Couverture de NRT_271

Article de revue

Écriture sainte

Pages 118 à 134

Faure P., Pentecôte et Parousie. Ac 1,6 – 3,26. L’Église et le Mystère d’Israël entre les textes alexandrin et occidental des Actes des Apôtres, coll. Études bibliques – n.s. 50, Paris, Gabalda, 2003, 24x16, 591 p., 75 €. ISBN 2-85021-147-8

1Nous avons lu avec beaucoup d’intérêt la thèse doctorale présentée récemment à l’École biblique de Jérusalem par un de nos anciens étudiants, prêtre du diocèse de Paris, actuellement professeur d’Écriture sainte à la Faculté Notre-Dame de cette ville. Œuvre monumentale de près de six cent pages, cet essai s’inscrit dans la foulée des travaux de type historico-critique des Pères Boismard, Lamouille et Taylor, ce dernier étant le promoteur de la thèse. Par rapport à ses maîtres, l’A. observe une distance critique de bon aloi, grâce à une confrontation patiente et pointue entreprise à nouveaux frais entre leurs conclusions et le double texte des Actes des apôtres.

2Son point de départ est théologique, tout comme sa conclusion, qui met en relief les deux lectures possibles de l’œuvre lucanienne, selon la recension « occidentale » (TO) ou la recension « alexandrine » (TA). Il envisage en particulier les rapports entre Israël et l’Église d’une part, et entre Pentecôte et Parousie d’autre part. L’A. s’adosse aux hypothèses de ses devanciers concernant la genèse de Luc-Actes à partir d’un Proto-Luc et de trois couches rédactionnelles successives du livre des Actes.

3En dialogue avec une vingtaine de spécialistes lucaniens à propos de la signification d’Israël, puis de l’ecclésiologie et de l’eschatologie, une première partie discute les positions en présence. Plutôt que de clore le débat sur l’intention des rédacteurs, pareille étude contribuera sans doute à ranimer la polémique à propos du but de la composition de Luc-Actes, grâce surtout à l’apport nouveau que représente la comparaison précise des deux versions du texte lucanien préservées par la tradition. La deuxième partie du livre analyse l’unité littéraire d’Ac 1,6 – 3,26, avec les expressions typiques de « rétablissement de tout » et de « temps de rafraîchissement », puis les séquences sur l’Ascension et la Pentecôte, et la guérison de l’infirme de la Belle Porte. Une troisième partie est consacrée à la révision du texte des Actes, avec l’évolution du TO vers le TA, sur base d’un examen rédactionnel détaillé des deux recensions pour en discerner les attributions. Enfin la quatrième partie s’efforce de présenter les « prolongements et synthèses » de l’étude comparative des deux documents en dégageant les caractéristiques thématiques de chacun d’eux ; l’analyse s’étend alors au récit de l’assemblée de Jérusalem (Ac 15,1-34), puis à celui de mort d’Étienne (Ac 6,8 – 7,60), avant de conclure sur le propos de Luc-Actes à partir des éditions successives du texte (Proto-Luc, TO, TA). Une conclusion finale reprend les acquis de la thèse concernant les trois points posés au départ : ecclésiologie, eschatologie et rapport entre Église et Israël.

4La démonstration au cours des analyses, souvent fastidieuse en cours de route, apparaît alors fort astucieuse et prête à susciter l’assentiment du lecteur. Devant cette (re)construction magistrale, on ne peut cependant réprimer un certain scepticisme, tant la base de l’argumentation paraît parfois ténue, et la systématisation un peu rapide, car elle s’appuie sur une lecture partielle du texte. De plus, les présupposés rédactionnels semblent bien contestables. En fait, les deux versions des Actes sont-elles finalement aussi divergentes que le laisse percevoir l’A. de la thèse ? Ou bien doit-on attribuer leur « hésitation » à une volonté des ultimes rédacteurs à interpeller le lecteur, juif ou non juif ? Il faut en effet permettre à celui-ci de se situer en liberté devant l’évolution des mentalités en cours, à la fin du Ier siècle de notre ère, concernant les rapports entre christianisme et judaïsme, la théologie ecclésiale et l’établissement du Royaume de Dieu : on connaît la tendance de Luc à « historiciser » l’eschatologie. C’est sans doute le mérite de la thèse d’éclairer les hésitations contemporaines à partir de celles qui existaient dès le départ. Entre autres points controversés, peut-être pourrait-on mieux utiliser le dédoublement significatif que fait Luc, à propos du discours apocalyptique des synoptiques (Mc 13 et Mt 24-25), en « venue du Fils de l’homme » pour les personnes (Lc 17) et pour les collectivités — dont le type est Jérusalem — (Lc 21) ? Quelle est la position de Luc par rapport à la conversion éventuelle d’Israël dans le temps de l’histoire ? Ne faudrait-il pas revoir le rôle et la fonction « missionnaire » que le rédacteur lucanien attribue à Paul comme représentant du peuple juif, accomplissant la vocation universelle dont celui-ci est porteur dès le Sinaï, comme l’évoque le récit de Pentecôte ?

5Une qualité incontestable de cette thèse réside dans la pertinence et l’acribie des analyses de détails, mais le matériau traité est si dense et si touffu qu’il est bien difficile d’en tirer des conclusions aussi nettes que celles qu’affirme l’A. Aux spécialistes de juger ! De toute manière, le lecteur aura intérêt à se reporter à la présentation que l’A. fait lui-même de sa thèse dans l’article qu’il lui consacre dans cette livraison de la revue (cf. supra p. 3). — J. Radermakers, S.J.

Atti del VI simposio di Tarso su S. Paolo Apostolo, éd. L. Padovese, coll. Turchia : la Chiesa e la sua storia XIV, Roma, Ist. Francescano di Spiritualità / Pont. At. Antoniano, 2000, 22x16, 390 p

6Tous les deux ans se réunit à Tarse, ville natale de saint Paul, un symposium consacré à ce dernier. Les Actes du sixième congrès (27-30 juin 1999) nous sont ici offerts, grâce à la diligence de L. Padovese. Les 21 contributions qui constituent ce recueil traitent de sujets fort divers, intéressants en eux-mêmes, mais dont la relation à Paul est souvent latérale. Deux articles sur Rm 8,4 et Ph 3,2 attirent l’attention : l’un est signé par R. Penna, l’autre par U. Vanni ; l’exégète paulinien y trouvera matière à réflexion. Épinglons encore une étude sur l’ecclésiologie de 1 P par F. Manns et un travail sur le peuple juif dans l’œuvre lucanienne par G. Ghiberti ; sujets importants et brûlants. Les autres articles touchent soit le Nouveau Testament et son milieu, soit des interprétations patristiques (notamment les figures de Pierre et Paul chez différents commentateurs), soit des informations archéologiques (Tarse et Séleucie). Surmontant l’impression de décousu qui ressort de ce volume, l’interprète du Nouveau Testament pourra y glaner une abondance de notations précieuses concernant ses thèmes favoris. Plusieurs articles sont munis d’une importante bibliographie. Bref, un bon instrument de travail pour les connaisseurs. — J.R.

Baumert N., Studien zu den Paulusbriefen, coll. Stuttgarter biblische Aufsatzbände – NT 32, Stuttgart, Verlag Katholisches Bibelwerk, 2001, 21x15, 320 p., 79 DM. ISBN 3-460-06321-1

7L’A., exégète jésuite, a enseigné jusqu’en 2000 le Nouveau Testament à l’École supérieure de Philosophie et de Théologie de Sankt Georgen à Francfort/Main. Il s’est spécialisé dans l’étude de Paul et de ses lettres, et s’est notamment attaché à la manière dont l’apôtre voit le rôle de la femme et de l’homme dans le dessein de Dieu. Ses différents ouvrages l’attestent : sur le mariage et le célibat (Würzburg 21986), sur l’antiféminisme chez Paul (Würzburg 1992), sur Homme et femme chez Paul (Würzburg21993). Le présent volume fait suite à un autre recueil intitulé Charisme – baptême - effusion de l’Esprit, 2 vol. (Würzburg 2001) ; il y rassemble des articles, parus dans diverses publications, qui manifestent une remarquable familiarité avec les écrits pauliniens et une nette perception de l’anthropologie qu’ils développent.

8Nous trouvons ici 23 études réparties en trois rubriques : l’exégèse de passages particuliers des lettres de Paul, dont le rapport entre les sexes (1 Co 6,12 – 7,40) ; 11,3-16 ; 14,33-36), la parénèse de Ga 5,25 – 6,10, un nouveau regard sur l’épître à Philémon — des contributions thématiques, soit sur la syntaxe paulinienne, soit sur la christologie et la sotériologie (quatre articles pénétrants sur l’union des chrétiens au Christ), soit sur les charismes en rapport avec les ministères, la spiritualité, le droit, soit encore sur l’herméneutique biblique (exégèse et spiritualité) — enfin une contribution sur le sens et la composition du livre de l’Apocalypse johannique. À cet arbre verdoyant, nous pouvons cueillir les fruits mûrs et variés d’une expérience de quarante ans de dialogue avec Paul, et découvrir effectivement que « l’Écriture grandit avec celui qui la lit », selon le mot de Grégoire le Grand dans son commentaire d’Ézéchiel. Rendons hommage à cet infatigable chercheur qui photographie le grand apôtre sous des angles encore inédits, invitant le lecteur, exégète de profession ou étudiant, à une réflexion en profondeur, et lui communiquant le goût de la théologie paulinienne. — J. Radermakers, S.J.

Benzi G., Paolo e il suo vangelo, coll. Interpretare la Bibbia oggi 2.5, Brescia, Queriniana, 2001, 21x14, 174 p., 12.39 €. ISBN 88-399-2464-7

9Le projet IBO se propose d’éditer une série de brèves monographies visant à une meilleure connaissance de la Bible (AT et NT), à l’usage des pasteurs et des fidèles. Le volume que Guido Benzi consacre à Saint Paul comporte trois parties. La première est une esquisse biographique de la vie et de l’œuvre de l’Apôtre des Gentils, telles qu’on peut les reconstituer surtout d’après ses Lettres et le récit des Actes. La seconde analyse l’aspect original et très riche de son annonce de l’Évangile aux communautés fondées ou animées par lui. La troisième partie applique ces données à une lecture continue de la Première Lettre aux Thessaloniciens et aide à découvrir la manière dont Paul présente la doctrine et la vie chrétiennes aux destinataires de son message ainsi que les richesses pour aujourd’hui que renferme ce texte inspiré.

10Une brève bibliographie choisie permet à ceux qui le souhaitent d’approfondir leur recherche. — †L. Renwart, S.J.

Biguzzi G., Velo e silenzio. Paolo e la donna in 1 Cor 11,2-16 e 14,33b-36, coll. Suppl. a la Rivista Biblica 37, Bologna, EDB, 2001, 24x17, 199 p., 19.11 €. ISBN 88-10-00000-0

11.

12Le voile et le silence des femmes : question bien actuelle ! Mais Paul parlait pour des chrétiennes aux chapitres 11 et 14 de sa première lettre aux Corinthiens. Le P. Biguzzi, prêtre enseignant le Nouveau Testament à l’Université pontificale de Rome, auteur de plusieurs monographies sur l’Évangile (Rome, 1987), l’Apocalypse (EDB, 1996) et Paul (Paoline, 1999), nous introduit à la conception paulinienne de la femme. Serait-il aussi antiféministe qu’on le dit ?

13L’A. s’attaque d’abord à la question du voile (1 Co 11,2-16) ; il fait état de la difficulté du texte, tant sur le plan du vocabulaire que du point de vue de l’articulation des idées, des allusions vétérotestamentaires, des données réelles du problème à Corinthe. Aussi entreprend-il une exégèse rigoureuse du passage, verset par verset, en dialoguant avec d’autres commentateurs. D’après lui, Paul veut mettre en valeur la féminité qui lui paraît négligée : le fait que l’homme et la femme sont à égalité dans le plan du salut ne signifie pas l’abandon des différences inscrites par le Créateur dans le corps et la psychologie des sexes, car la rédemption n’annule pas le dessein créateur ; d’ailleurs, le voile naturel de la femme n’est-il pas sa chevelure… ?

14Quant au silence des femmes dans les assemblées, Paul leur concède-t-il cet unique charisme ? Utilisant ici une méthode différente, l’A. replace les versets 33-36 de 1 Co 14 dans leur contexte historique et littéraire ; il compare le passage aux parallèles des Pastorales, aux actes apocryphes de Thècle et de Paul, puis il examine les commentaires grecs avec Origène et Jean Chrysostome, puis les exégètes latins, l’Ambrosiaster et Pélage antiféministes, et il en vient aux chercheurs et chercheuses modernes. Il montre ensuite que 1 Co 11 et 14 développent deux discours différents qu’il ne faut pas amalgamer. Il examine aussi la possibilité d’une interpolation (relecture ou slogan des interlocuteurs corinthiens).

15Finalement, comment comprendre Paul ? Il constate que son texte a effectivement obligé les femmes pendant deux millénaires à se taire à l’église et à se voiler. Aujourd’hui, on peut tourner la page. Et si le problème dépendait d’une virgule du texte ou du manque d’introduction d’une citation ou bien du ton de voix de l’apôtre ?

16Les exégètes pauliniens se délecteront de l’exégèse à la fois rigoureuse et volontiers humoriste de l’A. Une abondante bibliographie atteste le sérieux de l’étude. En définitive, on se demande si l’on a bien compris Paul, et s’il est vraiment antiféministe… Laissons la femme prendre son rôle à cœur, fût-il de prophétiser… — J. Radermakers, S.J.

Bunine A., Une légende tenace : le retour de Paul à Antioche après sa mission en Macédoine et en Grèce (Actes 18,18 – 19,1), coll. Cahiers de la Revue Biblique 52, Paris, Gabalda, 2002, 24x15, 142 p., 21.00 €. ISBN 2-85021-136-9

17Une monographie exemplaire en son genre : à partir de quelques versets rédactionnels des Actes des apôtres, qui semblent s’écarter de la vraisemblance historique, l’A. s’appuie sur le témoignage de la variante du « texte occidental » dont il souligne à bon droit la validité, revisite la chronologie paulinienne et s’attache à confirmer « l’hypothèse » des P. Boismard et Lamouille concernant la rédaction du livre des Actes. Sans être exégète de métier, l’A., qui signe sous un nom de plume, est familier de la Bible et lecteur perspicace des textes du NT en perspective historico-critique. Dans cet essai, il exerce son acribie et démontre son habileté d’herméneute. Son argumentation est précise et fine, sinon en tous points convaincante, et son information s’avère excellente.

18Certes, Lc n’est pas historien à la manière moderne : le rédacteur final de son œuvre compose une histoire théologique, sans doute à partir de « récits de voyage », sans se braquer sur l’exactitude du « référent événementiel ». Aussi pouvons-nous marquer notre accord avec l’A. concernant la « quatrième visite » de Paul à Jérusalem ou son passage à Antioche (Ac 18,18-22) ; avec lui nous pensons qu’il faut s’attacher plutôt à la composition narrative de l’œuvre. Manifestement, le rédacteur final entend montrer que l’évangélisation de Paul à Éphèse a été mûrie dans l’Esprit saint, lequel s’est chargé de la préparer. À cet effet, tandis que Priscilla et Aquilas balisent le terrain, il fait faire à Paul une sorte de voyage récapitulatif de son action passée : arrêt à Césarée pour « saluer l’église » de Jérusalem, passage par Antioche, le pays galate et la Phrygie.

19C’est une manière de dire que Paul a besoin de toute son expérience missionnaire pour s’attaquer à la ville d’Éphèse, car il faut y discerner l’œuvre de l’Esprit avec une attention redoublée. Ainsi le rédacteur note comment la théologie d’Apollos doit être revisée par une meilleure connaissance de l’Esprit Saint ; on a l’impression que par rapport à Paul, Apollos joue un rôle de précurseur, comme Jean le Prophète qui, mis en prison, disparaissait de l’évangile quand Jésus entrait en scène pour un ministère de trois ans. Comme si l’érudition d’Apollos ne faisait pas le poids devant l’activité pastorale que Paul déploiera à Éphèse pendant le même laps de temps. Nous avons là sans doute un de ces sommaires ou « raccourcis théologiques » dont Lc a le secret, pour nous faire percevoir le sens « spirituel » de l’histoire.

20À son arrivée à Éphèse d’ailleurs, Paul trouvera des disciples dans la même situation qu’Apollos, ignorants de l’Esprit Saint ; ils seront baptisés « au nom du Seigneur Jésus », prémices d’une nouvelle Pentecôte pour l’Asie. On voit que les « coups de pouce » donnés par le « rédacteur lucanien » à l’histoire factuelle sont au service d’une symbolique, qu’un travail minutieux comme celui de la monographie de l’A. permet de déceler ; nous lui en savons gré. Aux spécialistes de Luc-Actes d’en décider. — J. Radermakers, S.J.

Cassidy R.J., Paul in Chains. Roman Imprisonment and the Letters of St. Paul, New York, Crossroad Publ. Company, 2001, 23x15, XV-317 p., $ 24.95. ISBN 0-8245-1921-3

21En achevant sa lettre aux Colossiens, Paul écrit : « Souvenez-vous de mes chaînes » (Col 4,18). L’A. de ce livre suggestif, professeur de Nouveau Testament au Séminaire du Christ-Roi à Aurora-Est, dans l’État de New York, s’est souvenu… et il nous partage, dans cet essai, le fruit de ses investigations et de sa familiarité soutenue avec l’apôtre des nations. Il a particulièrement étudié les rapports entre les premiers chrétiens et le milieu socio-politique où ils vivaient. Dans ce volume, il tente d’élucider les conditions concrètes de l’emprisonnement de Paul à Rome, en parallèle avec ses épîtres et avec les Actes des apôtres qui consacrent huit chapitres à Paul prisonnier. L’A. est aussi bon connaisseur des écrits de Jean, de Luc et des Actes sur lesquels il a déjà publié.

22Le livre débute par deux chapitres concernant la loi romaine : qu’en pense Paul et quelles en sont les applications ? Il s’étend alors sur le contexte historique de Rm 13,1-7, puis brosse un portrait des prisonniers dans l’Empire romain face à la « Majesté impériale » sous Tibère, Gaius, Néron et Domitien. Passant alors au texte des épîtres, il examine le billet à Philémon, puis le témoignage de Colossiens et Éphésiens, avant de s’attarder à la IIe à Timothée pour déterminer quel était le sort d’un prisonnier à Rome. Le règne de Néron requiert aussi son attention pendant deux chapitres, avant de revenir à l’explication donnée par Paul dans sa lettre aux Philippiens sur son emprisonnement et au changement de position qu’elle suggère par rapport à la loi romaine. Un appendice important étudie les textes des Actes. En finale, la bibliographie et le double index habituel.

23Le texte de l’essai est agréable ; il est émaillé de citations d’Écriture et surtout de Paul. Les notes, où l’A. dialogue avec les commentateurs récents, sont rejetées à la fin du volume ; elles attestent l’information large de l’A. autant que son esprit critique. Des notations précises, souvent inédites, renouvellent la perspective, notamment à propos de Rm 13, et expliquent bien le fonctionnement de la justice impériale. Cette belle étude à la fois socio-politique et littéraire sera consultée avec intérêt par les exégètes de Paul, professeurs et étudiants, et par les lecteurs curieux du sujet. — J. Radermakers, S.J.

Chocheyras J., Les Actes des Apôtres Pierre et Paul. Histoire, tradition et légende, coll. Religion et Sciences humaines, Paris, L’Harmattan, 2003, 22x14, 320 p., 25 €. ISBN 2-7475-1179-0

24Voici une lecture séculière et critique des Actes des apôtres qui risque de déstabiliser certains lecteurs ou de leur poser question. Elle est l’œuvre d’un disciple du regretté E. Delebecque, professeur émérite de l’Université Stendhal de Grenoble et spécialiste des légendes religieuses. A la suite de Loisy, puis de Couchoud et Stahl, et plus récemment de Boismard, Lamouille et Taylor, il tente de préciser, autant que possible, la genèse de la composition du second livre de Luc et de reconstituer au moins certains jalons de l’histoire authentique des apôtres Pierre et Paul, les deux protagonistes de l’œuvre, au-delà des légendes recueillies par le rédacteur, et des libertés rédactionnelles qu’il prend par rapport aux faits réels pour « faire passer » sa thèse théologique. C’est donc un tout autre propos que celui que nous avons développé dans notre volumineux commentaire (cf. NRT 118 [1996] 273) mentionné par l’A. dans son introduction (p. 21).

25D’après lui, sur base de nombreux indices littéraires, la geste de Paul « apôtre des gentils » aurait été composée pour faire suite à l’évangile de Luc décrivant le ministère de Jésus auprès du peuple d’Israël. Par la suite, aurait été ajouté un recueil de traditions sur Pierre, agencées par un autre rédacteur, pour faire du « prince des apôtres » un portrait parallèle à celui de Paul, pareillement modifié par rapport à ses sources.

26Faisant état des remaniements successifs apportés au texte d’origine, il commence sa démonstration par l’histoire des « hellénistes », d’Étienne et de Philippe, qui laisse supposer une rupture au sein de la première communauté entre Juifs aramaïsés et Juifs hellénisants. Il reconstitue ensuite l’histoire de Saül, à la suite de S. Légasse et de M.-F. Baslez, puis il analyse de façon précise les aspérités du texte, montrant les coups de pouce du rédacteur définitif, qui souligne le statut social élevé de Paul, comme sa prise de distance par rapport au groupe des « apôtres » du Christ. Poursuivant son examen critique, l’A. suit la rédaction des Actes dans le récit de Paul en Asie mineure et à l’assemblée de Jérusalem, qu’il place en 42, soit sept ans après sa conversion. La même analyse rigoureuse du texte le mène à relire le périple européen de Paul et lui permet de détecter les modifications du second rédacteur concernant son retour en Syrie, puis son séjour à Éphèse, marquant chaque fois l’écart introduit par le rédacteur par rapport à la correspondance de Paul aux églises de ces régions, et il suggère une date postérieure à Paul pour le discours de Milet. L’A. continue de suivre Paul lors de son retour à Jérusalem, en notant toujours les interpolations du réviseur, comme dans les récits de l’arrestation et des comparutions — dont l’invraisemblance de celle devant le sanhédrin et de l’intervention du neveu de Paul — et spécialement celles devant Felix, puis Festus et Agrippa. Quant au voyage vers Rome, les interpolations du rédacteur sont passées au crible par l’A., qui s’étend aussi sur la fin des Actes, et parallèlement sur le martyre de Paul, en confrontation avec Josèphe et Clément de Rome. À la fin, il propose sa chronologie paulinienne.

27Il examine alors l’histoire de Pierre : « voile de traditions plus ou moins légendaires, auxquelles le second rédacteur a fait des ajouts qui reflètent ses propres préoccupations, à savoir dresser un tableau édifiant d’une communauté groupée autour des Douze apôtres, inspirés en permanence par le Saint-Esprit, et dont Pierre est le chef incontesté » (p. 189). L’A. tente de débrouiller le texte pour en extraire le fond historique et les embellissements du réviseur. Il conclut que Pierre serait mort à Jérusalem en prison (cf. Ac 12) sous Agrippa Ier et il consacre un long chapitre à la naissance et au développement de la tradition concernant le voyage et le martyre de Pierre à Rome, textes à l’appui. Travail minutieux se basant sur les ouvrages de Ch. Grappe et les écrits de Justin et des Actes de Pierre publiés par Vouaux, puis il analyse l’histoire du tombeau de saint Pierre et l’histoire de la succession apostolique, soulignant l’imprécision des traditions.

28La conclusion de l’ouvrage parle de l’enseignement de Pierre à travers les Actes. L’A. y lit une théologie différente de celle des hellénistes et de Paul. Il estime que « la doctrine officielle de l’Eglise a cumulé deux errements » : « un peuple juif historiquement responsable de la mort du Christ », et « un Christ mort pour nos péchés » (p. 293). En cela il paraît bien tributaire de l’interprétation protestante, défendue notamment par É. Trocmé.

29Ce livre, impressionnant par son érudition et son acribie, présente des hypothèses ingénieuses, plausibles et même souvent convaincantes. Il nous invite à réfléchir sur la notion d’histoire dans la Bible. En fait, l’auteur de Luc-Actes raconte une « histoire théologique » de la croissance des premières communautés chrétiennes, c’est-à-dire déjà une interprétation à partir de l’action conjointe du Ressuscité et de l’Esprit Saint. Il articule ainsi la mémoire des événements et leur lecture dans la foi, tout en donnant au lecteur la possibilité de dégager de la composition finale du texte les strates de développement progressif de l’interprétation salvifique des faits qu’il rapporte. Ainsi le récit des Actes est-il davantage qu’une histoire romancée ou gauchie de façon partisane ; il se donne comme la lecture en profondeur de notre foi en Christ à travers les témoins authentiques que sont Pierre, Étienne, Paul et les autres. Les lecteurs formés sauront y trouver leur bien. Des plans, des cartes, une bibliographie complètent le volume, qui contient quelques coquilles orthographiques. — J. Radermakers, S.J.

Das A.A., Paul, the Law and the Covenant, Peabody, Hendrickson, 2001, 22x14, XIX-342 p., $ 17.99. ISBN 1-56563-463-2

30Quelle compréhension Paul a-t-il de la Loi de Moïse ? Question essentielle pour une théologie de la foi en Christ. Après de nombreux autres chercheurs, l’A. se penche sur le problème. Jeune professeur assistant en théologie au Collège de Elmhurst (Illinois, U.S.A.), il a pu profiter de l’enseignement des Prof. W.A. Meeks et P.J. Achtemeier. Son livre est dédié à sa femme qui a longtemps souffert.

31Dans le sillage de E.P. Sanders (Paul and Palestinian Judaism, 1977), l’A. prend acte que, pour le judaïsme, le don de la Torah s’inscrit à l’intérieur d’une perspective de grâce, ce que beaucoup de commentateurs de Paul ont négligé. Il se demande comment le judaïsme est passé, au Ier siècle, d’une perspective de grâce touchant la Loi à un légalisme que Paul combat au nom de la foi au Christ, seul Sauveur. Son propos est de revisiter Paul sur fond de cette évolution, d’où sa démarche historique.

32Au 1er chapitre, il examine le passage de la grâce inconditionnelle à l’obéissance formelle dans le judaïsme des débuts. Il interroge le Livre des Jubilés, la littérature de Qumrân, Philon, les Tannaïtes, qui tous placent la grâce au départ de leur conception de la Loi, puis il assiste au déclin de cette situation dans la littérature apocryphe de l’AT. Il pose alors trois questions à Paul : Affirme-t-il un « nomisme de l’Alliance » (Ga 3,15-17 ; 4,21-31 ; 2 Co 3,1-18) ? – Quelle est sa position face à l’élection d’Israël (Rm 9 – 11) ? – Quelle importance donne-t-il au sacrifice du Christ (1 Co 5,7 ; Rm 8,3 ; 2 Co 5,21 et surtout Rm 3,24-25) ? Pour tenter de répondre avec Paul, il analyse au plus près quelques textes essentiels : d’abord les « œuvres de la Loi » en Ga 3,10 et Rm 1,18 – 2,29 ; puis il en vient à Rm 3,27 – 4,8 : est-on justifié par grâce ? En quoi consiste « la vie sous la Loi » (Ph 3,2-9 et Rm 7) ? Enfin, que signifie la « poursuite de la Loi » par Israël (Rm 9,30 – 10,21) ?

33Chaque chapitre est ponctué par une conclusion partielle. Sa conclusion finale corrige un peu la vision de Sanders concernant l’obéissance parfaite à la Loi dans le judaïsme : après la chute du temple et la suspension des sacrifices, le jugement de salut se réalise suivant l’observance de la Torah, ce qui explique la tendance au légalisme. Paul réagit, en montrant que la structure de grâce et l’élection d’Israël aboutissent, en fait, au Christ, en qui tous les hommes sont appelés au salut. Ce que Paul met en question, c’est que l’économie de la Loi soit le privilège exclusif d’Israël. Le Christ seul accomplit parfaitement la Loi, donnant à l’homme d’en observer les œuvres. Ainsi l’observance apparaît-elle comme un don intérieur à la grâce du Christ.

34Une bibliographie de près de 700 titres montre la vaste information de l’A. sur ce sujet si controversé. Il y apporte sa pierre ; ses analyses précises sont désormais incontournables pour tout exégète de Paul désireux de voir un peu plus clair dans ce difficile problème. — J. Radermakers, S.J.

Dognin P.-D., Paul, théologien de la confiance en Dieu, coll. Connaître la Bible 10, Bruxelles, Lumen Vitae, 1998, 21x15, 64 p. ISBN 2-87324-113-6

35L’A., ex-professeur de philosophie, prédicateur, se propose de manifester à neuf, au centre de la pensée paulinienne, la foi du Christ comme suscitant la nôtre en lui. Cette foi-confiance envers son Père, à l’opposé du péché-défiance, s’exerce suprêmement à la croix : « Père, entre tes mains… ». De ce moment décisif, Paul aurait eu la claire révélation. D’où la croix, épicentre de la grâce, comme contenu principal de son « évangile ». L’A. convoque notamment divers passages d’He selon lesquels l’obéissance du Christ le mène à sa perfection pour qu’il puisse y acheminer ses frères. Car si nous sommes justifiés par cette foi du Christ avant tout, « notre foi au Christ, sans nous justifier par elle-même, permet à la foi du Christ d’exercer en nous son action justifiante » (33), « le Christ devenant ainsi le médiateur de notre foi » (44), de telle sorte que l’on comprend Rm 1,16-17 comme suit : « en lui [l’évangile de la croix], la justice de Dieu se révèle de la foi [comprenons : la foi de J.-C.] à la foi [du croyant] » (57).

36Pour développer cette perspective, et mis chaque fois à l’enseigne d’une ou deux citations pauliniennes, cinq courts chapitres : croix, rédemption, justification, sanctification, prédication. L’A. s’appuie sur quelques auteurs de prédilection : Balthasar, Guillet, Lyonnet, Ignace d’Antioche. Il évoque volontiers les sacrements — baptême, eucharistie — où s’enracine l’union au Christ. L’argumentation est parfois un peu lâche ou foisonnante, chargée, dans le texte ou en notes, de remarques latérales. On pourra être gêné par certaines enfilades de passages du NT que leurs contextes différents inviteraient à ne pas si vite rapprocher. L’A. tend à utiliser et réinterpréter trop d’expressions pauliniennes à la lumière de son idée-force de « la foi du Christ ». Par ex. lorsque « une écoute de foi » (Ga 3,2) est comprise comme « l’audition d’une foi » et interprétée comme visant strictement l’audition du cri-confiance que lance Jésus en croix (54).

37Néanmoins, le propos reste éclairant. Par la lumière qu’il projette sur la justification, ce livret servira aussi le dialogue œcuménique. Il stimulera spirituellement ses lecteurs, en les invitant à une union plus grande avec le Christ en croix, dont l’A. souligne bien la foiconfiance, à défaut d’assez manifester la charité qui l’anime inséparablement. — Ph. Wargnies, S.J.

Dognin P.-D., « La foi étant venue ». L’Épître aux Galates, coll. Connaître la Bible 25, Bruxelles, Lumen Vitae, 2002, 21x15, 64 p., 6.25 €. ISBN 2-87324-168-3

38C’est la deuxième contribution à la collection Connaître la Bible du Frère Paul-Dominique Dognin, ancien professeur au Saulchoir, à l’Université Saint Thomas d’Aquin à Rome et à l’Institut catholique de Paris, actuellement en « retraite » studieuse et apostolique. Il se propose, dans cet essai, non pas de fournir un commentaire approfondi de la lettre aux Galates, mais de la réinterpréter brièvement à partir d’une expression de Paul qui n’est pas toujours bien traduite ou comprise exactement : Paul parle de la foi de Jésus-Christ, c’est-à-dire de sa fidélité à son Père, qui devient celle du croyant, vraie foi en Jésus-Christ. Comment la vivre dans « la liberté des enfants de Dieu », sans retourner aux pratiques de la Loi ?

39L’A. déroule d’abord une traduction de l’épître. Puis, en suivant le fil du texte, il l’explique succinctement, en renvoyant à d’autres lettres de Paul ou aux Actes des apôtres. Il développe particulièrement « l’Évangile de Paul » et le sens de la justification par la foi en Jésus Christ, par laquelle nous sommes configurés à Jésus lui-même. Celui qui sauve, c’est Dieu, et non la pratique de la Loi, mais le croyant pourrait considérer sa pratique comme une assurance-salut. Or tel n’est pas le cas : ce qui sauve, c’est la transformation intérieure du chrétien par la foi de Jésus-Christ qu’il laisse agir en lui. Telle est l’œuvre de l’Esprit en nous. Ce que Paul appelle la Loi, c’est donc plus une conception de celle-ci qui la réduirait au précepte et qui n’en verrait pas le formidable dynamisme de libération, lequel culmine dans le Christ. La Loi, qui donne la connaissance du péché, se situe sur le trajet de l’Esprit Saint qui, via la promesse, travaille déjà le précepte, comme un pédagogue illuminé par la foi au Christ.

40Pas d’autre conclusion que celle de Paul : l’A. s’efface devant la parole de l’Apôtre afin que nous laissions produire en nous les fruits de l’Esprit Saint. Merci de cette belle leçon d’exégèse, qui simplifie la compréhension du texte sans l’édulcorer. — J. Radermakers, S.J.

Edart J.-B., L’épître aux Philippiens. Rhétorique et composition stylistique, coll. Études bibliques n.s. 45, Paris, Gabalda, 2002, 24x16, 384 p., 57 €. ISBN 2-85021-138-2

41Œuvre substantielle au service de la rhétorique paulinienne, cette étude de l’épître de Paul aux Philippiens fait aussi honneur à l’École biblique de Jérusalem où l’A., membre de la communauté de l’Emmanuel a travaillé sous l’égide des Frères dominicains, particulièrement les Frères P. Garuti et J. Murphy O’Connor qui ont accompagné la rédaction de cette thèse.

42Il existe peu d’ouvrages d’ensemble sur la composition littéraire de la lettre aux Philippiens, considérée souvent comme trop intime pour permettre un développement organisé suivant les règles de l’art oratoire antique. Or l’A. de cet essai, partant d’une première lecture du texte, puis poursuivant son travail par une analyse stylistique, est arrivé à en découvrir la structure argumentaire conduisant à une interprétation de son message. En fait, le style épistolaire ne rend pas suffisamment compte de la composition et de l’articulation des thèmes touchés par Paul, et il est nécessaire de recourir d’abord à un examen approfondi du style de l’épître.

43La méthode utilisée est précise et rigoureuse : chaque étape du travail comporte une analyse du style et du raisonnement des péricopes du chapitre, puis une explicitation de l’argumentation. Après une exposition des préliminaires méthodologiques, tous les éléments sont passés au crible : la salutation, les figures de style, les détails du processus argumentatif, le rythme de la phraséologie, la manière de proposer le sujet, les métaphores, les subtilités de la rédaction, les passages hymniques, les ajouts rédactionnels, les modèles littéraires et finalement les étapes du raisonnement et le message de la lettre.

44La conclusion s’efforce de montrer le double caractère, unifié et composite, de l’ensemble où Paul exhorte ses interlocuteurs à s’identifier au Christ jusqu’à embrasser sa croix et passer à la gloire du Père avec lui. L’A. souligne que l’Apôtre fait référence à la sagesse stoïcienne ambiante afin de manifester l’exigence de la folie de la croix face à la mentalité du monde. Du point de vue de la rédaction, il note « une possible main lucanienne derrière les ajouts effectués » (p. 327). En mettant au jour les artifices littéraires, l’A. ne rend pas compte de tout le message de la lettre, et il faudrait compléter l’étude par un approfondissement théologique — par ailleurs souvent mis en évidence par les commentateurs — et par un examen de sa réception dans la tradition ultérieure. Mais il fallait commencer par l’examen formel, et l’A. nous a rendu ce service avec patience et compétence. Nous l’en remercions. Il n’a pas manqué de nous offrir un lexique des termes stylistiques employés et du vocabulaire rhétorique, ainsi qu’une bibliographie précieuse pour les chercheurs pauliniens. — J. Radermakers, S.J.

The Galatians Debate. Contemporary Issues in Rhetorical and Historical Interpretation, éd. M.D. Nanos, Peabody, Hendrickson, 2002, 24x16, LVI-517 p., rel., 24.95 $. ISBN 1-56563-468-3

45Un monumental recueil, superbement édité et d’une étonnante richesse pour les spécialistes de Paul nous est offert ici par un professeur diplômé de l’Université de St. Andrews, qui a déjà publié sur les lettres de Paul aux Romains (1996) et aux Galates (2002) ; il présente ici un recueil d’articles de haut niveau déjà publiés ailleurs. À la suite des recherches exégétiques modernes en matière d’analyse rhétorique et socio-historique, l’interprétation de l’épître de Paul aux Galates se trouve en effet singulièrement en « débat ». C’est ce que nous explique l’éditeur dans une longue introduction : approches rhétoriques et analyse épistolaire ; récits autobiographiques et examen socio-historique ; situation des Galates ; tels sont les points majeurs des discussions entre 22 auteurs qui ont contribué à la composition de ce volume.

46Il est divisé en quatre parties. La première est consacrée aux genres rhétorique et épistolaire, avec contributions de H.D. Betz (Chicago) sur la composition de l’épître, de R.G. Hall (Virginie) sur son plan rhétorique, de J. Smit (Utrecht) sur le discours délibératif, de R.M. Berchman (New York) sur Ga 1,1-5, de T. Martin (Chicago) sur la controverse galate et de C.J. Classen (Göttingen) sur le rapport entre les lettres de Paul et la rhétorique antique. Suivent deux articles à propos du genre épistolaire, de N.A. Dahl (Yale Univ.) et de G.W. Hansen (Pasadena). La deuxième partie parle de récits autobiographiques, avec quelques approches rhétoriques : de P.E. Koptak (Chicago) sur Ga 1,13-2,14, de J.S. Vos (Amsterdam) et de J.D. Hester (Californie) sur l’argumentation et la rhétorique de Ga 1-2 ; puis quatre approches socio-historiques : de J.D.G. Dunn (Durham) sur Ga 2,11-18, de P. Fredriksen (Boston) sur le judaïsme en Ga 1-2, de Ph.F. Esler (Écosse) sur Ga 2,1-14 et de M.D. Nanos (Missouri) sur l’expression « manger avec les Gentils ».

47La troisième partie développe la situation des Galates, avec l’opposition à Paul (A.E. Harvey, Oxford), les agitateurs et la communauté des Galates (R. Jewett, Heidelberg), la mission aux païens (J.L. Martyn, New York), les opposants à l’évangile du Christ (N. Walter, Iena), la polémique de la lettre (J.M.G. Barclay, Glasgow), l’argumentation mise en œuvre (B.C. Lategan, Afrique du Sud), le contexte politique juif (M.D. Nanos, Missouri), la « folie » des Galates et l’imitation du Christ crucifié (D. Mitternacht, Lund). Une ample bibliographie et les index indispensables achèvent de faire de ce florilège un instrument de première valeur pour une approche scientifique spécialisée de la lettre aux Galates. Merci du service rendu ainsi aux exégètes de Paul. — J. Radermakers, S.J.

Goulder M.D., Paul and the Competing Mission in Corinth, coll. Library of Pauline Studies, Peabody, Hendrickson, 2001, 23x16, XIV-303 p., $ 17.99. ISBN 1-56563-379-2

48L’altercation entre Pierre et Paul dont fait mention l’épître aux Galates (2,7-8) est-elle l’écho d’une divergence théologique profonde entre les deux apôtres, au point que l’on puisse déceler dans les premières communautés chrétiennes un courant paulinien et un pétrinien (Jacques, Pierre, Jean) ? Telle était l’hypothèse du chercheur allemand F.Ch. Baur en 1845, à la suite de J.E.C. Schmidt en 1797. M.D. Goulder, spécialiste des écrits pauliniens, professeur émérite en études bibliques à l’Université de Birmingham, a déjà publié sur le sujet, notamment St. Paul versus St. Peter : A Tale of Two Missions, Incarnation and Myth, et Luke : A New Paradigm.

49Dans cet essai, il pousse plus loin l’enquête en l’étendant à la communauté de Corinthe qui, d’après Paul lui-même, se trouvait divisée, avec un groupe de chrétiens partisans de Céphas (1 Co 2,1.12). Un chapitre d’introduction à la problématique précède un examen précis sur le rôle de Pierre à Corinthe (en 54-56) après la mission d’Apollos (52), suivant les deux lettres aux Corinthiens. L’A. poursuit son étude en s’interrogeant sur le message de sagesse centré sur la Torah apporté par Pierre et ses compagnons, et sur la distance que prend Paul à son endroit : quelle référence à l’AT ? — quel sens prennent connaissance et vision ? — que signifient les rapports sexuels dans le milieu de Corinthe ? — quel est le rôle des femmes dans les assemblées ? Ensuite, l’A. analyse l’importante question des viandes offertes aux idoles, et il fait appel à l’assemblée de Jérusalem de Act 15. Quel Christ annoncent les missionnaires chrétiens à Corinthe ? Quelle portée donner à la résurrection des morts ? Quelle compréhension les Corinthiens avaient-ils de la personne de Jésus et de l’eucharistie ? Toutes ces questions, qui font la trame des deux lettres, sont passées au crible. Enfin, il brosse un tableau de l’église de Corinthe entre 50 et 56, montrant qu’il n’y a pas de rivalité entre les adeptes de Pierre et ceux de Paul, mais que deux théologies se présentent avec des accents différents et complémentaires. Il estime que Paul quitta Corinthe en 56, qu’il arriva à Rome en 59 et qu’il fut exécuté en 61. Cinq appendices sont consacrés à des questions critiques touchant les deux épîtres.

50Cette étude constitue un sérieux apport à la connaissance du milieu de Corinthe, avec les divergences notoires entre les groupes de missionnaires, surtout à propos de christologie : annoncent-ils le même Jésus ? En tout cas, leurs expressions ne concordent pas toujours. Cela reste difficile à débrouiller, mais l’analyse de l’A. contribue à éclaircir bien des questions par rapport aux théologies en présence à l’époque de Paul, et dans les églises après lui. Cet essai, on l’aura compris, intéressera surtout les spécialistes. — J. Radermakers, S.J.

Holzner J., Le défi culturel chrétien selon saint Paul, rééd., coll. Aurore, Paris, Téqui, 2002, 18x11, 287 p., 15 €. ISBN 2-7403-0943-0

51On connaît l’ouvrage classique sur saint Paul publié par l’A. voici plus d’un demi-siècle : Paul de Tarse ; on le trouve dans toutes les bibliothèques. Pour beaucoup de chrétiens, il a dessiné un portrait inoubliable du grand Apôtre. Plus tard, l’A. réunissait des conférences et articles concernant l’actualité du message de Paul ; l’édition originale allemande s’intitulait Rings um Paulus et sa traduction française datait de 1953. C’est ce volume qui reparaît aux éditions Téqui. En fait, il resitue l’évangélisateur des païens dans le cadre de la vie socio-politique et religieuse de son époque où l’on retrouve des traits comparables à notre monde sécularisé, mais aussi de grandes différences qu’il ne faudrait pas estomper. Après avoir en quelques brefs chapitres replacé Paul dans le développement du « christianisme primitif », l’A. s’attarde à considérer les mystères grecs et l’idée de salut qu’ils véhiculent, puis il rappelle l’épopée évangélisatrice de l’Apôtre et esquisse la morale dont il se porte garant ; ensuite, il en fait le portrait comme prêtre et prédicateur. Après avoir retracé les grandes lignes théologiques du message paulinien, il conclut en nous parlant de la mort, et de sa conception dans l’antiquité et selon la foi chrétienne.

52Ce petit volume est encore plein d’enseignements pour le chrétien d’aujourd’hui, à charge d’en faire une transposition moderne. Son avantage est de synthétiser l’œuvre évangélisatrice de Paul et son message théologique. Ainsi il rendra service aux chrétiens trop souvent rebutés par l’écriture paulinienne. — J.R.

Kariuki Njiru P., Charisms and the Holy Spirit’s Activity in the Body of Christ. An Exegetical-Theological Study of 1 Corinthians 12,4-11 and Romans 12,6-8, coll. Tesi Gregoriana – Serie Teologia 86, Roma, PUG, 2002, 24x17, 367 p., 22.00 €. ISBN 88-7652-926-8

53Une bonne thèse de doctorat de l’Université grégorienne pontificale de Rome nous est offerte par un prêtre du Kenya, qui a travaillé au secrétariat de l’éducation pour les écoles catholiques du diocèse d’Embu. Son étude est consacrée à la théologie paulinienne des charismes comme action de l’Esprit Saint dans le Corps du Christ qui est l’Église ; il entreprend une analyse des deux passages importants de Paul sur le sujet : 1 Co 12,4-11 et Rm 12,6-8.

54La thèse est menée de manière classique, avec précision dans l’attention aux textes. En quelques pages d’introduction, il détermine son propos et présente sa méthode. Une première partie s’attache au passage de 1 Co 12 au sujet de la diversité dans la manifestation de l’Esprit Saint. Quelques traits généraux dessinent le contexte et précisent l’occasion de la lettre. Un premier balayage du texte est suivi d’une exégèse détaillée des versets choisis afin de déterminer le sens des charismes chez Paul, avec approfondissement théologique.

55Une deuxième partie examine Rm 12 sur les charismes comme dons de service au sein de la communauté. Après un survol de l’épître, le même processus est enclenché : examen de la péricope suivi d’une analyse de chaque verset séparément. La réflexion théologique met en évidence la fonction de service au sein du Corps du Christ par les charismes qui monnayent la grâce que donne l’Esprit. La troisième partie constitue une synthèse théologique d’une bonne quarantaine de pages sur le fonctionnement des charismes dans le Corps du Christ. L’A. montre comment la grâce se diversifie en multiples dons. Les membres du Renouveau y trouveront des réflexions substantielles afin de promouvoir dans l’Église unité et cohésion grâce au dynamisme de l’Esprit au service du Corps total. Un travail de valeur, parfois un peu long et répétitif, mais rigoureusement mené. — J.R.

Lambrecht J., Collected Studies on Pauline Literature and the Book of Revelation, coll. Analecta biblica 147, Roma, PIB, 2001, 24x17, XV-435 p., 25.82 €. ISBN 88-7653-147-5

56Saluons la publication de ce recueil de travaux d’un vétéran de l’exégèse belge, professeur émérite de Nouveau Testament à l’Université catholique de Leuven et à l’Institut biblique pontifical de Rome. Sa longue habitude de l’Écriture est attestée par bon nombre d’ouvrages publiés surtout en anglais ; en traduction française, nous disposons d’une précieuse monographie sur les paraboles (Tandis qu’il nous parlait…, Lethielleux, 1980). Trente contributions importantes sur les lettres de Paul et l’Apocalypse ont été rassemblées dans ce volume des Analecta biblica : la plupart ont paru dans diverses revues spécialisées ou recueils de travaux dont l’accès n’est pas toujours aisé.

57L’ouvrage présent contient : quatre articles sur l’épître aux Romains (3,29-30 ; 8,5-8 ; 10,1-4 ; 12,8-9), cinq sur la 1re aux Corinthiens (1,17-18 ; 4,6-21 ; 8,1 – 11,1 ; 15 ; 15,12-20) et quatre sur la seconde (8,24 – 9,5 ; 10 à 13 ; 10,1-6 ; 11,23-33). Suivent sept études sur les Galates (2,11-21 ; 4,12-20 ; 5,1 et 3,13 ; 5,11 ; 5,17 ; 6,1-6 ; une réflexion sur la Loi) et deux sur la 1re aux Thessaloniciens (2,13 ; 4 et 5). Viennent enfin trois essais sur le Christ et l’Église épouse (Eph 5,21-33), sur l’attente du Christ (2 Th 3 – 5) et sur la liberté chrétienne en 1 P 2,16. Une deuxième partie est consacrée à l’Apocalypse (lettres aux églises : 2,9-10 et 3,9 ; l’ouverture des sceaux : 6,1 – 8,6 ; le « peuple de Dieu » dans le livre ; les bénédictions finales : 20,11 – 21,8). Ces dernières études sont le fruit du Colloquium biblicum lovaniense de 1980 dont les contributions ont été éditées par l’A. sous le titre L’Apocalypse johannique et l’Apocalyptique dans le Nouveau Testament.

58Merci à l’A. et aux éditeurs d’avoir préservé de l’oubli ces précieux travaux, dignes témoins d’une riche et féconde expérience des textes sacrés. Un double index des références bibliques et des auteurs complète ce recueil qui stimulera l’attention des chercheurs à propos de plusieurs versets difficiles auxquels l’A. donne un éclairage original et perspicace. — J. Radermakers, S.J.

Légasse S., L’épître de Paul aux Romains, coll. Lectio divina - Commentaires 10, Paris, Cerf, 2002, 22x14, 992 p., 76.00 €. ISBN 2-204-06896-9 ; L’epistola di Paolo ai Romani, éd. G. Francesconi, tr. P. Crespi, coll. Commentari biblici, Brescia, Queriniana, 2004, 23x16, 810 p., 72 €. ISBN 88-399-1133-2

59Ce volumineux commentaire d’un bibliste renommé, professeur émérite de l’Institut catholique de Toulouse, spécialiste des évangiles (cf. NRT 120 [1998] 103-104) et surtout de Paul (cf. NRT 115 [1993] 916), est l’œuvre d’un vétéran de l’exégèse qui met ici à la disposition d’un public intéressé son expérience, fruit d’une longue fréquentation des écrits de l’« apôtre des païens ». Son commentaire se déroule de façon analogue à ceux qu’il a consacrés aux lettres aux Thessaloniciens (Cerf, 1999) et à celle aux Galates (Cerf, 2000). Une bibliographie choisie et une brève introduction ouvrent le volume, situant la communauté de Rome, ses rapports avec Paul et la valeur de « testament spirituel » que prend cette Lettre aux Romains dans l’œuvre de l’apôtre.

60Le commentaire est précis, soigné, proche du texte, dont il fait percevoir le sens littéral en même temps que l’argumentation et les perspectives théologiques. De temps en temps, un « excursus » succinct détermine de manière détaillée le sens d’un mot, d’un thème ou d’un passage plus difficile. On a songé à aider le lecteur par un précieux index des sujets traités, permettant de retrouver les versets où il est expliqué. On aurait préféré pouvoir consulter les notes en bas de page plutôt qu’à la fin des unités rédactionnelles, car le va-et-vient s’avère fastidieux. Nous regrettons aussi que l’A. n’ait pas tiré profit des nombreux ouvrages parus récemment sur la rhétorique antique ; ils sont souvent éclairants pour saisir les ressorts de l’argumentation paulinienne.

61Son découpage de l’épître demeure classique : une première section pratique (1,16 – 11,36) est intitulée « L’Évangile, puissance de salut pour les Juifs et les Gentils » ; la section pratique (12,1 – 15,13) est appelée « Directives générales et concrètes à l’intention des justifiés » ; elles sont encadrées par les « préalables » (1,1-15) et l’épilogue (15,14 – 16,27). L’A. ne cherche pas à réduire les « tensions » que les commentateurs reconnaissent dans la lettre, comme dans la théologie de Paul. Il s’efforce de suivre au plus près la pensée d’un homme d’action qui tente de situer le mystère pascal au cœur de « l’histoire du salut » et d’en tirer les conclusions pour l’agir de tout chrétien, tant celui qui est issu d’Israël que celui qui vient des nations.

62Nous ne pouvons que recommander ce majestueux commentaire de près de mille pages ; il rendra de grands services aux exégètes francophones, peu favorisés dans ce domaine comparativement aux travaux des chercheurs allemands ou anglophones. La compétence de l’A. et sa familiarité avec la vie et les écrits de Paul rendent ce volume désormais indispensable. — J. Radermakers, S.J.

Montagnini F., Lettera ai Romani I-VIII. Fra i segreti del testo, coll. Il pellicano rosso n.s. 9, Brescia, Morcelliana, 2002, 19x12, 154 p., 12.50 €. ISBN 88-372-1906-7

63L’A., bibliste italien renommé, professeur d’histoire du christianisme à l’Université de Brescia et d’exégèse du NT au Séminaire théologique de cette ville, fait passer dans ce petit commentaire pour gens pressés l’essentiel de sa longue habitude des textes pauliniens. Tout n’a pas été dit, en effet, sur cette admirable épître dans laquelle Paul lui-même revisite l’histoire du salut pour tout homme (chap. 1 à 8), le Juif d’abord, et aussi le païen. En une dizaine de chapitres bien troussés, écrits dans un style vif et interpellant, il nous fait entrer dans le mouvement de la pensée de Paul : dans son souci pastoral, il esquisse le parcours de la justice de Dieu révélée à tous, à charge pour chacun de donner sa foi à Jésus Christ, envoyé par le Père pour introduire l’humanité dans l’intimité divine, grâce à l’Esprit Saint. En fait, la lettre aux Romains est une ardente prière dans la foi au Dieu qui sauve. Ce petit livre, largement accessible pour qui entend l’italien, est à lire et à relire. — J.R.

Orge M., ¿Es posible la virginidad? Criterios paulinos para su discernimiento, coll. Monografías 9, Madrid, Publ. Claretianas, 2001, 22x16, 223 p. ISBN 84-7966-226-3

64L’A. de cette monographie sur la virginité, d’après le chapitre 7 de la première épître de Paul aux Corinthiens, était religieux de la congrégation des Missionnaires clarétins. Né en 1931, il mourut à Grenade en 1991, après avoir enseigné les Écritures à Rome, à Salamanque, à Madrid et à Grenade : un homme dévoré par le feu de la Parole, au témoignage de ses collègues et de ses étudiants. Soucieux de creuser les fondements de la vie religieuse, il avait présenté une thèse sur la Croix de Jésus selon l’épître aux Galates. Dans l’ouvrage posthume que nous présentons, il examine les critères pauliniens pour un discernement en vue de l’option au célibat.

65Après un panégyrique de l’A., signé par un exégète de Grenade qui lui a succédé, nous trouvons un bref exposé sur le thème doctrinal de 1 Co 7. Un premier chapitre développe la question posée à Paul par les Corinthiens : face à l’immoralité ambiante, faut-il recommander l’abstinence sexuelle ? Après avoir rappelé les passages évangéliques sur le sujet, l’A. explique la réaction des gens de Corinthe en raison de la dissolution des mœurs. Le chapitre 2 détaille la réponse de Paul dans un minutieux commentaire verset par verset : l’idéal de la continence sexuelle parfaite, le discernement à établir en distinguant les divers cas de figure, la dynamique du texte à propos de la viabilité du célibat. Dans un troisième chapitre, l’A. réfléchit sur l’enjeu et la pratique de l’idéal de la continence : le seul vrai motif est à la fois christologique et eschatologique, et non en raison de la proximité de la fin du monde, ou suivant un idéal stoïcien ou ascétique, ou encore en raison des inconvénients de la vie conjugale. En effet, seul le Christ est ma fin aujourd’hui. Une exégèse sobre, proche du texte, fine et nuancée, fait de cet ouvrage un modèle de rigueur interprétative ; il reste cependant accessible aux lecteurs hispanophones intéressés par le thème traité. Les notes sont nombreuses et riches, mais pas de bibliographie. — J. Radermakers, S.J.

Somerville R., La première épître de Paul aux Corinthiens. I, Vaux-sur-Seine, Édifac, 2002, 24x14, 254 p., 22 €. ISBN 2-904407-30-8

66Les éditions Édifac, de la Faculté libre de Théologie Évangélique de Vaux-sur-Seine (France, Yvelines) publient le début d’un commentaire de la première épître aux Corinthiens L’A., un pasteur ayant enseigné l’éthique chrétienne, explicite lui-même l’intérêt de son ouvrage : « L’étude des question éthiques m’a fréquemment contraint à me tourner vers la première épître de Paul aux Corinthiens. En me penchant sur ce texte que je connaissais de longue date, j’y ai découvert des richesses insoupçonnées et j’ai pris davantage conscience de l’actualité des problèmes que rencontrait l’apôtre Paul et de la pertinence de ses réponses pour l’Église d’aujourd’hui » (Préface). L’introduction du livre insiste sur la double culture littéraire de Paul, gréco-romaine et juive, tout en soulignant la grande liberté qui lui permet de communiquer l’évangile de Jésus-Christ aussi bien aux juifs qu’aux grecs.

67Dans la droite ligne de ces premières pages, le commentaire suivi du texte prend en compte tout à la fois les éléments de la rhétorique gréco-romaine, les formes de la pensée hébraïque, et le contexte culturel, pouvant éclairer le texte. Certains points font l’objet, en cours de route, d’un excursus particulier : par exemple, la koïnônia, ou « l’honneur et la honte dans le monde hellénistique », ou encore « Paul et le divorce ». Ce premier volume s’arrête avec les propos de Paul sur la sexualité, le mariage et le célibat (1 Co 7,1-40) ; il se trouvera fort heureusement complété par le second à venir. — V. Fabre.

Stettler Chr., Der Kolosserhymnus. Untersuchungen zu Form, traditionsgeschichtlichen Hintergrund und Aussage von Kol 1,15-20, coll. Wissenschaftliche Untersuchungen zum Neuen Testament 2. Reihe 131, Tübingen, Mohr Siebeck, 2000, 23x16, XV-395 p., 64 €. ISBN 3-16-147421-X

68Cette magnifique thèse de doctorat a été présentée en février 2000 par l’A. à la Faculté théologique-évangélique de l’Université Eberhard-Karl de Tübingen, et composée sous la direction des Prof. O. Betz et H. Gese. C’est un travail rigoureux, mené avec méthode et remarquablement documenté, comme en témoignent la substantielle bibliographie et les index qui couvrent près de 50 pages du volume.

69Comme il convient pour ce genre de littérature, le chap. 1 fait un état de la question, en partant de l’exégèse de E. Käsemann, avec mention de ses successeurs (Gese, Wright et M. Barth). Le chap. 2 expose la méthode de l’étude : prospection des mythes gnostiques, de la littérature paulinienne et du judaïsme hellénistique. Le chap. 3 développe une longue et méticuleuse exégèse de l’hymne de l’épître aux Colossiens, verset par verset, en dégageant la tradition liturgique de la pièce, l’image de Dieu qu’elle véhicule, la présentation qu’elle fait du « médiateur de la création du ciel et de la terre » et des « puissances » dont parle Paul. L’A. étudie la métaphore paulinienne du Christ comme « Tête du Corps » et le titre de « Premier de la résurrection » (v. 18), avant de s’expliquer sur ce qu’entend Paul par « en Christ habite toute la Plénitude (v. 19), puis comment il est « Réconciliation et Paix » (v. 20) pour les hommes comme pour le monde créé. Il analyse enfin le principe structurel des deux strophes de l’hymne, et en examine les différentes dimensions : horizon cosmique, typologie Adam-Christ, création et histoire du salut, cycle juif de Rosh-hashanah et Yom Kippur, monothéisme christologique, création et rédemption, la référence à la Sagesse de Si 24, le rapport entre création et nouvelle création. Les pages de conclusion constituent le chap. 4, avec une enquête sur les traditions du texte, le principe structurel et l’articulation des strophes, et finalement le sens du texte. On est impressionné par l’ampleur de l’investigation et la précision des analyses exégétiques et littéraires. De cet immense effort se dégage la personnalité insurpassable du Christ comme Premier-né de toute créature et promoteur de l’histoire humaine, et aussi comme pionnier de la résurrection dans laquelle il entraîne l’humanité entière et le cosmos créé. Un beau travail que ne manqueront pas de consulter les spécialistes de l’exégèse paulinienne, mais aussi les théologiens qui étudient la naissance de la christologie dans les écrits du Nouveau Testament. — J. Radermakers, S.J.

Tassin Cl., Saint Paul, homme de prière. Originalité d’une prière d’Apôtre, coll. Recherches – Vivre, Croire, Célébrer, Paris, L’Atelier, 2003, 22x15, 140 p. ISBN 2-7082-3657-1

70Excellent livre du religieux spiritain exégète, enseignant soucieux de perspectives pastorales (NRT 114 [1992] 941) et compositeur de chants liturgiques. Cl.T. ne cherche pas à s’immiscer dans l’intimité des secrets dialogues de Paul avec Dieu ; mais, en se basant principalement sur les sept lettres d’ordinaire attribuées directement à Paul, il fait entendre, dans ce que l’Apôtre dit lui-même de sa prière, ce qui peut aider ses destinataires ; il nous montre aussi en quel sens Paul invite ses lecteurs à partager sa prière, dont l’orientation résulte d’un discernement au service de son « Évangile » vécu et proclamé. L’originalité de Paul priant fait corps avec sa vocation propre.

71Sans négliger des apports d’anthropologie et de linguistique générale, ni des éclairages liturgiques sur la prière, l’A. privilégie l’exégèse de passages où Paul rend apostoliquement compte de sa prière : Ph 1,3-11, dont il dégage les moments d’action de grâce/louange et d’intercession (chap. 1) avant d’en considérer les racines anthropologiques et vétérotestamentaires (chap. 2) ; et la prière de Rm 1,8-15, en ses moments et son âme : le souci de l’Évangile (chap. 3). Intitulé « La prière, acte prophétique », le chap. 4 souligne les traits d’une prière missionnaire, partagée, combative et incessante, adressée au Père et transie de discernement apostolique ; puis commente un troisième texte : Rm 8,26-30, sur la prière vécue dans l’Esprit qui l’anime.

72Les passages commentés sont éclairés par leur contexte de rédaction et leur environnement textuel. Précise, l’analyse des textes élucide les dispositions de fond de l’Apôtre à travers ses propos. On passe avec justesse de l’exégèse à une théologie spirituelle dont les enchaînements, d’une belle cohérence, allient souffle et profondeur. La clarté de l’exposé s’aide d’annonces et de reprises régulières. Des notes sobres révèlent le recours éclairé à divers auteurs (repris en index), tandis qu’un index des références bibliques atteste le riche enracinement scripturaire de la réflexion et de l’expérience de prière ici partagées. Ces qualités recommandent chaleureusement ce petit ouvrage. — Ph. Wargnies, S.J.

Tellbe M., Paul between Synagogue and State. Christians, Jews, and Civic Authorities in 1 Thessalonians, Romans, and Philippians, coll. Coniectanea Biblica – New Testament Series 34, Stockholm, Almqvist & Wiksell Intern., 2001, 22x16, XII-340 p., 270 Sek. ISBN 91-22-01908-1

73Une analyse socio-historique des rapports croisés entre chrétiens et juifs au milieu de l’État romain à travers les autorités et la société civile au premier siècle de notre ère : tel est le sujet de cet intéressant ouvrage. Nous sommes en présence d’une thèse doctorale défendue en 1998 à l’Université de Lund en Suède, sous la direction du Prof. Birger Olsson. L’A. s’interroge sur le statut des chrétiens qui peu à peu prenaient distance vis-à-vis du judaïsme avec lequel ils étaient d’abord confondus. Que devenaient-ils lorsque, venant des cultes païens, ils embrassaient une religion qui attirait la suspicion des Romains ? Les Actes des apôtres montrent que Paul se trouvait souvent coincé entre ses coréligionnaires juifs et les structures socio-religieuses de l’Empire. L’A. teste à ce sujet trois lettres de Paul : 1 Thessaloniciens, Romains et Philippiens.

74Après avoir expliqué sa méthode, il dresse un état de la question du judaïsme de la diaspora sous la loi romaine et des différentes tensions que Paul subit « entre synagogue et État ». Il examine alors les trois modèles : Thessalonique, où se côtoyaient chrétiens et juifs souvent persécutés (50-52), auxquels Paul conseille une bonne entente ; Rome, d’où l’édit de Claude avait banni les juifs ; là, Paul prêche la soumission à l’empire ; Philippes, colonie romaine de stricte observance, où Paul rencontre des difficultés avec la société civile et avec les judaïsants et il demande aux chrétiens de garder leur identité au sein de la société, en évitant les conflits. Sa méthode consiste à comparer les récits des Actes et le contenu des lettres pauliniennes, tout en tenant compte de sources complémentaires. Cette étude précise et nuancée jette une vive lumière sur les rapports entre les premières communautés chrétiennes et la société romaine du Ier siècle. Les spécialistes en sociologie religieuse trouveront dans ce livre un peu touffu des informations utiles et d’intelligentes réflexions. — J. Radermakers, S.J.

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