Notes
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[*]
Agrégé et docteur en histoire. Postdoctorant à l’EHESS (CERMA, laboratoire Mondes américains).
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[1]
On trouvera de nombreuses contributions dans les ouvrages suivants : R. Marsiske (dir.), Movimientos estudiantiles en la historia de América Latina, Mexico, UNAM, vol. 1 et 2, 1999, vol. 3, 2006, vol. 4, 2015 ; S. Gonzalez et A. M. Sanchez Saenz (dir.), 154 años de movimientos estudiantiles, Mexico, UNAM, 2011.
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[2]
W. Richard, « The Intellectual Background of the 1918 University Reform in Argentina », The Hispanic American Historical Review, vol. 49, n° 2, 1969, p. 233-253 ; M. Van Aken, « University Reform before Córdoba », The Hispanic American Historical Review, vol. 51, n° 3, 1971, p. 447-462 ; J. C. Portantiero, Estudiantes y Política en América Latina. 1918-1938, Mexico, Siglo XXI, 1978 ; C. Tünnermann, Noventa años de la Reforma Universitaria de Córdoba (1918-2008), Buenos Aires, CLACSO, 2008. Pour une analyse transnationale de la Réforme, voir M. Bergel et R. Martinez Mazzola, « América Latina como práctica. Modos de sociabilidad intelectual de los reformistas universitarios (1918-1930) », in C. Altamirano (dir.), Historia de los intelectuales en América Latina, Buenos Aires, Katz, vol. 2, 2010, p. 119-143 ; F. Moraga Valle, « Reforma desde el sur, revolución desde el norte. El Primer Congreso Internacional de Estudiantes de 1921 », Estudios de historia moderna y contemporánea de México, n° 47, 2014, p. 155-195.
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[3]
Sur l’historiographie (dite successivement orthodoxe, révisionniste, néo-populiste, culturelle) de la Révolution, voir L. Barrón, Historias de la Revolución mexicana, Mexico, FCE, 2004 ; A. Knight, La revolución cósmica. Utopías, regiones y resultados, México 1910-1940, Mexico, FCE, 2015. Parmi une bibliographie extrêmement riche, on peut citer trois ouvrages féconds pour le lecteur francophone : F.-X. Guerra, Le Mexique : de l’Ancien Régime à la Révolution, Paris, L’Harmattan, 1985 ; J. Meyer, La Révolution mexicaine 1910-1940, Paris, Tallandier, 2010 ; A. Lempérière, Intellectuels, État et Société au Mexique. Les clercs de la Nation (1910-1968), Paris, L’Harmattan, 1992.
-
[4]
P. Castro Martinez, « Los partidos de la Revolución: del Partido Liberal Constitucionalista a los albores del Partido Nacional Revolucionario », Polis, vol. 8, n° 2, 2012, p. 75-106.
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[5]
Il n’existe pas de statistiques fiables pour cette période. Les 15 000 ou 16 000 étudiants de 1907 se répartissaient entre quatre ensembles : moins de 6 000 pour le secteur secondaire et préparatoire, 2 000 pour les écoles techniques, 2 500 pour les écoles normales, 5 000 pour les écoles « professionnelles » (universitaires) (M. Gonzalez Navarro, Estadísticas sociales del Porfiriato: 1877-1910, Mexico, Secretaría de Economía, 1956, p. 49-52). De manière générale, les diverses sources évoquent entre 20 000 et 40 000 étudiants au milieu des années 1920, dont la moitié environ se concentrait à Mexico.
-
[6]
R. Marsiske, « Antecedentes del movimiento estudiantil de 1929 en la Universidad de México: actividades y organización estudiantil », in R. Marsiske (dir.), Movimientos estudiantiles en la historia de América Latina, Mexico, UNAM, 2006, vol. 3, p. 141-178.
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[7]
El Universal, « La Labor Universitaria », 30 septembre 1917 ; « Lo que deber ser el congreso estudiantil », 1er mars 1918.
-
[8]
Nous utilisons comme outil l’analyse de Pierre Bourdieu sur le champ politique français (P. Bourdieu, Propos sur le champ politique, Lyon, Presses universitaires de Lyon, 2000). Pour une critique de la théorie des champs, voir B. Lahire, « Champ, hors-champ, contrechamp », in Id (dir.), Le travail sociologique de Pierre Bourdieu, Paris, La Découverte, 1999, vol. 3, p. 23-57.
-
[9]
« Juventud, juventud torbellino, soplo eterno de eterna ilusión », El Universal, 8 juillet 1918.
-
[10]
« Fueron designados los delegados al próximo congreso estudiantil », El Informador, 17 janvier 1926.
-
[11]
S. Aguirre Zertuche, « La idea revolucionaria es inmaculada », La Antorcha Estudiantil, 15 septembre 1928, p. 29.
-
[12]
Voir la trajectoire du groupe des « sept sages », dans E. Krauze, Caudillos culturales en la Revolución Mexicana, Mexico, Siglo XXI, 1976 et l’étude prosopographique de R. Ai Camp, Mexico’s leaders, Tucson, University of Arizona Press, 1980.
-
[13]
« Reúnense en una sesión los estudiantes », El Demócrata, 8 mai 1916.
-
[14]
Rapport du CECM à l’archevêque de Mexico (18 novembre 1916), Archivo Histórico del Arzobispado de México (AHAM), fonds E, section 5A, série Asociación Pia, carton 147, dossier 72. Nous reprenons la définition du catholicisme intransigeant formulée par Jean-Marie Mayeur, soit un courant qui « se fonde sur un refus total de la société née de la Renaissance, de la Réforme et de la Révolution, dominé par l’individualisme et le rationalisme, la sécularisation de l’État, des sciences et de la pensée » (J.-M. Mayeur, Catholicisme social et démocratie chrétienne : principes romains, expériences françaises, Paris, Le Cerf, 1986, p. 20). Sur ses dimensions mexicaines, voir M. Ceballos Ramirez, « Rerum Novarum en México: cuarenta años entre la conciliación y la intransigencia (1891-1931) », Revista Mexicana de Sociología, vol. 49, n° 3, 1987, p. 151-170. Comme en France, le catholicisme intransigeant mexicain fut la matrice d’un catholicisme social, lequel apparut, par la suite, largement compatible avec le réformisme social de la Constitution de 1917.
-
[15]
F. Pineda Gomez, La revolución del sur: 1912-1914, Mexico, Era, 2005, p. 275 ; J. Prieto Laurens, Cincuenta Años de Política Mexicana, Mexico, Editorial mexicana de Periódicos, Libros y Revistas, 1968, p. 10-11.
-
[16]
« Los Estudiantes Explican lo occurrido en una sociedad », El País, 19 mars 1913 ; J. Prieto Laurens, Cincuenta Años…, op. cit., p. 20.
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[17]
« Los estudiantes piden al gral. Díaz que renuncie [a] la presidencia de Méjico », El País, 30 avril 1911.
-
[18]
Sources : J. Prieto Laurens, Cincuenta Años…, op. cit. ; El País ; El Universal.
-
[19]
« Estatutos de la Federación de Estudiantes del Distrito Federal », El Universal, 3 mai 1918.
-
[20]
Ibid.
-
[21]
« La Nueva Directiva del Congreso de Estudiantes », El Universal, 18 février 1918.
-
[22]
H. Combes, Faire parti. Trajectoires de gauche au Mexique, Paris, Karthala, 2011, p. 18-20.
-
[23]
Sur les liens entre honneur et éloquence, voir P. Piccato, The Tyranny of Opinion: Honor in the Construction of the Mexican Public Sphere, Durham, Duke University Press, 2010.
-
[24]
« En el congreso estudiantil », El Universal, 8 juin 1919.
-
[25]
« Duelo entre dos miembros del congreso local estudiantil », El Universal, 14 juillet 1919.
-
[26]
Sur la perception du jeune Lombardo, étudiant modèle : « Sociales y personales », San-Ev-Ank, 22 août 1918, p. 12. Voir aussi E. Krauze, Caudillos culturales…, op. cit., p. 74-78. Vicente Lombardo Toledano (1894-1968), par la suite directeur de l’École nationale préparatoire, devint dès les années 1920 une figure centrale du syndicalisme mexicain. Marxiste hétérodoxe, il fut l’un des principaux idéologues de la Révolution durant les années 1930.
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[27]
« Congreso Local Estudiantil del Distrito Federal », El Universal, 14 juin 1918.
-
[28]
« Sección estudiantil », El Demócrata, 9 mai 1920.
-
[29]
Ibid.
-
[30]
D. Cosío Villegas, Memorias, Mexico, Mortiz, 1977, p. 63-64.
-
[31]
J. Medina, « Vida estudiantil », Helios, avril 1921, p. 28.
-
[32]
Ibid.
-
[33]
« Los estudiantes de ocho escuelas se declaran en huelga », El Demócrata, 6 avril 1922.
-
[34]
« La campaña electoral para integrar la presidencia de la conf. de estudiantes », El Demócrata, 6 avril 1922.
-
[35]
« Las elecciones para presidente de la Confederación de estudiantes de México han dado lugar a serios desórdenes, en que no han faltado los golpes duros », El Demócrata, 7 avril 1922.
-
[36]
Ibid.
-
[37]
« Se ha abierto entre el gremio estudiantil, un necesario parentesis de tranquilidad », El Demócrata, 8 avril 1922.
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[38]
Ibid. Ces fraudes, évoquées fréquemment, apparaissent plausibles. Étant donné l’homogénéité culturelle et sociale des votants, elles ne sauraient néanmoins être comparées aux procédés électoraux étudiés par les historiens du XIXe siècle latino-américain. Le caractère frauduleux de certaines élections dans les écoles de Mexico révèle en réalité l’importance des enjeux de la « politique étudiante » (postes, carrières), non un processus d’acculturation démocratique.
-
[39]
Ibid.
-
[40]
P. Campos Ortiz, « Los estudiantes y la política », San-Ev-Ank, 25 juillet 1918, p. 16.
-
[41]
« ¿Qué se entiende por vida política con relación a los estudiantes? », El Universal, 11 janvier 1918. Les informations suivantes en sont tirées.
-
[42]
« La acción social de los estudiantes », El Universal, 15 février 1918.
-
[43]
G. J. Valenzuela, « Entre el poder y la fe. El Partido Nacional Cooperatista. ¿Un partido católico en los años veinte? », in P. Galeana (dir.), El camino de la democracia en México, Mexico, UNAM, 1998, p. 202 sq.
-
[44]
Voir J. Garciadiego, Rudos contra científicos: la Universidad Nacional durante la Revolución mexicana, Mexico, Colmex, 1996.
-
[45]
G. J. Valenzuela, « Entre el poder y la fe… », art. cité, p. 204.
-
[46]
Ibid., p. 208.
-
[47]
Cooperación, janvier 1923.
-
[48]
G. J. Valenzuela, « Entre el poder y la fe… », art. cité, p. 208.
-
[49]
Ibid., p. 212-214.
-
[50]
« Los estudiantes tomarán parte en la campaña presidencial », El Universal, 25 juin1919.
-
[51]
Publicité électorale, El Demócrata, 11 mars 1920.
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[52]
J. Skirius, José Vasconcelos y la cruzada de 1929, Mexico, Siglo XXI, 1978.
-
[53]
D’après le discours des représentants du groupe, « l’étudiant moderne » était alors censé exercer un rôle directeur dans la société. Voir P. Campos Ortiz, « El concepto del estudiante moderno », San-Ev-Ank, 18 juillet 1918, p. 13-14.
-
[54]
« El mitin de mañana en el Teatro Hidalgo », El Universal, 22 juin 1918.
-
[55]
« El Gran Centro Obrero Independiente y Estudiantil Unidos », El Demócrata, 10 juillet 1918.
-
[56]
L. B. Hall, « Alvaro Obregón y el partido único mexicano », Historia mexicana, vol. 29, n° 4, 1980, p. 613.
-
[57]
« Tratan los estudiantes de organizar un partido político », El Demócrata, 16 juin 1920.
-
[58]
« Por el mundo del proletariado », El Demócrata, 12 septembre 1921 ; « Conferencias culturales », 11 octobre 1921.
-
[59]
Archivo General de la Nación (AGN), fonds Obregón/Calles, dossier 805-F.
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[60]
« A los estudiantes de toda la república », El Demócrata, 17 novembre 1923.
-
[61]
AGN, fonds Obregón/Calles, dossier 104-A-45.
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[62]
D. J. Mabry, The Mexican University and the State: Student Conflicts, 1910-1971, Austin, Texas University Press, 1982, p. 35.
-
[63]
Archives de l’Université ouvrière de Mexico (AUOM), « Invitación a los estudiantes de México », 1923. Document signé par la Confederación de Jóvenes Revolucionarios (R. Llamosa, E. González Aparicio, M. Gatica), l’Asociación de Preparatorianos Revolucionarios (F. Barrón, F. Dorantes), la Liga de Resistencia de Estudiantes de la Escuela Nacional Preparatoria (S. Azuela) et le Club Vicente Guerrero (J. M. Ojeda). Il ne faut pas croire Azuela qui écrivit avoir été étranger aux activités politiques de Lombardo (S. Azuela, La aventura vasconcelista, Mexico, Diana, 1980, p. 23).
-
[64]
Incarné par les peintres Diego Rivera, José Clemente Orozco et David Alfaro Siqueiros, ce mouvement artistique élabora, à partir de 1922, une série de fresques dans plusieurs institutions publiques fréquentées par les cadres et les élites du nouveau régime.
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[65]
S. Azuela, La aventura…, op. cit., p. 23.
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[66]
C. Fell, José Vasconcelos, los años del águila (1920-1925): educación, cultura e iberoamericanismo en el México postrevolucionario, Mexico, UNAM, 1989, p. 345.
-
[67]
AUOM, document envoyé par quatorze élèves de l’ENP à Vicente Lombardo Toledano, fin août 1923. Sauf mention contraire, les informations sur la crise d’août 1923 en sont extraites.
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[68]
Les 25 étudiants étaient S. Azuela, D. Schulz, S. Aceves, A. Carvajal, G. del Campo, A. Romandía, G. Gallardo, E. Morales Pardavé, M. García, S. Ramírez, H. Guerrero, R. Aristi, J. Joaquín César, G. Valencia, M. C. Bernal, M. Aguillón Guzmán, A. E. Monter, J. Surdez, D. Urencio, C. Han, A. Díaz, E. E. Marín, E. Ré, C. Jaimes et B. Montufar. On retrouve ici les lombardo-callistes (Azuela, Aceves, Aguillón Guzmán, Romandía).
-
[69]
Les élèves visés par l’ordre d’expulsion étaient H. Guerrero, F. Alpucho, J. Cabañas, F. Zanudio, A. Carvajal, S. Aceves, G. Gallardo, R. Aristi, S. Azuela, J. M. Ojeda, R. Nieva et la jeune Frida Kahlo.
-
[70]
Composée de J. Lelo de Larrea (FEDF), L. Rubio Siliceo (FEDF), E. Urtusástegui (FEDF), D. Schulz (ENP) et J. Surdez (ENP).
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[71]
« Los políticos que medraron a la sombra de los obreros son los que ahora tratan de aprovecharse de la vehemente candidez de los estudiantes », El Demócrata, 28 août 1923.
-
[72]
D. J. Mabry, The Mexican University…, op. cit., p. 37.
-
[73]
« La federación de estudiantes quedó definitivamente disgregada », El Demócrata, 21 avril 1924.
-
[74]
Ibid ; AUOM, lettre du Partido Rojo Estudiantil à Francisco Dorantes, 21 novembre 1923.
-
[75]
« La federación de estudiantes quedó definitivamente disgregada », El Demócrata, 21 avril 1924.
-
[76]
« Los miembros del Grupo Orientador Estudiantil se adhieren a la carta sobre el Perú del Lic. Vasconcelos », El Demócrata, 24 avril 1924.
-
[77]
« Actividades políticas », El Demócrata, 3 juillet 1924.
-
[78]
Ibid.
-
[79]
« Formidable escándalo formado por escolares », El Demócrata, 5 juillet 1924.
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[80]
« Actividades políticas », El Demócrata, 5 juillet 1924.
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[81]
« Los destructores de pinturas », El Demócrata, 21 juillet 1924.
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[82]
« No hubo escándalos en la Federación de estudiantes », El Demócrata, 3 juillet 1924.
-
[83]
Ibid.
-
[84]
J. Pensado, Rebel Mexico: Student Unrest and Authoritarian Political Culture During the Long Sixties, Stanford, Stanford University Press, 2013.
-
[85]
C. Ortiz, « La Actual Crisis Universitaria », Futuro, juin 1938.
1L’historiographie des mouvements étudiants en Amérique latine a essentiellement porté sur deux moments singuliers du XXe siècle : la Reforma Universitaria (Réforme universitaire) des années 1910-1930 et les contestations des « années 1968 » [1]. Si le second terme évoque un cycle protestataire bien connu du public français, le premier renvoie à une période tout aussi charnière pour l’histoire sociale du continent et à un ensemble de mouvements étudiants éruptifs, allant de l’Argentine au Mexique via Cuba. De la Grande Guerre à la fin des années 1930, la Réforme universitaire s’est en effet traduite par une très forte politisation étudiante, dont l’aboutissement fut généralement l’obtention de l’autonomie universitaire [2]. Cette « réforme », ou « révolution », était alors un mot d’ordre continental, signifiant selon les contextes la création d’universités populaires ou de départements « d’extension universitaire » permettant à des établissements jugés bourgeois de se rapprocher du « peuple », la révision complète des matières enseignées et la fin des cours magistraux voire des examens, ainsi que la participation des étudiants au « gouvernement » d’une institution qui était parfois vue comme un véritable État dans l’État. Néanmoins, si les origines, les réseaux et les mobilisations de la Réforme universitaire sont de mieux en mieux connus, force est de constater que la politisation étudiante n’a été étudiée que très partiellement – davantage comme actrice de la vie de l’université que de celle de la cité. Non sans contradictions, la politisation étudiante a été vue comme un phénomène interne aux établissements scolaires et universitaires. En interrogeant une notion fréquemment employée par les acteurs, la politique étudiante (política estudiantil), cette contribution s’intéresse à l’interaction entre les deux univers, entre arène politique et monde des organisations étudiantes.
2Comparé à l’Amérique latine dans son ensemble, le cas du Mexique paraît exceptionnel. La Révolution mexicaine, de 1910 au début des années 1940, favorisa en effet la soudaine ouverture du système politique et la formation d’une nouvelle classe dirigeante [3]. Elle ne saurait évidemment se résumer à l’instabilité politique ou à la violence de masse, laquelle n’en fut pas moins indéniable et provoqua la mort d’un million de Mexicains sur les quinze qui peuplaient le pays. Liée à la question de la réélection présidentielle, provoquée par une insurrection survenue dans un contexte de crise économique marquée, la fin du régime de Porfirio Díaz (1876-1911) signifia l’effondrement brutal d’un État érigé en modèle de stabilité dans toute l’Amérique latine. La décennie 1910 vit successivement triompher l’ancien opposant Francisco Madero (1911-1913), l’« usurpateur » Victoriano Huerta (1913-1914) puis, après un sanglant affrontement contre les armées de Pancho Villa et d’Emiliano Zapata, le civil et ancien sénateur porfirien Venustiano Carranza (1917-1920), chef de la « Révolution constitutionnaliste ». Ce dernier fut ensuite assassiné et les généraux du Sonora, ses alliés d’autrefois, purent se saisir à leur tour du pouvoir suprême. Cependant, les présidences d’Alvaro Obregón (1920-1924) et de Plutarco E. Calles (1924-1928) furent également frappées du sceau de l’instabilité : la rébellion d’Adolfo de la Huerta, en 1923-1924, se solda ainsi par la mort d’une cinquantaine de généraux et de 7 000 soldats. Le premier véritable signe de stabilité vint après l’assassinat d’Obregón en 1928. S’affirmant comme « le chef suprême de la Révolution », Calles impulsa alors la fondation du premier parti officiel de la Révolution, le Parti national révolutionnaire, en 1929.
3Ce récit sanglant ne doit pas faire oublier que la vie politique avait repris ses droits dès 1916-1917, au moment de la rédaction de la nouvelle constitution aux élans nationalistes, socialistes et anticléricaux. La constitution de 1917 permettait en effet au législateur de réduire considérablement le pouvoir de l’Église catholique en garantissant la laïcité de l’éducation (art. 3), de favoriser le travail aux dépens du capital par la journée de huit heures (art. 123), d’opérer une réforme agraire et de reprendre le contrôle des mines et pétroles en considérant le sol et le sous-sol du pays comme propriété éminente de la nation (art. 27). Les premiers partis politiques naquirent et le nombre des formations explosa, contrastant avec l’ère opprimante de Díaz [4].
4Né durant la lutte armée pour soutenir la faction carranciste, le mouvement étudiant mexicain ne fut jamais étranger à la politique, quand bien même les statuts de ses organisations représentatives bannissaient cette dernière. Il s’agissait jusqu’au début des années 1930 d’un mouvement interscolaire et non spécifiquement universitaire : ses organisations prétendaient représenter une « classe étudiante » largement issue des couches moyennes de la société mais formée en réalité de groupes très différents, allant des élèves moins favorisés des écoles techniques ou normales, féminines et masculines, aux jeunes privilégiés des écoles « professionnelles » ou facultés, dont les plus prestigieuses étaient celles de droit, médecine et ingénierie. Le terme de « classe étudiante », récurrent dans les discours publics, soulignait de manière en partie fictive l’unité et la cohérence de cette catégorie sociale en expansion. Parlant au nom d’environ 20 000 inscrits, le mouvement étudiant représentait de fait une minorité urbaine et lettrée dans une société largement rurale et analphabète de quinze millions d’habitants [5].
5À Mexico, ce mouvement se construisit peu à peu, sous l’impulsion du Congrès local étudiant du district fédéral (CLEDF, fondé en 1916) puis de la Fédération des étudiants du district fédéral (FEDF) qui lui succéda en 1918 [6]. Ce processus fut largement encouragé par les élites du nouveau régime, à l’instar de Félix Palavicini, fondateur du grand quotidien du pays, El Universal. Pour ce journal, l’organisation étudiante était une œuvre révolutionnaire : elle devait permettre la réforme intellectuelle et morale du pays, condition préalable à la mise en pratique des idées politiques et sociales de la Revolución [7]. Les liens entre grande presse et mouvement étudiant étaient par ailleurs extrêmement forts, à tel point que des quotidiens nationaux comme El Universal ou El Demócrata semblaient parfois fonctionner comme les organes de liaison de ses composantes, rendant publics l’ordre du jour des réunions du CLEDF ou les débats houleux au sein de la Fédération.
6La naissance d’un « champ politique » étudiant, cherchant son autonomie et définissant ses propres règles, fut dès lors consubstantielle à la formation d’une union étudiante [8]. Il s’agissait d’un espace de positions, concurrentiel et arbitré par les profanes, producteur d’un habitus spécifique. « La politique », les étudiants l’apprirent en effet en luttant au sein de leurs propres organisations, souvent miroirs des institutions républicaines : l’intitulé « Congrès local étudiant » faisait ainsi référence aux assemblées des États fédérés du Mexique. Comme un parlement, il se réunissait en « sessions » [9]. Fait tout aussi révélateur, en 1926, le règlement du IIIe congrès national étudiant fut officiellement calqué sur celui de la Chambre des députés [10].
7En partie autonome, ce nouveau champ politique entrait nécessairement en interférence avec les stratégies des hommes de pouvoir des écoles, directeurs d’établissement ou ministres de l’Éducation, et, par ce biais, avec l’arène politique nationale, dominée par les généraux qui s’étaient affirmés durant la lutte armée, le tout sous le regard d’une presse juge et partie. De manière générale, les étudiants furent animés par le « civilisme » – expression d’époque désignant l’idée qu’à la révolution des militaires devait succéder celle des civils. Si les étudiants du Porfiriat avaient formé, selon François-Xavier Guerra, le conservatoire du libéralisme, ceux appartenant aux générations dites « de 1915 » puis « de 1929 » furent les gardiens de la Révolution [11]. Les plus ambitieux d’entre eux en devinrent les cadres, dans les années 1920, 1930 et 1940 [12]. S’intéresser à leur socialisation permet d’apprécier la manière dont le mouvement étudiant irrigua, voire façonna, la vie politique mexicaine du premier XXe siècle.
8Croisant des sources de nature diverse (archives présidentielles, presse nationale, revues étudiantes, mémoires et correspondances), cet article défend l’idée que la « politique étudiante » ne fut pas seulement un tremplin pour rejoindre l’arène nationale ; elle devint rapidement un univers à elle seule, avec ses règles, ses fraudes, ses carrières (souvent longues de dix ans) et ses postes de pouvoir – lesquels permettaient de fréquenter l’élite du pays. Le champ politique étudiant interagissait avec l’arène nationale où s’affrontaient les interprètes officiels de la Révolution. Le plus souvent, ces deux sphères s’effleuraient ; toutefois, elles se pénétraient presque systématiquement lors des élections : une crise, plus ou moins violente, survenait alors et contribuait en retour à la politisation des étudiants.
La « politique étudiante » : carrières, règles et enjeux
9La « politique étudiante » émergea dès qu’un espace politique étudiant pérenne put éclore, c’est-à-dire dès l’élection du premier bureau directeur du CLEDF en mai 1916 [13]. La constitution du nouveau bureau rappelait les hiérarchies élémentaires et s’inscrivait dans le moment particulier de la guerre civile. La Révolution fut en effet capitale dans cette première « lutte des places » : la présidence échoua à Jorge Prieto Laurens (voir tableau 1), un élève au parcours prestigieux (École nationale préparatoire puis École nationale de jurisprudence) dont l’engagement pour la Révolution constitutionnaliste était sans tache. Certes, Prieto était un catholique intransigeant, ce qui était mal vu par les carrancistes qui avaient saccagé les locaux du Centre des étudiants catholiques mexicains (CECM) en février 1914 [14]. Mais il avait surtout été, comme les nouveaux hommes forts du pays, madériste puis constitutionnaliste. Fils d’un employé du neveu de Porfirio Díaz, le jeune Prieto n’avait pas hésité à voler le revolver de son père en janvier 1911 pour rejoindre les premiers insurgés [15]. En 1913, cet orateur hors pair avait osé critiquer le projet d’emprunt national voulu par les huertistes, avant de reprendre les armes contre « l’usurpateur » [16]. Ces faits, reproduits alors dans la presse nationale, étaient connus de tous. En 1916, la personne de Prieto permettait la reformulation publique de l’identité collective étudiante : associée auparavant aux científicos, une faction porfirienne détestée, la « classe étudiante » devenait par lui un groupe révolutionnaire. Son premier secrétaire, Feliciano Escudero, avait suivi un parcours similaire, et si le second secrétaire (Miguel Torner) avait, quant à lui, défendu l’emprunt huertiste, il avait ensuite été blessé sous les ordres d’Obregón à León. Quant au second sous-secrétaire du CLEDF, il avait signé la fameuse pétition étudiante demandant le départ de Díaz en 1911 [17].
La trajectoire du jeune Jorge Prieto Laurens [18]
Origine sociale et cursus scolaire | Carrière politique étudiante | Activités politiques postérieures |
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Naissance le 2 mai 1895 à San Luis Potosí (nord du Mexique) Enfance passée à San Luis Potosí puis à Mexico Père ingénieur, cadre de l’Agence Générale Díaz y Sala Enseignement primaire catholique à San Luis Potosí École nationale préparatoire (1909-1913) École nationale de jurisprudence (1914-1918) | Membre de la Société scientifique étudiante Francisco Díaz Covarrubias (1909) Militant pour la candidature du général Reyes, puis pour celle de Madero (1909) Rejoint les zapatistes au moment de l’insurrection madériste (1911) Membre de la Société philosophico-catholique étudiante Jaime Balmes (1912), puis membre du CECM (1913) Emprisonné pour avoir participé au « complot de Xochimilco », puis libéré (1913) Sous-trésorier du CECM (1913) Secrétaire de l’organisation de la manifestation qui consacra le Mexique au Christ Roi (1914) Membre d’une « commission patriotique » pour la paix au Mexique (1914) Président fondateur du CLEDF (1916) Membre de la Ligue des étudiants révolutionnaires (1916) Trésorier du CLEDF (1917) Secrétaire de rédaction du journal étudiant La Lucha (1917) | Sous-secrétaire de l’Association internationale américaniste du Mexique (1917) Fondateur du Parti national coopératiste (1917) Conseiller municipal de la ville de Mexico (1917) |
La trajectoire du jeune Jorge Prieto Laurens [18]
10L’apolitisme statutaire du mouvement étudiant apparaissait en réalité factice. Si, comme le CLEDF, la Fédération souhaitait regrouper « les étudiants des écoles universitaires, préparatoires, normales, militaires, techniques et spéciales, publiques et privées, d’hommes, de jeunes filles ou mixtes, du District fédéral, réunis en sociétés récréatives, coopératives, techniques, sportives, culturelles, journalistiques, etc. » [19], l’article 2 des statuts définissait bien son but premier, également hérité du CLEDF : « parvenir à la formation d’une classe étudiante compacte, forte et cultivée, avec des tendances sociales définies, et capable d’exercer une action efficace sur le destin de la Patrie » [20].
11Tous les étudiants n’étaient cependant pas en mesure de représenter ce groupe en pleine renaissance. D’une part, tous ne disposaient pas du temps nécessaire : ceux qui travaillaient en dehors des cours, fréquemment évoqués dans les sources, n’apparaissaient guère dans les exécutifs étudiants. Par ailleurs, un sentiment de compétence importait pour briguer l’investiture des pairs. Le prestige des écoles rejaillissait sur les inscrits : privilégiés socialement, les « étudiants universitaires » étaient plus nombreux dans les exécutifs que ceux des écoles techniques ou normales. Sur les dix-huit étudiants qui dirigeaient le CLEDF début 1918, onze étaient d’extraction universitaire – dont cinq de la célèbre École nationale de jurisprudence [21]. Parmi les « universitaires », les plus favorisés étaient indiscutablement les étudiants en droit : orfèvres des organisations dont ils avaient rédigé les statuts et dont ils percevaient plus que d’autres les subtilités, ils connaissaient aussi, mieux que leurs camarades, les problèmes du pays. Ces représentants étaient par ailleurs des acteurs « multi-positionnés » [22] : journalistes des pages étudiantes de la grande presse, enseignants dans les nouvelles structures d’éducation populaire, parfois créatures politiques de telle ou telle faction, plus rarement membres de telle ou telle famille. Professionnels de l’éloquence, pratiquée dans les nombreux concours d’art oratoire, ils défendaient l’honneur et les ambitions de la « classe étudiante » [23].
12En s’engageant dans le mouvement étudiant, les représentants des écoles accumulaient progressivement un « capital politique » propre, fruit de leur expérience et de leur réputation. L’honneur en était un élément central. Les étudiants prêtaient serment au moment de leur prise de fonction [24]. Élément exceptionnel mais révélateur : en 1919, deux étudiants se provoquèrent en duel pour laver leur honneur, souillé par des procédés irréguliers durant une élection étudiante où ils étaient rivaux [25]. Plusieurs éléments pouvaient faciliter l’accumulation d’un capital politique. Chez des étudiants comme Vicente Lombardo Toledano, dont le parcours a été bien étudié par Enrique Krauze, il pouvait être lié à un capital scolaire, c’est-à-dire au diplôme préparé et au fait d’être reconnu par ses pairs comme un « sage », un étudiant plus sérieux que les autres [26]. Il pouvait aussi être lié à un capital « révolutionnaire » : ce fut le cas pour les premiers présidents du CLEDF (Prieto Laurens, Torner), dont la trajectoire était liée à la lutte armée. Plus classiquement, il s’accumulait peu à peu au hasard des échelons gravis au sein des organisations étudiantes : de porte-parole à sous-secrétaire, de secrétaire à président. Ceux qui arrivaient à se constituer suffisamment de capital politique étudiant, en devenant notamment président de la Fédération, pouvaient le transformer en capital politique traditionnel.
13Les nombreuses élections étudiantes étaient les opérations qui organisaient et reproduisaient ce champ politique particulier. La bataille pouvait se mener aussi bien à l’échelle de l’école, pour élire l’exécutif de la Société des élèves, qu’à celle de Mexico, pour choisir les dirigeants du CLEDF puis de la FEDF. Nombre de postes faisaient l’objet d’une élection au sein du CLEDF : outre le président, les deux vice-présidents, le secrétaire général et le trésorier devaient être élus. Pour les postes inférieurs, le président pouvait présenter une liste restrictive de trois noms au sein de laquelle le Congrès choisissait l’élu [27]. Tous ces postes étaient disputés. En fonction de l’enjeu, de véritables partis politiques étudiants pouvaient se constituer. Ce qui n’était pas sans paradoxe pour un mouvement à vocation représentative qui bannissait la politique partisane de ses statuts. Le plus souvent, il s’agissait d’une simple liste qui se dispersait une fois les élections gagnées, mais certains partis survivaient à ces échéances fatidiques. De temps à autre, les directeurs des écoles encadraient l’élection et pouvaient faire pression sur les candidats. L’élection de Rodulfo Brito Foucher à la présidence de la FEDF se fit ainsi devant le professeur Antonio Caso, qui posa les règles des débats [28].
14Gagner la présidence de la FEDF était une tâche extrêmement rude : il fallait à la fois convaincre par son éloquence, sa maîtrise des problèmes du temps ou des questions scolaires, et activer ses réseaux dans les écoles de la capitale. Ainsi en 1920, Brito Foucher, qui remporta la présidence de la FEDF, invoqua le « socialisme », porteur d’avenir, pour convaincre ses pairs [29]. Dans ses mémoires, l’historien Daniel Cosío Villegas livra, cinquante ans après, les ficelles de son élection à la présidence de la FEDF en 1921 : il dut sillonner les écoles et organiser, dans chacune d’elles, un comité de campagne assurant la propagande en sa faveur [30]. Ses mémoires paraissent crédibles à la lecture de ce compte rendu électoral rédigé par un élève de l’École normale en 1921 :
Le groupe étudiant métropolitain s’est livré sérieusement à des travaux de propagande, formant des ligues et des partis qui luttèrent jusqu’au dernier moment […]. Dans chacune des écoles où existent des sociétés fédérées, des sessions extraordinaires ont eu lieu afin que les membres de ces sociétés écoutent les exposés des programmes que les partis opposés se proposaient de développer en cas de triomphe [31].
16Pour convaincre une école, il pouvait être nécessaire de promettre à ses étudiants les plus importants un des postes dont la nomination était du ressort du président de la FEDF, afin de s’assurer de leur fidélité. La victoire de Cosío sur son rival Pozzi fut, comme beaucoup, contestée. Bien évidemment, Cosío ne l’écrivit pas dans ses mémoires. Soulignons le commentaire du normalien José Medina :
Comme il était naturel, et soit dit en passant […] très mexicain, ces messieurs les pozzistes ne se résignèrent pas ; faisant savoir que le triomphe de Cosío [était dû] au plus grossier des coups de force, ils affirmèrent que le bureau directeur actuel [avait] péché par sa partialité, que cela ne devait pas rester ainsi, et les petites étudiantes rouges de [l’école] Lerdo et d’autres écoles allèrent dans les rues pousser les hauts cris, et il s’est même dit dans les moments les plus tendus que ces écoles retireraient leurs délégations [de la Fédération] [32].
18Les procédés n’étaient pas toujours réguliers. Par ailleurs, le champ politique étudiant n’étant qu’en partie autonome, les aspirants à la magistrature suprême devaient prendre en compte les stratégies d’acteurs externes – les autorités scolaires et la presse nationale, qui pouvaient défendre ou calomnier les candidats à l’investiture étudiante. L’élection pour la présidence de la FEDF en 1922, qui opposa Raúl Pous Ortiz et Benito Flores, fut à cet égard particulièrement dure. Les deux candidats étaient très populaires : Pous, candidat malheureux à l’élection de 1920, avait été une des chevilles ouvrières du congrès international étudiant de 1921 à Mexico. Flores avait le soutien de la Ligue étudiante, qui regroupait les écoles techniques au sein de la FEDF [33]. Tout comme le ministre Vasconcelos, le journal El Demócrata ne cachait pas sa préférence pour Pous, président de la « grande convention universitaire », et accusait Flores de représenter le « parti catholique » [34]. La diffamation venait de Francisco del Río Cañedo, un partisan de Pous ayant altéré le jugement de Vasconcelos [35]. Les deux groupes en vinrent même aux mains lors de meetings, comme à l’École d’ingénieurs mécaniciens et à l’École féminine Corregidora de Querétaro, provoquant l’indignation d’El Demócrata qui eût préféré que « l’élément féminin » se consacrât à étudier [36]. Les professeurs étaient aussi impliqués dans les troubles : ils savaient que les étudiants pouvaient contraindre à la démission leurs collègues ou leur hiérarchie, libérant ainsi des postes pour eux-mêmes ou leurs clients. Dans la presse, Pous accusa Flores d’avoir engendré « le désordre le plus complet », dénonçant la propagande « immorale » menée par son allié, la « Ligue étudiante indépendante ». Le président de celle-ci aurait tenu « des discours subversifs dans les établissements scolaires » et déclaré aux étudiantes de l’École Corregidora de Querétaro que son organisation était prête à « verser jusqu’à la dernière goutte de sang » dans la lutte électorale. Flores l’emporta finalement dans la majorité des écoles [37]. Représentatif à la fois des étudiants des écoles universitaires, techniques et normales, il gagna probablement en raison de son attitude fédératrice. Des élèves évoquèrent néanmoins des fraudes dans deux écoles [38]. D’autres critiquèrent l’immixtion des professeurs dans les affaires étudiantes et l’enjeu financier qui perturbait le scrutin, c’est-à-dire la gestion, par les futurs élus, des dizaines de milliers de pesos octroyés par le ministère à la FEDF [39].
19Le champ politique étudiant n’était qu’en partie autonome, et les étudiants pleinement conscients des dysfonctionnements. Toutefois, si des acteurs externes intervenaient dans leur sphère de pouvoir, les étudiants faisaient de même, en participant activement à la politique locale et nationale. La tentation politique, au sein du mouvement étudiant, fut permanente.
De l’organisation étudiante au parti politique
20En juillet 1918, le secrétaire général du CLEDF, Pablo Campos Ortiz, raillait les étudiants qui, après avoir martelé « je ne m’engage pas en politique », se lançaient soudainement dans « une croisade politique dans les quartiers aristocratiques de la ville ». Tout en critiquant ce revirement fréquent chez les représentants étudiants, Campos soulevait une question de fond pour l’orientation de la Révolution mexicaine :
Aujourd’hui, la grande aspiration de notre démocratie naissante est la formation de véritables partis politiques. Pourquoi l’Université d’aujourd’hui ne deviendrait-elle pas le berceau du premier véritable parti politique au Mexique ? [40]
22De fait, l’arène politique mexicaine était en complète reconfiguration : les civils, notamment la jeunesse intellectuelle, devaient participer à sa modernisation. Cette réflexion rejoignait celle d’autres acteurs, au Mexique ou en Amérique latine, qui voulaient permettre à ces jeunes savants de devenir des hommes politiques. Début 1918, El Universal publia une étude du professeur péruvien Luis Antonio Eguiguren sur les étudiants et la politique [41]. Tout en refusant que des étudiants mineurs pussent voter, Eguiguren proposait qu’ils fussent éligibles. Favorable à une forme de technocratie, il déterminait l’éligibilité selon le niveau de l’étudiant : un universitaire en seconde année devait pouvoir devenir élu municipal, un licencié d’une faculté, député, un docteur, sénateur. L’orientation politique devait venir de l’Université : « La vie universitaire moderne doit être considérée comme un laboratoire d’idéaux ». Eguiguren rejetait toutefois l’action des « clubs politiques » étudiants, qui embrigadaient de façon nocive la jeunesse au service d’une candidature [42].
23L’engagement de la jeunesse des écoles en politique prit, dès la fondation du mouvement étudiant, trois voies distinctes mais proches, empruntées successivement ou simultanément. La participation à l’un des partis politiques naissants, qui permettaient la transformation du capital étudiant en capital politique officiel, était la première. Plus éphémère, la deuxième consistait à développer des contacts au sein du monde politique en entrant dans un comité de campagne ou en prêtant allégeance à un homme politique. Révélatrice du prestige associé à l’éducation, la troisième passait par l’organisation d’un parti politique dont l’identité était explicitement étudiante – et souvent révolutionnaire.
24Une frange notable des fondateurs du CLEDF, acteurs de la transformation du champ politique mexicain, participa à l’organisation du plus important parti politique du Mexique du début des années 1920. Fondé en août 1917, le Parti national coopératiste (PNC), initialement présidé par un militaire, fit rapidement la part belle aux civils. Les membres de son premier bureau furent le général Jacinto B. Treviño, l’éditorialiste d’El Universal Luis Coyula, le rédacteur d’El Demócrata Francisco Araujo, le rédacteur d’Excélsior Ramón Riveroll et les deux étudiants fondateurs du CLEDF – par ailleurs catholiques intransigeants – Jorge Prieto Laurens et Julio Jiménez Rueda [43]. Prieto, déjà évoqué, fut la cheville ouvrière du parti. Il noua des contacts avec plusieurs dirigeants ouvriers à la suite de sa participation au congrès fondateur de la Confédération régionale ouvrière mexicaine (CROM) en 1918, comme représentant étudiant. Le mot « coopératisme », dans l’intitulé du PNC, prenait acte de la mort du libéralisme : le PNC préconisait la nationalisation des terres et des industries, le soutien au développement de l’irrigation et des communications, le remplacement de l’armée par des « gardes citoyennes » et l’abolition de la peine de mort. Certaines revendications, tout aussi importantes aux yeux du PNC, étaient directement liées à la présence des étudiants dans l’organisation : l’autonomie des universités et la non-intervention en matière de politique extérieure figuraient parmi les principaux points du programme. Il s’agissait de la traduction partisane des deux principaux combats étudiants menés à partir de l’été 1917, le mouvement pour « l’indépendance » de l’Université et celui pour le maintien de la neutralité mexicaine face à la « guerre européenne » [44]. Ces idées, portées par le mouvement étudiant, irriguaient ainsi les nouvelles structures politiques du Mexique révolutionnaire.
25Le PNC perça dès les élections municipales de 1917, faisant élire une dizaine de conseillers à la mairie de Mexico [45]. On comptait parmi ces derniers trois étudiants en droit qui avaient participé à la fondation du CLEDF : Jorge Prieto Laurens, Miguel Torner et Fernando Saldaña Galván. En 1922, le PNC atteignit son apogée, contrôlant la Chambre des députés et le Sénat [46]. Les principaux théoriciens du parti appartenaient tous à la génération des fondateurs du CLEDF : Jorge Prieto Laurens, Manuel Villavicencio, Eduardo Beltrán, Gabino A. Palma, Julio Jiménez Rueda et Luis Enrique Erro animaient l’Académie d’études sociales et politiques du PNC et sa revue [47]. En 1923, Prieto, l’étoile montante de la politique mexicaine, fut élu maire de Mexico [48]. Partisan de la candidature d’Adolfo de la Huerta, le PNC ne survécut cependant pas à la répression sanglante qui se déchaîna contre les delahuertistes [49].
26Les comités de campagne furent l’autre volant de la participation politique des étudiants. Ainsi, dès la fin du printemps 1919, dans la perspective de l’élection présidentielle de 1920, les écoles virent se multiplier les clubs politiques et les partisans des généraux Pablo González ou Alvaro Obregón [50]. Le candidat civil choisi par Carranza, Ignacio Bonillas, disposait lui aussi d’un comité de campagne avec une « section étudiante » [51]. Le civilisme était alors une donnée à géométrie variable, qui ne fédérait pas entièrement les étudiants. Après une décennie dominée par les généraux Obregón et Calles, seule la candidature de l’intellectuel José Vasconcelos à la présidence de la République en 1929 sut mobiliser fortement les dirigeants du mouvement étudiant [52].
27Parfois similaires aux clubs liés à un caudillo, les partis politiques authentiquement « étudiants » cherchaient à capter le vote de la jeunesse des écoles en invoquant la fonction sociale attachée à cette catégorie [53]. Ainsi à l’été 1918, au moment des élections législatives, une Alliance étudiante, formée pour l’occasion, présenta des candidats à la députation [54]. Alliée au Centre ouvrier indépendant, cette organisation, dont la devise était « Santé et révolution sociale », défendait un décalogue révolutionnaire : réglementation des deux grands articles nationalistes et sociaux de la constitution, réglementation des juntes de conciliation et d’arbitrage (équivalent des prud’hommes), abolition de la peine de mort, « liberté absolue d’exercer tout type de professions exceptées celles de médecine et d’ingénierie », limitation du secret médical, opposition à la militarisation de la jeunesse, paiement des professeurs durant les crises économiques, introduction d’une heure d’« enseignement rationaliste » dans toutes les classes et paiement de loyers équitables [55]. Les étudiants les plus politisés commençaient donc dès 1918 à explorer les possibilités contenues dans la constitution de 1917, tout en relayant les revendications professionnelles des futurs enseignants, médecins et ingénieurs. Le succès de cette coalition étudiante et ouvrière fut néanmoins réduit [56].
28L’idéal du parti politique étudiant ne périt pas pour autant [57]. Certains partis politiques étudiants étaient en réalité des organisations pratiquant l’éducation populaire, tel le Parti révolutionnaire étudiant, actif en 1921 [58]. D’autres étaient des comités de campagne au service des caudillos. Travaillant à légitimer la candidature de Calles dans la perspective de l’élection présidentielle de 1924, deux partis politiques étudiants publièrent une tribune commune en faveur du dauphin d’Obregón, intitulée « Les étudiants de la capitale à la Nation. Calles est l’homme ! ». Signée par le « Parti révolutionnaire mexicain intégré par des étudiants » et le « Parti politique étudiant », publiée le 18 octobre 1923, elle faisait l’éloge du viril candidat Calles, présenté comme l’incarnation de la Révolution [59]. La liste des signataires comprenait d’importants dirigeants étudiants, notamment Salvador Aceves, Miguel Aguillón Guzmán et Salvador Azuela. La présence de ce dernier, pourtant grand orateur vasconcéliste en 1929, montrait une fois encore les limites du civilisme et la fascination exercée par les bellatores. Au même moment, d’autres fondaient le « Parti solidariste des étudiants » pour soutenir la candidature d’Adolfo de la Huerta à la présidence ; ce parti était dirigé par un ancien élu de la FEDF, Ernesto Urtusástegui [60]. L’usage de l’étiquette « étudiant » en politique expliquait que des organisations prétendument créées pour représenter tous les étudiants pouvaient en réalité avoir pour unique but le soutien à un chef révolutionnaire : à titre d’exemple, le Centre national des étudiants fut, malgré son nom, une éphémère officine calliste [61].
29L’engagement d’une partie des représentants étudiants en politique pouvait avoir des incidences sur le mouvement lui-même – théoriquement apolitique – dès lors que les enjeux électoraux étaient importants. Les interactions entre les microcosmes étudiant et politique révolutionnaire, soudainement vives en période d’élections, pouvaient provoquer des crises violentes.
L’enchevêtrement de la vie politique étudiante et de la vie politique nationale. Les « crises politico-étudiantes » de 1923-1924
30Les années 1923-1924, marquées par la question de la succession présidentielle et sa solution politico-militaire (la révolte delahuertiste et sa répression), furent des moments d’intense agitation étudiante. Deux crises affaiblirent fortement le mouvement étudiant : celle de l’École nationale préparatoire (ENP) en août 1923 conditionna l’éruption d’une seconde, qui provoqua au printemps 1924 la désagrégation de la FEDF. Le mouvement étudiant, dans la capitale, en sortit exsangue.
31Le 20 juillet 1923, après avoir déclaré que de la Huerta aurait fait un bon président de la République, Villa était assassiné. Le 12 août, Calles démissionnait de son poste de premier ministre pour présenter sa candidature à la présidence. La campagne électorale commençait : la prestigieuse ENP, lieu central de formation des élites mexicaines, alors dirigée par Vicente Lombardo Toledano, entrait en ébullition. Le jeune directeur Lombardo était par ailleurs membre de la CROM, syndicat ouvrier partisan de Calles [62]. Jugeant légitime la politisation des étudiants, le populaire directeur de l’ENP chercha à mobiliser ses élèves pour son propre compte et en faveur de Calles. Un document envoyé par les étudiants de l’ENP à Lombardo en 1923 – qui peut être antérieur ou postérieur à la crise d’août – révélait l’existence de quatre organisations d’élèves favorables à Calles et au directeur [63]. Toutes créées en 1922, année où Lombardo avait pris les rênes de l’ENP, elles se réunissaient au siège du Parti travailliste dirigé par le chef de la CROM, Luis Morones. Elles s’étaient alliées pour faire de la propagande au bénéfice de la candidature de Lombardo aux élections municipales de décembre 1923. Par la chaîne des liens unissant les mondes politique étudiant et révolutionnaire, les élèves proches de Lombardo agissaient à la fois comme des lombardistes et comme des partisans du Parti travailliste, de la CROM et de Calles ; cette multiplicité d’allégeances se retrouvait en particulier chez les jeunes Fernando Barrón et Salvador Azuela. La crise n’aurait probablement pas éclaté si Lombardo avait été seul juge de la politisation étudiante. Il dépendait néanmoins du ministre Vasconcelos. Ce dernier, peu favorable à la candidature de Calles, cherchait à contrôler les multiples échelons du système éducatif, notamment l’ENP, vitrine de l’école révolutionnaire, décorée par les muralistes mexicains [64]. La crise politico-étudiante d’août 1923 naquit de ces contradictions.
32Le 15 août 1923, Vasconcelos découvrait avec effroi que plusieurs des fresques de l’ENP étaient recouvertes d’affiches faisant la promotion d’un journal étudiant [65]. Le ministre, ardent promoteur du mouvement muraliste, cria au vandalisme [66]. Les élèves, notamment les « lombardo-callistes », lui rétorquèrent qu’ils avaient l’habitude de s’exprimer ainsi [67]. Le ministre demanda alors à un surveillant de procéder à l’expulsion de l’ENP de tous les étudiants collaborateurs du journal. Le directeur jugea la décision injuste. Vasconcelos le licencia le lendemain. La nouvelle, publiée le 17 août, provoqua la colère des étudiants de l’école qui, solidaires de Lombardo, déclarèrent la grève. Ils chargèrent parallèlement vingt-cinq camarades, dont quatre étudiantes, d’opérer une médiation pour empêcher le licenciement de leur directeur [68] – en vain. Comme toute rupture de l’ordre scolaire, la grève étudiante commença dès lors bruyamment, à grands renforts de pétards, au moment où les élèves de l’ENP sortaient dans la rue. Vasconcelos fit appeler la police. Devant l’ENP, un des policiers tira en l’air et frappa plusieurs étudiants avec la crosse de son pistolet. Une masse d’étudiants le saisit et l’emmena à l’intérieur de l’école. Frappé par « beaucoup d’autres étudiants », le policier en mourut quelques jours plus tard. Face à la contestation naissante, Vasconcelos décida de procéder à de nouvelles expulsions [69].
33Le 18, les étudiants décidèrent de poursuivre la grève jusqu’à ce que toutes les expulsions fussent levées. Deux commissions furent nommées : la première se rendit à la présidence de la République mais ne put rencontrer le général Obregón ; elle signala à son secrétaire que la liberté d’expression, mise à mal par Vasconcelos, était « un des postulats suprêmes de la Révolution ». La seconde se rendit au ministère et obtint de Vasconcelos qu’une « junte d’honneur », composée de trois représentants de la FEDF et de deux représentants de l’ENP, jugeât les expulsions [70]. La junte décida de les annuler entièrement. Le 20 août, les étudiants reprirent le chemin des cours, satisfaits de l’apaisement. Le 21, leurs représentants refusèrent une nouvelle proposition de Vasconcelos enjoignant aux élèves de nommer des candidats pour remplacer Lombardo. Le statu quo fut donc vite rompu. Le 24, Vasconcelos désigna le nouveau secrétaire de l’ENP, Romano Muñoz, lequel allait en réalité jouer le rôle de directeur intérimaire. Le 27, Muñoz demanda à Vasconcelos l’expulsion de deux étudiants qui avaient exigé sa démission. Solidaires de leurs camarades, les élèves entrèrent une seconde fois en grève. Néanmoins, afin de pouvoir se réunir librement, les grévistes s’assemblèrent les 27 et 28 août dans un lieu hautement politique : les locaux de la CROM (le syndicat pro-Calles de Morones et Lombardo). Les étudiants reçurent dès lors le soutien moral de la CROM puis de la FEDF, laquelle autorisa d’autres écoles à rejoindre le mouvement et prévit une manifestation qui devait partir le 29 du siège du syndicat ouvrier. Parallèlement, Muñoz multipliait les expulsions d’élèves. Le 28, il critiqua publiquement les effets de la politique au sein de l’école, révélant l’existence du Parti révolutionnaire étudiant, et signalant l’adhésion d’une Ligue de résistance des étudiants au Parti socialiste du Sud-est [71]. La crise révélait les imbrications entre politique nationale et politique étudiante. Le nouveau directeur de l’ENP, Roberto Medellín, prit ses fonctions le même jour ; il semblait privilégier la conciliation et élabora un programme conforme aux désirs des élèves (licenciement de Muñoz et annulation des expulsions), en le conditionnant à l’abandon de la manifestation prévue le 29 août.
34Or les jeunes élèves maintinrent la manifestation. Faisant face à l’hostilité des étudiants, Vasconcelos appela la police et les pompiers. Medellín, pistolet à la main, fit entrer les forces de l’ordre par une des portes de l’école. Des coups de feu se firent entendre, certains étudiants étant armés. Des membres de la CROM, armés eux aussi, intervinrent aux côtés des étudiants [72]. Vasconcelos ordonna en conséquence à la police de se retirer. Les étudiants purent alors sortir de l’école et organiser une manifestation « solennelle et ordonnée », faisant la tournée des écoles et des journaux. De retour à l’ENP, ils furent surpris de voir non la police municipale, mais les forces fédérales postées sur les toits de l’établissement : Obregón, soucieux de l’ordre public, avait écouté Vasconcelos. Une quinzaine d’étudiants furent placés en garde à vue, les 29 et 30 août. Le 29, Vasconcelos, qui tenait les cordons de la bourse de la FEDF, obtint que l’organisation étudiante se désolidarisât officiellement des élèves de l’ENP. Ce revirement mina profondément le mouvement étudiant : son organe représentatif perdait toute crédibilité vis-à-vis de l’école qui regroupait en réalité tous les futurs cadres étudiants, l’ENP étant numériquement l’établissement le plus important. Le président Obregón refusa de s’entretenir avec les grévistes et leur demanda par télégramme de retourner à leurs études. Les élèves obtempérèrent. La crise se termina ainsi, le 31 août 1923.
35Cette « crise politico-étudiante » s’expliquait par les liens entre représentants étudiants et hommes politiques, démultipliés en période électorale. Une partie des acteurs politiques (Lombardo, la CROM, le Parti travailliste) s’était alliée avec une fraction des dirigeants étudiants. Perçus comme une ressource aisément mobilisable, ces derniers, influents dans leur milieu (l’ENP), avaient agi comme des acteurs autonomes cherchant à s’affirmer politiquement. D’autres acteurs (Vasconcelos, la FEDF, Obregón) avaient au contraire cherché à séparer politiques étudiante et officielle, en fonction de leurs intérêts respectifs. La crise de 1923 provoqua l’année suivante le surgissement d’une autre de même type. Année électorale chargée au sein du mouvement étudiant comme au niveau national, 1924 vit l’éclatement de la FEDF. Lors de la présidentielle étudiante, l’administration du jeune Lelo de Larrea (1923-1924) déclara vainqueur la liste menée par Enrique Torres et Mauricio Muñoz, tous deux membres du Parti d’orientation étudiante (POE) [73]. Or pour les rivaux du POE, l’élection était plus que contestable. D’une part, les voix du Parti rouge, jugé trop politique, n’avaient pas été comptées. Ce parti, majoritairement composé d’étudiants de l’ENP, avait été initialement fondé pour soutenir la candidature de Lombardo aux municipales [74]. D’autre part, des écoles favorables à un autre parti, le Centre rénovateur étudiant (CRE), comme l’ENP, n’avaient pu voter [75]. Enfin, le fait que l’administration Lelo, qui s’était rangée aux côtés de Vasconcelos lors de la crise d’août 1923, ait transféré le pouvoir à Torres et ses clients au printemps 1924, rendait ce dernier illégitime dès sa prise de fonction. En conséquence, le CRE fit sécession et un groupement alternatif, dirigé par Cayetano Ruiz García, fut lancé sous le nom de Fédération des étudiants de Mexico pour contrecarrer la FEDF contrôlée par les vasconcélistes et les partisans de Torres.
36Si l’administration Lelo avait soutenu le ministre Vasconcelos dans le conflit scolaire de 1923, la nouvelle administration Torres, peu légitime, rompit soudainement avec le principe de l’apolitisme étudiant en se prononçant en faveur du candidat Vasconcelos pour le poste de gouverneur de Oaxaca. À peine l’élection pour la présidence de la FEDF remportée, le POE de Torres affirma son soutien à Vasconcelos [76]. La FEDF franchit ensuite le Rubicon en faisant campagne pour Vasconcelos. Bien que statutairement étrangère à la politique partisane, l’organisation fit pourtant le choix d’intervenir dans cette élection locale au nom du civilisme et publia dans la presse, le 3 juillet 1924, une tribune explicitement vasconcéliste [77]. Pour la FEDF, la victoire électorale de Vasconcelos à Oaxaca, après la rébellion delahuertiste, devait signifier l’automne du militarisme mexicain :
C’est un symbole de civilisme et, en tant que tel, son triomphe électoral marquera un pas définitif dans la nécessaire inversion de nos valeurs politiques […] Il est temps que les postes publics cessent d’être le privilège d’une caste qui, tout au long de notre histoire, a engendré les plus sanglantes douleurs, étant donné que le militarisme a toujours été ennemi de la paix et violeur des libertés publiques […] La révolution, pour se faire, a hissé son drapeau sur la hampe de la force. Il est temps que la force intellectuelle se substitue à la force matérielle [78].
38Si cet horizon civiliste semblait commun à toute la « classe étudiante », Vasconcelos et la FEDF de Torres avaient aussi leurs détracteurs : le 4 juillet 1924, au lendemain de la publication du manifeste de la FEDF, les élèves de l’ENP troublèrent l’ordre public en criant « À mort Vasconcelos ! » [79]. Le même jour, leurs camarades fondaient le Parti communiste étudiant (PCE) aux cris de « Vive Obregón et Calles ! » [80]. Calles fut finalement élu à l’élection présidentielle de juillet 1924. Le PCE attaqua ensuite, à boulets rouges, la FEDF vasconcéliste de Torres [81]. Vasconcelos perdit l’élection au poste de gouverneur le 3 août 1924. La fièvre électorale retomba. En septembre, la Fédération des étudiants de Mexico, contrôlée par les anti-vasconcélistes et restée fidèle à Obregón et Calles, recevait la bénédiction du pouvoir et prenait possession des bureaux de la FEDF [82]. Le nouvel ordre politique conforta de nouveau l’apolitisme statutaire de la FEDF, paradoxalement défendu par les étudiants politisés les plus proches de Calles [83]. Toutefois, preuve de la géométrie variable du civilisme, nombreux furent ces mêmes anti-vasconcélistes de 1923-1924 à soutenir en 1929 leur ancien adversaire.
39En période électorale, la politique nationale pouvait donc mobiliser la « classe étudiante » au point de semer la division en son sein. En dehors de ces moments de tensions, la jeunesse des écoles participait, souvent avec passion, à la « politique étudiante ». Comme les représentants étudiants aspiraient parallèlement à jouer un rôle politique, les interactions entre politiques étudiante et nationale pouvaient altérer l’apolitisme statutaire et l’autonomie des organisations corporatives. Si l’engagement des étudiants dans les affaires de la cité passait par la formation de partis politiques (étudiants ou non), le multi-positionnement de leurs dirigeants pouvait être à l’origine de crises importantes. La réponse à ces crises passait par la réaffirmation, parfois peu crédible, de l’apolitisme des organisations et par l’invocation de l’autonomie universitaire – seule réforme, dans l’esprit des contemporains, à même de séparer le champ politique étudiant du champ politique national.
40En réalité, l’autonomie universitaire, acquise en 1929, ne fit qu’accroître les interactions entre étudiants et politiques : les étudiants continuèrent de s’engager en politique à l’extérieur des écoles, les partis politiques étudiants prospérèrent et leur participation effective au gouvernement de l’université les fit apparaître, aux yeux des recteurs, comme une ressource électorale capitale pour l’attribution des postes académiques et administratifs. La « politique étudiante » connut ainsi une mutation singulière durant les années 1930 : jeunes boxers et pistoleros professionnels firent leur apparition, contribuant à l’augmentation de la violence en milieu étudiant (figure 1). Un des aspects du « problème étudiant » [84], dénoncé dans les années 1950-1960, trouve sans doute son origine dans cette politisation extrême, née d’un enchevêtrement entre l’élan suscité par la « Réforme universitaire » et l’instabilité provoquée par la Révolution.
Notes
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[*]
Agrégé et docteur en histoire. Postdoctorant à l’EHESS (CERMA, laboratoire Mondes américains).
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[1]
On trouvera de nombreuses contributions dans les ouvrages suivants : R. Marsiske (dir.), Movimientos estudiantiles en la historia de América Latina, Mexico, UNAM, vol. 1 et 2, 1999, vol. 3, 2006, vol. 4, 2015 ; S. Gonzalez et A. M. Sanchez Saenz (dir.), 154 años de movimientos estudiantiles, Mexico, UNAM, 2011.
-
[2]
W. Richard, « The Intellectual Background of the 1918 University Reform in Argentina », The Hispanic American Historical Review, vol. 49, n° 2, 1969, p. 233-253 ; M. Van Aken, « University Reform before Córdoba », The Hispanic American Historical Review, vol. 51, n° 3, 1971, p. 447-462 ; J. C. Portantiero, Estudiantes y Política en América Latina. 1918-1938, Mexico, Siglo XXI, 1978 ; C. Tünnermann, Noventa años de la Reforma Universitaria de Córdoba (1918-2008), Buenos Aires, CLACSO, 2008. Pour une analyse transnationale de la Réforme, voir M. Bergel et R. Martinez Mazzola, « América Latina como práctica. Modos de sociabilidad intelectual de los reformistas universitarios (1918-1930) », in C. Altamirano (dir.), Historia de los intelectuales en América Latina, Buenos Aires, Katz, vol. 2, 2010, p. 119-143 ; F. Moraga Valle, « Reforma desde el sur, revolución desde el norte. El Primer Congreso Internacional de Estudiantes de 1921 », Estudios de historia moderna y contemporánea de México, n° 47, 2014, p. 155-195.
-
[3]
Sur l’historiographie (dite successivement orthodoxe, révisionniste, néo-populiste, culturelle) de la Révolution, voir L. Barrón, Historias de la Revolución mexicana, Mexico, FCE, 2004 ; A. Knight, La revolución cósmica. Utopías, regiones y resultados, México 1910-1940, Mexico, FCE, 2015. Parmi une bibliographie extrêmement riche, on peut citer trois ouvrages féconds pour le lecteur francophone : F.-X. Guerra, Le Mexique : de l’Ancien Régime à la Révolution, Paris, L’Harmattan, 1985 ; J. Meyer, La Révolution mexicaine 1910-1940, Paris, Tallandier, 2010 ; A. Lempérière, Intellectuels, État et Société au Mexique. Les clercs de la Nation (1910-1968), Paris, L’Harmattan, 1992.
-
[4]
P. Castro Martinez, « Los partidos de la Revolución: del Partido Liberal Constitucionalista a los albores del Partido Nacional Revolucionario », Polis, vol. 8, n° 2, 2012, p. 75-106.
-
[5]
Il n’existe pas de statistiques fiables pour cette période. Les 15 000 ou 16 000 étudiants de 1907 se répartissaient entre quatre ensembles : moins de 6 000 pour le secteur secondaire et préparatoire, 2 000 pour les écoles techniques, 2 500 pour les écoles normales, 5 000 pour les écoles « professionnelles » (universitaires) (M. Gonzalez Navarro, Estadísticas sociales del Porfiriato: 1877-1910, Mexico, Secretaría de Economía, 1956, p. 49-52). De manière générale, les diverses sources évoquent entre 20 000 et 40 000 étudiants au milieu des années 1920, dont la moitié environ se concentrait à Mexico.
-
[6]
R. Marsiske, « Antecedentes del movimiento estudiantil de 1929 en la Universidad de México: actividades y organización estudiantil », in R. Marsiske (dir.), Movimientos estudiantiles en la historia de América Latina, Mexico, UNAM, 2006, vol. 3, p. 141-178.
-
[7]
El Universal, « La Labor Universitaria », 30 septembre 1917 ; « Lo que deber ser el congreso estudiantil », 1er mars 1918.
-
[8]
Nous utilisons comme outil l’analyse de Pierre Bourdieu sur le champ politique français (P. Bourdieu, Propos sur le champ politique, Lyon, Presses universitaires de Lyon, 2000). Pour une critique de la théorie des champs, voir B. Lahire, « Champ, hors-champ, contrechamp », in Id (dir.), Le travail sociologique de Pierre Bourdieu, Paris, La Découverte, 1999, vol. 3, p. 23-57.
-
[9]
« Juventud, juventud torbellino, soplo eterno de eterna ilusión », El Universal, 8 juillet 1918.
-
[10]
« Fueron designados los delegados al próximo congreso estudiantil », El Informador, 17 janvier 1926.
-
[11]
S. Aguirre Zertuche, « La idea revolucionaria es inmaculada », La Antorcha Estudiantil, 15 septembre 1928, p. 29.
-
[12]
Voir la trajectoire du groupe des « sept sages », dans E. Krauze, Caudillos culturales en la Revolución Mexicana, Mexico, Siglo XXI, 1976 et l’étude prosopographique de R. Ai Camp, Mexico’s leaders, Tucson, University of Arizona Press, 1980.
-
[13]
« Reúnense en una sesión los estudiantes », El Demócrata, 8 mai 1916.
-
[14]
Rapport du CECM à l’archevêque de Mexico (18 novembre 1916), Archivo Histórico del Arzobispado de México (AHAM), fonds E, section 5A, série Asociación Pia, carton 147, dossier 72. Nous reprenons la définition du catholicisme intransigeant formulée par Jean-Marie Mayeur, soit un courant qui « se fonde sur un refus total de la société née de la Renaissance, de la Réforme et de la Révolution, dominé par l’individualisme et le rationalisme, la sécularisation de l’État, des sciences et de la pensée » (J.-M. Mayeur, Catholicisme social et démocratie chrétienne : principes romains, expériences françaises, Paris, Le Cerf, 1986, p. 20). Sur ses dimensions mexicaines, voir M. Ceballos Ramirez, « Rerum Novarum en México: cuarenta años entre la conciliación y la intransigencia (1891-1931) », Revista Mexicana de Sociología, vol. 49, n° 3, 1987, p. 151-170. Comme en France, le catholicisme intransigeant mexicain fut la matrice d’un catholicisme social, lequel apparut, par la suite, largement compatible avec le réformisme social de la Constitution de 1917.
-
[15]
F. Pineda Gomez, La revolución del sur: 1912-1914, Mexico, Era, 2005, p. 275 ; J. Prieto Laurens, Cincuenta Años de Política Mexicana, Mexico, Editorial mexicana de Periódicos, Libros y Revistas, 1968, p. 10-11.
-
[16]
« Los Estudiantes Explican lo occurrido en una sociedad », El País, 19 mars 1913 ; J. Prieto Laurens, Cincuenta Años…, op. cit., p. 20.
-
[17]
« Los estudiantes piden al gral. Díaz que renuncie [a] la presidencia de Méjico », El País, 30 avril 1911.
-
[18]
Sources : J. Prieto Laurens, Cincuenta Años…, op. cit. ; El País ; El Universal.
-
[19]
« Estatutos de la Federación de Estudiantes del Distrito Federal », El Universal, 3 mai 1918.
-
[20]
Ibid.
-
[21]
« La Nueva Directiva del Congreso de Estudiantes », El Universal, 18 février 1918.
-
[22]
H. Combes, Faire parti. Trajectoires de gauche au Mexique, Paris, Karthala, 2011, p. 18-20.
-
[23]
Sur les liens entre honneur et éloquence, voir P. Piccato, The Tyranny of Opinion: Honor in the Construction of the Mexican Public Sphere, Durham, Duke University Press, 2010.
-
[24]
« En el congreso estudiantil », El Universal, 8 juin 1919.
-
[25]
« Duelo entre dos miembros del congreso local estudiantil », El Universal, 14 juillet 1919.
-
[26]
Sur la perception du jeune Lombardo, étudiant modèle : « Sociales y personales », San-Ev-Ank, 22 août 1918, p. 12. Voir aussi E. Krauze, Caudillos culturales…, op. cit., p. 74-78. Vicente Lombardo Toledano (1894-1968), par la suite directeur de l’École nationale préparatoire, devint dès les années 1920 une figure centrale du syndicalisme mexicain. Marxiste hétérodoxe, il fut l’un des principaux idéologues de la Révolution durant les années 1930.
-
[27]
« Congreso Local Estudiantil del Distrito Federal », El Universal, 14 juin 1918.
-
[28]
« Sección estudiantil », El Demócrata, 9 mai 1920.
-
[29]
Ibid.
-
[30]
D. Cosío Villegas, Memorias, Mexico, Mortiz, 1977, p. 63-64.
-
[31]
J. Medina, « Vida estudiantil », Helios, avril 1921, p. 28.
-
[32]
Ibid.
-
[33]
« Los estudiantes de ocho escuelas se declaran en huelga », El Demócrata, 6 avril 1922.
-
[34]
« La campaña electoral para integrar la presidencia de la conf. de estudiantes », El Demócrata, 6 avril 1922.
-
[35]
« Las elecciones para presidente de la Confederación de estudiantes de México han dado lugar a serios desórdenes, en que no han faltado los golpes duros », El Demócrata, 7 avril 1922.
-
[36]
Ibid.
-
[37]
« Se ha abierto entre el gremio estudiantil, un necesario parentesis de tranquilidad », El Demócrata, 8 avril 1922.
-
[38]
Ibid. Ces fraudes, évoquées fréquemment, apparaissent plausibles. Étant donné l’homogénéité culturelle et sociale des votants, elles ne sauraient néanmoins être comparées aux procédés électoraux étudiés par les historiens du XIXe siècle latino-américain. Le caractère frauduleux de certaines élections dans les écoles de Mexico révèle en réalité l’importance des enjeux de la « politique étudiante » (postes, carrières), non un processus d’acculturation démocratique.
-
[39]
Ibid.
-
[40]
P. Campos Ortiz, « Los estudiantes y la política », San-Ev-Ank, 25 juillet 1918, p. 16.
-
[41]
« ¿Qué se entiende por vida política con relación a los estudiantes? », El Universal, 11 janvier 1918. Les informations suivantes en sont tirées.
-
[42]
« La acción social de los estudiantes », El Universal, 15 février 1918.
-
[43]
G. J. Valenzuela, « Entre el poder y la fe. El Partido Nacional Cooperatista. ¿Un partido católico en los años veinte? », in P. Galeana (dir.), El camino de la democracia en México, Mexico, UNAM, 1998, p. 202 sq.
-
[44]
Voir J. Garciadiego, Rudos contra científicos: la Universidad Nacional durante la Revolución mexicana, Mexico, Colmex, 1996.
-
[45]
G. J. Valenzuela, « Entre el poder y la fe… », art. cité, p. 204.
-
[46]
Ibid., p. 208.
-
[47]
Cooperación, janvier 1923.
-
[48]
G. J. Valenzuela, « Entre el poder y la fe… », art. cité, p. 208.
-
[49]
Ibid., p. 212-214.
-
[50]
« Los estudiantes tomarán parte en la campaña presidencial », El Universal, 25 juin1919.
-
[51]
Publicité électorale, El Demócrata, 11 mars 1920.
-
[52]
J. Skirius, José Vasconcelos y la cruzada de 1929, Mexico, Siglo XXI, 1978.
-
[53]
D’après le discours des représentants du groupe, « l’étudiant moderne » était alors censé exercer un rôle directeur dans la société. Voir P. Campos Ortiz, « El concepto del estudiante moderno », San-Ev-Ank, 18 juillet 1918, p. 13-14.
-
[54]
« El mitin de mañana en el Teatro Hidalgo », El Universal, 22 juin 1918.
-
[55]
« El Gran Centro Obrero Independiente y Estudiantil Unidos », El Demócrata, 10 juillet 1918.
-
[56]
L. B. Hall, « Alvaro Obregón y el partido único mexicano », Historia mexicana, vol. 29, n° 4, 1980, p. 613.
-
[57]
« Tratan los estudiantes de organizar un partido político », El Demócrata, 16 juin 1920.
-
[58]
« Por el mundo del proletariado », El Demócrata, 12 septembre 1921 ; « Conferencias culturales », 11 octobre 1921.
-
[59]
Archivo General de la Nación (AGN), fonds Obregón/Calles, dossier 805-F.
-
[60]
« A los estudiantes de toda la república », El Demócrata, 17 novembre 1923.
-
[61]
AGN, fonds Obregón/Calles, dossier 104-A-45.
-
[62]
D. J. Mabry, The Mexican University and the State: Student Conflicts, 1910-1971, Austin, Texas University Press, 1982, p. 35.
-
[63]
Archives de l’Université ouvrière de Mexico (AUOM), « Invitación a los estudiantes de México », 1923. Document signé par la Confederación de Jóvenes Revolucionarios (R. Llamosa, E. González Aparicio, M. Gatica), l’Asociación de Preparatorianos Revolucionarios (F. Barrón, F. Dorantes), la Liga de Resistencia de Estudiantes de la Escuela Nacional Preparatoria (S. Azuela) et le Club Vicente Guerrero (J. M. Ojeda). Il ne faut pas croire Azuela qui écrivit avoir été étranger aux activités politiques de Lombardo (S. Azuela, La aventura vasconcelista, Mexico, Diana, 1980, p. 23).
-
[64]
Incarné par les peintres Diego Rivera, José Clemente Orozco et David Alfaro Siqueiros, ce mouvement artistique élabora, à partir de 1922, une série de fresques dans plusieurs institutions publiques fréquentées par les cadres et les élites du nouveau régime.
-
[65]
S. Azuela, La aventura…, op. cit., p. 23.
-
[66]
C. Fell, José Vasconcelos, los años del águila (1920-1925): educación, cultura e iberoamericanismo en el México postrevolucionario, Mexico, UNAM, 1989, p. 345.
-
[67]
AUOM, document envoyé par quatorze élèves de l’ENP à Vicente Lombardo Toledano, fin août 1923. Sauf mention contraire, les informations sur la crise d’août 1923 en sont extraites.
-
[68]
Les 25 étudiants étaient S. Azuela, D. Schulz, S. Aceves, A. Carvajal, G. del Campo, A. Romandía, G. Gallardo, E. Morales Pardavé, M. García, S. Ramírez, H. Guerrero, R. Aristi, J. Joaquín César, G. Valencia, M. C. Bernal, M. Aguillón Guzmán, A. E. Monter, J. Surdez, D. Urencio, C. Han, A. Díaz, E. E. Marín, E. Ré, C. Jaimes et B. Montufar. On retrouve ici les lombardo-callistes (Azuela, Aceves, Aguillón Guzmán, Romandía).
-
[69]
Les élèves visés par l’ordre d’expulsion étaient H. Guerrero, F. Alpucho, J. Cabañas, F. Zanudio, A. Carvajal, S. Aceves, G. Gallardo, R. Aristi, S. Azuela, J. M. Ojeda, R. Nieva et la jeune Frida Kahlo.
-
[70]
Composée de J. Lelo de Larrea (FEDF), L. Rubio Siliceo (FEDF), E. Urtusástegui (FEDF), D. Schulz (ENP) et J. Surdez (ENP).
-
[71]
« Los políticos que medraron a la sombra de los obreros son los que ahora tratan de aprovecharse de la vehemente candidez de los estudiantes », El Demócrata, 28 août 1923.
-
[72]
D. J. Mabry, The Mexican University…, op. cit., p. 37.
-
[73]
« La federación de estudiantes quedó definitivamente disgregada », El Demócrata, 21 avril 1924.
-
[74]
Ibid ; AUOM, lettre du Partido Rojo Estudiantil à Francisco Dorantes, 21 novembre 1923.
-
[75]
« La federación de estudiantes quedó definitivamente disgregada », El Demócrata, 21 avril 1924.
-
[76]
« Los miembros del Grupo Orientador Estudiantil se adhieren a la carta sobre el Perú del Lic. Vasconcelos », El Demócrata, 24 avril 1924.
-
[77]
« Actividades políticas », El Demócrata, 3 juillet 1924.
-
[78]
Ibid.
-
[79]
« Formidable escándalo formado por escolares », El Demócrata, 5 juillet 1924.
-
[80]
« Actividades políticas », El Demócrata, 5 juillet 1924.
-
[81]
« Los destructores de pinturas », El Demócrata, 21 juillet 1924.
-
[82]
« No hubo escándalos en la Federación de estudiantes », El Demócrata, 3 juillet 1924.
-
[83]
Ibid.
-
[84]
J. Pensado, Rebel Mexico: Student Unrest and Authoritarian Political Culture During the Long Sixties, Stanford, Stanford University Press, 2013.
-
[85]
C. Ortiz, « La Actual Crisis Universitaria », Futuro, juin 1938.