Couverture de MIGRA_168

Article de revue

Gestion des émotions de migrantes transidentitaires sud-américaines en France

Pages 35 à 50

Notes

  • [*]
    Doctorant et attaché temporaire d’enseignement et de recherche en sociologie, membre du Centre d’études et de recherche sur les emplois et les professionnalisations (cerep, EA4692), Université de Reims Champagne-Ardenne.
  • [**]
    Professeure des universités, directrice du Centre d’études et de recherche sur les emplois et les professionnalisations (cerep, EA4692), Université de Reims Champagne-Ardenne.
  • [3]
    ESPINEIRA, Karine, La transidentité. De l’espace médiatique à l’espace public, Paris : Éd. L’Harmattan, 2008, 196 p. ; CALIFIA, Pat, Le mouvement transgenre. Changer de sexe, Paris : Éd. Epel, 2003, 384 p. ; KRIKORIAN, Gaëlle, “Les dilemmes du transsexualisme”, in : LAGRAVE, Rose-Marie ; GESTIN, Agathe ; LEPINARD, Éléonore ; PRUVOST, Geneviève (sous la direction de), Dissemblances. Jeux et enjeux du genre, Paris : Éd. L’Harmattan, 2002, pp. 23-35.
  • [4]
    CALIFIA, Pat, Le mouvement transgenre. Changer de sexe, op.cit.
  • [5]
    BENEDETTI, Marcos, Toda Feita. O corpo e o gênero das travestis, Rio de Janeiro : Garamond, 2005, 142 p.
  • [6]
    KULICK, Don, Travesti: Sex, Gender and Culture among Brazilian Transgendered Prostitutes, Chicago : University of Chicago Press, 1998, 280 p.
  • [7]
    BASTIDE, Loïs, “‘Migrer, être affecté’. Émotions et expériences spatiales entre Java, Kuala Lumpur et Singapour”, Revue Européenne des Migrations Internationales, vol. 29, n° 4, 2013, pp. 7-20.
  • [8]
    KALBERG, Stephen, “La sociologie des émotions de Max Weber”, Revue du MAUSS, vol. 2, n° 40, 2012, pp. 285-299.
  • [9]
    DEONNA, Julien ; TERONI, Fabrice, “L’intentionnalité des émotions : du corps aux valeurs”, Revue Européenne des Sciences Sociales, vol. XLVII, n° 144, 2009, pp. 25-41 (voir p. 28).
  • [10]
    HOCHSCHILD, Arlie R., “Travail émotionnel, règles de sentiments et structure sociale”, Travailler, vol. 1, n° 9, 2003, pp. 19-49.
  • [11]
    REYES, José, Trajectoires migratoires de transgenres sud-américaines ayant exercé la prostitution en France, Mémoire de Master en sciences sociales, Paris : EHESS, 2012, 114 p.
  • [12]
    GIL, Françoise ; HEDJERASSI, Nassira ; RULLAC, Stéphane, Discriminations et stigmatisation d’une population. Le cas des femmes trans’ migrantes, Rapport pour la Région Île-de-France (Programme de soutien en faveur de la lutte contre les discriminations), 2014, 109 p. ; GIL, Françoise ; HEDJERASSI, Nassira ; REYES, José, Enquête sur la population trans’ : intersection de discriminations directes et indirectes, Rapport pour la Région Île-de-France (Programme de soutien en faveur de la lutte contre les discriminations), 2015.
  • [13]
    Les entretiens en espagnol intégralement retranscrits ont été traduits en français.
  • [14]
    Pour préserver l’anonymat des personnes enquêtées, leurs prénoms ont été changés.
  • [15]
    HOCHSCHILD, Arlie R., “Travail émotionnel, règles de sentiments et structure sociale”, art. cité.
  • [16]
    ULISES BORGOGNO, Ignacio Gabriel, La transfobia en América latina y El Caribe. Un estudio en el marco de Redlactrans, Buenos Aires : Redlactrans, 2009, 76 p.
  • [17]
    CABRAL, Mauro, Me preguntaron cómo vivía / sobreviviendo, dije, sobreviviendo: Trans Latinoamericanas en situación de pobreza extrema, New York : IGLHRC, 2009, 17 p.
  • [18]
    VERMOT, Cécile, “Capturer une émotion qui ne s’énonce pas” [En ligne], Terrains/Théories, n° 2, 2015, http://teth.revues.org/224.
  • [19]
    GOFFMAN, Erving, Stigmate : les usages sociaux des handicaps, Paris : Éd. de Minuit, 1975, 180 p.
  • [20]
    HEDJERASSI, Nassira ; REYES, José ; GIL, Françoise, L’expérience de l’école, du travail et de la formation de migrantes transgenres : entre stigmatisation et discrimination, Revue Française d’Éducation Comparée, n°13, 2015, pp. 167-180.
  • [21]
    FERNANDEZ, Josefina, Cuerpos desobedientes. Travestismo e identidad de género, Buenos Aires : Edhasa, 2004, 213 p. ; KULICK, Don, Travesti: Sex, Gender and Culture among Brazilian Transgendered Prostitutes, op. cit.
  • [22]
    PIRANI, Denise, Quand les lumières de la ville s’éteignent : minorités et clandestinité à Paris. Le cas des travestis, Thèse de doctorat en ethnologie, Paris : EHESS, 1997, 323 p. ; FERNANDEZ, Josefina, Cuerpos desobedientes. Travestismo e identidad de género, op. cit.
  • [23]
    PRADA, Nancy ; HERRERA, Susan ; LOZANO, Lina ; ORTIZ, Ana María, ¡A mí me sacaron volada de allá!: relatos de vida de mujeres trans desplazadas forzosamente hacia Bogotá, Bogotá : Universidad Nacional de Colombia, 2012, 287 p. ; KULICK, Don, Travesti: Sex, Gender and Culture among Brazilian Transgendered Prostitutes, op. cit.
  • [24]
    FERNANDEZ, Josefina, Cuerpos desobedientes. Travestismo e identidad de género, op. cit.
  • [25]
    KULICK, Don, Travesti: Sex, Gender and Culture among Brazilian Transgendered Prostitutes, op. cit.
  • [26]
    Terme utilisé pour désigner les trans sud-américaines qui vivent en Europe.
  • [27]
    PRADA, Nancy ; HERRERA, Susan ; LOZANO, Lina ; ORTIZ, Ana María, ¡A mí me sacaron volada de allá!: relatos de vida de mujeres trans desplazadas forzosamente hacia Bogotá, op. cit.
  • [28]
    KULICK, Don, Travesti: Sex, Gender and Culture among Brazilian Transgendered Prostitutes, op. cit.
  • [29]
    FERNANDEZ, Josefina, Cuerpos desobedientes. Travestismo e identidad de género, op. cit.
  • [30]
    PIRANI, Denise, Quand les lumières de la ville s’éteignent : minorités et clandestinité à Paris. Le cas des travestis, op.cit. (voir p. 186).
  • [31]
    GIDDENS, Anthony, Modernity and Self-Identity, Stanford : University Press, 1991, 264 p.
  • [32]
    PRADA, Nancy ; HERRERA, Susan ; LOZANO, Lina ; ORTIZ, Ana María, ¡A mí me sacaron volada de allá!: relatos de vida de mujeres trans desplazadas forzosamente hacia Bogotá, op. cit.
  • [33]
    KULICK, Don, Travesti: Sex, Gender and Culture among Brazilian Transgendered Prostitutes, op. cit.
  • [34]
    FERNANDEZ, Josefina, Cuerpos desobedientes. Travestismo e identidad de género, op. cit.
  • [35]
    BENEDETTI, Marcos, Toda Feita. O corpo e o gênero das travestis, op. cit.
  • [36]
    Loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure.
  • [37]
    Loi n° 2016-444 du 13 avril 2016 visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées.
  • [38]
    Sur le débat concernant l’exercice de la prostitution en France, voir : FASSIN, Éric, “Trans’ et genre : des catégories construites historiquement”, Lettre d’information du CRIPS-CIRDD Île-de-France, n° 84, novembre 2007, pp. 3-4 ; REDOUTEY, Emmanuel, “Trottoirs et territoires, les lieux de prostitution à Paris”, in : HANDMAN, Marie-Élisabeth, MOSSUZ-LAVAU, Janine (sous la direction de), La prostitution à Paris, Paris : Éd. La Martinière, 2005, pp. 39-91 ; VERNIER, Johanne, “La loi sur la sécurité intérieure : punir les victimes du proxénétisme pour mieux les protéger ?”, in : HANDMAN, Marie-Élisabeth, MOSSUZ-LAVAU, Janine (sous la direction de), La prostitution à Paris, op. cit., pp. 121-152.
  • [39]
    KULICK, Don, Travesti: Sex, Gender and Culture among Brazilian Transgendered Prostitutes, op. cit. ; PRIEUR, Annick, Mema’s House, Mexico City: On Transvestites, Queens and Machos, Chicago : University of Chicago Press, 1998, 293 p.
  • [40]
    MOUJOUD, Nasima, “Prostitution et migration de Maghrébines”, in : HANDMAN, Marie-Élisabeth, MOSSUZ-LAVAU, Janine (sous la direction de), La prostitution à Paris, op. cit., pp. 199-233.
  • [41]
    BALDASSAR, Loretta, “Ce ‘sentiment de culpabilité’”, Recherches Sociologiques et Anthropologiques, vol. 41, n° 1, 2010, pp. 15-37.
  • [42]
    URREA, Fernando ; REYES, José ; CASTANO, Jairo ; VIERA, Oswaldo, “Entre la transgresión subversiva y el conservadurismo de género : transgeneristas negras”, in : URREA GIRALDO, Fernando ; POSSO QUICENO, Jaenny (sous la direction de), Feminidades, sexualidades y colores de piel : mujeres negras, indígenas, blancas-mestizas y transgeneristas negras en el suroccidente colombiano, Cali : Programa editorial Universidad del Vale, 2015, pp. 471-513.

1 Dans cet article, nous présentons une recherche portant sur des migrantes originaires de différents pays d’Amérique du Sud, installées en France. Nous cherchons à comprendre le sens de leur parcours migratoire et plus largement biographique, dans la mesure où les personnes enquêtées ont la particularité d’avoir à la fois franchi des frontières géographiques, mais aussi d’avoir subverti les frontières de genre. C’est pourquoi, nous avons choisi d’analyser leur parcours selon une approche qui croise sociologie du genre, des migrations et des émotions. La population enquêtée se caractérise par la stigmatisation, voire les discriminations institutionnalisées dont elle fait l’objet, depuis le cercle familial jusqu’au monde du travail. L’approche par les émotions nous paraît féconde pour comprendre les expériences des sujets, puisque nous cherchons à saisir les traits significatifs de ces parcours marqués par la transition de genre. Comment ces personnes font-elles face aux défis et difficultés qui jalonnent leur parcours de vie ? Nous faisons l’hypothèse que le projet migratoire vise à leur permettre de gagner en (re)connaissance, et donc d’espérer un avenir meilleur en quittant leur continent pour l’Europe. Alors que la stigmatisation construit socialement un sentiment de honte, la migration — et le capital économique, social et symbolique auquel elle rend l’accès possible— peut donner place à un sentiment de fierté.

2 En nous appuyant sur d’autres recherches portant sur des populations migrantes, notamment les rares travaux sur des personnes trans, nous mettrons en lumière le fait que, même si les conditions dans le pays d’accueil ne sont pas nécessairement beaucoup plus enviables, cette expérience est susceptible de leur conférer une nouvelle place sur le plan social. Comment composent-elles avec les effets du vieillissement ou encore des lois pénalisant l’exercice de la prostitution ? Quelle(s) stratégie(s) sont développée(s) pour maintenir cette place dans la durée ? C’est ce que nous visons à comprendre en analysant les récits de vie recueillis.

Problématique transidentitaire

3Notre recherche porte sur des personnes ayant en commun de subvertir les frontières de genre, qu’il s’agisse de transformistes, travesties, transsexuelles, transgenres ou transidentitaires [3]. Les déclinaisons sont mouvantes, au point même d’y avoir superposition. Pour autant, ni le monde académique ni le monde militant n’ont su s’accorder sur une notion générique susceptible de couvrir l’ensemble de ce spectre et de rendre compte de cette fluidité. Ainsi, pour l’activiste et intellectuelle Deirdre O’Hartigan, l’emploi du terme « transgenre » pose problème dans la mesure où toute application de celui-ci constituerait une tentative pour masquer un changement physique de sexe [4]. En France, le terme « transsexuel » a longtemps été utilisé dans le milieu médical, le recours à une chirurgie de réassignation sexuelle étant considéré comme la condition d’une transformation de genre. Pour des auteurs comme Marcos Benedetti [5] ou encore Don Kulick [6], les travesties brésiliennes aspirent à des modifications corporelles qui leur permettent de vivre chaque jour comme des personnes de sexe féminin, sans pour autant vouloir une chirurgie de réassignation sexuelle. Dans ce texte, nous utiliserons le terme « trans » pour rendre justice aux choix très diversifiés d’auto-appellation par les personnes enquêtées elles-mêmes.

4En France, la transidentité constitue un objet de recherche très récent dans le domaine des sciences sociales, alors que la littérature internationale est plus fournie. Une revue de cette littérature fait ressortir comme saillante, dans les histoires de vie, l’expérience de l’acceptation ou du rejet familial, la transphobie à l’école (marquée notamment par les insultes, des formes de harcèlement voire de violences), l’absence de soutien qui exposerait à une plus grande vulnérabilité, et pouvant conduire à des déscolarisations et/ou à des tentatives de suicide. Le monde de l’enseignement supérieur n’apparaît guère plus accueillant, les parcours y étant marqués par le rejet et les violences, y compris symboliques par leur invisibilisation. Enfin, notons les embûches dans l’accès au monde du travail, au marché de l’emploi, et dans l’exercice d’une activité professionnelle quotidienne, ce qui explique que beaucoup d’individus trans recourent à la prostitution, souvent en raison d’une rupture scolaire précoce, et donc de l’absence de formation et de qualification. Les rares travaux qui portent sur les parcours migratoires de ces personnes font ressortir les expériences imbriquées de racisme, de transphobie et de sexisme, comme explicatives du recours à la prostitution.

Lecture des parcours de migration au prisme des émotions

5La question des émotions a longtemps été considérée par les sociologues comme un sujet relevant de la psychologie [7]. Pourtant, certains auteurs comme Stephen Kalberg [8] décèlent la présence des émotions dans la sociologie de Max Weber. Si de nombreuses théories contemporaines sur les émotions insistent sur leur dimension intentionnelle (possibilité de réagir face à certaines situations auxquelles nous sommes confrontés), sans nier leur dimension phénoménologique (avoir conscience des perturbations physiologiques), les rapports entre ces deux dimensions sont rarement explicites. Selon Julien Deona et Fabrice Teroni, une analyse satisfaisante des émotions doit combiner ces deux aspects sans tomber dans une approche purement phénoménale : « […]» [9].

6Dans la perspective compréhensive que nous adoptons, l’approche par les émotions, et notamment par la « gestion des émotions » développée par Arlie R. Hochschild [10], nous apparaît heuristique pour éclairer les parcours de migrantes trans. Elle nous permet en effet d’analyser comment nos enquêtées font face à une situation à partir des sentiments ressentis dans leur parcours migratoire, et les actions mises en place. Pour reprendre les termes d’Arlie R. Hochschild, il s’agit de saisir le travail des et sur les émotions. Notre choix de nous intéresser à des migrantes nous permet d’interroger la relation entre émotion et expérience migratoire, comme a pu le faire Loïs Bastide dans ce présent dossier, puisque sa recherche souligne le lien entre les trajectoires spatiales et les trajectoires émotionnelles qui participent à moduler les rythmes et les géométries des parcours migratoires.

Présentation du terrain et du corpus

7Cet article s’appuie sur des travaux menés entre 2010 et 2015 dans le cadre d’une recherche exploratoire [11] poursuivie par une recherche collective [12], selon une approche ethnographique reposant sur des observations participantes. Nous avons également réalisé une trentaine d’entretiens (en français ou dans les langues des enquêtées) de type biographique qui visaient le recueil d’éléments sur l’histoire familiale, scolaire, professionnelle, migratoire, affective, amicale et sociale des enquêtées. Dans ce texte, nous analyserons les récits de vie [13] de cinq migrantes.

8Sonia [14], 45 ans, a grandi dans une petite ville du nord de l’Argentine au sein d’une famille modeste. Suite à la pression exercée par sa mère en raison de son apparence « androgyne », elle a quitté le foyer familial à 14 ans, ce qui a engendré une rupture scolaire. Elle s’est prostituée dans une ville proche de celle où elle résidait pour subvenir à ses besoins. Elle a alors entamé sa transition de genre, et a débuté un parcours migratoire qui l’a d’abord menée au Paraguay, puis au Chili, avant de revenir en Argentine pour s’établir à Buenos Aires. Elle y a exercé la prostitution pendant plusieurs années, avant de créer une petite entreprise de couture. Suite à la crise économique survenue en Argentine au début des années 2000, elle a pris la direction de la France en 2002. Après avoir exercé la prostitution, elle est devenue médiatrice sociale au sein d’une association.

9 Daniela, quarante ans environ, est issue d’une famille de paysans du centre du Pérou ayant migré à Lima, la capitale, à la recherche d’un avenir meilleur. Après l’obtention de l’équivalent du baccalauréat, elle a quitté le foyer familial à 16 ans, lasse de se voir reprocher « ses manières efféminées ». Elle s’est installée chez une amie et a alors commencé sa transition de genre. Elle a exercé comme femme de ménage dans un salon de coiffure avant de devenir elle-même coiffeuse. Elle a ensuite émigré vers l’Italie en 2005, pour s’installer à Milan puis à Turin, où elle a eu recours à la prostitution. Elle vit actuellement à Paris et exerce comme auxiliaire de vie.

10 Jasmine, 34 ans, a grandi à Lima au sein d’une famille de la classe moyenne. Elle a quitté sa famille à l’âge de 16 ans après des disputes répétées concernant son apparence jugée « féminine ». Afin de subvenir à ses besoins, elle a dû arrêter l’école pour travailler dans un salon de coiffure, puis dans un restaurant en tant que serveuse et ensuite comme cuisinière. Elle a commencé à exercer la prostitution après avoir entamé sa transition de genre à 17 ans. Elle a migré à Milan en 2003, puis s’est installée à Boulogne. Depuis, elle fait des allers-retours entre la France et l’Italie. Elle exerce encore la prostitution.

11 Juliana, 40 ans environ, est née à Bogota, en Colombie, au sein d’une famille de la classe moyenne. Elle a entamé sa transition de genre à l’âge de 13 ans, a arrêté ses études en raison du harcèlement scolaire dont elle faisait l’objet, et a quitté le foyer familial à 14 ans. Elle a alors exercé la prostitution pour survivre, et à 15 ans s’est installée chez son compagnon. Elle a ensuite arrêté sa transition de genre, a renoué le contact avec sa famille et a travaillé comme charpentier avec son ami. À l’âge de 16 ans, elle s’est formée à la coiffure. À 17 ans, elle a repris sa transition de genre, s’est séparée de son ami et a connu une nouvelle rupture avec sa famille. Elle a alors poursuivi son activité de coiffeuse, jusqu’à son départ pour l’Italie, à 20 ans. Elle s’est installée à Rome en 1993 et y a exercé la prostitution jusqu’en 2003, date de son arrivée à Paris. Elle est actuellement médiatrice dans une association.

12 Maria, 44 ans, a grandi au sein d’une famille modeste, dans une ville située au nord du Pérou. Elle a quitté le foyer familial à 17 ans et a arrêté l’école en raison du harcèlement sexuel qu’elle subissait de la part de ses camarades. Elle vivait alors grâce à des “petits boulots” (garde d’enfants, ménage). Une fois sa transition de genre entamée, elle a exercé la prostitution. À 30 ans, elle a migré à Buenos Aires, où elle s’est adonnée à la prostitution pendant cinq ans, avant de rejoindre Milan. Elle vit actuellement à Paris et exerce encore la prostitution, dans l’attente de régulariser sa situation administrative.

13 Pour analyser ce corpus de récits de vie, l’approche développée par Arlie R. Hochschild [15] nous permet de comprendre comment la situation de forte vulnérabilité, psychologique, sociale et économique, dans laquelle se (re)trouvent la plupart de nos enquêtées, dans leur pays d’origine, nourrit leur désir de migrer en Europe dans l’espoir, souvent illusoire, d’un avenir meilleur.

La honte, liée à la stigmatisation

14 Comme le souligne Ignacio Gabriel Ulises [16], en Amérique latine les personnes font tout à la fois l’objet de discriminations et de violences familiales, sociales et institutionnelles ; ce qui les place dans une situation d’extrême vulnérabilité sociale en matière d’accès à des biens et à des services essentiels, comme le logement et la protection sociale. Cette situation explique pourquoi l’espérance de vie de cette population est de 38 ans environ, alors qu’elle est de 75 ans en moyenne pour les habitants latino-américains. Selon Mauro Cabral [17], la reconnaissance des personnes transidentitaires comme sujets de droit, leur est souvent refusée pour des raisons combinant l’identité de genre, la pauvreté, l’ethnicité, le travail du sexe. Pour Cécile Vermot [18], le sentiment de honte constitue un puissant levier de contrôle social qui tend à isoler un individu du groupe par le biais d’un jugement social. En ce sens, toute personne portant un stigmate, une marque corporelle détestable [19], est susceptible d’être isolée du groupe, de se voir privée de ses droits fondamentaux. La subversion des rôles sociaux de sexe se traduit par une forme de stigmatisation, qui expose à une marginalisation, et par conséquent à une plus grande vulnérabilité.

15 De fait, les parcours des personnes enquêtées sont marqués par une série de ruptures, comme notre recherche collective l’avait déjà souligné [20]. Parmi ces ruptures, nous pouvons citer le rejet familial [21], dont témoigne par exemple Juliana, lorsqu’elle met en exergue le sentiment de honte ressenti par sa mère, qui rejaillit sur elle et dont elle finit par souhaiter se défaire : « Un jour, je dis à ma mère : “Ça suffit ! Oui, maman, je vis comme une femme au salon de coiffure, et je vais continuer à vivre comme ça” […]. “Non, comment peux-tu agir comme ça ? Quelle honte par rapport aux gens ! Que va dire la famille ? […] Que vont dire les voisins ? Tes frères ? Regarde, tout le monde ne fait que parler de toi, de te critiquer, de se moquer !” ».

16 La rupture scolaire marque également les parcours biographiques de nos enquêtées. Nous retrouvons ce que d’autres travaux [22] ont mis en lumière, à savoir que l’école est la première institution publique avec laquelle rompent les enfants dans leur processus transidentitaire. Le quotidien scolaire est marqué par les moqueries, comme le raconte Daniela : « L’école secondaire a été un moment difficile pour moi [...]. J’étais un objet pour les autres élèves, ils me tripotaient, je ne pouvais pas rentrer aux toilettes parce qu’ils voulaient me toucher, ou se moquer de moi, ils me faisaient des plaisanteries […]. Même si je ne portais pas des vêtements de femme, c’était difficile à l’école, car mes manières féminines étaient présentes : ma façon d’écrire, de m’asseoir, de me lever ».

17 Sur le plan de l’accès à l’emploi, comme dans d’autres recherches [23], nous observons les difficultés rencontrées par nos enquêtéesen raison de leur jeune âge, leur bas niveau de scolarité, la faiblesse de leurs réseaux sociaux et leur identité de genre. Joue également le poids des stéréotypes de sexe, par l’assignation à des secteurs peu rémunérateurs et connotés comme féminins (coiffure, services dans la restauration, services à la personne, etc.). Comme dans la recherche de Josefina Fernández [24], la prostitution demeure alors le seul moyen de subsistance pour la plupart de nos enquêtées. Outre la dimension économique, nous pouvons également y lire la trace d’un imaginaire social, qui repose en partie sur des constructions fantasmées de la sexualité des personnes . De plus, en raison des connotations sociales négatives associées à la prostitution, son exercice peut aussi engendrer une forme de honte, comme en témoigne Juliana : «  »

18 Nous constatons donc que le cumul de cette série de ruptures peut générer une fracture majeure face au rejet de la société, ce que raconte Juliana : « Je suis tombée de nouveau dans une situation de rupture sociale. Toutes les filles qui travaillaient dans les salons de coiffure, étaient dans une situation de rupture. Les uniques endroits où elles étaient acceptées étaient dans la prostitution, dans certains salons de coiffure et dans certaines boîtes. Sinon, c’était dans les bidonvilles où elles étaient obligées de rester. J’ai été aussi condamnée à cette situation, même si j’avais un salon de coiffure […]. Alors, j’ai vécu des périodes de toxicomanie pendant deux ans. J’ai eu beaucoup de problèmes pour m’en sortir, notamment parce que ça [la drogue] me soulageait. Je me rendais dans les quartiers les plus dangereux de Bogotá […]. Et je ressentais toujours la nécessité d’y retourner. J’y allais avec ma meilleure amie, elle aussi toxicomane, et je ressentais que dans ce monde-là, il n’y avait pas d’obstacles pour moi. Je sentais que j’étais acceptée. En fumant, je pouvais fuir une réalité qui m’opprimait ».

L’espoir d’un avenir meilleur et la fierté d’être reconnues

19 Au regard des difficultés rencontrées dans leur pays d’origine en raison de leur transidentité, la migration en Europe a constitué, pour la plupart de nos enquêtées, l’une des rares possibilités de réduire leur situation de forte vulnérabilité, ou d’offrir un espoir face à des perspectives limitées dans leur pays d’origine, comme le montre le témoignage de Juliana : «  […] […] ».

20 La migration des premières brésiliennes venues pour exercer la prostitution à Paris aurait commencé à la fin des années 1970 [25]. Le succès de certaines d’entre elles aurait incité de nombreuses autres à tenter cette aventure migratoire, comme semble le dire Jasmine : « [...][…] [26][...] »

21 L’analyse de ces récits de vie met en exergue la façon dont la migration a pu offrir à nos enquêtées la possibilité d’un rapprochement avec leur famille, après parfois des années de rupture. Cette réconciliation constitue, pour certaines d’entre elles, l’un des aspects considérés comme étant le plus important de leur expérience migratoire. De fait, la plupart ont repris contact et recréé des liens avec plusieurs membres de leur famille en les aidant économiquement. Ce soutien financier s’avère particulièrement important en raison de la classe sociale modeste, voire très défavorisée, dont est issue la majorité de ces migrantes, comme le montre le récit de Sonia : « […] […][…]».

22 Ces constatations vont dans le sens des résultats d’autres recherches : Nancy Prada, Susan Herrera, Lina Lozano et Ana María Ortiz [27] montrent ainsi combien le travail rémunéré de leurs enquêtées occupe une place importante dans leur vie, puisqu’il fournit non seulement les conditions matérielles d’existence, mais aussi un moyen d’aider financièrement leur famille. De la même manière, Don Kulick [28] et Josefina Fernández [29] notent que la prostitution permet aux personnes de tisser de nouvelles relations avec leur famille, dans la mesure où les biens matériels constituent une monnaie d’échange pour une reconnaissance affective. Notre recherche corrobore ces résultats dans la mesure où nous constatons à travers ces différents récits de vie que le soutien financier apporté par nos enquêtées à leurs proches leur permet de (re)trouver une place dans le cercle familial, tout en leur procurant un sentiment de fierté.

23 Pour autant, toutes les personnes enquêtées n’ont pas réussi à (re)tisser des liens avec leurs parents par le biais de cette aide financière. À défaut, certaines ont tout de même pu nouer des relations avec leurs neveux ou nièces en les appelant fréquemment, en les aidant à payer leurs études et en leur offrant des cadeaux pour leur anniversaire. Grâce aux liens établis avec ses neveux et nièces, Maria ressent un sentiment de fierté qui transparaît dans cet échange :

24 « Combien as-tu de frères et de sœurs ? —  […]. Qu’est-ce qu’ils font ? — . Qu’est-ce qu’il fait ? — . Et avec ta sœur ? — . Mais tu parles à tes neveux ? — . C’est-à-dire que tu as des meilleurs rapports avec tes neveux qu’avec tes frères ? - . Tu les considères comme tes fils ? — [elle utilise un ton catégorique]. Ils te ne jugent pas ? — [elle se montre gênée par la question]»

25 L’installation en France permet également aux personnes migrantes trans de mieux gérer les émotions dans leurs rapports de couple. La plupart des partenaires de nos enquêtées sont des clients rencontrés dans l’exercice de la prostitution. Comme peu d’entre eux envisagent une relation de couple avec une personne exerçant la prostitution, de surcroît trans, certaines monnayent ce lien en échange du soutien financier qu’elles leur accordent. Ce type de relations est proche de celles établies par les enquêtées dans leur pays d’origine, ce que Maria souligne : «». Cela rejoint les observations de Denise Pirani, qui affirme que «  [des personnes ] » [30]. Au regard des autres personnes , le fait de pouvoir afficher une relation de couple constitue une source de fierté.

26 D’autres enquêtées, au contraire, ont établi des relations de couple en tentant de reproduire l’idéal d’un « amour romantique » [31]. Pour autant, une telle conception du couple pose question par rapport à l’exercice de la prostitution. Selon certains auteurs [32], c’est d’ailleurs l’une des difficultés à laquelle les personnes en couple doivent faire face. Il arrive que certains partenaires, à un moment donné, leur demandent d’arrêter la prostitution. Or, pour plusieurs d’entre elles, il est impensable de perdre leur indépendance économique, comme en témoigne Vanessa, rencontrée lors de nos observations : «[...]».

27 De plus, l’analyse des récits nous permet d’identifier le rôle que joue cette activité dans le processus de construction de soi. Il est ainsi possible de saisir la jubilation ressentie par Jasmine dans cette exposition de soi, et surtout dans la subversion des rapports de pouvoir : «  ». Ce récit fait écho aux résultats d’autres recherches, puisque pour Don Kulick [33], la prostitution est vécue par certaines comme une activité de réaffirmation de soi. De la même manière, Josefa Fernández [34] montre que la prostitution peut leur permettre de gagner en estime de soi en se présentant comme « spectacle à admirer ». Enfin, Marcos Benedetti [35] voit la rue comme l’espace où les personnes cherchent à se montrer et à séduire.

28 Malgré l’indépendance économique acquise par l’exercice de la prostitution, certaines enquêtées doivent toutefois choisir entre le maintien de leur autonomie financière ou la dépendance économique à l’égard de leur partenaire, au risque d’un retour à la précarité en cas de rupture amoureuse.

La peur de nouvelles ruptures

29 En raison de leur avancée en âge et/ou de certaines lois interdisant l’exercice de la prostitution (notamment en France la loi de mars 2003 de sécurité intérieure [36] et la loi d’avril 2016 pénalisant les clients [37]) [38], certaines enquêtées connaissent des difficultés pour assurer l’aide financière qu’elles fournissent à leurs proches. Face à ce constat, elles expriment un sentiment d’anxiété engendré par la peur d’une rupture familiale probable. Une telle situation peut les fragiliser au niveau émotionnel et les conduire dans un état de dépression [39]. C’est pourquoi, pour atténuer cette peur, certaines enquêtées préfèrent continuer à exercer la prostitution, dans des conditions de plus en plus précaires. Nous retrouvons ainsi ce que Nasima Moujoud [40] met en exergue chez les prostituées sans papiers, qui incarnent selon elle un exemple extrême de sacrifice, dans la mesure où la majorité d’entre elles se privent de dépenses personnelles afin de répondre aux attentes et besoins de leur famille. Néanmoins, le sentiment d’anxiété peut rapidement se transformer en un sentiment de déception lorsqu’elles ne reçoivent pas de manifestation de solidarité de la part de leur famille, comme le montre le témoignage de Daniela : « [...] »

30 Cette déception peut être accompagnée d’une forme de frustration, également présente dans le récit de Daniela : «  […][...] [...] ».

31 Devant cette situation, d’autres au contraire cherchent des alternatives à l’exercice de la prostitution et s’engagent dans un processus d’insertion professionnelle. D’ailleurs, la possibilité d’obtenir une forme de reconnaissance en exerçant une activité moins stigmatisée socialement que la prostitution, rend possibles l’accumulation de capitaux symboliques et la mise en place de nouvelles façons de gérer ses émotions, ce que nous fait comprendre Daniela : «  […] »

32 Toutefois, en raison de la faiblesse de leur capital scolaire, voire même inexistant, leur absence d’expérience professionnelle et leur manque de confiance en elles, conjugués à la transphobie institutionnelle, la plupart de nos enquêtées éprouvent énormément de difficultés à entamer un processus d’insertion professionnelle.

33 Dans la mesure où la peur ressentie à la perspective d’une rupture amoureuse génère moins d’anxiété que celle d’une rupture familiale, ces personnes migrantes privilégient un soutien économique à leur famille. Mais, lorsque la rupture familiale s’avère incontournable, les enquêtées tentent de continuer à soutenir économiquement leur partenaire afin de maintenir un lien affectif avec un proche.

34 D’autres ne s’engagent pas, ou se désengagent. Nous retrouvons ici ce que la recherche de Loretta Baltasar [41] a mis au jour : dans les relations transnationales où les devoirs sont trop lourds à remplir, les individus peuvent se désengager pour éviter que des sentiments de culpabilité ne les accablent et les fragilisent.

35 La solitude semble être une caractéristique qui accompagne la vie des , en raison de l’absence de rapports étroits avec leur famille et des relations fragiles qu’elles entretiennent avec leur partenaire amoureux, comme en atteste le récit de Daniela : «[...] »

36 Cet état de fait est corroboré par nos premiers travaux [42] sur les personnes trans. En ce sens, le principal soutien affectif dont elles bénéficient provient des autres personnes trans, avec qui elles partagent parfois le même lieu de prostitution et/ou le même logement.

Conclusion

37 Notre analyse des parcours de migrantes originaires de pays d’Amérique latine à travers le prisme des émotions nous a permis de mettre en exergue la pertinence de cette grille de lecture. En effet, nous avons pu montrer la situation de vulnérabilité dans laquelle se trouvaient nos enquêtées dans leur pays d’origine, initialement imputable à leur rejet par le cercle familial. Dans ce contexte, le projet migratoire participe d’une volonté de gagner en reconnaissance (de soi par les autres, mais aussi de soi par soi). Même si le recours à la prostitution apparaît comme un pis-aller, le fait de subvertir les rapports de pouvoir et d’engranger un capital qui permet d’aider financièrement la famille est investi comme une ressource, opérant une forme de retournement du stigmate, qui agit comme un acte d’émancipation et est source de fierté. Pour les enquêtées, pouvoir (re)tisser des liens avec leur famille s’avère un élément central, tandis que la rupture avec celle-ci est considérée comme déterminante dans leur parcours de vie. Ces nouveaux liens, même s’ils reposent sur une dimension plus économique qu’affective, participent du processus de (re)construction de soi, la honte originelle (telle que vécue, socialisée dans le cercle familial notamment) se voyant ainsi transformée en fierté ressentie par l’individu lui-même et nécessairement par sa famille.

38 Notre perspective biographique met également en lumière la fragilité de cette (re)construction, dans la mesure où elle peut être limitée dans ou par le temps (problèmes de santé, vieillissement, etc.), et être également entravée par certains dispositifs législatifs.

39 Enfin, soulignons que la place nous a manqué pour explorer une piste très féconde. Dans tous les parcours évoqués ici, la rencontre avec des personnes , en général plus âgées, dans le sillage de la rupture familiale et scolaire a été jugée déterminante, car elle a permis de sortir de l’isolement et d’avoir des figures d’identification. De manière plus générale, que ce soit dans le pays d’origine ou dans les pays d’accueil, partager des lieux, des moments de sociabilité avec d’autres personnes apparaît comme central. Il n’est pas anodin que nombre des personnes enquêtées militent aujourd’hui au sein d’associations en faveur des droits des personnes , notamment migrantes, et qu’elles aient même trouvé, dans le monde associatif, des perspectives et alternatives sur le plan professionnel.

Notes

  • [*]
    Doctorant et attaché temporaire d’enseignement et de recherche en sociologie, membre du Centre d’études et de recherche sur les emplois et les professionnalisations (cerep, EA4692), Université de Reims Champagne-Ardenne.
  • [**]
    Professeure des universités, directrice du Centre d’études et de recherche sur les emplois et les professionnalisations (cerep, EA4692), Université de Reims Champagne-Ardenne.
  • [3]
    ESPINEIRA, Karine, La transidentité. De l’espace médiatique à l’espace public, Paris : Éd. L’Harmattan, 2008, 196 p. ; CALIFIA, Pat, Le mouvement transgenre. Changer de sexe, Paris : Éd. Epel, 2003, 384 p. ; KRIKORIAN, Gaëlle, “Les dilemmes du transsexualisme”, in : LAGRAVE, Rose-Marie ; GESTIN, Agathe ; LEPINARD, Éléonore ; PRUVOST, Geneviève (sous la direction de), Dissemblances. Jeux et enjeux du genre, Paris : Éd. L’Harmattan, 2002, pp. 23-35.
  • [4]
    CALIFIA, Pat, Le mouvement transgenre. Changer de sexe, op.cit.
  • [5]
    BENEDETTI, Marcos, Toda Feita. O corpo e o gênero das travestis, Rio de Janeiro : Garamond, 2005, 142 p.
  • [6]
    KULICK, Don, Travesti: Sex, Gender and Culture among Brazilian Transgendered Prostitutes, Chicago : University of Chicago Press, 1998, 280 p.
  • [7]
    BASTIDE, Loïs, “‘Migrer, être affecté’. Émotions et expériences spatiales entre Java, Kuala Lumpur et Singapour”, Revue Européenne des Migrations Internationales, vol. 29, n° 4, 2013, pp. 7-20.
  • [8]
    KALBERG, Stephen, “La sociologie des émotions de Max Weber”, Revue du MAUSS, vol. 2, n° 40, 2012, pp. 285-299.
  • [9]
    DEONNA, Julien ; TERONI, Fabrice, “L’intentionnalité des émotions : du corps aux valeurs”, Revue Européenne des Sciences Sociales, vol. XLVII, n° 144, 2009, pp. 25-41 (voir p. 28).
  • [10]
    HOCHSCHILD, Arlie R., “Travail émotionnel, règles de sentiments et structure sociale”, Travailler, vol. 1, n° 9, 2003, pp. 19-49.
  • [11]
    REYES, José, Trajectoires migratoires de transgenres sud-américaines ayant exercé la prostitution en France, Mémoire de Master en sciences sociales, Paris : EHESS, 2012, 114 p.
  • [12]
    GIL, Françoise ; HEDJERASSI, Nassira ; RULLAC, Stéphane, Discriminations et stigmatisation d’une population. Le cas des femmes trans’ migrantes, Rapport pour la Région Île-de-France (Programme de soutien en faveur de la lutte contre les discriminations), 2014, 109 p. ; GIL, Françoise ; HEDJERASSI, Nassira ; REYES, José, Enquête sur la population trans’ : intersection de discriminations directes et indirectes, Rapport pour la Région Île-de-France (Programme de soutien en faveur de la lutte contre les discriminations), 2015.
  • [13]
    Les entretiens en espagnol intégralement retranscrits ont été traduits en français.
  • [14]
    Pour préserver l’anonymat des personnes enquêtées, leurs prénoms ont été changés.
  • [15]
    HOCHSCHILD, Arlie R., “Travail émotionnel, règles de sentiments et structure sociale”, art. cité.
  • [16]
    ULISES BORGOGNO, Ignacio Gabriel, La transfobia en América latina y El Caribe. Un estudio en el marco de Redlactrans, Buenos Aires : Redlactrans, 2009, 76 p.
  • [17]
    CABRAL, Mauro, Me preguntaron cómo vivía / sobreviviendo, dije, sobreviviendo: Trans Latinoamericanas en situación de pobreza extrema, New York : IGLHRC, 2009, 17 p.
  • [18]
    VERMOT, Cécile, “Capturer une émotion qui ne s’énonce pas” [En ligne], Terrains/Théories, n° 2, 2015, http://teth.revues.org/224.
  • [19]
    GOFFMAN, Erving, Stigmate : les usages sociaux des handicaps, Paris : Éd. de Minuit, 1975, 180 p.
  • [20]
    HEDJERASSI, Nassira ; REYES, José ; GIL, Françoise, L’expérience de l’école, du travail et de la formation de migrantes transgenres : entre stigmatisation et discrimination, Revue Française d’Éducation Comparée, n°13, 2015, pp. 167-180.
  • [21]
    FERNANDEZ, Josefina, Cuerpos desobedientes. Travestismo e identidad de género, Buenos Aires : Edhasa, 2004, 213 p. ; KULICK, Don, Travesti: Sex, Gender and Culture among Brazilian Transgendered Prostitutes, op. cit.
  • [22]
    PIRANI, Denise, Quand les lumières de la ville s’éteignent : minorités et clandestinité à Paris. Le cas des travestis, Thèse de doctorat en ethnologie, Paris : EHESS, 1997, 323 p. ; FERNANDEZ, Josefina, Cuerpos desobedientes. Travestismo e identidad de género, op. cit.
  • [23]
    PRADA, Nancy ; HERRERA, Susan ; LOZANO, Lina ; ORTIZ, Ana María, ¡A mí me sacaron volada de allá!: relatos de vida de mujeres trans desplazadas forzosamente hacia Bogotá, Bogotá : Universidad Nacional de Colombia, 2012, 287 p. ; KULICK, Don, Travesti: Sex, Gender and Culture among Brazilian Transgendered Prostitutes, op. cit.
  • [24]
    FERNANDEZ, Josefina, Cuerpos desobedientes. Travestismo e identidad de género, op. cit.
  • [25]
    KULICK, Don, Travesti: Sex, Gender and Culture among Brazilian Transgendered Prostitutes, op. cit.
  • [26]
    Terme utilisé pour désigner les trans sud-américaines qui vivent en Europe.
  • [27]
    PRADA, Nancy ; HERRERA, Susan ; LOZANO, Lina ; ORTIZ, Ana María, ¡A mí me sacaron volada de allá!: relatos de vida de mujeres trans desplazadas forzosamente hacia Bogotá, op. cit.
  • [28]
    KULICK, Don, Travesti: Sex, Gender and Culture among Brazilian Transgendered Prostitutes, op. cit.
  • [29]
    FERNANDEZ, Josefina, Cuerpos desobedientes. Travestismo e identidad de género, op. cit.
  • [30]
    PIRANI, Denise, Quand les lumières de la ville s’éteignent : minorités et clandestinité à Paris. Le cas des travestis, op.cit. (voir p. 186).
  • [31]
    GIDDENS, Anthony, Modernity and Self-Identity, Stanford : University Press, 1991, 264 p.
  • [32]
    PRADA, Nancy ; HERRERA, Susan ; LOZANO, Lina ; ORTIZ, Ana María, ¡A mí me sacaron volada de allá!: relatos de vida de mujeres trans desplazadas forzosamente hacia Bogotá, op. cit.
  • [33]
    KULICK, Don, Travesti: Sex, Gender and Culture among Brazilian Transgendered Prostitutes, op. cit.
  • [34]
    FERNANDEZ, Josefina, Cuerpos desobedientes. Travestismo e identidad de género, op. cit.
  • [35]
    BENEDETTI, Marcos, Toda Feita. O corpo e o gênero das travestis, op. cit.
  • [36]
    Loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure.
  • [37]
    Loi n° 2016-444 du 13 avril 2016 visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées.
  • [38]
    Sur le débat concernant l’exercice de la prostitution en France, voir : FASSIN, Éric, “Trans’ et genre : des catégories construites historiquement”, Lettre d’information du CRIPS-CIRDD Île-de-France, n° 84, novembre 2007, pp. 3-4 ; REDOUTEY, Emmanuel, “Trottoirs et territoires, les lieux de prostitution à Paris”, in : HANDMAN, Marie-Élisabeth, MOSSUZ-LAVAU, Janine (sous la direction de), La prostitution à Paris, Paris : Éd. La Martinière, 2005, pp. 39-91 ; VERNIER, Johanne, “La loi sur la sécurité intérieure : punir les victimes du proxénétisme pour mieux les protéger ?”, in : HANDMAN, Marie-Élisabeth, MOSSUZ-LAVAU, Janine (sous la direction de), La prostitution à Paris, op. cit., pp. 121-152.
  • [39]
    KULICK, Don, Travesti: Sex, Gender and Culture among Brazilian Transgendered Prostitutes, op. cit. ; PRIEUR, Annick, Mema’s House, Mexico City: On Transvestites, Queens and Machos, Chicago : University of Chicago Press, 1998, 293 p.
  • [40]
    MOUJOUD, Nasima, “Prostitution et migration de Maghrébines”, in : HANDMAN, Marie-Élisabeth, MOSSUZ-LAVAU, Janine (sous la direction de), La prostitution à Paris, op. cit., pp. 199-233.
  • [41]
    BALDASSAR, Loretta, “Ce ‘sentiment de culpabilité’”, Recherches Sociologiques et Anthropologiques, vol. 41, n° 1, 2010, pp. 15-37.
  • [42]
    URREA, Fernando ; REYES, José ; CASTANO, Jairo ; VIERA, Oswaldo, “Entre la transgresión subversiva y el conservadurismo de género : transgeneristas negras”, in : URREA GIRALDO, Fernando ; POSSO QUICENO, Jaenny (sous la direction de), Feminidades, sexualidades y colores de piel : mujeres negras, indígenas, blancas-mestizas y transgeneristas negras en el suroccidente colombiano, Cali : Programa editorial Universidad del Vale, 2015, pp. 471-513.
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