Notes
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[*]
Professeur des universités, pédagogie spéciale et didactique, Université de Turin.
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[1]
À partir de 2003, on préfère utiliser le terme « disabile », toutefois on utilise encore des expressions comme : « porteur de déficit/déficiences » et « handicapé ». C’est pourquoi, dans le présent article, ces expressions seront adoptées comme synonymes. De la même façon, les termes « intégration » et « inclusion » (ce dernier moins fréquent) seront utilisés comme synonymes.
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[2]
DPR 8 mars 1999 n° 275, « Règlement apportant des règles en matière d’autonomie des institutions scolaires au sens de l’article 21 de la loi du 15 Mars 1997, n° 59 ». (DPR 8 marzo 1999 n° 275, « Regolamento recante norme in materia di autonomia delle istituzioni scolastiche ai sensi dell’art. 21 della legge 15 marzo 1997, n° 59 »).
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[3]
Le Décret Législatif 31 du Mars 1998, n° 112, « L’attribution des fonctions et devoirs administratifs de l’État aux régions et aux organismes locaux ». Loi constitutionnelle du 18 octobre 2001, n° 3, « Les modifications au titre V de la deuxième partie de la Constitution ». (Decreto Legislativo 31 marzo 1998, n° 112, « Conferimento di funzioni e compiti amministrativi dello Stato alle regioni e agli enti locali » ; Legge costituzionale 18 ottobre 2001, n° 3, « Modifiche al titolo V della parte seconda della Costituzione »).
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[4]
N de T : Istituto Nazionale per la valutazione del Sistema educativo di Istruzione e formazione, INVALSI.
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[5]
L’Autorité scolaire centrale a maintenu la compétence décisionnelle dans les domaines suivants : définition des objectifs généraux du processus de formation et des objectifs spécifiques d’apprentissage de base, détermination des disciplines et des activités constituant les curricula et des quotas nationaux des horaires annuels, définition des standards de prestation relatifs à la qualité de l’enseignement, indications générales concernant l’évaluation des élèves et reconnaissance des crédits et des « débits » [« debiti »].
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[6]
La Loi du 8 novembre 2000, n° 328, « la Loi cadre pour la réalisation du système intégré d’interventions et des services sociaux » (Legge 8 novembre 2000, n° 328, « Legge quadro per la realizzazione del sistema integrato di interventi e servizi sociali »).
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[7]
DM n° 226 du 26 mai 1998, « Les critères généraux pour la discipline de la part des universités des systèmes des cours de licence en Sciences de la formation primaire et des écoles de spécialisation pour l’enseignement dans l’école secondaire ». (DM n° 226 del 26 maggio 1998, « Criteri generali per la disciplina da parte delle università degli ordinamenti dei corsi di laurea in Scienze della formazione primaria e delle scuole di specializzazione per l’insegnamento nella scuola secondaria »).
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[8]
N de T : Scuole Interateneo di Specializzazione per l’Insegnamento nella scuola Ssecondaria di primo e secondo grado (SISS).
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[9]
Le diplôme de « lauréa » équivaut au master après le mémoire de fin de parcours.
-
[10]
La loi du 5 février 1992, n° 104, « Loi-cadre pour l’assistance, l’intégration sociale et les droits des personnes handicapées ». (Legge 5 febbraio 1992, n° 104, « Legge quadro per l’assistenza, l’integrazione sociale e i diritti delle persone handicappate »).
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[11]
Pour un approfondissement : « Les 10 ans de la Loi 104. Table Ronde », dans L’intégration scolaire et sociale, n° 1/4, septembre 2002, pp. 310-336. (I 10 anni della Legge 104. Tavola rotonda », in L’integrazione scolastica e sociale, n° 1/4, settembre 2002, pp. 310-336).
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[12]
Voir « l’Accord entre le Gouvernement, les Régions, les Provinces autonomes de Trente et de Bolzano, les Provinces, les Communes et les Communautés de montagne, au sujet des modalités et des critères pour l’accueil scolaire et la prise en charge de l’élève en situation de handicap », approuvé le 20 Mars 2008.
-
[13]
Ministère de l’Instruction Publique, Indications sur les curricula pour l’école maternelle et pour le premier cycle d’instruction, septembre 2007.
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[14]
« Gruppo tecnico responsabile del piano educativo individualizzato », « Gruppo handicap di Istituto », « Gruppo di lavoro interistituzionale a livello provinciale ».
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[15]
Données rapportées par l’ISTAT [Instruction et intégration des personnes en situation de handicap] pp. 4-5, www.disabilitaincifre.it. (Fonte dei dati riportati : ISTAT, Istruzione e integrazione delle persone con disabilità, pp. 4-5).
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[16]
Pour un approfondissement : Favorini. A.-M. La formation de l’enseignant de soutien dans la Faculté de Sciences de la Formation, cours de Licence en Sciences de la Formation Primaire, Université des Études « Rome-Trois ». L‘Intégration scolaire et sociale, juin 2004, n° 3/3, pp. 226-233.
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[17]
Pour un approfondissement : Pavone M. Modèles de semestre complémentaire de soutien. Université de Turin. L’Intégration scolaire et sociale, mai 2002, n° 1/2, pp. 148-155.
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[18]
Gruppo di Pedagogia Speciale – SIPED – Società Italiana di Pedagogia. Les éléments essentiels pour la formation de l’enseignant spécialisé pour le soutien. L’Intégration scolaire et sociale, avril 2005, n° 4/2, pp. 181-182.
1 – Un choix irréversible
1Dans un raisonnement empruntant des métaphores, nous pourrions dire que le processus d’intégration scolaire des élèves disabili [1] (handicapés) en Italie est comparable à une série d’histoires tressées entre elles. Il s’agit avant tout d’une histoire qui s’insère dans la grande histoire de l’éducation de tous les élèves et étudiants, avec les adaptations nécessaires sur le plan didactique, méthodologique, d’organisation et de formation. En outre, c’est une histoire qui, pour s’actualiser, mobilise l’aide d’autres micro-histoires contemporaines concernant différentes institutions : la santé, les administrations locales à plusieurs niveaux, le volontariat, le monde de la production, etc.
1.1 – L’intégration : une stimulation pour l’innovation
2Le choix de la pleine intégration scolaire des élèves et des étudiants avec des déficiences a d’abord été porté fortement, dans les années 1970, par la société civile. Ce choix a seulement ensuite été compris et accueilli par le législateur. Selon les experts les politiques « inclusives » n’ont représenté, jusqu’à la moitié des années 1980, qu’une « variable indépendante » des politiques scolaires générales. Les nouvelles lois ont cherché à assouplir le tissu rigide du système scolaire, pour l’ouvrir à l’accueil des élèves handicapés. Quand la présence de ceux-ci a été généralisée dans les classes communes, les politiques scolaires ont alors évolué jusqu’à considérer l’intégration comme une « variable dépendante » du système. Il y a eu une diminution des règles spécifiques pour les élèves et étudiants handicapés dans l’école et une forte attention pour affronter et penser les aspects de l’intégration dans le cadre des règles générales.
3L’expérience de « l’inclusion » intéresse aujourd’hui plus de 187 000 élèves et environ 85 000 « enseignants spécialisés pour le soutien » : le rapport moyen enseignant spécialisé/élèves handicapés est allé en se consolidant vers un rapport de 1 sur 2. Malheureusement encore presque 40 % des enseignants de soutien ne sont pas spécialisés et environ 50 % d’entre eux ont un statut précaire. Par ailleurs, cette expérience interpelle les régions, les provinces, les communes, les communautés de montagne et les organismes sanitaires locaux : ils sont obligés – par la loi – d’assurer les contributions qui soutiennent le processus d’intégration.
4Le bilan met en évidence beaucoup de bonnes pratiques scolaires, qui ont donné et donnent vie à des réalités, ainsi que des organisations plus que positives, même s’il ne manque pas de situations dans lesquelles les droits et la citoyenneté sont encore faibles pour les sujets qui vivent une situation de handicap. Malgré des zones d’ombre, la perspective de l’intégration des personnes avec des déficiences est considérée comme irréversible : toute l’évolution législative rappelle ce principe fondamental, en sollicitant la mise en œuvre d’interventions adéquates. La confrontation avec la différence a constitué – et constitue encore aujourd’hui – un fort impact de remise en question, mais désormais « l’inclusion » s’inscrit dans un processus de changement et d’innovation. Le « pari » reste celui d’apprendre à regarder la « différence » et ses difficultés en termes de ressources et pas seulement en termes de limites. Il devient possible d’expérimenter de nouvelles méthodologies ainsi que de nouvelles modalités relationnelles, de connaissance et d’apprentissage. Ceci conduit à un enrichissement des formes de la cohabitation et de la citoyenneté, qui doivent être renforcées, en lien avec deux points importants : la valorisation des rapports entre l’éthique, les valeurs et les droits qui s’inscrit dans la perspective d’une attention mondiale croissante au droit des citoyens, quel que soit le type d’écart des personnes à la norme, et d’une attention au dépassement de chaque forme d’intolérance. Rappelons qu’en décembre 2006 l’Assemblée Générale de l’ONU a approuvé la Convention sur les Droits des Personnes handicapées : c’est le premier traité du xxie siècle dont l’orientation s’oppose aux discriminations et qui - même avec des particularités - unifie le statut social des personnes handicapées dans les différents continents. L’idée que la pratique de « l’inclusion » doit représenter une occasion de comparaison et d’encouragement réciproque est soutenue par des projets, elle est en train de se répandre au niveau européen et international.
1.2 – L’expérience italienne vers l’intégration
5Parmi les acquis de l’expérience italienne, on peut mettre en évidence les principes et les objectifs les plus significatifs.
6Tous les élèves handicapés, indépendamment du type et du niveau de la gravité des déficiences, sont concernés par l’intégration dans les sections et dans les classes communes, au sein de la structure du système scolaire et de formation. Ceci, dans le cadre de l’obligation d’instruction jusqu’à 16 ans et de l’obligation de formation jusqu’à 18 ans. L’engagement pour l’intégration dans l’école de tous représente la stratégie fondamentale pour le développement et pour la conquête par chaque personne handicapée de son autonomie : ce constat a été validé par l’expérience. Le choix d’un modèle « inclusif » entraîne un rapport systémique entre la socialisation, la réhabilitation et l’apprentissage. Il ne s’agit pas de « réhabiliter d’abord, de socialiser ensuite, puis de faire apprendre », mais de stimuler par la confrontation la motivation des professeurs et des autres élèves et étudiants pour la réhabilitation fonctionnelle et cognitive, en organisant un contexte scolaire et extra-scolaire très enrichi.
7La conviction est que le principe éducatif et didactique prioritaire pour les écoles autonomes est la position centrale du sujet apprenant, dans son individualité ainsi que dans le réseau de relations qui le lie à la famille, à la sphère sociale et aux espaces territoriaux.
8La capacité des professionnels de l’éducation pour l’élaboration de projets, pour la mise en œuvre de méthodologies et de didactiques différenciées, constitue des ressources d’intervention (Ianes, 2006 ; Pavone, 2004). Cela concerne (1) la flexibilité d’organisation, (2) l’individualisation des curricula, (3) la pratique de l’évaluation. Tout en identifiant les acquis positifs, l’évaluation certifie les compétences concrètement acquises (même les plus simples) sur lesquelles on peut construire les objectifs ultérieurs.
9La différenciation des parcours de formation doit nécessairement trouver des ancrages réguliers dans la programmation de la classe selon un principe d’intégration coopérative.
10Est enfin bien établie l’importance du développement des liens en réseau – horizontaux et/ou verticaux – parmi tous les acteurs institutionnels, professionnels et non-professionnels, qui doivent ou qui peuvent contribuer à la réalisation de l’objectif de la pleine intégration scolaire et sociale. De fait, la personne handicapée ne passe parfois que quelques heures par jour à l’école, elle ne vit que quelques années dans les structures éducatives et formatives. Or, une perspective globale doit être celle qui prend en considération la totalité de l’existence (le projet de vie), dans le respect des choix personnels, familiaux, culturels et sociaux du sujet concerné.
2 – Le cadre
11Le processus de réforme du système d’instruction et de formation a commencé au milieu des années 1990. Malgré une décennie de dur travail, il n’est pas encore achevé, il se présente encore comme un « chantier ouvert » et son évolution est caractérisée par de longs temps d’élaboration. De plus, la nécessité de réviser certaines décisions initiales rend difficile les prévisions quant à son devenir.
12L’application de la Loi de réorganisation du système scolaire, approuvée par le Parlement en 2003 (Loi n° 53/2003) et qui a promu des innovations structurelles et radicales, a été interrompue au bout de trois années, en vue de sa modification, avec la suspension d’une bonne partie des décrets d’application. Plus précisément, l’entrée en vigueur de décrets législatifs a été retardée : ces décrets concernent la réforme du fonctionnement et des programmes de l’école du second degré, le rapport entre l’école et le monde du travail, la formation des enseignants, la revitalisation et le renforcement des lycées techniques et professionnels. Les programmes de l’école de base ont aussi été révisés.
2.1 – La réorganisation du système scolaire et la réforme des pouvoirs de l’État
13Dans un moment de transition lente et discontinue, la norme de référence la plus importante et la plus innovatrice pour l’école reste celle qui attribue l’autonomie aux institutions scolaires (DPR n° 275/1999 [2]). Ce cadre institutionnel - qui réglemente de manière négociée les compétences et les responsabilités respectives de l’administration centrale et des établissements scolaires autonomes - constitue le cadre de référence dans lequel s’inscrivent l’évolution en cours et les processus d’innovation.
14Le modèle de l’autonomie scolaire a ressaisi des tendances qui ont émergé dans la société à partir des années 1970 : (1) la participation, entendue comme ouverture à la cogestion du service scolaire avec des partenaires extérieurs ; (2) la décentralisation, qui réalise le transfert territorial de compétences de l’Administration centrale aux instances périphériques ; (3) le fédéralisme, qui prévoit la possibilité d’expérimenter des formes autonomes de pouvoir administratif, au-delà des pouvoirs délégués par l’État. Un processus de réorganisation des pouvoirs de l’État est en cours, avec l’attribution d’une autonomie majeure aux régions et aux organismes locaux, en particulier dans les secteurs de l’instruction et de la santé (DL n 112/98) [3].
15Cette autonomie a suscité dans les établissements scolaires des éléments de changement qui en ont modifié l’organisation. On peut en citer quelques-uns :
- l’attribution de la personnalité juridique, qui leur a conféré le statut de sujets institutionnels ;
- l’agrandissement de la sphère de l’autonomie en ce qui concerne les options didactiques, l’organisation administrative, la gestion financière, les options de recherche, de développement et d’expérimentation, avec la possibilité de constituer des réseaux d’écoles et des consortiums ;
- l’attribution de la qualification de dirigeant aux chefs d’établissement ;
- le contrôle de la qualité du service offert, avec le projet d’un organisme national approprié, responsable de l’évaluation du système d’éducation, d’instruction et de formation (INVALSI [4]).
16Le choix d’augmenter les pouvoirs de décision au niveau local ne doit pas induire le risque de fragmentation et de particularisme, ni induire l’isolement ; il doit plutôt favoriser l’émergence du lien social, de la solidarité, de l’intégration, des actions en réseau à l’échelle des territoires. C’est pourquoi la législation a introduit « le système intégré d’interventions et de services sociaux » (Loi n° 328/2000 [6]) : elle cherche à optimiser les convergences déjà organisées entre les différents organismes afin de poursuivre une redéfinition plus claire et plus précise des responsabilités et des compétences respectives.
2.2 – La formation universitaire des enseignants
17Parallèlement au choix de conférer des responsabilités majeures aux établissements scolaires, s’est imposée l’exigence d’une formation qualifiée de tous les enseignants, en confiant celle-ci à l’Université. Les dispositions sur la formation initiale universitaire des enseignants et sur la formation spécialisée pour l’intégration des élèves en situation de handicap ont trouvé une application concrète sur le plan de l’organisation avec un décret de 1998 (DM n° 226/98 [7]). Celui-ci a créé le Cursus de Licence en « Sciences de la Formation [d’enseignement] Primaire », d’une durée de quatre ans, en direction des futurs enseignants de l’école maternelle et élémentaire (qui possèdent un diplôme de « maturité » au terme des cinq années d’études secondaires). Il a également créé des « Écoles inter-universitaires de spécialisation pour l’enseignement dans l’école secondaire de premier et second cycle » (SISS [8]), d’une durée de deux ans pour les étudiants qui ont déjà obtenu le diplôme de « laurea » [quatre ou cinq années d’études universitaires] [9].
18Des « activités didactiques spécifiques pour au moins 400 heures » (100 heures de stage dans les classes fréquentées par des élèves porteurs de déficit) ont été prévues pour la formation aux contenus qui concernent l’intégration scolaire des élèves en situation de handicap : elles permettent l’admission dans le cursus de formation aux activités didactiques pour le soutien. Le parcours de spécialisation se termine avec une certification qui habilite à l’enseignement. Contrairement aux cours de spécialisation antérieurs d’une durée de deux années, structurés rigidement (avec des disciplines spécifiques très organisées et l’obligation de présence), le législateur, cette fois, n’a pas déterminé des contenus disciplinaires établis, à l’exception du stage, mais il a délégué à chaque université la responsabilité d’élaborer et d’articuler le projet de formation spécialisée. De manière réaliste, les dispositions concernant la formation initiale universitaire des enseignants spécialisés pour le soutien ont affirmé l’exigence d’une spécialisation ultérieure (comme « formation en service »), pour le perfectionnement professionnel nécessaire à la prise en charge des déficits sensoriels particuliers ou les situations de handicap plus complexes.
2.3 – La Loi-cadre sur le handicap
19Après vingt ans d’une lente évolution dans le sens de l’intégration, après une décennie de débats dans le pays et au Parlement, la « loi-cadre sur le handicap » a été approuvée en 1992 [10]. Une mesure qui, d’un côté, a réuni et réordonné la myriade de dispositions existantes dans ce domaine et, de l’autre, a énoncé de nouveaux droits spécifiques pour les sujets handicapés, en confiant les interventions aux régions, aux organismes et aux autorités locales, afin de traduire les déclarations de principe en dispositifs fonctionnels. Il s’agit d’une loi importante et même innovante à l’époque. Elle a effectué une révolution copernicienne, car elle n’est plus centrée sur les services et sur les acteurs professionnels, mais sur la personne et ses difficultés [11]. Pour la première fois il s’agit de prendre en considération toute l’existence de la personne handicapée, depuis sa naissance jusqu’à l’âge adulte, en s’occupant des aspects multiples qui la concernent : la santé (prévention, soin et réhabilitation), l’intégration sociale, l’éducation, l’instruction et la formation professionnelle, le travail, la maison, les transports, le dépassement des barrières architecturales et de communication.
20La section la plus intéressante et la plus élaborée de la loi est celle relative à l’intégration scolaire, inscrite dans la continuité de l’école maternelle jusqu’à l’Université. Elle garantit plus clairement des droits exigibles. Nous remarquons quelques conquêtes :
- le droit à l’éducation et à l’instruction est accompagné par un ensemble d’outils à vocation diagnostique (le diagnostic fonctionnel, le profil dynamique fonctionnel, le plan éducatif individualisé). Un groupe technique interprofessionnel en est responsable : ce groupe est composé par des enseignants spécialisés pour le soutien et des enseignants des curricula normaux, par des parents et des techniciens de la santé ;
- l’indication des procédures d’évaluation individualisée et des examens de fin de cycle scolaire ;
- la prévision des éléments nécessaires pour garantir l’intégration scolaire : les enseignants spécialisés, les autres acteurs professionnels de l’aide, la dotation d’équipement, des subsides et des technologies, des services de transport et des services pour la cantine ;
- la détermination de l’offre de formation scolaire, en sollicitant la flexibilité d’organisation et l’adaptabilité didactique, la formation et l’actualisation pluri-professionnelle des compétences ;
- l’option pour une programmation collégiale, interprofessionnelle et inter-institutionnelle, à différents niveaux, de l’intégration.
21Une de ses limites reconnues est le centralisme d’État qui la rend anachronique par rapport au processus de décentralisation dans l’organisation et dans la gestion de l’administration publique, qui a subi une forte accélération au tournant du siècle. L’autre anachronisme concerne « l’envahissement de la pensée du champ du handicap par le modèle de l’approche sanitaire », au regard des nouveautés introduites au début des années 2000 par l’Organisation Mondiale de la Santé. Il s’agit du nouveau modèle théorique de classement des conditions de santé/handicap des personnes, connu sous le sigle I.C.F. (International Classification of Functioning, Disability and Health). Ce paradigme permet une évaluation des fonctions de l’organisme humain pas seulement considérées en elles-mêmes, mais considérées aussi dans le contexte de la vie culturelle et des données environnementales. Cette dimension était ignorée par le modèle ancien.
22Dans l’optique d’aborder la question de l’intégration scolaire de l’élève en situation de handicap dans un projet global et d’intégrer les actions de tous les acteurs institutionnels impliqués, des confrontations sont en cours. Elles visent l’amélioration des dispositifs et procédures, comme l’accueil et l’accompagnement de l’élève, l’identification du déficit, l’élaboration du diagnostic fonctionnel, la coordination et l’intégration des ressources professionnelles, les modalités de répartition des enseignants spécialisés [12].
3 – Politiques, pratiques, normes : des signes de synergie
23À la question de savoir s’il y a une synergie entre les choix de la politique scolaire, les choix qui concernent la formation des enseignants et les orientations normatives adressées aux personnes handicapées, on peut répondre positivement, même si dans chacun de ces domaines pour chaque incitation de principe les réponses élaborées ne sont pas homogènes.
24La Loi-cadre a renforcé une sensibilité à l’intégration présente de manière diffuse dans le monde de l’école et dans la sphère du social, en contribuant à marquer une période dans laquelle on s’est occupé prioritairement de la qualité globale du service scolaire et de la qualité de l’intégration des élèves en difficulté.
3.1 – L’autonomie des établissements
25En ce qui concerne l’évolution vers l’autonomie des institutions scolaires, il ne s’agit pas seulement d’une opération d’organisation administrative, mais aussi de rapprocher le siège de l’offre de formation du contexte socio-spatial où s’expriment les besoins dans un territoire. L’autonomie des écoles favorise la capacité des instances éducatives à saisir les attentes en matière d’éducation et à y répondre de manière flexible. En outre, cette autonomie favorise le dialogue paritaire avec les autres partenaires locaux impliqués dans le processus de formation. Les écoles autonomes doivent reconnaître et prendre en compte la diversité présente dans les classes et accueillir chaque initiative utile à la réussite de chaque élève, y compris pour les élèves handicapés. Dans cette perspective, elles sont incitées à adopter des formes de flexibilité sur le plan des programmes, de l’organisation, de la méthodologie et de la didactique. Un outil essentiel pour les liaisons entre l’école et le territoire est constitué par le Plan de l’Offre de Formation. Ce document présente l’identité de l’école et doit exprimer pleinement la sensibilité de la communauté au processus d’intégration des élèves avec des déficiences, processus appuyé sur un projet méthodologique multidimensionnel et sur l’interaction coopérative entre les enseignants, les familles et les élèves.
26La réforme du système scolaire en 2003, ainsi que les documents-programmes pour l’école de base établis en 2004, puis rénovés en 2007 [13], confirment l’orientation vers la pleine intégration scolaire des élèves en situation de handicap.
3.2 – Une formation au handicap pour tous les enseignants
27Pour ce qui concerne la formation universitaire des enseignants spécialisés pour le soutien, ainsi que la Loi-cadre l’avait indiqué, le cursus de spécialisation s’inscrit à l’intérieur du parcours normal de formation du futur enseignant : c’est une dimension de sa professionnalité. Outre la qualification spécifique pour les enseignants spécialisés, la formation universitaire a prévu des « activités didactiques à l’intention de tous les étudiants », en vue de l’acquisition des aptitudes et des compétences nécessaires à quelques aspects transversaux de la fonction enseignante, y compris les dimensions concernant l’intégration scolaire des élèves handicapés. Ces activités de formation doivent être définies par le programme de chaque université « comme des objectifs de qualification de base nécessaires pour atteindre les objectifs de la formation », ce qui signifie qu’une sensibilisation à la question du handicap est prévue pour tous ceux qui veulent exercer la profession d’enseignant.
3.3 – La gestion collégiale
28La Loi-cadre a repris et adopté le modèle de la gestion collégiale et concertée utilisé dans l’École depuis le milieu des années 1970. Elle l’a adapté aux exigences de l’intégration scolaire et a prévu sa réalisation dans les différents domaines professionnels et territoriaux que sont le « Groupe technique responsable du plan éducatif individualisé » de chaque élève en situation de handicap, le « Groupe handicap de l’Institution scolaire », et le « Groupe de travail inter-institutionnel au niveau provincial » [14].
29On ne doit pas sous-estimer l’invitation à établir des « Accords de programme pour l’intégration scolaire » (au niveau communal ou intercommunal), à travers lesquels les cadres professionnels assument des engagements collégiaux de gestion et de bilan bien définis. Depuis 2000, les « Accords de programme » doivent être repris à l’intérieur de « Plans de zone » [« Piani de zona »] spécifiques, dont l’orientation doit favoriser la réalisation du projet de vie pour le sujet en situation de handicap (Loi n° 328/2000).
4 – Le processus se consolide
30Les statistiques officielles disponibles auprès du Ministère de l’Instruction Publique montrent qu’à partir des années 1990 la présence des élèves handicapés dans le système scolaire commun se consolide dans les écoles du premier cycle et croît fortement dans l’enseignement secondaire. Actuellement, environ deux-tiers des écoles italiennes accueillent des élèves en situation de handicap.
4.1 – Quelques données
31Dans l’année scolaire 2006/2007, le nombre d’élèves « avec des habiletés différentes », « differentemente abili » selon l’expression utilisée dans les documents du Ministère, qui fréquentent les écoles d’État et les écoles privées, se monte à 187 567, dont : 18 656 dans l’école maternelle, 71 381 dans le primaire, 56 747 dans le premier cycle du secondaire, 40 783 dans le deuxième cycle du secondaire. En quinze ans, depuis le moment où a été approuvée la Loi-cadre, il y a eu un accroissement de 70,48 % du nombre de ces élèves. Corrélativement au mouvement généralisé d’intégration dans les écoles communes, les effectifs ont beaucoup été réduits dans les écoles spécialisées. Environ 97,8 % des élèves handicapés sont inscrits et fréquentent des écoles ordinaires, les 2,2 % restants sont inscrits et fréquentent des écoles spécialisées. Les écoles spécialisées représentent 0,13 % de l’ensemble des écoles (Pavone, 2007).
4.2 – Les étudiants en situation de handicap à l’Université
32Les données sur la présence des étudiants en situation de handicap à l’Université montrent une tendance croissante entre 2000 et 2005, aujourd’hui ils sont plus de dix mille. La distribution selon la typologie du déficit indique que les sujets avec des problèmes moteurs constituent le pourcentage le plus élevé, alors que le pourcentage le plus faible concerne les difficultés psycho-cognitives et langagières. Cet accroissement témoigne d’un engagement grandissant de la part des institutions universitaires, pour le dépassement des barrières physiques et architecturales du handicap, stimulé par l’entrée en vigueur de la Loi n° 17/1999. Sont ainsi garantis, les équipements techniques et les outils didactiques spécifiques, les services de tutelle spécialisée, le soutien individualisé en vue des examens. Pour favoriser les fonctions de coordination, de management et de soutien des initiatives relatives à l’intégration dans le domaine universitaire, un professeur expressément « Délégué » est nommé par le Recteur dans chaque université.
4.3 – Les enseignants spécialisés pour le soutien comme protagonistes de l’intégration
33Dans le cheminement italien vers l’intégration scolaire, l’enseignant spécialisé pour le soutien a toujours été le pivot de l’action d’inclusion. Certains points ont suscité des critiques. D’une part, la tendance à lui déléguer la quasi-totalité de la responsabilité de la gestion du dispositif didactique destiné aux élèves handicapés. D’autre part, sa présence sur des horaires ponctuels le fait apparaître comme prestataire d’un service individuel et non comme responsable d’interventions pour l’ensemble de la classe qui l’accueille. Il faut rappeler, en effet, que, depuis le début, l’enseignant spécialisé a été investi comme une « figure de l’institution » et comme une ressource pour l’école : un « enrichissement des potentialités de la fonction enseignante » aux fins de l’intégration.
34Pour ce qui concerne son profil professionnel, il existe une ambiguïté entre deux fonctions : d’un côté, une fonction « formelle », technique, spécialisée aux fins d’une intégration didactique-éducative réelle - les connaissances et compétences de type pédagogique, méthodologique-didactique et psycho-socio-médical, la capacité d’élaborer des projets - d’un autre côté, une fonction plus « informelle », la fonction de soutien. Cette seconde fonction souligne la responsabilité en matière de soin et le devoir d’accompagnement de l’enseignant spécialisé vis-à-vis de l’élève, des collègues et de l’institution scolaire, en mettant l’accent sur les capacités de communication et les savoir-faire relationnels. L’enseignant spécialisé est considéré comme le premier responsable du processus d’identification et d’organisation des relations/réseaux de soutien.
35L’enseignant spécialisé travaille en collaboration avec les autres enseignants de la classe et avec les autres membres de « l’équipe » qui inclut les professionnels de l’institution sanitaire et sociale ainsi que la famille, il suit la totalité du parcours scolaire de l’élève. Il doit mettre au point les documents concernant les projets et la méthodologie-didactique pour la connaissance de l’élève, pour l’apprentissage et pour l’inclusion : le « profil dynamique fonctionnel » et le « plan éducatif personnalisé ». Tout cela nécessite d’avoir des idées précises sur des objectifs pertinents, sur les modèles didactiques prévus pour la classe et pour l’élève en situation de handicap, sur les outils qui facilitent les activités scolaires (les outils informatiques et multimédias), sur les espaces scolaires et extrascolaires et sur les temps nécessaires à l’élève en difficulté pour réaliser des progrès.
36Un lien fort entre le travail de l’enseignant spécialisé et les enseignants de la classe est fondamental pour le processus d’intégration « car c’est l’interaction entre des compétences et des contenus différents qui pourra induire la synergie entre les programmes, les méthodes, les stratégies et les moyens didactiques employés en direction des sujets ordinaires et qui pourront être proposés à l’élève en situation de handicap, après une évaluation de chaque situation » (Gelés, 2004, p. 91).
37L’enseignant spécialisé peut travailler avec d’autres professionnels de l’éducation et de la santé (des éducateurs et des collaborateurs scolaires bien formés) en présence des élèves en situation de handicap particuliers (les sujets malentendants, les sujets nonvoyants, les sujets autistiques, etc.), ou qui n’ont pas l’autonomie dans l’emploi des fonctions hygiéniques, dans l’alimentation ou dans la déambulation. Toutefois, cet enseignant spécialisé reste le principal médiateur entre le sujet porteur de déficiences, la classe, l’école et les apprentissages prévus dans les curricula scolaires.
4.4 – Des problèmes ouverts
38On peut dire que l’intégration scolaire en Italie est dans une phase de maturité « adulte », au sens actuel du terme (l’âge adulte est considéré aujourd’hui comme une phase de la vie dans laquelle la personne est encore à la recherche d’un équilibre, plutôt que comme un âge où l’on a atteint tous ses objectifs). On ne peut pas ignorer que les écoles manifestent des capacités différentes pour l’accueil et l’accompagnement des sujets en difficulté dans leur parcours de formation : l’attention à la singularité des élèves et la disponibilité-flexibilité sur le plan didactique sont plus significatives dans les écoles primaires que dans l’enseignement secondaire. Dans quelques établissements de l’enseignement secondaire (par exemple dans les lycées professionnels et dans les lycées artistiques), la proportion des élèves avec des déficiences est plus élevée que la proportion des élèves ordinaires : en général leur proportion diminue progressivement au cours des cinq années. Malgré l’accroissement continu des étudiants en situation de handicap à l’Université, les statistiques confirment que ces étudiants obtiennent généralement des résultats passables d’instruction : plus de 50 % obtiennent les diplômes de l’école élémentaire et moyenne, seulement 10,4 % arrivent à la fin de l’enseignement secondaire au bac (données relatives à l’année universitaire 1999-2000 [15]). L’orientation et le rapport école-travail demeurent des problèmes ouverts, dont la solution est encore lointaine.
39Parmi les améliorations à introduire, nous pouvons citer :
- une meilleure définition des compétences des différents professionnels de l’éducation qui travaillent pour l’intégration scolaire (les enseignants spécialisés et les enseignants des curricula ordinaires, les éducateurs et les professionnels de la santé) ;
- la garantie d’une continuité des enseignants spécialisés présents à côté des élèves : il s’agit de rompre avec la précarité des statuts et avec la fuite des enseignants vers l’enseignement dans les cursus ordinaires ;
- l’amélioration des standards de qualité en matière d’intégration à l’intérieur de la communauté scolaire. À ce propos, les experts soulignent l’urgence de définir et de rendre opérationnels les critères d’évaluation de la qualité de l’intégration et les critères d’évaluation de l’apprentissage, en tant qu’indicateurs du processus.
40Il ne faut pas oublier l’opportunité de promouvoir des actions de sensibilisation vers les professionnels de la santé, les assistants et les éducateurs des organismes locaux. Les indications de la Loi-cadre, remarquaient, il y a quinze ans déjà, l’importance de penser des initiatives de formation interprofessionnelle et inter-institutionnelle.
5 – Modèles de formation universitaire aux situations de handicap
41Il y a une pluralité de projets de formation dans le champ de la problématique du handicap qui ont été mis en œuvre par les différentes universités italiennes. Nous présentons à titre d’exemples deux modèles de « Cours de spécialisation pour les activités de soutien » : un modèle concerne la formation des maîtres, l’autre concerne la formation des enseignants des écoles du secondaire (SISS : Scuole Interateneo di Specializzazione per l’Insegnamento nella scuola Secondaria di primo e secondo grado).
5.1 – L’offre de formation de l’Université de Rome-Trois [16]
42Dans le cursus de licence en « Sciences de la formation Primaire », l’Université de Rome-Trois a mis en œuvre un choix qui privilégie les savoirs-compétences : (a) professionnels (observation et évaluation des habiletés et déficiences de l’élève ; capacité de choisir et définir des objectifs de formation), (b) méthodologiques-didactiques (connaissance et utilisation des procédures et stratégies didactiques très connues, par exemple : Mastery Learning, Task Analysis, Modeling, Coopérative Learning, Tutoring).
43Le plan de formation se déroule selon un parcours caractérisé par la spécificité des contenus et par une méthodologie qui se concrétise dans les séances d’activités pratiques (laboratori) et dans les stages, comme des moments de réflexion et de ré-élaboration individuelle. Les disciplines qui rentrent dans le curriculum (180 heures) sont : la Pédagogie spéciale (niveau avancé), la Didactique spéciale (niveau avancé), la Méthodologie et la Didactique spéciales des troubles de l’apprentissage, la Neuropsychiatrie infantile, la « Psychopathologie évolutive » (Psicopatologia evolutiva), la Psychologie du handicap et de la réhabilitation.
44Les séances d’activités pratiques (120 heures) ont pour but de permettre aux étudiants de faire des expériences dans la réalité professionnelle : l’étudiant a la possibilité de ré-élaborer les contenus des disciplines et les connaissances acquises par leur mise en œuvre dans des occasions concrètes d’approfondissement qui conjuguent la théorie et la pratique. La problématique de la technologie qui concerne le handicap (l’utilisation du réseau Internet, les outils auxiliaires, etc.) bénéficie d’une attention particulière.
45Le stage « direct » (50 heures) est centré principalement sur l’acquisition des connaissances et des pratiques issues de l’expérience. Les activités sont réalisées dans les écoles, où il est possible d’appliquer et d’expérimenter les techniques d’observation apprises et de mettre en œuvre la capacité d’élaborer des projets.
46Le stage « indirect » (50 heures) a lieu dans des structures externes à l’Université, où les stagiaires sont suivis par un tuteur de référence. L’expérience de stage représente pour les étudiants une importante opportunité de réflexion sur leurs propres motivations initiales, sur leurs capacités de construire des relations, ainsi que sur leur formation disciplinaire, méthodologique-didactique et spécialisée.
47Le parcours de spécialisation se conclut avec la réalisation d’un mémoire de fin de stage qui consiste en une étude monographique de cas : chaque étudiant analyse et décrit de façon critique le cas choisi, de la phase de l’observation diagnostique à l’intervention éducative et méthodologique-didactique.
5.2 – Le curriculum de la SISS du Piémont [17]
48Le cursus de spécialisation de la SISS propose de fournir au futur enseignant spécialisé pour le soutien : (a) les connaissances propédeutiques sur le monde de la différence ; (b) les connaissances relatives à l’élève handicapé, surtout pour ce qui concerne l’utilisation des outils du diagnostic, de la réhabilitation et des interventions éducatives-didactiques ; (c) les modalités de conduite et de gestion d’une classe inclusive ; (d) les compétences pour l’utilisation des stratégies didactiques complètes ; (e) les compétences pour l’utilisation des méthodologies, des méthodes et des matériels spécifiques ; (f ) les connaissances et les compétences relatives à l’élaboration des projets d’intervention pour accompagner les élèves dans leur projet de vie ; (g) les méthodes et les techniques pour tisser des liens relationnels avec les collègues et les autres professionnels scolaires et extra-scolaires. Le curriculum est organisé en cours de base et en séances d’activités pratiques dans le but de déterminer – de manière unitaire et en même temps flexible – le cursus de la formation. Les programmes des séances d’activités pratiques sont choisis par rapport aux disciplines des cours de base, comme le montre le tableau ci-dessous.
Curriculum de spécialisation des enseignants du Piémont
Curriculum de spécialisation des enseignants du Piémont
49Pendant les activités de stage, les étudiants sont accompagnés par des superviseurs spécialisés et experts (avec un encadrement de 1 pour 15 à 20 étudiants). Le stage se déroule dans les classes d’écoles moyennes et secondaires qui accueillent des élèves handicapés (il s’agit de l’activité d’observation et d’assistance à l’enseignement pour environ 65 heures). En outre, des expériences indirectes de réflexion critique (individuelle et avec le superviseur pour environ 35 heures) sont prévues.
50Après le passage des épreuves des examens disciplinaires en contrôle continu, le parcours de formation se conclut avec la soutenance du portfolio individuel des compétences, c’est-à-dire d’un dossier et d’un document écrit qui concernent : un cas, une pathologie, une méthodologie, une séquence didactique, un projet, des relations inter-personnelles et de groupe.
6 – Perspectives pour le changement
51Il est important que les cours de spécialisation complémentaires aient été placés dans l’institution universitaire qui est le siège de toute la formation des futurs enseignants des écoles primaires et secondaires. Mais l’autonomie complète des universités a ouvert les portes à la construction de curricula très diversifiés et il manque - au niveau national - l’homogénéité d’un projet de formation pour les enseignants responsables de l’intégration scolaire des élèves et étudiants en situation de handicap.
6.1 – Critiques du modèle de la formation
52Le processus de formation du futur enseignant spécialisé devrait être caractérisé par un ensemble de différentes possibilités de formations : formation culturelle, formation à la programmation et à la méthodologie-didactique, formation à l’observation dans les classes qui accueillent des élèves avec des déficiences.
53L’intégration entre ces diverses dimensions ne peut pas se réaliser à travers le simple rapprochement des domaines et/ou des différents contenus des programmes d’études. L’intégration peut se réaliser en favorisant un processus d’élaboration fondé sur la dialectique et la confrontation des méthodologies. En d’autres termes, il ne s’agit pas d’un programme académique mais d’un projet de formation.
54Une autre critique concerne l’insuffisance du nombre des heures de didactique. Les cours de 400 heures, par rapport aux vieux cours de spécialisation de 1300 heures, sur une durée de deux années, en place jusqu’en 1995, induisent des questions et conduisent beaucoup de pédagogues et d’experts de l’éducation à juger ce choix « comme un choix insuffisant et absorbé dans le parcours universitaire de base pour tous les futurs enseignants » (Ianes, 2004, p. 590). On peut encore ajouter que toutes les universités n’imposent pas aux étudiants l’obligation de présence aux activités prévues dans l’offre de formation.
55Depuis longtemps la conviction s’est imposée que, pour une intégration scolaire de qualité, il est indispensable qu’il y ait une prise en charge du projet par tous les enseignants de l’équipe de la classe, dans une optique où l’école est considérée comme une « communauté d’apprentissage » qui assume collégialement l’attention à l’intégration. Même si la formation universitaire prévoit des activités didactiques destinées aux futurs enseignants, sur les thématiques de l’intégration des élèves handicapés, peu d’universités proposent cependant dans leur plan d’études normales, des disciplines comme la Pédagogie Spéciale et la Didactique Spéciale, ou encore des séances d’activités pratiques qui concernent le handicap à l’école.
56Un autre secteur important à améliorer est celui de la formation continue des enseignants. En effet, la « faiblesse » du projet de formation universitaire pour le handicap – surtout par rapport aux déficiences sensorielles et aux « situations de gravité » – rappelle l’exigence d’une spécialisation en cours de carrière, au niveau scientifique, méthodologique et organisationnel. Il y a aussi urgence à préparer tous les enseignants qui travaillent en classe pour l’accueil éducatif et didactique des élèves en difficulté.
57Malgré les nombreuses pressions qui viennent des associations familiales (Nocera, 2002), des chercheurs et des professionnels (Canevaro, 2006), il n’y a pas encore beaucoup de propositions pour des interventions formatives sur le handicap en direction de tous les personnels des écoles. Aujourd’hui aucune norme n’impose ou n’impulse la requalification des enseignants impliqués dans les curricula ordinaires ou spécialisés. Dernièrement un plan expérimental de formation sur les thématiques de l’inclusion a démarré : il est promu par le MPI (Ministère de l’Instruction Publique) et destiné à 250 institutions scolaires (le projet I Care).
6.2 – Propositions
58Depuis des années, on discute sur la nécessité de réformer le système de formation universitaire de tous les enseignants. Évidemment, dans ce vaste projet de changement s’insère aussi la formation spécialisée pour le soutien au handicap. Le groupe des professeurs universitaires du secteur avance quelques propositions qui cherchent à créer des synergies entre les meilleures réussites de la tradition et les meilleures réussites de l’innovation. On peut indiquer leurs principales recommandations [18] :
59Formation spécialisée. Il est réaffirmé que l’enseignant spécialisé est un enseignant des curricula ordinaires qui se forme dans une spécialisation polyvalente pour le soutien avec : (a) une forte formation pédagogique-didactique et méthodologique ; (b) la connaissance des méthodes les plus connues pour la réhabilitation ; (c) de bonnes compétences de relation et de communication ; (d) la capacité d’accompagner le jeune handicapé dans son projet scolaire de préparation à la vie adulte (De Anna, 2007). Le parcours de formation suggéré prévoit : la licence (3 années) (laurea triennale), la licence magistrale (+ 2 années laurea magistrale), une année ultérieure d’études pour obtenir la spécialisation (+ une année).
60Formation continue. Il faut penser à un système de formation continue, capable de proposer périodiquement aux enseignants spécialisés en activité des modules de formation et des cours universitaires. En particulier, les universités devraient organiser des Masters qui compléteraient la formation spécialisée, par exemple sur les grandes pathologies (sensorielles, comportementales, cognitives etc.) et sur les méthodologies innovantes.
61Formation transversale spéciale pour tous les enseignants. Tous les enseignants, dans leur formation universitaire, devraient bénéficier d’une série d’enseignements concernant la formation spécialisée de base. Ce tronc commun (quantifié en 60 crédits), pourrait proposer comme contenus : (a) la connaissance de la diversité des besoins éducatifs spécifiques dans la classe et des possibilités offertes par les lois et par les pratiques réelles d’inclusion ; (b) la connaissance spécifique de l’élève en situation de handicap ; (c) la création en classe de situations actives d’apprentissage et de sensibilisation aux relations interpersonnelles et de groupe ; (d) l’utilisation de stratégies didactiques intégrées.
62Système des crédits de formation universitaire. Le système des crédits de formation doit rester un point fondamental capable de favoriser, dans la flexibilité des systèmes académiques, la formation des enseignants spécialisés pour le soutien (dans la formation en service, dans la formation de base, dans le cursus de spécialisation, dans le master).
6.3 – Travaux en cours : « intégrer l’intégration »
63L’analyse quantitative et qualitative des interventions au Parlement indique que, pour soutenir la logique de l’intégration, il est nécessaire d’intervenir sur des fronts différents : pas seulement sur la dimension juridique – déjà consolidée et éventuellement à perfectionner – mais surtout à travers la requalification de l’action éducative-didactique dans l’école, la formation du personnel, les choix politiques et organisationnels.
64Une culture toujours plus sensible à l’intégration doit permettre aux différents contextes, dans lesquels les sujets handicapés vivent, de communiquer et d’interagir à plusieurs niveaux : individuel, familial, scolaire, extrascolaire, institutionnel, social et du travail.
65La thématique de la coordination entre l’institution et les ressources ouvre sur une nouvelle frontière : « intégrer l’intégration », c’est-à-dire optimiser les liens que les organismes (les communes, les provinces, les régions, les écoles, les organismes de la santé ASL) cherchent déjà à réaliser, dans l’optique de poursuivre une redéfinition plus claire et un engagement plus précis des responsabilités et des compétences. Le développement de deux types de coordination – une politique et une technique – devrait améliorer les résultats de l’intégration, en promouvant une sensibilité et des pratiques capables de personnaliser les réponses concrètes en les adaptant aux besoins, à l’intérieur de cadres de référence unitaires pour l’ensemble des territoires.
66Le chantier des travaux reste ouvert ; ceci est rassurant car cela nourrit l’idée qu’on peut toujours travailler pour l’amélioration, convaincus que l’intégration scolaire est le fondement de la future intégration sociale et de la qualité de vie de la personne handicapée.
Bibliographie
Bibliographie
- Canevaro A. Le logiche del confine e del sentiero. Trento : Erickson, 2006.
- De Anna L. La formazione degli insegnanti e i sette moduli. L’integrazione scolastica e sociale, novembre 2007, n° 6/5, pp. 447-463.
- Favorini A. M. La formazione dell’insegnante di sostegno nella Facoltà di Scienze della Formazione, corso di Laurea in Scienze della Formazione Primaria, Università degli Studi « Roma Tre ». L’integrazione scolastica e sociale, giugno 2004, n° 3/3, pp. 226-233.
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- Gelati M. Pedagogia speciale e integrazione. Roma : Carocci, 2004.
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- Ianes D. La speciale normalità. Strategie di integrazione e inclusione per la disabilità e i Bisogni Educativi Speciali. Trento : Erickson, 2006.
- Ianes D. La formazione dell’insegnante di sostegno. Studium Educationis, Monografia su « Disabilità, Integrazione e Pedagogia Speciale », 2004, n° 3, pp. 589-598.
- Nocera S. L’importanza della Legge quadro n° 104/92 sui diritti delle persone con disabilità. L’integrazione scolastica e sociale, febbraio 2007, n° 6/1, pp. 86-90.
- Nocera S. Gli insegnanti curricolari hanno diritto alla formazione sull’integrazione scolastica. L’integrazione scolastica e sociale, novembre 2002, n° 1/5, pp. 470-472.
- Nocera S. Il diritto all’integrazione nella scuola dell’autonomia. Trento : Erickson, 2001.
- Nussbaum M. Le nuove frontiere della giustizia. Bologna : Il Mulino, 2007.
- Pavone M. La via italiana all’integrazione scolastica degli allievi disabili. Dati quantitativi e qualitativi. In : Canevaro A. (coord.). L’integrazione scolastica degli alunni con disabilità. Trento : Erickson, 2007, pp. 159-183.
- Pavone M. Specialist Teacher Training in Educational Integration of Students with Disability in Italy. Special Education. Baltic Journal of Special Education, 2007, n° 2 (17), pp. 72-81.
- Pavone M. Personalizzare l’integrazione. Brescia : La Scuola, 2004.
- Pavone M. Modelli di semestre aggiuntivo di sostegno. Università di Torino. L’integrazione scolastica e sociale, maggio 2002, n° 1/2, pp. 148-155.
- Pavone M. Quale formazione per l’insegnante specializzato e per quale specializzazione ? Le leggi dell’integrazione scolastica e sociale, dicembre 2001, n° 2/7, pp. 426-433.
- Trisciuzzi L. & Galanti M. A. Pedagogia e didattica speciale per insegnanti di sostegno e operatori della formazione. Pisa : ETS, 2001.
Notes
-
[*]
Professeur des universités, pédagogie spéciale et didactique, Université de Turin.
-
[1]
À partir de 2003, on préfère utiliser le terme « disabile », toutefois on utilise encore des expressions comme : « porteur de déficit/déficiences » et « handicapé ». C’est pourquoi, dans le présent article, ces expressions seront adoptées comme synonymes. De la même façon, les termes « intégration » et « inclusion » (ce dernier moins fréquent) seront utilisés comme synonymes.
-
[2]
DPR 8 mars 1999 n° 275, « Règlement apportant des règles en matière d’autonomie des institutions scolaires au sens de l’article 21 de la loi du 15 Mars 1997, n° 59 ». (DPR 8 marzo 1999 n° 275, « Regolamento recante norme in materia di autonomia delle istituzioni scolastiche ai sensi dell’art. 21 della legge 15 marzo 1997, n° 59 »).
-
[3]
Le Décret Législatif 31 du Mars 1998, n° 112, « L’attribution des fonctions et devoirs administratifs de l’État aux régions et aux organismes locaux ». Loi constitutionnelle du 18 octobre 2001, n° 3, « Les modifications au titre V de la deuxième partie de la Constitution ». (Decreto Legislativo 31 marzo 1998, n° 112, « Conferimento di funzioni e compiti amministrativi dello Stato alle regioni e agli enti locali » ; Legge costituzionale 18 ottobre 2001, n° 3, « Modifiche al titolo V della parte seconda della Costituzione »).
-
[4]
N de T : Istituto Nazionale per la valutazione del Sistema educativo di Istruzione e formazione, INVALSI.
-
[5]
L’Autorité scolaire centrale a maintenu la compétence décisionnelle dans les domaines suivants : définition des objectifs généraux du processus de formation et des objectifs spécifiques d’apprentissage de base, détermination des disciplines et des activités constituant les curricula et des quotas nationaux des horaires annuels, définition des standards de prestation relatifs à la qualité de l’enseignement, indications générales concernant l’évaluation des élèves et reconnaissance des crédits et des « débits » [« debiti »].
-
[6]
La Loi du 8 novembre 2000, n° 328, « la Loi cadre pour la réalisation du système intégré d’interventions et des services sociaux » (Legge 8 novembre 2000, n° 328, « Legge quadro per la realizzazione del sistema integrato di interventi e servizi sociali »).
-
[7]
DM n° 226 du 26 mai 1998, « Les critères généraux pour la discipline de la part des universités des systèmes des cours de licence en Sciences de la formation primaire et des écoles de spécialisation pour l’enseignement dans l’école secondaire ». (DM n° 226 del 26 maggio 1998, « Criteri generali per la disciplina da parte delle università degli ordinamenti dei corsi di laurea in Scienze della formazione primaria e delle scuole di specializzazione per l’insegnamento nella scuola secondaria »).
-
[8]
N de T : Scuole Interateneo di Specializzazione per l’Insegnamento nella scuola Ssecondaria di primo e secondo grado (SISS).
-
[9]
Le diplôme de « lauréa » équivaut au master après le mémoire de fin de parcours.
-
[10]
La loi du 5 février 1992, n° 104, « Loi-cadre pour l’assistance, l’intégration sociale et les droits des personnes handicapées ». (Legge 5 febbraio 1992, n° 104, « Legge quadro per l’assistenza, l’integrazione sociale e i diritti delle persone handicappate »).
-
[11]
Pour un approfondissement : « Les 10 ans de la Loi 104. Table Ronde », dans L’intégration scolaire et sociale, n° 1/4, septembre 2002, pp. 310-336. (I 10 anni della Legge 104. Tavola rotonda », in L’integrazione scolastica e sociale, n° 1/4, settembre 2002, pp. 310-336).
-
[12]
Voir « l’Accord entre le Gouvernement, les Régions, les Provinces autonomes de Trente et de Bolzano, les Provinces, les Communes et les Communautés de montagne, au sujet des modalités et des critères pour l’accueil scolaire et la prise en charge de l’élève en situation de handicap », approuvé le 20 Mars 2008.
-
[13]
Ministère de l’Instruction Publique, Indications sur les curricula pour l’école maternelle et pour le premier cycle d’instruction, septembre 2007.
-
[14]
« Gruppo tecnico responsabile del piano educativo individualizzato », « Gruppo handicap di Istituto », « Gruppo di lavoro interistituzionale a livello provinciale ».
-
[15]
Données rapportées par l’ISTAT [Instruction et intégration des personnes en situation de handicap] pp. 4-5, www.disabilitaincifre.it. (Fonte dei dati riportati : ISTAT, Istruzione e integrazione delle persone con disabilità, pp. 4-5).
-
[16]
Pour un approfondissement : Favorini. A.-M. La formation de l’enseignant de soutien dans la Faculté de Sciences de la Formation, cours de Licence en Sciences de la Formation Primaire, Université des Études « Rome-Trois ». L‘Intégration scolaire et sociale, juin 2004, n° 3/3, pp. 226-233.
-
[17]
Pour un approfondissement : Pavone M. Modèles de semestre complémentaire de soutien. Université de Turin. L’Intégration scolaire et sociale, mai 2002, n° 1/2, pp. 148-155.
-
[18]
Gruppo di Pedagogia Speciale – SIPED – Società Italiana di Pedagogia. Les éléments essentiels pour la formation de l’enseignant spécialisé pour le soutien. L’Intégration scolaire et sociale, avril 2005, n° 4/2, pp. 181-182.