L’octroi à ce dernier livre en date de Lee Grieveson du Limina Award 2018 pour le meilleur livre international en études cinématographiques, prix accordé par les comités scientifiques de la revue Cinéma & Cie et du colloque annuel d’Udine, produit ou révèle une situation tout à fait intéressante. Notre discipline se trouve en effet reconnaître ainsi comme l’une de ses plus importantes contributions récentes un ouvrage en profond décalage avec ses préconisations dominantes. La méthode historique employée ici par le professeur en histoire des médias à University College London diffère en effet assez radicalement de ce qui se fait de nos jours dans la plupart des revues et des colloques spécialisés. Elle s’en écarte consciemment et délibérément. En fait, le livre peut se lire entièrement comme une critique tranchante sinon rageuse de l’état actuel de la discipline, critique qu’il formule explicitement à plusieurs reprises et qui clôt le volume sous le titre piquant de « Discipline and Publish » (p. 334) – référence bien sûr à l’histoire de la prison de Michel Foucault, dont le titre anglais est Discipline and Punish. Son histoire, écrit-il d’emblée, est « polémique » (p. 19).
La question fondamentale au cœur du projet de Grieveson est politique. Il s’agit de reprendre une histoire des médias – principalement du cinéma, mais la radio est aussi évoquée – qui en réinterroge la dimension politique, tout en questionnant le statut de cette question politique aujourd’hui dans les études universitaires qui s’y intéressent…