Notes
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[1]
J’emploie « ingénierie climatique » (IC) dans la présente étude en lieu et place de « géo-ingénierie ». Comme je le rappellerai par la suite, j’estime que c’est une formulation plus précise pour parler de projets d’ingénierie qui agissent au niveau du climat.
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[2]
Cette idée de transcendance ontologique s’apparente à une forme d’hubris, s’agissant en particulier d’une surévaluation des habilités humaines et d’un esprit arrogant (Meyer et Uhle, 2015). Mais la différence est que le premier est de plutôt d’ordre anthropologique, tandis que plusieurs conceptions de l’hubris relèvent plutôt de l’éthique (Meyer et Uhle, 2015). La transcendance ontologique rend compte d’un potentiel basculement vers une conscience résolument transcendantale de l’humain et ayant des implications sur la relation qu’entretiennent l’humain et la nature. Ainsi, un lien plus explicite est établi avec le paradoxe de l’IC. J’espère éviter, en outre, certains amalgames possibles avec l’hubris dont certaines connotations – l’idée de techno-optimisme par exemple – sont encore fortement ancrées (Niemann, 2016).
Par ailleurs, Clive Hamilton (2013a) parle d’« arrogance ontologique ». A nouveau, j’estime que l’emploi du mot « transcendance » et sa dimension anthropologique siéent mieux à mes propos. -
[3]
Cette double pulsion est assez prégnante chez les partisans de l’IC (voir par exemple Brand ; 2010 ; Lynas 2011 ; Morton, 2015). Grevsmühl (2014) propose une analyse similaire très intéressante à partir de la conquête spatiale.
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[4]
Dans le mémoire de recherche sur lequel se base cet article, je montre, tout comme Boucher et al. (2014) notamment, que le mot « géo-ingénierie » est à la fois ambigu et imprécis, faisant parfois référence au contrôle et la manipulation du climat/de la météorologie voire de l’environnement, et parfois à des techniques bien précises.
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[5]
Toujours dans ce mémoire, je souligne également, grâce à la littérature, l’absence de la dimension historique de la géo-ingénierie.
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[6]
Boucher et al. (2014), par exemple, proposent cinq critères : l’échelle d’action, l’échelle des impacts, l’impact sur les communs globaux, les effets transfrontaliers ou transnationaux indésirables, et la permanence de l’effet.
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[7]
Par « processus naturel », je fais référence aux processus très variés qui se déroulent dans la nature à l’instar des cycles biogéochimiques, l’effet de serre, etc.
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[8]
D’aucuns pourraient contester que les deuxième et troisième critères sont d’ordre anthropologique. Sans m’opposer complètement à cette critique, j’estime que ces critères relèvent néanmoins de l’anthropologie, car ils interrogent directement la place de l’humain dans la nature et la relation entre les deux.
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[9]
Dans le mémoire de recherche, je me prête à l’exercice de classification et je distingue six catégories de lutte contre le CC (le lecteur peut s’y référer, le cas échéant). Je précise néanmoins les techniques issues de ma classification qui intègrent la catégorie « ingénierie climatique » : les techniques déployées dans l’espace ; l’injection d’aérosols dans la stratosphère ; la modification de l’albédo des nuages ; la modification de l’albédo terrestre à grande échelle ; les opérations d’échanges de chaleurs dans les océans ; la modification des glaces dans l’Arctique ; l’alcalinité des océans ; l’altération augmentée par l’introduction de produits secondaires dans les rivières et océans ; la fertilisation des océans avec du fer ; l’injection de CO2 dans les océans ; et la capture aérienne directe.
La technique comme solution pour nous sortir de l’urgence climatique
1Les mises en garde et les recommandations des experts scientifiques ne sauraient être plus claires : il est impératif d’agir d’urgence pour éviter un changement climatique (CC) dangereux et pour préserver les conditions sur Terre optimales au développement de l’humanité qui ont prévalues durant l’ère géologique de l’Holocène (Hansen et al., 2008 ; Rockström et al., 2009). Partant, il semble nécessaire et urgent d’adapter le mode de fonctionnement sociétal et les modes de vies en conséquence. Force est de constater, cependant, que les mesures prises jusqu’ici n’ont pas eu d’effets notoires.
2Face à ce constat, une issue alternative se dessine dont la légitimité semble croître : le recours à la technologie ou, plus précisément, à la « géo-ingénierie » ou l’« ingénierie climatique » (IC) [1]. Il s’agit, sommairemment, de techniques qui ont pour objectif de limiter le réchauffement climatique de la biosphère en manipulant et en contrôlant le climat à l’échelle globale. Ces techniques sont généralement regroupées en deux ensembles (Shepherd et al., 2009) : soit les techniques qui visent à réduire et/ou extraire le dioxyde de carbone (CO2) atmosphérique (en anglais « Carbon Dioxyde Removal » ou CDR), soit celles cherchant à réguler le bilan radiatif de la Terre par des méthodes de gestion du rayonnement solaire (en anglais « Solar Radiation Management » ou SRM).
3Cette recherche, tout comme d’autres (par exemple Clingerman, 2014 ; Gardiner, 2011 ; Hamilton, 2013a,b), soutient l’idée que l’IC repose sur des caractéristiques anthropologiques particulières qu’il est fondamental d’étudier en sus des considérations purement techniques – en matière de fiabilité, efficacité, risques, etc. Plus spécifiquement, je postule que l’IC peut être analysé à travers un paradoxe qui s’articule de la manière suivante : dans son approche, l’IC semble faire état d’une perception de la finitude – des limites planétaires, des ressources naturelles, de capacité de charge des écosystèmes, c’est-à-dire une finitude globale et totale perçue – mais en la concevant à partir d’un esprit bien particulier, celui que nous nommons un esprit infini (ce paradoxe est développé par la suite).
4La présente recherche étudie les fondements anthropologiques de l’IC, afin de proposer une perspective originale de l’enracinement, dans nos mentalités, d’une idée de maîtrise et de contrôle de l’environnement et du climat. Je tente en outre de montrer que les fondements anthropologiques du paradoxe de l’IC sont le fruit de développements anthropologiques qui précèdent l’apparition de l’IC. Cette recherche se penche également sur les implications en matière de typologie qu’engendre ce nouveau regard porté sur l’IC à travers ce paradoxe. En effet, ces réflexions anthropologiques invitent à repenser la manière de définir l’IC et les critères qui sont usuellement employés pour classer les techniques d’IC. Je propose ainsi une nouvelle définition de l’IC qui intègre certaines considérations anthropologiques. Je propose également d’adopter trois critères qualitatifs qui, adjoints à des critères techniques, inviteraient à repenser les classifications actuelles des techniques d’IC. Dans le cadre de cet article, toutefois, je ne m’adonne pas à l’exercice de classification et je m’en tiens à proposer trois critères qui permettraient d’intégrer les réflexions liées au paradoxe.
5Je souhaite d’emblée souligner que le dessein de cette recherche n’est pas de critiquer la technique – incontournable à l’heure du CC –, mais d’encourager les débats sur l’IC et, si possible, d’élargir le spectre des possibles réponses à l’enjeu climatique. En somme, je cherche à apporter des clarifications à la question de recherche suivante : quels sont les fondements anthropologiques de ce paradoxe dans le cas de l’ingénierie du climat ?
Cadre théorique : la tension entre la finitude perçue et la position d’exteriorite
6À la base du paradoxe que je vais dépeindre, je perçois une tension de nature anthropologique. Cette dernière résulte du fait que la finitude est perçue, et cela à travers une position d’extériorité. Dans ce qui suit, je présente ces deux notions.
7Débutons par ce que je propose de nommer la « position d’extériorité ». Elle tire ses racines du dualisme ontologique de la séparation de l’Âme et du Corps (Danowski et Viveiros de Casto, 2014) qui a donné lieu à une scission entre la nature et la culture (Descola, 2005). Cette idée d’extériorité n’est donc pas nouvelle, mais je désire préciser le sens que je lui attribue. Par « position d’exériorité », je souhaite traduire la manière par laquelle le monde semble être contemplé et vécu. Plus précisément, je soutiens que l’humain perçoit un attachement à la Terre. Toutefois, en raison de son extériorité qui établit une distance décisive entre lui et la Terre (Arendt, 2007), il ne ressent pas de lien ontologique et métaphysique avec elle.
8La seconde dimension de cette tension est la « perception de la finitude ». Une première manière de percevoir la finitude est directement liée aux sciences modernes, dont l’essor fulgurant est lié à la situation d’extériorité de l’humain vis-à-vis de la nature. En effet, en mathématisant la nature, les sciences modernes ont permis d’objectiver cette dernière et de la réduire à des lois propres (Descola, 2005 ; Eisenstein, 2007). Plus spécifiquement, cette mathématisation a contribué à dé-complexifier la « réalité observée » et d’expliquer les mouvements naturels observés dans la nature, autrefois expliqués par la nécessité d’une intervention externe, c’est-à-dire divine (Eisenstein, 2007). En conséquence, la « réalité observée » est réduite en une « réalité rationnelle » (Eisenstein, 2007 ; Federau, 2017). C’est cette réalité rationnelle, ce monde abstrait et objectivé, qui permet de percevoir la finitude. En somme, cette première manière de percevoir la finitude, grâce aux développements scientifiques notamment, est à proprement parler visuelle, c’est-à-dire un processus par lequel la finitude est perçue à travers le système visuel. Par la suite, des clichés de la Terre vue de l’espace amèneront une dimension globale dans la perception de la finitude (Grevsmühl, 2014).
9D’autres manières permettent de percevoir la finitude. Celle que je propose d’étudier à présent relève d’une expérience philosophique. Je suggère que la finitude peut être perçue à travers ce que je propose de nommer un « sentir physique ». Par « sentir », j’entends une expérience par laquelle l’humain ressent une forme de participation au monde et aux processus naturels. Par « physique », j’essaie de rendre compte que ce sont des processus dynamiques naturels qui sont ressentis physiquement, comme par exemple le vent, la chaleur du soleil, la pluie, etc. (voir par exemple Brand, 2010 ; Keith, 2013 ; Lovelock, 2014 ; Morton, 2015). Autrement dit, le sentir physique peut être défini comme étant une transmission d’informations sensorielles, issues desdits processus naturels, qui permet à l’humain de percevoir une forme d’appartenance au naturel. Ainsi, par l’expérience de ces processus, l’humain perçoit une forme de participation au monde qui, in fine, le confronte à la finitude.
10Cependant, la participation et la finitude sont perçues, c’est-à-dire qu’il n’y a pas de participation consciente ni d’« expérience d’un Tout cosmique » (Arnsperger, 2016 : 198). Cela illustre justement la tension anthropologique : il y a bel et bien une contemplation du monde mais à travers les yeux ou l’expérience d’un observateur qui est externe. Une injonction semble découler de cette tension : la finitude n’est pas comprise ou conscientisée comme une contrainte nécessaire aux activités anthropiques, mais comme « quelque chose » à dépasser.
L’esprit infini et le paradoxe de l’ingenierie climatique
11Je propose de nommer « esprit infini » cet élan qui traduit un besoin de dépasser la finitude et qui découle de la tension anthropologique décrite plus haut. Plus précisément, par « esprit », j’entends un état psychique particulier dans lequel se développe l’IC. Par « infini », j’entends un état d’être dans lequel il y a une conviction de l’existence d’une ingéniosité humaine supérieure au reste du monde naturel. Simultanément, cela suscite une croyance en des capacités humaines illimitées permettant, en particulier, d’outrepasser la finitude.
12Comme nous le verrons par la suite, le paradoxe de l’IC est l’existence simultanée d’une perception de la finitude et de l’esprit infini. Par conséquent, avant de présenter le paradoxe plus en détail, il me paraît opportun d’explorer de potentielles sources de cet esprit infini. Une première source provient, selon moi, de la vision globalisante de la Terre à partir de l’espace. À partir de cette vision, exacerbant la distance entre l’humain et la nature, la Terre est conçue comme un objet étranger, une exo-planète (Neyrat, 2016), ou un monde sans gens (Hache, 2014). Partant, ce qui est extérieur n’est plus l’espace, cet infini au-delà de la Terre, mais la Terre en elle-même. À travers cette évolution, l’humain est en quelque sorte arraché – cognitivement du moins – de ses attaches biologiques et terrestres (Grevsmühl, 2014). Et la Terre, conçue ainsi comme un objet abstrait, devient une fascination, un objet saisissable et potentiellement manipulable et contrôlable.
13Une seconde source de cet esprit infini est liée à l’édification, avec le développement des sciences modernes, de ce que je propose de nommer un « monde ingénieurial ». En employant cette dénomination, je souhaite transmettre l’idée qu’il y a une propension à lire scientifiquement le monde – grâce à la mathématisation en particulier – et l’avènement d’un schème de pensée scientifique et technique. À travers la mathématisation du monde et le réductionnisme inhérent à ce développement (Eisenstein, 2007 ; Descola, 2005), la Terre et les processus naturels sont dé-complexifiés et réduits à des paramètres (Grevsmühl, 2014). Si ces développements scientifiques ont notamment permis de percevoir la finitude (voir plus haut), ils contribuent également à la rendre invisible. En effet, la finitude est réduite et transformée en un problème – au sens d’un obstacle – qui peut être résolu par la science et un surcroît de technologie. Autrement dit, à travers l’esprit infini, la finitude est éclipsée car elle est conçue comme un obstacle franchissable (Asafu-Adjaye et al., 2015 ; Brand, 2010 ; Lynas, 2011 ; Morton, 2015).
14Finalement, l’émergence d’un esprit infini n’est pas étrangère, selon moi, à un certain recul des réflexions spirituelles ou religieuses qui abordaient la question de la finitude et de l’infinitude. Sans entrer dans les détails, je m’en tiens à l’analyse de Jean-Marie Pelt qui stipule l’existence d’un effritement d’un Dieu incarnant l’infini. Ainsi, on peut suggérer que la disparition progressive de « quelque chose » qui transcendait l’humain laisse libre cours aux aspirations infinies de ce dernier (Pelt, 2008).
15Pour résumer, cet esprit infini traduit une forme de recherche d’infini (Vilmer, 2008) à travers une conviction d’une forme de supériorité humaine. Cela provient de sa croyance en une ingéniosité supérieure au reste du monde naturel et des capacités illimitées qui résultent, notamment, des développements scientifiques modernes. En anticipant un peu les propos qui vont suivre, je suggère que cette situation laisse émerger un « sentiment de transcendance ontologique » qui élève l’humain au-dessus du reste du monde naturel et éclipse la finitude.
16Nous détenons à présent les éléments pour proposer une définition plus minutieuse du paradoxe de l’IC. Mais avant cela, par souci de clarté, j’aimerais préciser deux points dans l’optique de guider le lecteur dans sa lecture. Le paradoxe de l’IC – dont les caractéristiques anthropologiques présentées plus haut précèdent l’IC – constitue un cadre conceptuel permettant une lecture originale de l’IC. En outre, je suggère que l’IC est à la fois le résultat de la tension entre la perception de la finitude et l’esprit infini qui donne lieu au paradoxe, et un mécanisme qui renforce ce paradoxe et le pérennise. Dans ce qui suit, je m’efforce d’expliquer en quoi consiste ce paradoxe de l’IC.
17Par « paradoxe de l’IC », j’entends une situation paradoxale résultant de l’existence conjointe et simultanée d’une perception de la finitude et d’un développement d’un esprit infini qui éclipse la réalité de cette finitude en cherchant à la transcender (je reviens là-dessus par la suite). Formulé autrement, l’humain est soustrait de la nature (Grevsmühl, 2014) provoquant un processus cognitif et psychique de négation des attaches biologiques et terrestres et, par extension, de la finitude. C’est ainsi une distance définitive (Arendt, 2007) qui s’établit entre l’humain et la nature qui rompt l’idée d’un lien ou d’une continuité entre eux. Il s’agit d’une véritable anthropologie de l’infini. Dans de telles circonstances, la finitude, bien que perçue, n’est pas conçue comme une condition de pérennité des activités anthropiques, mais comme un obstacle surmontable par les avancées scientifiques et par un surcroît de technologies.
18Ce paradoxe initie un mouvement perpétuel « vers l’avant » et semble traduire une volonté d’atteindre une transcendance qui distingue l’humain des éléments de la nature (Danowski et Viveiros de Castros, 2014). Je propose de formuler cela comme étant une recherche d’un « sentiment de transcendance ontologique » et qui reprend directement certaines réflexions précédentes. Par là, j’entends un état d’être où, en se libérant de ses attaches biologiques et terrestres, la conscience humaine se convainc de sa supériorité sur le reste du monde naturel et établit définitivement une distance décisive entre l’humain et le monde [2].
19Comme je l’ai déjà mentionné, je suggère que l’IC est une émanation de la tension entre la perception de la finitude et de l’esprit infini qui mène au paradoxe de l’IC. En effet, le développement de l’IC est empreint des caractéristiques anthropologiques que j’ai développées précédemment. En prétendant vouloir et pouvoir contrôler et manipuler le climat, l’IC adopte un regard résolument extérieur sur une Terre dé-complexifiée et objectivée grâce aux développements scientifiques. La finitude, comme je l’ai déjà expliqué, devient un obstacle franchissable par les sciences et les technologies. Cette distance entre la Terre et l’humain rend tout lien entre ces derniers difficilement perceptible. De même, une prise de conscience de la finitude semble également difficile à atteindre. C’est dans cette optique, me semble-t-il, que se développe l’IC. Cette forme d’ingénierie cherche à élever l’humain au-dessus du monde naturel et de le piloter grâce à la croyance en une ingéniosité supérieure et des capacités illimitées, en cherchant ainsi à atteindre ce sentiment de transcendance ontologique. Cette situation aurait des répercussions potentiellement significatives sur la relation entre l’humain et la nature, reléguant définitivement cette dernière au rang d’artefact (Hess, 2013).
20J’ai tenté jusqu’ici de mettre en avant certains fondements anthropologiques qui expliquent comment ce paradoxe s’est établi. À présent, je désire m’intéresser aux aspects anthropologiques qui alimentent et pérennisent l’existence de ce paradoxe. Je suggère que cela résulte d’une double pulsion simultanée : des peurs et des excitations. En effet, les réflexions anthropologiques portant sur la finitude sont une source de peurs. À l’opposé, l’esprit d’infinitude, qui cherche à surpasser la finitude et les angoisses existentielles y afférentes, est une source d’excitation [3]. Je m’efforce dans ce qui suit à clarifier ces propos.
21Une première source de peur peut être appréhendée par l’idée de l’« absurde » d’Albert Camus (1942). En effet, l’humain entretient un rapport avec le monde qui lui paraît « absurde ». Cette absurdité semble provenir de la dialectique entre la perception d’un monde fini et cet esprit d’infinitude. Dans cette situation, l’humain, à partir de sa position d’extériorité, s’identifie difficilement avec le monde qui se dessine devant ses yeux. Il le conçoit comme un univers de choses dans lequel il se sent étranger (d’Arcais, 2013). Ainsi, une peur naît de cette tension et de ce monde fini auquel il ne s’identifie pas. Pour surmonter cette peur, l’humain cherche à donner une cohérence univoque au monde par une tentative d’unification métaphysique de ce dernier (Camus, 1942). En cherchant à contrôler et maîtriser le système climatique, l’IC traduit une volonté de transcendance pour vaincre cette absurdité. En tant qu’être transcendant, l’humain peut alors donner une cohérence au monde en s’efforçant de l’unifier en le concevant comme un tout rationnel.
22Une seconde source de peur dérive du fait que la finitude du monde confronte ontologiquement l’humain à sa propre finitude (Neyrat, 2016) et éveille en lui une angoisse existentielle. Afin d’apaiser cette angoisse, c’est vers l’infini que l’humain se tourne. En effet, la recherche d’infini devient un objectif qui traduit cette volonté de surpasser la finitude.
23Il existe également une pulsion d’excitation qui résulte, d’une part, d’une volonté de surpasser les peurs susnommées et, d’autre part, de cette croyance en une ingéniosité humaine supérieure. Dépasser la finitude, c’est autant un effort qui consiste à surmonter les angoisses existentielles qu’une source d’excitation. Par « excitation », j’entends ici les conséquences de l’esprit infini, c’est-à-dire l’état d’être où la conscience de l’être humain se persuade de posséder une ingéniosité humaine supérieure, suscitant la conviction de capacités illimitées. Toute comme avant, cette pulsion d’excitation se construit à travers un processus de négation de la finitude : l’humain construit, par négation du « réel » – la finitude –, « quelque chose » d’infini, diamétralement opposé à la finitude.
24Pour résumer cette brève présentation de cette double pulsion – les peurs et l’excitation –, une forte volonté de surpasser la finitude peut être constatée. Et ceci, donc, par un processus de négation de cette dernière. Cela traduit, derechef, une recherche d’infini (Vilmer, 2008) permettant d’atteindre une véritable conscience transcendantale, libre de tout lien avec la finitude. Je suggère que c’est ainsi, à travers cette double pulsion, que le paradoxe de l’IC est alimenté et pérennisé.
Les implications pour la définition et les critères de classification des techniques de l’IC
25Intégrer les réflexions anthropologiques sur l’IC menées jusqu’ici me semble être une tâche fondamentale mais complexe. En outre, l’IC regroupe une pléthore de techniques très variées, n’ayant pas nécessairement les mêmes implications et ne succombant pas toutes au paradoxe. Il s’avère donc nécessaire, à mon sens, de poser un nouveau autre regard sur l’IC. Dans ce qui suit, je propose une voie potentielle qui s’inscrit dans cette volonté de clarification et d’inclusion des caractéristiques anthropologiques, en me penchant sur la définition de l’IC et les critères de classification des techniques. J’estime qu’en délimitant plus judicieusement les contours de l’IC, les enjeux anthropologiques pourront mieux être perçus et permettront ainsi un débat plus ciblé et fructueux, notamment à l’aune du paradoxe. Pour cela, il faut revisiter les critères de classification, ce qui permet ainsi de déceler les techniques ayant les implications les plus significatives sur le devenir de l’humain et de la biosphère, et présentant des possibles symptômes du paradoxe étudié. Je précise que l’exercice que je propose ici se veut réflexif, et vise avant tout à poser les bases d’une nouvelle manière d’appréhender l’IC et les techniques y afférentes. Dans le cadre de cet article, je me tiendrais à proposer une nouvelle définition de l’IC et de développer trois critères qualitatifs qui, adjoints à d’autres critères d’ordre technique, permettraient de classer les techniques d’IC d’une manière différente. Par souci de clarté, je précise que je ne m’adonne toutefois pas ici à une tentative de classification des techniques (je reviens sur ce point plus tard), et m’en tiens à présenter ces trois potentiels nouveaux critères.
26Débutons par la définition de l’IC. Comme mentionné précédemment, j’ai choisi d’employer « ingénierie climatique » en lieu et place de « géo-ingénierie », car j’estime que cette dénomination est plus précise du fait, tout simplement, qu’elle fait directement référence au climat [4]. Je propose la définition de l’IC suivante dans l’optique d’intégrer certaines des réflexions précédentes et de souligner la dimension anthropologique de l’IC : l’ingénierie climatique est une idée historique qui vise à manipuler et contrôler le climat dans l’optique de contrer les effets délétères d’un CC anthropique dangereux pour l’humanité, comportant une anthropologie implicite, affectant potentiellement la relation qu’entretient l’humain avec le milieu naturel et ayant des implications sur le devenir humain et celui de la biosphère [5].
27Penchons-nous ensuite sur la classification des méthodes d’IC. Boucher et al. (2014) et Heyward (2013) ont proposé des nouvelles méthodes de classification en introduisant une série de critères innovants [6]. En adoptant une démarche similaire, je propose trois critères pour évaluer les techniques d’IC. Pour être plus précis, et en guise de rappel, je propose une voie pour appréhender l’IC et ses techniques de manière différente, en adjoignant aux réflexions techniques une dimension anthropologique. Les trois critères sont une manière, selon moi, d’établir une différence entre les techniques d’IC et d’autres techniques. Ces critères sont naturellement sujets à débat, ce qui est l’une des volontés de cette recherche. Je précise encore, pour rappel, qu’elles sont une manière d’évaluer qualitativement les techniques.
28Le premier critère que je suggère reprend directement un élément du paradoxe de l’IC : le « sentiment de transcendance ontologique ». Ayant été défini plus haut, je propose ici de simplement préciser certains éléments pour faciliter – je l’espère – l’emploi de ce critère. Tout d’abord, à travers ce critère, une manière implicite de concevoir la nature émerge. En effet, la transcendance humaine reconnaît au premier chef les valeurs humaines et l’importance d’un soi et d’individualisation (Hamilton, 2013a) et marque ainsi une distance décisive entre l’humain et la nature. Ensuite, ce critère dénote un risque de basculement : le sentiment de transcendance ontologique étant atteint par la technique notamment, cela présente le risque d’ancrer défintivement un schème de pensée technique et scientifique. Ainsi, par un effet de retournement dialectique, la technique risque de devenir une fin en soi : initialement développée pour répondre aux enjeux climatiques, elle devient par la suite un outil de domination et reconnaissance d’une prétendue supériorité.
29Les deux prochains critères découlent directement des réflexions sur le paradoxe et sont étroitement liés au premier critère. Le second critère que je suggère d’adopter est la « perturbation des processus naturels [7] ». Pour évaluer une technique selon ce critère, je propose de faire une distinction entre des « interactions » et des « modifications ». Par « interaction », j’entends une situation où l’humain interfère ou s’insère dans un processus naturel tout en prenant conscience de la relation d’interdépendance qui existe entre lui et la nature. Ceci correspondrait à une faible perturbation des processus naturels. Par « modification », j’entends, au contraire, une situation ou l’interférence humaine consiste à changer de manière significative un processus naturel. Il s’agit d’un projet de manipulation et de contrôle sur le long terme s’acheminant vers une forme de domination de ce processus et qui correspondrait à une forte perturbation des processus naturels.
30Finalement, le troisième critère je propose d’adopter est le risque de verrouillage technologique. J’entends par là, d’une part, une situation dans laquelle l’utilisation d’une technique ne peut être interrompue sans engendrer des conséquences potentiellement délétères pour l’humanité. Et, d’autre part, cela participe, une nouvelle fois, à ancrer un schème de pensée technique et scientifique. Ce critère tient donc compte des effets potentiels sur les générations futures que l’IC pourrait engendrer.
31Les trois critères qui viennent d’être brièvement présentés doivent être pensés comme un premier effort visant à intégrer une dimension anthropologique dans les méthodes de classification des techniques d’IC. Ces critères sont certainement sujets à débat, mais je pense qu’ils permettent implicitement de faire éclore les enjeux liés au paradoxe de l’IC ou, du moins, des enjeux d’ordre anthropologique [8]. J’aimerais également préciser la raison pour laquelle je ne m’adonne pas, dans le cadre cet article, à un exercice de classification des techniques d’IC. Tout d’abord, les trois critères proposés ne peuvent être pensés de manière isolée. Ils doivent être adjoints à des critères techniques. De plus, cette combinaison entre une approche technique et anthropologique a pour effet que certaines techniques usuellement considérées comme de l’IC pourraient être placées dans les catégories d’adaptation et de réduction (Boucher et al., 2014). Ces éléments devraient être considérées, à mon sens, dans les futures propositions de classification [9].
Conclusion
32Cette étude a souhaité transmettre l’idée que l’IC est symptomatique de caractéristiques anthropologiques particulières. J’ai proposé d’étudier l’IC à travers un paradoxe. Ce dernier, que je nomme « le paradoxe de l’IC », est défini comme étant l’existence simultanée d’une perception de la finitude et d’un esprit dit infini qui éclipse la réalité de la finitude et qui cherche à atteindre une conscience transcendantale. Cette étude suggère, en outre, que les fondements anthropologiques du paradoxe sont le fruit de développements anthropologiques qui précèdent l’apparition de l’IC.
33Reconnaître l’existence de ce paradoxe et plus généralement des enjeux anthropologiques associés à l’IC me paraît essentiel. Ainsi, je propose, d’une part, de définir l’IC de sorte à ce que la nature anthropologique de l’IC soit explicite. D’autre part, je propose d’adopter trois critères qualitatifs qui permettent de mettre en lumière les techniques qui présentent les symptômes du paradoxe. Cela pourrait potentiellement conduire à une nouvelle classification des techniques d’IC.
34Finalement, l’IC se profile comme étant une solution légitime aux enjeux climatiques. Imaginer d’autres solutions que celles proposées par l’IC nécessite de prendre en compte des enjeux anthropologiques liés au paradoxe. Autrement dit, je suggère qu’il faut développer une anthropologie qui puisse appréhender les questions liées à la finitude en particulier. Une prise de conscience de la finitude contribuerait à reconnaître et ressentir le lien ontologique et métaphysique entre l’humain et la nature. Et cette prise de conscience pourrait sonner l’avènement d’un mode de fonctionnement sociétal dans lequel les activités anthropiques seraient arrimées aux limites planétaires (Arnsperger, 2016). C’est également par une prise de conscience de ce lien indéfectible entre l’humain et la nature que la distance entre ces derniers – établi par les sciences modernes et l’extériorité de l’humain – peut se réduire. Nous pourrions peut-être ainsi porter un regard nouveau sur la nature et apprendre à interagir différemment avec elle (Zürcher, 2016).
Bibliographie
- Arendt Hannah. 2007. Condition de l’homme moderne (vol. 24 ; trad. anglaise par Georges Fradier), Pocket, Coll. « Agora les classiques ».
- Arnsperger Christian. 2016. « Progrès et conscience : Eléments pour une anthropologie économique non réductionniste de la durabilité », in Hess Gérald et Bourg Dominique (ed.) Science, conscience et environnement : Penser le monde complexe, Paris : Puf. pp.179-206
- Asafu-Adjaye John et al. 2015. An Ecomodernist Manifesto, http://www.ecomodernism.org. Consulté le 14 mai 2017.
- Boucher Olivier et al. 2014. « Rethinking climate engineering categorization in the context of climate change mitigation and adaptation », WIREs Clim Change, vol. 5, pp. 23-35.
- Brand Stewart. 2010. Whole Earth Discipline : Why dense cities, nuclear power, genetically modified crops, restored wildlands, radical science and geoengineering are essential, London : Atlantic Books.
- Camus Albert. 1942. Le Mythe de Sisyphe, Paris : Gallimard.
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Notes
-
[1]
J’emploie « ingénierie climatique » (IC) dans la présente étude en lieu et place de « géo-ingénierie ». Comme je le rappellerai par la suite, j’estime que c’est une formulation plus précise pour parler de projets d’ingénierie qui agissent au niveau du climat.
-
[2]
Cette idée de transcendance ontologique s’apparente à une forme d’hubris, s’agissant en particulier d’une surévaluation des habilités humaines et d’un esprit arrogant (Meyer et Uhle, 2015). Mais la différence est que le premier est de plutôt d’ordre anthropologique, tandis que plusieurs conceptions de l’hubris relèvent plutôt de l’éthique (Meyer et Uhle, 2015). La transcendance ontologique rend compte d’un potentiel basculement vers une conscience résolument transcendantale de l’humain et ayant des implications sur la relation qu’entretiennent l’humain et la nature. Ainsi, un lien plus explicite est établi avec le paradoxe de l’IC. J’espère éviter, en outre, certains amalgames possibles avec l’hubris dont certaines connotations – l’idée de techno-optimisme par exemple – sont encore fortement ancrées (Niemann, 2016).
Par ailleurs, Clive Hamilton (2013a) parle d’« arrogance ontologique ». A nouveau, j’estime que l’emploi du mot « transcendance » et sa dimension anthropologique siéent mieux à mes propos. -
[3]
Cette double pulsion est assez prégnante chez les partisans de l’IC (voir par exemple Brand ; 2010 ; Lynas 2011 ; Morton, 2015). Grevsmühl (2014) propose une analyse similaire très intéressante à partir de la conquête spatiale.
-
[4]
Dans le mémoire de recherche sur lequel se base cet article, je montre, tout comme Boucher et al. (2014) notamment, que le mot « géo-ingénierie » est à la fois ambigu et imprécis, faisant parfois référence au contrôle et la manipulation du climat/de la météorologie voire de l’environnement, et parfois à des techniques bien précises.
-
[5]
Toujours dans ce mémoire, je souligne également, grâce à la littérature, l’absence de la dimension historique de la géo-ingénierie.
-
[6]
Boucher et al. (2014), par exemple, proposent cinq critères : l’échelle d’action, l’échelle des impacts, l’impact sur les communs globaux, les effets transfrontaliers ou transnationaux indésirables, et la permanence de l’effet.
-
[7]
Par « processus naturel », je fais référence aux processus très variés qui se déroulent dans la nature à l’instar des cycles biogéochimiques, l’effet de serre, etc.
-
[8]
D’aucuns pourraient contester que les deuxième et troisième critères sont d’ordre anthropologique. Sans m’opposer complètement à cette critique, j’estime que ces critères relèvent néanmoins de l’anthropologie, car ils interrogent directement la place de l’humain dans la nature et la relation entre les deux.
-
[9]
Dans le mémoire de recherche, je me prête à l’exercice de classification et je distingue six catégories de lutte contre le CC (le lecteur peut s’y référer, le cas échéant). Je précise néanmoins les techniques issues de ma classification qui intègrent la catégorie « ingénierie climatique » : les techniques déployées dans l’espace ; l’injection d’aérosols dans la stratosphère ; la modification de l’albédo des nuages ; la modification de l’albédo terrestre à grande échelle ; les opérations d’échanges de chaleurs dans les océans ; la modification des glaces dans l’Arctique ; l’alcalinité des océans ; l’altération augmentée par l’introduction de produits secondaires dans les rivières et océans ; la fertilisation des océans avec du fer ; l’injection de CO2 dans les océans ; et la capture aérienne directe.