Notes
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[1]
Cette « scolarisation » semble au demeurant entretenir des liens intimes avec une recherche croissante de résultats, elle-même indissociable de la diffusion dans l’Education nationale du new public management.
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[2]
Nous emploierons le pluriel « enseignantes » du fait du très grand nombre de professeurs des écoles de sexe féminin. Quand nous dirons « enseignantes », nous voulons dire enseignantes et enseignants de sexe masculin.
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[3]
Le passage de la photographie des lieux à la photographie des personnes est une phase cruciale de l’enquête visuelle selon Maresca et Meyer (2013, p. 31).
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[4]
ASEM : Assistante Spécialisée des Écoles Maternelles.
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[5]
Un extrait du cahier d’observation est ici fourni ; entre crochet, la date de l’observation dont rend compte l’extrait, accompagné du nom de l’enseignante.
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[6]
Merci à Philippe Bongrand qui a contribué à l’interprétation de ce passage.
Introduction : ambivalences dans le régime émotionnel contemporain
1Dans la société contemporaine, le rapport aux émotions paraît, à maints égards, ambivalent. Côté pile, l’individu contemporain se doit d’être à « l’écoute de soi », sensible à ses propres émotions. La quête du bien-être personnel s’avère hautement légitime dans une société marquée par l’individualisme (Gally, 2019). Mais, côté face, cet individu contemporain est également susceptible d’être soumis à des exigences croissantes, génératrices de stress nouveaux ou renforcés. Cet aspect est attesté tant du côté du monde du travail et de ses évolutions contemporaines, qu’au-delà, par exemple dans la sphère de l’éducation familiale, comme le montre notamment l’acuité contemporaine de la question du suivi scolaire à la maison. Ces côtés pile et face s’entremêlent au demeurant volontiers, voire se confondent, comme le montre ce passage d’Azdine Henni (2003), commentant l’ouvrage de Baudelot et Gollac (2003) :
Ainsi, dans la troisième partie [de l’ouvrage], la « souffrance au travail » est interprétée comme le produit d’une évolution objective des conditions de travail : flexibilité, intensification, déstabilisation […], horaires alourdis… Une autre interprétation n’était-elle pas envisageable ? Ne peut-on voir dans la montée de cette plainte le fruit de l’évolution des attentes sociales des salariés envers leur activité professionnelle, ces derniers étant imprégnés d’une nouvelle « culture psychologique » qui fait du travail un lieu d’expression de soi et de respect de sa dignité. Aussi bien l’évolution des nouvelles exigences managériales vers une plus grande individualisation de la gestion des ressources humaines, que les nouvelles conceptions « psychologistes » du travail portées par les salariés tendraient à construire de nouvelles plaintes individuelles.
3Nous cherchons ici à reprendre ces questions sociologiques en les appliquant à l’école maternelle contemporaine. Quel travail social des émotions se met-il en œuvre au sein de cette instance-clé de la socialisation enfantine ? Il se pourrait que les côtés pile et face évoqués précédemment se retrouvent à l’école. En effet, d’une part, certaines émotions y semblent plus légitimes que jadis, en témoigne par exemple la diffusion récente des thématiques de la « bienveillance » ou du « bien-être » dans les textes officiels. Pourtant, côté face, nombreux sont les travaux qui montrent la permanence de pratiques scolaires peu respectueuses des « bien-être » enfantins et source d’émotions désagréables (Merle, 2005). Les travaux internationaux montrent d’ailleurs une école française plutôt mal classée sur ces questions (OCDE, 2009 ; 2004).
4Du côté de l’école maternelle, deux faits doivent être évoqués car ils amènent des éléments de problématisation. Premier point : depuis les années 60-70, des valeurs éducatives issues de la psychanalyse et de la psychologie se sont fortement diffusées au sein des catégories moyennes et supérieures, sous des formes vulgarisées. Chamboredon et Prévot (1973) ont montré que ces valeurs avaient profondément pénétré l’école maternelle à cette période. Du même coup, à l’école maternelle comme dans ces franges de la société, s’est diffusée l’idée selon laquelle il était capital de mettre en œuvre un rapport à l’enfant que l’on peut qualifier de psycho-affectif, c’est-à-dire marqué par les valeurs d’écoute, de valorisation, de sécurisation affective, etc. Mais, second point, l’école maternelle a connu depuis les années 80 environ, un mouvement de scolarisation (Garnier, 2016). Des années 1970/80 à nos jours, d’un point de vue administratif, institutionnel, et surtout curriculaire, l’école maternelle a de plus en plus été pensée comme le premier segment de l’école et non plus son « avant » ou son « en dehors [1] ». On peut dès lors poser la question de ce que devient le régime des émotions enfantines dans une école maternelle « scolarisée ». De fait, la scolarisation a par exemple été de pair avec l’introduction d’une culture de l’évaluation à l’école maternelle, que l’on peut supposer avoir des conséquences affectives. Mais surtout, l’étude de l’évolution des programmes permet de montrer un indéniable déclin de certaines thématiques affectives, au fur et à mesure de la période de scolarisation. Tandis que les instructions de 1977 faisaient la part belle aux thématiques issues de la psychologie affective et de la psychanalyse, affirmant notamment que « l’affectivité » était le premier domaine de l’école maternelle, les instructions officielles, à partir de 1995, les relégueront très largement au second plan. Notre étude du régime émotionnel contemporain s’effectuera donc avec comme toile de fond cette tension potentielle entre rapport scolaire et rapport psycho-affectif à l’enfant, ces deux rapports étant indissociables de normativités émotionnelles différentes voire opposées. Nous appellerons émotions, un sentiment, une réaction, plus brève qu’une humeur, indissociable d’une situation la déclenchant, ou censée la déclencher. Notre approche des émotions est sociologique : nous reprendrons à Hochschild (2017) l’idée selon laquelle le processus socialisateur consiste en un travail, une élaboration, une mise en ordre, sociale, des émotions.
Cadrage théorique et méthodologie
Entre sociologie de l’enfance, des enfants, des émotions et de la socialisation
5Si notre analyse relève donc de la sociologie des émotions, elle consiste aussi en une analyse sociologique des enfants et de leur socialisation. Situons conceptuellement notre étude au sein de la sociologie de l’enfance et des enfants et des sous-champs qui la constituent (Leroy, 2020). L’objectif est d’étudier les normes émotionnelles qui sont au principe de la socialisation de l’enfant à l’école maternelle. Nous étudions ces normes à la fois dans les actions socialisatrices des professeures des écoles [2] vis-à-vis des enfants et dans l’action même de ces derniers. Nous souhaitons étudier le régime social des émotions enfantines à l’école maternelle en posant la question de son caractère différencié. Nombreuses sont en effet les recherches qui ont montré que le travail social des émotions enfantines diffère selon les milieux sociaux (Kellerhals & Montandon, 1991 ; Lareau, 2011). Ainsi, nous avons cherché à étudier, d’une part, des écoles de milieux sociaux différents, faisant l’hypothèse que les rapports aux émotions pouvaient y être divers, et d’autre part, des professeures des écoles issues de milieux sociaux hétérogènes. Nous nous centrons donc sur la question des socialisations différenciées uniquement du point du vue des milieux sociaux du fait de la brièveté de cet article, laissant de côté la question du genre.
Méthodologie
6L’étude des socialisations des émotions enfantines à l’école maternelle a été réalisée en recourant à plusieurs méthodologies dont les résultats ont été croisés. Dix entretiens semi-directifs ont été réalisés en 2008-2009, auprès d’enseignantes issues de milieux sociaux hétérogènes et exerçant dans des écoles de milieux variés. Six de ces dix enseignantes enseignaient en éducation prioritaire, deux dans des écoles de milieu intermédiaire, et deux dans des écoles privilégiées du centre de Paris. Cette enquête visait à interroger les enseignantes sur les thématiques de la contrainte, du plaisir et de la « joie » de l’enfant à l’école maternelle. Les deux questions suivantes ont notamment été posées : « Diriez-vous que l’élève doit apprendre les contraintes de l’école, ou que c’est l’école qui doit se mettre à l’écoute de l’élève ? » et « La maternelle est une école où le plaisir et la joie de l’enfant doivent être au centre. Que pensez-vous de cette affirmation ? ».
7Ensuite, de 2011 à 2013, 50 jours d’observation de six heures ont été réalisés dans 15 classes d’école maternelle de Paris. Nous avons pu observer trois des dix enseignantes auprès desquelles un entretien avait réalisé en 2008-2009. Pour les autres, il s’agit d’enseignantes issues d’origines sociales diverses, allant des milieux populaires aux catégories supérieures. Nous avons aussi visité des écoles de milieux sociaux très divers allant du centre de Paris à l’éducation prioritaire dans des arrondissements « périphériques ». Trente jours d’observation ont été réalisés en éducation prioritaire. Le procès de socialisation enfantine a été étudié à partir des interrogations suivantes : comment l’enseignante réagit-elle face aux diverses émotions enfantines ? Quelles sont les émotions enfantines les plus, et les moins, légitimes ? En quoi les pratiques ordinaires sont-elles indissociables d’une mise en forme des émotions enfantines ? Une observation des enfants a également été mise en œuvre : quel travail des émotions doivent-ils réaliser pour jouer le rôle social que l’on attend d’eux dans cette institution ? Quelles situations relèvent d’une sortie du cadre attendu ? Nous avons été particulièrement attentifs aux émotions « déviantes », au sens de Becker (1985), c’est-à-dire disqualifiées au sein du système normatif de l’école maternelle. Nous nous sommes également appuyés sur certains résultats complémentaires glanés lors d’une enquête réalisée plus récemment (2017-2018), sur les pratiques d’inspiration montessorienne se diffusant actuellement à l’école maternelle (Leroy & Lescouarch, 2019).
8Enfin, un troisième dispositif méthodologique a permis d’apporter une dimension diachronique, visant à rendre compte des évolutions de normativités inspectorales sur la question des émotions. Deux corpus de 25 rapports d’inspection ont été confrontés : l’un datant de 1965-1970 (soit avant la scolarisation du curriculum formel de l’école maternelle) et l’autre de 2000-2010 (la scolarisation était alors enclenchée depuis longtemps). C’est la question du traitement des émotions enfantines au sein des discours inspectoraux des deux époques qui a guidé notre analyse.
9Notre raisonnement s’appuiera sur plusieurs photographies. L’intérêt de ces dernières au sein d’une enquête sociologique n’est plus à prouver (Maresca & Meyer, 2013). Elle fige en particulier l’observation, capitale [3], des personnes. Ici, la photographie a tout particulièrement permis de capter les émotions enfantines. Elle peut également jouer un rôle lors de l’exposition des résultats, ayant un fort pouvoir évocateur ainsi que d’administration de la preuve (Delsaux, 1976). En outre, dans cet article, les photos permettent parfois de donner à voir les émotions enfantines « négatives » à l’école maternelle, ce qui nécessite un très grand respect de l’anonymat des élèves concernés ainsi que de leurs professeures des écoles. Pour cela, les photographies ont donc été copiées par le dessin, extrêmement fidèlement pour rendre compte des émotions enfantines (visages par exemple) mais en enlevant certains éléments (du décor notamment) qui auraient pu permettre l’identification. Nous remercions très chaleureusement Aurélie Dorléans qui a réalisé les dessins ici présentés avec un grand talent, en arrivant à rendre compte très fidèlement des émotions enfantines à l’œuvre.
Ordre scolaire et émotions
10Nous nous penchons ici sur des caractéristiques qui ont été observées dans l’ensemble des écoles observées. Elles sont mises en œuvre par l’ensemble des enseignantes quel que soit leur milieu social d’origine et quel que soit le milieu social d’exercice.
Savoir se distancier des parents
11À un premier niveau, le moment de l’accueil des enfants s’avère capital pour qui cherche à clarifier la mise en forme des émotions à l’école maternelle. La classe de Violaine est organisée en deux espaces. Une sorte de « couloir » formé avec des meubles se situe à l’entrée de la classe, dans la continuité de la porte d’entrée. Le reste de la classe est aménagé avec des activités à disposition des enfants à leur hauteur, dont ils peuvent se saisir, quand elles leur ont été présentées, dans une perspective d’inspiration montessorienne (Leroy & Lescouarch, 2019). Les parents ne peuvent rentrer dans aucun de ces espaces. À l’arrivée des enfants, l’espace « couloir » est le lieu de l’ASEM [4]. Elle joue un rôle d’accueil des enfants. La maîtresse se situe, elle, dans l’espace principal de la classe, déjà engagée dans les apprentissages scolaires visés par les activités dont les enfants doivent se saisir. Deux types d’élèves se distinguent : un premier type d’élève arrive assez vite à quitter les parents au seuil de la classe. Ils traversent ainsi le couloir rapidement, mettent leurs chaussons et rejoignent l’espace de la professeure des écoles. Un deuxième type d’élèves peinent à mettre en œuvre la séparation avec les parents. Ils sont très tristes, et/ou pleurent, et/ou manifestent ostensiblement leur mal-être, pour certains par des cris, particulièrement en début d’année (il s’agit d’une classe de petite section). Il arrive alors souvent que l’ASEM les fasse s’asseoir au coin cuisine (espace de jeu d’imitation avec du matériel de cuisine en plastique), comme dans une sorte de sas qui jouxte l’espace « couloir » interne à la classe. Ils sont censés s’y reprendre avant de pouvoir pénétrer l’espace des apprentissages scolaires. L’ensemble de ce dispositif montre que pour pénétrer dans la classe stricto sensu, une maîtrise des émotions liées à la séparation avec les parents est indispensable.
12Selon les enseignantes (voir plus bas les deux idéaux-types), les attitudes varient face aux élèves tristes lors de ce moment, entre une certaine préoccupation et une quasi-indifférence. Du même coup, dans certaines classes, il n’y a pas une démarcation aussi forte que dans la classe de Violaine entre le rôle (affectif) de l’ASEM et celui de la professeure des écoles, ici uniquement centrée sur les apprentissages scolaires. Enfin, il est aussi des classes où les parents peuvent rentrer. Il n’en reste pas moins que partout, dès le début de la journée, les professeures des écoles accordent un primat très net à leur rôle d’enseignant sur un quelconque rôle d’ordre affectif.
« À côté de Jason, une petite pleure depuis longtemps (il est 8h55, elle pleure depuis le début [8h30]). Elle sera angoissée toute la matinée. Lui s’occupe de son activité [des élèves doivent reconnaître leur prénom]. Ce n’est pas qu’il n’a pas de considération pour elle ; il me dira avoir de la pitié pour elle, être attentif à ses problèmes d’intégration dans la classe, et la qualifiera de « petite chose fragile » lors d’un entretien informel. Mais il n’abandonne pas son activité pour ne se consacrer qu’à la consoler, se montrant ici attaché à ses objectifs d’apprentissage ».
14Des déviances émotionnelles se manifestent parfois. Dans la classe de Rosalie, je fus frappé par la présence d’un enfant ne quittant pas, crispé, angoissé et triste, la photo de sa maman ainsi que ses doudous (lapin, chat, tissus) (fig.1).
Un enfant angoissé en maternelle, n’acceptant pas la séparation d’avec les parents
Un enfant angoissé en maternelle, n’acceptant pas la séparation d’avec les parents
15Durant l’enquête, des enseignantes de petite section ont évoqué des situations semblables pouvant durer toute la journée, durant plusieurs semaines.
Apprentissages scolaires et contrôle de soi
16Les pratiques pédagogiques actuellement répandues dans les écoles maternelles relèvent de la forme scolaire, en particulier les dispositifs du regroupement et des ateliers (Joigneaux, 2009 ; Leroy, 2017). Nous prendrons ici l’exemple du regroupement pour étudier le travail des émotions qui se joue dans le cadre des dispositifs pédagogiques quotidiens de l’école maternelle. Le regroupement est le moment où les élèves de la classe se retrouvent aux bancs pour suivre des activités d’apprentissage initiées par la professeure des écoles.
17La figure n° 2 rend compte d’une situation qui eut lieu quelques minutes après le moment de séparation avec les parents, très mal vécue ce jour-là par Julia (pleurs notamment). Elle a alors bénéficié d’« aménagements » et de ménagements relatifs à la tristesse qu’elle rencontra : temps différé pour rejoindre le groupe au regroupement et ASEM lui donnant la main pour l’y amener. Pour autant, maîtresse et ASEM n’ont pas accepté qu’elle ne participe pas au regroupement. Si la photo rend compte d’une particularité (chaise personnelle), elle montre aussi l’impossibilité de s’émanciper de ce moment fédérateur et symbolique. En effet, le regroupement est indissociable d’un cadrage des émotions : mise au second plan des éventuelles douleurs intimes liées à la séparation et surtout capacité à endosser son rôle d’élève : se taire, participer selon un ordre précis des prises de parole dans un certain calme, propice à l’attention et aux apprentissages scolaires visés. Lors d’un regroupement, Florence critique ainsi vertement une enfant qui a, selon elle, la « rigolomania » [Florence, 29.11.2011]. Ce terme, semble-t-il crée par l’enseignante, vise à associer le rire à la « mania » (étymologiquement : folie, déraison), ce qui montre bien en creux que le moment du regroupement va de pair avec la figure d’un enfant calme et maîtrisant ses émotions.
De la nécessité du regroupement et de son régime émotionnel
De la nécessité du regroupement et de son régime émotionnel
18On notera que le regroupement s’avère en outre peu propice aux prises de paroles spontanées, alors même qu’il pourrait, du fait de sa disposition spatiale, devenir une sorte d’agora. Lors du regroupement, les enfants ont surtout à répondre à des questions fermées, en se conformant aux choix thématiques de l’enseignant, liés à tel ou tel apprentissage scolaire. Peu avant un regroupement, une élève veut poser une question au maître proche de moi, qui ne l’entend pas et dit : « Mélina, tu es trop excitée le matin » [Bertrand, 02.05.2012]. On voit ici comment la prise de parole spontanée se voit requalifiée comme une forme d’« excitation », du fait de la sortie du cadre scolaire qu’elle met en œuvre [6].
Scolarisation de l’école maternelle, « joie » et travail
19Il s’agit ici de s’interroger sur la spécificité de ce régime émotionnel contemporain. Est-il lié au phénomène de scolarisation de l’école maternelle ? Pour répondre à cette question, comparons les deux corpus de rapports d’inspection pour mettre en œuvre une analyse diachronique. Au sein du premier corpus de rapports (1965-1970), on est notamment frappé par la présence de la thématique de la « joie » de l’enfant, dans de multiples rapports : « tout le monde chante et avec joie », « la matinée se termine avec de chants bien rythmés cette fois, que les enfants exécutent avec joie et conviction », « des exercices très réguliers, journaliers, auxquels les enfants tiennent beaucoup et qu’ils réclament. Ils se déroulent dans l’entrain et la joie », « la joie de chanter », etc. Ces éléments pourraient être liés aux représentations de l’enfant alors en vigueur (années 1960-1970) et évoquées en introduction. À moins qu’il ne s’agisse de permanences de la thématique de la joie de l’enfant qui avait profondément marqué les textes officiels du xixe siècle (Luc, 1982) et les écrits de Kergomard. En tout cas, dans leur continuité, les thématiques de l’affection et même de l’amour apparaissent également dans ce premier corpus de rapports. Amour des enfants, de la part de la maîtresse, tout d’abord : « […] l’ouverture de cœur de l’institutrice », « l’amour de l’enfance », « […] une tendresse discrète dans ses manifestations mais rayonnante ». Mais également amour de l’enfant pour sa maîtresse : « […] l’entrain et la joie règnent ; je garde une merveilleuse impression d’une entente profonde entre la maîtresse et les enfants : observation et sollicitude d’une part, confiance naïve et ravissement de l’autre ».
20Les thématiques affectives se transforment dans le deuxième corpus (2000-2010). La « joie » disparaît quasiment. La thématique de l’affection connaît aussi un déclin très important entre les deux corpus. Quelques rares phrases peuvent s’apparenter à cette thématique : « la salle de classe […] est chaleureuse » ; « Elle sait communiquer la soif et le plaisir d’apprendre, avec rigueur et générosité ». Les termes ont changé et apparaissent moins lyriques. Le thème de l’amour disparaît totalement. En revanche, le « plaisir » apparaît, mais presque toujours associé à la notion de « travail », qui connaît une croissante exponentielle (Leroy, 2017) : « les élèves travaillent avec plaisir », « j’ai vu ce matin des élèves heureux de travailler », « les élèves participent avec plaisir ».
21L’ensemble de ces évolutions tendent à montrer des évolutions diachroniques sur la question de la légitimité des émotions enfantines. Dans les années 1960-1970, la figure d’un enfant éprouvant de la joie à l’école maternelle est hautement légitime. L’amour entre la maîtresse et les enfants n’est pas disqualifié (référence maternelle ?). Dans les années 2000-2010, les objectifs émotionnels sont différents : dans une école maternelle qui se scolarise, il s’agirait désormais de tirer du plaisir du travail scolaire (logique d’autonomie). La relation à l’adulte s’avère alors bien moins affective. Notons qu’il s’agit ici de représentations se dégageant des rapports d’inspection ; il faudrait mener une investigation du côté des pratiques passées pour établir ce qu’il en était réellement du côté du régime émotionnel effectif de l’époque.
22En cohérence, dans les entretiens contemporains, nombre d’enseignantes ont lié contrainte et plaisir. Pour certaines, la maternelle doit initier à la contrainte scolaire, ce qui est un obstacle au plaisir de l’enfant : « le plaisir pour moi c’est quand même lié à quelque chose d’assez libre, qui […] serait éloigné d’une forme de contrainte et de rigueur… » [Violette, entretien du 12.03.2009]. Mais d’autres, un peu comme dans les rapports d’inspection, établissent des liens entre apprentissage du travail scolaire et plaisir.
« une contrainte, ce n’est pas nécessairement quelque chose de chiant [sic] ».
« le travail, ça peut être plaisant aussi ».
Premier idéal-type : les enseignantes marquées par les valeurs psycho-affectives
25La scolarisation de l’école maternelle contemporaine induit donc une mise en forme des émotions enfantines singulière et qui se retrouve chez tous les enseignantes observées. Pour autant, dans le détail, l’observation directe a également permis de dégager deux idéal-types d’enseignantes, entretenant des rapports hétérogènes aux émotions enfantines. La notion d’idéal-type est ici mobilisée de la manière suivante : il s’agit d’un type idéal de maîtresse, bâti à partir de multiples exemples tirés de l’observation directe. Aucune maîtresse ne correspond totalement à un des deux idéal-types même si certaines s’en rapprochent et ont servi à les construire conceptuellement.
26Un premier groupe de professeures des écoles a pu être distingué. De leurs pratiques se dégage la figure d’un enfant dont il faudrait respecter le « bien-être » psycho-affectif et à qui imposer une autorité scolaire trop franche, trop directe, pourrait avoir des conséquences négatives. Leur discours (entretiens informels), comme leurs pratiques, semblent à référer à la diffusion et à la vulgarisation de la psychologie de l’enfant et de la psychanalyse qui se sont mises en place à partir des années 1960-1970, valeurs qui marquent toujours en partie les pratiques éducatives contemporaines, en particulier dans les catégories moyennes et supérieures. Sophie fut caractéristique de ce groupe.
« Sophie ne crie pas. Le CRI est un indicateur de “douceur” ou pas » ; « Toujours douce (elle me dit […] que c’est son caractère d’être douce). Elle n’aura pas haussé la voix une seule fois de la matinée ».
28De même, Aurélie considère le cri comme une faute professionnelle, que d’ailleurs, elle ne commet presque jamais.
29Par ailleurs, face à des élèves ne respectant pas les règles de la classe, Aurélie opte pour une stratégie de retour sur l’événement, visant à ce que l’élève prenne conscience de son attitude, la pense, et la modifie. « A un élève, elle dira : “Qui a fait la bêtise ?” “C’est moi” dira-t-il. “C’est ton cerveau qui commande la bêtise… alors tu peux faire autrement.” » [Aurélie, 10.01.2012]. Aurélie semble ici en appeler à la figure d’un élève capable de se dominer, par un mouvement de secondarisation, et de prendre conscience des raisons de son dysfonctionnement. Ceci va de pair avec un recours à la parole et au dialogue : « “S’il y a un problème, tu parles, tu expliques” dit-elle » [Aurélie, 10.01.2012]. Du point de vue des émotions, ces professeures des écoles accueillent avec une certaine tolérance les émotions enfantines déviantes vis-à-vis de l’ordre scolaire, mais un temps seulement. Elles espèrent ensuite que le dialogue et des formes de prises de conscience permettront un dépassement de ces émotions disqualifiées (colère, caprice, manque d’envie de travailler) et un retour à l’ordre scolaire. Les entretiens semi-directifs menés, comme l’observation directe, montrent que ce groupe de professeures des écoles valorisent en outre souvent le jeu éducatif (Brougère, 1995) (appelé ici « jeu dirigé ») comme modalité d’apprentissage par rapport aux exercices scolaires moins ludiques. Apprendre par ce type de jeu permettrait de transmettre les contenus scolaires attendus, mais sans mettre en œuvre une situation trop directement coercitive et/ou rébarbative. L’autorité mise en œuvre par ces maîtresses n’en est pas moins forte, sachant qu’il s’agit d’un jeu imposé et non choisi par l’enfant. Retenons de l’ensemble de ces développements que ce premier groupe d’enseignantes mettent en œuvre une normalisation des conduites plus subtile, plus discrète peut-être, mais qui ne le cède en rien sur la conformation scolaire des émotions.
30Les données glanées convergent pour faire l’hypothèse que les professeures des écoles de ce groupe viendraient davantage des catégories moyennes et supérieures. Leur attachement aux valeurs psycho-affectives et au jeu éducatif s’expliquerait par leur socialisation primaire (Le Pape, 2012 ; Vincent, 2000). Nathalie Mangeard-Bloch (2017) a montré que les albums de littérature de jeunesse contemporains concernant la rentrée scolaire en maternelle portent toujours la figure d’un enfant qui parvient à triompher de ce rite de passage. Cela étant, les albums visant les familles de milieu populaire et ceux à destination des catégories moyennes et supérieures présentent des représentations des émotions hétérogènes. Dans les albums visant les catégories moyennes et supérieures, l’enfant s’avère bien plus émotionnel (inquiet, anxieux, rebelle etc.), et associé à une mise en conformité scolaire qui prend du temps, différée, et indissociable des logiques de retour sur soi et de prise de conscience. Nous avons retrouvé ces représentations de l’enfant dans les pratiques pédagogiques de ce premier groupe. Du côté des albums visant les milieux populaires, on trouve davantage la figure d’un enfant se conformant immédiatement aux attentes disciplinaires scolaires (voir ci-après). Notons in fine, dans la continuité de Dannepond (1979) que ce premier groupe de professeures des écoles ici mis au jour a été davantage constaté dans les écoles de milieux populaires. Peut-être car il y règne moins d’ambitions scolaires.
Deuxième idéal-type : franche mise en ordre scolaire des émotions
31Un autre groupe de professeures des écoles a pu être mis en lumière. Il se caractérise par des types d’autorité moins marqués par les valeurs psycho-affectives. Isia (maîtresse issue de milieu populaire) impose les règles scolaires de manière beaucoup plus directe que Sophie. Elle ne considère pas que l’âge des enfants de sa classe (2, 3 ans) doive entraîner des aménagements particuliers d’ordre psycho-affectif : elle a à être enseignante et les enfants ont à être élèves. La classe d’Isia se caractérise en conséquence par une discipline stricte. Elle intervient de façon vive et reprend directement les élèves tout au long de la journée. « “vous vous excusez mutuellement. ATTENTION : si je vois encore vos mains levées” » [Isia, 31.01.2012]. Tout comportement inadapté est immédiatement repris. Cette attitude s’oppose à celle d’Aurélie, qui cherchait à ce que l’élève revienne sur ses émotions inappropriées, et qui, par conséquent, les acceptait davantage, même si ce n’était que de façon transitoire.
32Les valeurs psycho-affectives marquent très peu la classe d’Isia. Elle critique ainsi la maman de Mohamed, un enfant de 2 ans qui a du mal à accepter les exigences disciplinaires de sa classe et s’oppose à elle : il tape d’autres enfants, se met en colère et refuse de faire les activités prescrites. Sa maman dit : « il est jeune… ». Isia, reprenant les propos de la maman, pour les railler, me dit : « “‘Il est jeune…’ [Isia parodie la mère de Mohamed et reprend ses mimiques]…pfff…. Il est jeune donc il doit être maté, oui !” ajoute Isia » [Isia, 31.01.2012]. Des situations proches de l’humiliation ont parfois été constatées.
Punition humiliante en maternelle
Punition humiliante en maternelle
33Mohamed a été puni en culotte et chaussettes, tête entre les bras sur une table contre le mur. L’enfant n’était pas totalement habillé, car il revenait de la sieste à ce moment. Ces pratiques éducatives portent la figure d’un enfant dont on attend une conformation immédiate aux règles. Cette figure est plus diffusée dans les milieux populaires, dont est issue Isia. Les entretiens informels amènent à faire l’hypothèse que son style éducatif s’explique aussi par le grand respect de cette enseignante pour l’institution scolaire, ainsi que par une trajectoire sociale ascendante : Isia tire une fierté de son statut d’enseignante (sa mère travaille dans une crèche).
34Paradoxalement (en apparence), ce type de rapport à l’enfant a aussi été constaté plus souvent dans des écoles dont les enfants sont majoritairement issus des catégories supérieures. Nous faisons l’hypothèse qu’une pression scolaire forte amène à un renforcement des attentes scolaires défavorable à une acceptation, fût-elle transitoire, de certaines émotions enfantines.
35Dans la classe de Violette (école du centre de Paris), au rythme très intense par rapport aux autres classes observées, des propos dévalorisant sont parfois tenus sur une élève, Romane, plus lente que les autres : « Romane ne fait pas [la nouvelle fiche] car elle ne comprend rien ». Des situations de violence verbale ont aussi aussi été constatées dans cette classe : « Garance va se faire fortement reprendre, car elle n’est pas encore aux bancs. “je serais au bord du meurtre !!” » [Violette, 22.05.2012]. Cette maîtresse fait aussi preuve parfois de violence physique, d’au moins trois manières : tirer le menton, taper sur la tête et prendre l’enfant par le col. « Elle tire le menton de Jean, qui semble perdu, avec toujours cette tête d’angoissé. » [Violette, 22.05.2012].
36Des attitudes similaires ont été constatées chez Bertrand (classe de petite section), dans la même école, en particulier lors des séances de sport.
« Un parcours de motricité […] a été préparé : au début, marcher sur des plots plus ou moins hauts, puis passer sous une table, puis marcher en équilibre etc. […] Tous en même temps. Je serai assez frappé par le fait que la plupart des paroles du maître et l’ASEM consistent en des injonctions par rapport à ce qu’ils attendent des élèves. Ne pas s’arrêter, ne pas doubler etc. […] Exemples : […] “Simon, tu fais n’importe quoi, tu arrêtes”. […] Un élève, Lucas, est timide. Il voudrait monter avec l’ASEM. Le maître ne veut pas. Je ne sais pas si c’est un caprice ou si c’est une angoisse. Cet enfant fait vraiment petit. […] Le maître dira : “n’importe quoi ! Tu sais le faire tout seul !” […] Pourtant les demandes affectives existent : « “BERTRAND, j’ai peur ! “Il lui dit de continuer ».
38De même, Bertrand se moque parfois des élèves de sa classe, devant eux. « Bertrand rit d’un élève qui vient me parler (car il parle pas parfaitement). C’est un élève d’origine asiatique. » [Bertrand, 15.05.2012].
39Même si les liens entre école et humiliations ne sont pas récents, les attentes de conformation scolaire immédiate pourraient avoir été favorisées par le procès de « scolarisation » de l’école maternelle. De fait, les thématiques psycho-affectives ont largement décliné dans les textes officiels. On peut imaginer qu’il en est allé de même au niveau des formations initiales et continues. Dès lors, l’apport psycho-affectif devient un supplément d’âme, apporté par la « personnalité » de l’enseignante (en réalité souvent par son milieu social) ; il n’est plus un attendu professionnel.
40Par ces propos, nous précisons donc que nous ne tenons nullement les enseignantes ici évoquées pour « responsables » de ces pratiques (qui sont liées aux évolutions du curriculum formel, des formations, etc.).
Plaisirs enfantins non scolaires introduits par l’enseignante
41Isia et Aurélie ont été comparées sur la question des anniversaires en classe, une pratique traditionnelle en maternelle. Il a été vu précédemment qu’Aurélie relève plutôt du premier idéal-type. Si les maîtresses proches de ce dernier cherchent à mettre en œuvre un travail scolaire qui ait l’apparence d’un jeu plaisant (pédagogie ludique), elles sont du même coup plutôt hostiles à la possibilité de plaisirs qui n’aient pas de vertus scolaires. Ceci n’est pas sans évoquer l’utilisation du jouet dans les catégories moyennes et supérieures (Vincent, 2000). Aussi Aurélie critique-t-elle le fait que l’on fête les anniversaires en maternelle. Si l’anniversaire a lieu en classe (elle préférerait que ce ne soit pas le cas), « il ne doit pas être une fête » [Aurélie, 24.01.2012] mais un moment d’apprentissage (apprendre des mots de vocabulaire en préparant le gâteau d’anniversaire par exemple). Attachée à son statut d’enseignante, elle dit que « le côté affectif de l’anniversaire la dérange » [Aurélie, 24.01.2012]. On voit ici que la référence affective est subtile à cerner au sein du premier idéal-type. S’ils partagent des valeurs psycho-affectives, ils sont réticents à une prise en compte affective qui soit au détriment des apprentissages.
Le cérémonial de l’anniversaire chez Isia
Le cérémonial de l’anniversaire chez Isia
42Au rebours, chez Isia, l’anniversaire a une importance toute autre. Un véritable cérémonial l’entoure.
43L’enfant prend alors symboliquement la place de la maîtresse. Le dispositif du coin regroupement, dont il a été vu précédemment qu’il est habituellement fort lié à la forme scolaire, change ici de personnage central : l’enfant fêté succède à la maîtresse, rehaussé par la grande chaise. Et la maîtresse prend la place de l’enfant sur le banc. Sur la petite table amenée devant lui pour ce moment particulier, du papier de soie a été disposé avec goût. La mise en scène souligne la solennité du moment. À l’inverse d’Aurélie, Isia dit : « ça leur fait plaisir… » [Isia, 17.01.2012]. C’est que le moment de l’anniversaire chez Isia est un moment de mise en suspens des perspectives socialisatrices disciplinaires, sorte de carnaval où les règles habituelles sont inversées.
Conclusion
44Même si des manières variées de faire, plus ou moins directement coercitives, ont été mises en lumière selon l’origine sociale des enseignantes et leur milieu d’exercice, peut-être plus qu’avant, l’école maternelle initie les enfants à un régime émotionnel favorable à l’ordre scolaire. Comment penser ces résultats au regard des socialisations familiales ? Nos observations montrent des enfants plus ou moins préparés au régime émotionnel scolaire. La littérature sur le sujet amène indiscutablement à faire l’hypothèse de socialisations familiales plus ou moins en continuité avec le régime émotionnel de l’école maternelle. Reste que d’autre part, dans les familles contemporaines (catégories moyennes et supérieures en particulier), l’enfant est de plus en plus conçu comme pourvoyeur de bonheur, de joie et de rapports affectifs (Déchaux, 2014). Il est singulier de constater qu’alors même que se mettait en œuvre cette « passion de l’enfant », l’école maternelle se scolarisait (des années 80 à nos jours). Comment penser les rapports entre ces deux phénomènes sociaux ? La famille reléguerait-elle en partie à l’école maternelle une partie du « mauvais rôle », celui d’œuvrer précocement à la réussite scolaire et sociale d’un enfant dont on espère beaucoup ? En partie dans l’ombre, la maternelle effectue en tout cas ce travail scolaire et disciplinaire des émotions indispensable à une scolarité, qui, de facto, commence aujourd’hui à trois ans.
Bibliographie
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- Vincent S. Le jouet au cœur des stratégies familiales d’éducation. Sociétés contemporaines, 2000, vol. 40, n° 1, pp. 165-182.
Notes
-
[1]
Cette « scolarisation » semble au demeurant entretenir des liens intimes avec une recherche croissante de résultats, elle-même indissociable de la diffusion dans l’Education nationale du new public management.
-
[2]
Nous emploierons le pluriel « enseignantes » du fait du très grand nombre de professeurs des écoles de sexe féminin. Quand nous dirons « enseignantes », nous voulons dire enseignantes et enseignants de sexe masculin.
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[3]
Le passage de la photographie des lieux à la photographie des personnes est une phase cruciale de l’enquête visuelle selon Maresca et Meyer (2013, p. 31).
-
[4]
ASEM : Assistante Spécialisée des Écoles Maternelles.
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[5]
Un extrait du cahier d’observation est ici fourni ; entre crochet, la date de l’observation dont rend compte l’extrait, accompagné du nom de l’enseignante.
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[6]
Merci à Philippe Bongrand qui a contribué à l’interprétation de ce passage.