Couverture de MAV_069

Article de revue

Valorisation territoriale, sociétale et environnementale : le cas de la Bande verte et citoyenne

Pages 152 à 167

Notes

  • [1]
    Philippe Callot, Professeur HDR, France Business School, campus de Tours, Granem (Angers), philippe.callot@france-bs.com
  • [2]
    Antoine Selosse, Directeur Centre Culturel Européen Saint Martin de Tours, antoine.selosse@saintmartindetours.eu
  • [3]
    Le Centre Culturel Européen Saint Martin de Tours, dont le siège social est situé à Tours, est placé sous le régime des associations sans but lucratif de droit français. C’est la structure porteuse du développement en France et en Europe de l’Itinéraire Culturel du Conseil de l’Europe « Saint Martin de Tours, personnage européen, symbole du partage, valeur commune ». Il a été créé en 2004, avec le soutien du Ministère de la Culture et de la Communication et celui du Conseil général d’Indre-et-Loire.
  • [4]
    www.unwto.org (consulté le 7 février 2011).
  • [5]
    www.ifen.fr (janvier 2007).
  • [6]
    Document « La Bande verte et citoyenne », Fonds de dotation Saint Martin, partage citoyen, 2012.
  • [7]
    Documentation interne CCE.
  • [8]
    Crochets rajoutés par les auteurs.
  • [9]
    Plaquette du Fonds de dotation saint Martin partage citoyen www.saintmartin-partagecitoyen.eu
  • [10]
    Ibid.
  • [11]
    Programme d’actions pour la mise en place de la Bande verte et citoyenne 2012-2013, document CCE, avril 2012.

1Après avoir créé et ouvert un grand parcours européen sur les pas de saint Martin « la Via Sancti Martini », reliant la ville natale de saint Martin (Szombathely/Vas) en Hongrie à la ville de sa mort (Candes Saint-Martin/Indre-et-Loire) en France, le Centre Culturel Européen [3] (CCE) saint Martin de Tours travaille aujourd’hui à son développement dans une perspective d’aménagement du territoire et de développement durable. Il a pour ambition de faire émerger des pratiques qui vont au-delà de celles communément développées autour des chemins de randonnée. Il s’agit de développer tout le long du chemin, le concept d’une Bande verte et citoyenne de 2 000 km de long et 20 km de large (10 km de part et d’autre du chemin de saint Martin), valorisant un tourisme lent et de citoyenneté. Ce concept s’appuie sur la valeur du « Partage citoyen ».

Carte 1

La Bande verte et citoyenne en Indre-et-Loire

Carte 1

La Bande verte et citoyenne en Indre-et-Loire

2L’objectif est de faire de ce parcours un lieu de partage et d’échanges entre les locaux et les passants autour de projets concrets se structurant en relation avec l’Homme et la nature, afin que ce chemin du XXIe siècle soit exemplaire, éthique, social et environnemental... Le touriste, randonneur ou pas, et l’autochtone sont directement concernés par ce projet et l’expérience proposée. Tous les acteurs (marchands et non-marchands) en relation avec le tourisme le sont, a priori, aussi.

3Un consensus semble avoir pris corps ces dernières années autour de la nécessité d’entrevoir le tourisme autrement (Martin, 2002 ; Perriot, 2005 ; Delisle et Jolin, 2007 ; Comité 21, 2008 ; Eskénazi, 2008 ; Van de Walle, 2011), en termes de voyages différents, de solidarités affirmées, de plus grandes équités, par exemple. Au-delà des vœux et convictions partagés autour de cette vision, des doutes s’immiscent sur la capacité à traduire cette perspective en une réalité tangible. Des chartes ou engagements sont établis, des labels se développent (Callot, 2011b), des guides ou normes se mettent en place (Comité 21, Afaq 26000, 2010) afin de garantir la soutenabilité de cette filière autant que pour prévoir ces travers. L’émergence d’une responsabilité sociétale des organisations (RSO) s’inscrit alors dans cette logique contributive au développement durable. La question de la gouvernance, de ses relations avec tous les acteurs, est posée et contribue à l’exploration de la théorie des parties prenantes (TPP). Au-delà de la définition du tourisme durable avec ses variations sémantiques (Lamic, 2008 ; Schéou, 2009), l’expérience du CCE participe à une matérialisation précise et détaillée d’un autre tourisme. Dans un premier temps nous rappellerons les enjeux relatifs au développement touristique autour des quatre piliers que sont l’économique, le social, l’environnemental et le climatique pour ensuite aborder le rôle des parties prenantes dans le cas de la Bande verte et citoyenne des chemins de saint Martin. Après avoir identifié les parties prenantes, nous préciserons nos intentions méthodologiques (démarche exploratoire).

4Au final nous plaiderons, du côté de la demande, pour un partage citoyen avec les parties prenantes identifiées autour de ce projet et dans une optique descriptive nous verrons que l’organisation (CCE ici) est appréhendée comme une constellation d’intérêts coopératifs.

1 – Développement touristique et théorie des parties prenantes (TPP)

1.1 – Développement touristique, les capitaux collectifs vs les capitaux individuels

5De nombreux auteurs ont mis en évidence les dilemmes de la massification du secteur au-delà des apports et avantages que cette filière peut représenter (11% du PIB, 8% de l’emploi mondial).

6Des transports moins polluants pour moins de CO2 (Babou et Callot, 2007 ; Lamic, 2008) afin de moins dégrader la planète (Christin, 2008), les nouvelles emprises au sol et la difficulté de comptabiliser pour chaque individu ses impacts en termes d’emprise au sol (Codur et Véron, 2005), sont quelques exemples « négatifs » au-delà des effets parfois dévastateurs sur les écosystèmes et la biodiversité (Sharpley, 2009). Ces éléments sont largement décrits dans le rapport du Comité 21 relatif à la filière (2008).

7Nous pouvons rappeler ici les éléments clés de la définition du tourisme durable selon l’Unwto (l’Organisation mondiale du tourisme) invitant tous les acteurs à adopter une posture plus responsable.

8Selon cette organisation, le tourisme durable c’est « faire un usage optimal des ressources environnementales […] en préservant les processus écologiques essentiels et en contribuant à la conservation des ressources naturelles et de la biodiversité […] respecter l’authenticité socioculturelle des communautés d’accueil, conserver leur patrimoine culturel bâti et vivant […] garantir des activités économiques viables à long terme en apportant à tous les acteurs des retombées socio-économiques équitablement réparties, notamment des possibilités d’emploi et de revenus stables, des services sociaux aux communautés d’accueil, et en contribuant à la lutte contre la pauvreté [4] ».

9Par cette définition de l’Unwto, nous voyons l’idée d’une responsabilité « élargie » aussi bien du côté de l’offre que de celui de la demande. Nous introduisons ici le rôle éminemment majeur des parties prenantes.

10Le trèfle des capitaux, développé dès 2007 (Babou et Callot), et amendé depuis, matérialise cet élargissement. Les quatre pôles (Schéma 1) individuels et collectifs mettent en évidence les responsabilités de tous les acteurs (ou parties prenantes).

11C’est la notion du quadruple bottom line : environnemental, social, économique et climatique, évoquée lors de la seconde conférence internationale sur le changement climatique et tourisme de Davos (2007).

Schéma 1

Le trèfle du tourisme et le quadruple bottom line

Schéma 1

Le trèfle du tourisme et le quadruple bottom line

Source : Babou et Callot (2007)

12La responsabilité environnementale fait implicitement référence au concept de l’empreinte écologique (Rees et Wackernagel, 1996 ; Wackernagel et alii, 2005). L’empreinte désigne l’espace utilisé par les hommes pour produire les ressources nécessaires à leur mode de vie et pour rejeter les déchets issus de ce mode.

13La responsabilité climatique renvoie aux émissions de gaz à effet de serre (Ges) résultant de l’activité de l’homme notamment.

14A ce sujet, même si les chiffres stagnent ces dernières années dans les économies développées, il apparaît une distorsion majeure selon les pays (Commissariat général au DD, 2011 : Tableau 1).

Tableau 1

Emissions de CO2 par an et par hb

Tableau 1
Pays Etats-Unis France Allemagne Chine Inde UE à 27 Total monde Tonnes CO2/an/hb 17 5,5 9,2 5,1 1,4 7,1 4,3

Emissions de CO2 par an et par hb

(source AIE, 2011)

15L’Institut français de l’environnement indiquait en 2007 qu’il « faudrait ramener les émissions au-dessous de 3 Giga tonnes équivalent carbone par an. Equitablement réparti, ce chiffre pour 6 milliards d’habitants conduit chaque terrien à disposer d’un droit à émettre 500 kg équivalent carbone par an » [5] soit 1,83 tonne de CO2. On le voit ici seule l’Inde répond à l’exigence formulée. 2

16A l’inverse de Van der Yeught (2009) nous ne dissocions pas la culture du social, responsabilité propre à chaque individu lorsque nous parlons de la demande ou aux valeurs sociétales lorsqu’il s’agit d’une entreprise ou organisation. Enfin la responsabilité économique (capital argent ou monétaire) constitue pour les acteurs de l’offre touristique la viabilité des projets portés par les organisations. Cela prend également en considération les retombées économiques pour les parties prenantes concernées (par exemple, les intermédiaires d’une offre touristique ou les partenaires indissociables de cette offre).

1.2 – Valorisation territoriale, sociétale et environnementale

17Le projet porté par le CCE – la Bande verte et citoyenne – sur les chemins de saint Martin, consiste à développer un parcours, un chemin du XXIe siècle exemplaire, éthique, social et environnemental. La valorisation proposée se veut ici holistique « un lieu de partage et d’échanges entre les locaux et les passants autour de projets concrets se structurant en relation avec l’Homme et la nature » [6]. Elle porte ainsi autant sur la valorisation des territoires (découverte d’espaces, de biodiversités, d’écosystèmes ambiants), des terroirs (produits et artisanat locaux, mise en valeur gastronomique) que sur la valorisation des sites culturels, des patrimoines bâtis, des altérités proposées. Nous retrouvons ici les logiques de stratégies de développement durable comme celle de l’Opération grand site (OGS) où les acteurs du Marais Poitevin cherchent à : restaurer les qualités patrimoniales et notamment paysagères du site, mieux accueillir les visiteurs (aires d’accueil, divers modes de découverte), enrichir et diversifier les activités touristiques, faire connaître les multiples facettes du marais, notamment son patrimoine lié à l’eau (Leroux, 2010a, p. 307).

18Par ailleurs, et partant de l’idée de partage citoyen, le projet ne s’inscrit pas dans une logique d’enjeu ou de pari (stake). Les parties prenantes, dans la plupart de ces classifications, sont des « agents » situés en périphérie de l’organisation et pour lesquels l’action de celle-ci peut avoir un impact. Cet impact peut s’avérer sans l’existence de liens contractuels. Ce qui prime c’est « la conception sociétale des relations entre l’organisation et son environnement » (Pesqueux in Bonnafous-Boucher et al., 2006, p. 22). Le tracé de la Bande verte et citoyenne concernera, de fait, des acteurs aux gouvernances et statuts variés (collectivités territoriales, acteurs privés, associations, autochtones). La question posée alors est : comment assurer une « vision partagée » ? Les acteurs peuvent-ils exprimer une motivation au seul argument d’une conception sociétale matérialisée par la notion de partage citoyen ? La valorisation territoriale, sociétale et environnementale devient cet enjeu en même temps que le leitmotiv du tracé proposé. Le balisage d’un chemin de randonnée chaque année, des animations et fêtes autours de saint Martin, l’ouverture d’un grand parcours sur le territoire national, le projet de réhabilitation de la Tour Charlemagne (Tours) ou le projet d’éducation à la biodiversité, géolocalisé, sont les matérialisations actuelles et à venir de la valorisation du patrimoine architectural et culturel.

1.3 – Contrastes de différentes classifications

19Pour Freeman (1984, p. 46) les parties prenantes sont définies « comme tout groupe ou individu qui peut affecter l’organisation ou qui peut être affecté par la réalisation d’objectifs de l’entreprise ». Post et al. (2002, p. 8), plus récemment, définissent les parties prenantes « comme des individus et éléments constitutifs qui contribuent de façon volontaire ou non à la capacité de la firme à créer de la valeur et à ses activités et qui en sont les principaux bénéficiaires et/ou supportent les risques ». De nombreuses classifications des parties prenantes ont été entreprises. L’inventaire de ces classifications fait apparaître une forte hétérogénéité des perceptions tant au titre des relations contractuelles ou non entre les acteurs (Caroll, 1989), des engagements volontaires ou non de ceux-ci (Clarkson, 1995) ou bien des influences composites liées au pouvoir, à la légitimité ou à l’urgence (Mitchell et al., 1997).

20Les fondements de la TPP postulent que les parties prenantes en relation avec l’organisation « construisent une constellation d’intérêts à la fois coopératifs et concurrents » (Pesqueux, 2006, citant les travaux de Donaldson et Preston). Cette « convention » met en évidence la question de la classification des parties prenantes. La pertinence de cette classification résulte de l’importance à accorder à cette théorie. L’idée étant, que sur un niveau qualifié d’instrumental (Jones, 1995), « les entreprises qui pratiquent le management des parties prenantes, toutes choses égales par ailleurs, seront plus performantes en termes de profitabilité, de stabilité, de croissance… » (Pesqueux, 2006).

21Dans le cas des chemins de saint Martin il s’agira avant tout « d’encourager la collaboration entre les acteurs locaux, les associations, la société civile et les marcheurs » [7]. En effet, nous rejetons ici le terme concurrent évoqué par Pesqueux au vu des caractéristiques uniques de ce que représentent la Bande verte et citoyenne et le patrimoine martinien.

22Toutefois, les classifications nous semblent trop orientées vers des notions économiques où les termes « intérêts » et « risques » côtoient ceux de « performances » et « bénéfices ». Ces classifications supposent une distinction entre les dimensions instrumentale ou normative des parties prenantes.

1.4 – De la dimension instrumentale à celle dite normative

23Dans sa dimension instrumentale et selon Paradas (2008), « la satisfaction des besoins des parties prenantes ne constitue qu’un moyen pour atteindre l’objectif ». La question prédominante tourne autour de l’efficacité de la structure et de son efficience, l’ensemble construit autour d’une vision très utilitariste. Les responsabilités, élargies, seraient alors des obligations contraignantes pouvant limiter la réalisation des objectifs notamment financiers. L’objectif, du Centre culturel européen, via la Bande verte et citoyenne est à l’opposé de cette dimension. La dimension instrumentale est ici centrée sur les comportements individuels ignorant les dynamiques collectives. Ce qui prime ici c’est la maximisation du profit.

24A l’inverse, dans la dimension qualifiée de normative, la vision des préoccupations est étendue bien au-delà du profit et favorise les logiques collectives. L’objectif d’effectivité découle d’une recherche de justice ou d’une distribution équitable des satisfactions. L’approche normative modifie la représentation mentale des objectifs du dirigeant de l’entreprise, objectifs trop souvent limités au seul profit. Les normes sont une voie favorisant la légitimation, par la société, des actions entreprises par la firme. La négociation en est une autre. Le CCE est une organisation non-commerciale légitimée par la mise en place d’actions comme celle de la Bande verte et citoyenne afin de développer un tourisme de participation, porté par la valeur du partage et appuyé par le Ministère de la Culture ou encore le Conseil général d’Indre et Loire. C’est un projet innovant, d’éducation à la biodiversité géolocalisée où la défense de l’environnement, la fabrication artisanale locale, l’écoconstruction, l’accès aux personnes handicapées participent autant à la valorisation territoriale qu’à la mise en réseau d’acteurs, de parties prenantes dans leur dimension normative au sens de Paradas. La notion de risque (où les parties prenantes seraient exposées) n’existe pas dans ce cas et c’est bien la notion d’intérêt (de l’ensemble des acteurs) qui prévaut (Mercier, 2010 : 150-151). Reprenant la conclusion de Mercier (2010) nous convenons que le concept des parties prenantes, même s’il reste souvent vague et ambigu où l’approche est « davantage statique que dynamique, descriptive plutôt qu’analytique […] fournit une grille de lecture pertinente des relations qui se développent entre l’entreprise [ici organisation [8]] et ses parties prenantes ». Un contrat global, moral, éthique, s’établit alors entre cette organisation et la société. En ce sens, le CCE n’est pas une entreprise mais une organisation « socialement responsable soucieuse de l’intérêt collectif ».

1.5 – Le rôle des parties prenantes dans la stratégie des acteurs

25« La responsabilité sociétale des organisations se définit comme la contribution de ces dernières au développement durable » (Afaq 26000, 2010).

26Au vu des définitions qui précèdent, et comme Martinet le souligne (Martinet in Bonnafous-Boucher et al., 2006), nous retrouvons les éléments constitutifs du management stratégique énoncé quelques années plus tôt, en France, par Tabatoni et Jarniou (1975). Les modes de relations et l’intensité de celles-ci avec les environnements, le degré de coopération (volontaire/involontaire) pour les stratégies externes et les principes qui régissent les stratégies internes sont en effet en phase avec cette définition. Comme Freeman, nous soutiendrons l’idée que l’entreprise comprend le terme « organisation ». Nous insistons sur le terme « RSO » et adhérons au préalable posé par la norme ISO 26000 qui précise que « les démarches de RSO et des entreprises sont toutes uniques et font appel à des réponses et des pratiques qui dépendent de leurs enjeux propres, de leur contexte, de leur culture » (Afaq 26000, 2010).

27Le cinquième critère du guide de l’Afaq souligne que les « enjeux du développement durable sont relatifs à l’implantation géographique sous l’angle de l’ancrage territorial ». Avec pour fondation la valeur commune du Partage citoyen, nous retrouvons ce critère dans l’une des missions du CCE : celle de relier le patrimoine martinien par des voies transcontinentales de tourisme, fondées sur la rencontre avec l’autre, le sport, le développement personnel, le terroir et l’environnement.

28La contribution aux trois développements - environnemental, social, économique - est à la base même de l’approche conduite par le CCE au titre de la Bande verte et citoyenne. La politique de transport de personnes intègre les principes de développement durable. Le tracé passe par des gares « voyageurs » et permet un accès facile.

29Dans le cas des Cinq terres, Van der Yeught, nous montre que le Parc national « respecte les principes du développement durable et répond aux exigences de bénéfice mutuel attendu de toute relation d’échange » (2009, p.82).

30C’est sur ces mêmes principes qu’est envisagé le projet de la Bande verte. L’objectif est pour le CCE de montrer que l’intérêt pour la randonnée et les chemins de saint Martin sont des éléments moteurs pouvant inciter de nouveaux touristes à venir sur le ou les sites. Comme en Italie le cercle vertueux du développement durable serait enclenché. Toutefois, nous recommandons, ce qui n’est pas fait sur le site des Cinq terres, de s’interroger sur la provenance géographique des flux touristiques pour évaluer l’impact environnemental de la distance parcourue et du moyen de transport utilisé.

31Peu d’acteurs – offre commerciale, collectivités territoriales – intègrent cette dimension. Or comme ce sont les déplacements qui contribuent le plus aux émissions de Ges (avions et voitures), nous avons là une contradiction significative entre l’attraction des destinations (ce qui est le cas de la Bande verte et citoyenne) et le poids CO2 de chaque touriste pour vivre l’expérience de celle-ci.

32En référence à la stratégie du tourisme durable du Parc naturel régional de Camargue (PNRC), Leroux (2010b) rappelle le rôle aussi important que stratégique des nombreuses associations sur ce site naturel. Après identification des parties prenantes concernées par les décisions du PNRC et en s’appuyant sur les travaux de Wheeler et Sillanpää, l’auteur propose un « classement des parties prenantes en stakeholders primaires sociaux et stakeholders primaires non-sociaux » (Lozato-Giotart et al., 2012, p. 258-259). Les acteurs primaires participent activement aux décisions relatives aux processus environnementaux, économiques et sociaux du site alors que ceux dits non-sociaux regroupent les collectivités locales ou encore l’Etat. Ils orientent la politique du parc. Par ailleurs, les individus ou organisations dont le bien-être est fortement affecté par les décisions du parc (habitants, touristes) mais influant faiblement sur les décisions sont regroupés dans la catégorie stakeholders secondaires sociaux. Enfin, la dernière catégorie de stakeholders secondaires non-sociaux concerne les organisations en périphérie du Parc (Offices de tourisme, Comités départementaux du tourisme…). Ici il n’est pas fait mention des aspects contractuels comme dans la typologie de Caroll (1989) alors qu’il nous semble que cet aspect revêt une dimension importante dans les rapports du CCE avec ses parties prenantes.

1.6 – Des acteurs « agents » facilement identifiables

33Le Conseil régional du Centre a récemment développé un Schéma régional d’aménagement et de développement durable du territoire (Sraddt). Ce schéma consiste notamment à favoriser « la convergence de tous les acteurs du développement de la région et les différents niveaux de collectivités et tous ceux, dans les différents domaines d’activité, qui sont les acteurs du développement de notre région » (p. 3).

34Dans une démarche participative le Sraddt est soumis à l’avis des partenaires qui œuvrent à sa conception. Nous sommes là au cœur de l’identification et du rôle des parties prenantes. A l’horizon 2020, la démarche s’appuie d’abord sur des valeurs avec par exemple « une solidarité renforcée entre les habitants et entre les territoires […] une ambition concertée et partagée par l’ensemble des acteurs en région ». Dans la partie intitulée « Le jardin de la France, l’alliance de la nature et de la culture », les objectifs sont clairement de favoriser la culture pour tous et de faire du tourisme une filière économique majeure en région Centre.

35Cette ambition colle parfaitement avec celle du Centre Culturel Européen saint Martin de Tours qui a signé, en 2008, une convention avec la Direction du Tourisme. Le but ici est triple :

  • faire émerger en France un nouveau tourisme durable et responsable, axé sur la mise en valeur du patrimoine culturel martinien et l’itinérance douce ;
  • développer un tourisme de citoyenneté basé sur nos racines culturelles européennes communes, en s’appuyant sur la valeur du Partage citoyen axé sur le respect de l’environnement et le développement durable ;
  • mettre en place une structure pérenne, centre de ressources du « Partage citoyen », et gestionnaire du fonctionnement et du développement de l’Itinéraire Culturel Européen saint Martin de Tours.

2 – Méthodologie

2.1 – Approche exploratoire, qualitative, étude de cas

36Nous optons ici pour l’étude de cas. Comme l’évoquent Le Roy et Yami (2007), « l’étude des comportements d’une firme dans un seul secteur doit nous permettre d’en obtenir une compréhension et de limiter les effets du “bruit de l’environnement” (Eisenhardt, 1989) ». Cette méthode, par une succession d’entretiens avec le directeur du CCE et l’exploitation de documentations est particulièrement bien adaptée dans le cadre d’une approche inductive. De nombreux échanges entre les deux auteurs, d’une manière récursive, ont permis d’explorer le thème des parties prenantes en relation avec le CCE.

2.2 – Catégorisation des parties prenantes du Centre culturel européen de saint Martin depuis 2006

37Le Schéma 2 présente les parties prenantes contractuelles au sens de Caroll (1989) - ici sous la forme de soutien financier - identifiées autour du CCE au titre des chemins de saint Martin et, désormais, du projet de la Bande verte et citoyenne. Le Schéma 3 présente les parties prenantes non-contractuelles concernées par le projet.

Schéma 2

Cartographie des parties prenantes contractuelles du CCE dans le cadre de la Bande verte et citoyenne

Schéma 2

Cartographie des parties prenantes contractuelles du CCE dans le cadre de la Bande verte et citoyenne

(adaptée de Freeman, 1984, p.55)

38Au-delà d’un partenariat privé, en l’occurrence une banque, et de quelques soutiens de particuliers, les parties prenantes contractuelles sont ici majoritairement des institutions ou collectivités territoriales.

Schéma 3

Cartographie des parties prenantes non-contractuelles du CCE dans le cadre de la Bande verte et citoyenne

Schéma 3

Cartographie des parties prenantes non-contractuelles du CCE dans le cadre de la Bande verte et citoyenne

(adaptée de Freeman, 1984, p.55)

3 – Résultats et discussion

39Le Partage citoyen, de quoi s’agit-il ? C’est « l’évolution de la conscience de l’absolue nécessité de partager l’eau, l’air, la nourriture, les ressources, les savoirs, les cultures, l’accès à l’éducation, au travail, à la santé, au logement » [9]. Ici c’est toute la valeur du partage, à l’image de saint Martin, comme moyen de répondre aux problèmes contemporains. Solidarité active, fraternité et justice s’inscrivent comme socle du partage citoyen. Chaque année de nombreuses initiatives sont identifiées comme remarquables et une dizaine d’entre elles sont primées par le « prix du partage citoyen ».

40L’objectif de la Bande verte et citoyenne « est de faire de ce parcours un chemin du XXIe siècle : exemplaire éthique, social et environnemental…, un lieu de partage et d’échanges entre les locaux et les passants autour de projets concrets se structurant en relation avec l’Homme et la nature » [10].

41Pour atteindre cet objectif, le CCE s’appuie sur les parties prenantes contractuelles pour la mise en place d’actions ayant pour but la valorisation du patrimoine architectural et culturel tout au long du parcours. Les parties prenantes non-contractuelles bénéficient, en retour, de ces valorisations tout au long du parcours de la Bande verte et citoyenne. Cela peut se schématiser de la façon suivante (schéma 4) :

Schéma 4

Mobilisation des parties prenantes contractuelles par le CCE et impacts sur les parties prenantes non-contractuelles : proposition de cadrage1,2,3,4,5,6,7,8,9

Schéma 4

Mobilisation des parties prenantes contractuelles par le CCE et impacts sur les parties prenantes non-contractuelles : proposition de cadrage1,2,3,4,5,6,7,8,9

1. Ouvrir et baliser chaque année un chemin de randonnée
2. Organisation de la fête de l’Eté de saint Martin
3. Expérimentation du concept de la Bande verte et citoyenne
4. Animation et promotion de trois chemins de saint Martin et développement de la Bande verte et citoyenne
5. Ouvrir chaque année un grand parcours de saint Martin sur le territoire national
6. Valorisation du site de l’abbaye de Marmoutier
7. Projet de réhabilitation de la Tour Charlemagne (Tours)
8. Projet d’éducation à la biodiversité géolocalisé sur la Bande verte et citoyenne
9. Mise en place signalétique et balisage des chemins culturels de randonnée de saint Martin (37 et 86)

42Nous le voyons ici tous ces projets s’inscrivent dans la durée. Les premières conventions triennales datent de 2006 au lendemain de la création du CCE. Certaines, renouvelées, s’étalent jusqu’en 2014.

43Aujourd’hui d’autres partenaires (contractuels ?) pourraient apparaître au vu des besoins techniques (ex : géolocalisation et repérages d’expériences à vivre, à partager).

44Les convergences technologiques permettront des téléchargements fournis par ces acteurs via les équipements disponibles (Smartphone par exemple). Des témoignages audio, des vidéos en streaming, des cartes « augmentées » participeront à une découverte élargie tout au long du parcours emprunté tout en permettant d’accomplir des actes citoyen et solidaire ponctuels. Cela nécessite la mise en place d’une plateforme numérique. C’est toute la question de la gouvernance du projet pour en assurer la pérennité qui est posée. Ce cas met en évidence la relation aussi particulière que spécifique qu’une association à but non lucratif peut entretenir avec les parties prenantes contractuelles. L’enjeu ici porte sur la valorisation du patrimoine, de la culture, des espaces dans un cadre bien particulier : celui d’un partage citoyen.

45Après avoir défini le concept et sa matérialisation par la mise en place de la Bande verte et citoyenne, nous avons vu que le CCE mobilise les parties prenantes contractuelles pour, en les fédérant par leur soutien, véhiculer des valeurs sur un territoire donné.

46L’objectif est alors « de faire émerger un écotourisme durable et responsable, de citoyenneté, en s’appuyant sur la valeur du partage citoyen, moteur d’une nouvelle économie, de nouveaux comportements et d’un nouveau type de loisirs » [11]. La volonté est d’offrir sur un territoire donné un tourisme multiple : culturel, de pèlerinage, sportif, de randonnée, vert, uval…

Conclusion

47Dans le cas du CCE nous avons présenté le particularisme du projet autour de la Bande verte et citoyenne. Nous avons mis en évidence la notion de partage citoyen avec toutes les parties prenantes. Au vu des catégorisations proposées lors de la revue de littérature, et considérant les objectifs particuliers de cette association, nous adhérons à la classification de Caroll (1989).

48Les parties prenantes contractuelles, par convention avec le CCE, s’appuient sur cette association pour innover en termes de valorisation du patrimoine architectural et culturel. De par les actions conventionnées, ces valorisations impactent directement les parties prenantes non-contractuelles.

49Les retombées peuvent alors être économiques (transporteurs, hébergeurs, restaurateurs), sociétales (apprentissages, transmissions, éducation) et environnementales (sensibilisation à la biodiversité, aux écosystèmes ambiants, aux déplacements peu émetteurs de CO2). De nouvelles parties prenantes (contractuelles) apparaissent au vu des développements attendus et des initiatives en cours.

50Ces prestataires de services n’ont pas les mêmes intérêts que les parties prenantes identifiées (Schéma 4). La gouvernance représentée ici par le directeur du CCE doit ainsi trouver et sélectionner des acteurs adhérant aux valeurs développées par ce projet.

51La triangulation des parties prenantes pose alors la question de la divergence des intérêts, de l’adhésion aux valeurs du projet.

Bibliographie

Bibliographie

  • AFAQ 26000 (2010), Guide d’évaluation Afaq 26000, développement durable, responsabilité sociétale, Afnor certification, novembre, 31 pages.
  • BABOU I. et CALLOT Ph. (2007), Dilemmes du tourisme, Vuibert.
  • BONNAFOUS-BOUCHER M. et PESQUEUX Y. (2006), Décider avec les parties prenantes. Approches d’une nouvelle théorie de la société civile, Editions La Découverte,
  • CALLOT Ph. (2011), « Les pionniers de l’écolabellisation en hôtellerie : une vision responsable, levier d’un changement durable », Management & Avenir, 2011/1, n° 41, p. 31-46.
  • CAROLL A.-B. (1989), Business and Society : Ethics and Stakeholder Management, OH, South Western, Cincinatti.
  • CHRISTIN R. (2008), Manuel de l’antitourisme, Editions Yago.
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Notes

  • [1]
    Philippe Callot, Professeur HDR, France Business School, campus de Tours, Granem (Angers), philippe.callot@france-bs.com
  • [2]
    Antoine Selosse, Directeur Centre Culturel Européen Saint Martin de Tours, antoine.selosse@saintmartindetours.eu
  • [3]
    Le Centre Culturel Européen Saint Martin de Tours, dont le siège social est situé à Tours, est placé sous le régime des associations sans but lucratif de droit français. C’est la structure porteuse du développement en France et en Europe de l’Itinéraire Culturel du Conseil de l’Europe « Saint Martin de Tours, personnage européen, symbole du partage, valeur commune ». Il a été créé en 2004, avec le soutien du Ministère de la Culture et de la Communication et celui du Conseil général d’Indre-et-Loire.
  • [4]
    www.unwto.org (consulté le 7 février 2011).
  • [5]
    www.ifen.fr (janvier 2007).
  • [6]
    Document « La Bande verte et citoyenne », Fonds de dotation Saint Martin, partage citoyen, 2012.
  • [7]
    Documentation interne CCE.
  • [8]
    Crochets rajoutés par les auteurs.
  • [9]
    Plaquette du Fonds de dotation saint Martin partage citoyen www.saintmartin-partagecitoyen.eu
  • [10]
    Ibid.
  • [11]
    Programme d’actions pour la mise en place de la Bande verte et citoyenne 2012-2013, document CCE, avril 2012.
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