Couverture de NCAE_018

Article de revue

Crédit aux PME : des mesures ciblées pour des difficultés ciblées

Pages 1 à 12

Notes

  • [a]
    Nomura International, correspondant du CAE.
  • [b]
    École d’économie de Toulouse (TSE), Université de Toulouse 1, IDEI.
  • [c]
    Sciences Po Paris, membre du CAE.
  • [1]
    Cf. L’Observatoire des entreprises, Banque de France. Une petite ou moyenne entreprise (PME) est une entreprise de moins de 250 salariés, moins de 50 millions d’euros de chiffre d’affaires et moins de 43 millions de total de bilan.
  • [2]
    Des externalités négatives liées au chômage induit, ou positives liées à l’innovation peuvent servir à justifier de telles subventions.
  • [3]
    La finance d’entreprise moderne pousse plus loin l’analyse en tenant compte du fait que la viabilité économique d’un projet ne dépend pas seulement de sa capacité à engendrer des profits mais aussi des incitations de l’entrepreneur à mener à bien ce projet, ce qui limite le montant de financement externe qui peut être apporté à l’entreprise. Voir, par exemple, Tirole J. (2010) : The Theory of Corporate Finance, Princeton University Press. Dans ce cas, l’imperfection du marché du crédit est structurelle : elle est due à un problème d’information auquel un intervenant public serait également confronté.
  • [4]
    Banque de France (2012) : « Les PME en Europe : les disparités sont plus fortes en 2010 qu’avant la crise », Bulletin de la Banque de France, n° 188, 2e trimestre.
  • [5]
    Banque de France (2014) : « Le recul de la rentabilité pèse sur l’investissement des PME », Bulletin de la Banque de France, n° 197, 3e trimestre.
  • [6]
    Estimée ici par les séries « titres hors actions à l’exclusion de produit dérivés » dans les comptes nationaux financiers.
  • [7]
    En 2013, la part de l’endettement dans le bilan agrégé des PME est estimée à 29 %, dont moins de 1 % sous forme d’obligations, cf. Banque de France, données FIBEN.
  • [8]
    À la fin du deuxième trimestre 2014, les encours de crédits auprès des très petites entreprises (TPE, définies comme des entreprises réalisant un chiffre d’affaires de moins de 2 millions d’euros) s’élevaient à 230 milliards d’euros, cf. Banque de France (2014) : « Financement des micro-entreprises », Stat Info, juin.
  • [9]
    Le scoreboard de l’OCDE sur le financement des PME en septembre 2014 met l’accent sur ce problème de comparabilité des données. Par exemple, plus les entreprises deviennent petites et plus il est difficile de faire la distinction entre un prêt individuel et un prêt à une entreprise. Par ailleurs, les pratiques diffèrent selon les pays : 70 % du financement des entreprises individuelles au Royaume-Uni se font au moyen d’une carte de crédit ; dans d’autres pays, le prêt est accordé après hypothèque d’un bien personnel, auquel cas le prêt peut se trouver répertorié avec les prêts immobiliers.
  • [10]
    Cf. Banque de France : Enquête mensuelle auprès des banques sur la distribution du crédit en France, disponible sur www.banque-france.fr/economie-et-statistiques/stats-info/detail/enquete-mensuelle-aupres-des-banques-sur-la-distribution-du-credit-en-france.html ; Enquête trimestrielle de la Banque de France auprès des entreprises (3 500 PME et 400 ETI, dans les secteurs de l’industrie, des services et du bâtiment), disponible sur www.banque-france.fr/economie-et-statistiques/stats-info/detail/acces-des-entreprises-au-credit.html
  • [11]
    Cf. Survey on Access to Finance of Enterprises (SAFE), disponible sur www.ecb.europa.eu/stats/money/surveys/sme/html/index.en.html
  • [12]
    Selon la Fédération nationale des travaux publics (FNTP), 90 % des entreprises du secteur ont moins de 50 salariés, pour un total de 11 milliards de chiffre d’affaires, cf. Fédération nationale des travaux publics (FNTP) (2013) : « Recueil de statistiques », TP Informations, n° 71, novembre, www.fntp.fr/upload/docs/application/pdf/2013-12/recueil_statistiques_2012.pdf
  • [13]
    Voir INSEE (2014) : Enquête mensuelle de conjoncture dans l’industrie du bâtiment, octobre. Les délais de paiement sont plus courts en France qu’en Espagne et surtout en Italie, mais nettement plus longs qu’en Allemagne, voir ALTARES (2014) : Comportements de paiement des entreprises en France et en Europe, 1er semestre, p. 7.
  • [14]
    Voir Fonds monétaire international (FMI) (2014) : Global Financial Stability Report, chap. 1, octobre.
  • [15]
    Cf. Observatoire du financement des entreprises par le marché (2013) : Rapport annuel.
  • [16]
    Notons toutefois que la forte croissance du placement privé s’explique en partie par le niveau historiquement bas des taux d’intérêt de long terme. Son évolution future est donc incertaine car très sensible aux évolutions de la politique monétaire américaine.
  • [17]
    La rétention par la banque d’une tranche « equity » joue le même rôle qu’une franchise dans un contrat d’assurance. La franchise incite l’assuré à maîtriser son risque. Mais cette incitation a un coût : celui d’un transfert de risque imparfait vers l’assureur.
  • [18]
    En revanche, les petits entrepreneurs américains utilisent fréquemment des crédits à la consommation ou des crédits hypothécaires pour financer leur activité. La titrisation de ces types d’encours est de ce fait très développée aux États-Unis et joue un rôle important dans le financement des TPE.
  • [19]
    La situation est différente en Espagne et surtout en Italie, où les banques ne paraissent pas en mesure de prendre davantage de risques à leur bilan.
  • [20]
    Landier A. et D. Thesmar (2009) : « Financial Contracting with Optimistic Entrepreneurs », Review of Financial Studies, vol. 22, n° 1, pp. 117-150.
  • [21]
    Bourquin M. (2013) : Les relations entre donneurs d’ordres et sous- traitants dans le domaine de l’industrie, Rapport au Premier ministre du Sénateur Martial Bourquin, mai.
  • [22]
    Voir, par exemple, Souquet C. (2014) : « Forte hétérogénéité des délais de paiement entre entreprises » in Les entreprises en France, INSEE Références.
  • [23]
    Observatoire des délais de paiement (ODP) (2014) : Une double nécessité : stabiliser la loi, aménager les procédures de vérification pour les acteurs publics locaux, Rapport de l’ODP 2013, janvier.
  • [24]
    Stiglitz J.E. et A. Weiss (1981) : « Credit Rationing in Markets with Imperfect Information », American Economic Review, vol. 71, n° 3, pp. 393-410, juin.
  • [25]
    Grossman S.J. et J.E. Stiglitz (1976) : « Information and Competitive Price Systems », American Economic Review, vol. 66, n° 2, pp. 246-253 et Grossman S.J. et J.E. Stiglitz (1980) : « On the Impossibility of Informationally Efficient Markets », American Economic Review, vol. 70, n° 3, pp. 393-408, juin.
  • [26]
    Des études académiques confirment un problème généralisé de manque de culture financière. Voir, par exemple, Lusardi A. et O.S. Mitchell (2013) : « The Economic Importance of Financial Literacy : Theory and Evidence », NBER Working Papers, n° 18952.
  • [27]
    FICO (Fair Isaac Corporation), créateurs du principal score de crédit aux Etats-Unis. Cf. www.myfico.com/CreditEducation/WhatsInYourScore.aspx

1Dans un contexte de transformation majeure de la régulation bancaire, l’avenir du financement des PME suscite des interrogations légitimes. Les nouvelles exigences de fonds propres et de liquidité ne risquent-elles pas de réduire la propension des banques à financer leur développement ? Jusqu’à ce jour, la recapitalisation des banques françaises ne s’est pas faite au détriment des PME. Par ailleurs, le développement de nouveaux instruments de financement pour les plus grandes d’entre elles et pour les ETI, accompagné par deux réformes de l’assurance, devrait permettre aux banques de préserver leur capacité à prendre des risques sur les petites PME et TPE. En outre, le secteur bancaire français paraît en mesure de répondre à une reprise de la demande de crédit, évaluée ici à 10-15 milliards d’euros par point de croissance supplémentaire du PIB nominal. Dans ce contexte, les auteurs ne voient pas dans la titrisation des prêts aux petites PME et TPE une piste très prometteuse en France. Ils lui préfèrent la titrisation de prêts aux ménages ou aux entreprises de plus grande taille (grosses PME et ETI), moins coûteuse, qui peut être encouragée dès lors qu’elle permet un véritable transfert de portefeuille vers des investisseurs de long terme. Cette titrisation pourra favoriser indirectement les prêts aux petites PME en « libérant » une capacité à prendre des risques, à fonds propres inchangés.

2Pour les auteurs de la Note, les problèmes de crédit des PME sont relativement ciblés en France : ils concernent surtout le financement de la trésorerie, les entreprises les plus petites et celles du BTP. Il convient donc de se tourner vers des mesures ciblées, permettant de fluidifier le marché du crédit des PME et TPE et de remédier aux problèmes informationnels qui le caractérisent.

3Constatant que les problèmes de trésorerie des PME sont en grande partie provoqués par des délais de paiement excessifs, ils recommandent de favoriser l’affacturage et en particulier l’« affacturage inversé » dans lequel le donneur d’ordres (plutôt que le fournisseur) devient le client de l’affactureur. Dans le but de remédier aux problèmes d’asymétrie d’information qui font obstacle aux relations de prêts, ils suggèrent d’élargir l’accès aux données FIBEN de la Banque de France à l’ensemble des acteurs économiques et de développer un « fichier positif » du crédit (sur le modèle du FICO américain) tout en respectant la confidentialité des données personnelles, le crédit aux TPE étant très proche d’un crédit accordé à son dirigeant. C’est enfin dans l’approfondissement de la relation de crédit et dans l’accompagnement des emprunteurs que des solutions sont recherchées. Il est proposé de développer, en partenariat avec les banques ou les chambres de commerce, un outil de formation aux problématiques financières et comptables de base à destination des TPE. Sa validation pourrait être prise en compte par la banque et déboucher sur l’obtention de conditions de crédit plus favorables.

Introduction

4Depuis le début de la crise financière à l’automne 2008, le nombre de défaillances d’entreprises – principalement des petites et moyennes entreprises (PME) – est d’environ 60 000 par an en France, contre environ 48 000 avant crise [1]. Il est tentant d’attribuer cette forte hausse des défaillances aux difficultés que rencontrent les PME dans leur accès aux financements et, plus particulièrement, au crédit bancaire. Cependant, la crise financière s’est rapidement transformée en crise économique, de sorte que nombre de défaillances sont dues à l’insuffisance des carnets de commande plutôt qu’à celle des financements.

5Il faut ainsi d’emblée distinguer la détresse financière d’une entreprise de sa non-viabilité économique. Une entreprise cesse d’être économiquement viable lorsque la somme actualisée de ses flux de revenus anticipés passe au-dessous de ses coûts. Bien sûr, le calcul est par nature incertain. Mais lorsque le constat de non-viabilité est établi, l’entreprise ne peut voir ses besoins financés autrement qu’à perte. La puissance publique peut vouloir retarder la fermeture de l’entreprise [2], mais il s’agit alors d’une subvention, dont le montant ne sera pas recouvré.

6La situation est toute différente pour une entreprise économiquement viable, mais dont la création ou la continuation sont menacées par des contraintes financières liées à un mauvais fonctionnement du marché du crédit. Ainsi, une entreprise viable peut être temporairement illiquide si la poursuite de son activité requiert un financement externe immédiat qu’elle est quasiment sûre de pouvoir rembourser dans quelques mois. Si le système financier n’est pas en mesure de lui procurer ce financement, l’entreprise entre en situation de détresse financière. Une entreprise viable peut également devenir insolvable, si la valeur de ses actifs devient inférieure à celle de ses dettes. Il lui faut alors trouver le moyen de restructurer son bilan (c’est-à-dire de renégocier sa dette), ce qui implique que les créanciers et actionnaires « prennent leurs pertes », et nécessite donc un effort de coordination important et rapide de leur part. Dans les deux cas – illiquidité ou insolvabilité – l’entreprise est viable mais peut cesser de l’être par exemple si sa détresse financière lui fait perdre des clients.

7La distinction entre détresse économique et détresse financière est essentielle : soutenir des entreprises qui ne sont pas économiquement viables serait une perte pour le contribuable ; laisser mourir des entreprises viables parce que le système financier est déficient au moment où elles ont besoin de lui constituerait un gâchis économique. Mais en pratique, la distinction entre les deux cas de figure n’est pas toujours aisée et l’entrepreneur sera naturellement porté à mettre en avant des difficultés de financement plutôt qu’un problème de viabilité. La puissance publique peut chercher à atténuer les dysfonctionnements du marché du crédit, par exemple en améliorant les possibilités d’échanges informationnels. Lorsqu’elle choisit de prêter directement, elle doit rester consciente qu’elle est en général soumise aux mêmes informations imparfaites qu’un acteur privé : un crédit jugé trop risqué pour être rentable par une banque privée l’est également pour une banque publique [3].

8À l’appui de cette distinction, nous commençons par dresser un état des lieux du crédit aux PME en France avant d’aborder trois questions clés : la titrisation des prêts, le crédit de trésorerie et les problèmes d’information.

Le financement des PME : état des lieux

9À la fin de 2012, l’encours de financement externe des entreprises non financières françaises (toutes tailles confondues) s’élevait à 4 130 milliards d’euros (deux fois le PIB de la France), dont 59 % d’actions cotées et non cotées, 29 % de crédits et 12 % d’obligations et titres de créances négociables (données consolidées, Eurostat). Si le crédit aux entreprises a fortement ralenti en France depuis le début de la crise, son encours ne s’est que peu réduit, tandis que se développaient parallèlement les financements obligataires pour les entreprises de grande taille.

10Dans l’ensemble, les PME françaises ne semblent pas manquer de fonds propres par rapport à leurs homologues européennes [4]. Selon la Banque de France [5], les capitaux propres représentent environ 40 % du bilan des PME et ils ont augmenté en moyenne d’environ 5 % par an depuis 2008. Les problèmes de fonds propres se font sentir à certains moments précis de la vie des entreprises, dans la phase d’amorçage, lors du « second tour » d’appel de fonds des petites entreprises innovantes ou encore au moment des transmissions. Ces questions, qui concernent le développement peut-être insuffisant des fonds d’investissement en France mais aussi la pénurie de projets à forte rentabilité dans le pays, feront l’objet d’une prochaine Note du CAE. Nous nous concentrons ici sur la question du crédit, qui est au centre de la crise financière de 2008 et des inquiétudes suscitées par le mouvement de re-régulation bancaire opéré depuis lors.

11Les entreprises non financières françaises (toutes tailles confondues) ont vu le montant de leur financement par crédit bancaire augmenter de 10 points de PIB entre 1995 et 2012 pour atteindre l’équivalent de 60 % du PIB en 2012. Les données préliminaires de 2013 et 2014 suggèrent un ratio similaire pour ces années. C’est moins qu’au Royaume-Uni, en Espagne et en Italie (cf. graphique 1) mais plus qu’en Allemagne où le ratio n’a guère évolué ces vingt dernières années et demeure à un niveau proche de 40 % du PIB.

1

Financement des entreprises non financières par le crédit bancaire et les obligations en % du PIB

1

Financement des entreprises non financières par le crédit bancaire et les obligations en % du PIB

Source : Comptes financiers nationaux (encours, données consolidées), Eurostat.

12Quant au financement par obligations [6], son poids a plus que doublé depuis 1995, pour atteindre près de 25 % du PIB en 2012, juste derrière le Royaume-Uni. La France est le grand pays de la zone euro où les sources de financement des entreprises apparaissent les plus diversifiées. Cela reflète cependant la situation des grandes entreprises et bien moins celle des PME. Le graphique 2 montre que le financement par obligations ne représente que 2 % de l’endettement des PME en 2012, contre 34 % pour les grandes entreprises [7]. Les PME et TPE (très petites entreprises) sont donc structurellement plus dépendantes du financement bancaire, essentiellement du fait de la petite taille des prêts nécessaires à leur financement.

2

Répartition de l’endettement financier selon la taille des entreprises, en %

2

Répartition de l’endettement financier selon la taille des entreprises, en %

Source : Banque de France (2013) : « Les entreprises en France en 2012 : dégradations des performances mais consolidation des équilibres financiers », Bulletin de la Banque de France, n° 194, 4e trimestre.

13Même si, à terme, il est possible d’envisager une diversification des financements pour les PME et TPE, il est fort probable que le crédit bancaire restera leur principale source de financement externe, en raison des problèmes d’information que seule une relation personnalisée entre la banque et l’entrepreneur peut surmonter.

14Le contraste entre petites et grandes entreprises est également saisissant à l’aune des encours de crédits à l’actif des banques (graphique 3) : en juillet 2014, environ 45 % des 820 milliards d’encours bancaires mobilisés auprès des sociétés non financières – soit 377 milliards d’euros – allaient aux PME [8], un volume deux fois supérieur à celui des grandes entreprises.

3

Encours de crédit bancaire par taille d’entreprises, juillet 2014, en milliards d’euros

3

Encours de crédit bancaire par taille d’entreprises, juillet 2014, en milliards d’euros

Source : Banque de France.

15Les comparaisons internationales de l’évolution du crédit bancaire auprès des PME (et plus particulièrement des TPE) sont délicates, du fait du manque d’harmonisation des définitions [9]. Si l’on s’en tient aux taux de croissance (ce qui limite les problèmes de comparabilité des données), la France se trouve dans une situation relativement favorable entre 2010 et 2012 : les encours de crédits aux PME augmentent au cours de cette période, alors qu’ils régressent dans de nombreux pays, y compris aux États-Unis et au Royaume-Uni où la croissance avant crise était plus rapide qu’en France (graphique 4). Si l’on se concentre sur les nouveaux prêts de taille inférieure à 250 000 euros, qui ciblent les petites PME et les TPE, les volumes sont stables en 2013 et 2014 en France, alors qu’ils régressent nettement en Italie (données Banque centrale européenne, BCE).

4

Taux de croissance des encours de crédit aux PME, 2010-2012

4

Taux de croissance des encours de crédit aux PME, 2010-2012

Note : Les données ne sont pas disponibles pour l’Allemagne et l’Espagne.
Sources : OCDE (2014) : Financing SMEs and Entrepreneurs 2014 : An OECD Scoreboard, juillet.

Les banques sont-elles en mesure de répondre à une hausse de la demande de crédit ?

16Le faible dynamisme des prêts aux PME s’explique en grande partie par les perspectives de croissance limitées de l’activité, qui réduisent les besoins d’investissement. Il est alors utile d’apprécier quelle serait la demande de crédit de la part des PME si la croissance du PIB était plus soutenue. Les calculs présentés en encadré 1 suggèrent un besoin supplémentaire de crédit de l’ordre de 10 à 15 milliards d’euros par point de croissance nominale supplémentaire. Or, le crédit aux entreprises représente une part faible dans les bilans des banques françaises et il n’a pas suivi le rythme de croissance de ces derniers (graphique 5). En juin 2014, l’encours total des prêts aux entreprises représentait à peine 10 % du bilan des banques françaises et l’encours des prêts aux PME à peine 5 %. Les années 2000 ont, en effet, été marquées par une montée en puissance des activités de marché qui ont été pour les banques une source de rentabilité supérieure à celle du crédit aux entreprises.

5

Crédit bancaire aux entreprises non financières et total des actifs bancaires en milliards d’euros

5

Crédit bancaire aux entreprises non financières et total des actifs bancaires en milliards d’euros

Source : Auteurs à partir de données Banque de France.

1. Quel montant de crédit pour quel régime de croissance ?

Quel est le montant « normal » du crédit aux entreprises pour un niveau d’activité économique donné ? L’estimation n’est pas aisée et elle l’est encore moins en temps de crise. Les facteurs d’offre et de demande sont difficilement observables et se conjuguent. Peuvent aussi intervenir des changements structurels comme l’augmentation de la part du financement externe par des titres de dette ou encore l’évolution de l’environnement prudentiel qui compliquent un peu plus l’exercice.
Des études récentes [a] se sont penchées sur la question du rationnement de crédit et ont cherché à identifier des facteurs d’offre de crédit qui viendraient freiner la production de crédit à l’économie. Il en ressort que la faiblesse de la croissance du crédit en France pendant ces dernières années s’explique plus par des facteurs de demande que par des facteurs d’offre.
Nous étudions ici la relation entre la croissance nominale du PIB et la croissance des crédits aux entreprises afin d’établir un ordre de grandeur du supplément de crédit nécessaire en cas de reprise nette de l’activité. Il existe bien une relation dans le long terme comme l’indique le graphique. La régression par moindres carrés ordinaires réalisée sur la période 1994-2014 (avec une variable muette introduite pour couvrir la période de la crise financière entre le troisième trimestre de 2008 et le troisième trimestre de 2009) suggère qu’un supplément de croissance nominale de 1 point de pourcentage relève de 1,7 point le rythme de croissance de la demande de crédit.

Croissance du crédit aux entreprises et croissance nominale du PIB, 1994-2014

figure im6

Croissance du crédit aux entreprises et croissance nominale du PIB, 1994-2014

Note : La crise de 2008 a été retirée du graphique.
Sources : INSEE, Banque de France et Nomura.

17Ainsi, les 10 à 15 milliards de demande de crédit supplémentaires en cas de redressement significatif du taux de croissance du PIB ne représenteraient pour les banques françaises que 0,1 à 0,2 % de leur bilan agrégé, ce qui est un ordre de grandeur inférieur aux ajustements de bilan requis par les nouvelles réglementations prudentielles. Les enquêtes de la BCE et de la Banque de France confirment que les contraintes de bilan auxquelles font face les banques n’ont jusqu’à présent pratiquement pas eu d’incidence sur leurs conditions d’offre de crédit. La publication par la BCE, le 26 octobre 2014, des résultats de son évaluation complète des bilans bancaires de la zone euro (revue des actifs et tests de résistance) tend également à confirmer que les banques françaises ont une capitalisation suffisante pour répondre à un redressement de la demande de crédit de la part des PME.

18Du côté de la demande de crédit, les enquêtes existantes auprès des banques comme des entreprises [10] ne traduisent pas de problème important d’accès au financement pour les PME en 2014, sauf pour le crédit de trésorerie, pour lequel le taux de rejet apparaît sensiblement plus important que pour les crédits d’investissement. Si, selon l’enquête de la Banque de France, près de 90 % des PME ayant demandé un crédit d’investissement indiquent l’avoir obtenu en totalité ou à plus de 75 %, ce chiffre tombe à près de 75 % des PME dans le cas de crédits de trésorerie. Une comparaison internationale issue des don nées de l’enquête semi-annuelle SAFE de la BCE suggère par ailleurs que les conditions d’accès au crédit en France seraient, dans certains cas, plus difficiles qu’en Allemagne [11]. D’après les résultats obtenus, les demandes de prêts bancaires des PME françaises sont acceptées dans leur intégralité ou dans leur quasi-totalité à 77 %, celles des TPE à 70 %. Bien qu’assez faible, le taux d’acceptation des demandes de prêts des TPE reste néanmoins plus élevé en France qu’en Allemagne, en Espagne ou encore en Italie, où il atteint 43 %. Concernant les autres types de prêts (crédits commerciaux, découverts, etc.), le taux d’acceptation apparaît, en revanche, meilleur en moyenne en Allemagne. Mais à ce niveau aussi, la situation des entreprises françaises reste plutôt moins mauvaise que celles de leurs concurrentes italiennes et espagnoles (cf. tableau).

Part des demandes de prêts acceptées dans leur intégralité ou financées dans leur quasi-totalité entre avril et septembre 2014, en %

figure im7

Part des demandes de prêts acceptées dans leur intégralité ou financées dans leur quasi-totalité entre avril et septembre 2014, en %

Note : On additionne ici les réponses S1 (« demande acceptée dans sa totalité ») et S5 (a obtenu la quasi-totalité de la quantité de prêt demandée) à la question 7B de l’enquête.
Sources : Survey on the Access to Finance of Enterprises (SAFE, question Q7B), BCE et Nomura.

19Ce constat mitigé est confirmé par le « Baromètre sur le financement et l’accès au crédit des PME » de CGPME et KPMG, fondé sur une enquête menée auprès d’un échantillon de 401 chefs d’entreprises, représentatif des entreprises françaises de 10 à 500 salariés. En septembre 2014, 34 % des chefs d’entreprises interrogés faisaient état de problèmes de trésorerie ou de financement, contre 26 à 29 % en 2010. Le problème paraît le plus ressenti dans le secteur du BTP (46 %), dans la région Nord-Est (35 %) et dans les communes rurales (38 %).

Un problème sensible de financement de trésorerie

20Si les problèmes de financement sont plus sensibles lorsqu’on interroge les entreprises que dans les enquêtes auprès des banques, les deux populations se retrouvent pour pointer un problème récurrent de financement de la trésorerie. Les difficultés de trésorerie s’avèrent particulièrement aiguës dans le secteur du BTP, en grande partie constitué de TPE [12], qui paraît souffrir à la fois de délais de paiement importants et de difficultés de trésorerie, aussi tendues qu’au milieu des années 1990 [13]. Plusieurs facteurs expliquent la détérioration de la situation au cours de la période récente : la faiblesse de la demande de construction, la contraction des dépenses de l’État et des collectivités locales et une augmentation sans précédent des délais de paiement. Si le BTP n’est pas le seul secteur concerné par les retards de paiements, il semble bien que les retards de paiements contribuent fortement aux problèmes de trésorerie de ce secteur

21Constat. Le secteur bancaire français paraît en mesure d’absorber une demande de crédit plus soutenue de la part des PME en cas de conjoncture plus favorable. Les conditions d’accès aux crédits de trésorerie semblent toutefois difficiles par rapport à l’Allemagne. L’allongement des délais de paiement pèse durement sur certains secteurs.

Diversifier les sources de financement des PME ?

22Même si le secteur bancaire reste l’acteur incontournable, on peut s’interroger sur l’opportunité d’une diversification des sources de financement des PME, dans le contexte d’un système bancaire probablement plus prudent à l’avenir et de la très grande cyclicité voire instabilité de l’offre de crédit bancaire [14].

23Les marchés financiers européens ont spontanément fourni des réponses à cette incertitude quant au futur des financements bancaires. L’une d’elles est le placement privé, qui consiste à placer de la dette de moyen ou long terme auprès d’un petit nombre d’investisseurs institutionnels, donc sans faire appel à l’épargne publique. Le placement privé de la dette des ETI (entreprises de taille intermédiaire) ou des PME les plus grosses a connu un développement sans précédent en zone euro depuis 2013. En France, il a permis en 2013 à 40 entreprises d’emprunter plus de 3,3 milliards d’euros, dont 20 ETI pour environ 1,2 milliard d’euros [15]. Ce développement a été accompagné par la publication en mars 2014 de la charte relative aux Euro Private Placements, ou Euro PP, établie par la Place financière de Paris sous l’égide de la Banque de France et de la Chambre de commerce et d’industrie de Paris-Île-de-France. Cette charte standardise les pratiques sur le marché des placements privé [16]. En parallèle à ces évolutions de marché, les pouvoirs publics ont également mis en œuvre des réformes en vue de réorienter les placements d’assurance-vie vers le financement des entreprises.

Les réformes de l’assurance-vie

24L’encours de l’assurance-vie dépassait 1 400 milliards d’euros en mars 2014. Ce total comprenait 240 milliards d’encours relatifs aux contrats en unités de compte, investis typique ment dans des OPCVM (organisme de placement collectif en valeurs mobilières) dont le risque de fluctuation de valeur est supporté par les assurés. Le reste de l’encours – soit plus de 1 100 milliards – représentait essentiellement les engagements liés aux contrats dits « en euros ». Ces contrats offrent des garanties importantes aux assurés puisque, d’une part, leur valeur est garantie et peut être réalisée à tout moment moyennant des frais de rachat peu élevés, et, d’autre part, les assurés doivent bénéficier d’une fraction au moins égale à 85 % des performances nettes des actifs de l’assureur. Ces engagements importants au passif imposent aux compagnies d’assurance-vie des politiques d’investissement très prudentes orientées vers des actifs sûrs et liquides. La réglementation prudentielle des compagnies d’assurance, jusqu’à sa réforme en août 2013, consacrait d’ailleurs cet objectif de prudence en limitant fortement la capacité des entreprises d’assurance-vie à investir dans la dette des PME et ETI.

25Deux réformes récentes, qui portent à la fois sur l’actif et le passif des assureurs-vie, visent à faciliter le financement des ETI et grosses PME :

  • au passif : les contrats d’assurance-vie dits « euro croissance » et « vie-génération » ont été introduits en 2014. Les contrats euro-croissance conservent tous les attributs des actuels contrats d’assurance-vie en euros, notamment leur fiscalité, mais ne sont pas sou mis à l’obligation de garantir aux assurés la valeur de leur contrat avant une date d’échéance fixée à huit ans après la souscription. Les contrats vie-génération sont des contrats en unités de compte qui offrent un abattement de 20 % sur les capitaux transmis par décès, en contrepartie d’un investissement à hauteur de 33 % au moins dans les PME et l’économie solidaire ;
  • à l’actif : le décret n° 2013-717 du 2 août 2013 modifiant le Code des assurances permet désormais aux assureurs d’investir jusqu’à 5 % de l’épargne des assu rés, environ 60 milliards d’euros, soit directement dans des prêts aux entreprises, soit dans des « fonds de prêts à l’économie » qui émettent des titres de créances adossés à des prêts aux PME et ETI.

26Ces deux réformes vont dans le bon sens. Garantir à tout moment la valeur de rachat des contrats d’assurance-vie en euros conduit de facto à en faire des produits d’épargne liquide bancaire. Certes, offrir la possibilité aux assureurs de s’exposer plus significativement aux risques des ETI et grosses PME, classes d’actifs qui leur sont peu familières, comporte des risques. Les dispositions réglementaires qualitatives qui imposent aux assureurs investissant dans de tels actifs de disposer de l’expertise interne nécessaire sont à cet égard importantes.

Faut-il titriser les prêts aux TPE ?

27Les tentatives actuelles de diversification des sources de financement des entreprises concernent essentiellement les ETI ou les plus grosses PME. Le placement privé entraînant des coûts fixes trop importants pour les TPE et la plus grande partie des PME, on peut s’interroger sur l’opportunité de développer un marché de prêts titrisés pour les PME et les TPE.

28La titrisation consiste à transférer un portefeuille de prêts ou de créances du bilan de l’institution financière qui l’a initialement souscrit vers une structure qui le refinance en émettant des titres. Les titres sont des droits sur les flux futurs de revenus générés par le portefeuille. L’émission peut éventuellement être décomposée en différentes « tranches » de risque. La tranche dite « equity », la plus risquée, supporte les premières pertes. Chaque tranche suivante absorbe à son tour les pertes jusqu’à ce qu’elle perde toute valeur. La dernière tranche, dite « senior » ne supporte des pertes que si toutes les tranches qui la précèdent ont perdu toute valeur. Cette structure permet d’adapter le profil de risque de chaque tranche à une clientèle particulière (hedge funds, assureurs…) et donc de valoriser au mieux le portefeuille. Mais elle a pour inconvénient de complexifier le produit financier. Par ailleurs, la tranche « senior », en dépit de son nom rassurant, peut dans certains cas s’avérer relativement risquée.

29Développer la titrisation pour les prêts aux PME supposerait de réunir dans de vastes portefeuilles un grand nombre de prêts unitaires de montants modestes afin de diversifier les risques. Ces portefeuilles seraient alors titrisés et vendus tels quels ou par tranche, la banque ayant accordé les prêts devant en tout état de cause conserver une partie des risques dans son bilan, afin de maintenir les bonnes incitations de son côté (voir encadré 2) [17]. La vente des prêts tritrisés permettrait alors à la banque de faire de la place dans son bilan pour prendre de nouveaux risques, c’est-à-dire pour accorder de nouveaux prêts à l’économie. La volonté de la BCE de promouvoir le marché des prêts titrisés aux PME pro cède de cette logique, la Banque centrale ayant la possibilité d’acquérir sur le marché les tranches « senior » de ces actifs.

2. Les dérives de la titrisation et la crise de 2008

Les risques de la titrisation sont liés à la modification des comportements qu’elle induit. Si une banque anticipe qu’elle va céder les flux futurs associés à des prêts, ses incitations à sélectionner les emprunteurs sont moindres, d’une part, et, d’autre part, ses incitations à engager des mesures de recouvrement efficaces en cas d’événement de crédit sont également moins importantes puisqu’elle ne supporte plus les conséquences pécuniaires du défaut. Ces problèmes d’incitation ont été mis en évidence dans le cas des prêts hypothécaires américains lors de la crise de 2008 [a]. Les incitations de la banque « originatrice » du crédit sont contrôlées en pratique par une rétention de risque. En conservant une fraction de la tranche « equity », c’est-à-dire une fraction des premières pertes sur le portefeuille, la banque conserve des incitations à maintenir une qualité de portefeuille minimale.
Les opérations de titrisation qui ont joué un rôle central dans la crise de 2008 constituaient des formes dévoyées de la titrisation telles que décrite ci-dessus, à des fins de contournement de la réglementation prudentielle des banques. Les prêts titrisés n’étaient pas transférés vers des investisseurs non bancaires : ils étaient refinancés soit dans le système bancaire, soit par des banques « de l’ombre », c’est-à-dire des institutions qui se refinancent en émettant des quasi-dépôts, tels que les fonds monétaires, c’est-à-dire de facto des banques non régulées. La titrisation était devenue aux États-Unis avant 2008 un outil d’arbitrage réglementaire permet tant aux banques de se soustraire à la réglementation prudentielle, davantage qu’un transfert de risques des banques vers des institutions aux bilans moins fragiles.

30Cependant, les petites entreprises constituent une population hétérogène – plus encore que celle des particuliers. Les prêts comportent des clauses variées et sont difficiles à regrouper en grandes classes d’emprunteurs se prêtant à l’analyse statistique. De plus, les petites entreprises sont sans doute les entreprises pour lesquelles les problèmes d’asymétrie d’information entre les banques et les marchés sont le plus importants. La décision de crédit repose sur le juge ment du responsable de clientèle local, au fait de l’environnement économique immédiat de l’entreprise, ainsi que de la compétence et du dynamisme, voire de la situation financière personnelle de ses dirigeants. Les coûts informationnels de la titrisation paraissent donc particulièrement élevés dans le cas des petites PME et TPE. Cette classe d’actifs est d’ailleurs très peu titrisée par le système financier américain, pourtant le plus innovant en matière de titrisation [18].

31Il faut ainsi s’interroger sur les gains spécifiques de cette titrisation par rapport au placement privé mentionné plus haut (qui bénéficie aux ETI et aux grosses PME) et à la titrisation des prêts aux particuliers, plus facile à mettre en œuvre (surtout lorsqu’ils sont adossés à des prêts immobiliers) que celle des prêts aux petites PME et TPE. Lorsqu’une banque « libère » un euro de fonds propres (en transférant le risque qu’assure cet euro au marché), elle est censée l’utiliser pour octroyer des financements là où ils sont le plus profitables, indépendamment de l’origine de cet euro (titrisation, émission d’actions, résultats mis en réserve…). En d’autres termes, il n’y a aucune raison de penser que le desserrement des contraintes de fonds propres des banques éventuelle ment engendré par des placements privés de prêts aux ETI ou par la titrisation d’emprunts immobiliers ne bénéficierait pas, au moins en partie, aux TPE et PME qui ont des pro jets profitables. La fongibilité, au moins partielle, du bilan des banques, implique qu’il n’est pas efficace de chercher à titriser les actifs bancaires les plus illiquides pour desserrer les contraintes financières des banques.

32En définitive, les réformes récentes de l’assurance-vie ont déjà pour objectif de pallier les insuffisances de concours bancaires aux PME qui pourraient éventuellement se manifester en cas de reprise prononcée de l’investissement. Par exemple, la réforme des placements des assureurs crée un potentiel d’investissement dans les PME de 60 milliards d’euros, très supérieur à l’augmentation de la demande de crédit des PME en cas de reprise telle que nous l’estimons. Le fait que Novo, le fonds de prêts à l’économie lancé par la Caisse des dépôts et consignations en juillet 2013, ait pour l’heure engagé moins de 500 millions d’euros sur une capacité totale de 1 milliard suggère qu’il est peu probable que la nouvelle capacité d’endettement créée par ces réformes soit rapidement consommée.

33S’il y a lieu de veiller à ce que les évolutions réglementaires internationales (en particulier Bâle 3 pour le secteur bancaire et Solvabilité 2 pour celui de l’assurance), et leur transposition en droit français, ne pénalisent pas à l’excès l’activité de titrisation en France dans les années à venir, les gains à attendre d’une titrisation des prêts aux PME ne nous paraissent pas flagrants en France à court terme [19].

34Proposition 1. Le développement de la titrisation devrait cibler les prêts aux particuliers et ceux aux grandes PME et ETI plutôt que les prêts aux petites PME et TPE.

Le financement du besoin en trésorerie des PME

35On a vu plus haut que, si la pénurie de financements pour l’investissement n’est pas clairement établie, il ne fait pas de doute que les PME françaises rencontrent de fréquents problèmes de trésorerie. Cependant, ceux-ci semblent souvent relever en réalité de problèmes de solvabilité qui impliquent la restructuration des dettes ou la fermeture de l’entreprise. Les « difficultés de trésorerie » décrites par les entreprises comme des situations où la banque est exagérément frileuse peuvent être un indicateur avancé d’un business plan qui n’est pas en mesure de couvrir le passif existant. Il est important de garder en tête le décalage inévitable entre les discours d’un entrepreneur optimiste qui veut croire que son entreprise va rebondir [20] et celui d’un banquier qui sait qu’il ne recouvrera pas l’argent qu’il avance si l’entreprise devient insolvable.

36De fait, comme le souligne l’Observatoire du financement des entreprises dans son rapport de juin 2014 (encadré 3), le taux de défaut sur les crédits de trésorerie est en moyenne supérieur au taux de défaut sur les crédits d’investissement. Un moyen pour l’entreprise de surmonter la réticence de son banquier est alors d’anticiper le problème de trésorerie. La gestion en amont des risques financiers peut notamment passer par la négociation antérieure au stress financier de prêts pouvant jouer le rôle de coussins absorbant les chocs de liquidité. Cela pourrait permettre de limiter les situations où l’entreprise est prise à la gorge par des besoins que la banque ne peut couvrir qu’à un coût élevé car statistique ment, ce type d’avance dans l’urgence a une probabilité de défaut élevée. Nous revenons plus bas sur ces problèmes de capacité d’anticipation.

3. Financement de trésorerie : le constat de l’Observatoire du financement des entreprises

Le rapport sur le financement des TPE publié en juin 2014 par l’Observatoire du financement des entre prises [a] s’intéresse spécifiquement aux difficultés de financement de trésorerie souvent mentionnées par les entreprises et fournit un compte rendu détaillé des auditions effectuées sur ce sujet.
Selon ce rapport, le taux de défaut sur les crédits aux TPE est en moyenne de l’ordre de 6 %, mais il serait « significativement plus élevé » pour les crédits de trésorerie. Dès lors, les banques seraient plus réticentes à prêter pour financer de la trésorerie plutôt qu’un investissement : un besoin urgent de trésorerie s’interprète (rationnellement) comme le symptôme avancé d’un problème économique qui ne relève pas d’une simple question de liquidité.
Une piste d’action est de prévenir autant que possible les problèmes de trésorerie. Le rapport mentionne à cet égard un certain manque de professionnalisme de la part des TPE : « Il apparaît dans de nombreux cas qu’a posteriori un crédit échéancé aurait été moins coûteux pour l’entreprise que l’utilisation d’un découvert. Mais le chef d’entreprise n’a pas toujours cette perception au moment où il demande son financement. Des actions de pédagogie en direction des chefs d’entreprise sur les crédits de trésorerie seraient souhaitables » (p. 44).
Un pilotage financier plus efficace des petites entre prises serait d’autant plus bénéfique à leur santé qu’une spécificité du marché français est une utilisation massive du découvert pour absorber leurs chocs de liquidité : 60 % de l’encours du financement à court terme des TPE est constitué d’autorisations de découvert. Le financement par un découvert est coûteux pour les entreprises (environ trois fois plus cher qu’un finance ment par un crédit échéancé), surtout dans le cas où aucun découvert n’est autorisé (agios, frais de rejet de chèques et de prélèvements, commissions d’intervention particulièrement élevées).

Délais de paiement des grands donneurs d’ordres

37Le besoin de trésorerie d’une entreprise est largement déterminé par la différence entre les délais avec lesquels ses clients la paient et ceux avec lesquels elle paie ses fournisseurs. La Loi de modernisation de l’économie (LME) de 2008 visait à réduire ces délais en introduisant des plafonds pour les délais de paiement des fournisseurs à 60 ou 45 jours fin de mois, ainsi que des pénalités en cas de non-respect de ces plafonds. La loi LME a significativement réduit les délais de paiement jusqu’en 2011. Ses effets se sont ensuite estompés. Surtout, un rapport parlementaire de 2013 [21] établit que les délais de paiement des fournisseurs croissent nette ment avec la taille du donneur d’ordres, alors que les délais clients sont moins sensibles à la taille. Les PME ont donc subi un allongement des délais de paiement de leurs grands donneurs d’ordres pouvant créer pour elles des tensions de trésorerie dans un environnement économique difficile [22]. S’agissant des donneurs d’ordres publics, si l’État a globalement réduit ses délais de paiement, ceux des collectivités locales se sont allongés depuis 2011.

38Dans son rapport pour l’exercice 2013, l’Observatoire des délais de paiement [23] procède à des simulations montrant que, dans l’hypothèse où l’ensemble des acteurs en situation de non-conformité, y compris publics, viendraient s’aligner sur le délai maximal autorisé par la loi, des montants de trésorerie significatifs financés par les grands donneurs d’ordres seraient dégagés en faveur des PME et des ETI, pour un montant de 15 milliards d’euros dans le premier cas et de 6 milliards dans le second. La loi relative à la consommation n° 2013-344 du 17 mars 2013 a introduit deux dispositions visant une meilleure application de la loi LME. Désormais, les commissaires aux comptes devront établir une attestation relative aux délais de paiement fournisseurs et clients. Cette attestation sera transmise au ministère de l’Économie. Les sanctions en cas de retard de paiement ont également été renforcées.

39Le fait que certains grands donneurs d’ordres réduisent ainsi leur besoin de fonds de roulement aux dépens de leurs petits fournisseurs s’apparente à un problème classique d’asymétrie de taille entre les deux agents, le (petit) fournisseur perdant tout pouvoir de négociation une fois que l’équilibre de son activité dépend d’une relation commerciale spécifique avec un (grand) donneur d’ordres. Le recours par le donneur d’ordres à l’affacturage inversé paraît une solution contractuelle très bien adaptée à ce problème. Comme nous le détaillons ci-dessous, l’affacturage inversé permet au donneur d’ordres de s’engager de manière crédible à ne pas utiliser son pouvoir de marché vis-à-vis de ses fournisseurs.

Assurer le risque de retard de paiement par le recours à l’affacturage inversé

40L’affacturage est une opération financière par laquelle une entreprise transfère ses créances commerciales à une institution financière, l’affactureur, contre règlement par anticipation des créances. L’affacturage peut s’effectuer sans recours, auquel cas l’affactureur ne se retourne pas vers le titulaire des créances en cas d’événement de crédit. Dans le cas de l’affacturage avec recours, l’affactureur se retourne vers son client titulaire de la créance en cas d’impayé.

41Dans le cas de l’affacturage inversé le client de l’affactureur est le donneur d’ordres et non le fournisseur : l’entreprise cliente transmet à la société d’affacturage les factures des fournisseurs qui ont autorisé leur transfert, et les informations nécessaires au suivi des risques (cf. figure). La société d’affacturage règle immédiatement les fournisseurs après déduction de l’escompte pour paiement comptant, puis l’affactureur reverse l’escompte obtenu à l’entreprise cliente qui le rémunère. Enfin, l’entreprise cliente paie à échéance les factures des fournisseurs à l’affactureur, selon un délai préalablement convenu.

Affacturages classique et inversé

tableau im8
France Allemagne Italie Espagne PME ? prêts bancaires 77 76 56 62 ? crédits commerciaux 70 87 70 71 ? découverts, lignes de crédit, cartes de crédit 69 75 56 69 TPE ? prêts bancaires 70 63 43 57 crédits commerciaux 72 88 58 65 ? découverts, lignes de crédit, cartes de crédit 66 72 45 70

Affacturages classique et inversé

Source : Auteurs.

42Les modalités de l’affacturage inversé paraissent parfaitement adaptées à la situation dans laquelle un donneur d’ordres important (ETI, grande entreprise ou collectivité locale) est en relation avec de nombreux fournisseurs PME. L’affacturage inversé s’est développé rapidement aux États-Unis après que la crise de 2008 a tari d’autres sources de financement de trésorerie. Il est à l’heure actuelle nettement moins développé en France que dans d’autres pays de la zone euro. Cela est vraisemblable ment lié à la structure du marché de l’affacturage en France, beaucoup plus concentré qu’aux États-Unis. Les acteurs de l’affacturage en France sont pour l’essentiel des filiales de grands groupes bancaires, eux-mêmes très concentrés. Aux États- Unis, au contraire, le marché de l’affacturage est beaucoup plus fragmenté, composé d’entreprises qui, pour la plupart, n’ont pas de liens capitalistiques avec le secteur bancaire.

43Nous proposons que la puissance publique incite au développement de solutions contractuelles de marché de ce type. Les règles des marchés publics pourraient comporter l’obligation, pour les entreprises dont les volumes de dettes fournisseurs dépassent une taille critique, de satisfaire une des conditions suivantes :

  • l’entreprise soumissionnaire est en mesure de fournir des données détaillées sur la distribution de ses délais de paiement à ses sous-traitants lors des exercices récents ;
  • elle présente une solution d’affacturage inversé pour l’exécution du marché.

44Proposition 2. Inciter au développement de l’affacturage inversé afin d’assurer les PME contre le risque de délais excessifs de leurs grands donneurs d’ordres.

La réduction des asymétries d’information sur le marché du crédit

45Les frictions informationnelles sont au cœur du problème du financement des petites entreprises [24] : l’entrepreneur peut difficilement montrer la qualité de son projet et ses compétences d’exécution ou même s’engager de manière crédible à des efforts importants pour le faire réussir. Comme le montre en effet la littérature économique depuis les travaux fondateurs de Grossman et Stiglitz (1976 et 1980) [25], la production privée d’information (notamment financière) peut se révéler sous-optimale quand le producteur d’information supporte son coût mais ne parvient pas à s’en approprier les rendements. L’intervention publique dans ce domaine est dès lors pleinement justifiée.

Accès aux données FIBEN pour fluidifier le marché secondaire des prêts aux PME

46La Banque de France produit des données financières sur les entreprises françaises dont le chiffre d’affaires est supérieur à 750 000 euros. Regroupées dans le fichier FIBEN (fichier bancaire des entreprises), ces données informent sur le passif de l’entreprise, l’historique récent des incidents de paie ment, et attribuent une note à l’entreprise qui vise à mesurer sa capacité à honorer ses engagements financiers à un horizon de trois ans. Cette note dépend des données de bilan, mais aussi d’une appréciation qualitative issue des échanges entre la Banque de France et l’entreprise.

47Actuellement, ces données sont accessibles à l’ensemble des établissements de crédit, des sociétés d’assurance-crédit et d’assurance-caution. Les informations FIBEN sont cou vertes par le secret professionnel et ne peuvent donc pas être communiquées à des tiers non autorisés. Cette confidentialité des données évite à la Banque de France, qui les produit, d’être considérée comme une agence de notation et régulée comme telle.

48Fluidifier et standardiser l’information concernant le risque financier des entreprises, sans donner d’avantage informationnel à certaines catégories d’acteurs, aurait cependant une valeur sociale. Cela pourrait faciliter l’émergence d’un marché secondaire des prêts et favoriser l’innovation sur ce marché. Un accès plus large aux informations FIBEN pourrait par exemple permettre des ventes de prêts individuels des plus grosses PME, l’escompte de créances commerciales, etc. Cela ouvrirait l’analyse des produits titrisés à des acteurs divers – pas uniquement des établissements de crédit mais aussi des acheteurs potentiels ou des consultants offrant des prestations d’analyse. Plus généralement, cela élargirait l’analyse économique du marché du crédit aux PME. Les personnes susceptibles de participer à la formation des prix sur le marché du crédit ne sont pas toutes salariées des établis sements de crédit ou des assureurs.

49Produite par la Banque de France, cette information pourrait soit être vendue à tous les acteurs économiques, soit être mise dans le domaine public au titre de l’open data. Le pro jet de loi relatif à la simplification de la vie des entreprises avait envisagé l’ouverture de FIBEN aux assureurs au titre de leur activité de crédit, aux plateformes de crowdfunding et aux sociétés de gestion pour l’activité des fonds de prêt. Le Sénat, qui l’a examiné en novembre 2014, a cependant déci dé de supprimer l’article 30 qui contenait cette disposition, en invoquant le « coût », « la faisabilité » de FIBEN, et le risque que la vie des entreprises ne s’en trouve au final « complexifiée ». Il est regrettable de voir ce sujet enterré sans motifs substantiels, dans la mesure où le fichier FIBEN existe déjà, et qu’il a déjà fait la preuve de son utilité pour les acteurs bancaires qui en ont l’usage. Il y aurait tout à gagner à ouvrir ces données, et ce le plus largement possible, afin de faciliter de nouvelles relations de financement en dehors du secteur bancaire.

50Proposition 3. Élargir l’accès aux données FIBEN à l’ensemble des acteurs économiques.

Éducation financière et écosystème banques/PME

51De l’avis même des représentants des associations de PME, les difficultés financières des TPE s’expliquent en grande partie par un manque de formation financière de leurs dirigeants [26]. La mauvaise anticipation des besoins en trésorerie et en capitaux propres est un facteur d’échec entrepreneurial qu’il est souhaitable d’éviter. En particulier, il est important que le dirigeant de TPE soit sensibilisé aux risques d’occurrence de stress financier de l’entreprise et à l’importance de les gérer en amont. A minima, une formation développée en partenariat avec les banques ou les chambres de commerce permettrait au dirigeant de réaliser son besoin d’accompagnement sur les sujets financiers. La formation couvrirait les principes de base de la comptabilité et de la gestion de trésorerie, ainsi que les notions essentielles de fiscalité et de droit du travail, qui font partie intégrante du calcul de la solvabilité de l’entreprise.

52Si des initiatives intéressantes existent dans ce domaine, leur diffusion spontanée est peu probable, notamment parce que peu d’acteurs y ont véritablement intérêt, tandis que les entrepreneurs n’en perçoivent pas nécessairement l’utilité ex ante. Les pouvoirs publics ont donc un rôle à jouer, en complément des aides à l’entrepreneuriat. Le développement du numérique laisse entrevoir des solutions de formation relativement peu onéreuses (cours et tests en ligne). Nous rejoignons ici l’une des conclusions de l’Observatoire du financement des entreprises qui préconise de renforcer la connaissance financière des dirigeants de TPE.

53Proposition 4. Développer un outil de formation pour préparer le dirigeant de TPE aux problématiques financières et comptables de base. Cette formation pourrait être validée par un examen en ligne et les banques participantes pourraient offrir (en toute transparence) un traitement favorable aux entrepreneurs qui participent au programme.

Informations personnelles

54En termes de chiffres d’affaires, les TPE sont sous le seuil du répertoire FIBEN (> 750 000 euros), ce qui rend l’évaluation de leurs risques de défaut difficile pour le prêteur. L’extension du système FIBEN à ces entreprises n’est cependant pas la voie à suivre, car des scores basés sur la comptabilité de l’entreprise ne sont pas de bons prédicteurs de la probabilité de remboursement pour les très petites entreprises. De plus, la situation financière de la petite entreprise est indissociable de la situation financière personnelle de l’entrepreneur : le crédit aux TPE est beaucoup plus proche du prêt aux particuliers que du prêt aux PME. Ce qu’il s’agit d’évaluer, outre le projet, ce sont des variables relatives au comportement du dirigeant d’entre prise, ainsi qu’à sa situation personnelle (a-t-il déjà beaucoup emprunté à titre personnel ? a-t-il déjà réussi à rembourser des prêts importants ? a-t-il tendance à ne pas payer ses factures à l’heure ?, etc.). Aux États-Unis, une grande partie du crédit aux TPE passe par les cartes de crédit personnelles du fondateur. Ceci est possible du fait de l’existence d’un « FICO score », qui évalue la capacité de remboursement de l’individu sur la base de son historique de crédit [27]. Ce type de fichier positif n’existe pas en France et c’est sans doute une des entraves au développement du crédit aux TPE. Un score positif au registre du crédit constituerait un collatéral non financier que l’entrepreneur pourrait gager lorsqu’il emprunte, signalant son intention de rembourser. La France se singularise par une hostilité au fichier positif au nom de la protection de la vie privée. Mais cette protection rend vulnérables les individus qui ont le plus besoin de se crédibiliser auprès des prêteurs, notamment les créateurs de petites entreprises. Il faut également s’attendre à ce que certains grands réseaux bancaires expriment une opposition au fichier positif du simple fait qu’il affaiblit leurs rentes de monopole en donnant à l’emprunteur la possibilité d’étayer son dossier auprès d’organismes de crédit chez lesquels il n’a pas d’historique.

55En mars 2014, le Conseil constitutionnel a rejeté le projet de fichier positif formulé dans le cadre de la loi de modernisation de l’économie (loi Hamon). Il y voyait « une atteinte au droit au respect de la vie privée » non proportionnée au but poursuivi, lequel était la « lutte contre le surendettement ». Bien au-delà de la lutte contre le surendettement, le fichier positif est un moyen de réduire les exclusions du marché du crédit. Le motif d’un tel fichier est donc bien plus large que celui porté par la loi Hamon.

56Proposition 5. Le développement d’un « fichier positif » du crédit des individus (sur le modèle du FICO américain) permettrait de desserrer la contrainte de crédit des TPE sans historique ni collatéral.

Conclusion

57Dans un contexte économique difficile depuis 2007, les financements bancaires et obligataires des PME ont légèrement crû. On ne relève pas de dégradation notable des conditions de financement des PME mais cela ne doit pas masquer des difficultés dans les cas particuliers des TPE et des financements de trésorerie. Nous pensons que les réponses les mieux adaptées à ces difficultés sont des mesures très ciblées, permettant de fluidifier le marché du crédit dans ces cas particuliers : réduction et assurance des risques liés aux délais de paiement des grands donneurs d’ordres pour les problèmes de trésorerie, développement d’une information publique de meilleure qualité et de la formation à la gestion financière pour les TPE.

Cette Note a bénéficié de plusieurs entretiens auprès d’institutions publiques et privées. Les auteurs remercient leurs interlocuteurs pour leur disponibilité et leurs contributions et plus particulièrement CGPME (Confédération générale du patronat des petites et moyennes entreprises) et KPMG (groupe français d’audit, de conseil et d’expertise comptable) pour la mise à disposition des données relatives à leur « baromètre sur le financement et l’accès au crédit des PME », ainsi que BPI pour le partage des données publiées dans le rapport PME 2013. Ils sont particulièrement redevables à Jézabel Couppey-Soubeyran, conseillère scientifique au CAE, pour la qualité de son accompagnement et de ses contributions tout au long de leur travail.

Notes

  • [a]
    Nomura International, correspondant du CAE.
  • [b]
    École d’économie de Toulouse (TSE), Université de Toulouse 1, IDEI.
  • [c]
    Sciences Po Paris, membre du CAE.
  • [1]
    Cf. L’Observatoire des entreprises, Banque de France. Une petite ou moyenne entreprise (PME) est une entreprise de moins de 250 salariés, moins de 50 millions d’euros de chiffre d’affaires et moins de 43 millions de total de bilan.
  • [2]
    Des externalités négatives liées au chômage induit, ou positives liées à l’innovation peuvent servir à justifier de telles subventions.
  • [3]
    La finance d’entreprise moderne pousse plus loin l’analyse en tenant compte du fait que la viabilité économique d’un projet ne dépend pas seulement de sa capacité à engendrer des profits mais aussi des incitations de l’entrepreneur à mener à bien ce projet, ce qui limite le montant de financement externe qui peut être apporté à l’entreprise. Voir, par exemple, Tirole J. (2010) : The Theory of Corporate Finance, Princeton University Press. Dans ce cas, l’imperfection du marché du crédit est structurelle : elle est due à un problème d’information auquel un intervenant public serait également confronté.
  • [4]
    Banque de France (2012) : « Les PME en Europe : les disparités sont plus fortes en 2010 qu’avant la crise », Bulletin de la Banque de France, n° 188, 2e trimestre.
  • [5]
    Banque de France (2014) : « Le recul de la rentabilité pèse sur l’investissement des PME », Bulletin de la Banque de France, n° 197, 3e trimestre.
  • [6]
    Estimée ici par les séries « titres hors actions à l’exclusion de produit dérivés » dans les comptes nationaux financiers.
  • [7]
    En 2013, la part de l’endettement dans le bilan agrégé des PME est estimée à 29 %, dont moins de 1 % sous forme d’obligations, cf. Banque de France, données FIBEN.
  • [8]
    À la fin du deuxième trimestre 2014, les encours de crédits auprès des très petites entreprises (TPE, définies comme des entreprises réalisant un chiffre d’affaires de moins de 2 millions d’euros) s’élevaient à 230 milliards d’euros, cf. Banque de France (2014) : « Financement des micro-entreprises », Stat Info, juin.
  • [9]
    Le scoreboard de l’OCDE sur le financement des PME en septembre 2014 met l’accent sur ce problème de comparabilité des données. Par exemple, plus les entreprises deviennent petites et plus il est difficile de faire la distinction entre un prêt individuel et un prêt à une entreprise. Par ailleurs, les pratiques diffèrent selon les pays : 70 % du financement des entreprises individuelles au Royaume-Uni se font au moyen d’une carte de crédit ; dans d’autres pays, le prêt est accordé après hypothèque d’un bien personnel, auquel cas le prêt peut se trouver répertorié avec les prêts immobiliers.
  • [10]
    Cf. Banque de France : Enquête mensuelle auprès des banques sur la distribution du crédit en France, disponible sur www.banque-france.fr/economie-et-statistiques/stats-info/detail/enquete-mensuelle-aupres-des-banques-sur-la-distribution-du-credit-en-france.html ; Enquête trimestrielle de la Banque de France auprès des entreprises (3 500 PME et 400 ETI, dans les secteurs de l’industrie, des services et du bâtiment), disponible sur www.banque-france.fr/economie-et-statistiques/stats-info/detail/acces-des-entreprises-au-credit.html
  • [11]
    Cf. Survey on Access to Finance of Enterprises (SAFE), disponible sur www.ecb.europa.eu/stats/money/surveys/sme/html/index.en.html
  • [12]
    Selon la Fédération nationale des travaux publics (FNTP), 90 % des entreprises du secteur ont moins de 50 salariés, pour un total de 11 milliards de chiffre d’affaires, cf. Fédération nationale des travaux publics (FNTP) (2013) : « Recueil de statistiques », TP Informations, n° 71, novembre, www.fntp.fr/upload/docs/application/pdf/2013-12/recueil_statistiques_2012.pdf
  • [13]
    Voir INSEE (2014) : Enquête mensuelle de conjoncture dans l’industrie du bâtiment, octobre. Les délais de paiement sont plus courts en France qu’en Espagne et surtout en Italie, mais nettement plus longs qu’en Allemagne, voir ALTARES (2014) : Comportements de paiement des entreprises en France et en Europe, 1er semestre, p. 7.
  • [14]
    Voir Fonds monétaire international (FMI) (2014) : Global Financial Stability Report, chap. 1, octobre.
  • [15]
    Cf. Observatoire du financement des entreprises par le marché (2013) : Rapport annuel.
  • [16]
    Notons toutefois que la forte croissance du placement privé s’explique en partie par le niveau historiquement bas des taux d’intérêt de long terme. Son évolution future est donc incertaine car très sensible aux évolutions de la politique monétaire américaine.
  • [17]
    La rétention par la banque d’une tranche « equity » joue le même rôle qu’une franchise dans un contrat d’assurance. La franchise incite l’assuré à maîtriser son risque. Mais cette incitation a un coût : celui d’un transfert de risque imparfait vers l’assureur.
  • [18]
    En revanche, les petits entrepreneurs américains utilisent fréquemment des crédits à la consommation ou des crédits hypothécaires pour financer leur activité. La titrisation de ces types d’encours est de ce fait très développée aux États-Unis et joue un rôle important dans le financement des TPE.
  • [19]
    La situation est différente en Espagne et surtout en Italie, où les banques ne paraissent pas en mesure de prendre davantage de risques à leur bilan.
  • [20]
    Landier A. et D. Thesmar (2009) : « Financial Contracting with Optimistic Entrepreneurs », Review of Financial Studies, vol. 22, n° 1, pp. 117-150.
  • [21]
    Bourquin M. (2013) : Les relations entre donneurs d’ordres et sous- traitants dans le domaine de l’industrie, Rapport au Premier ministre du Sénateur Martial Bourquin, mai.
  • [22]
    Voir, par exemple, Souquet C. (2014) : « Forte hétérogénéité des délais de paiement entre entreprises » in Les entreprises en France, INSEE Références.
  • [23]
    Observatoire des délais de paiement (ODP) (2014) : Une double nécessité : stabiliser la loi, aménager les procédures de vérification pour les acteurs publics locaux, Rapport de l’ODP 2013, janvier.
  • [24]
    Stiglitz J.E. et A. Weiss (1981) : « Credit Rationing in Markets with Imperfect Information », American Economic Review, vol. 71, n° 3, pp. 393-410, juin.
  • [25]
    Grossman S.J. et J.E. Stiglitz (1976) : « Information and Competitive Price Systems », American Economic Review, vol. 66, n° 2, pp. 246-253 et Grossman S.J. et J.E. Stiglitz (1980) : « On the Impossibility of Informationally Efficient Markets », American Economic Review, vol. 70, n° 3, pp. 393-408, juin.
  • [26]
    Des études académiques confirment un problème généralisé de manque de culture financière. Voir, par exemple, Lusardi A. et O.S. Mitchell (2013) : « The Economic Importance of Financial Literacy : Theory and Evidence », NBER Working Papers, n° 18952.
  • [27]
    FICO (Fair Isaac Corporation), créateurs du principal score de crédit aux Etats-Unis. Cf. www.myfico.com/CreditEducation/WhatsInYourScore.aspx
bb.footer.alt.logo.cairn

Cairn.info, plateforme de référence pour les publications scientifiques francophones, vise à favoriser la découverte d’une recherche de qualité tout en cultivant l’indépendance et la diversité des acteurs de l’écosystème du savoir.

Avec le soutien de

Retrouvez Cairn.info sur

18.97.14.86

Accès institutions

Rechercher

Toutes les institutions