Vues depuis l’extérieur, les élections présidentielles états-uniennes ressemblent parfois à une sorte de spectacle grandiose, un art des foules et de l’enthousiasme, mobilisant discours et images, musique, ballons de baudruche, haut-parleurs, traditions cultuelles, bons et mauvais sentiments, et bien sûr, médias. La télévision y joue un rôle majeur et bien connu depuis longtemps, mais on a vu ces dernières années l’importance grandissante d’internet. Charles Musser ouvre son livre avec l’impact de la vidéo du discours « Yes We Can » de Barack Obama, qui devint un phénomène sur Youtube (p. 1) – et l’on a vu combien Twitter pesa sur la campagne de Donald Trump et Hillary Clinton, exactement contemporaine de la sortie de cet ouvrage.
Le premier geste théorique posé ici par Musser consiste à affirmer justement ces élections comme objet. Le professeur de l’université de Yale est, on le sait, l’un des historiens qui ont profondément renouvelé, depuis leur intervention au colloque de Brighton, l’historiographie du cinéma des premiers temps. Auteur notamment de The Emergence of Cinema (1990), premier tome de la History of American Cinema dirigée par Charles Harpole, de Before the Nickelodeon sur Edison et Porter (1991), d’une filmographie annotée des films Edison produits entre 1890 et 1900 (1997), il proposa plusieurs idées importantes, depuis l’intégration du cinéma dans l’ensemble appelé « screen practice » jusqu’à la considération du rôle créatif des exploitants dans les premières années…