Depuis la publication de mon livre, Fille de harki, en février 2003, je recueille et publie, entre autres, des témoignages liés à la guerre d’Algérie, et plus particulièrement ceux des anciens supplétifs et de leurs familles. Le recueil de mémoire est, pour moi, une sorte de grande aventure humaine. Je me laisse porter par des récits, par des interrogations, par des indignations, par mes propres sentiments lorsqu’au détour d’une parole, d’un regard ou d’un geste corporel, se dégage un bout de la petite histoire individuelle qui vient éclairer et préciser un pan de la grande Histoire.J’ai retenu ici les témoignages de Mohamed et Mohand, deux anciens harkis, et Zinouba, veuve d’ancien supplétif. Mohamed et Zinouba, je les ai rencontrés lors de mes conférences. Mohand, je l’ai côtoyé pendant mes années de vie dans les camps dits « de harkis ». Ces trois premiers témoins m’ont confié leur récit dans un mélange d’arabe dialectal ou de berbère ponctué régulièrement par du français. C’est avec leur accord que je les ai rédigés sous la forme que l’on lira. Tous les trois ont préféré rester dans l’anonymat pour des raisons de sécurité, vraies ou imaginées, mais qui montrent combien le chemin à parcourir est encore long pour que l’histoire s’apaise enfin.Les deux autres témoins, Daniel et Marc, je les ai découverts grâce à la magie d’Internet.Daniel avait publié sur un forum Internet, par l’intermédiaire d’un journaliste, un texte où il racontait le jour où, en avril 1962, il avait dû sur ordre de ses supérieurs « raccompagner », depuis la métropole, des harkis chez eux, en Algérie, où ils risquaient leur vie…