Notes
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[1]
On lit par exemple, sur le site web des femmes en psychologie aux États-Unis, que l’association a été créée en 1969 parce que « the American Psychological Association […] was not responding to the issues raised by the new women’s liberation movement » (www.awpsych.org).
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[2]
1987 a vu la création de l’association Femmes et mathématiques (www.femmes-et-maths.fr) qui organise des colloques et publie une revue ; l’association Femmes et Sciences a vu le jour en 2000 (www.int-evry.fr).
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[3]
Le dernier a eu lieu du 9 au 11 mai 2008 à Leeds, sur le thème « Parcours et Itinéraires ».
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[4]
Le sixième colloque a eu lieu le 13 octobre 2007 à la Bibliothèque des femmes de Glasgow (Glasgow Women’s Library) et le suivant, organisé conjointement par les Universités de Paisley et de Strathclyde, aura lieu à Glasgow, à la Bibliothèque Mitchell (la plus grande bibliothèque municipale d’Europe) le 18 octobre 2008. Contact : j.charnley@strath.ac.uk ou caroline.verdier@strath.ac.uk
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[5]
Certaines associations (par exemple : Sociologists for Women in Society) ont en fait choisi d’inclure explicitement les hommes.
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[6]
L’organisation par Women in French d’un colloque sur le thème « La Belle Époque » il y a quelques années a par exemple donné lieu à un débat animé sur internet sur la question de l’exclusion des hommes. Un chercheur a violemment attaqué cette politique, qu’il qualifiait de « discriminatoire », mais qui a cependant été défendue et maintenue par les organisatrices.
1Inspirées par le mouvement des femmes à la fin des années 60 et conscientes que les questions soulevées ne trouvaient pas toujours d’écho dans les universités et les associations mixtes, des chercheuses américaines ont ressenti le besoin de se retrouver entre elles pour se soutenir mutuellement et promouvoir les carrières féminines [1]. Ces associations, qui s’intitulent souvent « Women in… », continuent de regrouper des femmes travaillant dans une discipline précise et, depuis les premières créations, l’idée a traversé l’Atlantique pour être adoptée en Europe, particulièrement en Grande-Bretagne mais également dans d’autres pays (par exemple en France) [2]. Le mode de fonctionnement des diverses associations « Women in… » varie d’un pays et d’une discipline à l’autre, mais le but premier – soutenir les femmes et défendre les idées féministes – reste globalement le même.
2Ces associations se sont donné pour objectif de créer des réseaux où les femmes enseignant dans des universités peuvent trouver du soutien, des conseils et des mentors. En général, pour assurer leur pérennité, financer les activités et faciliter les demandes de subsides, des structures formelles ont été créées, avec un comité, des frais d’inscription, un colloque annuel et parfois un journal ou bulletin. Certaines associations s’occupent également de récolter et diffuser des statistiques concernant le nombre de femmes présentes dans la profession.
3Dans un premier temps, ces réseaux ont dû employer les structures déjà en place dans la discipline pour se faire connaître et établir leur propre liste d’adhérentes ou sympathisantes, mais l’arrivée d’internet a bien évidemment changé la donne. Bon nombre d’associations possèdent maintenant un site web, ce qui a permis une visibilité accrue et facilité la diffusion de leurs idées. On trouve donc aux États-Unis, entre autres, « Women in German » (www.womeningerman.org) ; la « Society for Women in Philosophy » (www.uh.edu/-cfreelan/SWIP) ; « Supporting Women in Geography » (www.geography.wise.edu/swig) ; « The Association for Women in Psychology » (www.awpsych.org) ; « Sociologists for Women in Society » (www.socwomen.org) et « The Association for Women in Mathematics » (www.awm-math.org). Le degré d’organisation formelle varie d’une association à l’autre, tout comme l’accent mis sur les racines et les objectifs féministes du réseau en question. Ainsi, alors que les femmes géographes parlent de « empowerment » sans mentionner explicitement le féminisme, les « activités militantes » sont fortement mises en avant par les psychologues, qui déclarent qu’un de leurs buts principaux reste « l’activisme féministe ».
4Pendant les années 80, des universitaires féministes en Grande-Bretagne ont, à leur tour, ressenti le besoin de se regrouper pour défendre et promouvoir les intérêts des femmes. Le phénomène déborde même le cadre universitaire, pour toucher le monde du travail de manière plus générale, puisqu’on trouve maintenant des groupes tels que « Women’s Engineering Society » (www.wes.org.uk), « Women in Engineering Organisation » (www.wieo.org) et « Women in Journalism » (www.womeninjournalism.co.uk). Encore une fois, chaque groupe a modifié à sa façon la structure de base : certains se déclarent ouvertement féministes (« Women in Spanish, Portuguese and Latin-American Studies » – www.wisps.org.uk) alors que d’autres se donnent simplement pour but de « réunir les femmes » (« Women in German Studies » – www.wigs.ac.uk) ; certains laissent clairement entendre que l’association ne vise que les femmes, d’autres (probablement la plupart) restent plus vagues et se disent ouverts à « toutes les personnes intéressées par les questions de genre » (« Women’s History Scotland » – www.womenshistoryscotland.org) ; quelques groupements (sans doute la majorité) ont créé des structures formelles, comportant un comité et une assemblée générale, alors que d’autres ont fait le choix d’une organisation minimale. « Women in French », qui a vu le jour en 1988 en réaction au nombre réduit de femmes occupant des postes au plus haut niveau et intervenant dans les comités de rédaction des revues les plus importantes, illustre bien ce dernier mode de fonctionnement. L’association ne possède ni site web, ni comité, ni membres en tant que telles et continue à exister par la volonté de celles qui organisent et assistent au colloque biennal à Leeds [3]. L’association a bientôt 20 ans, preuve s’il en fallait de sa résistance, de son importance pour beaucoup de femmes dans la discipline, et de la force du « bouche à oreille », mais il faut reconnaître que le manque de structures formelles rend plus difficile la diffusion d’informations et risque peut-être de fragiliser l’association. Avec le sentiment accru de l’indépendance culturelle et politique de l’Écosse, des groupements spécifiquement écossais se sont également créés, et « Women in Languages in Scotland », fondé en 1991, devenu « Women in French in Scotland » en 2001 (http://www.wifis.edublogs.org) ont suivi le modèle de leur sœur anglaise, c’est-à-dire une organisation souple, sans comité ni frais d’inscription. Malgré les risques d’un tel système, on constate encore une fois l’extraordinaire vitalité de cette association, où les femmes se relaient tous les ans pour organiser un colloque [4].
5La question de l’exclusion des hommes, qui au départ s’est imposée comme une évidence, revient régulièrement dans les débats, et certaines associations se posent la question de savoir s’il est utile de continuer à se réunir exclusivement entre femmes [5]. Comme on l’a vu cependant, tout en maintenant cette règle de base, la plupart d’entre elles préfèrent rester discrètes quant à leurs objectifs féministes et quant au rôle éventuel des hommes. En fait, on remarque que, sans doute pour éviter des controverses, les « appels à communications » diffusés sur internet et ailleurs font en général très attention de ne pas dire explicitement que le colloque ne sera ouvert qu’aux femmes [6].
6Quel est donc l’avenir de ce genre d’association ? Tout cela n’est-il pas inutile pour la génération « postféministe » ? Les femmes ayant fait beaucoup de progrès dans le milieu universitaire tant aux États-Unis qu’en Grande-Bretagne depuis la fin des années 60, on pourrait penser que se réunir entre femmes ne sert plus à rien. En fait, on constate tout le contraire, car on ne remarque pas de fléchissement d’intérêt pour les colloques et les publications de ces associations, et, à en juger par l’enthousiasme des nombreuses jeunes chercheuses présentes lors du récent colloque de « Women in French in Scotland », la relève est assurée. Les jeunes femmes, toujours minoritaires dans beaucoup de départements, et toujours en butte à des préjugés qui ont la vie dure, s’aperçoivent que le soutien d’autres femmes peut vraiment leur être d’un grand secours. Dans le cadre d’une table ronde à cette occasion, trois professeures qui occupent ou ont occupé une chaire de français en Écosse ou en Angleterre ont fait part de leurs expériences et de leurs conseils pour réussir dans une profession encore trop souvent dominée par les hommes. Se déclarant globalement optimistes, puisque les choses évoluent et que des femmes occupent maintenant des postes importants dans les universités britanniques, elles ont quand même tenu à signaler qu’il reste encore bien des sources d’inquiétude et qu’il faut rester vigilantes.
7Un souci précis pour les femmes en Grande-Bretagne est constitué par l’audit de la recherche universitaire qui aura lieu encore une fois en 2008 et qui pour beaucoup tourne carrément à l’obsession. Cet audit [« Research Assessment Exercise » (RAE)] exige un nombre minimum de publications dont on prétend juger la qualité, et l’obtention de bourses et la direction de doctorant·e·s contribueront également à l’évaluation de chaque chercheur·e. Ce processus décidera du financement de la recherche dans les années à venir et il est censé tenir compte des circonstances particulières qui ont pu empêcher un individu de « produire » le nombre de publications requis (congé de maternité, maladie). Il semble cependant que ce ne soit pas forcément facile d’insister pour que l’éducation des enfants ou une carrière interrompue ou incomplète soit prise en compte comme « circonstance atténuante ». Pour pouvoir obtenir le meilleur résultat possible, les universités sont fortement tentées d’exclure celles et ceux considéré·e·s comme des « maillons faibles ». Encore une fois, il est clair que cet audit prend comme base le parcours soi-disant « normal », c’est-à-dire masculin, et s’intéresse trop peu à tout ce qui ne rentre pas facilement dans le cadre établi.
8L’exemple du « RAE » démontre si besoin est qu’il existe encore un rôle pour ces associations de femmes, ne serait-ce qu’en proposant un forum où les femmes peuvent se retrouver entre elles pour échanger des informations, créer leurs propres réseaux et s’entraider. Et, comme l’a souligné une des femmes participant à la table ronde de « Women in French in Scotland », nous avons encore besoin de femmes qui servent de modèles à la génération montante et qui ne lui tournent pas le dos une fois les échelons gravis. Celles qui ont réussi peuvent encourager la relève en disant : « Toi aussi tu peux y arriver », ou, pour citer le titre d’une exposition organisée par l’Association « Femmes et Mathématiques » en 2001 : « Pourquoi pas vous ? »
Notes
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[1]
On lit par exemple, sur le site web des femmes en psychologie aux États-Unis, que l’association a été créée en 1969 parce que « the American Psychological Association […] was not responding to the issues raised by the new women’s liberation movement » (www.awpsych.org).
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[2]
1987 a vu la création de l’association Femmes et mathématiques (www.femmes-et-maths.fr) qui organise des colloques et publie une revue ; l’association Femmes et Sciences a vu le jour en 2000 (www.int-evry.fr).
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[3]
Le dernier a eu lieu du 9 au 11 mai 2008 à Leeds, sur le thème « Parcours et Itinéraires ».
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[4]
Le sixième colloque a eu lieu le 13 octobre 2007 à la Bibliothèque des femmes de Glasgow (Glasgow Women’s Library) et le suivant, organisé conjointement par les Universités de Paisley et de Strathclyde, aura lieu à Glasgow, à la Bibliothèque Mitchell (la plus grande bibliothèque municipale d’Europe) le 18 octobre 2008. Contact : j.charnley@strath.ac.uk ou caroline.verdier@strath.ac.uk
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[5]
Certaines associations (par exemple : Sociologists for Women in Society) ont en fait choisi d’inclure explicitement les hommes.
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[6]
L’organisation par Women in French d’un colloque sur le thème « La Belle Époque » il y a quelques années a par exemple donné lieu à un débat animé sur internet sur la question de l’exclusion des hommes. Un chercheur a violemment attaqué cette politique, qu’il qualifiait de « discriminatoire », mais qui a cependant été défendue et maintenue par les organisatrices.