La manifestation des professeurs du 15 octobre 2013 devait partir à 18 heures du centre de Rio de Janeiro. Moins de cinq minutes avant l’heure, des jeunes habillés en noir, portant des masques et des capuches, sont arrivés des rues parallèles et ont remonté l’avenue en silence jusqu’à l’église de la Candelária, point de départ habituel des cortèges à Rio. Ils étaient plus de cinq cents ; ils seraient plus de mille un peu plus tard.
Quand ils sont arrivés, les professeurs ont entamé des chants déjà fameux, des sortes de cris de guerre : « Uh ! Uh ! Uh ! », « Uh ! C’est le Black Bloc ! ». En bondissant, ces corps souples, légers, surprenants, dont plusieurs Noirs des banlieues et des favelas, répondaient à la camaraderie qui s’exprimait dans ces cris. C’était ainsi que la tactique Black Bloc montrait sa face la plus politique dans les manifestations à Rio, en soutenant ouvertement les professeurs en grève qui avaient été sévèrement réprimés quinze jours auparavant devant le palais du Conseil municipal. Le soutien était devenu réciproque : réagissant à la répression toujours plus sévère à l’égard des Black Blocs, les professeurs portaient des T-shirts avec les mots « Black Prof » et des placards avec la phrase : « Le Black Bloc, c’est mon élève, une attaque contre lui c’est une attaque contre moi ».
La tactique Black Bloc est née dans les années 1980 au sein du mouvement antinucléaire allemand comme une forme de protection contre la répression policière croissante. Des collectifs anarchistes et antifascistes habillés en noir et portant des masque…