La notion de « martyr » a évolué dans l’histoire et reste, plus que jamais, sujette à débat. Le verbe grec marturein signifie à l’origine « témoigner » dans le cadre d’un procès. Durant les deux premiers siècles de notre ère, la signification du mot a évolué pour signifier « témoigner de sa foi devant Dieu ». Les premiers à témoigner de leur foi furent les chrétiens, en refusant de sacrifier aux dieux païens et à l’Empereur. Les premiers martyrs chrétiens préféraient être soumis au supplice et à l’humiliation de l’arène plutôt que d’abjurer leur foi. Le terme shahid en arabe est, par de nombreux aspects, similaire à la notion grecque du martyr. La racine sh – h – d signifie « être témoin, être présent, participer », mais aussi « donner la preuve de quelque chose ».
Bien que le martyre musulman cristallise aujourd’hui toutes les passions, la religion musulmane n’a pas le monopole du martyre. La notion de martyre fut jadis au cœur du christianisme et rappelons également que le martyre n’est pas forcement religieux, comme le montre fort bien l’exemple des Tigres Tamul au Sri Lanka ou celui des kamikazes japonais. Il y a donc une multiplicité de nuances possibles au sein du martyre ; un concept qui continue de diviser. En effet, l’emploi d’expressions et de termes différents – kamikaze, suicide bombers, martyr ou terroriste – montre à quel point ces termes sont lourds de sens et correspondent « autant à des univers de représentations culturelles et linguistiques qu’à des choix politiques »…