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Article de revue

« Mais quel monde voulons-nous ? »

Entretien avec Maïté Debats, féministe engagée de Toulouse (F)

Pages 101 à 114

1Maïté Debats est une militante féministe engagée contre les injustices sociales et les discriminations dont sont victimes les femmes et les jeunes issu·e·s des milieux populaires et de l’immigration postcoloniale. Depuis plus de trente ans, Maïté se bat sur le terrain avec les femmes, spécialement avec des femmes victimes de violences conjugales. Elle est cofondatrice de l’APIAF (Association pour la promotion d’initiatives autonomes des femmes), centre d’accueil pour des femmes en difficulté. « Lieu d’écoute, d’information, d’orientation et d’insertion pour les femmes en difficulté, avec un accueil spécifique pour les femmes victimes de violences conjugales », l’APIAF fut créée à Toulouse en 1981 et adhère à la Fédération nationale solidarité femmes (FNSF). Chaque année, l’APIAF accueille environ 1000 femmes victimes de violences conjugales et 1200 enfants. Maïté participe aussi au comité d’éthique et au service de formation de la FNSF.

2Maïté a un parcours professionnel atypique et original. Elle a mené une double carrière de formatrice dans le travail social puis d’enseignante universitaire, et une carrière d’éducatrice spécialisée. Un double engagement qui lui a permis d’enrichir son action, de confronter les idées à la réalité du terrain et, par conséquent, de maintenir le lien entre le savoir issu de la pratique et le savoir universitaire. La transmission de ses idées et de son expérience occupe une place privilégiée dans son engagement.

3Avec sa formation d’éducatrice spécialisée, Maïté a travaillé au Club de prévention des quartiers nord de Toulouse. Durant cette période, en tant que militante féministe, elle s’est intéressée à la pratique culturelle de la vidéo et à son utilisation comme outil d’expression engagée. Après plusieurs stages avec des copines féministes, elle a suivi une formation à l’ESAV (École supérieure d’audiovisuel), en 1986. Plusieurs de ses documentaires et de ses reportages ont été tournés avec Carol Prestat. Maïté utilise cet outil dans ses interventions, tant auprès des femmes – parmi les documentaires qu’elle a réalisés : Cinq femmes et des mariages, Des dames comme tout le monde (avec des femmes chômeuses) et Prends garde à toi ! (sur l’intervention professionnelle auprès de femmes victimes de violences conjugales) – que des jeunes – une de ces vidéos, Salah, Malik, Beurs, a donné naissance au groupe de musique Zebda. Ce travail avec les jeunes l’a amenée à mettre sur pied l’Association Vitécri, visant à réaliser des films et à organiser des activités culturelles avec des jeunes des quartiers populaires issu·e·s de l’immigration postcoloniale.

4Engagée sur tous les fronts, Maïté a également participé aux débuts des études féministes à Toulouse, donnant des cours en tant que maîtresse de conférences associée à l’un des premiers masters en études de genre en France (actuellement « Politiques sociales et genre »), dirigé par l’équipe de recherche Simone-Sagesse. Du fait de son activité professionnelle dans le domaine du travail social, elle a créé et participe aussi au groupe de recherche « Genre et travail social » de l’Institut Saint-Simon de Toulouse, centre régional de formation aux métiers éducatifs et sociaux. Elle a écrit plusieurs articles, parmi lesquels « Tous les garçons et les filles » (Revue Empan, N° 67, 2007), « Jour après jour avec les femmes victimes de violences conjugales » (Revue Empan, N° 73, 2009), et « La professionnalité : une mise en œuvre liée à l’objet » (dans Ginette Francequin [Éd.], Tu me fais peur quand tu cries. Sortir des violences conjugales, Éditions Érès, 2010).

5Maïté est un esprit libre qui ne s’arrête jamais d’apprendre. C’est une femme passionnée qui transmet sa vitalité partout où elle va, une femme engagée contre les injustices dans le quotidien et une femme rêveuse de l’utopie.

6Quelle est l’origine de ton engagement féministe ?

7C’est difficile de situer l’origine ! Je n’en connais pas l’origine. Si tu veux, ce qui m’interroge aujourd’hui, c’est comment les événements de ma vie se sont imbriqués les uns après les autres et jusqu’à quel point c’était choisi. Parfois je me dis, si je regarde ce que j’ai fait, dans l’après-coup, je peux parler de quoi est faite ma vie, mais quelle est l’origine, qu’est-ce que j’ai voulu, franchement je ne le sais pas. Par exemple, mon engagement dans la question des violences conjugales je pourrais dire, même si c’est un peu bête, que c’est un hasard ! Je n’aurais jamais cru que l’engagement auprès des femmes donnerait une place si grande aux violences conjugales.

8Le féminisme est tellement consubstantiel de ma vie, il a fait ma vie. Car j’étais jeune quand je suis devenue féministe. Je commençais ma vie presque, dans la mesure où je dis « ma vie » à partir du moment où j’étais adulte, après l’adolescence. En 1968, j’ai passé le bac à Mirande dans une petite ville du Gers. J’avais passé un an aux États-Unis, je n’étais pas du tout politisée, pas du tout, mais pas du tout !

9Comment es-tu partie aux États-Unis ?

10Avec une sorte de bourse. C’est au lycée qu’un prof nous a dit : « Qui veut partir aux États-Unis ? » Avec une copine on a dit : « Nous, Monsieur ! » C’était les « exchange students » de l’American Field Services. J’ai passé comme un concours, plusieurs entretiens. J’ai été admise, j’ai passé un an dans un lycée et j’étais dans une famille. C’était en 1966, au fin fond du Texas, dans un tout petit village de 900 habitant·e·s. C’était des ranches. Les pères de mes copines étaient des cow-boys, mais vraiment des cow-boys, avec le chapeau, les chaussures… Et moi j’ai adoré mon séjour aux États-Unis ! Je venais d’une famille paysanne, mon père était agriculteur. Ma mère avait été institutrice pendant dix ans, mais elle avait arrêté son emploi en se mariant. La vie n’était pas facile pour mes parents, matériellement, financièrement. Moi, j’avais envie de vivre autre chose. Donc quand j’ai vécu cette expérience, c’était le confort… Chez moi il n’y avait pas l’eau, on allait la chercher au puits, il n’y avait pas de salle de bains, tu vois, tout ça. Je suis arrivée aux États-Unis, le superconfort, des gens qui me prenaient pour aller en vacances par-ci et par-là, des gens qui me choyaient… C’était comme si j’avais refait en une année une enfance, comme celui qui dit : « Il n’est jamais trop tard pour avoir une enfance heureuse. » J’ai eu en une année une enfance heureuse, en condensé.

11À quel moment as-tu commencé à t’engager politiquement ?

12Je me rends compte que j’étais apolitique à fond. C’est Mai 68 qui m’a réveillée. Parmi toutes les idées qui étaient brassées, j’ai découvert l’existence des rapports de classe et ça m’a fait regarder la vie, nos conditions de vie différemment. Je connaissais de façon très aiguë le sentiment de honte, la honte d’appartenir à une classe de paysans qui étaient mal vus, méprisés. J’avais conscience de ça. Du coup, ça m’a fait regarder ma famille, mon histoire, mon milieu différemment. C’est comme si on passait de la honte à la fierté. Et puis, on était plusieurs à se reconnaître là-dedans. Du coup, c’est comme si je m’étais trouvé une nouvelle famille. La famille de ceux qui relèvent la tête, qui sont issus de classe populaire comme moi, qui analysent leur situation.

13Je n’ai pas milité dans un parti, mais j’étais proche des maoïstes, sûrement parce qu’ils s’intéressaient à la classe paysanne. Il y a même eu des groupes de Toulouse qui sont allés à la campagne. Moi je me souviens d’être allée avec les maos chez des paysans, et un groupe d’entre eux est venu aider mes parents en été à la moisson.

14Pour le féminisme c’est pareil, c’est après 1968. Quand j’étais petite, je voulais être femme d’explorateur, maman, ou alsacienne parce que, dans la collection des poupées traditionnelles, c’était celle qui avait la plus jolie cape. J’étais quelqu’un qui acceptait complètement d’être une petite fille et l’idée de devenir une femme. Vraiment, j’adorais l’idée de devenir une femme ! J’étais essentialiste à fond sans le savoir ! (Rires.) J’avais un poupon et j’adorais passer des heures avec le poupon ! Et puis, je ne sais pas, je me vois en train de lire un livre chez mes parents, sans doute celui d’Engels sur la famille. Et là, j’ai regardé la vie familiale différemment. Après, j’ai lu que le travail domestique rapportait beaucoup et qu’on ne le quantifiait pas, j’ai alors vu ma mère exploitée ! J’ai vu tout le travail qu’elle faisait, et ça m’a fait un effet extraordinaire ! Je me sentais révoltée et justifiée complètement dans la révolte : j’avais raison, j’étais dans la colère. Ça devait changer, ce n’était pas normal…

15Quand les femmes se sont organisées à Toulouse et qu’il y a eu des réunions féministes, j’ai baigné dedans. C’est vrai qu’on était immergées dans la réflexion politique. Classes sociales, puis femmes, féminisme, MLF, groupes de femmes… J’allais dans toutes les réunions et c’était très exaltant, la découverte de la libération des femmes… Je me demande si on disait tellement le mot féminisme… je ne pense pas : on disait « libération des femmes ». Disons que moi, je me libérais, voilà ! Ce n’était pas que parler, que réfléchir, on avait l’impression d’être dans la libération permanente, ça touchait très très profond quoi !

16Est-ce là que tu as commencé à faire des films ?

17Dans l’effervescence féministe, à un moment, j’ai fait un stage de vidéo avec des femmes. Parce qu’on disait : « Oui, les femmes ne font pas de films, il n’y a pas de femmes dans le cinéma, dans la vidéo… » C’était un moment où les femmes commençaient à prendre la caméra, à filmer des femmes. Il y avait toute une réflexion sur la « caméra militante », sur « vidéo et féminisme ». Donc je me suis initiée à la vidéo avec des féministes et j’ai fait un film avec trois collègues, qui s’appelait Masculin/Féminin. On a passé un an à réfléchir une fois par mois sur le film. J’ai fait ça de façon militante. C’était très important, on avait l’impression de réinventer la poudre audiovisuelle ! Après ça, j’ai fait de nouveau un film avec des copines militantes, qui s’est appelé L’aidant de la mère. Et là, on a obtenu une bourse pour faire une formation à Paris. On a fait ce film, il y avait des copines avec qui plus tard nous avons fondé l’APIAF, et c’était toute une réflexion sur comment le social culpabilise les mères, comment, quand on est travailleur social, on met les mères en situation de contrôle social : soit elles font trop, soit elles ne font pas assez. Les mères sont vraiment culpabilisées. Le titre vient d’un film connu qui s’appelait Les dents de la mer et, nous, on l’a appelé « L’aidant de la mère ». C’était un travail collectif, on s’est régalées. C’était formidable. Le film n’était pas mauvais, mais je ne peux pas supporter de le voir maintenant : je me dis que j’étais naïve ! On se trouvait géniales, c’est ça qui était bien, ça narcissisait ! (Rires.) C’était passionnant, et c’était un travail, une réflexion approfondie. Ce qu’il y avait de particulier à cette époque, c’est qu’on avait une audience, on montrait les films dans les milieux féministes, on éditait des revues. Ce qu’on faisait était valorisé, les copines donnaient du sens, on s’autolégitimait.

18Ensuite, tu es devenue éducatrice spécialisée. Comment t’es-tu intéressée à ce métier ?

19Au début, j’ai commencé à faire des études d’anglais et je m’emmerdais. D’abord, j’avais intériorisé que je ne pouvais pas faire d’études universitaires, parce que jamais mes parents n’ont parlé de cette possibilité. Ma mère avait la manie, et l’horreur d’ailleurs, de dire : « Ça, ce n’est pas pour nous. » Elle avait une vision « Ça c’est pour nous », le peuple, et « Ça ce n’est pas pour nous ». C’était très culpabilisant. Donc sans même me renseigner, j’ai commencé un BTS de secrétariat trilingue. Puis, comme ma copine de lycée avec qui je suis partie aux États-Unis s’était inscrite en fac d’anglais, je me suis dit : « Moi aussi je vais m’inscrire en fac d’anglais ! » Et je l’ai fait, en cachette de mes parents. J’ai alors abandonné le secrétariat trilingue et, après la licence d’anglais, j’ai fait une licence en Sciences de l’éducation et ça, j’ai adoré ! Apprendre qu’il y avait plein de mouvements pédagogiques, plein de mouvements pour permettre aux enfants de se développer… ça a été encore quelque chose de très conscientisant, une grande découverte.

20À partir de ce moment, je me suis engagée dans un mouvement d’éducation populaire, les CEMEA (Centre d’entraînement aux méthodes d’éducation active). Ce mouvement d’éducation populaire rejoignait ma découverte de tous ces courants pédagogiques en sciences de l’éducation. Avoir une expérience avec des enfants me permettait d’actualiser la théorie dans ma pratique.

21Malgré cet intérêt, je n’envisageais pas du tout de devenir éducatrice et, pendant longtemps, je ne savais pas ce que j’avais envie de faire. J’ai eu l’occasion de faire un remplacement d’éducatrice pendant un an et j’ai beaucoup aimé ce travail. J’ai fait une formation et j’ai travaillé comme éducatrice spécialisée dans un quartier populaire de Toulouse, dans un club de prévention. À partir de là, j’ai l’impression que j’ai choisi ce que je faisais. J’avais 30 ans.

22J’ai adoré ce travail avec des jeunes issu·e·s de l’immigration, avec des gitans sédentarisés. C’était une ancienne cité d’urgence de l’Abbé Pierre, dans un quartier de Toulouse. Il y avait des problèmes sociaux, mais ce n’était pas un quartier très difficile.

23Parlons de l’APIAF. Comment cette association soutenant les femmes victimes de violences conjugales est-elle née ?

24C’est dans les années 1978 qu’on a commencé à se réunir. On avait un groupe, « Femmes et travail social », parce qu’à cette époque à Toulouse, où j’étais en formation d’éducatrice spécialisée, se mêlaient le mouvement féministe et le mouvement de lutte de travailleurs sociaux. Comme il y avait beaucoup de femmes féministes dans les écoles de travail social, on faisait des réunions de femmes travailleuses sociales. C’était génial. C’est là que j’ai rencontré plusieurs d’entre elles et qu’on a décidé, avec d’autres féministes d’autres groupes, de se réunir autour d’un projet de maison des femmes, un centre d’accueil pour femmes. C’était l’idée « On va faire une maison des femmes ». On pensait que toutes les femmes viendraient. C’était une époque où on pensait qu’on était toutes égales… Dans les années 1970, on était dans cette question de la sororité, tout comme les femmes qu’on allait accueillir, et on y est restées plusieurs années.

25L’association incluait des femmes issues du travail social, des femmes du planning familial, des femmes du MLF… À Toulouse, il y a eu une division entre le MLF et les « groupes femmes ». Moi, j’étais dans les deux. Les groupes femmes voulaient s’adresser aux femmes des classes populaires et mener des actions sur l’extérieur. Alors que le MLF était beaucoup moins dans l’action sur l’extérieur. C’était plus des groupes d’autoconscience… Le groupe qui a fait naître l’APIAF était un mélange de plusieurs personnes de ces mouvements.

26Et comment as-tu participé à la création de l’association de quartier Vitécri ?

27Vitécri est une association dont le but était de faire des films à la suite d’une activité vidéo dans le cadre du club de prévention. Dans mon travail professionnel, je tournais des vidéos avec de jeunes garçons. Je faisais avec ces jeunes de classes populaires ce que l’on avait fait avec les femmes. Eux non plus n’avaient pas accès aux pratiques culturelles « bourgeoises », comme nous les femmes n’avions pas eu accès aux pratiques culturelles des hommes. Donc monter des films, c’était aussi un combat à mener avec les jeunes de classes populaires… C’était la même dynamique au fond.

28Lors d’une diffusion, il y a eu une chargée de mission de la culture qui avait été intéressée par un de nos films et qui a voulu donner de l’argent au Club de prévention, mais il n’en a pas voulu. Elle avait mis 30 000 francs de côté. Elle s’était battue à la DRAC (Direction régionale des affaires culturelles) pour dire que ce qu’on faisait, c’était « de la culture ». Pour toucher cet argent, il a fallu monter une association, et du coup, on a monté l’association avec les jeunes, vite fait, bien fait, c’est pour ça que nous l’avons appelée Vitécri. Là encore, plusieurs copines féministes de l’APIAF se sont mises au Conseil d’administration de l’association Vitécri pour faire une association autonome, dont le but était de réaliser des activités culturelles avec des jeunes issu·e·s de l’immigration. L’objectif, c’était l’expression des minorités. Les jeunes petit à petit ont pris des responsabilités dans l’association. Jusqu’à la prendre en mains. Parmi ces jeunes du quartier qui faisaient de la vidéo dans le club de prévention, il y avait Magyd Cherfi, qui est devenu le chanteur de Zebda. C’est Magyd qui avait toujours plein d’idées de films, qui écrivait les scénarios, qui rassemblait des copains autour de ces activités, et c’est finalement avec lui qu’on a fait plusieurs films. Un des films a fait naître le groupe Zebda. Comme il y avait un groupe de rock’n’roll dans le film, il a écrit quatre chansons, avec ses copains de lycée, les autres ont fait la musique et ça a abouti à quatre vraies chansons. On a fait un disque avant que le film sorte : leur disque s’appelait Zebda-Beur, parce que zebda ça veut dire « arabe » en kabyle, en référence au mouvement Beur qui démarrait. Du coup Zebda-Beur était un jeu de mots, qui veut dire beur-beur, puisqu’on nageait dans le mouvement Beur. Ce qu’on a fait avec Vitécri, ces petits films, jamais ça n’aurait eu d’impact s’il n’y avait pas eu le mouvement politique Beur. De la même façon, nos films qu’on trouvait géniaux n’étaient vus que parce que le mouvement féministe était fort : dès qu’on réalisait un film, on échangeait avec d’autres femmes, il y avait une scène publique, des revues… Vitécri c’était ça : une façon de vivre pleinement les effets du mouvement Beur, collectivement, avec les jeunes de l’époque. Plus tard, Vitécri s’est transformé en Tactickollectif, une association culturelle qui a cofondé le collectif Motivé·e·s.

29C’est vrai que les deux histoires de l’APIAF et de Vitécri ont été parallèles. Ces deux associations sont cousines. Pour moi Vitécri a été très importante, autant que l’APIAF. C’était très joyeux Vitécri, tandis que l’APIAF, avec les violences conjugales, ce n’est pas toujours joyeux. La chance de Vitécri est qu’elle a été énormément soutenue par les pouvoirs publics, énormément ! Il y avait un mouvement dans toute la France qui faisait que, quand un de nos films sortait, se montait toujours un festival de films beurs, à Brest ou à Metz, dans lequel on allait présenter le nôtre. Les jeunes y allaient, y parlaient, rencontraient d’autres jeunes, des pairs, des alter ego qui étaient aussi des militant·e·s. Après on a dit, il y a une « beurgeoisie » qui s’est créée, et tant mieux ! Le mouvement a vu émerger des sortes de leaders – pas au sens courant, car il n’y avait pas de leader dans le mouvement Beur, mais des personnes visibles, des personnalités qui réfléchissaient. Je pense que les jeunes ont acquis une forte culture politique à travers toutes ces rencontres. En tant qu’expérience d’éducation populaire, c’était extraordinaire. Moi j’étais très peu formée à l’audiovisuel à l’époque. J’avais fait ça avec des copines. Avec les jeunes de Vitécri c’est pareil, on s’est formé·e·s ensemble, on était à égalité du savoir et du non-savoir. Et c’est pour ça qu’après Vitécri, j’ai fait une formation audiovisuelle à l’ESAV. Vitécri c’était un peu comme le féminisme, c’étaient les mêmes conceptions. Et de toute façon, le mouvement féministe a été très marqué par le mouvement anticolonialiste et de décolonisation, Franz Fanon, Paulo Freire… tout ça. La vision qu’on avait de l’émancipation, on la partageait avec ce que ces anticolonialistes ont fait, ça se ressemblait.

30Souvent on t’entend dire : « Quel monde voulons-nous ? » Qu’est-ce que cela signifie pour toi dans ton engagement féministe ?

31Pour moi, « Quel monde voulons-nous et au prix de quelles conséquences ? » comme dit Françoise Collin, c’est une formule qui me sert tout le temps de repère : pour juger ce que je suis en train de décider aujourd’hui, je me demande quelles conséquences ça aura pour l’avenir. Il y a deux aspects dans la lutte féministe : la lutte contre la domination et la question de ce qu’on appelle la « libération des femmes ».

32Quand on commence à réfléchir sur la lutte pour la libération, ça se complexifie énormément, car la libération, c’est quelque chose d’individuel, et la grande question c’est : « Comment articuler ma libération individuelle avec les collectifs, avec les Autres, ceux qui connaissent d’autres dominations ? « Quel monde voulons-nous et au prix de quelles conséquences ? » est un repère. Si je choisis de faire ceci pour ma libération, est-ce que cela n’aura pas de conséquences néfastes pour le monde que je veux ? Quelles conséquences cela aura-t-il, pas uniquement pour moi, mais pour toutes les femmes ? Plusieurs questions sont concernées, dont celle de la prostitution. Si je réglemente aujourd’hui, quelles en seront les conséquences pour toutes les femmes ? Idem pour les mères porteuses : si je légalise les mères porteuses aujourd’hui, quels effets sur les femmes du Sud faut-il attendre ? Est-ce qu’elles vont porter les enfants des femmes du Nord ?

33L’autre jour, j’ai vu sur un banc trois femmes africaines avec plein de petits bébés blancs, c’était des nounous : est-ce que je veux ce monde ? Est-ce qu’être féministe, c’est-à-dire, m’affranchir des tâches domestiques, des tâches maternelles, c’est les donner à faire à ces femmes du Sud que je vais exploiter ? Pourtant, ça m’affranchit des conflits avec mon mec, ça me permet de faire du « féminisme haut de gamme ». Je trouve que c’est terriblement compliqué ! On ne peut pas s’en satisfaire. En tout cas moi, je sais que je suis complice du système Nord-Sud, je suis une privilégiée, mais je n’ai pas envie de m’en satisfaire, de le prôner.

34En fait, je trouve que je suis modestement féministe. On n’a pas de leçons à donner, c’est pour ça que je te disais que, pour moi, le féminisme n’est pas une morale et que, surtout, il faut croiser l’oppression des femmes avec d’autres oppressions, d’autres dominations.

35Quand as-tu commencé à enseigner dans le Master de Toulouse ?

36J’ai toujours été intéressée par la question de la transmission, à partir du moment où je me suis intéressée aux sciences de l’éducation. Les choses auxquelles je tiens, que j’aime, qui me paraissent importantes, j’ai envie de les transmettre. Pour moi, la transmission c’est politique. Je me dis qu’au fond, mon engagement politique est de l’ordre de la transmission. Très vite, j’ai aimé le travail qui se faisait dans les colonies de vacances et j’ai aimé transmettre aux futurs moniteurs comment s’y prendre avec les enfants. Quand j’étais éducatrice, la formation sur des choses qui me tenaient à cœur m’a plu. C’est comme ça que j’ai été formatrice dans une école de travail social, puis que j’ai travaillé dans le Master « Genre et politiques sociales ».

37Avec une collègue formatrice féministe, Martine Pagès, nous avons déploré l’absence de l’approche féministe dans la formation des travailleurs sociaux. Nous avons alors sollicité l’Équipe Simone qui a pris l’initiative de demander l’agrément du « DESS Politiques sociales et rapports sociaux de sexe », devenu maintenant « Master Genre et politiques sociales ». Pendant treize ans, j’ai été à mi-temps, maître de conférences associée dans ce Master. C’était le lieu idéal pour faire se rejoindre la pensée et l’action !

38Par rapport aux interventions que tu fais dans les lycées sur les rapports filles-garçons : le féminisme a-t-il toujours été ton fil conducteur ?

39Exactement ! C’est pour ça que, lorsque je travaille avec les jeunes, j’essaie de leur faire aimer le féminisme, parce que je trouve que le féminisme touche à toutes les questions, ça permet de tout interroger : quelle décision prendre sur des options politiques, sur le droit de la famille, sur l’éducation à la sexualité chez les jeunes, etc. Toute question je vais la passer à la grille de lecture féministe. Mais ce n’est pas pour autant que le féminisme me donne une réponse, c’est pour ça qu’il faut le croiser avec d’autres questions.

40Quand tu disais qu’au début vous vouliez créer une maison des femmes d’égales à égales, vous vous êtes rendu compte que finalement vous ne l’étiez pas…

41En effet, initialement, on pensait : « On va recevoir toutes les femmes, elles pourront rester anonymes, elles n’auront même pas besoin de donner leur nom, ce ne sont pas des cas sociaux, on ne va pas faire du social, ce n’est pas du social dont elles ont besoin, c’est de la solidarité avec d’autres femmes. » En réalité, ces femmes cumulent des difficultés, beaucoup sont très précaires ; pour qu’elles puissent accéder à des droits, on est obligées d’individualiser leur situation, de leur demander leur nom, de faire du social finalement ! En les aidant, jusqu’à quel point va-t-on les contrôler ? Jusqu’à quel point va-t-on les normaliser ? Jusqu’à quel point fera-t-on en sorte qu’elles rentrent dans des cases pour pouvoir les aider ? Même si on veut les considérer comme des personnes à part entière, la réalité cruelle implique qu’on est obligées de les faire entrer dans des catégories. Avec nos exigences, qui passent parfois par un certain contrôle, le lien entre nous devient hiérarchique, il n’est plus égalitaire. Après, on essaie de compenser ce lien inégalitaire par des actions qui visent à créer les conditions pour se comporter comme des citoyennes à égalité les unes avec les autres. En tout cas, on a beaucoup déchanté là-dessus avec notre idée première de « maison des femmes » et la réalité de cet accompagnement. Parce que beaucoup d’entre elles sont des femmes précaires.

42On a essayé de générer des espaces dans l’APIAF, des activités, des actions, des rencontres avec les femmes où ce respect mutuel pouvait s’instaurer, comme l’atelier d’écriture, la salle d’études ou la réalisation de films avec et par les femmes. Ce qui nous réunit est de l’ordre du respect. Dans ces espaces, les femmes se « révèlent comme quelqu’une » dirait Arendt. Du coup, elles ne sont pas des femmes en difficulté accueillies à l’APIAF, elles sont « une telle qui écrit tel texte, une telle qui dit telle parole singulière ». Si on discute un sujet dans la salle d’études, elles donnent leur point de vue sur le monde, comme n’importe qui. Si elles participent à un film, c’est encore mieux. Cette réflexion sur la citoyenneté nous a aidées dans la mesure où leurs paroles fabriquent le monde aussi. Il est vrai que les femmes avec qui on travaille sont tellement dans la survie, devant répondre à des besoins minimaux, qu’elles n’ont pas « le luxe » de se préoccuper des affaires du monde. Du coup, quand on monte des espaces où elles montrent que, malgré tout, elles ont envie de s’en préoccuper, ça leur fait du bien. Pour nous, ce type d’échanges est aussi une bonne chose. Je pense qu’on a vraiment créé un service qui a une vision différente des autres services sociaux.

43L’APIAF est une expérience d’une grande richesse. Qu’est-ce qui t’a le plus marquée ?

44À l’APIAF, ce que je trouve extraordinaire et énigmatique, c’est qu’on a pratiqué la cogestion : avoir des responsabilités collectives entre nous, sans direction. On a réussi à tenir ça pendant trente ans. Je suis étonnée moi-même que ça ait pu fonctionner, et suis curieuse de savoir quels sont les ingrédients, comment on s’y est prises. On a réussi à être en coresponsabilité, en cogestion, à partager la politique de l’association et à prendre en charge le quotidien. Nous avons vraiment partagé tout ça. J’ai une très très grande gratitude envers chacune des femmes de l’APIAF pour nous avoir permis de le vivre, sans qu’aucune n’ait abîmé le projet ! Et surtout, on a trouvé un équilibre pour s’épanouir individuellement et faire marcher un collectif qui nous nourrit et qu’on nourrit.

45Quelle est la spécificité de votre travail avec les femmes victimes de violences conjugales ?

46Quand on travaille avec des femmes victimes de violences conjugales, nous sommes amenées à nous interroger quotidiennement sur ce que sont l’oppression et l’aliénation des femmes. Nous mesurons les ravages de « l’incorporation de la domination ». Nous voyons des femmes impliquées dans des histoires terribles. Tu sais que celle-ci a fait de mauvais choix et qu’elle est en train d’en faire encore. Ses conditions de vie ne peuvent pas être pires, elle est enceinte, elle garde l’enfant qu’elle a eu avec un type hyperviolent qui lui a fait vivre des horreurs avec le premier enfant. Face à cette situation, j’emprunte les yeux de Marguerite Duras pour la regarder et je me dis qu’elle fait partie de « ces femmes imprudentes, imprévoyantes qui font le malheur de leur vie ».

47J’aime beaucoup Duras, que j’ai découverte jeune, car elle parle très bien de la folie des femmes. Elle donne une complexité, une dignité à leur folie, à l’aliénation. La folie est une réponse à la dureté du monde des femmes. Parfois je dis aux étudiant·e·s : « Vous devez lire Duras pour comprendre les femmes victimes des violences conjugales. » Souvent ces femmes sont très contradictoires. Donc, pour les respecter, pour ne pas mépriser ce qu’elles vivent, je trouve que la vision de Duras est intéressante. C’est une façon de comprendre, de magnifier l’expérience des femmes, même si elle est négative. Elle est le fruit d’un excès d’horreur sur elles. Je me dis : « Mais comment les femmes peuvent-elles survivre à tant de domination, d’oppression ? » C’est normal que les femmes se cherchent un chemin comme elles le peuvent.

48On essaie de transmettre ce regard sur les femmes aux jeunes : « Intéressez-vous à cette femme, soyez curieuses d’elle, de toute sa singularité, ne pensez pas que, tout de suite, vous saurez intervenir et que vous saurez vers quel chemin vous allez la diriger. » Moi, le féminisme m’a amenée à m’intéresser aux femmes, à être curieuse des femmes. Ça a été la grande découverte, vraiment ! Car, de la même façon que je ne m’intéressais qu’aux bourgeois, je pense qu’au fond, je ne m’intéressais qu’aux hommes, parce que, franchement, leur vie était quand même plus enviable que celle des femmes.

49Comment travaillez-vous cette complexité à l’APIAF ?

50J’ai envie de dire que chaque femme est complètement singulière et qu’il faut écouter sa spécificité, son unicité, et en même temps, en tant qu’intervenantes, il nous faut en savoir beaucoup sur les violences conjugales. L’effet pervers de tout le travail (théorique) qu’on a fait, c’est de laisser croire que toutes les femmes victimes de violences conjugales ont les mêmes caractéristiques, alors que chacune doit être considérée comme une personne singulière. C’est quelque chose de très complexe à transmettre.

51Dans les formations, je constate que certaines nouvelles intervenantes, en voulant trop bien faire, ont tendance à presser les femmes de parler des violences, dès le premier entretien. Pour nous, à l’APIAF, la dimension du temps est très importante. Quand une femme vient, nous pensons qu’il faut lui donner envie de revenir. Peu importe si on parle des violences conjugales. On doit arriver à faire qu’il se passe quelque chose, qu’elle se dise : « Dans ce lieu de femmes, j’ai confiance que je vais pouvoir aller mieux, améliorer ma situation. » Le défi de la fidéliser est là en permanence. C’est un superdéfi, et quand ça marche c’est formidable ! Dans ce cas, on a le temps, on peut distinguer ce qui relève de l’urgence et ce qui n’en relève pas. Il s’agit à la fois de parer à l’urgence, pour l’hébergement et tout ça, et, surtout, de respecter le rythme des femmes ! On ne peut pas agir vite. Chacune va avoir son histoire, son parcours, ses valeurs.

52Dans les mouvements féministes se pose la question de la transmission de l’héritage des luttes. Comment vois-tu le relais à l’APIAF ?

53Sur cette question, on est très chanceuses à l’APIAF : d’abord parce qu’avec le Master « Genre et politiques sociales », on a rencontré plein de jeunes. Les jeunes femmes devenues membres de l’association sont superbes. Nous, on s’en va petit à petit, on essaie de faire le passage. Cela leur permet de prendre de plus en plus de responsabilités, de participer à la gestion. On ose rêver que ça va se faire facilement. La manière dont se passe le relais est hyperintéressante. Comme nous, les anciennes, les jeunes vont devoir trouver un équilibre entre l’individuel et le collectif. À l’APIAF, les tâches à accomplir sont très nombreuses et diversifiées. Finalement, on les accomplit plus ou moins par choix ou par « devoir ». On a toujours été polyvalentes, il faut être polyvalente, c’est notre devoir d’être polyvalentes (Rires). C’est en quelque sorte la dette qu’on a vis-à-vis du collectif : nous faisons toutes de l’accueil avec les femmes victimes des violences conjugales, de l’accompagnement… mais à côté des tâches incontournables, qu’on est obligées de faire (il y a pas de raison que l’une les fasse et que l’autre fasse un truc plus fun ou prestigieux), chacune a des « spécialités ». Chacune a pu exercer sa créativité et sa singularité sur certains thèmes. On est arrivées à conjuguer les choses : se faire plaisir, dans le sens de faire des choses qui nous tiennent à cœur et qui correspondent à notre personnalité, et faire notre « devoir » vis-à-vis du collectif. L’enjeu est que les nouvelles venues, elles aussi, se construisent cet équilibre. Mais elles ne vont pas forcément reprendre ce qui faisait la singularité de chacune. On envisage les choses comme ça : que les jeunes puissent reprendre l’héritage, mais aussi imprègnent le collectif de leur originalité. De ce fait, peut-être que certaines activités de l’APIAF vont s’éteindre. Je trouve qu’il faut pouvoir l’envisager. Moi, en ce moment, je fais un travail pour « avaler » l’idée que des choses que j’ai initiées peuvent s’éteindre ! C’est un travail pour les anciennes qui partent. Voilà, l’APIAF va continuer sous d’autres formes… La question est aussi que la période est très difficile au niveau financier, je ne sais pas ce qui nous attend, mais il est probable qu’avec la réforme draconienne des politiques publiques, on aura moins de financements. Heureusement que beaucoup partent à la retraite : on n’aura pas besoin de licencier. Par contre, nous ne serons pas remplacées, les chances de créer des emplois sont minces.

54À ton avis, quels sont les avancées et les reculs dans le combat contre les violences conjugales des trente dernières années ?

55À travers la FNSF, on est constamment en train d’essayer de faire évoluer la loi. On a réussi, avec d’autres féministes, à peser pour qu’il y ait des évolutions. Certaines ont eu lieu, mais ça reste encore très difficile. Parce qu’entre les lois et leur application, le fossé est énorme.

56Aujourd’hui, une nouvelle question est arrivée, celle des enfants. C’est devenu plus difficile pour une femme qui a des enfants de se séparer, de s’échapper d’une situation de violence conjugale. La question de l’intérêt de l’enfant, conçue comme le droit des enfants à avoir leurs deux parents, est cruciale : une femme ne peut plus partir si facilement du fait qu’elle risque d’être accusée de soustraire l’enfant à l’autorité du père. Cela a complètement perturbé notre fonctionnement et a rendu difficile notre soutien aux femmes. Au cas par cas, on assiste à des situations très complexes, où les femmes restent avec leur conjoint violent à cause de cette question des enfants. À côté de ça, les lois bougent. C’est bizarre, parce qu’au niveau de l’opinion publique, beaucoup pensent que les choses ont évolué : on les entend dire : « Ah, oui ! Mais maintenant, on peut expulser les hommes violents », « Ah oui ! Mais maintenant, il y a une ordonnance de protection ». Alors qu’en fait, c’est extrêmement compliqué de la mettre en œuvre. Il faut toujours des conditions, et les conditions ne sont jamais les bonnes, elles ne sont jamais réunies. Il y a donc un immense décalage entre l’opinion publique, qui pense que les choses ont vraiment bougé et que, finalement, ça va se passer facilement et bien ; et nous, qui sommes au quotidien devant des situations très difficiles à dénouer.

57Franchement, je me demande comment on peut rester des années à mener ce combat quand il est aussi difficile, quand on obtient si peu de résultats positifs. Je ne sais pas si ce sont nos convictions féministes qui nous conduisent à continuer. C’est comme tous les combats politiques, mais là on est devant la souffrance des femmes au quotidien, et c’est difficile aussi pour nous. On déploie tout le temps de nouvelles commissions, on essaie d’améliorer nos moyens de lutte ; on n’améliore pas les résultats, mais on améliore ces moyens, on a l’impression qu’on fait toujours mieux, avec de meilleurs réseaux. Finalement, est-ce là ce qui nous fait du bien ? Il est vrai que combattre, ça aide à vivre, ça donne un sens. Et il est vrai que c’est ce qu’on souhaite aux femmes ! Que peut-on leur souhaiter de mieux ? Au fond, on ne leur souhaite pas de gagner : nous, on ne gagne pas. On leur souhaite d’être comme nous, des « parias conscientes », et de combattre.

58On pourrait croire lorsque je dis ça que j’aime « combattre ». Pourtant je n’aime pas ça. Il y a tant d’autres choses à faire dans la vie. Mais c’est une nécessité, lorsqu’on appartient à un groupe dominé. « De quelque minorité que l’on soit, nous sommes condamné·e·s au politique », dit Françoise Collin. J’aime cette expression. Elle m’aide à justifier mes choix.


Date de mise en ligne : 17/07/2015

https://doi.org/10.3917/nqf.311.0101

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