Pays désormais massivement urbanisé (et même, d’une certaine manière, métropolisé de force), pays où l’accession à la propriété est l’horizon ultime de toute politique publique de logement, la Turquie n’a pas de politique publique de logement social clairement identifiable. Souvent confondu avec le logement collectif, le logement social n’existe pas comme une catégorie stable de l’action publique, pas plus au niveau de l’Etat qu’au niveau des pouvoirs locaux. Ce constat opéré, il s’agira de voir comment la catégorie « logement social » est manipulée et détournée à des fins partisanes et comment la vision de l’espace social s’en trouve faussée, privilégiant – pour fonder la politique publique de logement – les affiliations politiques et les relations de dépendance au détriment des critères socio-économiques plus objectifs. Autrement dit, alors que les populations les plus nécessiteuses sont invisibilisées et dès lors cantonnées dans l’autoproduction et le bricolage au jour le jour, les politiques publiques de « logement social », tout en étant des instruments d’ingénierie sociale (au service d’une conception conservatrice de l’ordre social), servent soit à récompenser des fidèles, soit à maintenir dans une dépendance totale des groupes sociaux aspirant à accéder à la propriété. Les endettés reconnaissants et les familles de şehit ont évincé les pauvres.
“Social housing” in Turkey since the early 2000s: conceptual misunderstandings, redefinition of actor systems and invisibility of the needy
As a country now massively urbanized, as a country where home ownership is the ultimate horizon of any public housing policy, Turkey has no clearly identifiable social housing policy. Often confused with collective housing, social housing does not exist as a stable category of public action, no more at the state level than at the level of local authorities. Therefore, we need to scrutinize in what extent the category of “social housing” is manipulated and diverted for partisan purposes and how the vision of social space is distorted, favoring political affiliations and dependency relationships to the detriment of more objective socio-economic criteria. In other words, whereas the most needy segments of the population are invisible and therefore confined to housing self-production and day-to-day small arrangements, being instruments of social engineering (in the service of a conservative conception of social order), public policies of “social housing” serve either to reward the faithful citizens, or to maintain total dependence on social groups aspiring to access property. Thus, the grateful debtors and the şehit families ousted the poor.