Né en 1960, Yu Hua était enfant quand la Révolution culturelle a éclaté. Au début des années 1980, il commence à bâtir une œuvre nourrie de l’expérience de toute une génération et marquée par l’influence de nombreux auteurs occidentaux, de Kafka au Nouveau Roman en passant par Kawabata et Borgès. Il est l’une des figures les plus fortes de la nouvelle littérature chinoise.
Parmi les premiers textes qui ont fondé la réputation du jeune écrivain Yu Hua figure une longue nouvelle d’une facture insolite : 1986. Le choix de l’année, qui n’offre rien de remarquable par rapport à celle qui précède ou qui suit, semble motivé en premier lieu par le moment de la rédaction : la date portée à la fin de la nouvelle, qui paraîtra en juillet 1987, indique qu’elle aurait été achevée le 31 décembre 1986. On imagine l’auteur, à l’instant charnière où le temps bascule d’une année à l’autre, se retournant sur les mois écoulés pour en tirer le bilan, personnel ou collectif. Toutefois, le choix du matériau sur lequel s’effectuera cet exercice de remémoration n’a pas été abandonné au hasard : 1986, en effet, est une date anniversaire doublement symbolique, puisque, à défaut d’avoir prêté son millésime à des événements qui resteront dans l’histoire chinoise, elle évoque par son dernier chiffre deux années mémorables, celle du début de la Révolution culturelle (1966) et celle qui marque sa fin (1976). Si la remontée de souvenirs liés à la décennie terrible n’a rien que de très banal en ce milieu des années quatre-vingt, sa mise en forme dan…