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Article de revue

Quelle rationalité pour l'enfant-consommateur ? Prise en compte et incidence de la rationalité des enfants dans les recherches sur l'enfant consommateur

Pages 135 à 157

1Un test réalisé à l’école maternelle propose à de jeunes enfants, à partir de l’image suivante,

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2de répondre à la question : dans quelle direction roule l’autobus que tu vois ? Si la question ne semble pas évidente de prime abord, elle paraît l’être pour de jeunes écoliers qui répondent pour 90% d’entre eux, « l’autobus va vers la gauche ». Et lorsqu’on leur demande d’expliquer pourquoi ils pensent que l’autobus va vers la gauche plutôt que vers la droite, ils répondent d’un ton très assuré : « parce qu’on ne voit pas la porte pour sortir de l’autobus ! ».

3Cet exemple, bien que déconnecté des sciences de gestion, laisse déjà percevoir combien la question de la rationalité des jeunes enfants est subtile et complexe.

4En marketing, si l’on place devant un enfant une tablette de chocolat du goût qu’il préfère enveloppé d’un papier de sa couleur la moins aimée et une autre de son goût le moins apprécié, mais entouré d’une enveloppe de sa couleur préférée (Gollety et Guichard, 2011), il n’est pas aisé d’imaginer quelle tablette de chocolat remportera la faveur de l’enfant…Goût préféré versus couleur préférée, l’enfant est face à un dilemme qu’il ne résoudra pas de la même manière selon son âge… Si l’on ajoute à cette situation d’autres facteurs tels la présence de pairs, le contexte du choix, la manière dont l’information est recueillie, la réponse de l’enfant aura toutes les chances de différer d’autant.

5La question de la rationalité des individus a préoccupé depuis longtemps les gestionnaires, notamment au travers du concept de rationalité limitée développé par Simon (1947) et l’exemple précédent témoigne de l’intérêt notoire que ce concept peut susciter en marketing, en particulier au niveau de la cible enfantine. Comment tenir compte de la rationalité a priori limitée des enfants quand on s’intéresse à eux et à leurs processus de choix et de consommation ?

6Pour répondre à cette question, revenons brièvement sur la notion de rationalité limitée.

7La rationalité limitée au sens où l’entend Simon comprend deux aspects. Les individus sont certes rationnels puisque quand on leur demande d’expliquer leurs actes ou leurs décisions, ils sont capables de le faire. « Dans une définition large de la rationalité, pratiquement tout comportement humain est rationnel. Les gens ont des raisons pour faire ce qu’ils font et, si on les interroge, ils peuvent donner leur avis sur ce que sont ces raisons » (Simon, 1991, p 1).

8Mais cette rationalité est limitée par deux facteurs principaux. L’information à disposition des individus étant imparfaite, complexe et abondante, l’individu n’a pas la capacité de la traiter en totalité : « Chaque organisme humain vit dans un environnement qui produit des millions de bits de nouvelles informations chaque seconde, mais le goulot d’étranglement de l’appareil de perception n’admet certainement pas plus de 1000 bits par secondes et probablement moins » (Simon, 1959, p 273).

9Par ailleurs, du fait de ses capacités cognitives limitées, l’individu est amené à réduire l’état du monde à un modèle simplifié. Il se représente à sa façon le monde qui l’entoure et en construit ainsi sa propre vision. Ce qui rend difficile, voire impossible, la prévision de ses comportements puisque sa construction est unique et sienne. Cette construction guide ses actions et ses décisions.

10En marketing, et particulièrement dans les recherches en comportement du consommateur qui s’attachent à « analyser comment des individus, des groupes et des organisations choisissent, achètent et utilisent des biens, des services, des idées ou des expériences afin de satisfaire leurs besoins et leurs désirs » (Kotler et Dubois), le concept de rationalité limitée a trouvé un écho auprès d’éminents chercheurs et a même engendré un courant, celui de la théorie de la décision comportementale (cf. synthèse de ces travaux dans l’article de Guibert, 2010). A l’instar de la démarche adoptée par Rojot en théorie des organisations, des chercheurs comme Bettman et al. (1998) ont tenté de développer des théories pour comprendre les facteurs qui influencent la construction individuelle des préférences, lesquelles conduisent aux comportements.

11Les travaux de ces chercheurs reposent sur les principes rappelés précédemment (Simon, 1947). Les choix des consommateurs sont avant tout construits. En raison de leurs capacités cognitives limitées, les consommateurs ont bien souvent des préférences peu stables qui varient suivant les situations dans lesquelles ils se trouvent et des circonstances auxquelles ils sont confrontés. Pour autant, ils effectuent leurs choix en respectant toujours un ensemble de buts qu’ils souhaitent satisfaire. Ainsi, d’après le modèle conceptuel intégré par Bettman et al. (1998), les processus de choix seraient conditionnés par l’un des quatre buts suivants : maximiser la pertinence du choix, minimiser l’effort cognitif requis pour réaliser ce choix, minimiser l’expérience d’une émotion négative éventuellement ressentie lors du choix et/ou enfin maximiser la capacité à justifier la décision finale. Les auteurs précisent que la sélection de ces quatre buts n’est pas arbitraire, le cadre proposé permettant ainsi de rendre compte des aspects motivationnels les plus importants de la prise de décision.

12Si le concept de rationalité limitée a retenu l’attention de chercheurs en comportement du consommateur, il suscite un ensemble de questions pour tous ceux qui s’intéressent plus spécifiquement à la cible des enfants consommateurs. Est-il tout simplement judicieux de se poser la question de la rationalité chez ces êtres en devenir ? Si les adultes, comme nous l’avons montré dans cette introduction, sont des individus rationnellement limités, comment les enfants ne le seraient-ils pas a fortiori ? Dans quelle mesure, la rationalité des jeunes consommateurs n’est-elle pas intimement liée aux théories en lien avec leur développement psychologique ? Que cela engendre-t-il alors au niveau des paradigmes et des courants de recherches développés à l’attention de cette cible ? Quelles incidences enfin, au niveau du choix des méthodes de collecte des données quand on s’intéresse aux jeunes consommateurs ?

13L’objectif de cet article est de conduire une réflexion autour du concept de rationalité limitée, décliné au niveau de la cible enfantine, en tentant d’apporter des éléments de réponse à l’ensemble de ces questions. La première partie de l’article s’attache à démontrer, à la lumière des théories récentes sur le développement psychologique de l’enfant, que l’enfant n’est pas si irrationnel qu’on le pense. La seconde expose les incidences de la rationalité des enfants consommateurs d’une part sur le développement de certains courants de recherches et d’autre part sur les méthodes de collecte des données à appliquer auprès de cette cible.

1 – Des limites de la rationalité chez l’enfant consommateur

14La question de la rationalité en marketing, et plus spécifiquement dans le champ de la compréhension du comportement de l’enfant consommateur se pose avec d’autant plus d’acuité que par essence les enfants sont des êtres en devenir. Les théories en lien avec le développement psychologique de l’enfant parce qu’elles renseignent sur la manière dont l’enfant traite, code, interprète le monde qui l’entoure et plus particulièrement les informations en lien avec la consommation, peuvent éclairer l’incidence que peut avoir la rationalité limitée des enfants sur leur comportement de consommation.

1.1 – Enfance et rationalité : deux concepts antinomiques ?

1.1.1 – L’enfant : un petit être aux capacités cognitives insoupçonnées

15La majeure partie des travaux portant sur la consommation enfantine s’appuie sur les travaux des psychologues et en particulier sur ceux de Piaget, pour comprendre l’évolution des connaissances de consommation acquises par l’enfant. Pourtant, la prise en compte des travaux plus récents en psychologie du développement (Gopnik et alii, 2005) viendraient sans doute nuancer certains de ces résultats.

16L’approche structuraliste du développement cognitif de Piaget (1972) traite prioritairement de la construction des structures opératoires de l’intelligence et considère que l’organisation des différents aspects de la connaissance, c’est-à-dire la perception, l’imagerie mentale, la mémoire, le langage, etc. est subordonnée à la mise en place des structures cognitives (Bideaud et alii, 2002). Selon le modèle piagétien, l’enfant construit, à partir d’actions sur son environnement et grâce à un processus d’assimilation et d’accommodation, son appréhension du réel (Tourrette et Guidetti, 2000). D’après Piaget, l’enfant serait donc contraint par l’immaturité de ses capacités cognitives, qui l’empêcherait tout simplement de se livrer à certaines tâches.

17Des travaux plus récents ont démontré les limites du modèle piagétien de développement de l’enfant, et ont ainsi mis en lumière que le monde de l’enfance n’est pas si irrationnel qu’il y paraît. L’approche fonctionnaliste du développement cognitif dont le chef de file est Bruner (1983) soutient par exemple l’idée selon laquelle la pensée de l’enfant est organisée bien plus tôt que ce que ne le laisse entendre les conclusions issues des travaux de Piaget. A l’aide de nouveaux protocoles (utilisation de la vidéo, de l’imagerie mentale…), Bruner parvient à décrire différents stades d’acquisition des formes de représentations mentales par l’enfant, fondées d’abord sur l’action, puis sur l’imagerie mentale et enfin sur un système symbolique au sein duquel le langage occupe une place de choix. Une fois acquis, ces trois formats coexistent et fonctionnent parallèlement.

18Dans la lignée des travaux de Bruner, ceux de Lautrey (1990) mettent en exergue que l’enfant dispose de deux modes de traitement de l’information : le traitement analogique (« je choisis le packaging le plus grand parce que c’est là où il y en aura le plus ») et le traitement propositionnel au cours duquel l’enfant est capable de mobiliser des concepts plus abstraits (« à taille équivalente, si un produit est plus cher qu’un autre, c’est sans doute parce qu’il est de meilleure qualité »), sans que ces modes de traitement ne soit forcément en lien avec l’âge de l’enfant, les enfants utilisant indifféremment l’un ou l’autre des traitements suivant les situations où ils se trouvent.

19Enfin, les travaux de Gopnik et alii (2005) bousculent les connaissances acquises jusqu’à présent sur le développement de l’enfant. Ils montrent que l’enfant est loin d’être immature, qu’il dispose de capacités d’apprentissage exceptionnelles qui lui permettent de modifier, reformuler et restructurer spontanément ses connaissances. Selon ces auteurs, « les enfants ne sont ni des pages vierges, ni des êtres aux appétits démesurés, ni même des voyants « extra-intuitifs ». Les bébés et les tout jeunes enfants pensent, observent et raisonnent » (Gopnik et alii, 2005, p.31). Ainsi, à l’instar des scientifiques, les enfants, spontanément curieux, attentifs et explorateurs, disposeraient d’une intelligence certaine et développeraient des connaissances sur le monde au travers des expériences nombreuses qu’ils réalisent au quotidien.

20Certes, ces mêmes auteurs insistent également sur le fait que si les jeunes enfants sont capables de penser et d’apprendre, c’est qu’ils ont à leur côté des adultes, apparemment eux aussi programmés pour aider leur progéniture à apprendre. L’environnement social, trop souvent négligé dans les théories du développement cognitif de l’enfant, est un facteur à prendre en considération pour tenter d’expliquer la rationalité plus ou moins limitée des enfants.

1.1.2 – Un enfant entouré : un enfant plus rationnel ?

21Aux côtés des théories sur le développement cognitif de l’enfant, les défenseurs de l’approche psycho-sociale réhabilitent l’environnement social comme étant un catalyseur du développement des capacités cognitives. D’après notamment Vygotsky (1984), l’enfant se développe grâce à ses propres caractéristiques, mais également celles de son milieu. Pour Vygotsky, le contexte culturel et social dans lequel l’enfant évolue est fondamental et doit être pris en considération pour comprendre comment un enfant voit et décode l’information qui l’entoure. L’enfant développe ainsi ses capacités cognitives par le biais de ses interactions avec autrui, et plus spécifiquement avec des personnes plus compétentes que lui. La notion de zone proximale de développement est au cœur de la théorie de Vygotsky « [..] L’élément central pour toute la psychologie de l’apprentissage est la possibilité de s’élever dans la collaboration avec quelqu’un à un niveau intellectuel supérieur, la possibilité de passer, à l’aide de l’imitation, de ce que l’enfant sait faire à ce qu’il ne sait pas faire. C’est là ce qui fait l’importance de l’apprentissage pour le développement et c’est là aussi précisément le contenu du concept de zone proximale de développement » (Vygotsky, 1984 : 272-273). Au cours d’interactions sociales, l’adulte oriente l’enfant dans sa recherche de solutions à un problème et l’aide ainsi à progresser. Ce que l’enfant effectue à un moment donné en présence de l’adulte, il pourra le réaliser seul plus tard. En cela, le développement cognitif est tributaire des interactions sociales et le langage joue un rôle central dans la transmission de connaissances.

22Dans la lignée des travaux de Vygostsky (1984), les chercheurs en psychologie sociale reconnaissent que le développement de l’enfant est fonction de deux types de facteurs : l’action de facteurs biologiques et l’influence du contexte socioculturel. Mais pour ces auteurs, contrairement au courant béhavioriste, le développement de l’enfant ne repose pas sur de simples processus de conditionnement. Autrement dit, l’enfant n’apprend pas de manière purement conative et sans traitements cognitifs, par association entre un stimulus venu de l’environnement et une réponse. Son développement résulte bien d’un véritable processus interactif entre l’enfant et son environnement social (Hémar, 2007).

23La rationalité des enfants serait donc également dépendante de l’environnement dans lequel les enfants évoluent et de la richesse des interactions qui leur sont proposées, la place des parents, éducateurs, adultes en général, étant fondamentale pour l’acquisition de connaissances, savoirs et savoir-faire en lien avec la consommation. Si le sens commun conduit naturellement à opposer la part de la « nature », déterminée par le patrimoine génétique et conditionnée par l’évolution, à celle de la « culture », fruit des interactions que l’enfant peut construire avec son environnement, Gopnik et ali (2005) démontrent qu’en étudiant les bébés, cette opposition est vaine.

1.1.3 – Un enfant égocentrique ou capable de prendre en compte le point de vue d’autrui ?

24Une autre caractéristique du développement de l’enfant soulignée par Piaget est le caractère égocentrique de sa pensée. L’enfant envisage le monde selon sa propre perspective et il serait dans l’incapacité de prendre en considération celle d’autrui. Il devient par conséquent extrêmement difficile pour lui de se décentrer de lui-même pour définir des buts et des actions à entreprendre pour atteindre ces buts. De plus, en raison de ses capacités cognitives limitées, qui l’empêchent d’analyser une situation, l’enfant va réagir en fonction de ce qu’il ressent et sur une base avant tout affective.

25Toujours selon Piaget, cet égocentrisme résulte d’un ensemble de conceptions du monde propres à la pensée enfantine, et qui peuvent expliquer un certain nombre de ses réactions affectives. En particulier, les enfants voient le monde à travers un prisme animiste, c’est-à-dire qu’ils attribuent aux objets inanimés qui les entourent (des poupées, un personnage de BD, une voiture, un animal sur un paquet de céréales) des qualités humaines et des pensées analogues aux leurs. Et ils expliquent les phénomènes qu’ils observent par des processus quasi magiques, reliant ainsi des êtres ou des phénomènes entre eux alors qu’ils n’ont a priori aucune influence mutuelle (l’enfant croit par exemple que si les nuages ont disparu, c’est parce qu’il a fini de compter jusqu’à 10).

26Des théories ou travaux plus récents (théorie de l’esprit, Frye et Moore, 1991 ; Skolnic & Bloom, 2009 in Sciences Humaines, 2010) tendent à nuancer ces conclusions. L’enfant dès son plus jeune âge serait capable de comprendre le point de vue de l’autre. Et si en effet un enfant de trois ans ne s’étonne pas de voir un chien parler dans un dessin animé, les psychologues ont montré que les enfants savent très bien distinguer un être réel d’un être fictif et sont donc plus rationnels qu’ils ne le laissent penser. Ces théories sont mobilisées en marketing, en particulier par les chercheurs travaillant sur la compréhension par l’enfant des buts poursuivis par la publicité. Si plusieurs auteurs (Robertson et Rossiter, 1974 ; Roedder John, 2001) ont conclu que l’enfant ne pouvait comprendre les intentions persuasives de la publicité avant l’âge d’environ 8 ans, Mc Alister et Cornwell (2009) démontrent que cette compréhension est contingente à la capacité qu’a l’enfant de se représenter les intentions et pensées d’autrui. Ainsi, des différences individuelles dans le développement de la théorie de l’esprit peut expliquer que certains très jeunes enfants aient conscience bien plus tôt que d’autres des intentions persuasives de la publicité.

27Gopnik (2010) montre également que même de tout petits bébés présentent une étonnante aptitude à l’empathie et à l’altruisme. Les jeunes enfants savent parfaitement qu’il y a des règles à suivre ; ils savent aussi que ces règles peuvent être modifiées.

28Au regard des principales caractéristiques du développement de l’enfant que nous venons de rappeler, force est de reconnaître que l’enfant présente une forme de rationalité qui lui est propre. Comment cette rationalité se manifeste-telle dans les comportements de consommation de l’enfant ?

1.2 – Rationalité limitée et comportement de consommation de l’enfant

1.2.1 – Un comportement de consommation encore immature

29Pour qu’un enfant puisse devenir un consommateur à part entière et exercer ainsi une forme de rationalité dans ses choix de consommation, il importe que soient remplies trois conditions (Brée, 1993).

30L’enfant doit avoir compris quelques principes économiques de base. A l’âge de 3-4 ans, il est capable de distinguer des pièces de monnaie de boutons par exemple, mais il n’établit pas de relation directe entre l’argent et l’acte d’achat. Si on lui demande de choisir une pièce, il choisit celle qui est la plus grande sans qu’intervienne une notion de valeur. A 6 ans, l’enfant assimile que toutes les pièces ne permettent pas d’acheter la même quantité de biens. Cette acquisition de la notion de valeur va de pair avec celle des prix affichés sur les produits. Enfin, c’est vers 9 ou 10 ans que l’enfant comprend que le marchand est quelqu’un qui assure une fonction de distribution. Il sait que le commerçant prend son profit en servant d’intermédiaire entre le producteur et le consommateur final.

31L’enfant doit avoir à sa disposition un minimum d’argent dont la gestion lui incombe totalement. Il doit expérimenter lui-même un certain nombre d’arbitrages dans les dépenses qu’il a à réaliser.

32Enfin, il doit avoir acquis une certaine indépendance dans ses comportements et dans la manière dont il va chercher à résoudre les problèmes qui se présentent à lui. La socialisation du consommateur ne peut pas résulter uniquement de l’acquisition de savoirs et savoir-faire théoriques. Il faut qu’il y ait de la part de l’enfant le désir affiché de mettre tous ces apprentissages en application au travers d’expériences qu’il réalisera par lui-même.

33Or, la plupart du temps, il n’est qu’accompagnateur de ses parents ou d’un adulte et finalement rares sont les occasions où il peut effectivement mobiliser seul ses connaissances, les tester pour les conforter et exprimer ainsi une rationalité dans ses choix.

1.2.2 – Un processus de choix fondé sur des critères visuels

34La rationalité limitée substantielle s’exerce avec d’autant plus de poids chez les enfants que leur développement psychologique n’est pas achevé. Cette caractéristique vient déformer d’autant leur processus de traitement de l’information. Roedder John (2001), dans son article de synthèse sur l’enfant consommateur, souligne en effet que les enfants sont « visuellement orientés » et qu’ils privilégient naturellement le traitement visuel de l’information. Ils accordent par exemple un poids plus important aux caractéristiques perceptuelles et tangibles du packaging (taille, forme, couleurs…) qu’aux aspects plus symboliques, par nature intangibles (image de marque, qualité du produit…). L’étude de Roedder-John et Sujan (1990) montre que soumis à une tâche de classification de produits, les enfants utilisent d’abord les attributs physiques du produit (couleur, forme, taille de l’emballage…). Ce n’est que lorsque leurs compétences cognitives se sont développées qu’ils prennent en compte des caractéristiques plus abstraites (goût, qualité, marque…) et deviennent ainsi capables de réaliser des arbitrages plus complexes en termes de choix, en se fondant sur des attributs plus nombreux (prix, qualité, présence de primes, taille etc…) (Brée, 1993). Ainsi, dans l’exemple présenté en introduction, la couleur préférée est mobilisée par les enfants les plus jeunes comme critère dictant le choix de la tablette de chocolat, alors que pour les plus âgés, le goût préféré, critère plus abstrait devient le fondement du choix de la tablette (Gollety & Guichard, 2011).

35En conséquence, s’agissant des processus de catégorisation mémorielle des produits, les jeunes enfants organisent leurs connaissances autour de critères perceptuels plus facilement accessibles (Roedder John et Sujan, 1990) et donc mobilisables. Les enfants mémorisent en effet plus difficilement des stimuli purement sémantiques (Macklin, 1996 ; Luisi, 1999) et retiennent les informations relatives au produit ou à la marque via les dimensions visuelles du packaging par exemple (Rossiter, 1975 ; Peracchio, 1992 ; Macklin, 1996).

36Il en est de même au niveau des recherches sur les annonces publicitaires et leur influence sur les comportements de consommation des enfants. Un spot apprécié des enfants le sera parce qu’il présente un scénario amusant, parce qu’il est accompagné d’une musique rigolote ou parce qu’il met en scène un personnage que l’enfant apprécie (Phelps et Hoy, 1996 ; Derbaix et Brée, 1997 ; Moore-Shay et Lutz, 2000)… L’enfant retient d’abord les éléments périphériques du spot avant le message central (nom de marque, type de produit promu) et ils mobilisent ces derniers pour fonder son jugement.

37Ces résultats font écho à l’heuristique de disponibilité, proposée par Kahneman et Tversky (1979) comme un mécanisme systématique de simplification de la réalité. A la question « quelle marque de gâteau préfères-tu ? », l’enfant a toutes les chances de répondre, non par celle qu’il apprécie objectivement le plus, mais par celle qui lui viendra immédiatement en mémoire soit parce qu’elle s’accompagne d’un personnage de marque qui lui est familier (Hémar, 2007), ou qu’elle a fait l’objet d’une publicité télévisée que l’enfant a récemment visionnée et appréciée ou encore qu’elle a été partagée entre pairs lors d’un goûter. Autrement dit, la disponibilité de l’information passée ou présente dans la mémoire de l’enfant influence ses comportements ; ce qui rend d’autant plus importante la prise en compte du contexte dans lequel ils évoluent.

1.2.3 – L’influence de la situation sur les processus de choix des enfants

38De manière encore plus prononcée que chez les adultes, les enfants dans le domaine de la consommation n’ont pas toujours la capacité à définir les buts qu’il convient de suivre. Comment à 7 ans, avoir conscience et combiner un objectif d’alimentation saine et de recherche de plaisir tout en cherchant à s’intégrer au sein de son groupe de pairs ?

39Chez les enfants, les buts naissent de la situation dans laquelle ils sont plongés, ce qui va influencer leur comportement et leur stratégie. Un enfant qui accompagne ses parents pour les courses hebdomadaires, va être tenté par les linéaires de produits. Il va développer en conséquence des stratégies d’influence (Davis, 1976) qu’il jugera susceptibles de lui faire atteindre ses buts. Alors que l’attente aux caisses est fastidieuse et face aux présentoirs de sucreries, il va chercher à obtenir de sa mère un paquet de confiseries (but qui surgit de la situation). Il pourra alors mettre en œuvre une stratégie ponctuelle fondée sur l’affectif (supplier sa mère d’une voix langoureuse) qui lui permettra éventuellement d’atteindre son but. Ce sont ces buts concrets, surgis de la situation, qui influencent le comportement de l’enfant, plus que des buts plus abstraits dont il n’a même pas idée. Cette notion de rationalité calculatoire (Denis, 2009) consiste finalement à adopter un comportement en fonction d’un objectif que l’on s’est fixé. Elle trouve un terrain d’application choisi dans les recherches en comportement de consommation de l’enfant.

40De même, Denis (2009) indique qu’en situation d’incertitude, les individus adoptent un comportement en fonction de leur perception de la norme, sur la base d’une conviction mimétique. Ainsi, Damay et al. (2011), en observant les enfants lors de la pause méridienne dans un self scolaire, constatent que face à l’hésitation d’un enfant devant les choix d’entrées ou de desserts qui lui sont offerts, celui-ci regarde ce que ses voisins choisissent et reproduit les comportements observés, pensant que c’est ainsi qu’il convient d’agir. Cette forme de rationalité est également présente chez l’enfant et constitue d’ailleurs un des fondements de son apprentissage de la consommation (Bandura, 1980).

41Face à la réalité des comportements de consommation des enfants, des théories explicatives spécifiques et des méthodes de collecte de données nouvelles ont vu le jour pour tenter de prendre en compte au mieux la rationalité de cette population.

2 – Quelles incidences sur les recherches en comportement de l’enfant consommateur

2.1 – L’émergence de paradigmes spécifiques

42Comme Rojot (2006) le souligne, il existe un lien très étroit entre nos actions et nos connaissances. Si le monde est construit par nos actions, la rationalité limitée des individus conduit au fait que nous agissons avant de connaître et de raisonner et « c’est cette action qui crée nos connaissances et nous découvrons nos raisons d’agir dans et après l’action » (Rojot, 2006 : p.66).

2.1.1 – L’importance de la dimension affective dans les théories en comportement de l’enfant consommateur

43Dans le cadre des travaux, très nombreux, portant sur l’enfant et la publicité, la dimension émotionnelle du comportement de l’enfant a été mise en exergue notamment par le modèle de la réaction émotionnelle développé par Derbaix en 1982 et repris ensuite dans les travaux de Pécheux et Derbaix en 2002. Ces auteurs mettent en évidence que confronté à une publicité, l’enfant développe une forte réaction émotionnelle qui donne lieu à un comportement de requête de l’enfant auprès d’un adulte. Ce n’est que plus tard, au contact direct du produit que l’enfant développe un ensemble de croyances à l’égard du dit produit. Cette séquence dans laquelle la phase émotionnelle précède la phase comportementale et la phase cognitive peut se résumer ainsi : après visionnage d’un film publicitaire sur les gâteaux Pépito, l’enfant exprime une attitude positive à l’égard du produit ou de la marque (« J’aime les Pépitos ») qui donne lieu à une requête (« maman tu peux m’acheter des Pépitos »), et ce n’est qu’après que l’enfant développe un ensemble de croyances à l’égard de la marque (« mm ! Vraiment les Pépitos c’est meilleur que les BN ! »). Dans la lignée des travaux précédents, plusieurs chercheurs ont mis en exergue la prédominance de la facette affective dans les comportements de consommation des enfants au détriment de la facette cognitive.

44Les travaux de Derbaix et Pecheux (1997) sur la construction d’une échelle de mesure de l’implication envers un produit, pour des enfants âgés de huit à onze ans, mettent en exergue la recherche de plaisir dans le comportement de consommation de l’enfant.

45L’étude de Derbaix, Blondeau et Pécheux (1999) réalisée auprès de la même cible conclut que l’attitude des enfants envers une annonce publicitaire télévisée comprend une seule dimension, de nature hédoniste. Exposé à un message publicitaire télévisé, l’enfant recherche avant tout à se faire plaisir et à vivre des expériences émotionnelles, sans que l’annonce publicitaire ne génère chez lui une quelconque évaluation cognitive.

46Enfin, les travaux en lien avec l’enfant et la marque (notamment, Kapferer, 1985 ; Brée, 1993; Derbaix et Pécheux, 1999 ; Ji, 2002 ; Rouen-Mallet, 2002 ; Rodhain, 2004) démontrent tous le rôle dominant des réactions affectives dans les processus de choix des enfants.

47Ces travaux font écho à ceux de Zajonc (1980) et Zajonc et Marcus (1982), développés auprès d’une cible adulte qui explicitent que certaines attitudes ne sont pas apprises au sens cognitif du terme mais relèvent d’autres ressorts, affectifs ou en lien avec le contexte de choix (les attitudes peuvent être la résultante d’habitudes répétées, de renforcement parental, de pression sociale normative, ou d’identification avec le groupe).

2.1.2 – La pertinence de certains modèles intégrateurs pour la cible enfantine

48Deux modèles intégrateurs font l’objet de développements spécifiques, car ils s’attachent à rendre compte de la spécificité de la cible enfantine, notamment dans l’expression de sa rationalité.

49Le premier met en exergue le rôle des interactions sociales et du contexte dans lequel l’enfant réalise ses apprentissages de la consommation.

50Les enfants, au fur et à mesure de leur développement, sont amenés à vivre dans des contextes sociaux différents qui contribuent à favoriser le développement de leur rationalité. Ainsi, dans le champ de la socialisation du consommateur, l’enfant évolue dans différents environnements : la famille, les pairs, l’école et les médias. Ces différents agents de socialisation, parce qu’ils contribuent chacun à l’apprentissage des savoirs et des savoir-faire des enfants consommateurs, ont été étudiés mais de façon cloisonnée (Ward, 1974 ; Roedder John, 2001).

51L’approche systémique du développement défendue par Bronfenbrenner (1979) s’intéresse à rendre compte de la porosité des différents environnements sociaux dans lesquels évolue l’enfant. Elle envisage les compétences de l’enfant comme le résultat d’un apprentissage reçu au travers des relations qu’il entretient avec les différents agents sociaux qu’il fréquente. Ces divers contextes de développement de l’enfant sont conceptualisés comme une suite de systèmes emboîtés les uns dans les autres dans une structure concentrique.

52Cette approche a été notamment mobilisée dans le champ de la socialisation à la consommation alimentaire (Damay et al., 2010). Elle a permis de montrer que les différents environnements fréquentés par le jeune consommateur structurent conjointement ses apprentissages et ses préférences. Si les premiers choix et les préférences alimentaires des enfants se forment dans la famille (Fisher and Birch, 1995 ; Nicklas et ali., 2001 ; Ayadi, 2009), quand ils entrent à l’école, la confrontation avec les pairs introduit de nouvelles potentialités. Les pairs ouvrent les enfants à la dimension symbolique et sociale des produits qu’ils consomment (Moschis and Churchill, 1978 ; Ezan, 2004). L’élargissement des environnements sociaux fréquentés par les enfants ne conduit pas à un cloisonnement de ces sphères. Au contraire, celles-ci s’encastrent, se complètent pour développer les apprentissages du jeune consommateur (Bronfenbrenner, 1979). Ainsi les savoirs obtenus dans la cellule familiale s’exportent à l’école et sont susceptibles d’alimenter les apprentissages des enfants dans la cour de récréation. Inversement, les discussions entre pairs donnent lieu à l’importation de connaissances nouvelles ou comportements novateurs au sein de la famille. Comme une méta influence, le marketing, et plus particulièrement les publicités télévisées, interviennent sous la forme d’un discours qui est mobilisé par les enfants dans différents contextes sociaux (Guichard, 2000 ; Lawlor and Prothero, 2008).

53Dans cette approche, l’enfant n’est pas seulement un sujet qui regarde et imite des modèles pour reproduire des comportements qu’il estime appropriés à une situation donnée ou pour rejeter des pratiques considérées comme répréhensibles. C’est un acteur à part entière qui influence également les autres agents de socialisation. En se focalisant sur l’intersection des environnements sociaux dans lesquels les enfants évoluent et sur la porosité entre ces sphères d’influence, cette approche réhabilite l’importance de la situation et du contexte dans les processus de choix des enfants. Elle permet ainsi de mieux rendre compte de la dynamique et des influences qui pèsent sur ces choix. En ce sens, elle est une voie intéressante à suivre pour tenter de rendre compte de la rationalité des enfants consommateurs.

54Dans un champ plus étroit, celui de la communication persuasive, la théorie de l’irrationalité restreinte (Derbaix et Grégory, 2004), applicable aux consommateurs adultes, donne à réfléchir sur la notion de rationalité. Les auteurs, à la lumière des travaux de ces vingt cinq dernières années, constatent que la communication persuasive, autrement dit les actions entreprises pour tenter de modifier les attitudes et comportements de consommation des individus, relève de moins en moins d’un apprentissage raisonné. Ils soulignent les limites des modèles séquentiels de persuasion (Vakratsas et Ambler, 1999). Ils mettent en exergue l’insuffisance du nombre de variables explicatives des processus de persuasion. Ils remettent enfin en cause la catégorisation envisagée par les chercheurs (« en situation de faible implication… » « en cas d’achat routinier »…), laquelle leur permet d’éviter de prendre en considération les conflits entre les déterminants cognitifs et affectifs certes, mais aussi ceux plus automatiques qui relèvent de l’apprentissage et ceux qui résultent des influences sociales. Ils proposent donc « d’abandonner les processus séquentiels et d’accepter l’évidence que la persuasion (…) ne peut être comprise qu’en acceptant l’existence de multiples voies par lesquelles un message peut modifier l’attitude et le comportement d’un agent économique, et l’incapacité des processus hiérarchiques à décrire la réalité du changement d’attitude » (Derbaix et Grégory, 2004 : p.17).

55En s’inscrivant ainsi en rupture avec le paradigme cognitif dont l’hypothèse majeure repose sur un traitement de l’information rationnel et séquentiel, ils proposent de combiner l’ensemble des voies possibles par lesquelles un consommateur peut être persuadé par un message. Outre le cheminement rationnel et logique marquant les étapes du processus décisionnel (Porte de la Logique), trois autres voies d’influence coexistent : la stratégie affective de traitement des informations (Porte des Sentiments et émotions), le mode fondé sur les automatismes (Porte des Automatismes et du conditionnement) et les processus décisionnels résultant des interactions sociales et des effets d’imitation (Porte de l’Imitation, résultante des influences interpersonnelles). Inspiré de la physique quantique, le modèle LISA Q repose sur cinq postulats. La persuasion publicitaire est le fruit de divers déterminants. Ces derniers se trouvent simultanément sollicités et ne peuvent être appréhendés par des logiques séquentielles. Il existe une porosité entre les différentes portes du modèle. Les conflits qui pourraient naître entre les portes élémentaires du modèle sont résolus par l’individu selon une logique du moindre effort cognitif. Enfin, les effets de la communication persuasive relèveraient davantage de traces perceptives mémorielles ou émotionnelles que de modification de comportements effectivement visibles et mesurables avec les instruments de mesure traditionnellement mobilisés par les chercheurs.

56Ce modèle a vocation à rendre compte de la complexité des processus de persuasion publicitaire, et tente ainsi d’appréhender plus finement la rationalité limitée des consommateurs. Si les enfants comme nous l’avons vu dans la partie précédente réagissent particulièrement selon un mode affectif aux messages qui leur sont adressés et sont sensibles à la situation et aux influences sociales, force est de conclure qu’une déclinaison ou adaptation de ce modèle à cette population par les chercheurs spécialistes de la cible enfantine serait la bienvenue. Pour parvenir à montrer d’un point de vue opérationnel la pertinence et la portée d’un tel modèle, une réflexion sur la question de la mesure et plus largement sur les modes de collecte des données auprès des enfants s’impose.

2.2 – Une réflexion au niveau des méthodes de collecte des données à mettre en œuvre auprès de la population enfantine

57Deux défis majeurs sont à relever pour les chercheurs travaillant sur les enfants : il faut non seulement qu’ils s’assurent que les enfants sont capables d’assimiler ce qui leur est dit, mais également qu’ils veillent à ce que ces derniers puissent exprimer le message qu’ils souhaitent faire passer (Brée, 2007).

58Prenons un exemple pour illustrer l’importance de la question des méthodes de collecte des données auprès des enfants, même s’il se situe hors du champ de la gestion. Pendant longtemps les théoriciens du développement cognitif de l’enfant ont défendu l’idée selon laquelle les enfants ne pouvaient acquérir la notion de nombre avant 6-7 ans. Pour le prouver, Piaget place l’enfant face à deux rangées de jetons en nombre égal mais de longueur différentes selon l’espacement entre les jetons. Face à cette situation, jusqu’à 6-7 ans l’enfant considère qu’il y a plus de jetons là où la ligne est la plus longue. Cette réponse verbale est une erreur d’intuition perceptive qui révèle selon Piaget que la notion de nombre n’est pas acquise (Houdé, 2006). Pourtant, des chercheurs (Mehler, Bever) ont réitéré l’expérience en remplaçant les jetons par des bonbons et ont ainsi montré que dès 2 ans, les enfants étaient capables d’apporter la bonne réponse. « L’émotion et la gourmandise, puisqu’il s’agit de manger le plus grand nombre de bonbons, rendent ainsi le jeune enfant « mathématiciens » » nous dit Houdé (2006). Cet exemple illustre que si les chercheurs adaptent les méthodologies traditionnellement déployées auprès de la population adulte à celle des enfants, alors ils auront davantage de chance de constater que l’enfant n’est pas si irrationnel qu’il ne le laisse a priori paraître.

2.2.1 – Les limites des méthodes traditionnelles de collecte des données

59Les méthodes classiquement mobilisées par les chercheurs quand ils s’adressent à la cible enfantine sont les entretiens ou les échelles de mesure. En dépit de conseils, rédigés par des chercheurs très familiers de la cible des enfants consommateurs (Derbaix et Pecheux, 2000), et qui sont judicieux à suivre quand on réalise des entretiens ou que l’on administre des instruments de mesure aux enfants, ces techniques classiques présentent des limites qu’il convient de rappeler rapidement.

60Le questionnaire, qui peut prendre la forme d’échelles de mesure d’un concept quelconque cumule un ensemble de handicaps en lien avec les limites cognitives des enfants, comme le rappelle Brée (2007). Les enfants, plus à l’aise avec les informations visuelles que verbales, peuvent éprouver des difficultés de compréhension face aux questions qui leur sont posées. Chez les plus jeunes même, le seul fait de déchiffrer les questions auxquelles ils sont soumis peut être un problème en soi. Quand bien même l’enfant serait en mesure de lire l’information qui lui est soumise, encore faut-il qu’il soit capable d’exprimer avec des mots sa pensée. La pauvreté de son vocabulaire l’empêche souvent de formuler clairement ses idées.

61Par ailleurs, en raison d’une maîtrise de l’écriture encore limitée, l’enfant est plus à l’aise face à des questions fermées qu’à des questions ouvertes. De même, lui demander de catégoriser des alternatives en fonction de ses préférences relève d’un exercice périlleux qui a toutes les chances de donner lieu à des réponses erronées.

62Dans le cas particulier des instruments de mesure, la question du choix des items composant l’instrument est fondamentale et doit faire l’objet de nombreuses études préliminaires (cf. à ce sujet les dispositifs méthodologiques des recherches portant spécifiquement sur le développement d’instrument de mesure à destination des enfants). Par ailleurs, le nombre d’échelons à considérer et la forme des échelles d’attitude sont deux difficultés auxquelles les chercheurs sont confrontés quand ils s’adressent à une population enfantine. Deux échelons par polarité et la suppression de l’échelon central, source d’ambiguïté, sont à privilégier (Brée, 1991). Sauf pour les plus jeunes d’entre eux, les échelles iconiques (smiling faces) ne donnent pas de résultats plus fiables que les échelles verbales (Mac Neal, 1992).

63La mesure des réactions affectives après exposition à un stimulus, souvent présentes dans les comportements de consommation des enfants, peut faire l’objet de méthodes déclaratives verbales classiques (ce qui n’est pas exempt de limites comme on peut aisément l’imaginer) mais peut aussi donner lieu à l’enregistrement déguisé des expressions faciales des répondants (méthode non verbale) ainsi qu’au moyen d’un moniteur des réactions affectives (cf. l’article de synthèse de Derbaix et Poncin, 2005 pour une synthèse sur les apports et les limites de ces méthodes). Si les méthodes non verbales présentent indéniablement des avantages, aucune mesure ne semble être la panacée pour rendre compte de l’éventail complet des réactions affectives. Les auteurs concluent donc en préconisant une approche multi méthodes qui permet ainsi de compenser les inconvénients de certains instruments de mesure par les avantages des autres et vice versa.

64Quant aux entretiens, les chercheurs se retrouvent face à des enfants qui peinent à verbaliser les raisons de leurs comportements. Ayant des difficultés à faire preuve de décentration et de réflexivité, les enfants la plupart du temps poursuivent inconsciemment des buts mais éprouvent des difficultés à faire le lien entre des actions qu’ils ont entreprises ou des choix qu’ils ont réalisés et les raisons qui ont fondé ces choix. Face au chercheur, les enfants se sentent alors obligés soit de rationaliser a posteriori leurs choix en inventant des réponses aux questions qui leur sont posées, soit de reprendre les propos des adultes parce qu’ils croient que c’est ce que le chercheur attend d’eux. Le chercheur est donc dans l’obligation de s’en tenir à des données factuelles.

65Enfin, devant la difficulté des enfants à se concentrer et à maintenir leur attention, les chercheurs ont tout intérêt à réfléchir à des dispositifs de collecte des données plus ludiques et pédagogiques et qui ne nécessitent pas de la part de l’enfant un temps de traitement de l’information trop long.

2.2.2 – Un renouveau des méthodes de collecte des données auprès des enfants

66Deux directions très différentes, parmi d’autres, peuvent être envisagées pour contrer les limites des méthodes plus classiques de collecte des données et tenter ainsi de mieux rendre compte de la rationalité limitée des enfants consommateurs. Il s’agit de la méthode ethnographique et des mesures implicites.

67L’article récent de Ezan (2009) prône l’utilisation de la méthode ethnographique pour mieux comprendre les pratiques de consommation des enfants. Plutôt que de partir du postulat selon lequel les enfants, en raison de leurs capacités cognitives encore limitées, ne peuvent fournir d’informations valides et fiables et qu’il vaut par conséquent mieux interroger leurs parents, les défenseurs de la démarche ethnographique prennent le contre pied de cette posture. Ils considèrent au contraire qu’il faut placer l’enfant au cœur des dispositifs de collecte des données et chercher à comprendre la réalité telle que l’enfant la raconte, en faisant confiance à sa parole. Il ne s’agit pas forcément de croire tout ce que dit un enfant mais de partir du principe qu’il dit bien ce qu’il a besoin de dire et que dans la situation qui est la sienne, son comportement est logique.

68En développant ainsi une méthode centrée sur l’Autre, qui exige de la part du chercheur une immersion sur le terrain et la recherche de sources d’informations variées (observation de pratiques et de rituels, entretiens individuels et collectifs, netnographie, études de productions réalisées par les enfants type dessins…), Ezan (2004) soutient qu’il est ainsi possible de dépasser les traditionnels écueils méthodologiques des outils traditionnels de collecte des données et comprendre ainsi plus finement les pratiques de consommation des enfants.

69Dans la même veine que l’approche ethnographique, Banister et Booth (2005), pour recueillir les préférences des enfants en matière alimentaire, ont développé une méthodologie de collecte des données appropriée aux enfants âgés entre 4-11 ans. Après avoir observé pendant 3 mois les pratiques enfantines dans des écoles, les auteurs proposent un dispositif fondé sur trois techniques différentes : des tests projectifs qui demandent aux enfants de décorer des arbres symbolisant « les choses qui sont dégoutantes pour toi », « les choses qui n’ont pas bon goût pour toi » et « les choses qui ont bon goût pour toi ». Puis cette phase est complétée par des photographies prises par les enfants de produits qu’ils apprécient. Ces photos sont ensuite commentées lors d’entretiens individuels dans une dernière phase de l’étude. Les auteurs soulignent qu’en développant des méthodologies de collecte des données variées mais toutes adaptées à la cible enfantine, les chercheurs multiplient les possibilités d’obtenir des données riches.

70En synthèse, l’approche ethnographique appliquée aux jeunes consommateurs permet de contourner un certain nombre de difficultés que le chercheur peut rencontrer s’il utilise des instruments de mesure plus classiques (Ezan, 2009). En reposant principalement sur l’observation des comportements des enfants dans des milieux qui leur sont familiers (école, centre de loisirs, restaurants scolaires, cour de récréation…), elle pallie la difficulté qu’ils ont à verbaliser les raisons de leurs comportements et à comprendre ce qu’on leur demande. Parce qu’elle s’inscrit dans la durée, la méthode ethnographique permet aux chercheurs de recourir aux outils de collecte des données qui leur semblent les plus appropriés à la population qu’il observe. Ils peuvent ainsi non seulement les adapter en fonction des situations familières vécues par les enfants, mais aussi faire varier leur nature pour ne pas lasser les enfants.

71Dans un tout autre registre, les mesures implicites de mémorisation présentent sans aucun doute un intérêt pour les chercheurs en marketing, étudiant les populations enfantines. En effet, selon Derbaix et Poncin (2005), « en matière de prise de mesure, tout ce qui rend le consommateur conscient qu’il fait l’objet d’une mesure s’écarte de l’idéal. Prendre conscience de l’existence d’une prise de mesure, d’un instrument, peut déformer ce qu’il va ressentir. Au plus tard le consommateur est conscient de l’existence d’une prise de mesure, au mieux ». Or comme le rappellent Trendel et Warlop (2005), le principe des mesures implicites de mémorisation est le suivant : après exposition à un stimulus cible, les sujets exposés sont invités à réaliser une tâche (sans aucune référence à la situation d’exposition), qui va révéler indirectement l’éventuel effet de cette exposition. La comparaison de la performance atteinte lors de la réalisation de cette tâche par un groupe de sujets préalablement exposés, à la performance atteinte par un groupe comparable non exposé (groupe de contrôle), indiquera l’effet consécutif à l’exposition. Les mesures implicites reposent ainsi sur la mise en évidence d’un accroissement de la performance lors de la réalisation d’une tâche.

72Particulièrement adaptées pour des cibles susceptibles de rencontrer des difficultés à se remémorer consciemment des informations, les mesures implicites de mémorisation permettent de tenir compte d’effets produits en l’absence de conscience du stimulus étudié ou de l’influence de ce stimulus (Herrmann et ali., 2011). Elles participent également à la diminution des biais inhérents aux mesures plus classiques (biais de rationalisation a posteriori, biais de désirabilité sociale, biais liées à la construction de réponse…) et qu’il est fréquent de rencontrer auprès de la population enfantine.

73Dans le prolongement de la présentation du modèle LISA Q (Derbaix et Grégory, 2004) dont nous avons souligné la pertinence au niveau de la cible enfantine, les mesures implicites de restitution mémorielle permettraient par exemple de prendre en compte l’ensemble des effets produits par un spot publicitaire, et ce quelle que soit la (ou les) portes de persuasion empruntée(s). Ainsi, ces mesures ne se contentent pas, comme le font les traditionnelles mesures directes reposant le plus souvent « sur un rapport verbal direct (explicite) de l’objet d’investigation » (Trendel et Warlop, 2005), de recueillir les effets conscients, mais cherchent plutôt à capturer les traces mémorielles laissées par les messages publicitaires, dont l’origine et l’influence semblent essentiellement et le plus souvent inconscientes.

Conclusion

74Les récents travaux des psychologues spécialistes du développement de l’enfant ont remis en cause un certain nombre d’idées reçues concernant l’enfant, parmi lesquelles domine l’idée selon laquelle les enfants seraient des adultes en construction. Dans ces travaux, les enfants et les adultes sont considérés comme deux populations distinctes, puisque leurs modes de pensée sont spécifiques. L’enfant présente en effet des capacités différentes de celles de l’adulte en termes d’attention, de compréhension ou encore de mémorisation et à ce titre, il est important de le considérer en tant que tel, sans le définir comme un adulte inachevé. Dans ces approches, l’enfant est considéré dans les recherches comme un objet modeste qui ne peut pas ou si peu alimenter notre compréhension de la cognition chez l’adulte. Pourtant les chercheurs en psychologie cognitive proposent une autre perspective en postulant que la plupart des facultés qui caractérisent l’adulte s’enracinent dans l’enfance. Cette approche est sans doute plus porteuse pour les chercheurs en sciences de gestion qui s’intéressent aux mécanismes d’apprentissage de la consommation parce qu’elle permet de se servir de l’enfance comme d’un soubassement heuristique permettant de se réapproprier les différents stades de développement de l’intelligence humaine et de comprendre pas à pas les mécanismes qui sous-tendent cette construction.

75Ainsi, à l’instar de ceux qui étudient le développement de l’enfant et qui ont montré par exemple que quand les adultes faisaient des sciences, de l’art ou de la philosophie, ils mobilisaient des compétences ancrées dans le monde de l’enfance comme apprendre de manière désintéressée ou encore laisser libre cours à leur imagination, il semble pertinent, dans notre discipline des sciences de gestion, et en particulier en marketing, de revisiter le concept de rationalité en replaçant l’enfant au centre de nos schèmes compréhensifs. Dans cette perspective, le concept de rationalité exemplaire examinée par Denis (2009) pourrait ainsi servir de cadre conceptuel pour analyser les ressources de l’enfant, ressources transposables pour mieux comprendre le consommateur adulte. Pour préciser ce que nous avançons, partons d’une situation d’incertitude pour laquelle, les individus ne disposent pas d’informations utiles pour fonder leurs choix et se retrouvent seuls, face à eux-mêmes, pour inventer le comportement qu’ils jugent convenir à la situation à laquelle ils sont confrontées. Ils adoptent alors un comportement que l’on qualifie d’inédit et qui peut s’ériger en comportement exemplaire. Ne pourrait-on pas alors imaginer, qu’en observant le comportement des enfants et leurs toutes premières expériences du monde de la consommation, on pourrait ainsi mieux saisir le comportement des adultes et en conséquence les fondements de leur rationalité ? Plus concrètement, pour ne reprendre par exemple que la notion d’incomplétude de l’information, une observation longitudinale du comportement des enfants face à une situation de consommation donnée pourrait nous renseigner sur la construction des stratégies de traitement de l’information que celui-ci met peu a peu en place pour fonder ses choix, en fonction des informations qu’il apprend à traiter. Ces éclairages nous serviraient sans doute à mieux comprendre les comportements des adultes plus tard…

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