Notes
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[1]
Dans notre approche, le sujet est moins instance que mouvement : « Le sujet nous importe moins comme contenant d’une subjectivité que comme pôle d’un entre-deux sujet-objet ; entre l’un et l’autre s’instaure tout un espace de jeu », (Sibony, 2007, p. 244) « D’une certaine façon, on ne pourra commencer à penser la subjectivité - c’est-à-dire essentiellement à décrire la réalité de son « jeu » - que lorsqu’on aura tiré le deuil du « Sujet », c’est-à-dire au moins de sa majuscule » (Benoist, 1995, p. 560).
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[2]
« Nous sommes des êtres spatiaux, non pas seulement, comme le suggère le bon sens, parce que situés dans l’espace, dans un espace qui nous pré-existe, mais parce que nous ne cessons pas d’instaurer nous-mêmes des relations spatiales que nous constituons bien avant que nous nous y situions » (Goetz, 2011, p. 16).
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[3]
« C’est l’esprit qui confère à l’espace sens et fonction. […] La frontière […] n’est que la cristallisation ou la spatialisation des processus psychiques de délimitations, seuls effectifs…La frontière n’est pas un fait spatial avec des conséquences sociologiques, mais un fait sociologique qui prend une forme spatiale » (Simmel, 1908/1999, pp. 599-607).
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[4]
Nous retrouvons au travers de cette notion de plasticité, ce que Pauline Fatien (2009) développe autour de la malléabilité du coaching : « Derrière ces ambiguïtés d’une pratique, il est possible de pointer une certaine malléabilité, mettant ainsi l’accent sur la multiplicité des manières de se saisir du coaching ». Cette plasticité du coaching en tant qu’offre sociale est à nos yeux tout aussi constitutive du coaching en tant que dispositif d’accompagnement.
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[5]
La plasticité a deux faces. Le pli est transformable, mais il est tout aussi nécessaire qu’il « se moule » à la personne, pour qu’il puisse se déployer. En portant attention aux émotions, aux mots, à l’histoire, en délaissant le « tour à tour » de l’échange, en partant de là où en est le sujet et en s’adaptant à ses rythmes, le dispositif coaching crée ainsi un environnement bienveillant qui semble se plier à la personne et non l’inverse. Ce pliage (Belin, 2002) « réinitialise », comme en écho, le moment fondateur, décrit par Winnicott, où la mère en s’adaptant aux besoins de l’enfant, fait apparaître un objet réel (le sein), au moment même où le bébé l’hallucine. Ce lien entre ce que l’enfant a créé, et ce qu’en fait il n’a que trouvé, instaure quelque chose de tout à fait fondamental : il est possible d’attendre quelque chose du monde, donc de désirer, de croire en du possible. Cette « levée » du principe de réalité, l’allégement de son âpreté, est bien évidemment partielle et provisoire mais elle crée les conditions pour que s’initie un rapport à la réalité qui ne signifie pas nécessairement le sacrifice de sa réalité intérieure. Ce que Winnicot appelle justement un rapport créatif au monde.
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[6]
Dans un journal de coaching, tenu au jour le jour, le coaché-analysant décrit des situations professionnelles significatives dans lesquelles il est directement impliqué et qui le mettent en jeu, lui et son environnement professionnel. Elles font l’objet d’un travail d’élaboration durant les séances (D. Jaillon, 2011).
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[7]
Sur un schéma socio-biographique, le coaché-analysant localise les événements significatifs de sa vie personnelle, professionnelle et éducative, les figures d’autorité, les moments de changement, de crise, de conflit, de rupture et de décision. Ces éléments constitutifs de soi sont, en séance, mis en connexion avec les situations professionnelles. Le coaché circule alors progressivement entre son histoire passée et présente afin de développer une vision à la fois diachronique et synchronique de son comportement « en situation » (Ibidem).
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[8]
La « maison » n’est pas le strict lieu du dedans. « Le dehors de ma maison, c’est encore ma maison. » (Goetz, 2011 p. 182).
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[9]
Ces réflexions sont issues de travaux réalisés avec le cabinet Wei, dirigé par Alain Mergier.
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[10]
Si leur prise en compte par les entreprises est un signe encourageant, il semble se traduire par une difficulté à prendre véritablement en considération cette zone d’empiètement entre le personnel et le professionnel : soit l’entreprise met la question au dehors, et c’est le « stress », soit elle la met au-dedans, et c’est le « problème psychologique ». Il semble également difficile de sortir d’une pure optique préventive qui ne reconnait que le sujet souffrant, sans voir et reconnaître le sujet agissant (Clot, 2010).
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[11]
En ancien français talent a signifié « désir, volonté », entrant dans plusieurs locutions : avoir en talent, « désirer » ; faire son talent de, « agir à son gré » ; dire son talent, « donner son avis ». (Dictionnaire historique de la langue française, 2012).
1Voilà un bien bel espace que le nom porté par cette revue offre pour penser et re-penser encore la question du coaching professionnel. Profitons donc de cette ouverture pour remettre encore au travail cette pratique si jeune et pourtant déjà si peu disposée à se remettre en cause et interroger ce qui la fonde. Et faisons le pari que la confrontation, le frottement à cette question, celle du sujet justement – qui n’est pas n’importe quelle question puisque c’est celle qui fait point critique du coaching – nous permettra d’avancer dans le projet qui nous anime.
Quel est-il, ce projet ?
2Il passe tout d’abord par la volonté de développer une approche du coaching professionnel qui renouvelle les notions avec lesquelles il se pense. Pour ce faire, il faut revenir à ce qui s’y passe : que se passe-t-il au cours d’un coaching professionnel ? Qu’est-ce qui fait que cela bouge, qu’est-ce qui sous-tend le processus-coaching en tant que tel et en fait un processus vivant ? Mon hypothèse de travail pourrait se formuler de la manière suivante : ce qui s’y passe est une affaire d’espace.
3Ce projet vise à poser les briques d’une assise théorique du coaching qui, dans la perspective de l’accompagnement professionnel personnalisé, donne toute sa place au sujet. Cet accompagnement est un processus, oui, mais de quoi est-il le processus ? Mon hypothèse : c’est un processus de subjectivation. Non au sens où du sujet résulterait du processus coaching comme son produit final, mais que de bout en bout le processus est « subjectivant », qu’il active la fonction sujet [1]. Le coaché y tient donc une place déterminante, constitutive du processus lui-même. En conséquence, nous la nommerons ici, le « sujet du coaching ».
4Si cette approche peut sembler éloignée, voire à l’opposé des conceptions qui sous-tendent les pratiques actuelles des entreprises et des organisations, nous poserons, en guise de conclusion, une troisième et dernière hypothèse : cet éloignement est, dans une perspective dynamique, proche des transformations à l’œuvre dans le champ entrepreneurial et des enjeux qui en découlent pour les organisations.
Une affaire d’espace
5Mon expérience formative et professionnelle m’a très vite amené à donner à la question spatiale une dimension stratégique. Elle est une voie d’accès qui permet de consolider les bases conceptuelles du coaching : lui donner un sol.
6Les discours multiples sur les méthodes, (voire les catalogues de méthodes), comme les débats sur les finalités (oscillant du développement personnel au dépassement de la performance) demeurent prisonniers du schéma moyens-fins et ne parviennent pas alors à cerner cette assise. Ma tentative d’approche sera donc tout autre. Au schéma moyens-fins, j’opposerai un autre couple : espace-processus. Processus, car la nature première du coaching est d’être un processus en tant que tel, un processus à l’œuvre – le suffixe ing anglais signalant bien l’action, le mouvement en cours. Espace, car l’espace est le soubassement, le premier étage du processus coaching. L’espace amorce le processus, il est déjà processus.
7Pour cela, il est nécessaire de sortir d’une vision contenante de l’espace. L’espace n’est pas ce dans quoi quelque chose se passe mais est déjà quelque chose qui se passe. L’espace n’est pas qu’un contenant : un espace espace, c’est un verbe d’action (Goetz, 2011) [2]. L’espace consiste à relier et à séparer, c’est ce à travers quoi des processus sociaux-psychiques prennent formes (Simmel, 1908) [3]. L’espace est déjà processus : une manière de disposer les choses spatialement, qui dispose à…, un peu comme la pente oriente le mouvement de la bille.
8Selon moi, contribuer à renouveler les bases du coaching, identifier les processus à l’œuvre et penser la nature et les dynamiques du dispositif spatial qu’il pose sont une seule et même question. C’est cet espace-processus que je vous propose de parcourir en traçant les premières lignes d’une perspective qui, comme une sorte de programme de recherche, me semble porteuse d’un regard renouvelé sur le coaching professionnel.
9Pour cela, mettons en évidence la nature de cet espace, examinons quelques-unes de ses dynamiques et identifions les processus socio-psychiques dont ces dynamiques sont porteuses.
Le coaching se situe à la frontière
10Ni de plein pied dans la réalité professionnelle, ni sur le divan, lieu d’exploration de l’intériorité, le coaching se situe entre les deux, à la frontière.
11Arrêtons-nous un instant, sur cette situation, à la lisière, à mes yeux constitutive du coaching professionnel. Il n’est ni plongée dans la réalité subjective explorée par le dispositif « psy », ni le territoire de la réalité objective et professionnelle qu’investit le conseiller de son expertise. Ce « ni-ni » (ni psy, ni conseil) que l’on retrouve dans la plupart des manuels définissant le coaching, n’est pas rien. Cet entre-deux n’est pas sans être, sans consistance. C’est même, selon moi, son sol fondateur (au sens architectural), là où peut trouver son assise.
12C’est du côté de psychanalystes atypiques, notamment D.W. Winnicott (1975) mais aussi D. Sibony (1991) que nous trouvons des notions qui permettent de penser et de donner à cette situation, toute sa portée théorique.
13En effet, si D.W. Winnicott s’est rendu célèbre par ses études sur les phénomènes transitionnels – le fameux objet transitionnel, la création d’un espace transitionnel entre la mère et l’enfant,…– son apport majeur et le plus original sur le plan théorique est le concept d’aire intermédiaire. Celle-ci ne désigne ni le monde des phénomènes objectivement perçus (le dehors) ni celui des phénomènes de la vie intérieure (le dedans). D.W. Winnicott fait l’hypothèse d’un troisième ordre de réalité qui s’oppose à la réalité psychique interne, comme il s’oppose à la réalité extérieure.
14Si ce « ni-ni » signale bien la difficulté à circonscrire cet espace, il désigne tout autant l’embarras que nous éprouvons à sortir d’une pensée structurée par la coupure intérieur/extérieur, sujet/objet… que ces auteurs nous proposent de dépasser. En posant un autre espace, intermédiaire, ils nous invitent à considérer que l’entre-deux (Sibony, 1991) n’est pas réductible à une limite. La troisième aire est un espace-frontière. Entre le dedans et le dehors, la réalité intérieure et la réalité extérieure, il n’y a pas un simple trait qui sépare et distingue. Cet entre-deux est un être à part entière. La frontière est, elle-même, un territoire. Entre ces deux bords, des flux circulent, des liens forment une texture à parcourir, un territoire à explorer. Ce territoire est celui du coaching. C’est là qu’il se tient.
En ce point se forme un pli
15Reprenons le processus. Le coaching se situe à la frontière, et en ce point, se forme un pli. Quelles en sont les propriétés spatiales ? En quoi sont-elles porteuses de dynamiques de subjectivation ?
16Premièrement, le dispositif coaching est un pli dans le cours de la vie professionnelle. À l’instar d’une zone de reflux aux marges d’un rapide, le pli ne rompt pas avec le cours principal, il reste en continuité. Les échéances d’une dizaine de séances, la fin proche et programmée (à la différence d’une psychanalyse), le contenu des séances maintiennent le contact avec la vie et l’univers professionnels.
17S’il ne rompt pas avec le cours de la vie professionnelle, il en suspend la prise, celle d’être pris par le cours des choses. Il suspend, comme le peintre suspend son geste pour mieux l’habiter. En se déprenant – en l’occurrence en décidant de s’engager dans une démarche d’accompagnement – le sujet du coaching fait peut-être son principal, en tout cas l’inaugural premier acte de subjectivation. Celui-ci se manifestant dans cette pulsation première, ce mouvement premier, ce passage entre se prendre et se déprendre.
18Deuxièmement, en suspendant, un creux se crée. Au sein de la concavité du pli, un espace de pensée s’ouvre, un espace mental de subjectivation de sa vie professionnelle trouve son lieu. Comme un pli du système cérébral, un dedans de la pensée se matérialise en rendez-vous, en lieu. Une personne accompagnée me disait ainsi, que plus d’un an après nos rencontres, elle poursuivait de temps à autre, dans sa tête, nos entretiens.
19Ce pli fait donc doublure. « Penser, c’est plier, c’est doubler le dehors d’un dedans qui lui est coextensif. » (Deleuze, 1986) Il vient tout autant faire doublure du dehors (de la vie professionnelle) que doublure de sa propre pensée, telle que le mouvement réflexif amène à replier la pensée sur elle-même. La constitution de cette doublure traduit tout à la fois la conscience d’une limitation inhérente à l’inachèvement de tout sujet et une poussée (un désir) de franchissement de frontières, de clôtures. En doublant le dehors comme soi-même (le dedans), elle crée du « jeu », au sens d’un espacement comme lorsque l’on dit qu’il y a du « jeu » dans la jointure d’une porte. C’est au travers de ce jeu que le sujet accompagné tentera de se frayer un passage.
20Troisièmement, ce jeu initial, il s’agira de le maintenir pour que du « je » puisse se mettre en mouvement, cheminer. La plasticité [4] est ainsi une propriété fondamentale du pli. Maintenir le jeu ouvert, c’est ne pas s’enfermer dans la méthode selon une stricte logique moyens-fins, mais créer les conditions – en fait poser un dispositif, plus qu’une méthode – qui permettent :
- que l’objectif évolue, se reformule, bifurque ; comme celui qui demande à être accompagné pour quitter son entreprise, partir ailleurs et dont l’accompagnement, in fine va conduire à s’y réinscrire, à s’y réinvestir ;
- que la demande prenne forme ; elle n’est ni posée là immuable, comme point de départ, cadrant l’accompagnement à venir, elle n’est pas non plus, comme nous l’entendons souvent, cachée, tapie ; elle va prendre forme, se découvrir, se reconnaître,…
- que le sujet accompagné puisse aborder des impensés qui le surprennent.
21Ce point est fondamental. Car cet espace mental qui s’ouvre va prendre forme sans que l’on sache la forme qu’il va prendre. Et le risque de tout coaching est justement de pré-formater, de faire que cet espace naissant soit rabattu sur de l’espace connu – votre demande, votre problème c’est ça : alors au travail ! On y retourne, pas d’écart – ou bien encore totalement occupé par la méthode, les outils… S’annihile dès lors toute chance que quelque chose de nouveau apparaisse, alors même que là réside l’enjeu du sujet du coaching. C’est la raison pour laquelle il accomplit le geste de se déprendre. Se déprendre de son activité professionnelle, de sa vie professionnelle telle qu’elle va, comme de se déprendre de soi-même. Pour reprendre sans doute, mais autrement. Et cet autrement, le sujet du coaching a justement à le créer [5].
Au sein du pli, se forme une aire intermédiaire
Au sein du pli, la frontière se déplie
22Le pli esquisse un mouvement d’invagination. Comme dans le conduit d’une oreille, un dedans se forme, mais sa surface est tournée vers l’extérieur. Le dehors est dedans, et réciproquement. Le trait qui les sépare se mue alors en espace-frontière à la fois intérieur et extérieur, rencontre de l’intériorité et de l’extériorité (Merleau-Ponty, 1964). Le coaching consiste ainsi, à même le pli, à procéder à un dé-pli de sa situation professionnelle, permettant d’y saisir et d’y déployer les entrelacs, parfois problématiques entre le dedans de la réalité intérieure et le dehors de la réalité extérieure.
23Car, le problème n’est pas qu’en soi, pas qu’en dehors de soi. Il est à la rencontre de ce qui vient de soi – son histoire, ses désirs, ses manières d’être, de penser, d’agir – et de ce qui vient du dehors – l’environnement, ses enjeux, ce qui s’y joue, s’y passe, s’y transforme – : c’est entre les deux que cela se noue et bloque. Ce point, il faut l’ouvrir, le déplier, y circuler sans arrêt du dedans au dehors. Et découvrir que l’on n’est pas tout à fait tel que l’on croyait être, que son environnement n’est pas tout à fait tel qu’on l’a construit dans sa tête. C’est entre ces deux pas tout à fait que, là où cela coince, se dessine un passage.
24C’est toute la pertinence du dispositif conçu par Dominique Jaillon (2005 ; 2011), de coupler deux outils qui permettent le déploiement de cette frontière. En couplant à l’exploration de la situation professionnelle [6] le schéma socio-biographique [7], le dispositif introduit du « jeu » au sens d’espacement. Agissant comme des leviers, l’un plus orienté vers le dehors et l’autre plus orienté vers le dedans, ils ouvrent la situation. Au sein du pli, accompagnant et accompagné vont alors pouvoir suspendre la séparation stricte entre l’intérieur et l’extérieur, déplier cette frontière mentale entre le dedans et le dehors, comme un accordéon se déplie, et investir ce territoire.
Instauration d’une aire de playing-créatif
25Au sein de cet espace, des flux circulent : des éléments de la réalité extérieure rencontrent des éléments de la réalité intérieure et vice versa. Cette mise en circulation entre les deux ordres de réalité constitue le préalable à une attitude créative, entendue comme capacité à utiliser le monde extérieur en rapport avec notre vie intérieure et de manière réciproque d’élaborer notre vie intérieure en relations fertiles avec les objets externes.
26La créativité est inhérente à la rencontre d’une intériorité et d’une extériorité. La mélodie que nous improvisons se chante en nous (Merleau-Ponty, 1964) dans notre gorge, elle naît de la mise en résonance entre le dehors et le dedans. Cet espace de rencontre devient alors un terrain de jeu, qui donne lieu à de multiples opérations. Jouer, c’est faire, c’est manipuler les signes, les altérer, les articuler et produire des synthèses nouvelles qui donnent aux mots, aux récits, aux expériences un sens nouveau qui change par conséquent « les choses ».
27Altérer un mot, ou bien altérer le récit que l’on a forgé, c’est faire en sorte que ce mot ou ce récit ne soit pas que, ne se réduise pas à ce qu’il signifie à ses propres yeux. C’est l’ouvrir à d’autres sens, dévoiler d’autres aspects qui ouvrent des pistes d’action, de nouvelles hypothèses d’interprétation. C’est ainsi que le terme de « compétences génériques » qui, pour Marie, était le marqueur d’une absence d’identité professionnelle va peu à peu prendre une autre tournure. En « circulant » dans ses expériences passées et actuelles, il va s’altérer en « compétences transverses ». Cette altération du « générique » au transverse » constituera, pour elle, le point de départ d’une reconstruction de son identité professionnelle.
Combiner et produire de nouvelles configurations, c’est rassembler des signes épars en de nouvelles synthèses
28En réinscrivant la situation actuelle dans une série, potentiellement infinie, d’autres situations, le schéma socio-biographique étend l’aire d’expériences d’une à n situations. Il densifie alors le travail de réflexivité et permet d’identifier des règles. Faire un lien, une similitude entre ce moment-là et tel autre (« j’y ai agi de la même façon »), c’est se mettre en position d’émettre l’hypothèse que « je » suis (au sens de suivre), inconsciemment, une règle qui détermine ma conduite. Pour en prendre conscience, il faut identifier une régularité et, pour identifier une régularité, il faut plusieurs occurrences.
29De la même manière, ce parcours au travers d’une multiplicité de situations permet d’envisager de nouvelles règles. Éric, cadre d’une entreprise privée du secteur financier construisait sa vie professionnelle au travers d’un modèle « guerrier ». Le travail de mise en rapport de situations passées et actuelles fera émerger un modèle alternatif, le modèle du « commerce ». L’identification et l’émergence de ce modèle alternatif lui permettront progressivement d’envisager le transfert de ses savoir-faire – analyse des situations, saisie d’opportunité, décryptage des signes, fortement développés dans les relations conflictuelles avec sa famille comme avec ses hiérarchiques – au service du « commerce » qui se construit dès lors comme un véritable paradigme.
30Ainsi, à l’instar de l’enfant qui, avec ses cubes, construit et déconstruit une maison, se sépare de certains cubes, change l’orientation d’autres, modifie leur assemblage, le sujet du coaching déconstruit et reconstruit cet espace frontière, réaménage sa « maison » [8].
Intensification et activation de la subjectivation
31Non seulement, l’introduction du schéma socio-biographique densifie le travail réflexif, mais, en plaçant le sujet du coaching au croisement des points de vue diachronique et synchronique, croisement constitutif de l’être humain, elle intensifie et active le processus de subjectivation.
32La production créative s’ancre dans une aire d’expérience chargée d’émotions, dans toute la texture de ce qui fait une personne : une histoire, une mémoire. Cet ancrage permet de se ressourcer, de réactiver des désirs anciens, d’en activer de nouveaux, sur lesquels il est possible de prendre élan. Comme il est possible de retrouver un point d’appui fondamental, au détour d’une réminiscence qui surgit des rais du diachronique. C’est ce qui arriva, lors d’une séance, à Anna. Coincée entre une mère qui a toujours dit « moi, je sais faire », et un père qui a toujours dit « tu n’y arriveras pas », surgit, comme dans un jaillissement, la puissance d’un regard bienveillant porté sur elle par une figure grand-parentale : « Quoique tu fasses, je t’aime toi ».
33La production créative s’inscrit dans une perspective historique permettant de repenser l’histoire, non pour se libérer du passé, mais pour libérer le présent et ouvrir l’avenir. « La pensée pense sa propre histoire (passé), mais pour se libérer de ce qu’elle pense (présent), et pouvoir enfin penser autrement (futur) » (Deleuze, 1986/2004, p. 127). C’est ce travail qu’entreprit Marie en séances. Elle prit peu à peu conscience que son identité professionnelle était surdéterminée par le territoire où elle exerçait, comme son identité personnelle était liée aux territoires où elle se posait. Cette pensée de sa propre histoire lui a permis de penser autrement son identité professionnelle, de changer de détermination : de passer du territoire au projet. Et ainsi de ré-ouvrir un devenir professionnel.
34Enfin, cette production créative, suractivée par le croisement des points de vue diachronique et synchronique, fait du sujet accompagné l’acteur et le siège d’interprétations renouvelées. L’être humain est un être de sens. Activer le jeu de la symbolisation, c’est produire du sens, des mots, des liens, des pistes. C’est produire de la capacité interprétative qui rend plus fort, c’est nourrir le sujet accompagné d’un afflux de sens qui le rend tout simplement plus vivant. Et ce point est crucial, car l’enjeu, c’est le faire – pas seulement au sens de comment faire, car souvent, en fait, ils savent très bien comment faire : l’enjeu, c’est d’y aller, de produire une bifurcation et faire du coaching un point de départ. Et, pour engager ce faire, pour faire le pas juste suffisant, il faut se sentir « suffisamment vivant », « exister assez » (Sibony, 2007).
35Alors, fort de cette énergie réactivée et d’une détermination retrouvée, le sujet peut être en mesure de mettre en œuvre, dans sa réalité professionnelle, tout ce qu’il a élaboré en séances - d’autres manières d’agir, de penser, d’aborder une situation. Un pied dedans, un pied dehors, il s’engage dans la voie qu’il tente de frayer.
Conclusion
36Posons tout d’abord les grands principes du coaching professionnel qui se dessinent au travers de ce parcours dans ce que j’ai appelé l’espace processus.
371. Le sujet accompagné ne s’y réduit ni à une personne (une histoire, des émotions, des valeurs, des manières d’agir…) ni à un acteur professionnel (des compétences, un métier, un parcours…). Il y est considéré centralement comme un sujet. C’est-à-dire un être qui aspire à faire siens ses actes professionnels et est à même de produire les écarts qui lui permettent de reconfigurer son rapport au travail, d’introduire des inflexions, voire des ruptures dans sa vie professionnelle.
382. Le coaching y est considéré comme un cheminement singulier et ouvert. Un cheminement ne se cadre pas dans une méthode, ne s’enferme ni dans des objectifs, ni dans un plan d’actions préétabli. Il repose sur un dispositif (versus une méthode) mis à disposition du sujet, qui crée les conditions favorables pour que se déploie la dynamique de subjectivation.
393. Ce processus de subjectivation procède centralement par exploration-activation de l’aire de playing-créatif. Là où l’entrelacement entre le dehors et le dedans fait nœud, l’aire de playing-créatif introduit un espace de symbolisation créative. Elle crée une sorte de respiration entre les fils du dedans et ceux du dehors qui permet tout à la fois de séparer et de relier ce qui était intriqué.
404. Au travers de cette exploration, le sujet accompagné est le siège d’une densification des flux de sens, qu’ils viennent du dehors des événements qui surviennent dans sa situation ou du dedans de sa mémoire. Cette densification de flux hétérogènes favorise le renforcement de son assise et de son élan, le développement d’un art de réinterpréter pour élaborer des solutions nouvelles, l’aiguisement de sa détermination personnelle : il sait mieux ce pour quoi il est là, ce qu’il désire.
415. C’est au travers du travail de production de sens au sein de l’aire de playing-créatif que là où il n’y avait qu’impasse, se dessine un passage. La visée de cet accompagnement consiste à se frayer une voie singulière face à une épreuve professionnelle, quelle qu’elle soit. Pas la voie standard, mais la sienne et à travers laquelle le sujet franchit une nouvelle étape de son histoire : il modifie son jeu, voire change de jeu (au sens du jeu répétitif) dans lequel il est souvent pris.
426. Dans cette optique, l’accompagnement professionnel ne consiste pas en une stricte adaptation du sujet, adaptation qui consisterait à se plier à son environnement. C’est une adoptation. Au sens où cette « adaptation » est adoptable – elle s’ancre dans ce qu’il est, ce qu’il peut et ce qu’il désire – et s’inscrit dans une trajectoire pour laquelle il opte.
Perspectives
43Une fois ceci posé et en guise de perspectives, confrontons-nous à ce que nous énoncions en introduction : si ces principes peuvent sembler éloignés des préoccupations et pratiques actuelles des entreprises, je fais l’hypothèse que d’un point de vue dynamique ils entretiennent une convergence avec ce qui sous-tend les dynamiques de transformations à l’œuvre dans le champ entrepreneurial.
44Ces transformations sont l’œuvre d’un double mouvement qui traverse les entreprises par les deux bouts [9].
45Le premier vient du dehors. C’est ce qu’on appelle classiquement la mutation de la mondialisation, dont la spécificité est d’être dominée par des flux de toutes sortes (services, financiers, population, produits, opinions…) et de donner au monde une dimension réticulaire (Gros, 2012) : tout se tient, tout interagit. Quelles en sont les conséquences ? On évoque généralement la montée des incertitudes. Mais je pense que cette formulation ne traduit pas l’ampleur du changement en cours. Il ne s’agit pas d’une montée des incertitudes. L’incertitude devient l’horizon, la confrontation à l’imprévu et l’inédit devient la norme.
46Ce franchissement de seuil n’est pas sans conséquences sur le management des entreprises. Il ne peut penser ses procédures de décision, ses organisations, sa légitimité que dans la perspective de l’innovation, comprise comme l’ajustement permanent de tout niveau d’action de l’entreprise (de la décision managériale à la relation de service) à toute situation singulière de l’environnement de l’entreprise.
47Le monde de l’inspiration (Boltansky, Thévenot 1991) n’est donc plus strictement réservé aux professionnels de l’innovation ou de la communication. Les capacités d’initiative, d’analyse des situations, d’élaboration de solutions face à l’imprévu, de coopération et d’ajustement aux singularités locales mises en œuvre par tous les collaborateurs sont tout aussi stratégiques. C’est l’ensemble de ces ajustements pragmatiques qui par effet d’accumulation produisent des mutations innovantes.
48Le deuxième mouvement vient du dedans. C’est du côté des salariés que l’on trouve une autre mutation, celle de leur rapport au travail : plus intime (parfois trop), ce rapport au travail se singularise (Martuccelli, 2010). Le travail est devenu peu à peu le lieu stratégique de la subjectivation. C’est au travers du travail que l’on se construit en tant que personne singulière, en prenant part et contribuant à quelque chose qui nous dépasse. Épreuve sociale majeure du projet de réalisation de soi, il est ce à travers quoi, l’individu grandit, s’éprouve, se découvre, fait la preuve de ses facultés, déploie ou réoriente sa trajectoire.
49Le salarié, en tant que personne, a ainsi besoin de se reconnaître dans ce qu’il fait, de manifester sa singularité. C’est par sa manière de « façonner à sa façon » ce qu’il fait, d’y apporter sa pâte, sa valeur ajoutée qu’il s’y retrouve. Et c’est au travers de la reconnaissance de ce rapport actif à l’organisation qu’il construit la confiance en soi et l’estime de soi sans lesquelles, selon Axel Honneth (2000), « il ne peut y avoir de projet de réalisation de soi ». Le surgissement des risques psycho-sociaux n’est que l’envers de ce mouvement. C’est justement parce que le travail devient ce lieu de haute intensité subjective qu’il peut être un lieu de souffrance. Et c’est justement parce qu’il y a disjonction entre les modèles d’organisation traditionnels et la mutation du rapport au travail que la souffrance croît [10]
50C’est à la croisée de cette double mutation, celle de l’innovation et celle du rapport au travail, qu’il me semble que l’approche développée en ces pages et dans cette revue consacrée à l’app peut trouver une pertinence. Lenhardt (1992) introduisant en France le coaching faisait du champion (expression récurrente à travers laquelle il s’adressait à son lecteur) l’emblème de l’acteur professionnel. S’il y avait à choisir une figure emblématique, il me semble que cette double mutation en désignerait une autre : celle du travailleur artistique (Menger, 2002), en ce que le travail artistique exacerbe ce dont ces mutations sont porteuses : singularité, créativité, improvisation, désir, détermination, forte imprévisibilité, coopération au sein de collectifs assemblant de multiples compétences, exploration sans buts, capacité à conjoindre conflit et alliance, etc.
51Plus simplement, il me semble :
- que la singularité est stratégique pour la personne, comme pour l’organisation ; l’enjeu, pour celle-ci, est d’entretenir, via ces énergies singulières, sa vitalité ;
- que les capacités d’ajustement des entreprises et donc leur pérennité, dépendent des capacités de chacun à inventer des solutions, de nouvelles manières de faire et à les mettre en œuvre ;
- que l’entreprise a tout à gagner à rendre possible une respiration qui permette de repenser son investissement, sa trajectoire, son rapport au travail ;
- qu’il n’y a pas de talent sans un désir qui le porte, qui propulse ; d’ailleurs, en ancien français, talent désignait désir, volonté [11] ;
- qu’un sujet déterminé qui sait ce pour quoi il est là est tout simplement plus solide et plus à même de ne pas se laisser envahir par les conflits de territoires (personnels) qui gangrènent les entreprises ; il se contente des conflits nécessaires ;
- que l’élan, l’élaboration des solutions créatives, portées par une détermination aiguisée, sont constitutives de la performance ; pas celle que l’on mesure, pas celle d’un standard mais celle qui consiste à faire acte, à oser entreprendre, c’est-à-dire, dans son sens premier, commencer et mettre en œuvre.
Bibliographie
Références bibliographiques
- Belin, E. (2002). Une sociologie des espaces potentiels. Logique dispositive et expérience ordinaire. Bruxelles : De Boeck Université.
- Benoist, J. (2001). La subjectivité. In Quelle philosophie pour le XXIe siècle ? Paris : Gallimard.
- Clot, Y. (2010). Le travail à cœur. Pour en finir avec les risques psychosociaux. Paris : La Découverte.
- Deleuze, G. (2004 [1968]). Michel Foucault. Paris : Minuit.
- Fatien, P. (2009). Intérêt organisationnel du coaching individuel. Vie & sciences de l’entreprise, 182, pp. 39-56.
- Goetz, B. (2011). Théorie des maisons. L’habitation, la surprise. Lagrasse : Verdier.
- Gros, F. (2012). Le Principe Sécurité. Paris : Gallimard.
- Honneth, A. (2000). La lutte pour la reconnaissance. Paris : Cerf.
- Jaillon, D. (2011) Qu’est-ce qu’un praticien réflexif et congruent ? Document de formation. Groupe CAPP-Coaching.
- Jaillon, D. (2005). Éléments pour un coaching socianalytique. In « De l’ère des pionniers à l’ère des professionnels. Le coaching phénomène de société ». Actes du premier Colloque national de la Société française de Coaching.
- Lenhardt, V. (2010). Les responsables porteurs de sens. Paris : Insep Consulting Éditions.
- Martuccelli, D. (2010). La société singulariste. Paris : Armand Colin.
- Merleau-Ponty, M. (1964). Le visible et l’invisible. Paris : Gallimard.
- Menger, P.-M. (2002). Portrait de l’artiste en travailleur. Métamorphoses du capitalisme. Paris : La République des Idées/Seuil.
- Rey, A. (dir.) (2012). Dictionnaire historique de la langue française. Paris : Le Robert.
- Sibony, D. (2007). L’enjeu d’exister. Analyse des thérapies. Paris : Seuil.
- Sibony, D. (1991). Entre-deux. L’origine en partage. Paris : Seuil.
- Simmel, G. (1999). Sociologie. Études sur les formes de la socialisation. Paris : Presses Universitaires de France.
- Winnicott, D. W. (1975). Jeu et réalité. Paris : Gallimard.
Notes
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[1]
Dans notre approche, le sujet est moins instance que mouvement : « Le sujet nous importe moins comme contenant d’une subjectivité que comme pôle d’un entre-deux sujet-objet ; entre l’un et l’autre s’instaure tout un espace de jeu », (Sibony, 2007, p. 244) « D’une certaine façon, on ne pourra commencer à penser la subjectivité - c’est-à-dire essentiellement à décrire la réalité de son « jeu » - que lorsqu’on aura tiré le deuil du « Sujet », c’est-à-dire au moins de sa majuscule » (Benoist, 1995, p. 560).
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[2]
« Nous sommes des êtres spatiaux, non pas seulement, comme le suggère le bon sens, parce que situés dans l’espace, dans un espace qui nous pré-existe, mais parce que nous ne cessons pas d’instaurer nous-mêmes des relations spatiales que nous constituons bien avant que nous nous y situions » (Goetz, 2011, p. 16).
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[3]
« C’est l’esprit qui confère à l’espace sens et fonction. […] La frontière […] n’est que la cristallisation ou la spatialisation des processus psychiques de délimitations, seuls effectifs…La frontière n’est pas un fait spatial avec des conséquences sociologiques, mais un fait sociologique qui prend une forme spatiale » (Simmel, 1908/1999, pp. 599-607).
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[4]
Nous retrouvons au travers de cette notion de plasticité, ce que Pauline Fatien (2009) développe autour de la malléabilité du coaching : « Derrière ces ambiguïtés d’une pratique, il est possible de pointer une certaine malléabilité, mettant ainsi l’accent sur la multiplicité des manières de se saisir du coaching ». Cette plasticité du coaching en tant qu’offre sociale est à nos yeux tout aussi constitutive du coaching en tant que dispositif d’accompagnement.
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[5]
La plasticité a deux faces. Le pli est transformable, mais il est tout aussi nécessaire qu’il « se moule » à la personne, pour qu’il puisse se déployer. En portant attention aux émotions, aux mots, à l’histoire, en délaissant le « tour à tour » de l’échange, en partant de là où en est le sujet et en s’adaptant à ses rythmes, le dispositif coaching crée ainsi un environnement bienveillant qui semble se plier à la personne et non l’inverse. Ce pliage (Belin, 2002) « réinitialise », comme en écho, le moment fondateur, décrit par Winnicott, où la mère en s’adaptant aux besoins de l’enfant, fait apparaître un objet réel (le sein), au moment même où le bébé l’hallucine. Ce lien entre ce que l’enfant a créé, et ce qu’en fait il n’a que trouvé, instaure quelque chose de tout à fait fondamental : il est possible d’attendre quelque chose du monde, donc de désirer, de croire en du possible. Cette « levée » du principe de réalité, l’allégement de son âpreté, est bien évidemment partielle et provisoire mais elle crée les conditions pour que s’initie un rapport à la réalité qui ne signifie pas nécessairement le sacrifice de sa réalité intérieure. Ce que Winnicot appelle justement un rapport créatif au monde.
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[6]
Dans un journal de coaching, tenu au jour le jour, le coaché-analysant décrit des situations professionnelles significatives dans lesquelles il est directement impliqué et qui le mettent en jeu, lui et son environnement professionnel. Elles font l’objet d’un travail d’élaboration durant les séances (D. Jaillon, 2011).
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[7]
Sur un schéma socio-biographique, le coaché-analysant localise les événements significatifs de sa vie personnelle, professionnelle et éducative, les figures d’autorité, les moments de changement, de crise, de conflit, de rupture et de décision. Ces éléments constitutifs de soi sont, en séance, mis en connexion avec les situations professionnelles. Le coaché circule alors progressivement entre son histoire passée et présente afin de développer une vision à la fois diachronique et synchronique de son comportement « en situation » (Ibidem).
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[8]
La « maison » n’est pas le strict lieu du dedans. « Le dehors de ma maison, c’est encore ma maison. » (Goetz, 2011 p. 182).
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[9]
Ces réflexions sont issues de travaux réalisés avec le cabinet Wei, dirigé par Alain Mergier.
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[10]
Si leur prise en compte par les entreprises est un signe encourageant, il semble se traduire par une difficulté à prendre véritablement en considération cette zone d’empiètement entre le personnel et le professionnel : soit l’entreprise met la question au dehors, et c’est le « stress », soit elle la met au-dedans, et c’est le « problème psychologique ». Il semble également difficile de sortir d’une pure optique préventive qui ne reconnait que le sujet souffrant, sans voir et reconnaître le sujet agissant (Clot, 2010).
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[11]
En ancien français talent a signifié « désir, volonté », entrant dans plusieurs locutions : avoir en talent, « désirer » ; faire son talent de, « agir à son gré » ; dire son talent, « donner son avis ». (Dictionnaire historique de la langue française, 2012).