pour une histoire alternative de l’émancipation, Serge Audier, La Découverte, 2017, 750 p.
49Alors que monte la prise de conscience du péril environnemental, les obstacles à une véritable mutation écologique des sociétés contemporaines restent massifs et les modèles alternatifs peinent à s’imposer. Les traditions intellectuelles de la gauche semblent souvent impuissantes à apporter des réponses. Pire, n’ont-elles pas contribué, par leur culte des « forces productives », à l’impasse actuelle ?
50La généalogie intellectuelle proposée par Serge Audier revient sur des évidences trompeuses, notamment celle qui voudrait que les mouvements émancipateurs n’aient abordé que très tardivement les enjeux écologiques. On redécouvre certes peu à peu des voix minoritaires qui, de Henry David Thoreau à William Morris, avaient manifesté très tôt un souci inédit de la nature. Mais en les érigeant en héros solitaires, on contribue à occulter une nébuleuse beaucoup plus large et méconnue qui, entre socialisme et anarchisme, a esquissé les traits d’une « société écologique ». L’objectif de ce livre est d’exhumer et de reconstituer une pensée sociale de la nature et de l’émancipation, construite aux marges du « grand récit » socialiste et républicain.
51De fait, cette tendance dissidente a été ignorée, marginalisée, voire combattue par les courants hégémoniques, qui ont souvent vu dans l’écologie un conservatisme traditionaliste ou un romantisme réactionnaire… Si les « ennemis » de la « société écologique » se trouvent bien entendu du côté des forces du capitalisme, il serait faux et dangereux d’oublier qu’ils font aussi partie de l’histoire même de la gauche et du socialisme dans ses orientations majoritaires, encore prégnantes.
Risques
Vivre avec les catastrophes, Yoann Moreau, Presses universitaires de France, 2017, 392 p.
52Les catastrophes semblent humainement absurdes, impossibles et impensables, mais elles surgissent, suscitant la stupeur et l’effroi. Et chaque fois, les individus touchés reconstruisent tant bien que mal un récit donnant sens à leur existence.
53En s’appuyant sur des cas précis (séisme d’Edo de 1855, éruption volcanique d’Ambrymen 1892, éruption de l’Etna en 1991, glissement de terrain de Vargas en 1999…), l’auteur réinvestit les milieux où survient l’événement, dans ses variations géographiques et sociales, pour mettre en lumière les processus de refabrication du sens qui, par des dispositifs de remédiation collective, sans étouffer la part d’absurde et d’inacceptable, permettent de « vivre avec » les catastrophes.
54Une magistrale étude, qui renouvelle notre compréhension des situations de crise.
Histoire et philosophie des sciences
Penser l’éventuel. Faire entrer les craintes dans le travail scientifique, Nicolas Bouleau, Quæ, 2017, 216 p.
55L’interprétation, parce qu’elle ressemble à des croyances, a été écartée de la science moderne, en tout cas négligée, au profit de la déduction et de la généralisation. Pourtant l’histoire des sciences nous montre son rôle permanent tant dans les sciences humaines que dans les sciences de la nature. C’est elle qui relance la fécondité dans les moments de compréhension difficile.
56Le positivisme, qui reste une référence majeure dans les pratiques actuelles, est responsable de cette situation. Il cherche les commandements auxquels se soumet la nature. Cependant, après la période de conquête, nos inquiétudes sur l’environnement appellent une science plus ouverte, plus compréhensive des éventualités. Nicolas Bouleau montre que le cœur du problème est d’utiliser dans la science les matériaux interprétatifs que sont les craintes. Prolongeant et concrétisant les idées de Jonas, il décrit le travail d’élaboration de craintes désintéressées par une enquête sur un être supposé, par exemple l’agent de transmission de la maladie de la vache folle. L’ouvrage porte plus largement sur la façon de penser l’éventuel dans les relations des humains avec leur contexte.
Rapports sciences, technologies et sociétés
Les Big Data à découvert, Mokrane Bouzeghoub, Rémy Mosseri (Eds), CNRS Éditions, 2017, 368 p.
57Les tablettes mésopotamiennes, l’invention et l’industrialisation de l’imprimerie, les grandes missions archéologiques, naturalistes et spatiales : l’humanité a toujours collecté et exploité des données. Mais l’informatique et Internet ont donné en un demi-siècle une accélération considérable à ce phénomène. C’est une révolution sans précédent, tant au niveau de la numérisation et du stockage que dans les méthodes de traitement : on a généré, dans la dernière décennie, plus de données que depuis la fin de la préhistoire et on est capable de traiter en quelques secondes des millions de requêtes ou de transactions.
58Astrophysique, physique des particules, sciences de la terre, biologie, sciences humaines et sociales : l’activité scientifique est, et sera toujours plus tributaire des progrès dans ce domaine. Mais d’autres domaines, comme la sécurité, la santé ou le marketing, ne sont pas en reste.
59Quels défis ces big data représentent-elles ? Comment les stocker, comment les traiter ? Comment les analyser et en extraire des connaissances ? Comment évaluer la qualité des données et la transparence des algorithmes qui les traitent ? Quels sont les bénéfices scientifiques ou économiques attendus ? Quels sont les effets induits par l’accumulation de données ? Qu’en est-il de leur ouverture au marché et de leur monétisation ?
60Un large panel d’experts présente, à travers 150 articles synthétiques, l’état de l’art sur ces questions afin que le citoyen puisse en saisir les enjeux et participer de façon informée au débat de société qui s’est engagé.
La biologisation du social. Discours et pratiques, Sébastien Lemerle, Carole Reynaud Paligot (Eds), Presses universitaires de Paris Nanterre, 2017, 238 p.
61Les progrès enregistrés par les sciences de la vie sont appelés à modifier nombre de nos conceptions relatives à la personne humaine et à la société. Mais alors qu’il existe une riche littérature théorique sur ce sujet, peu d’études avaient jusqu’à ce jour été consacrées aux pratiques résultant des appropriations sociales des savoirs en génétique et neurosciences.
62L’objectif principal de ce livre est de contribuer à combler cette lacune, grâce aux contributions de chercheuses et chercheurs issus de différentes disciplines (neurosciences, sociologie, histoire, sciences de l’information et de la communication…). Il révèle une tendance, perceptible depuis quelques décennies dans nos sociétés, à « biologiser le social ». L’importation de grilles d’analyses et d’action inspirées par les sciences biologiques touche en effet un nombre grandissant d’univers, des débats autour du genre, de la race, du transhumanisme ou de la souffrance sociale, aux pratiques en mutation dans les domaines de la santé mentale, du sport, de l’éducation, du marketing ou du droit.
63À partir d’études de cas concrètes, ce livre conduit à réexaminer la question des relations entre recherche, idéologie scientifique et ingénierie sociale, à l’heure où la biologie s’inscrit durablement dans l’horizon mental de notre temps.
Ignorance scientifique et inaction publique. Les politiques de santé au travail, Emmanuel Henry, Presses de Sciences Po, 2017, 256 p.
64Sait-on qu’entre 14 000 et 30 000 nouveaux cas de cancers professionnels se déclarent chaque année ? N’est-il pas surprenant que l’activité économique soit la cause de milliers de malades et de morts et que personne n’en parle ? Comment expliquer qu’à l’exception du scandale de l’amiante, la question des substances toxiques et des processus industriels dangereux soit éludée du débat public ?
65En sociologue, Emmanuel Henry s’interroge sur les mécanismes qui aboutissent à cette occultation et analyse la façon dont s’élaborent, en silence, les politiques de santé au travail en France. Il montre en quoi les instruments et les dispositifs de gestion des risques professionnels sont aujourd’hui conçus par et pour des experts, ce qui rend leur appropriation par les représentants salariaux et par les citoyens très difficile. Devenus invisibles par méconnaissance, voire par production volontaire d’ignorance scientifique par les industriels, ces risques disparaissent purement et simplement des radars officiels, et c’est l’inaction publique qui l’emporte.
L’innovation en eaux troubles. Sciences, techniques, idéologies, Ivan Sainsaulieu, Arnaud Saint-Martin (Eds), Éditions du Croquant, 2017, 330 p.
66Difficile d’échapper aux discours d’emballement sur l’innovation technologique. Les promesses des entrepreneurs starifiés de la Silicon Valley, l’unanimité des responsables politiques autour du « numérique » facteur de croissance, les dépenses publiques conséquentes en faveur de la R&D privée sont autant d’expressions d’un consensus idéologique.
67Cet ouvrage se propose d’interroger ce lieu commun et les enjeux qu’il recouvre. Naviguant dans les eaux troubles de l’innovation, il alterne analyses critiques et approches « embarquées » de pratiques innovantes, interdisciplinaires et high-tech. Les différentes études de cas rassemblées explorent chacune des situations peu connues, elles suggèrent aussi de nouvelles pistes de recherche, en même temps qu’elles s’appuient sur une littérature toujours plus abondante. Il en résulte un panorama à la fois critique et suggestif, informé et pédagogique, à même de nourrir les réflexions générales sur la question à tiroirs de l’innovation scientifique et technique.
Interdisciplinarité
The Oxford handbook of interdisciplinarity (Second edition), Robert Frodeman, Julie Thompson Klein, Roberto Carlos Dos Santos Pacheco (Eds), Oxford University Press, 2017, 656 p.
68Interdisciplinarity has become as important outside academia as within. Academics, policy makers, and the general public seek insights to help organize the vast amounts of knowledge being produced, both within research and at all levels of education. The second edition of The Oxford handbook of interdisciplinarity offers a thorough update of this major reference work, summarizing the latest advances within the field of inter- and transdisciplinarity. The collection is distinguished by its breadth of coverage, with chapters written by leading experts from multiple networks and organizations. The volume is edited by respected interdisciplinary scholars and supported by a prestigious advisory board to ensure the highest quality and breadth of coverage.
69The Oxford handbook of interdisciplinarity provides a synoptic overview of the current state of interdisciplinary research, education, administration and management, and of problem-solving knowledge that spans the disciplines and interdisciplinary fields. The volume negotiates the space between the academic community and society at large. Offering the most broad-based account of inter- and transdisciplinarity to date, its 47 chapters provide a snapshot of the state of knowledge integration as interdisciplinarity approaches its century mark. This second edition expands its coverage to discuss the emergence of new fields, the increase of interdisciplinary approaches within traditional disciplines and professions, new integrative approaches to education and training, the widening international presence of interdisciplinarity, its increased support in funding agencies and science-policy bodies, and the formation of several new international associations associated with interdisciplinarity.
70This reference book will be a valuable addition to academic libraries worldwide, important reading for members of the sciences, social sciences, and humanities engaged in interdisciplinary research and education, and helpful for administrators and policy makers seeking to improve the use of knowledge in society.
Sciences humaines et sociales
Cultures et systèmes d’innovation, Jean-Éric Aubert, Presses des mines, 2017, 142 p.
71Les spécificités culturelles influencent considérablement les capacités de développement technologique et industriel des pays, et in fine leurs trajectoires économiques. Ce livre relate des expériences d’évaluation des climats de l’innovation et de conseil en politiques publiques, conduites pendant plus de vingt ans dans plusieurs dizaines de pays à travers le monde. La compréhension des cultures et des mentalités repose sur l’observation de détails dans les comportements des acteurs, les productions des entreprises, les actions des pouvoirs publics. C’est par l’analyse des cultures que l’auteur explique les contrastes entre les différents systèmes d’innovation. Une analyse qui, parce qu’elle revient sur les fondements anthropologiques et les expériences historiques de différents pays, met en lumière les ressorts profonds de leur capacité d’innovation et de changement.
Misère du scientisme en économie. Retour sur l’affaire Cahuc-Zylberberg, Benjamin Coriat, Thomas Coutrot, Anne Eydoux, Agnès Labrousse, André Orléan (Eds), Éditions du Croquant, 2017, 134 p.
72À l’orée d’une campagne électorale qui constitue un moment de confrontation démocratique entre divers projets politiques et économiques, un pamphlet d’une rare violence a été promu à grand fracas par les médias conservateurs pour tenter de clore le débat : Le négationnisme économique et comment s’en débarrasser, écrit par deux économistes jusqu’alors peu connus du public, Pierre Cahuc et André Zylberberg. Début septembre 2016, Challenges, Le Point, L’Express, Les Échos, L’Opinion, BFM Business lui ont réservé une place de choix. Cette extraordinaire couverture médiatique révèle le singulier désarroi des « élites » économiques.
73Mais qui sont au juste ces « négationnistes » cloués au pilori ? Des Faurisson de l’économie, dont les théories prétendraient justifier l’expulsion des immigrés ou l’éradication des banquiers ? Évidemment non : ce ne sont que des économistes (post)keynésiens, marxistes ou non, organisés au sein des Économistes atterrés ou de l’Association française d’économie politique (AFEP). Leur crime : ils dénoncent l’austérité, la dérégulation et le creusement organisé des inégalités ; ils critiquent les politiques néolibérales menées depuis plus de trente ans qui ont conduit la France et l’Europe dans une dangereuse impasse. Surtout, ces économistes proposent des alternatives à ces politiques dont tout observateur raisonnable – y compris désormais une large part des économistes du FMI ou de l’OCDE ! – reconnaît qu’elles ont gravement contribué à déstabiliser nos sociétés.
74Devant l’impasse de l’austérité et des réformes « modernisatrices » des marchés du travail, ce livre propose de rouvrir le débat sur les politiques macroéconomiques, sur l’emploi et sur la RTT.
Les péchés secrets de la science économique, Deirdre McCloskey, Markus Haller, 2017, 109 p.
75Les économistes vivent-ils dans des tours d’ivoire d’où ils produisent des analyses qui n’expliquent rien ? Deirdre McCloskey propose un tour d’horizon des péchés des économistes – réels ou supposés, pardonnables ou non – qui pourraient justifier cette accusation.
76L’usage de modèles mathématiques, l’adhésion aux valeurs politiques du libéralisme ou l’ignorance des motivations altruistes compromettent-ils inéluctablement la pertinence des explications économiques ? Que faut-il pour qu’une analyse économique parle vraiment de la société telle qu’elle se présente à l’observation ?
77Dans cet essai iconoclaste, érudit et souvent drôle, l’une des plus éminentes historiennes contemporaines de l’économie remet les pendules à l’heure.