Couverture de NCAE_016

Article de revue

Redresser la croissance potentielle de la France

Pages 1 à 12

Notes

  • [a]
    Directeur de la recherche et des études à NATIXIS, correspondant du CAE.
  • [b]
    Université Aix-Marseille (AMSE), membre du CAE.
  • [c]
    Université de Maastricht et UNU-MERIT (Pays-Bas), membre du CAE.
  • [1]
    Chiffre retenu dans le programme de stabilité de la France à l’horizon 2017.
  • [2]
    Voir, par exemple, Direction générale du Trésor (2013) : Projection des dépenses de santé à l’horizon 2060, le modèle PROMEDE, Document de Travail, décembre.
  • [3]
    Voir aussi Aghion P., G. Cette et É. Cohen (2014) : Changer de modèle, Odile Jacob.
  • [4]
    Voir, par exemple, Acemoglu D., P. Aghion et F. Zilibotti (2006) : « Distance to Frontier, Selection, and Economic Growth », Journal of the European Economic Association, vol. 4, n° 1 et Aghion P., G. Cette, É. Cohen et J. Pisani-Ferry (2007) : Les leviers de la croissance française, Rapport du CAE, n° 72, La Documentation française.
  • [5]
    Voir Fontagné L., P. Mohnen et G. Wolff (2014) : « Pas d’industrie, pas d’avenir ? », Note du CAE, n° 13.
  • [6]
    Le taux de croissance annuel du stock de capital productif est passé de 2,33 % au cours de la période 1980-1989 à 3,87 et 3,23 % respectivement sur 1990-1999 et 2000-2013.
  • [7]
    INSEE, Enquête sur les investissements dans l’industrie : http://www.insee.fr/fr/themes/indicateur.asp?id=15.
  • [8]
    Voir Conseil d’analyse économique (2014) : « Quelles réformes pour la France ? », Note du CAE, n° 15. Voir aussi Aghion, Cette, Cohen et Pisani-Ferry (2007) op.cit.
  • [9]
    OCDE (2014) : Examens de l’OCDE des politiques d’innovation : France.
  • [10]
    Voir Ministère de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche (MESR) (2012) : « Un déficit d’effort de recherche des entreprises françaises ? Comparaison France-Allemagne », Note d’Information du MESR, n° 12.09, disponible sur http://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/reperes/telechar/ni/ni1209.pdf. Voir aussi Science, Technologie et Industrie (2013) : Tableau de bord de l’OCDE. En 2009, les industries de moyenne-haute technologie représentaient 3 % seulement de la valeur ajoutée en France, contre 10 % en Allemagne.
  • [11]
    OCDE (23014) op.cit., p. 68.
  • [12]
    Les brevets triadiques sont ceux qui sont déposés à la fois dans les offices de brevets américains, japonais et européens et qui de ce fait reflètent en principe des brevets de meilleure qualité.
  • [13]
    de Rassenfosse G., H. Dernis, D. Guellec, L. Picci et B. van Pottelsberghe de la Potterie (2013) : « The Worldwide Count of Priority Patents :A New Indicator of Inventive Activity », Research Policy, vol. 42, n° 3, pp. 720-737.
  • [14]
    Les enquêtes communautaires d’innovation sont menées dans tous les États membres de l’Union européenne suivant les lignes directrices contenues dans le Manuel d’Oslo, cf. OCDE (2005) : Manuel d’Oslo : Principes directeurs pour le recueil et l’interprétation des données sur l’innovation, 3e édition, Eurostat. Les données ne sont pas aisément comparables entre pays à cause par exemple de formulations différentes de certaines questions, de différences d’échantillonnage ou du caractère obligatoire ou facultatif de réponse à l’enquête. La sous-performance de la France apparaît néanmoins assez nette.
  • [15]
    L’enquête PISA (Program for International Student Assessment) de l’OCDE évalue les compétences des jeunes de 15 ans dans les domaines de la lecture, des mathématiques et des sciences.
  • [16]
    L’enquête PIAAC (Program for the International Assessment of Adult Competencies) de l’OCDE mesure les compétences des adultes âgés de 16 à 65 ans et l’utilisation de ces compétences dans le cadre professionnel : capacité à comprendre et réagir aux textes écrits, à comprendre et utiliser des outils numériques et mathématiques, à résoudre des problèmes dans des environnements à forte composante technologique. Le déficit de formation de la main d’œuvre est également au centre du diagnostic porté par le rapport de France Stratégie (2014) : Quelle France dans 10 ans ?, Fayard, juin.
  • [17]
    Par exemple, les tutilaires d’une licence professionnelle de 2007 avaient, en 2010, un taux d’emploi de 88 %, contre 75 % pour les titulaires d’une licence générale (cf. CEREQ).
  • [18]
    OCDE (2013) : Regards sur l’éducation.
  • [19]
    Entre 2000 et 2011 les dépenses publiques actives du marché du travail ont oscillé entre 0,9 et 1,2 % du PIB. Selon l’enquête de l’INSEE de 2012 sur la formation des adultes, un tiers des personnes interrogées se sont senties empêchées, à un moment donné, de suivre une formation. Les raisons les plus fréquemment invoquées sont les responsabilités familiales (34 %), le coût (31 %), le manque de formation adaptée (24 %) et l’éloignement du lieu de formation (16 %). Par ailleurs, 30 % des répondants estiment ne pas avoir été encouragés par leur employeur et 22 % déclarent avoir essuyé un refus. Sur les déficiences de la formation professionnelle en France, voir Cahuc P., M. Ferracci et A. Zylberberg (2011) : Formation professionnelle : pour en finir avec les réformes inabouties, Institut Montaigne.
  • [20]
    D’après la base Reflet (Regards sur les flux de l’enseignement technique et professionnel) du Centre d’études et de recherches sur les qualifications (CÉREQ).
  • [21]
    Voir Hobijn B. et A. ?ahin (2012) : Beveridge Curve Shifts across Countries since the Great Recession, Mimeo, Federal Reserve Bank of New York.
  • [22]
    OCDE (2011) : Perspectives de l’emploi. Les travailleurs sont considérés comme surqualifiés lorsque leur niveau de qualification est supérieur à celui requis par leur emploi, et sous-qualifiés dans le cas inverse. Ces données doivent être considérées avec prudence compte tenu des spécificités nationales (par exemple, le cumul emploi-étude, fréquent dans certains pays mais pas en France), ou bien l’apprentissage qui tire vers le haut la proportion de « sous-qualifiés »en Allemagne.
  • [23]
    Voir la polémique lancée sur le cas américain par Gordon R. (2014) : « The Demise of US Economic Growth : Restatement, Rebuttal, and Reflections », NBER Working Paper, n° 19895.
  • [24]
    Sur les rigidités de la carte des formations, voir le rapport de l’Inspection de l’Éducation nationale (2013) : Évolution des cartes de formations professionnelles et technologiques à la rentrée 2013. Synthèse des notes des correspondants académiques, août.
  • [25]
    Sur la période 2003-2009, parmi les personnes ayant terminé leurs études depuis moins de onze ans, le taux de chômage des titulaires de BTS et DUT (ou équivalent) dans le secteur du génie civil, de la construction, du bois et de la mécanique est de 4 % tandis que le taux de chômage des titulaires de master (1 ou 2) en sociologie, psychologie, communication et documentation est de 14 %. Voir Martinelli D. et C. Prost (2010) : « Le domaine d’études est déterminant pour les débuts de carrière », INSEE Première, n° 1313.
  • [26]
    À ce jour, l’apprentissage n’est pas ouvert aux plus de 25 ans (sauf dérogations pour de rares cas particuliers). Ces derniers ont accès aux contrats de professionnalisation mais uniquement lorsqu’ils sont au chômage.
  • [27]
    Cahuc P., S. Carcillo et K.F. Zimmermann (2013) : « L’emploi des jeunes peu qualifiés en France », Note du CAE, n° 4.
  • [28]
    Chéron A. (2014) : « Le cumul emploi-retraite : un dispositif efficace ? », TDTE Caisse des Dépôts, n° 39.
  • [29]
    Voir Bozio A. et T. Piketty (2008) : Pour un nouveau système de retraite, CEPREMAP, n° 14, Édition Rue d’Ulm.
  • [30]
    Ministère de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche (2013) : Le crédit d’impôt recherche en 2011.
  • [31]
    Cf. Ientile D. et J. Mairesse (2009) : « A Policy to Boost the R&D : Does the Tax Credit Work ? », European Investment Bank Paper, vol. 14, n° 1 et Mulkay B. et J. Mairesse (2013) : « The R&D Tax Credit in France : Assessment and ex ante Evaluation of the 2008 Reform », NBER Working Paper, n° 19073. Cette faible « efficacité » du CIR tient surtout au fait que le crédit d’impôt est proportionnel au volume de recherche et non, comme avant la réforme de 2008, à son incrément. Le crédit d’impôt incrémental a ses propres limites : évolution des dépenses de R&D en dents de scie, limites à l’accélération des dépenses de R&D, coûts de gestion plus importants et faible impact du crédit d’impôt incrémental sur le coût d’usage de la recherche. Voir Mohnen P. et B. Lokshin (2010) : « What Does it Take for an R&D Tax Incentive Policy to be Effective ? » in Reforming Rules and Regulations : Laws, Institutions and Implementation, Vivek Ghosal (ed.), MIT Press, pp. 33-58.
  • [32]
    Voir le rapport de l’AFIC (2013) : Activités des acteurs français du capital-investissement.
  • [33]
    Selon la European Private Equity and Venture Capital Association (EVCA), le montant des dépenses d’amorçage en 2013 est de 0,006 ‰ du PIB en France contre 0,016 et 0,018 ‰ en Allemagne et en Suède.
  • [34]
    Krieger E., K. Medjad, F. Iselin, R. Grandsart et V. Gerasymenko (2012) : La performance du capital-risque : entre fantasme et réalité, Conférence Innovation, Financement et Entrepreneuriat, HEG Genève. Les auteurs rapportent un taux de rendement interne sur 10 ans sur le capital-risque de – 0,8 % en France (selon l’AFIC), de 34,5 % aux États-Unis (selon la National Venture Capital Association) et de 1,8 % dans les autres pays européens (selon l’Association européenne du capital-risque).
  • [35]
    Voir Comin D. et M. Mestieri (2013) : « Technology Diffusion : Measurement, Causes and Consequences », Institute for New Economic Thinking Research, Note n° 029, pour une synthèse de la littérature sur le sujet de l’adoption des nouvelles technologies.
  • [36]
    Bourlès et al. (2013) montrent qu’une baisse des réglementations de secteurs en amont a un effet significatif sur la PGF de secteurs en aval. Voir Bourlès R., G. Cette, J. Lopez, J. Mairesse et G. Nicoletti (2013) : « Do Product Market Regulations in Upstream Sectors Curb Productivity Growth ? Panel data Evidence for OECD Countries », Review of Economics and Statistics, vol. 95, n° 5, pp. 1750-1768. Voir aussi les expériences suédoise et allemande en matière d’ouverture à la concurrence du transport ferroviaire, cf. Centre d’analyse stratégique (2011) : L’ouverture à la concurrence du transport ferroviaire des voyageurs, La Documentation française. L’expérience du Royaume-Uni est très différente, mais à partir d’un modèle où l’État ne participe pas directement au système ferroviaire.

1De nombreux pays développés ont connu, avant même le déclenchement de la crise de 2008, un fléchissement de leur rythme de croissance économique. En Europe, la France partage, avec l’Italie, une inquiétude légitime sur ses perspectives de croissance à long terme. Cette inquiétude est renforcée par le caractère quasi général de l’affaiblissement des gains de productivité à travers les secteurs d’activité : si la baisse relative de la part de l’industrie manufacturière dans l’économie a contribué au ralentissement de la productivité agrégée, cet effet de structure est très loin d’expliquer les évolutions à l’œuvre, pas plus que la faible part, dans notre économie, des secteurs produisant les nouvelles technologies.

2Différents travaux du CAE ont souligné l’importance qu’il y avait à améliorer le fonctionnement du marché du travail, stimuler la concurrence sur le marché des biens et services, repenser la politique industrielle ou encore rendre la dépense publique plus efficace. Les auteurs de cette Note se focalisent sur le niveau de compétence de la main d’œuvre et les incitations des entreprises à investir et innover qui sont à même de contribuer au redressement du potentiel de la croissance.

3Les enquêtes existantes sur les compétences des jeunes comme des adultes, en relation ou non avec les postes occupés, sont inquiétantes en France. Une formation insuffisante a pour effet immédiat une productivité affaiblie des personnes en emploi et un nombre élevé de jeunes et de seniors sans emploi – une singularité persistante de la France par rapport à la plupart des pays développés. Le défaut de compétences de la main d’œuvre est aussi un obstacle, pour les entreprises, à des investissements lourds dans le domaine des technologies sophistiquées. Les auteurs recommandent alors d’augmenter la part de la formation en entreprise dans les filières professionnelles de l’enseignement secondaire, mais aussi d’ouvrir davantage ces filières aux personnes de plus de 25 ans. En matière d’enseignement supérieur, ils suggèrent de renforcer la capacité d’accueil des cursus technologiques au détriment de certaines filières générales et de mettre en place des incitations auprès des étudiants pour mieux les orienter vers les études les plus porteuses.

4Pour ce qui est de l’investissement productif, les auteurs notent que le principal frein est le manque de rentabilité plutôt que le défaut de financements. Ils recommandent d’adapter les réglementations de certains secteurs non manufacturiers de manière à en réduire le coût pour les entreprises en aval qui pourront ainsi redresser leurs taux de marge. En matière de recherche, ils relèvent la bonne position de la France en termes d’inventivité, mais une proportion limitée d’entreprises innovantes. Ils recommandent une meilleure sécurisation du Crédit impôt recherche pour les entreprises, notamment les PME et les ETI.

5Ces différentes recommandations doivent être considérées comme complémentaires pour améliorer l’écosystème de l’innovation en France. Elles suggèrent qu’il est possible aujourd’hui d’agir en faveur de la croissance – un enjeu essentiel pour l’emploi, le niveau de vie mais aussi la soutenabilité de notre système social.

6Entre le début de la crise de 2008 et la fin de l’année 2013, la richesse produite par habitant a légèrement diminué en France. Surtout, on a observé avant la crise un fléchissement progressif de la croissance française, alors que la croissance par habitant se maintenait autour de 1,7 % par an en Allemagne (graphique 1). Une question essentielle pour la France (comme pour l’Italie, qui a subi une évolution encore plus marquée) est de savoir si le mouvement de baisse du taux de croissance est inexorable, ou bien si les politiques publiques ont la capacité de redresser le taux de croissance de l’économie. Cette Note montre que la France dispose de marges de manœuvre pour améliorer son taux de croissance en agissant notamment sur la formation de sa main d’œuvre et sur ses politiques d’innovation.

1

Taux de croissance moyen du PIB par habitant, en volume, % par an

1

Taux de croissance moyen du PIB par habitant, en volume, % par an

Source : FMI, base de données WEO.

7Un faible taux de croissance observé sur une longue période a des conséquences majeures non seulement sur l’emploi et le niveau de vie, mais aussi pour les finances publiques. Considérons, à titre illustratif, un scénario pessimiste avec un taux de croissance de long terme du PIB agrégé de la France de 1 % par an. Cumulé sur 26 ans, il aboutirait en 2040 à un niveau du PIB en volume supérieur de près de 31 % à celui de 2014. En considérant un taux de croissance annuel de 1,6 % par an [1], le PIB en 2040 serait supérieur de 51 % à celui de 2014. La différence est considérable.

8Pour les régimes de retraite publics, cette perte cumulée de PIB relèverait entre 2 et 2,5 points de PIB le besoin de financement à l’horizon 2040, avec les paramètres de la réforme 2014. Il faudrait alors, pour rééquilibrer les régimes en supposant qu’ils l’étaient avec un scénario de croissance à 1,6 %, ponctionner le pouvoir d’achat des actifs, ou bien réduire très sévèrement le niveau des retraites.

9Pour le système public de santé, une croissance potentielle de 1 % ne permettrait pas de financer des dépenses qui, compte tenu du vieillissement démographique et des évolutions technologiques, devraient croître d’au moins 2 % par an en termes réels, si l’on en croit les projections de long terme sur les dépenses de santé [2]. Cette tension de financement pourrait alors conduire à de nouvelles amputations de pouvoir d’achat des cotisants ou à des déremboursements de soins de santé plus marqués.

10Plus généralement, la trajectoire des finances publiques est fortement conditionnée aux perspectives de croissance de long terme. Pour l’illustrer simplement, partons de la prévision du programme pluriannuel des finances publiques jusqu’en 2017, même si le contexte économique actuel fait que celles-ci sont entachées d’incertitudes. Retenons comme hypothèse que l’impact du vieillissement est contenu par une modération des autres dépenses publiques, si bien que les dépenses primaires seraient stabilisées en part de PIB à partir de 2018, avec une croissance économique de 1,6 %. Dans un tel scénario et à prélèvements constants, les finances publiques seraient totalement assainies, avec un ratio d’endettement réduit de moitié et sans déficit à l’horizon 2040. Si toutefois la croissance économique n’était que de 1 %, toutes choses égales par ailleurs, le déficit public serait de l’ordre de 9 % et la dette dépasserait 145 % en 2040. Encore ce scénario n’est-il pas le plus défavorable car il suppose un taux d’intérêt égal au taux de croissance, et non supérieur comme cela pourrait se produire en cas de défiance des marchés.

11Ces chiffres peuvent être jugés pessimistes sur longue période, mais ils ne sauraient être totalement écartés. Ils mettent en avant l’importance des politiques de croissance non seulement pour l’emploi et le niveau de vie, mais aussi pour la pérennité de notre système social. Améliorer le fonctionnement du marché du travail afin de mobiliser plus efficacement la force de travail dans une économie changeante, grâce notamment à un meilleur appariement entre offre et demande et à une moindre dualité du marché, semble essentiel. Stimuler la concurrence sur le marché des biens et services, repenser la politique industrielle et la fiscalité sur les revenus du capital ou rendre la dépense publique plus efficace sont également des pistes importantes pour redresser le potentiel de croissance français. Celles-ci ont été présentées dans différents travaux du CAE [3]. La présente Note se focalise principalement sur le niveau de compétence de la main d’œuvre et les incitations des entreprises à investir et innover.

Croissance et productivité

12Les déterminants du PIB à long terme résident du côté de l’offre, donc des facteurs de production et de leur productivité.

13Le concept le plus simple de productivité est la productivité du travail, c’est-à-dire la production par personne employée (productivité par tête) ou bien par heure travaillée (productivité horaire). La France présente un déclin tendanciel depuis les années 1970 de la productivité du travail, que ce soit la productivité par tête ou la productivité horaire du travail (tableau 1).

1

Taux de croissance moyen de la productivité par tête et de la productivité horaire, en % par an

1
1971- 1979 pr od. par tête 1,22 2,91 3,28 3,20 1,06 4,06 pr od. horaire 1,68 4,11 4,30 4,34 1,68 4,70 1980- 1989 pr od. par tête 1,37 1,04 1,92 1,98 1,53 2,33 pr od. horaire 1,39 2,07 2,85 1,88 1,20 3,40 1990- 1999 pr od. par tête 2,02 1,67 1,28 1,33 2,56 1,04 pr od. horaire 1,73 2,23 1,84 1,34 2,02 1,08 2000- 2013 pr od. par tête 1,38 0,66 0,67 – 0,27 1,46 0,89 pr od. horaire 1,83 1,18 1,06 0,21 1,71 1,17

Taux de croissance moyen de la productivité par tête et de la productivité horaire, en % par an

Source : OCDE.

14L’affaiblissement des gains de productivité depuis les années 1970 est important aussi en Allemagne, en Espagne et en Italie, tandis qu’aux États-Unis et en Suède, les gains de productivité sont constants voire croissants dans le temps. Avec une tendance des gains de productivité par tête de 0,7 % par an depuis le début des années 2000 (1,05 % avant la crise de 2008, 0,31 % sur 2008-2013), la France ne peut évidemment pas afficher une croissance potentielle vigoureuse.

15La productivité par tête dépend à la fois du stock de capital par travailleur et de la productivité globale des facteurs (PGF) qui représente l’efficacité de la combinaison du travail et du capital (encadré). La PGF est souvent assimilée au progrès technique mais elle englobe d’autres facteurs tels que les infrastructures et les institutions. Or, la PGF stagne en France depuis le début des années 2000, alors qu’elle a continué d’augmenter en Allemagne et surtout aux États-Unis et en Suède (graphique 2).

2

Productivité globale des facteurs base 100 en 1995

2

Productivité globale des facteurs base 100 en 1995

Lecture : Productivité globale des facteurs (PGF) calculée à partir d’une fonction de production Cobb-Douglas avec un coefficient de 0,36 sur le capital (0,64 sur le travail), cf. Lequiller F. et Sylvain A. (2006) : Partage de la valeur ajoutée : éléments descriptifs et comparaison internationale, 11e Colloque de l’Association de comptabilité nationale, Paris, 18-20 janv.
Source : Calcul des auteurs.

Un ralentissement quasi général

16Le ralentissement de la productivité du travail comme de la PGF sont-ils le fait de certains secteurs spécifiques ou bien affectent-ils toute l’économie ? Pour le savoir, nous examinons quatre grands secteurs : l’industrie manufacturière, la construction, les services aux entreprises et les services financiers, les autres services (commerce, transport, hébergement, restauration, loisirs, services aux particuliers). Le graphique 3 montre que la productivité ralentit dans les quatre secteurs en France, alors qu’en Allemagne et aux États-Unis, la productivité horaire du travail a accéléré dans l’industrie au cours des années 2000. La productivité dans les services aux entreprises a accéléré de 1 point de pourcentage aux États-Unis. Celle dans la construction et dans les services domestiques a crû plus vite en Allemagne. En France, le secteur des services aux entreprises et des services financiers est le seul dont le taux de croissance de la productivité s’est amélioré, après une croissance négative dans les années 1990.

3

Taux de croissance moyen de la productivité horaire 1990-1999 et 2000-2013, en % par an

3

Taux de croissance moyen de la productivité horaire 1990-1999 et 2000-2013, en % par an

Lecture : histogrammes : 1990-1999 ; points : 2000-2013.
Note : a Commerce, transport, hébergement, activités de restauration, loisirs, services aux particuliers.
Source : Eurostat.

17Il s’agit donc bien en France d’un freinage global et assez homogène de la productivité. Ceci n’est pas imputable à l’évolution de la durée du travail dans la mesure où ce phénomène s’observe aussi bien pour la productivité par tête que pour la productivité horaire. Bien que la durée annuelle du travail soit faible et ait beaucoup baissé en France depuis les années 1970, la dépression induite de la productivité par tête est dominée par le freinage de la productivité horaire du travail.

18L’écart des gains de productivité entre la France et les États-Unis n’est pas dû au poids dans l’économie du secteur des technologies de l’information – secteur à forts gains de productivité –, qui avoisinait les 7 % dans les deux pays en 2007. Celui-ci a depuis lors augmenté d’un point de pourcentage aux États-Unis alors qu’il est resté constant en France, mais la différence reste faible. L’écart de productivité pourrait davantage provenir de l’utilisation des nouvelles technologies par les autres secteurs.

Productivité, production, croissance

On représente usuellement la production potentielle d’une économie par une fonction Cobb-Douglas qui relie le PIB en volume Y à la quantité de capital disponible dans l’économie K, à la quantité de travail L et à la productivité globale des facteurs A :
equation im5
? est un paramètre positif évalué à environ 0,3. Le niveau du PIB potentiel correspond à la richesse qu’une économie peut atteindre indépendamment des fluctuations cycliques.
La productivité du travail se calcule alors en rapportant le PIB à la quantité de travail :
equation im6
On voit que la productivité du travail dépend positivement de la PGF A et de la quantité de capital K.
Quant au taux de croissance du PIB, il se déduit de la première équation comme la somme des contributions de la PGF (dA/A), du capital (? dK/K) et du travail ((1–?) dL/L).
Il faut se garder de confondre le niveau du PIB et son taux de croissance. C’est le niveau du PIB et non son taux de croissance qui permet de déterminer le niveau des recettes fiscales et donc, à terme, des dépenses publiques. La perte de PIB potentiel entraîne ainsi une aggravation du déficit public structurel.
En France, la crise a entraîné une chute de l’activité en 2008 et surtout 2009, puis un redressement qui a marqué le pas à partir de 2012. À la fin de 2013, le PIB dépassait à peine, en volume, le niveau d’avant crise. Une question clé est de savoir si cette crise affectera durablement le taux de croissance de l’économie ou bien seulement son niveau. Trois cas sont envisageables (voir schéma) [a] :
  1. rattrapage intégral : après la crise, le taux de croissance du PIB est temporairement plus fort, ce qui permet au niveau du PIB de rejoindre sa trajectoire d’avant crise. La crise n’a pas d’effet durable sur le niveau du PIB ni sur son taux de croissance ;
  2. perte en niveau : la crise fait chuter le niveau du PIB mais non la croissance potentielle. Le niveau du PIB potentiel diminue donc durablement ;
  3. perte en niveau et en croissance : la crise fait chuter le niveau du PIB potentiel ainsi que son taux de croissance.
figure im7
Au vu des études publiées ces dernières années [b], il semblerait que le cas 1 soit peu probable en raison d’un effet d’hystérèse (dû en particulier à la modification des qualifications requises par les entreprises et à la déqualification progressive des travailleurs sans emploi – voir Couch et Placzek, 2010 [c]). Ball (2014) montre que cet effet d’hystérèse a été fort pendant la crise et qu’un scénario de type 3 (perte en niveau et en croissance) est à l’œuvre dans la plupart des pays de l’OCDE. Pour la France, ses résultats indiquent que la perte de PIB en niveau serait de l’ordre de 7,5 % en 2013 et de 8,6 % en 2015, par rapport à ce qu’on aurait pu espérer en absence de la crise.

Expliquer le ralentissement de la productivité en France

19Quatre facteurs sont susceptibles d’expliquer le ralentissement de la productivité en France : le recul de l’industrie manufacturière – secteur à forts gains de productivité – dans l’économie ; un investissement en capital productif insuffisant (en quantité ou en qualité) ; une recherche et développement trop faible et la diffusion trop lente des nouveaux produits et procédés de production [4] ; enfin, des taux d’emploi et des compétences insuffisants.

Un effet de structure ?

20Entre 2000 et 2007, la part de l’industrie dans la valeur ajoutée totale française a diminué de 6 %, à prix constants [5]. L’industrie étant un secteur à forts gains de productivité (graphique 3), on s’attend à ce que le recul de l’industrie pèse sur l’évolution de la productivité agrégée de l’économie. Cependant les ordres de grandeur sont faibles compte tenu du recul limité de l’industrie sur cette période (une fois l’effet prix retiré). Surtout, nous avons vu plus haut que la productivité a freiné dans presque tous les secteurs.

Un problème d’investissement ?

21Le graphique 4 montre l’évolution de l’investissement brut total des entreprises (y compris construction de bureaux et bâtiments industriels) et de l’investissement productif (en machines, équipements et logiciels). L’investissement total des entreprises est assez élevé et stable en France, tandis que l’investissement productif se situe dans la moyenne des pays de l’OCDE.

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Investissement des entreprises en % du PIB

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Investissement des entreprises en % du PIB

Sources : OCDE et BEA.

22En France, selon l’OCDE, le capital total net des entreprises est passé de 91 % du PIB en 1980 à 158 % en 2013, soit davantage qu’en Suède (80 % en 2013) et qu’aux États-Unis (92 %), mais moins qu’en Allemagne (181 %). En dépit de son accélération au cours des années 1990 et 2000 [6], l’accumulation de capital productif en France est restée inférieure de 1 à 2 points de pourcentage à ce qu’on a observé en Suède et aux États-Unis depuis les années 1980.

23Au-delà de la quantité d’investissement et du poids important de la construction relativement aux équipements, les entreprises françaises ont, depuis 2000, boudé les investissements de modernisation et de rationalisation dans l’industrie, propres à favoriser les gains de productivité, au profit des investissements de renouvellement des capacités existantes [7]. Ainsi, l’investissement en biens d’équipement sophistiqués est faible en France. En témoigne la faible robotisation dans l’industrie par rapport à l’Allemagne et à la Suède, mais aussi l’Italie (graphique 5).

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Stocks de robots industriels en % de l’emploi manufacturier

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Stocks de robots industriels en % de l’emploi manufacturier

Sources : International Federation of Robotics (IFR) et UNECE. Les chiffres ne sont pas disponibles pour la Suède en 2013.

24La faiblesse de l’investissement en technologies avancées est en partie liée à la part réduite de l’industrie dans l’économie. Mais dans l’industrie elle-même, l’investissement a pu être ralenti par le recul des marges bénéficiaires depuis le début des années 2000, installant un véritable cercle vicieux entre baisse des marges de l’industrie, capacité à investir dans des technologies sophistiquées, investissement insuffisant conduisant à une baisse des marges, etc.

25Parmi les explications possibles des marges faibles dans l’industrie figure en bonne place le degré encore timide de la concurrence dans des services aux entreprises et activités de réseau (énergie, transports), en comparaison avec d’autres pays de l’OCDE [8]. Cette concurrence limitée gonfle les coûts des entreprises industrielles qui, elles, ne peuvent les répercuter sur leurs clients compte tenu de la concurrence internationale à laquelle elles font face.

26Les obstacles à la concurrence freinent par ailleurs l’adoption des innovations. En effet, si certaines réglementations (sécurité, environnement) peuvent être favorables à l’innovation en imposant aux entreprises des objectifs nouveaux qui ne peuvent être atteints que par l’innovation, les barrières à l’entrée et les limites à la concurrence imposées dans un certain nombre de cas réduisent la capacité et l’incitation des acteurs à innover [9].

Un problème de R&D ?

27Le progrès technique, qui explique une part importante de la croissance de la PGF, résulte en partie des efforts propres de recherche-développement, qui favorisent en même temps l’assimilation des avancées technologiques externes à l’entreprise. L’argument est souvent avancé que la France fait trop peu de recherche ou qu’elle n’arrive pas à transformer le produit de ses recherches en nouveaux produits, procédés de fabrication et ultimement en croissance de la productivité. Qu’en est-il ?

28La France a une intensité de R&D, mesurée par la part des dépenses intérieures de recherche et développement (DIRD) en pourcentage du PIB, nettement plus faible que l’Allemagne et la Suède mais plus élevée que l’Italie et l’Espagne (graphique 6). Notons que la France se trouve en 2012, avec 2,26 % du PIB, au-dessus de la moyenne européenne de 1,98 % mais au-dessous de la moyenne des pays de l’OCDE de 2,40 %.

6

Dépenses de R&D en % du PIB, 2012

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Dépenses de R&D en % du PIB, 2012

Source : OCDE.

29On le sait, la France souffre d’un déficit de dépenses privées en R&D. Néanmoins, l’écart avec l’Allemagne dans ce domaine résulte essentiellement d’un effet de structure, dû à une part plus faible de l’industrie en France et, au sein de l’industrie, à une part plus faible des secteurs de moyenne et haute technologie, telles que la fabrication de machines et d’équipements, l’industrie automobile, la fabrication d’équipements électriques et l’industrie chimique. Si la France avait la structure industrielle de l’Allemagne mais conservait ses intensités sectorielles de recherche propres par sous-secteur, elle parviendrait à doubler son intensité globale de recherche [10].

30Selon le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, l’écart entre la France et l’Allemagne en matière de recherche privée vient principalement des entreprises de plus de 1 000 salariés, et plus particulièrement des entreprises de plus de 5 000 salariés, qui ont investi seulement 10 milliards d’euros en recherche en 2009 en France, contre 25 milliards en Allemagne. Cependant cet effet taille est en partie attribuable à la structure industrielle. Comme l’indique l’OCDE (2014), « Les grandes entreprises françaises, plus que les allemandes, sont dans des secteurs comme la construction, les matériaux, l’énergie, la distribution ou le luxe, dont l’intensité technologique est moindre que celle des secteurs où les grandes entreprises allemandes sont les plus présentes, comme l’automobile, l’électronique ou la chimie » [11].

31La faiblesse de la position française en matière de recherche privée transparaît aussi dans les statistiques de brevets. Le nombre de brevets triadiques par million d’habitants est nettement moins élevé en France qu’en Allemagne ou en Suède (graphique 7) [12]. Une mesure plus fine de l’inventivité d’un pays est le comptage des dépôts de brevets de priorité, c’est-à-dire de tous les brevets déposés pour la première fois (donc jouissant du droit de priorité) n’importe où dans le monde. Sur ce terrain, en 2008, la France se plaçait en 5e position derrière la Corée du Sud, le Japon, l’Allemagne et le Royaume-Uni, mais devant les États-Unis et la Suède [13].

7

Brevets triadiques et premiers dépôts de brevets par million d’habitants, 2011

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Brevets triadiques et premiers dépôts de brevets par million d’habitants, 2011

Sources : OCDE et PATSTAT.

32Alors que le brevet mesure l’inventivité des entreprises, la proportion d’entre elles qui amènent un nouveau produit ou procédé de fabrication sur le marché cerne mieux la notion d’innovation. D’après les enquêtes communautaires d’innovation, la proportion d’entreprises innovantes n’était que de 34 % en France en 2010, contre 64 % en Allemagne, 40 % en Italie, 29 % en Espagne et 49 % en Suède [14]. Ceci s’explique peut-être par l’importance plus grande des secteurs de services en France, où peu de firmes recourent au brevet et où l’innovation en produit ou procédé est aussi moins fréquente.

33Parmi les entreprises innovantes, la part du chiffre d’affaires en produits innovants (nouveaux pour la firme ou pour le marché) est plus semblable entre les pays.

La force de travail : emploi et formation

34La force de travail effective d’un pays dépend du nombre de personnes qui sont prêtes à travailler (taux de participation) et du niveau de formation moyen de la population.

35La France présente des particularités dans ces deux composantes qui ont une influence importante sur la croissance soit de façon directe, soit à travers leur impact sur l’accumulation de capital et la PGF.

Participation au marché du travail

36L’offre de travail globale est le produit des heures de travail par personne et le nombre d’individus qui travaillent ou souhaitent travailler (les « actifs »). Concernant les heures, la France est dans une situation comparable aux autres pays européens. La durée effective de travail hebdomadaire y est plutôt longue alors que le nombre de semaines de travail est faible, ce qui donne une moyenne annuelle proche de celle de bien d’autres pays.

37La véritable singularité française (et italienne) est le faible taux d’activité avant 25 ans ou après 54 ans (graphique 8).

8

Taux d’activité par âge en % de la classe d’âge, 2013

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Taux d’activité par âge en % de la classe d’âge, 2013

Source : OCDE.

Éducation et travail dans un monde globalisé

38Le nombre moyen d’années d’éducation est assez satisfaisant en France, en comparaison avec le reste de l’Europe, mais il est inférieur à celui de l’Allemagne et est en léger recul depuis 2005. Dans le groupe de pays que nous considérons, les résultats de l’enquête PISA [15] placent la France seulement derrière l’Allemagne (cf. tableau 2), mais en net recul depuis 2003. De son côté, l’enquête PIAAC de l’OCDE, portant sur les compétences (compréhension écrite, mathématiques, nouvelles technologies) de la population active, donne un score médiocre, légèrement inférieur à l’Espagne et loin derrière les États-Unis et surtout de la Suède [16].

2

Scolarisation et compétences selon les enquêtes PISA et PIAAC

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Scolari PIAACb PISAc sation Score Score % de la classe d’âge moyennea global moyen – + France 6,7 258 495 22,4 12,9 États-Unis 7 267 481 25,8 8,8 Allemagne 7,7 275 514 17,7 17,5 Espagne 6,4 260 484 23,6 8 Italie 6,8 249 485 24,7 9,9 Suède 7,9 282 478 27,1 8

Scolarisation et compétences selon les enquêtes PISA et PIAAC

Notes : a En 2011, en France, les individus étaient scolarisés pendant 6,7 années entre l’âge de 15 et 29 ans ; b 2013 ; c Score en mathématiques, 2012 ; – : en difficulté (< niveau 2) ; + « très compétents » (> niveau 5).
Source : OCDE.

39Les différences de score entre les enquêtes PIAAC et PISA peuvent s’interpréter comme un problème lié à l’éducation. Le bon score PISA en France ne provient pas d’une faible proportion d’adolescents avec des résultats insuffisants : avec 22,4 % d’élèves « en difficulté », notre pays est très proche de l’Espagne et de l’Italie. Ce sont plutôt les bons résultats tout en haut de la distribution qui tirent la moyenne vers le haut. Le contraste avec la Suède est particulièrement intéressant. Ce pays a des résultats en dessous de ceux de la France pour les adolescents (PISA) mais bien au-dessus pour les compétences adultes (PIAAC) qui sont probablement le résultat d’une formation professionnelle de bonne qualité.

40Comment se traduisent ces caractéristiques du système éducatif en performance sur le marché du travail ? L’OCDE pointe certaines particularités françaises dans la relation emploi-éducation. Premièrement, le risque de chômage n’est pas plus faible en France pour les jeunes avec un diplôme de l’enseignement secondaire en filière professionnelle (du type CAP, BEP ou Baccalauréat professionnel) que pour les diplômés des filières secondaires générales (qui n’ont acquis aucune compétence professionnelle directement utilisable). Cette situation est singulière par rapport aussi bien aux autres pays avancés qu’aux diplômes français du supérieur [17]. Une explication possible est l’image négative véhiculée par les filières secondaires professionnelles qui sont en grande partie perçues comme la voie pour les élèves en échec scolaire, et non pas comme des opportunités pour les jeunes dont les centres d’intérêts et aptitudes sont autres qu’académiques. Par ailleurs, les filières professionnelles ne combinent pas suffisamment études et travail : seuls 12 % des élèves français en filières professionnelles suivent une formation en alternance, alors que c’est presque la totalité en Allemagne [18].

41Deuxièmement, reprendre les études après 25 ans semble particulièrement difficile en France. Selon l’OCDE, seuls 1 % des jeunes adultes (25-29 ans) sans diplôme sont en formation, la moyenne pour l’OCDE étant de 7 %, avec une proportion de plus de 10 % en Allemagne et dans certains autres pays du Nord de l’Europe. Ceci aide à comprendre l’écart entre les résultats de PISA et de PIAAC, ainsi que le fait que le score PIAAC décroît plus vite avec l’âge en France qu’ailleurs. On sait aussi que les faibles compétences de la population active en France ne sont pas liées aux budgets de formation et requalification, qui sont élevés, mais plutôt à la difficulté à trouver une formation adaptée ou de trouver un accord avec l’employeur [19].

42Troisièmement, les diplômés du supérieur reçoivent en France, en moyenne, des salaires supérieurs aux diplômés du secondaire, mais l’écart est de seulement 47 %, soit 10 points de moins que la moyenne pour l’OCDE. L’éducation supérieure procure donc à ses titulaires un rendement financier plus faible qu’ailleurs, ce qui peut limiter l’incitation à entreprendre des études supérieures.

43De fait, le système français a évolué de façon inattendue. Les formations techniques (telles que celles dispensées par les IUT) ont la possibilité de sélectionner des étudiants, tandis que les universités ne l’ont pas. Cette absence de sélection brouille l’effet de signal de l’enseignement supérieur et peut en partie expliquer le faible rendement d’un diplôme du supérieur en France. Malgré le succès des formations techniques, entre 2000 et 2012 la proportion d’élèves en formation aux métiers industriels a diminué en pourcentage de chaque classe d’âge : elle est passée de 3,5 à 2,7 % de la classe d’âge 15-26 ans [20].

Éducation et changement technologique

44Un rôle fondamental du système éducatif est de veiller à ce que les compétences et la disponibilité de la main d’œuvre correspondent aux besoins de l’économie, dans un contexte de concurrence internationale et de changements technologiques.

45Quantifier l’écart entre les compétences effectives de la force de travail et celles requises par les entreprises est une tâche difficile. Une mesure parfois utilisée est le nombre de postes vacants pour un taux de chômage donné. Historiquement, en France, pour un taux de chômage donné, le nombre de postes vacants est le double de celui de l’Allemagne ou de la Suède [21].

46Des mesures directes de l’inadéquation des qualifications entre le travailleur et le poste occupé montrent que, pour l’année 2005, la France a un taux de « sur-qualification » inférieur à la Suède et aux États-Unis et un taux de « sous-qualification » supérieur à ces deux pays [22]. La mauvaise adéquation des qualifications aux postes pourrait en partie expliquer le faible taux d’adoption des nouvelles technologies par les entreprises. Il souligne aussi les problèmes émanant du système éducatif, en particulier l’inadéquation structurelle des filières professionnelles et le faible recours à la formation à l’âge adulte.

Quelle politique de croissance pour la France ?

47Estimer la croissance potentielle d’un pays est un exercice périlleux, notamment du fait de ruptures technologiques très difficiles à anticiper [23]. Compte tenu des conséquences très importantes d’une erreur de prévision pour la soutenabilité des finances publiques, et quelles que soient les politiques de croissance mises en place, il est essentiel pour les pouvoirs publics d’envisager différents scénarios dont un franchement pessimiste.

48Recommandation 1. Rendre systématique et publique l’évaluation prospective, par un organisme indépendant, de la soutenabilité des finances publiques selon différentes hypothèses de croissance potentielle, dont une réellement défavorable.

49Afin d’éviter qu’un scénario défavorable ne se réalise, et en conformité avec le diagnostic présenté plus haut, l’action publique devrait se concentrer sur deux axes : la qualité de la force de travail et les incitations des entreprises à investir et innover.

La force de travail

50Comme on l’a vu plus haut, le système éducatif français présente des spécificités qui rendent plus difficile l’adaptation des compétences aux besoins des entreprises.

51Le premier axe de réforme porte sur l’enseignement secondaire. Il s’agit de différencier plus nettement les filières professionnelles des filières générales de manière à mettre en valeur les compétences acquises sur le terrain (combinaison études-travail) et à adapter plus rapidement les filières professionnelles aux besoins des entreprises. L’objectif doit être de faire passer le risque de chômage des diplômés de ces filières en dessous de ceux des filières générales, comme c’est le cas dans les autres pays européens.

52Recommandation 2. Renforcer le temps passé en entreprise dans les filières professionnelles du secondaire. L’absence de mobilisation des entreprises autour d’une formation donnée devrait remettre en cause l’existence de cette formation.

53La France se caractérise par des formations, tant professionnelles qu’universitaires, qui restent relativement peu réactives aux demandes des entreprises. Les informations sur les postes vacants et les travaux de prospective sur les métiers pourraient être mobilisés plus activement pour évaluer quelles formations répondent aux besoins des entreprises et permettre ainsi de faire évoluer la carte des formations. Dans ce domaine, des marges importantes de progrès existent en France. La mise en place du Conseil national éducation économie en 2013, pour « mieux articuler les enjeux éducatifs et les enjeux économiques » va dans le bon sens. Il importe de rendre plus réactive la carte des formations professionnelles initiales où l’échelon régional a été désigné comme pertinent. Pour cela, il est indispensable de lever les résistances et rigidités diverses qui entravent l’adaptation de l’offre éducative. En présence d’un chômage massif des jeunes peu qualifiés, l’adaptation des formations aux emplois devrait l’emporter sur tout autre objectif [24].

54Recommandation 3. Accroître les incitations des régions et des établissements d’enseignement à faire évoluer les formations en fonction des besoins des entreprises, sur la base d’évaluations régulières des performances en matière d’accès à l’emploi.

55Ceci concerne autant les formations post-bac que celles du secondaire. De fait, les écarts importants de taux de chômage à la sortie de formations post-bac suggèrent une adaptation insuffisante aux besoins. Ainsi, le faible taux de chômage dans plusieurs filières BTS et DUT (génie civil, construction, bois, mécanique) indique non seulement une bonne insertion professionnelle mais peut aussi révéler une demande imparfaitement satisfaite de la part des entreprises, au contraire de certaines filières universitaires au niveau licence voire master (sociologie, psychologie, communication et documentation) [25]. Ainsi, il semble important d’accroître le nombre de places dans les BTS et IUT, tout en maintenant le caractère sélectif des ces filières qui est un élément essentiel de la réussite des étudiants qui les intègrent. À l’Université, assouplir les conditions de mise en place de formations d’excellence contribuerait à une meilleure valorisation du diplôme universitaire. Par ailleurs, le système des bourses d’études pourrait utiliser comme critère d’attribution non seulement les revenus familiaux mais aussi la filière choisie. À dotation constante, nous recommandons une augmentation du nombre des bourses dans des disciplines à fort potentiel d’emploi en réduisant celles accordées pour d’autres filières.

56Recommandation 4. Accroître le nombre de places dans les formations technologiques post-Bac qui ont démontré de forts débouchés professionnels (BTS, IUT, universités technologiques, licences pro, en particulier). Réduire en proportion la capacité de certaines filières générales post-Bac. Moduler les bourses d’études en fonction des secteurs porteurs.

57Comme nous avons vu, peu d’adultes sans diplôme de la tranche 25-29 ans sont en formation en France par rapport à ce qu’on observe dans d’autres pays, ce qui participe aux résultats médiocres en termes de compétences de la force de travail (enquête PIAAC). Nous recommandons une ouverture des formations professionnelles aux personnes de plus de 25 ans à travers un assouplissement des conditions d’entrée dans les formations en alternance [26]. Il est aussi souhaitable de faciliter l’interruption temporaire des études, comme c’est le cas dans les pays nordiques.

58Recommandation 5. Assouplir les conditions de la formation en alternance pour les plus de 25 ans souhaitant effectuer une reconversion professionnelle et les conditions de reprise d’études après cet âge.

59La quantité de travail, et pas seulement sa qualité, est un élément central pour accroître le PIB potentiel. À cet égard, la France souffre d’un faible taux de participation en haut et en bas de la distribution d’âges. Les propositions du CAE concernant l’emploi des jeunes, en particulier des jeunes peu qualifiés – développement de l’enseignement professionnel en alternance, renforcement de l’accompagnement vers l’emploi – restent pertinentes [27]. Pour ce qui est des seniors, un premier pas a été fait avec l’assouplissement des conditions de poursuite d’activité après 65 ans et de cumul emploi-retraite. L’emploi des seniors semble avoir réagi à ces mesures, mais ces dispositifs sont encore peu utilisés en France [28] et le taux d’emploi de seniors reste encore loin de ceux observés ailleurs.

60Nous proposons de poursuivre deux pistes complémentaires. La première relève de l’assurance chômage spécifique pour les plus de 50 ans, dont l’âge d’éligibilité n’a pas varié depuis sa création malgré l’augmentation de l’espérance de vie de la population. L’harmonisation de la durée maximale d’indemnisation des plus de 50 ans avec celle des moins de 50 ans devrait augmenter les incitations à travailler de cette classe d’âge. La seconde piste serait d’adapter le système de retraite de manière à prendre en compte, pour le calcul des pensions, la totalité des contributions tout au long de la carrière, y compris dans le cadre d’un cumul emploi-retraite [29]. Ceci augmenterait les incitations à réduire progressivement le taux d’activité en fin de vie professionnelle, et non brutalement, comme on l’observe aujourd’hui dans la très grande majorité des cas.

61Recommandation 6. Aligner la durée maximale d’indemnisation du chômage des plus de 50 ans sur celle du reste de la population. Prendre en compte toutes les contributions retraite pour le calcul des pensions, y compris les contributions réalisées dans le cadre d’un cumul emploi-retraite.

Investissement et recherche

62La France ne fait pas trop peu de R&D si l’on tient compte de sa structure industrielle. Elle fait également partie des pays les plus inventifs à en croire les chiffres de premiers dépôts de brevets. Ceci ne veut pas dire qu’il n’y a pas lieu de soutenir la recherche en France. Au moins deux raisons justifient l’intervention de l’État en matière de science et technologie : la présence d’externalités et le problème de financement de la recherche. C’est la logique qui sous-tend l’existence, depuis 1983, du plus important dispositif de soutien public à la recherche privée : le Crédit d’impôt recherche (CIR, 5,2 milliards d’euros en 2011) [30]. L’avantage du CIR est qu’il n’est pas biaisé en faveur d’une technologie ou d’un secteur d’activité particulier. Mais c’est aussi là que réside sa faiblesse : le CIR ne cible pas des projets porteurs d’externalités ni ceux qui peinent à se financer. Par ailleurs, des travaux empiriques ont montré que les entreprises répondent positivement à la baisse du coût de la recherche suite au CIR, mais qu’un euro dépensé par l’État en CIR n’entraîne guère plus d’un euro de dépenses de recherche de la part des entreprises [31]. La réforme du CIR de 2008 a simplifié l’accès au CIR mais n’a pas augmenté (et a même probablement diminué) son efficacité. Des améliorations sont encore possibles, notamment en réduisant les coûts de gestion pour les PME et les ETI, en accélérant le remboursement pour ces établissements ou encore en assouplissant la procédure préalable permettant de sécuriser les dépenses déclarées auprès de l’administration fiscale (rescrit).

63Recommandation 7. Améliorer l’efficacité du CIR en poursuivant l’effort de simplification de la procédure et de sécurisation des dépenses pour les PME et les ETI. Compléter le dispositif « neutre » du CIR par des aides directes à la recherche dans des domaines à fortes externalités et vers des entreprises ayant des projets prometteurs mais manquant de ressources pour les financer.

64Il est souvent avancé que les entreprises voulant investir en recherche ont des difficultés à trouver du financement externe et se financent dès lors sur base de fonds propres et de bénéfices réinvestis, ce qui exclut les nouvelles entreprises. De fait, c’est surtout dans la phase d’amorçage des projets que les difficultés de financement surgissent. Il existe en France peu de « business angels » apportant aux entreprises naissantes le financement, l’expertise managériale et les réseaux dont elles ont besoin et les investissements sont concentrés sur les phases de développement plutôt que d’amorçage. Sur les 6,48 milliards d’euros de fonds en capital-investissement en 2013, le capital-risque ne représentait que 0,64 milliard [32]. Ainsi, malgré un soutien public important (à la fin du mois de mars 2014, le Fonds national d’amorçage, géré par BPI France dans le cadre du Programme d’investissements d’avenir, avait investi 0,31 milliard d’euros dans seize fonds d’amorçage), la France accuse un retard par rapport à l’Allemagne et à la Suède [33]. Une cause possible est la rentabilité avant impôt négative du capital-risque en France, qui décourage les investisseurs institutionnels (fonds de pension, assureurs) [34]. Le fait que la France exporte plus de fonds de capital-risque qu’elle n’en importe semble révéler un manque de projets d’innovation rentables plutôt qu’un manque de fonds disponibles.

65Recommandation 8. Mener une étude sur les causes profondes de la faible rentabilité du capital-risque en France. Ne pas soutenir des entreprises innovantes peu rentables après quelques années, mais au contraire allouer les ressources de soutien aux entreprises innovantes en phase d’amorçage.

66Il est aussi important de souligner que les mécanismes précis derrière le faible taux d’adoption des technologies sophistiquées sont mal connus à cause d’un manque des données. Si les travaux existants mettent en avant l’importance du capital humain, du cadre institutionnel et de la dépendance de sentier comme facteurs d’adoption des nouvelles technologies [35], une enquête auprès des entreprises françaises sur cette question fournirait un élément extrêmement utile pour affiner le diagnostic.

67Enfin, l’une des causes des faibles taux de profit dans l’industrie manufacturière est le prix élevé des services intermédiaires. Des changements dans la réglementation des secteurs tels que les réseaux de transports et certaines professions libérales pourront augmenter la concurrence et comprimer les prix dans ces secteurs, ce qui réduira les coûts de l’industrie, augmentera les taux de marge et encouragera ainsi l’investissement en équipements et en recherche [36].

68Recommandation 9. Adapter la réglementation des secteurs non manufacturiers, en particulier ceux qui produisent des services intermédiaires pour les autres secteurs, tels que les réseaux de transport et certaines professions libérales.

69L’économie française dispose de grands atouts et d’importantes réserves d’expansion liées au niveau élevé du sous-emploi, et à la marge de progrès possible en termes de qualifications et de diffusion des technologies dans l’entreprise. Il ne tient qu’à ses acteurs de les mobiliser.

Les auteurs remercient Cyriac Guillaumin et Jean Beuve, Conseillers scientifiques au CAE, pour leur aide précieuse tout au long de la réalisation de cette Note.

Date de mise en ligne : 03/12/2014

https://doi.org/10.3917/ncae.016.0001

Notes

  • [a]
    Directeur de la recherche et des études à NATIXIS, correspondant du CAE.
  • [b]
    Université Aix-Marseille (AMSE), membre du CAE.
  • [c]
    Université de Maastricht et UNU-MERIT (Pays-Bas), membre du CAE.
  • [1]
    Chiffre retenu dans le programme de stabilité de la France à l’horizon 2017.
  • [2]
    Voir, par exemple, Direction générale du Trésor (2013) : Projection des dépenses de santé à l’horizon 2060, le modèle PROMEDE, Document de Travail, décembre.
  • [3]
    Voir aussi Aghion P., G. Cette et É. Cohen (2014) : Changer de modèle, Odile Jacob.
  • [4]
    Voir, par exemple, Acemoglu D., P. Aghion et F. Zilibotti (2006) : « Distance to Frontier, Selection, and Economic Growth », Journal of the European Economic Association, vol. 4, n° 1 et Aghion P., G. Cette, É. Cohen et J. Pisani-Ferry (2007) : Les leviers de la croissance française, Rapport du CAE, n° 72, La Documentation française.
  • [5]
    Voir Fontagné L., P. Mohnen et G. Wolff (2014) : « Pas d’industrie, pas d’avenir ? », Note du CAE, n° 13.
  • [6]
    Le taux de croissance annuel du stock de capital productif est passé de 2,33 % au cours de la période 1980-1989 à 3,87 et 3,23 % respectivement sur 1990-1999 et 2000-2013.
  • [7]
    INSEE, Enquête sur les investissements dans l’industrie : http://www.insee.fr/fr/themes/indicateur.asp?id=15.
  • [8]
    Voir Conseil d’analyse économique (2014) : « Quelles réformes pour la France ? », Note du CAE, n° 15. Voir aussi Aghion, Cette, Cohen et Pisani-Ferry (2007) op.cit.
  • [9]
    OCDE (2014) : Examens de l’OCDE des politiques d’innovation : France.
  • [10]
    Voir Ministère de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche (MESR) (2012) : « Un déficit d’effort de recherche des entreprises françaises ? Comparaison France-Allemagne », Note d’Information du MESR, n° 12.09, disponible sur http://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/reperes/telechar/ni/ni1209.pdf. Voir aussi Science, Technologie et Industrie (2013) : Tableau de bord de l’OCDE. En 2009, les industries de moyenne-haute technologie représentaient 3 % seulement de la valeur ajoutée en France, contre 10 % en Allemagne.
  • [11]
    OCDE (23014) op.cit., p. 68.
  • [12]
    Les brevets triadiques sont ceux qui sont déposés à la fois dans les offices de brevets américains, japonais et européens et qui de ce fait reflètent en principe des brevets de meilleure qualité.
  • [13]
    de Rassenfosse G., H. Dernis, D. Guellec, L. Picci et B. van Pottelsberghe de la Potterie (2013) : « The Worldwide Count of Priority Patents :A New Indicator of Inventive Activity », Research Policy, vol. 42, n° 3, pp. 720-737.
  • [14]
    Les enquêtes communautaires d’innovation sont menées dans tous les États membres de l’Union européenne suivant les lignes directrices contenues dans le Manuel d’Oslo, cf. OCDE (2005) : Manuel d’Oslo : Principes directeurs pour le recueil et l’interprétation des données sur l’innovation, 3e édition, Eurostat. Les données ne sont pas aisément comparables entre pays à cause par exemple de formulations différentes de certaines questions, de différences d’échantillonnage ou du caractère obligatoire ou facultatif de réponse à l’enquête. La sous-performance de la France apparaît néanmoins assez nette.
  • [15]
    L’enquête PISA (Program for International Student Assessment) de l’OCDE évalue les compétences des jeunes de 15 ans dans les domaines de la lecture, des mathématiques et des sciences.
  • [16]
    L’enquête PIAAC (Program for the International Assessment of Adult Competencies) de l’OCDE mesure les compétences des adultes âgés de 16 à 65 ans et l’utilisation de ces compétences dans le cadre professionnel : capacité à comprendre et réagir aux textes écrits, à comprendre et utiliser des outils numériques et mathématiques, à résoudre des problèmes dans des environnements à forte composante technologique. Le déficit de formation de la main d’œuvre est également au centre du diagnostic porté par le rapport de France Stratégie (2014) : Quelle France dans 10 ans ?, Fayard, juin.
  • [17]
    Par exemple, les tutilaires d’une licence professionnelle de 2007 avaient, en 2010, un taux d’emploi de 88 %, contre 75 % pour les titulaires d’une licence générale (cf. CEREQ).
  • [18]
    OCDE (2013) : Regards sur l’éducation.
  • [19]
    Entre 2000 et 2011 les dépenses publiques actives du marché du travail ont oscillé entre 0,9 et 1,2 % du PIB. Selon l’enquête de l’INSEE de 2012 sur la formation des adultes, un tiers des personnes interrogées se sont senties empêchées, à un moment donné, de suivre une formation. Les raisons les plus fréquemment invoquées sont les responsabilités familiales (34 %), le coût (31 %), le manque de formation adaptée (24 %) et l’éloignement du lieu de formation (16 %). Par ailleurs, 30 % des répondants estiment ne pas avoir été encouragés par leur employeur et 22 % déclarent avoir essuyé un refus. Sur les déficiences de la formation professionnelle en France, voir Cahuc P., M. Ferracci et A. Zylberberg (2011) : Formation professionnelle : pour en finir avec les réformes inabouties, Institut Montaigne.
  • [20]
    D’après la base Reflet (Regards sur les flux de l’enseignement technique et professionnel) du Centre d’études et de recherches sur les qualifications (CÉREQ).
  • [21]
    Voir Hobijn B. et A. ?ahin (2012) : Beveridge Curve Shifts across Countries since the Great Recession, Mimeo, Federal Reserve Bank of New York.
  • [22]
    OCDE (2011) : Perspectives de l’emploi. Les travailleurs sont considérés comme surqualifiés lorsque leur niveau de qualification est supérieur à celui requis par leur emploi, et sous-qualifiés dans le cas inverse. Ces données doivent être considérées avec prudence compte tenu des spécificités nationales (par exemple, le cumul emploi-étude, fréquent dans certains pays mais pas en France), ou bien l’apprentissage qui tire vers le haut la proportion de « sous-qualifiés »en Allemagne.
  • [23]
    Voir la polémique lancée sur le cas américain par Gordon R. (2014) : « The Demise of US Economic Growth : Restatement, Rebuttal, and Reflections », NBER Working Paper, n° 19895.
  • [24]
    Sur les rigidités de la carte des formations, voir le rapport de l’Inspection de l’Éducation nationale (2013) : Évolution des cartes de formations professionnelles et technologiques à la rentrée 2013. Synthèse des notes des correspondants académiques, août.
  • [25]
    Sur la période 2003-2009, parmi les personnes ayant terminé leurs études depuis moins de onze ans, le taux de chômage des titulaires de BTS et DUT (ou équivalent) dans le secteur du génie civil, de la construction, du bois et de la mécanique est de 4 % tandis que le taux de chômage des titulaires de master (1 ou 2) en sociologie, psychologie, communication et documentation est de 14 %. Voir Martinelli D. et C. Prost (2010) : « Le domaine d’études est déterminant pour les débuts de carrière », INSEE Première, n° 1313.
  • [26]
    À ce jour, l’apprentissage n’est pas ouvert aux plus de 25 ans (sauf dérogations pour de rares cas particuliers). Ces derniers ont accès aux contrats de professionnalisation mais uniquement lorsqu’ils sont au chômage.
  • [27]
    Cahuc P., S. Carcillo et K.F. Zimmermann (2013) : « L’emploi des jeunes peu qualifiés en France », Note du CAE, n° 4.
  • [28]
    Chéron A. (2014) : « Le cumul emploi-retraite : un dispositif efficace ? », TDTE Caisse des Dépôts, n° 39.
  • [29]
    Voir Bozio A. et T. Piketty (2008) : Pour un nouveau système de retraite, CEPREMAP, n° 14, Édition Rue d’Ulm.
  • [30]
    Ministère de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche (2013) : Le crédit d’impôt recherche en 2011.
  • [31]
    Cf. Ientile D. et J. Mairesse (2009) : « A Policy to Boost the R&D : Does the Tax Credit Work ? », European Investment Bank Paper, vol. 14, n° 1 et Mulkay B. et J. Mairesse (2013) : « The R&D Tax Credit in France : Assessment and ex ante Evaluation of the 2008 Reform », NBER Working Paper, n° 19073. Cette faible « efficacité » du CIR tient surtout au fait que le crédit d’impôt est proportionnel au volume de recherche et non, comme avant la réforme de 2008, à son incrément. Le crédit d’impôt incrémental a ses propres limites : évolution des dépenses de R&D en dents de scie, limites à l’accélération des dépenses de R&D, coûts de gestion plus importants et faible impact du crédit d’impôt incrémental sur le coût d’usage de la recherche. Voir Mohnen P. et B. Lokshin (2010) : « What Does it Take for an R&D Tax Incentive Policy to be Effective ? » in Reforming Rules and Regulations : Laws, Institutions and Implementation, Vivek Ghosal (ed.), MIT Press, pp. 33-58.
  • [32]
    Voir le rapport de l’AFIC (2013) : Activités des acteurs français du capital-investissement.
  • [33]
    Selon la European Private Equity and Venture Capital Association (EVCA), le montant des dépenses d’amorçage en 2013 est de 0,006 ‰ du PIB en France contre 0,016 et 0,018 ‰ en Allemagne et en Suède.
  • [34]
    Krieger E., K. Medjad, F. Iselin, R. Grandsart et V. Gerasymenko (2012) : La performance du capital-risque : entre fantasme et réalité, Conférence Innovation, Financement et Entrepreneuriat, HEG Genève. Les auteurs rapportent un taux de rendement interne sur 10 ans sur le capital-risque de – 0,8 % en France (selon l’AFIC), de 34,5 % aux États-Unis (selon la National Venture Capital Association) et de 1,8 % dans les autres pays européens (selon l’Association européenne du capital-risque).
  • [35]
    Voir Comin D. et M. Mestieri (2013) : « Technology Diffusion : Measurement, Causes and Consequences », Institute for New Economic Thinking Research, Note n° 029, pour une synthèse de la littérature sur le sujet de l’adoption des nouvelles technologies.
  • [36]
    Bourlès et al. (2013) montrent qu’une baisse des réglementations de secteurs en amont a un effet significatif sur la PGF de secteurs en aval. Voir Bourlès R., G. Cette, J. Lopez, J. Mairesse et G. Nicoletti (2013) : « Do Product Market Regulations in Upstream Sectors Curb Productivity Growth ? Panel data Evidence for OECD Countries », Review of Economics and Statistics, vol. 95, n° 5, pp. 1750-1768. Voir aussi les expériences suédoise et allemande en matière d’ouverture à la concurrence du transport ferroviaire, cf. Centre d’analyse stratégique (2011) : L’ouverture à la concurrence du transport ferroviaire des voyageurs, La Documentation française. L’expérience du Royaume-Uni est très différente, mais à partir d’un modèle où l’État ne participe pas directement au système ferroviaire.

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