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Article de revue

L’innovation inverse : clarification conceptuelle et essai d’évaluation quantitative

Pages 47 à 61

Notes

  • [1]
    Université Paris-Est, Laboratoire Interdisciplinaire Sciences, Innovations, Société (LISIS-CNRS) – Institut Francilien Recherche Innovation Société (IFRIS), Noisy Le Grand (France). patricia.laurens@esiee.fr
  • [2]
    Université catholique de Lyon, ESDES Lyon Business School. clebas@univ-catholyon.fr
  • [3]
    « Frugal innovations based on new product architectures are often quite disruptive » (Zeschky, Winterhalter, Gassmann, 2014, 3).
  • [4]
    On traduit souvent ce terme anglais par “innovation de rupture”. Le terme apparaît trop fort. Le terme “innovation perturbatrice” nous semble préférable.
  • [5]
    Ces auteurs sont considérés comme étant les premiers à avoir introduit le concept d’II.
  • [6]
    Ils écrivent, en effet, page 20 : « Instead of customizing the western world products to local markets, these companies are increasingly developing products from scratch for the local consumers. They are engaging in frugal & reverse innovations, by developing affordable products and solutions with “good enough” functionalities and minimum frills, and later on, introducing them to the developed countries. »
  • [7]
    « More and more, companies are redeploying their resource-constrained innovations to Western markets, to attract cost-minded customers or to fill gaps in these large, developed markets » (Zeschky et al., 2014, 7).
  • [8]
    Ainsi que le remarque Talaga (2010, 1400), « OI uses sharing of IP as the ‘currency’ to drive collaborative research, it should help to decrease the initial R & D financial investments and, thus, probably allow pharmaceuticals to continue investing in risky innovative R & D activities. »
  • [9]
    Par exemple, comme le remarque Talaga (2010, 1400) pour l’industrie pharmaceutique, « the economical downturn may well be one of the principal drivers that pushes companies such as Johnson & Johnson, GSK or Sanofi-Aventis, to proactively adopt the OI business model as a new way to fill pipelines with innovative drugs ; moving away from the traditional ‘merger and acquisition game’. »
  • [10]
    Une autre serait de s’allier avec elles.
  • [11]
    Le tout avec des risques moindres.
  • [12]
    Une approche qualitative est possible pour attester de la réalité de l’II, voir le travail de Hadengue et al. (2015) sur l’industrie pharmaceutique chinoise.
  • [13]
    Ces citations sont le fait des déposants de brevets, mais aussi parfois des examinateurs.
  • [14]
    L’entrée de l’Inde dans l’Organisation mondiale du commerce (OMC), en 1995, a obligé le pays à se mettre en conformité avec les lois internationales de la propriété intellectuelle. Il autorise la prise de brevet sur les produits pharmaceutiques et les médicaments, mais conserve certaines règles particulières (dont des cessions obligatoires de licence).
  • [15]
    Le brevet cité peut être le brevet prioritaire lui-même ou une de ses extensions géographiques ultérieures. La recherche de citations se fait ainsi sur l’ensemble des brevets avec inventeurs uniquement « indiens » de la famille du brevet prioritaire. La fenêtre de citations de 5 ans est calculée sur la base de l’année de dépôt du brevet prioritaire.
  • [16]
    L’usage des citations dans les brevets étant très variable selon les offices de propriété intellectuelle, utiliser le nombre de citations reçues nécessite de prendre de nombreuses précautions (OECD, 2009).
  • [17]
    Dont la qualité des médicaments génériques a été contestée en Europe et aux USA (voir Huffingtonpost, 27 janvier 2014).

1 Les activités d’innovation des économies émergentes du Sud ont gagné en importance dans le fonctionnement et la croissance des activités d’innovation au niveau mondial (voir, par exemple, Corsi et Minin, 2011). La possibilité de transférer vers le Nord industriel développé des technologies nouvelles (concernant les produits comme les procédés de fabrication) mises au point dans le Sud constitue un phénomène récent mais plus marginal. Lorsque ce transfert donne lieu à des modifications des produits ou des procédés, de façon à adapter les technologies aux standards du Nord ou du marché mondial, on analyse ce processus comme de « l’innovation inverse » (reverse innovation). Selon Nunes and Breene (2011, 2) « reverse innovation is developing and selling new products in emerging markets as a first step and then modifying these products for sale in developed countries. » Dans la littérature, ce thème est très souvent mis en rapport avec les méthodes d’innovation frugale et la fabrication de produits dits « low-cost », bien qu’il ne soit pas certain que les produits « low-cost » du Nord soient toujours associés à des retombées dans le Nord des innovations frugales réalisées dans le Sud (Laperche et Lefèbvre, 2012).

2 L’objet de cet article est double. D’abord permettre une clarification du concept. Cela sera fait en soulignant les enjeux stratégiques qui se trouvent liés aux pratiques de l’innovation inverse. On envisage également les déterminants potentiels de ce type de pratiques. Ensuite, on offre une évaluation quantitative de l’échelle et de la variété du phénomène par l’usage de données de brevets concernant l’Inde. Dans ce travail, la définition de l’innovation technologique que l’on retient est celle fournie par Pavitt (2003). L’innovation est l’emboîtement de trois processus se recoupant partiellement : 1/ La production de connaissances scientifiques et technologiques nouvelles. 2/ La transformation de ces savoirs en outils (workings artefacts) : produits, systèmes, processus et services, 3/… en réponse à (ou en correspondance avec) une demande marchande et des besoins d’utilisateurs. Cette définition tend bien à montrer que les connaissances nouvelles constituent la base des processus innovants.

3 Nous étudierons en premier lieu la question de la « reverse innovation » dans le contexte de l’innovation frugale, puis dans celui du cycle de vie du produit, deux approches pertinentes qui sont mobilisées dans la littérature. On situe ensuite le phénomène par rapport à la stratégie d’innovation ouverte (open innovation) et à la conjoncture de croissance faible. Dans les deux dernières parties nous présentons notre méthodologie quantitative, puis nos données construites visant la mesure de l’invention inverse.

1. La question de la « reverse innovation » dans le contexte de l’innovation frugale

4 Dans la littérature, l’innovation inverse est très souvent associée à un type d’innovation réalisée dans le Sud, l’innovation frugale (par exemple, Brem et Wolfam, 2014). C’est elle qui contient des propriétés particulières intéressant les marchés mondiaux (et donc ceux du Nord). Toutefois, innovation frugale et innovation inverse ne sont pas identiques La spécificité de l’innovation inverse peut être déduite de la typologie des innovations proposée par Zeschky, Winterhalter, Gassmann (2014). Ils distinguent : 1/ L’innovation de coût (cost innovation). Dans cette configuration, le produit a les mêmes fonctionnalités, mais il est fabriqué à un coût plus bas. On reste ici dans le cadre de l’innovation technologique classique. 2/ L’innovation assez bonne (good enough innovation) : elle permet d’adapter les fonctionnalités aux marchés ou aux types d’utilisateurs avec un coût plus bas (les produits sont repensés (re-engineered) pour les adapter aux types de marché). 3/ L’innovation frugale, qui permet la création de produits avec de nouvelles fonctionnalités, toujours à un coût plus bas [3]. L’innovation inverse correspond à des innovations de type « low-cost » des pays émergents. Leur définition est claire : « … reverse innovations are cost, good-enough, or frugal innovations that find a market among customers outside of the emerging markets at which they were originally targeted » (Ibid., 3). Leurs travaux permettent de mieux poser les relations des emprunts entre les différentes catégories d’innovation à travers la production de nouveaux concepts. Deux caractéristiques sont choisies : le degré de nouveauté technologique et le degré de nouveauté du marché auquel s’adresse l’innovation. L’innovation frugale serait fondée sur de nouvelles architectures de produits. En cela, elle est déstabilisante ou perturbatrice (disruptive[4]), bien que produite avec de faibles ressources et pour des marchés de consommateurs à faibles revenus. Elle apparaît ainsi beaucoup plus « nouvelle » que les deux autres catégories du point de vue du contenu technologique comme du point de vue des perspectives de marché car elle peut avoir des applications entièrement nouvelles (Zeschky et al., 2014). Cela conforte l’idée qu’elle correspond bien à un nouveau paradigme technologique (Haudeville et Le Bas, 2016). Par rapport à ces trois types d’innovation, l’innovation inverse (II par la suite) renvoie plus à une question de marchés qu’à celle d’un contenu technologique. En effet elle peut correspondre à de l’innovation « low-cost », comme à de l’innovation « good enough » ou frugale.

5 La littérature est unanime pour considérer que l’innovation frugale est plutôt spécifique au pays en développement. Toutefois, nombre de recherches traitent de la possible « reverse innovation », c’est-à-dire de la possibilité de transférer vers le Nord des technologies (produits et procédés) et des méthodes frugales. Mais il n’est pas certain que tous les produits « low-cost » conçus et fabriqués dans le Nord constituent des retombées des innovations frugales réalisées dans le Sud. Le « low-cost » du Nord n’est peut-être pas dans la continuité de l’innovation frugale du Sud car la notion de pauvreté dans les deux hémisphères n’a pas le même contenu. La littérature souligne, en revanche, que les filiales dans le Sud de grandes firmes du Nord développent un volume significatif d’innovations frugales (Zeschky et al., 2014). L’enjeu, il nous semble, est plus de savoir si, comme certains l’ont défendu, l’innovation frugale pourrait s’intégrer aux normes occidentales de management pour construire de nouvelles perspectives d’innovation. Par exemple, pour Carlos Ghosn, les pratiques « low-cost » de Renault seraient directement inspirées de la logique de l’innovation frugale (voir ses remarques sur le modèle Logan dans Radjou et al., 2013). Il y a certainement de bonnes pratiques au sein de l’innovation frugale dont l’ingénierie de l’occident peut s’inspirer. Dans le même esprit, l’innovation frugale peut être un complément à l’innovation plus structurée (Ibid.).

6 Selon Brem et Ivens (2013), les notions d’innovation frugale et d’innovation inverse se réfèrent à un concept d’innovation finalement identique : bas coûts de recherche-développement (R-D), faible sophistication technologique, réponse aux besoins fondamentaux des consommateurs. En conséquence, elles permettent de vendre à des prix peu élevés. La différence entre les deux types d’innovation proviendrait des marchés. Les produits correspondants à l’innovation frugale sont, en général, développés pour le marché domestique et n’ont pas vocation à être distribués au niveau mondial. D’un autre côté, l’innovation inverse « has the goal to develop market-oriented products in and for emerging economies through globalized innovation teams, which are meant to be sold worldwide from the beginning » (Immelt et al.[5], 2009, 60). Nunes et Breene (2011) sont plus clairs quand ils avancent que la différence entre innovation frugale et innovation inverse est liée au fait que les produits de l’innovation inverse sont en premier lieu développés pour les marchés des économies émergentes, puis modifiés pour être vendus dans les pays développés. Notons que l’II ne peut correspondre à un simple transfert de connaissances technologiques au sein des firmes multinationales. Elle implique des compétences managériales et technologiques fortes, et donc de l’expérience (von Zedtwitz et al., 2015). Plusieurs types d’II comme processus existent selon que l’acteur central soit une firme multinationale (FMN), une FMN de la Triade, ou une quelconque entreprise (Radojevic, 2015).

2. L’innovation inverse, l’internationalisation de la recherche-développement et la problématique du cycle de vie de Vernon

7 L’innovation inverse tend à « renverser » le sens des transferts de connaissances. Dans ce concept, les idées viennent des économies en développement, ou émergentes, pour produire des biens vendus sur les marchés globaux et peut-être avant tout sur les marchés du Nord. Elle tend à remettre en question la vieille approche du cycle de vie élaborée par Vernon.

8 Vernon (1966), le premier, a proposé une théorie du cycle de vie du produit appliquée au commerce international. Quatre étapes rythment l’insertion d’un produit dans le commerce international. Le produit nouveau est d’abord fabriqué et vendu aux États-Unis. Dans la seconde phase, dite de croissance, le produit, déjà plus standardisé, peut être vendu sur le marché mondial. Compte tenu de l’apparition de concurrents étrangers, les firmes américaines délocalisent alors leur production à l’étranger. Enfin, dans la toute dernière étape, il n’y a plus de production du bien sur le territoire américain, la demande qui subsiste est finalement satisfaite par des importations en provenance des filiales américaines à l’étranger. Mansfield et Romeo (1984) furent parmi les premiers à questionner le schéma de Vernon ; ils notent l’existence de transferts inverses de connaissances au sein de FMN (américaines notamment) à partir de filiales localisées à l’étranger vers les firmes américaines basées aux USA. Ils soulignent que ce transfert est, en réalité, tout à fait conséquent. Il témoigne du fait que les filiales à l’étranger ne sont plus simplement dédiées à l’adaptation au contexte local de technologies américaines. Elles peuvent également viser la création de nouveaux produits et l’amélioration d’anciens. Dans leur échantillon de firmes, les filiales sont principalement localisées au Canada et en Europe et non dans le Sud.

9 Les premières versions de ce modèle du cycle de vie du produit reposent implicitement sur deux hypothèses : 1) les innovations sont presque toujours produites dans les pays d’origine des FMN (home base), 2) la diffusion internationale des activités économiques est propulsée par les firmes leaders technologiques. Cantwell (1995) a questionné ces deux hypothèses. Il a montré à partir de données de brevets américains que la première n’est pas (plus ?) valide. La seconde reste pertinente, encore que, au cours des dernières années, la globalisation des activités technologiques a pris beaucoup plus la forme de la production/exploitation de réseaux internationaux de connaissances.

10 Il faut nécessairement complémenter l’approche du cycle de vie à la Vernon par les recherches menées sur les motifs d’internationalisation de la R-D des grandes firmes. Beaucoup d’auteurs ont suggéré qu’une partie significative de la R-D réalisée en dehors du territoire national visait à fournir une aide technique aux infrastructures présentes à l’étranger, en particulier de manière à adapter les produits et les procédés existants de ces entreprises aux conditions particulières locales ou aux besoins des consommateurs étrangers (voir ici les travaux pionniers de Medcof (1997) et de Ronstadt (1978)). On est dans une problématique que Hewitt (1980) avait appelé recherche-développement de produits d’adaptation (product adaptive R & D). On a récemment parlé de glocalization, c'est-à-dire de l’adaptation de produits globaux à des besoins beaucoup plus locaux. Il semble bien que s’appuyant sur la base de connaissances acquises dans ces processus technologiques d’adaptation, les firmes internationalisées dans le Sud ou les pays émergents disposent de produits différents de ceux vendus dans, ou autour, de leur base nationale. On tient là un potentiel en faveur de l’innovation inverse car il devient très facile de rapatrier ces produits une fois reconfigurés vers le Nord. C’est un tel processus qu’envisagent Agarwal et Brem (2012) [6].

11 Un autre fait stylisé est l’émergence de pays devenus des contributeurs importants de la production technologique mondiale. Les pays émergents constituent maintenant des foyers essentiels d’innovation (Hadengue et al., 2015). Ce phénomène a pu être considéré en partie comme lié à une augmentation significative des inventions provenant des filiales étrangères des FMN (Athreye et Cantwell, 2007). Ces faits ne correspondent pas aux éléments pris en compte dans le modèle de Vernon. Ces nouveaux acteurs dans les activités technologiques mondiales sont issus principalement, mais pas seulement, du groupe des BRIC. Un levier de ce développement est que les FMN du Nord ne peuvent pas répondre par des produits adaptés à tous les besoins des pays du Sud. En particulier, elles ne peuvent pas toujours répondre de façon profitable à la demande qui s’exprime sur les marchés de masse des classes moyennes (ou plus pauvres) de ces pays. Vendre sur ces marchés requiert souvent des produits différents s’appuyant sur des technologies de rupture (disruptive technology, selon les termes de Hart et Christensen, 2002).

12 Bien que le modèle de Vernon soit très général et s’applique aussi aux relations au sein des économies du Nord, dans le passé, la voie standard du transfert de technologies était du Nord vers le Sud. Aujourd’hui, l’innovation inverse témoigne précisément d’un réel renversement [7] : les idées viennent des économies en développement, ou émergentes, pour produire des biens vendus sur les marchés globaux et peut-être avant tout sur les marchés du Nord. Remarquons que si l’innovation frugale colle trop fortement à son environnement du Sud, il devient plus difficile « de l’inverser » ; elle ne peut offrir de nouvelles opportunités de marché dans le Nord. Pour Immelt et al. (2009), l’innovation inverse consiste à prendre des opportunités dans les pays émergents et de faire de la valeur dans les pays riches. L’idée est que si ce ne sont pas les FMN du Nord qui le font, elles seront rapidement concurrencées par les grandes firmes des pays émergents. La stratégie de l’innovation inverse ne peut être en aucun cas une stratégie hégémonique, au moins dans les conditions actuelles du développement de la technologie et des marchés. La stratégie dominante reste celle dite de glocalization : créer et développer des produits au Nord, les vendre sur les marches mondiaux avec des adaptations aux conditions locales (normes, goûts, …).

13 Remarquons un point important. Prenons le cas des produits conçus et manufacturés dans le Sud, mis aux normes du Nord (ingénierie faite dans le Nord) puis (avec éventuellement des transformations dans leurs technologies) vendus dans le Nord. Toutes ces opérations peuvent être réalisées par des firmes du Sud ou de pays émergents, mais aussi au sein d’une même firme multinationale du Nord. On a donc bien deux configurations : 1) soit une II initiée par une firme du Sud, 2) soit une II initiée par une FMN présente dans le Sud. Dans le dernier cas, il y a alors des transferts de savoirs et d’idées au sein d’une même firme. On verra dans notre analyse quantitative que cette dernière configuration est loin d’être mineure.

3. L’innovation inverse et le modèle d’open innovation

14 L’open innovation (OI) constitue un paradigme reposant sur l’idée que les firmes doivent capitaliser des idées venues de l’extérieur à tous les stades de la chaîne logistique de la production d’innovation, en clair, des idées générales ou de développement industriel (Chesbrough, 2003). Les combiner avec des connaissances produites en interne constitue la voie permettant les progrès technologiques et de produire de la valeur pour l’entreprise. Acheter des brevets (ce qui n’exclut pas d’en vendre), partager des projets de R-D, créer des alliances, etc., forment autant de voies stratégiques permettant de réduire les coûts, les risques et les ressources investies nécessaires à l’innovation [8].

15 L’II peut être considérée comme une pratique impliquant une stratégie de type OI mais cette fois sur une échelle désormais planétaire. En effet l’II signifie s’appuyer sur des inputs de connaissance créés dans le Sud pour construire des innovations générées dans, et pour, le Nord. Même si une importante fraction de ce processus d’absorption et de transfert se trouve être interne à une grande firme multinationale, des inputs de connaissances sont nécessairement rassemblés dans le Sud pour mettre au point localement l’invention qui sera produite et valorisée dans le Sud d’abord et, éventuellement, rapatriée vers le Nord. Les firmes multinationales tendent à collaborer dans le Sud avec des firmes locales (Hadengue et al., 2015). L’OI est favorisée grandement par les comportements de réseaux permis par internet et l’usage de plates-formes d’échange d’informations sur une échelle mondiale. Les entreprises du Nord se trouvent ainsi connectées avec des innovateurs localisés partout dans le monde.

4. L’innovation inverse dans le contexte macro-économique de croissance ralentie

16 Nombre d’experts reconnaissent que la crise économique et la faible croissance dans les grands pays industriels européens ont ouvert une période d’incertitudes fortes sur les potentialités de la croissance future. Cela occasionne des coûts de R-D plus élevés, et des restrictions financières plus marquées pour la réalisation des activités de recherche. Un tel diagnostic a été réalisé pour l’industrie pharmaceutique par Talaga (2010). Dans ce contexte l’OI constitue une voie stratégique pour poursuivre des activités et des projets de R-D qui apparaissent plus risqués qu’auparavant. En revanche, l’II fournit des occasions d’accès à des inventions produites dans le Sud pour ensuite les mettre en œuvre au niveau mondial. Ces pratiques se font à des coûts de R-D décroissants, à travers des partenariats ou des transferts internes au sein des FMN. Elles tendent à diminuer les risques inhérents aux projets d’innovation puisque les innovations souches réalisées dans le Sud ont déjà été acceptées par les marchés (au moins dans le Sud) et que des directions de recherche quant à leur amélioration/adaptation sont déjà envisageables. La crise économique ou la croissance lente poussent également les grandes firmes à adopter des démarches d’OI [9].

17 La faible croissance économique dans les pays du Nord a, d’autre part, réduit le pouvoir d’achat d’une partie des consommateurs dans les pays développés. Aussi, des produits de type « low-cost » peuvent être de grande valeur sur des segments de marché des pays avancés. C’est cela que notaient Hart et Christensen (2002). Dans cette perspective, le rôle des firmes multinationales chinoises avait retenu l’attention (Zeng et Williamson, 2007) : fabriquant sur leur marché domestique des produits à bas coûts mais avec des technologies très souvent sophistiquées et offrant une grande variété de choix aux consommateurs. De tels produits sont de grande valeur pour les consommateurs. Une des recommandations de Zeng et Williamson (2007) à l’attention des grandes firmes du Nord est de battre les firmes chinoises avec les mêmes armes, entrer dans le modèle d’innovation à « low-cost » et peut-être s’éloigner du modèle d’innovation reposant sur la sophistication [10].

18 La croissance lente enregistrée dans beaucoup de pays industriels du Nord (en particulier européens) joue en faveur de l’innovation inverse via deux effets :

19

  1. l’II tend à économiser des dépenses de R-D parce que l’II fait qu’on ne « réinvente pas la roue » en adaptant aux normes et aux besoins du Nord des technologies déjà maîtrisées dans le Sud et parce que les technologies sont moins complexes [11] ;
  2. l’II permet de répondre à une demande de consommation à croissance faible, voire stagnante, et à des besoins des populations les moins riches du Nord.

5. Méthodologie pour une quantification de l’innovation inverse [12]

20 Notre hypothèse fondatrice est que le système de brevet qui délivre de riches informations sur les processus d’invention et les éléments de savoir qu’elle implique constitue un bon référent pour marquer l’II. L’obligation de citer les brevets qui constitue l’état de l’art renseigne sur les éléments de connaissances sur lesquels les entreprises s’appuient. L’usage de la méthodologie des citations de brevets permet de cartographier les flux de connaissances entre firmes, secteurs, nations (Trajtenberg, 1987 et 1990). Quand un déposant cite un brevet, on peut admettre que le citant s’appuie sur les connaissances technologiques contenues dans le brevet cité (ou les reprend de manière à les dépasser). Les connaissances technologiques nouvelles contenues dans le brevet citant sont construites pour partie sur les connaissances anciennes du brevet cité [13]. Ainsi, les citations de brevets constituent une source très riche de transferts potentiels de connaissances entre firmes (Michel et Bettels, 2001 ; Schmoch, 1993) ou régions (Maurseth et Verspagen, 2002 ; Jaffe et al., 1993). Compte-tenu de ses caractéristiques, la méthodologie des citations est très appropriée pour décrire les flux de connaissances du Sud vers le Nord. Bien évidemment, tous les transferts ne sont pas pris en compte dans les documents de brevets. D’autre flux existent et contribuent à la production de nouvelles connaissances économiques. Ils peuvent passer par la mobilité des hommes, les contrats de licences, ou des transferts de connaissances codifiées. Une partie de ces transferts passent certainement par les firmes multinationales implantées aussi bien dans le Nord que dans le Sud.

21 Un brevet déposé et accordé dans un système de brevets donne les informations suivantes : les noms et pays des déposants, les noms et adresses des inventeurs, les champs technologiques dans lesquels le brevet est déposé, les brevets qui constituent l’état de l’art, les autres éléments constitutifs de l’état de l’art, comme les références à la littérature scientifique, les revendications précises de la nouveauté technologique.

22 Notre approche sera la suivante : nous essayons de regarder dans le potentiel d’invention de l’Inde, un grand pays du Sud, la part qui peut faire l’objet d’un transfert inverse. Le potentiel d’innovation est mesuré par les brevets inventés par des inventeurs basés en Inde (nommés inventeurs « indiens » de par le fait qu’ils donnent une adresse de résidence située en Inde). Ce choix a au moins deux limites. D’une part, l’Inde n’est entrée que récemment dans l’ère du brevet, bien que ce pays ait été longtemps réfractaire aux actifs de propriété industrielle, en particulier dans le domaine pharmaceutique [14]. Ses brevets ne couvrent qu’une partie de son potentiel d’innovation. D’autre part, dans ce pays, une grande partie de ce potentiel correspond à des améliorations techniques de faible portée et très souvent non brevetées. Néanmoins, on pense capter une partie significative du potentiel d’innovation d’un pays du Sud, y compris des innovations correspondant au mode frugal.

6. Échelle et variété de l’innovation inverse : l’exemple des inventions brevetées de l’Inde

23 On sélectionne à partir des adresses des inventeurs, l’ensemble des brevets prioritaires produits uniquement par des inventeurs localisés en Inde. Ces brevets correspondent à de nouvelles inventions réalisées sur le sol indien (mais pas nécessairement des innovations frugales). Précisément, nous travaillons sur les brevets inventés par des inventeurs localisés en Inde et ayant fait l’objet de demandes de dépôt de brevets recensées dans la base Patstat (version avril 2014) entre 1995 et 2005. On sélectionne ensuite parmi l’ensemble des brevets indiens prioritaires publiés ceux ayant fait l’objet de citations dans les 5 ans suivant leur demande de dépôt (brevets cités) [15]. Pour ces brevets, on recueille les informations relatives aux brevets indiens cités (noms et pays des déposants, nombre de citations reçues) et aux brevets citants (noms et pays des déposants). Parmi les 8 209 brevets prioritaires avec des inventeurs « indiens » déposés entre 1995 et 2005 et publiés dans Patstat 2014, un tiers (2 748 brevets) ont été cités. On comptabilise 10 158 brevets citants différents, impliquant au total 33 750 déposants. Les brevets « indiens » cités sont le plus souvent des brevets qui ont fait l’objet de publication aux États-Unis (soit que le brevet prioritaire ait été déposé aux États-Unis, soit qu’il ait fait l’objet d’une extension géographique ultérieure dans ce pays). Les brevets cités reçoivent un nombre très variable de citations (de 1 à plus de 800 citations), mais plus de la moitié d’entre eux ne reçoivent qu’une à deux citations [16].

24 Les brevets inventés par des inventeurs en Inde ont été déposés par des déposants principalement localisés en Inde (65 % des brevets comportent un déposant en Inde) ou aux États-Unis (dans 40 % des brevets on trouve une adresse de déposant aux USA). En dehors de ces deux pôles géographiques, très peu de brevets proviennent de déposants présents en Europe ou ailleurs dans le monde (1,5 % des brevets ont une adresse en Allemagne, 0,8 % en Grande-Bretagne et 0,5 % en France). Si l’utilisation des compétences technologiques basées en Inde pour produire de l’innovation technologique pouvant donner lieu à l’innovation inverse est concentrée aux États-Unis et en Inde, l’exploitation qui est faite de ces technologies pour produire dans d’autres espaces de nouvelles technologies est beaucoup diversifiée géographiquement. En effet, les brevets citant des brevets « indiens » sont le fait de brevets provenant de déposants situés aux États-Unis (48 %), en Inde (12 %), Allemagne (6 %), Japon (6 %), Corée du Sud, Grande-Bretagne, France, Israël, Pays-Bas (3 % chacun), ou encore Chine ou Suisse (1,5) %. Si les pourcentages donnés ici doivent être pris avec précaution, puisque provenant de brevets déposés dans des offices différents (essentiellement aux USA, mais également à l’Office européen des brevets, en Australie, Grande-Bretagne, Allemagne, Corée du Sud, France), il n’en demeure pas moins que les brevets indiens font l’objet de citations dans un univers géographique beaucoup plus large que celui dans lequel ils sont produits (effet de diffusion géographique).

Tableau 1

Principaux déposants des brevets indiens cités et nombre de brevets cités

Déposants des brevets « indiens » cités Nbre de brevets cités
Council of Scientific & Industrial Research (Inde) 600
IBM (USA) 232
Texas Instrument (USA) 90
General Electric (USA) 79
Hetero Drugs (Inde) 75
Honeywell International (USA) 71
Hewlett-Packard (USA) 68
Cisco Technology (USA) 61
Biocon (Inde) 56
Symantec (USA) 54
Intel (USA) 52
Sun Microsystems (USA) 43
Ranbaxy Laboratories (USA) 40
Cipla (Inde) 32
Broadcom Corporation (USA) 30
Oracle International (USA) 30
Lupin (Inde) 27
figure im1

Principaux déposants des brevets indiens cités et nombre de brevets cités

Patstat (2014), nos propres calculs.

25 L’organisme indien de recherche, le Council of Scientific and Industrial Research (CSIR), financé par le Ministère de la Science et de la Technologie, le premier déposant de brevets inventés en Inde, est l’organisation qui reçoit le plus grand nombre de citations (tableau 1). Viennent ensuite principalement des grandes entreprises d’origine américaine du secteur des technologies de l’information et de la communication (TIC) (IBM, Texas Instruments, HP, …) et, de façon très contrastée, des grandes entreprises indiennes du secteur pharmaceutique (Hetero Drugs, Biocon, Ranbaxy Laboratories, Cipla, …).

26 On peut ainsi considérer qu’il y a dans les brevets des inventeurs indiens, à côté de la R & D menée dans le cadre d’instituts de recherche publics, deux grands pôles impliquant la recherche privée : celui des brevets du secteur des TIC (impliquant essentiellement des firmes américaines comme déposant) et des brevets du secteur pharmaceutique (mais avec des déposants indiens).

Tableau 2

Les principaux déposants des brevets citant les brevets indiens

Déposants des brevets citants Citations émises
IBM (USA) 531
Microsoft (USA) 365
Council of Scientific & Industrial Research (Inde) 323
Teva Pharma (Israël) 153
Samsung Electronics (Japon) 107
Intel (USA) 105
Cisco Technology (USA) 102
Hewlett-Packard (USA) 101
Symantec (USA) 101
General Electric (USA) 99
Oracle America (USA) 99
Ranbaxy Laboratories (Inde) 94
Hitachi (Japon) 82
Qualcomm (USA) 82
Sun Microsystems (USA) 78
Texas Instrument (USA) 73
Google (USA) 69
Nokia (Finlande) 68
SAP (Allemagne) 65
Fujitsu (Japon) 63
Broadcom (USA) 59
EMC (USA) 58
Sony (Japon) 56
Siemens (Allemagne) 54
figure im2

Les principaux déposants des brevets citant les brevets indiens

Patstat (2014), nos propres calculs.

27 S’agissant des entreprises du pôle des technologies de l’information on voit très clairement que la grande majorité de celles qui citent les brevets « indiens » (tableau 2) sont également celles qui en déposent : IBM, INTEL, Cisco, HP, Texas Instrument, Sun Microsystems. Elles sont principalement américaines. On a donc ici un modèle déjà décrit par Mansfield et Romeo (1984) et repris par Agarwal et Brem (2012) : des inventions produites en Inde (par des inventeurs indiens), protégées par des brevets déposés par de grandes sociétés américaines, donnent lieu à des inventions nouvelles que l’on peut qualifier d’inverse, puisqu’elles prennent appui sur des bases de connaissances nées dans le Sud et visent un marché principalement occidental. Pour ce qui est du second bloc de brevets, ceux de la pharmacie, on voit que les entreprises TEVA et Ranbaxy [17], toutes les deux connues pour leur forte activité dans les médicaments génériques, sont les inventeurs de nouveaux médicaments brevetés s’appuyant sur les brevets déposés par des entreprises indiennes. On a affaire ici à un modèle entièrement différent d’II.

28 Revenons maintenant à l’objet de cette étude. Un quart des brevets dans lesquels se trouvent impliqués des inventeurs indiens se trouvent cités, ce qui correspond à la matière première de l’innovation inverse. Le nombre de brevets citants (autour de 10 000) constitue évidemment une goutte d’eau dans l’océan du dépôt de brevets mondial (pour lequel le million constitue l’ordre de grandeur). Mais il peut s’agir de brevets d’une certaine valeur. On a mis en évidence, au moins dans le cas de l’Inde, le rôle crucial des FMN américaines dans les transferts de connaissances dans le champ des industries de l’information et de la communication.

Conclusion

29 Du point de vue analytique, cet article a discuté de la « reverse innovation » à travers ses enjeux stratégiques mis en rapport avec le management de l’innovation globale. On a proposé une méthodologie encore provisoire pour apprécier l’échelle et la variété des innovations inverses. Par ailleurs, ce travail présente un autre output : on a voulu, également, tester la pertinence de cette méthode d’évaluation du transfert inverse. Une des limites de notre méthodologie est que le système brevet, bien que très opérationnel dans certains secteurs industriels (ceux reposant sur les technologies de l’information, ou relevant de l’ensemble industriel Chimie-Pharmacie), est encore trop peu répandu dans les économies du Sud pour constituer un bon outil de mesure de l’II. De plus, les brevets permettent de tracer les flux de connaissances et beaucoup moins la production d’innovation (pour la simple raison que tout brevet ne donne pas toujours lieu à une innovation mise en œuvre). On ne peut donc pas encore avoir une vue vraiment achevée de l’échelle du phénomène. Travailler sur un autre pays du groupe des BRIC présenterait de ce point de vue un intérêt certain. Enfin, on a confirmé empiriquement l’existence de deux schémas de l’II : 1) celui initié par une firme du Sud (dans notre étude empirique : les industriels de la pharmacie en Inde) ; 2) celui porté par une FMN présente dans le Sud (dans notre étude : les leaders des technologies électronique et informatique implantés en Inde).

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Mots-clés éditeurs : firme multinationale, citations de brevets, innovation inverse, internationalisation de larecherche-développement

Date de mise en ligne : 05/04/2016

https://doi.org/10.3917/med.173.0047

Notes

  • [1]
    Université Paris-Est, Laboratoire Interdisciplinaire Sciences, Innovations, Société (LISIS-CNRS) – Institut Francilien Recherche Innovation Société (IFRIS), Noisy Le Grand (France). patricia.laurens@esiee.fr
  • [2]
    Université catholique de Lyon, ESDES Lyon Business School. clebas@univ-catholyon.fr
  • [3]
    « Frugal innovations based on new product architectures are often quite disruptive » (Zeschky, Winterhalter, Gassmann, 2014, 3).
  • [4]
    On traduit souvent ce terme anglais par “innovation de rupture”. Le terme apparaît trop fort. Le terme “innovation perturbatrice” nous semble préférable.
  • [5]
    Ces auteurs sont considérés comme étant les premiers à avoir introduit le concept d’II.
  • [6]
    Ils écrivent, en effet, page 20 : « Instead of customizing the western world products to local markets, these companies are increasingly developing products from scratch for the local consumers. They are engaging in frugal & reverse innovations, by developing affordable products and solutions with “good enough” functionalities and minimum frills, and later on, introducing them to the developed countries. »
  • [7]
    « More and more, companies are redeploying their resource-constrained innovations to Western markets, to attract cost-minded customers or to fill gaps in these large, developed markets » (Zeschky et al., 2014, 7).
  • [8]
    Ainsi que le remarque Talaga (2010, 1400), « OI uses sharing of IP as the ‘currency’ to drive collaborative research, it should help to decrease the initial R & D financial investments and, thus, probably allow pharmaceuticals to continue investing in risky innovative R & D activities. »
  • [9]
    Par exemple, comme le remarque Talaga (2010, 1400) pour l’industrie pharmaceutique, « the economical downturn may well be one of the principal drivers that pushes companies such as Johnson & Johnson, GSK or Sanofi-Aventis, to proactively adopt the OI business model as a new way to fill pipelines with innovative drugs ; moving away from the traditional ‘merger and acquisition game’. »
  • [10]
    Une autre serait de s’allier avec elles.
  • [11]
    Le tout avec des risques moindres.
  • [12]
    Une approche qualitative est possible pour attester de la réalité de l’II, voir le travail de Hadengue et al. (2015) sur l’industrie pharmaceutique chinoise.
  • [13]
    Ces citations sont le fait des déposants de brevets, mais aussi parfois des examinateurs.
  • [14]
    L’entrée de l’Inde dans l’Organisation mondiale du commerce (OMC), en 1995, a obligé le pays à se mettre en conformité avec les lois internationales de la propriété intellectuelle. Il autorise la prise de brevet sur les produits pharmaceutiques et les médicaments, mais conserve certaines règles particulières (dont des cessions obligatoires de licence).
  • [15]
    Le brevet cité peut être le brevet prioritaire lui-même ou une de ses extensions géographiques ultérieures. La recherche de citations se fait ainsi sur l’ensemble des brevets avec inventeurs uniquement « indiens » de la famille du brevet prioritaire. La fenêtre de citations de 5 ans est calculée sur la base de l’année de dépôt du brevet prioritaire.
  • [16]
    L’usage des citations dans les brevets étant très variable selon les offices de propriété intellectuelle, utiliser le nombre de citations reçues nécessite de prendre de nombreuses précautions (OECD, 2009).
  • [17]
    Dont la qualité des médicaments génériques a été contestée en Europe et aux USA (voir Huffingtonpost, 27 janvier 2014).

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