Notes
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[1]
Benaglia F. Petit Dernier : Le grand départ pour la petite école. Paris : Sarbacane, 2012.
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[2]
Ces trente dernières années, la littérature de jeunesse a connu un authentique essor. Différentes instances de légitimation ont concouru à lui ériger un véritable statut dans un champ qui s’est affirmé de plus en plus autonome. Son entrée à la Bibliothèque nationale de France a consacré sa patrimonialisation. Elle a intégré les programmes scolaires en devenant le vecteur privilégié de la culture littéraire et une épreuve au concours de Professeur des écoles lui était encore récemment dédiée. Les prix littéraires, les salons, les revues critiques spécialisées ont aussi contribué à l’installer comme l’un des segments du marché littéraire les plus solides. Isabelle Nières-Chevrel avance cependant que, malgré la démocratisation de l’accès aux livres, la production éditoriale n’en reste pas moins très hiérarchisée montrant combien restent fortes les disparités sociales et intellectuelles. On a d’un côté une création inventive exigeante, relayée par les discours critiques et par les médiateurs, de l’autre un marché de masse moins contrôlé, peu commenté mais économiquement puissant (Nières-Chevrel, 2009, p. 52).
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[3]
Dès 1977, Jean-Claude Chamboredon et Jean-Louis Fabiani avaient établi que « le système des définitions de l’enfance développé dans les livres pour enfants entretenait une relation d’homologie avec le système de classes sociales et avec les formes de socialisation pratiquées dans les différentes classes » (Chamboredon & Fabiani, 1977, p. 72).
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[4]
Monsieur et Madame (Hachette), T’choupi (Nathan) et Le loup qui voulait changer de couleur (Auzou).
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[5]
Lecherbonnier E., Le livre jeunesse joue dans la cour des grands, Ina Global, http://www.inaglobal.fr/edition/article/le-livre-jeunesse-joue-dans-la-cour-des-grands, 4 mai 2016, site consulté le 25 mai 2016.
-
[6]
Bondoux A. & Capdevila R. Le prince Nino à la maternouille. Paris : Bayard Jeunesse, 2008.
-
[7]
Bawin M.-A. & Le Masne C. Tom va à l’école. Paris : Mango Jeunesse, 1996.
-
[8]
Henkes K. Juliette s’inquiète. Paris : Kaléidoscope, 2007.
-
[9]
Lager C. K. & Dubois C. Tout rouge. Bruxelles : Pastel, 1993.
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[10]
Bardy S. Dring, c’est la rentrée ! Paris : Magnard Jeunesse, 2002.
-
[11]
De Bourgoing P. & Hahn N. La rentrée. Fribourg : Calligram, 1996.
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[12]
Graux A. & Yeong-Hee L. Jinju, ma nouvelle école. Paris : Chan-Ok, 2010.
-
[13]
Dreyfuss C. & Choux N. Premier jour d’école. Paris : Thierry Magnier, 2007.
-
[14]
Benaglia F. Petit Dernier : Le grand départ pour la petite école. Paris : Sarbacane, 2012.
-
[15]
Bouchama N. & Magdalena. 24 petites souris vont à l’école. Paris : Flammarion-Père Castor, 2004.
-
[16]
Barton J. & Hest A. En route pour l’école, Bébé Canard ! Paris : Kaléidoscope, 1999.
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[17]
Moundlic C. Chamalo rentre à l’école. Paris : Flammarion- Père Castor, 2010.
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[18]
Scotton R. Splat le chat. Paris : Nathan, 2011.
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[19]
Bloch S. L’école de Léon. Paris : Albin Michel Jeunesse, 2000.
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[20]
Gaudrat M.-A. & Camil C. La rentrée de la famille Cochon. Paris : Bayard Jeunesse, 1993.
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[21]
Magdalena. & Richard L. Bali va à l’école. Paris : Flammarion-Père Castor, 2011.
-
[22]
Bour D. Petit Ours Brun : le premier jour d’école. Paris : Bayard Jeunesse, 2012.
-
[23]
Horse H. Petit lapin va à l’école. Bruxelles : Pastel, 2004.
-
[24]
De Montsabert A. S. & Chatellard I. Ma couverture et moi. Paris : Casterman, 2000.
-
[25]
Morgentsen S. Emma et l’école. Paris : Nathan, 2007.
-
[26]
Scotto T. & Martin T. La rentrée de la petite sorcière. Paris : Bayard Jeunesse, 1998.
-
[27]
Pleux D. Zoup va à l’école. Paris : Odile Jacob, 2013.
-
[28]
Annette Lareau a observé la vie quotidienne d’enfants de dix ans, blancs et noirs dans différentes sphères de socialisation (famille, école, pairs). Elle a montré, à la suite de cette expérience, que la classe sociale prévaut sur l’origine ethnique et que les modalités éducatives s’organisent autour de deux modèles d’élevage des enfants. Les parents de la classe moyenne sont engagés dans une éducation de type « concerted cultivation », une mise en culture négociée destinée à développer les talents et la capacité de raisonnement des enfants tandis que les parents de la classe ouvrière favorisent « the accomplishment of natural growth », la pousse naturelle qui laisse les enfants grandir et choisir leurs activités mais qui privilégie davantage les directives que le raisonnement.
-
[29]
Lauer D. Juliette va à l’école. Champigny-sur-Marne : Lito, 1994.
-
[30]
Belineau N., Beaumont E. & Michelet S. La maternelle. Paris : Fleurus, 2008.
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[31]
Becue B., Ricard A., Ristord E. & Souppart G. L’école maternelle. Paris : Milan Jeunesse, 2010.
-
[32]
Matter P. Mini-loup à l’école. Paris : Hachette Jeunesse, 1993.
-
[33]
Doinet M. & Botton S. Ma première année d’école. Trois-Ponts : Lipokili, 2006.
-
[34]
Suigne M-C. & Macias J.-L. Loly à l’école. Paris : Hemma, 1983.
Introduction
1Entrer à l’école, « c’est émigrer, quitter une petite société, la famille, pour entrer dans une autre société vaste, populeuse, bruyante et impersonnelle, l’école » (Baby, 2013, p. 2). Ce passage de la sphère privée de la famille à la sphère publique scolaire, décrit ici par Antoine Baby, s’affiche comme un des premiers rites de passage de la petite enfance. L’entrée à l’école cristallise désormais des enjeux de plus en plus resserrés autour d’une adaptation scolaire et sociale réussie du jeune enfant. Elle se présente comme une étape de socialisation forte qui condense, comme l’a observé Rachel Gasparini, toutes les caractéristiques d’un rituel contemporain (dimension collective, séparation du reste de la société avec mise à l’écart dans un espace-temps spécifique, références communes à des croyances sociales qui relèvent de l’éducatif et du psychologique), un « moment clé » qui indique à l’enfant le changement de statut et les attendus de comportement liés à ce changement de statut (Gasparini, 2013).
2La première rentrée scolaire opère la séparation et engage l’enfant à entrer dans cette phase où la distance entre deux mondes, le monde du dehors et le monde du dedans, « le monde social » et « le monde scolaire » va être institutionnalisée (Marchive, 2007, p. 599). Une fois séparé de sa famille, l’enfant va intérioriser un ordre scolaire fondé sur une stricte organisation de l’espace et du temps et une définition précise des rôles et des places de chacun. Si le respect de l’espace et du temps, la discipline du corps sont les axes forts de cet ordre nouveau, l’apprentissage du métier d’élève, conceptualisé comme « l’habileté de l’enfant à jouer le jeu de l’école, à faire ce qu’on attend de lui » (Perrenoud, 1995, p. 13), ne peut être réduit à l’acquisition de savoirs et de savoir-faire, mais repose sur la définition d’un savoir-être légitime requis par l’institution qui passe par le contrôle des émotions (Mabilon-Bonfils, 2010).
3Les livres pour enfants destinés à accompagner la première rentrée viennent investir cette niche en mettant en exergue les injonctions contradictoires d’épanouissement mais aussi de réussite qui pèsent sur les épaules de l’enfant contemporain. Les ouvrages traitant de la rentrée se situent au cœur de ces tensions. Ils se proposent de préparer émotionnellement les familles et de désamorcer l’intensité dramatique associée à cette transition en offrant un panel de mises en représentations des codes émotionnels dispensés aux enfants et à leurs parents à l’occasion du premier jour d’école. Les livres témoignent et explicitent d’une part les modalités de ce rite de passage, mais ils s’affichent aussi comme des prescripteurs en favorisant « l’identification sur un enfant-héros en prise avec les difficultés du réel qui invente des modalités adaptatives efficaces » (Bauer, Mietkiewicz & Ostrowski, 2013, p. 86).
4Le postulat de cet article repose sur l’idée que les albums de littérature jeunesse s’inscrivent à ce titre comme une instance de socialisation à part entière. Les livres, qui à la fois s’adressent aux enfants et les mettent en scène, révèlent les différentes visions de l’enfant mais aussi les logiques qui sous-tendent ses actions et celles de la chaîne d’acteurs qui s’organisent autour de lui. Plusieurs sociologues ont saisi ce matériel pour évaluer l’évolution de l’architecture des liens familiaux et les termes du « contrat social » qu’il redéfinit. Sylvie Cadolle, dans un article consacré à la recomposition familiale, évoque un « matériel privilégié pour observer comment les nouvelles normes familiales se manifestent » et « un miroir médiatique, où se réfléchit et se corrige l’expérience sociale » (Cadolle, 2001, p. 29). Régine Sirota, à travers l’observation du rite d’anniversaire, parle de son côté d’un « traité moderne de civilités mettant en miroir l’évolution des normativités contemporaines », témoin privilégié de la fabrication de modèles éducatifs au travers d’une mise en scène littéraire (Sirota, 2013, p. 24).
5Les livres pour enfants, relatifs à l’univers de l’école, sont partie prenante de ce processus de transmission qui « mobilise des schèmes comportementaux, des schémas de pensée, des normes sociales, morales, politiques, des limites à ne pas transgresser, etc. » (Amigues, Zerbato-Poudou, 2000, p. 101). Ils sont empreints de tout un environnement prescriptif propre à une époque ou à une période mais ils sont aussi « une fabrique de représentations » ancrée dans un champ idéologique qu’il convient de décrypter. La littérature de jeunesse offre un paysage éditorial large à même de délivrer un répertoire de normes variées. Le marché de l’édition est un échiquier non homogène, un univers hiérarchisé marquée par des polarités, où littératures légitime et illégitime [2] cohabitent. Les normes identifiées dans les ouvrages nous renseignent sur la façon dont la gestion des émotions est déclinée et socialement distribuée. Elles révèlent par là même combien une connivence plus ou moins explicite entre l’école et ses futurs lecteurs-élèves peut s’établir et niveler les relations. Les albums participent, en livrant des interprétations contrastées, à une inégale appropriation du « métier d’élève » par les différentes classes sociales. Les mises en scènes, fruit de choix éditoriaux, vont naviguer entre ces tensions en privilégiant de répondre à ces angoisses, de les conjuguer, ou de les éluder.
Une méthodologie basée sur une analyse de contenu et une « enquête de présentoirs »
6Dans un premier temps, un corpus de 158 ouvrages a été rassemblé. Le choix s’est porté sur des albums narratifs et documentaires destinés aux trois-six ans. Les albums ou livres d’images combinent l’association de textes et d’illustrations ; ils font système et constituent à ce titre « un terrain de prédilection privilégié pour saisir les représentations » (Brugeilles, Cromer & Cromer, 2002, p. 264). La thématique d’une toute première fois à l’école a été retenue avec l’idée de rendre lisible, à travers l’analyse des rouages scénaristiques, les points forts de ce passage et de pointer la place des émotions associées à la séparation de l’enfant d’avec sa famille. Les catalogues des bibliothèques et des éditeurs, les sites de livres d’occasion, les bibliothèques d’écoles ont permis de recenser de façon quasi-exhaustive les albums répondant à ces critères de 1970 à nos jours.
7La très grande majorité du corpus est constituée par des albums narratifs adoptant un schéma classique. Le début du récit expose une situation initiale stable que vient perturber un événement : l’entrée à l’école. Puis la narration se développe avec ses actions et ses péripéties jusqu’à la résolution du « problème ». L’histoire s’achève alors sur une situation finale équilibrée. Ce schéma récurrent obéissant aux lois traditionnelles de l’album s’est prêté idéalement à l’analyse de contenu mise en place à partir de la modélisation du rite de passage de Arnold Van Gennep (1909). Ce dernier ramène pour sa démonstration l’ensemble des pratiques à une séquence ternaire désormais classique : la phase de séparation/la phase de marge/la phase de réagrégation. Le séquençage en trois phases du rite de passage a orienté l’examen de cette étape fondatrice en permettant de circonscrire les normes qui prévalent dans la mise en place de cette transition entre l’école et la famille. Les items susceptibles dans chaque phase de mettre en évidence les composantes et articulations de ce passage entre famille et école ont été inventoriés. La gestion des objets personnels, le mode de transmission des règles, les interactions entre personnages (famille, enseignants, pairs) ont permis de décrypter les dispositions du futur élève et de sa famille face à la gestion de cette rupture annoncée entre espace privé et espace public. Enfin, c’est l’album, en tant qu’objet, qui a été observé, le style et le vocabulaire employé, la palette de couleurs utilisée, ses entours (couverture, dédicace, quatrième de couverture) se révélant comme autant d’indices de la polarité des choix réalisés par les éditeurs.
8Une cinquantaine de maisons d’édition sont présentes dans le corpus. Elles sont représentatives de l’échiquier qui compose l’activité du secteur jeunesse dans son ensemble et développent des politiques sous-tendues par des valeurs et des définitions sociales de l’enfance variées [3]. Selon Nic Diament, spécialiste de la littérature de jeunesse, l’éventail est large entre les petites maisons « plus présentes par la réception favorable de la critique et des médiateurs que par leur chiffre de vente – et les multinationales capables de mettre en place des stratégies de marketing sophistiquées » (Diament, 2008, p. 49).
9Dans les grandes maisons, l’édition repose sur une certaine industrialisation notamment avec la sérialisation de titres portés par des héros-licences. Les licences et les personnages récurrents [4] sont largement plébiscités. Les séries les mettant en scène ont totalisé, en 2016, des ventes avoisinant les 3,6 millions d’exemplaires [5].
10Ce phénomène de concentration largement partagé par les autres secteurs de la production éditoriale laisse cependant la place à de petits éditeurs qui réalisent l’essentiel de leurs ventes grâce à des librairies indépendantes et aux librairies spécialisées, par lesquelles passent également souvent des achats de bibliothèques municipales (Clavreul, 2015, p. 43).
11Dans le cadre de cette recherche, le poids de cette médiation marchande a été à l’origine d’une autre démarche d’investigation qui est venue se greffer à l’analyse de contenu déjà initiée : « une enquête de présentoirs », des photos prises au mois de septembre dans des supermarchés, librairies générales et spécialisées, ont livré un instantané de la répartition de la production permettant de constater comment, dans un paysage éditorial et commercial hiérarchisé, se répartissaient les albums entre littérature légitime et littérature illégitime, entre réseau populaire et réseau lettré.
12La qualité des illustrations ou de la narration, le degré d’élaboration du discours de présentation de la ligne, le rapport à la diffusion et aux impératifs financiers posent les barreaux d’une échelle de légitimité plus ou moins visible qui hiérarchise le secteur. Pierre Bourdieu, qui a été un des premiers à dévoiler les mécanismes sociaux qui aboutissent à la reconnaissance d’une « culture légitime », a mis en avant le pouvoir de consécration détenu par certaines instances sociales : académies littéraires, écrivains décernant des prix, critiques littéraires et intellectuels. Il a montré combien le champ de la littérature canonique pouvait être délimité par une élite soucieuse d’affirmer symboliquement sa distinction par rapport au public des œuvres non consacrées. À l’image du champ de la littérature générale, le secteur de la littérature de jeunesse comporte lui aussi « ses dominants et ses dominés, ses conservateurs et son avant-garde, ses luttes subversives et ses mécanismes de reproduction » (Bourdieu, 1987, p. 167).
13Selon le profil éditorial et donc social (légitime/illégitime) des livres du corpus, l’ambition de cette contribution est, donc, de pouvoir rendre compte des variations de prescriptions associées à ce passage émotionnel du statut d’enfant au statut d’élève et d’établir les conceptions de l’enfance et de l’élève qui se distinguent. Le niveau d’« affinité culturelle » (Chamboredon & Prévot, 1973) ou encore de « connivence culturelle » (Plaisance, 1986) tissé avec l’école par le biais des albums ne s’établit pas sur les mêmes registres en fonction du type d’ouvrage et des définitions de l’enfance qui le sous-tendent.
Les codes émotionnels dispensés dans les albums alimentent une connivence culturelle nivelée
14L’enfant ou futur élève est « porteur d’une socialisation façonnée par la famille, il est porteur de l’habitus de sa classe sociale » (Sirota, 2009, p. 247). L’entrée à l’école lui impose de s’éloigner de sa cellule familiale pour intégrer un collectif organisé par des règles peu négociables. Rachel Gasparini souligne, dans son article consacré à l’entrée à l’école, la complexité potentielle de répondre aux attendus de comportement liés à une socialisation contraignante : « derrière l’aspect festif, positivé de l’entrée en maternelle, se trouve tout un travail de socialisation, répétitif, explicité ou tacite, basé sur les injonctions du groupe familial et du groupe professionnel à l’égard du jeune enfant pour créer des habitudes et des dispositions durables » (Gasparini, 2013, p. 5).
15Marie-France Doray émet l’hypothèse que l’investissement des familles dans les préparatifs de rentrée contribue « à construire la signification du passage de la famille à l’école ». Elle montre que l’enfant est le support des croyances des parents qui « tentent de mettre en acte, à travers l’enfant, ce qu’ils pensent de ce que devrait être la réalité » (Doray, 1997, p. 175). Selon leur classe sociale et expériences du système scolaire, c’est une logique de rupture ou de continuité entre les univers qui prévaut.
16Au même titre que les cahiers parascolaires étudiés par Pascale Garnier, les livres autour de la rentrée permettent de « focaliser l’analyse sur les médiations matérielles qui opèrent en pratique dans les rapports entre les familles et l’école maternelle » (Garnier, 2013, p. 135). Ils donnent en effet, l’opportunité de saisir la variabilité des dispositions émotionnelles dans lesquelles les familles se placent à la veille d’intégrer la sphère scolaire. « La non-équivalence des socialisations familiales face à l’école » pointée par Muriel Darmon peut être captée dans le contenu de ces livres qui déclinent des modèles de gestion émotionnelle distincts (Darmon, 2001, p. 534).
17Les « postures » émotionnelles des protagonistes inventoriées dans le corpus oscillent entre un enfant acteur dont on reconnait les besoins émotionnels et à même de réguler ses émotions, et un enfant moins réflexif promis à un bonheur scolaire inéluctable.
Privilégier l’expression des émotions
18Les scenarii des albums portés par les maisons d’édition bénéficiant de la reconnaissance des médiateurs du livre montrent comment l’annonce de la prochaine entrée à l’école peut provoquer une montée de l’inquiétude progressive ou une panique immédiate. C’est dans le bac à sable, îlot préservé, refuge provisoire, que Nino « tremble de trouille en pensant à la maternouille » [6] et que l’intériorité de Tom nous est révélée quand ce dernier, mis en scène en posture pensive, confie combien il n’est pas rassuré : « Demain, je vais pour la première fois à l’école. Je me demande bien ce que je vais pouvoir y faire. Je ne suis pas rassuré du tout » [7].
19Les appréhensions liées à la peur de l’inconnu, à la découverte d’un nouvel espace sont partagées par les protagonistes des ouvrages qui évoquent ou listent les angoisses auxquelles ils sont sujets. Juliette peine à surmonter une inquiétude irrépressible, elle inventorie les probables difficultés auxquelles elle imagine être confrontée : « Et si je mets à pleurer ? Et si je ne trouve pas les toilettes ? » [8]. La crainte de perdre ses repères et de céder à l’émotion envahit Juliette mais aussi ses parents qui ne parviennent pas à la rassurer. L’anxiété des personnages les empêche de s’endormir ou les surprend au cœur de la nuit en les réveillant brusquement. Dans le ventre d’Antoine, une boule de peur grossit doucement : « il se réveille en sursaut, son cœur bat très fort. Il se souvient, qu’aujourd’hui, il va à l’école pour la première fois » [9].
20Coulisses ou laboratoires des émotions, les scènes qui s’inscrivent dans l’alcôve de la chambre ou dans l’antre de la salle à manger familiale sont l’occasion pour les personnages des albums de dévoiler de façon quasi-clinique les symptômes physiques de la peur et les émotions liées à la crainte de ce premier jour. « Le cœur de Bo s’affole » [10], « Castorette a la gorge serrée » [11]. L’inquiétude d’être seul, « abandonné, comme dans une forêt inconnue » [12] ou rejeté, met en lumière le bouleversement du territoire intime d’un enfant désormais considéré comme sujet.
21La déstabilisation de la cellule familiale produite par la perspective de la rentrée scolaire favorise le renforcement des valeurs d’amour et de protection. La puissance du lien familial amène les futurs élèves du corpus à partager leurs émotions avec leurs parents. Les illustrations de parents enveloppant leur enfant, les étreignant avec émotion et peinant manifestement à se détacher émaillent les albums les plus récents. Les larmes sont mutualisées à l’image de cette scène issue de Premier jour d’école où l’on accède aux pensées de l’enfant et de sa mère. Alors que le texte nous confie qu’« il pleut des yeux de l’enfant comme des giboulées », on prend connaissance parallèlement des réflexions de la mère qui avoue de son côté que « c’est en dedans les flaques » [13]. L’entrée à l’école vient casser cette bulle et l’émotion est vécue de façon fusionnelle.
22À travers ces représentations, c’est la démonstration d’une circulation de l’affectivité grandissante qui est réaffirmée. La manifestation d’amour organisée devant l’école par la famille de Petit Dernier [14] montre la force du lien familial qui semble avoir besoin d’être exprimée au moment de l’entrée à l’école. Le cocon de la famille est déstabilisé, fragilisé par ce départ vers l’école. La présence de la banderole « on t’aime ! », brandie par les membres de la famille révèle combien l’affectif domine et de quelle façon la figure de l’enfant à protéger s’installe.
23Les émotions se manifestent par la transmission d’objets garants de la sécurité affective et à même de canaliser une émotion parfois débordante… « On offre ce cœur quand tous les enfants vont à l’école et que même le plus petit quitte les jupes de sa maman pour devenir grand. Gardez-le dans votre poche, il vous donnera du courage et de la force. Voyez celui que Mamie Albertine avait brodé pour moi, il est un peu usé mais il ne m’a jamais quitté » [15].
24Le seuil de l’école marque la fin des démonstrations d’affects. L’émotion liée à la séparation, si elle est étayée, doit l’être dans le contexte familial et ne doit pas pénétrer l’enceinte de l’école. Le chemin de l’école est l’ultime lieu d’intimité partagée avec les parents où les personnages peuvent encore exprimer leur malaise : « Bébé canard ne peut pas sautiller, ses pieds sont de plomb » [16], les jambes de Chamalo reculent [17] et Splat a l’impression que « le lampadaire ne veut pas le laisser passer » [18]. « Le jour de la rentrée, j’ai serré la main de maman et j’ai senti comme si je pleurais à l’intérieur pour pas que ça se voie » [19] déclare le personnage principal de l’album L’école de Léon. L’aptitude à intérioriser une tristesse débordante a été relevée par Cléopâtre Montandon qui a mis en évidence que certaines émotions ont intérêt à être contrôlées, camouflées, transformées pour être socialement acceptables dans l’espace scolaire. L’école est un lieu où il est bon de canaliser les émotions. Les enfants apprennent davantage à cacher leurs émotions qu’à les exprimer, ne pas pleurer, ne pas se mettre en colère à l’école, ne pas montrer sa peur devant les autres sont autant de préceptes valorisés en milieu scolaire (Montandon, 1996). Ils signent la capacité de l’enfant à composer avec les exigences scolaires et à payer le « prix d’une dépersonnalisation progressive au fur et à mesure qu’il assume son statut d’écolier » (Mollo-Bouvier, 1975, p. 144).
25Les jeunes protagonistes d’une partie des ouvrages du corpus font preuve d’une conscience aigüe de la nécessité de garder la face et de conserver une maîtrise de soi propice à l’exercice du métier d’élève. L’enfant est ici un individu, au sens où le définit Erving Goffman, déjà inquiet lors de ces premières interactions à l’école, de produire une image de soi conforme aux exigences institutionnelles (Goffman, 1974). Bébé cochon fait un gentil sourire crispé, « tout appliqué à ne pas laisser son menton trembler » [20] et Bali prétend que l’émotion qui le submerge est causée par la douleur que lui occasionnent ses chaussures neuves [21].
26Les histoires du corpus prescrivent une émotion hors les murs et si cette dernière tente de s’immiscer dans le contexte scolaire par l’intermédiaire d’un objet rapporté de la maison, elle doit être rapidement régulée. « Si tu veux, il y a une boîte pour les doudous… Tintin peut y aller, il retrouvera ses copains » rappelle le maître de Petit Ours Brun [22]. Les doudous, objets transitionnels, tolérés un temps pour contenir les émotions, vaincre la peur et accepter la séparation doivent être éloignés pour ne pas nuire aux apprentissages. Il faut se détacher de la dimension affective et privée pour privilégier la nécessité d’installer « la distinction entre espace familial et espace scolaire et assurer la légitimité à venir de l’espace scolaire et du travail pédagogique » (Garcion-Vautor, 2003, p. 143).
27Les objets transitionnels symboles du lien dans la séparation représentent par ce biais une forme de réification des émotions. Renoncer au doudou révèle un signe de maturité affective. Nombreux sont les albums où le personnage énonce lui-même combien l’objet importé de la maison n’a pas sa place à l’école. « J’ai envie de retourner à l’école » dit Petit Lapin « Mais demain je laisserai Billy Cheval à la maison avec toi, maman. Il fait trop de bêtises en classe ! » [23]. Les objets personnels, incarnation d’une émotion encore vivace, doivent subsister dans le secret car derrière le doudou, objet en apparence anodin, se jouent des conceptions de la socialisation qui font l’objet d’injonctions contradictoires. « L’école semble n’accepter le doudou en début de scolarité que pour mieux l’évacuer des préoccupations de l’enfant afin de lui permettre d’entrer dans une attitude scolaire » rappelle Rachel Gasparini Le sevrage doit être organisé pour ne pas faire obstacle à l’appropriation du métier d’élève (Gasparini, 2012, p. 75).
28À la marge, quelques ouvrages offrent des stratégies de contournement de cette prescription scolaire qui donnent lieu à des rebondissements narratifs. Le personnage de la mère dans l’album intitulé Ma couverture et moi transforme une couverture doudou non tolérée à l’école en bonnet et en chaussettes. L’enfant pourra garder le lien avec sa couverture en toute légitimité [24]. De son côté, Emma se sent en confiance grâce à un papier dissimulé au fond de sa poche où il est inscrit « papa » et « maman » [25]. Ces albums qui « défient » légèrement la mise en conformité scolaire restent rares car majoritairement, ce sont la force, la volonté et la maîtrise de soi, au final, qui guident les personnages des récits du corpus.
Contrôler les émotions relève de la compétence parentale
29L’inquiétude grandissante de familles submergées par une affectivité débordante ou les stratégies utilitaristes d’autres familles, favorisent l’essor d’ouvrages dont une partie du contenu s’assimile à une forme de prise en charge didactique destinée à poser les jalons de ce métier de parent d’élève.
30La quatrième de couverture de La rentrée de la petite sorcière [26] rappelle que « pour vaincre sa peur… chacun à sa manière doit trouver son mode d’emploi ». La fiction proposée ne prétend pas délivrer une solution universelle mais invite parents et enfants à ouvrir le débat, à réfléchir sur ce moment clé. La mission de ces albums se profile ici clairement : elle vise à dédramatiser ce passage en privilégiant le discours psychologique désormais largement répandu et vulgarisé qui préconise la nécessité de la parole par le biais du support d’un album. Cette formation active du parent s’illustre dans les recommandations rédigées par l’auteur de Zoup va à l’école [27], qui plaident pour un engagement parental résolument optimiste : « Aider son enfant à imaginer une situation qui lui semble très inconfortable et qui lui fait peur est d’un grand secours : cette sorte de “répétition” lui permet de voir la réalité avec ses bons et ses… mauvais côtés. Mais bien sûr, notre rôle de parent est d’envisager un monde surtout… positif ! »
31L’impératif de contrôler ses propres émotions et celles de son enfant relève de la compétence parentale. La multiplication des astuces, conseils ou recommandations, présente dans les ouvrages, va de pair avec une forme d’injonction à l’art d’être un « bon » parent car la fonction de parent se didactise, « elle est désormais associée à un univers de compétences et d’apprentissages » (Le Pape, 2012, p. 36).
32L’attention accordée dans ces albums à l’inquiétude des protagonistes met en lumière combien toute une frange de la littérature jeunesse a largement été pénétrée par la reconnaissance des discours psychologiques autour de l’enfant. L’enfant est considéré comme une personne à part entière dont il faut reconnaitre les émotions et les capacités. Sa préciosité grandissante a été investie de toute part, le muant en un bien rare qui concentre l’amour des parents et des proches. La passion de l’enfant selon le titre de l’ouvrage de Laurence Gavarini s’est installée au point d’amener l’enfant à être évalué en « termes émotionnels » et de le transformer en « objet d’affects démesurés, déraisonnables » (Gavarini, 2002, p. 136). La figure d’un enfant sacralisé dont il faut privilégier l’épanouissement et l’équilibre psychologique voisine avec l’obsession scolaire des familles qui entraine parfois un « surinvestissement de parents soucieux, face à la compétition sociale, d’armer au mieux leur progéniture » (Neyrand, 2002, p. 51). François de Singly a montré combien ces deux images réfractaient la dualité des attentes sociales vis-à-vis de l’enfance : « Les pères et les mères définissent les contours de l’éducation selon laquelle l’enfant doit devenir lui-même, tout en respectant les obligations scolaires » (De Singly, 1996, p. 129).
Des « prescriptions » qui reflètent les modèles d’appartenance sociale
33L’entrée à l’école requiert un travail émotionnel fort qui engage parents et enfants « à produire ou à inhiber des sentiments de façon à les rendre “appropriés” à la situation » (Hochschild, 2003, p. 38). Cette notion de travail émotionnel, développée par Arlie Hochschild comme la capacité de l’individu à modeler ou à gouverner les sentiments, requiert des techniques qui obéissent à des règles plus ou moins explicites, des règles qui reflètent les modèles d’appartenance sociale. Les ouvrages évoqués précédemment invitent leurs lecteurs à dompter les codes émotionnels et à s’inscrire dans un savoir-être émotionnel requis à l’école. Ils placent les récepteurs dans une adéquation culturelle certaine avec l’école qui favorise le contrôle des émotions par le biais d’une médiation. Les mécanismes à l’œuvre dans la transmission de ces codes évoquent ceux mis au jour par l’enquête d’Annette Lareau [28]. Cette dernière, en observant et en comparant les modalités éducatives mobilisées autour d’enfants issus de classes sociales différentes, a conclu que les familles de classes moyennes, par le biais d’apprentissages informels favorisaient l’entrainement à la maîtrise des situations sociales, laissaient la place au raisonnement tandis que les familles populaires privilégiaient une éducation plus subie. En proposant un étayage plus ou moins élaboré des émotions liées à l’entrée à l’école, les albums participent à ces stratégies familiales d’éducation socialement différenciées à la fois explicites et implicites.
34L’exploration de l’intimité n’est, en effet, pas évoquée dans tous les albums, elle reste l’apanage d’une frange d’ouvrages reconnus comme légitimes et distribués dans les librairies. Cette vision d’un enfant partenaire dont il faut privilégier la réflexivité est diffusée dans la production légitime. C’est un mode de contrôle différent des émotions de l’enfant qui traverse la production populaire où le contrôle social des émotions est prôné d’une autre façon. On ne s’intéresse plus au processus ou à l’étayage de l’émotion. L’évacuation des affects s’effectue via la négation ou la stigmatisation de certains comportements.
Favoriser une rentrée vécue sans heurts : la négation ou stigmatisation des émotions
35Les albums recensés sur les présentoirs des supermarchés et diffusés auprès d’un plus large public s’appliquent, pour la plupart, à refléter une école idéalisée où l’incorporation de la forme scolaire et de ses règles, est vécue sans heurts par un enfant fondamentalement heureux. La séparation d’avec le parent parait acquise, naturelle. Elle ne fait l’objet d’aucune émotion particulière sinon celle de l’impatience d’intégrer cette nouvelle sphère. On note l’empressement joyeux de personnages ravis de rejoindre leur classe et de découvrir les apprentissages promis. Ces ouvrages, dont les personnages pour la plupart sont des héros sous licence issus des séries télévisées, ou portés par des éditeurs aux valeurs traditionnelles, assoient la représentation d’un enfant déjà socialisé inscrit dans un ordre social légitimé où la résistance est relativisée voire inexistante.
36Juliette [29] est pressée de se rendre à l’école, elle se lève de bonne humeur, elle participe d’emblée aux activités, s’intègre avec facilité aux jeux de ses pairs et tisse une bonne relation avec la maîtresse ; l’appréhension est évoquée mais est vite éludée puisque Juliette annonce à sa mère à la fin de l’ouvrage qu’elle a réussi à ne pas pleurer. Soutenu par un schéma narratif simple, sans surprise, et par un graphisme classique, c’est la figure de l’enfant consensuel, traditionnel, à qui on distille une morale claire et simple qui ressort. On voit ici combien le modèle de Juliette doit véhiculer une image stéréotypée et figée de l’enfance. Un enfant qui ne déroge pas aux règles et prêt à servir une mise en conformité scolaire immédiate.
37Les illustrations marquées par un réalisme conventionnel soutiennent un discours très axé sur le respect des règles et les apprentissages formels. Le classicisme des images identifié dans ces albums rassure quand il accompagne un schéma narratif simple et comble les attentes d’un public aux attentes traditionnelles car les choix esthétiques des albums sont à mettre en relation avec une vision de l’ordre social. Cécile Boulaire, dans son article sur le beau et le moche dans l’album, met en avant combien « la conception du “visuellement acceptable” est finalement assez dépendante de qui est idéologiquement acceptable » (Boulaire, 2005, p. 113). Cette dernière souligne combien dans certaines séries « l’ensemble des éléments de la représentation graphique tend à la désambiguïsation de toutes les situations évoquées, par le recours systématique au stéréotype […] à la même gamme de couleurs, aux aplats univoques qui viennent renforcer la dimension exemplaire des éléments eux-mêmes » (Boulaire, 2010, p. 19).
38La politesse, l’obéissance sont les valeurs premières de ces ouvrages : des albums qui cherchent à soumettre l’enfant et à l’inscrire dans une posture non réflexive. Les personnages sont invités « à se séparer sans faire de colères et obéir à la maîtresse » [30]. Quand elle n’est pas déniée, l’expression des émotions (pleurs, colère) peut être qualifiée de comédie, de caprice, de pleurnicherie et avoir pour réponse injonctive : « Papa doit s’en aller, c’est la règle ! » [31]. La négociation, le dialogue font place à l’imposition. Le père de mini-loup le somme de cesser de pleurnicher en déclarant : « Assez parlé en route ! C’est en allant à l’école qu’on devient un homme, pas autrement ! » [32]. De la même façon le doudou de Roméo fait peser sur ses épaules une menace de déclassement et remet en question son envie de grandir quand il lui assène un : « Cesse de pleurnicher ou retourne dans ta poussette ! » [33].
39Dans ces ouvrages, neutraliser les émotions garantit l’insertion de l’élève dans un ordre social et renforce cet ordre. Loly, qui le matin a fait une crise de larmes, est jugée « capricieuse » par ses camarades. Les aspirations de la petite fille à introduire une forme de négociation de l’ordre scolaire sont immédiatement réduites à des caprices. Elle doit non seulement abdiquer mais aussi montrer combien son comportement était inapproprié : « Elle regrette son attitude de ce matin, maintenant l’école lui plait […] elle regrette de s’être si mal conduite avec tout le monde ». [34]
40Cette volonté de nier ou « rabrouer » les émotions, identifiée dans les albums les plus traditionnels du corpus peut trouver un écho dans les travaux de Basil Bernstein (1975). Selon Bernstein, la tendance à socialiser l’enfant par la conformité à un statut prédéfini, aligné sur la culture, le langage, et les règles du groupe, gouverne les pratiques des familles les plus populaires. Elle s’oppose en cela à un centrage sur le développement personnel et l’affirmation individuelle qui caractérise l’éducation négociatrice des classes socialement mieux dotées (De Queiroz, 2004, p. 123). Dans ces ouvrages où l’on constate un lissage assumé des éventuelles aspérités émotionnelles concomitantes à l’entrée à l’école, l’analyse développée par Bernard Lahire dans Tableaux de famille semble pertinente. Ce dernier y rend compte de l’investissement de plus en plus volontariste des parents de milieux populaires qui, « à défaut de pouvoir aider scolairement leurs enfants leur demandent d’avoir la capacité à se soumettre à l’autorité scolaire en se comportant correctement » (Lahire, 1995, p. 24).
41Aujourd’hui, le changement de vision de l’enfant, l’idée d’une relation basée sur le dialogue, se sont immiscés dans les modes et styles éducatifs de toutes les familles cessant de confronter de façon aussi claire les modes de socialisation des familles populaires et des familles plus aisées. Martine Segalen remarque pourtant que ces évolutions n’en ont pas pour autant fait disparaître la différence des pratiques de socialisation selon les milieux sociaux : les milieux aisés continuent de former des enfants autonomes et responsables d’eux-mêmes tandis que les moins favorisés encouragent l’obéissance aux règles et l’adaptation aux contraintes extérieures (Segalen, 2013, p. 185). Elle est rejointe par Marie-Clémence Le Pape dans ce constat, « s’il n’y a pas lieu d’opposer les pratiques et les normes éducatives des parents des milieux populaires à ceux des milieux supérieurs, ils demeurent des clivages sociaux » (Le Pape, 2012, p. 41).
Conclusion : Quand la raison scolaire l’emporte sur les émotions… mais emprunte des chemins différents
42Le contrôle des émotions est la cheville ouvrière d’une incorporation plus ou moins avérée des normes scolaires. Les ouvrages destinés à accompagner le premier jour d’école participent à cette dynamique. La tension dramatique associée à l’entrée à l’école, génère chez les éditeurs une production d’ouvrages destinés à nourrir une niche lucrative dénoncée par les observateurs comme « un marché de l’angoisse ». Les maisons d’édition concèdent que, d’un point de vue marketing, ce segment représente indéniablement une manne. Les livres relatant un premier jour d’école surfent sur l’engagement affectif grandissant des parents dans la scolarité en proposant une vision rassurante mais différemment maitrisée des émotions à venir. Ils participent à l’apprentissage de la gestion des émotions en « prescrivant » des modèles identificatoires qui s’inscrivent dans des registres de normativité et dans une construction sociale clivée. Les représentations proposées tendent vers celles d’un enfant à même d’accepter la séparation en se soumettant à l’injonction d’un « bonheur scolaire » inéluctable ou de façon plus nuancée, facilitent l’appréhension de l’école, par le lecteur-récepteur, comme un espace nécessaire à l’élaboration de ses pulsions.
43En engageant l’enfant et le parent dans un travail émotionnel approprié et contrôlé en adéquation avec les attentes de l’école, les ouvrages, scénarisant une première rentrée, permettent à certaines familles de baliser le parcours du futur élève. Étayer et gouverner ses émotions permet de se rendre disponible pour les apprentissages. La socialisation émotionnelle est un préalable à la socialisation cognitive requise à l’école. Gérer ou nier ses émotions ne permet pas d’inscrire les élèves dans les mêmes dispositions. Les livres plus audacieux qui mettent en scène puis étayent les émotions en les exposant de façon moins édulcorée, s’affichent comme « des prises de risque » éditoriales et touchent un public ciblé. L’observation des chiffres de vente montre que c’est une représentation de l’école délestée de son pouvoir potentiellement anxiogène que privilégient les éditeurs et les lecteurs-consommateurs. Il semble plus rentable de désamorcer les émotions liées à l’école en les aseptisant. La nécessaire mise en conformité scolaire du futur élève demeure, quelle que soit l’origine éditoriale de l’album, une ambition commune à presque tout le corpus qui installe et voit triompher la raison scolaire. La raison l’emporte face à une émotion régulée, ou niée selon le registre social. Les sentiments d’abandon, de tristesse, de colère sont troqués au final contre la joie, le partage, la fierté. Tous finissent par revendiquer et célébrer un nouvel attachement à l’école et une adhésion sans faille.
44Avant de conclure, il convient de rappeler que la démocratisation massive de la littérature de jeunesse permet aux enfants d’avoir plusieurs portes d’accès aux livres. Ils naviguent de ce fait au-delà du répertoire émotionnel de leur groupe d’appartenance en faisant face à « un puzzle de références ». Les modes de socialisation mobilisés et les médiations que ce type d’albums engendre recouvrent aussi d’autres enjeux, ceux liés au positionnement des familles quant à l’accompagnement de l’enfant. La réception de ces livres est marquée par la diversité des modalités de lecture partagée et les usages socialement différenciés que sollicitent ces ouvrages au sein des familles (Bonnery, 2015). Cette hypothèse est accréditée par les récents travaux de Doriane Montmasson, qui, dans sa thèse consacrée au rôle de l’acte de réception dans le processus de socialisation du jeune enfant, s’interroge sur la façon dont les enfants s’approprient les normes et les réinvestissent. Cette dernière minore la performativité des livres en montrant que les enfants tendent à réaménager les valeurs transmises, non pas à cause de la divergence des normes proposées mais du fait des multiples instances de socialisation qui influent sur leur parcours (Montmasson, 2016). Pour les lecteurs d’albums, la possibilité d’accéder ou de se confronter à des registres multiples existe mais cela reste malgré tout l’apanage des classes les plus aisées qui, bénéficiant du « décloisonnement entre l’univers de la culture savante et celui de la culture populaire » propre à un fort « éclectisme culturel », demeurent les plus à mêmes de naviguer d’un répertoire à l’autre grâce à une fréquentation du livre plus large (Coulangeon, 2016, p. 109).
Bibliographie
Corpus des albums cités dans le texte
- Bardy S. Dring, c’est la rentrée ! Paris : Magnard Jeunesse, 2002.
- Barton J. & Hest A. En route pour l’école, Bébé Canard ! Paris : Kaléidoscope, 1999.
- Bawin M.-A. & Le Masne C. Tom va à l’école. Paris : Mango Jeunesse, 1996.
- Becue B., Ricard A., Ristord E. & Souppart G. L’école maternelle. Paris : Milan Jeunesse, 2010.
- Belineau N., Beaumont E. & Michelet S. La maternelle. Paris : Fleurus, 2008.
- Benaglia F. Petit Dernier : Le grand départ pour la petite école. Paris : Sarbacane, 2012.
- Bloch S. L’école de Léon. Paris : Albin Michel Jeunesse, 2000.
- Bondoux A. & Capdevila R. Le prince Nino à la maternouille. Paris : Bayard Jeunesse, 2008.
- Bouchama N. & Magdalena. 24 petites souris vont à l’école. Paris : Flammarion-Père Castor, 2004.
- Bour D. Petit Ours Brun : le premier jour d’école. Paris : Bayard Jeunesse, 2012.
- De Bourgoing P. & Hahn N. La rentrée. Fribourg : Calligram, 1996.
- De Montsabert A. S. & Chatellard I. Ma couverture et moi. Paris : Casterman, 2000.
- Doinet M. & Botton S. Ma première année d’école. Trois-Ponts : Lipokili, 2006.
- Dreyfuss C. & Choux N. Premier jour d’école. Paris : Thierry Magnier, 2007.
- Gaudrat M.-A. & Camil C. La rentrée de la famille Cochon. Paris : Bayard Jeunesse, 1993.
- Graux A. & Yeong-Hee L. Jinju, ma nouvelle école. Paris : Chan-Ok, 2010.
- Henkes K. Juliette s’inquiète. Paris : Kaléidoscope, 2007.
- Horse H. Petit lapin va à l’école. Bruxelles : Pastel, 2004.
- Lager C. K. & Dubois C. Tout rouge. Bruxelles : Pastel, 1993.
- Lauer D. Juliette va à l’école. Champigny-sur-Marne : Lito, 1994.
- Magdalena. & Richard L. Bali va à l’école. Paris : Flammarion-Père Castor, 2011.
- Matter P. Mini-loup à l’école. Paris : Hachette Jeunesse, 1993.
- Morgentsen S. Emma et l’école. Paris : Nathan, 2007.
- Moundlic C. Chamalo rentre à l’école. Paris : Flammarion- Père Castor, 2010.
- Pleux D. Zoup va à l’école. Paris : Odile Jacob, 2013.
- Scotton R. Splat le chat. Paris : Nathan, 2011.
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- Van Gennep A. Les rites de passage. Paris : Mouton, 1909.
Notes
-
[1]
Benaglia F. Petit Dernier : Le grand départ pour la petite école. Paris : Sarbacane, 2012.
-
[2]
Ces trente dernières années, la littérature de jeunesse a connu un authentique essor. Différentes instances de légitimation ont concouru à lui ériger un véritable statut dans un champ qui s’est affirmé de plus en plus autonome. Son entrée à la Bibliothèque nationale de France a consacré sa patrimonialisation. Elle a intégré les programmes scolaires en devenant le vecteur privilégié de la culture littéraire et une épreuve au concours de Professeur des écoles lui était encore récemment dédiée. Les prix littéraires, les salons, les revues critiques spécialisées ont aussi contribué à l’installer comme l’un des segments du marché littéraire les plus solides. Isabelle Nières-Chevrel avance cependant que, malgré la démocratisation de l’accès aux livres, la production éditoriale n’en reste pas moins très hiérarchisée montrant combien restent fortes les disparités sociales et intellectuelles. On a d’un côté une création inventive exigeante, relayée par les discours critiques et par les médiateurs, de l’autre un marché de masse moins contrôlé, peu commenté mais économiquement puissant (Nières-Chevrel, 2009, p. 52).
-
[3]
Dès 1977, Jean-Claude Chamboredon et Jean-Louis Fabiani avaient établi que « le système des définitions de l’enfance développé dans les livres pour enfants entretenait une relation d’homologie avec le système de classes sociales et avec les formes de socialisation pratiquées dans les différentes classes » (Chamboredon & Fabiani, 1977, p. 72).
-
[4]
Monsieur et Madame (Hachette), T’choupi (Nathan) et Le loup qui voulait changer de couleur (Auzou).
-
[5]
Lecherbonnier E., Le livre jeunesse joue dans la cour des grands, Ina Global, http://www.inaglobal.fr/edition/article/le-livre-jeunesse-joue-dans-la-cour-des-grands, 4 mai 2016, site consulté le 25 mai 2016.
-
[6]
Bondoux A. & Capdevila R. Le prince Nino à la maternouille. Paris : Bayard Jeunesse, 2008.
-
[7]
Bawin M.-A. & Le Masne C. Tom va à l’école. Paris : Mango Jeunesse, 1996.
-
[8]
Henkes K. Juliette s’inquiète. Paris : Kaléidoscope, 2007.
-
[9]
Lager C. K. & Dubois C. Tout rouge. Bruxelles : Pastel, 1993.
-
[10]
Bardy S. Dring, c’est la rentrée ! Paris : Magnard Jeunesse, 2002.
-
[11]
De Bourgoing P. & Hahn N. La rentrée. Fribourg : Calligram, 1996.
-
[12]
Graux A. & Yeong-Hee L. Jinju, ma nouvelle école. Paris : Chan-Ok, 2010.
-
[13]
Dreyfuss C. & Choux N. Premier jour d’école. Paris : Thierry Magnier, 2007.
-
[14]
Benaglia F. Petit Dernier : Le grand départ pour la petite école. Paris : Sarbacane, 2012.
-
[15]
Bouchama N. & Magdalena. 24 petites souris vont à l’école. Paris : Flammarion-Père Castor, 2004.
-
[16]
Barton J. & Hest A. En route pour l’école, Bébé Canard ! Paris : Kaléidoscope, 1999.
-
[17]
Moundlic C. Chamalo rentre à l’école. Paris : Flammarion- Père Castor, 2010.
-
[18]
Scotton R. Splat le chat. Paris : Nathan, 2011.
-
[19]
Bloch S. L’école de Léon. Paris : Albin Michel Jeunesse, 2000.
-
[20]
Gaudrat M.-A. & Camil C. La rentrée de la famille Cochon. Paris : Bayard Jeunesse, 1993.
-
[21]
Magdalena. & Richard L. Bali va à l’école. Paris : Flammarion-Père Castor, 2011.
-
[22]
Bour D. Petit Ours Brun : le premier jour d’école. Paris : Bayard Jeunesse, 2012.
-
[23]
Horse H. Petit lapin va à l’école. Bruxelles : Pastel, 2004.
-
[24]
De Montsabert A. S. & Chatellard I. Ma couverture et moi. Paris : Casterman, 2000.
-
[25]
Morgentsen S. Emma et l’école. Paris : Nathan, 2007.
-
[26]
Scotto T. & Martin T. La rentrée de la petite sorcière. Paris : Bayard Jeunesse, 1998.
-
[27]
Pleux D. Zoup va à l’école. Paris : Odile Jacob, 2013.
-
[28]
Annette Lareau a observé la vie quotidienne d’enfants de dix ans, blancs et noirs dans différentes sphères de socialisation (famille, école, pairs). Elle a montré, à la suite de cette expérience, que la classe sociale prévaut sur l’origine ethnique et que les modalités éducatives s’organisent autour de deux modèles d’élevage des enfants. Les parents de la classe moyenne sont engagés dans une éducation de type « concerted cultivation », une mise en culture négociée destinée à développer les talents et la capacité de raisonnement des enfants tandis que les parents de la classe ouvrière favorisent « the accomplishment of natural growth », la pousse naturelle qui laisse les enfants grandir et choisir leurs activités mais qui privilégie davantage les directives que le raisonnement.
-
[29]
Lauer D. Juliette va à l’école. Champigny-sur-Marne : Lito, 1994.
-
[30]
Belineau N., Beaumont E. & Michelet S. La maternelle. Paris : Fleurus, 2008.
-
[31]
Becue B., Ricard A., Ristord E. & Souppart G. L’école maternelle. Paris : Milan Jeunesse, 2010.
-
[32]
Matter P. Mini-loup à l’école. Paris : Hachette Jeunesse, 1993.
-
[33]
Doinet M. & Botton S. Ma première année d’école. Trois-Ponts : Lipokili, 2006.
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[34]
Suigne M-C. & Macias J.-L. Loly à l’école. Paris : Hemma, 1983.