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Article de revue

L'histoire sociale du XIXe siècle : tendances et perspectives

Pages 153 à 162

Notes

  • [*]
    Freie Universität, Berlin.
  • (1)
    T. JUDT, « A Clown in Regal Purple : Social History and the Historians », History Workshop Journal, 7,1979, p. 66-94.
  • (2)
    E. J. HOBSBAWM, « From Social History to the History of Society », Daedalus, 100,1971, p. 20-45.
  • (3)
    W. H. SEWELL, « Toward a Post-materialist Rhetoric for Labor History », in L. R. BERLANSTEIN (ed.), Rethinking Labor History. Essays on Discourse and Class Analysis, Urbana, University of Illinois Press, 1993, p. 16-38.
  • (4)
    J. KOCKA, Sozialgeschichte. Begriff-Entwicklung-Probleme, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 1986, p. 76 et suiv.
  • (5)
    C. TILLY, Big Structures, Large Processes, Huge Comparisons, New York, Russell Sage Foundation, 1984.
  • (6)
    H.-J. SIEGENTHALER, « Geschichte und Ökonomie nach der kulturalistischen Wende », Geschichte und Gesellschaft, 25,1999, p. 276-301.
  • (7)
    I. KATZNELSON, A.R. ZOLBERG (eds.), Working-Class Formation : Nineteenth Century Patterns in Western Europe and the United States, Princeton, Princeton University Press, 1986.
  • (8)
    F. DOSSE, L’histoire en miettes. Des Annales à la « nouvelle histoire », Paris, La Découverte, 1987.
  • (9)
    L. HUNT, Politics, Culture, and Class in the French Revolution, Berkeley, University of California Press, 1986; W. H. SEWELL Jr., Langages et révolutions, Paris, Aubier, 1983; L. HUNT (ed.), The New Cultural History, Berkeley et Los Angeles, University of California Press, 1989; J. REVEL, L. HUNT (eds.), Histories. French Constructions of the Past, New York, New Press, 1996.
  • (10)
    E. P. THOMPSON, La formation de la classe ouvrière anglaise, Paris, Gallimard-Seuil, 1988 (1963).
  • (11)
    M. KAMMEN (ed.), The Past Before Us, Ithaca, Cornell University Press, 1980.
  • (12)
    T. WELSKOPP, « Westbindung auf dem “Sonderweg”. Die deutsche Sozialgeschichte vom Appendix der Wirtschaftsgeschichte zur Historischen Sozialwissenschaft », in W. KÜTTLER et al. (Hg.), Geschichtsdiskurs, vol. 5, Francfort-sur-le-Main, Fischer Taschenbuch Verlag, 1999, p. 191-237.
  • (13)
    J. REVEL (dir.), Jeux d’échelles. La micro-analyse à l’expérience, Paris, Gallimard/Seuil, 1996.
  • (14)
    T. WELSKOPP, « Klasse als Befindlichkeit ? Vergleichende Arbeitergeschichte vor der kulturhistorischen Herausforderung », Archiv für Sozialgeschichte, 38,1998, p. 301-336.
  • (15)
    G. STEDMAN JONES, Languages of Class : Studies in English Working-Class History, 1832-1982, Cambridge, Cambridge University Press, 1983.
  • (16)
    J. W. SCOTT, Gender and the Politics of History, New York, Columbia University Press, 1988.
  • (17)
    H.-U. WEHLER, Geschichte als Historische Sozialwissenschaft, Francfort-sur-le-Main, Suhrkamp, 1973.
  • (18)
    G. ELEY, « Is All the World a Text ? From Social History to the History of Society Two Decades Later », in T. J. MC DONALD (ed.), The Historic Turn in the Human Sciences, Ann Arbor, University of Michigan Press, 1996, p. 193-243.
  • (19)
    U. DANIEL, Kompendium Kulturgeschichte. Theorien, Praxis, Schlüsselwörter, FrancfortsurleMain, Suhrkamp, 2001.
  • (20)
    H.-U. WEHLER, Die Herausforderung der Kulturgeschichte, Munich, C. H. Beck Verlag, 1998.
  • (21)
    T. WELSKOPP, « Die Sozialgeschichte der Väter. Grenzen und Perspektiven der Historischien Sozialwissenschaft », Geschichte und Gesellschaft, 24,1998, p. 169-194.
  • (22)
    M. A. CABRERA, « On Language, Culture, and Social Action », History and Theory, 40,2001, p. 82-100.
  • (23)
    T. WELSKOPP, « Die Dualität von Struktur und Handeln. Anthony Giddens’ Strukturierungstheorie als “praxeologischer” Ansatz in der Geschichtswissenschaft », in A. SUTER, M. HETTLING (Hg.), Struktur und Ereignis, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 2001, p. 99-119.
  • (24)
    T. MERGEL, T. WELSKOPP (Hg.), Geschichte zwischen Kultur und Gesellschaft. Beiträge zur Theoriedebatte, Munich, Beck, 1997.
  • (25)
    Voir par exemple : A. SUTER, « Histoire sociale et événements historiques. Pour une nouvelle approche », Annales H.S.S., mai-juin 1997, p. 543-567.
  • (26)
    J. REVEL, « Die Wiederkehr des Ereignisses-ein historiographischer Streifzug », in A. SUTER, M. HETTLING (Hg.), Struktur und Ereignis, op. cit., p. 158-174.
  • (27)
    R. HACHTMANN, Berlin 1848. Eine Politik- und Gesellschaftsgeschichte der Revolution, Bonn, J.H.W. Dietz, 1997.
  • (28)
    G. DUBY, M. PERROT (dir.), Histoire des femmes en Occident, Paris, Plon, 5 vol., 1991-1992.
  • (29)
    A. CLARK, The Struggle for the Breeches. Gender and the Making of the British Working Class, Berkeley, University of California Press, 1995.
  • (30)
    S. DUDINK, K. HAGEMANN, J. TOSH (eds.), Masculinities in Politics and War : Rewritings of Modern History, Londres, Routledge, 2002.
  • (31)
    C. WISCHERMANN et al. (Hg.), Unternehmenskommunikation im 19. und 20. Jahrhundert. Neue Wege der Unternehmensgeschichte, Dortmund, 2000; K. LAUSCHKE, T. WELSKOPP (Hg.), Mikropolitik im Unternehmen. Arbeitsbeziehungen und Machtstrukturen in Großbetrieben des 20. Jahrhunderts, Essen, Klartext, 1994.
  • (32)
    P. ROBERTSON (ed.), Authority and Control in Modern Industry : Theoretical and Empirical Perspectives, Londres, Routledge, 1999.
  • (33)
    R. BIERNACKI, The Fabrication of Labor. Germany and Britain, 1640-1914, Berkeley, University of California Press, 1995; K. CANNING, Languages of Labor and Gender : Female Factory Work in Germany, 1850-1914, Ithaca, Comell University Press, 1996; J. KOCKA, C. OFFE (Hg.), Geschichte und Zukunft der Arbeit, Francfort-sur-le-Main, Campus, 2000.
  • (34)
    T. WELSKOPP, Arbeit und Macht im Hüttenwerk. Arbeits- und industrielle Beziehungen in der deutschen und amerikanischen Eisen- und Stahlindustrie von den 1860er bis zu den 1930er Jahren, Bonn, J.H.W. Dietz, 1994.
  • (35)
    R. E. WEIR, Beyond Labor’s Veil. The Culture of the Knights of Labor, University Park, Pennsylvania State University Press, 1996; T. WELSKOPP, Das Banner der Brüderlichkeit. Die deutsche Sozialdemokratie zwischen Vormärz und Sozialistengesetz, Bonn, J.H.W. Dietz, 2000.
  • (36)
    S.-L. HOFFMANN, Die Politik der Geselligkeit. Freimaurerlogen in der deutschen Bürgergesellschaft 1840-1918, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 2000.
  • (37)
    J. VERNON, Politics and the People. A Study in English Political Culture, c. 1815-1867, Cambridge, Cambridge University Press, 1993; M. L. ANDERSON, Practicing Democracy. Elections and Political Culture in Imperial Germany, Princeton, Princeton University Press, 2000.
  • (38)
    R. CHARTIER, L’ordre des livres. Lecteurs, auteurs, bibliothèques en Europe entre le XIVe et le XVIIIe siècle, Aix-en-Provence, Alinéa, 1992; D. KALIFA, La culture de masse en France, t. I : 1860-1930, Paris, La Découverte, 2001; D. BLACKBOURN, Marpingen. Apparitions of the Virgin Mary in Bismarckian Germany, Oxford, Oxford University Press, 1994; C. EISENBERG, « English Sports » und deutsche Bürger. Eine Gesellschaftsgeschichte, Paderborn, Schoningh, 1999.
  • (39)
    Voir la contribution de A. KÖNER dans le présent numéro.
English version

1Depuis son essor spectaculaire à la fin des années 1960 et au début des années 1970, l’histoire sociale a beaucoup changé. Elle a traversé de nombreusessont les efforts de synthèse qui ont suscité des débats de fond, dans un domaine de crises dont la première remonte à la fin des années 1970  [1]. Au départ, ce recherche en pleine expansion. Il serait facile d’en conclure qu’à l’époque, l’histoire sociale était très vivante et florissante  [2]. Cependant, avec le début des années 1980, le débat a pris une dimension quelque peu différente. Les « révisionnistes » ont mis en lumière certaines déficiences de l’histoire sociale qu’il était impossible de corriger par de simples éclaircissements, compléments ou addenda. Les défauts et les problèmes mis à jour étaient de taille, et profondément enracinés dans les structures et les postulats fondamentaux qui caractérisaient l’histoire sociale de l’époque.

2L’histoire sociale a poussé sur le terreau du marxisme et de la théorie de la modernisation. Il s’ensuit que le domaine a tout entier été imprégné d’un matérialisme tenace. Le matérialisme – un concept singulièrement sous-théorisé – est à l’origine du postulat selon lequel l’économie structurerait la société et serait le moteur du changement social  [3]. Une priorité causale a par conséquent été accordée à la sphère économique dans les modèles explicatifs des inégalités sociales, de la mobilité et des conflits sociaux. Ceux-ci ont ensuite pris leur place dans la chaîne causale en tant que causes de la contestation politique et idéologique. Politique et idéologie ont ainsi été réduites au rang de potentialités secondaires. Le déterminisme économique s’est d’abord combiné à un structuralisme qui privilégiait les conditions de possibilité de l’action à l’action elle-même. Les relations de production apparaissaient alors comme le plus évident des facteurs contraignants pour les « agents »  [4]. Par ailleurs, les structures n’étaient pas seules à subsumer les hommes du passé dans des collectivités anonymes  [5]. La chaîne causale évoquée ci-dessus ne fonctionnait que dans un mode d’explication macro-causal. Les interprétations restaient donc cantonnées à un niveau très global. Les sociétés, les classes et les mouvements sociaux étaient traités comme des entités collectives capables d’agir en fonction d’« intérêts » prédéfinis. Les processus étaient perçus comme des développements unilatéraux. Les normes de mesure et d’évaluation de leurs trajectoires historiques étaient fixées par des concepts linéaires comme la « modernisation » ou la « formation de la classe ouvrière »  [6]. Cette perspective a, finalement, aidé les historiens du social à préserver une vision unitaire de l’histoire en tant que processus cohérent et continu, toujours en phase avec l’« historisme » du XIXe siècle.

3Une bonne part de l’histoire sociale composée dans ce cadre s’est concentrée sur le « long » XIXe siècle. Commencé avec la double césure qui a transformé la société « traditionnelle » en société « moderne » (révolution politique française et révolution industrielle britannique), ce siècle est devenu synonyme de la percée des processus économiques, sociaux et politiques à long terme considérés comme précurseurs du monde moderne. Ce siècle a également vu l’apparition de la société capitaliste de classes, caractérisée par des appartenances de classe, des manifestations de « conscience de classe » bien plus claires et tranchées que n’en connaîtra le XXe siècle. De nombreux historiens du social – et pas seulement ceux qui se revendiquaient ouvertement du marxisme – se sont lancés dans l’étude du passé comme s’il s’agissait d’une entreprise d’émancipation. L’histoire sociale se devait d’être l’histoire des hommes ordinaires, des masses, des exploités, des opprimés, des défavorisés. L’histoire sociale a offert un nouvel espace aux historiens du travail prêts à dépasser la simple description des organisations ouvrières et des luttes idéologiques  [7].

4L’histoire sociale a, par conséquent, produit un large éventail d’études empiriques. La démographie historique s’est développée jusqu’à devenir un sous-champ très sophistiqué du point de vue méthodologique. L’histoire urbaine a placé les villes naissantes au centre de l’histoire économique, démographique, familiale et ouvrière. L’étude de la mobilité sociale – parallèlement à celle de la très forte mobilité spatiale contemporaine – a profité de l’essor des méthodes quantitatives pour mettre en lumière un aspect de la réalité sociale du passé qui semble lier le développement économique aux structures de classes et au changement social. Les opinions, les mentalités de par le monde, la « culture ouvrière », le niveau de vie, la famille, les associations, les cercles politiques et bien d’autres sujets encore sont devenus des objets d’investigation. La contestation sociale, les conflits sociaux et les mouvements révolutionnaires ont été considérés comme des champs d’intérêt historique majeur. L’histoire sociale a véritablement menacé de supplanter l’histoire politique, proposant une manière plus profonde et mieux adaptée d’expliquer le passé non pas sous l’angle des idées, des événements, des « grands hommes » mais selon une approche socio-économique de la société prise dans son ensemble, institutions politiques comprises. Pourtant, malgré une vague philosophie marxiste de l’histoire ou un modèle universaliste de la modernisation, l’histoire sociale n’a pas réussi à fournir une synthèse de ce champ menacé de désintégration par la prolifération des études de cas et la spécialisation  [8].

5Bien sûr, le tableau de l’histoire sociale « classique » que je viens de brosser n’est qu’une simplification grossière. Le champ a toujours été bien plus diversifié et bien plus dynamique que cette esquisse ne le laisse penser. L’histoire sociale française n’a jamais complètement accepté de séparation nette entre société « pré-moderne » et « moderne » et a préféré se tourner vers le début de la période moderne afin de remettre la Révolution française en perspective. Les historiens français ne se sont pas limités à l’étude des groupes sociaux de l’ère industrielle. Celle des mentalités n’a en rien cédé à la logique causale du déterminisme économique. Ce n’est pas un hasard si l’histoire de la France de la fin du XVIIIe et du début du XIXe siècle a été utilisée par la « nouvelle histoire culturelle » pour mettre à l’épreuve ses propositions en faveur d’un renversement des relations causales et d’une « relative autonomie » de la culture  [9]. Dans l’histoire du travail britannique, Edward P. Thompson a été un des premiers à lancer une « histoire de l’expérience » visant à réhabiliter le rôle des sujets ordinaires de l’histoire  [10]. Les historiens britanniques ont découvert que des traditions plus anciennes avaient grandement influencé l’expérience ouvrière du capitalisme et de la société de classes et conféré aux conflits politiques une rhétorique radicale renouvelée héritée du passé pré-capitaliste. L’histoire sociale américaine, quant à elle, s’est, bien sûr, trouvée confrontée aux tensions raciales et à la diversité ethnique qui ont compliqué les études de cas urbains et orienté l’attention sur les contextes culturels. Le vocabulaire de base y a bientôt adopté la trilogie « classe, race et genre »  [11]. En Allemagne, les études comparatives stimulées par le débat sur la « voie particulière » (Sonderweg) qu’aurait suivie le pays ont contribué de manière décisive à la dislocation des représentations sur l’État-nation et à l’adoption de certaines des approches nouvelles exposées plus haut. C’est ainsi que les limites de l’histoire sociale ont été considérablement repoussées  [12].

6Certaines dynamiques internes ont amené à une critique plus prononcée de l’histoire sociale. La micro-histoire et l’histoire des femmes, principalement issues d’une histoire de l’expérience « d’en bas », sont venues contester la notion unitaire de l’histoire tout comme le parti pris macro-historique. La distinction entre microet macro-histoire fait l’objet de débats depuis les années 1980  [13]. L’histoire des femmes a évolué vers l’histoire des genres, introduisant un concept d’identité qui croise les classes sociales (de même que l’identité ethnique aux États-Unis) et repose davantage sur la « différence » et la « construction » que sur l’appartenance collective et la détermination économique  [14]. La vision de la structure comme relation s’est heurtée à la conception socio-historique de la structure ramenée à sa dimension matérielle. Gareth Stedman Jones a mis très tôt en question le caractère accessoire du langage et l’idée répandue selon laquelle il serait déformé par l’idéologie lorsqu’il n’est pas conforme à l’« intérêt »  [15]. L’histoire des genres a radicalisé son propos sur le rôle créatif du langage, responsable d’une certaine perception de la réalité sociale. L’analyse du discours et la « déconstruction » ne se sont pas contentées de révéler l’instabilité des principales catégories de l’histoire sociale, elles ont aussi réduit son approche segmentée et causale de la société à une simple stratégie linguistique  [16]. L’influence croissante de Michel Foucault, notamment sur les historiens américains du social, a beaucoup contribué à augmenter le malaise du champ. Son décentrage du sujet intentionnel et ses analyses des disciplines et des institutions orientées sur le discours et le pouvoir ont non seulement miné le mode d’investigation « réaliste » de l’histoire sociale mais aussi exagéré le flou de son statut épistémologique et dénoncé son « modernisme » enthousiaste (qu’il soit marxiste ou non). Enfin, son « néo-narrativisme », en soulignant les caractéristiques littéraires inhérentes à l’historiographie et ses structures éminemment narratives, a nié à l’histoire sociale cette précision scientifique qu’elle avait si fermement revendiquée au moment de ses premières avancées vers la sociologie et l’économie  [17].

7Il ne fait aucun doute que ces « révisionnismes » ont transcendé les limites de l’histoire sociale au cours des années 1980 et 1990. La discipline n’a pas répondu à ces défis de manière unanime. On peut cependant dire que l’histoire sociale est toujours restée ouverte aux approches nouvelles, les adaptant aux exigences de ses domaines de recherche traditionnels comme l’histoire du travail. D’aucuns prétendent que les historiens du social, à l’exception de quelques irréductibles, ont rallié le camp culturaliste  [18]. D’autres soutiennent que l’histoire sociale s’est désintégrée et ne forme plus un champ cohérent. De manière générale, l’étiquette « histoire sociale » a perdu les connotations progressistes qu’elle revendiquait au temps de sa splendeur. Si on l’identifie à l’arsenal des convictions fondamentales exposées au début de l’article, elle symbolise un conservatisme thématique et méthodologique qui lutte pour défendre son orthodoxie. Pourtant il n’y a qu’en Allemagne que le débat semble s’être exacerbé au point que l’histoire sociale, malgré des points de recoupement certains, s’oppose à toutes les autres approches rassemblées sous la bannière de la Neue Kulturgeschichte (« nouvelle histoire culturelle »)  [19].

8Il est de toute façon douteux que ces querelles d’étiquetage aient une quelconque valeur intellectuelle. Les évolutions de l’histoire sociale ont été suscitées par des lacunes avérées et des critiques justifiées. De même, l’historiographie révisionniste, si elle a montré qu’elle pouvait avoir des limites d’ordre divers, a aussi eu ses mérites. La totalisation des revendications de l’histoire sociale ou des divers courants de l’histoire culturelle n’était pas véritablement propice au maintien du dialogue. En ce qui concerne l’histoire sociale, il faut reconnaître qu’elle a renoncé à prendre l’initiative dans les débats théoriques et méthodologiques des années 1990. L’histoire sociale a en grande partie refusé de succomber aux sirènes totalisantes de l’analyse du discours, du « déconstructionnisme » et du « constructivisme social » (si l’on considère que ce dernier va au-delà de l’épistémologie stricto sensu). Cependant un simple rappel « terre-à-terre » au bon sens de l’historien ne suffira pas à régler le problème. Il est inutile de se lamenter parce que ces quinze dernières années l’intérêt de la recherche a clairement délaissé l’étude des structures et des inégalités sociales pour se tourner vers des phénomènes culturels intégrant valeur symbolique et dimension discursive cela ne règle pas la question de savoir quelle est la meilleure façon d’aborder aujourd’hui les sujets d’étude traditionnels  [20].

9De mon point de vue, l’histoire sociale du XIXe siècle telle qu’elle est pratiquée aujourd’hui est bien partie pour supplanter à la fois « l’histoire sociale telle que nous la connaissions » et les révisionnismes limités qui ont remodelé l’historiographie des années 1990. Il est grand temps de reprendre l’initiative dans le débat théorique et méthodologique. Pour y parvenir, il est indispensable de redéfinir les concepts centraux de l’histoire sociale « traditionnelle »  [21]. Sur quelles bases l’histoire sociale d’aujourd’hui peut-elle se construire ?

10Comme l’histoire sociale se heurte depuis si longtemps au dualisme entre « structure » et « action », la solution consistant à adopter le néostructuralisme inhérent aux postulats de la « culture comme discours » ou de la « culture comme texte » n’est guère tentante. L’histoire sociale a de bonnes raisons de vouloir considérer « l’action » comme le produit de l’interaction entre des sujets signifiants, sinon autonomes. La « structure » est donc perçue comme une relation entre agents. Ce concept permet de prendre pleinement en compte le rôle constitutif des symboles et du discours et d’aller au-delà de la « textualité » pour intégrer les activités interprétatives et performatives des agents dans une théorie englobante des pratiques sociales. L’histoire sociale traite de connaissances tacites, d’exercice du pouvoir et de besoins émotionnels tout autant que de discours et de symboles. La théorie de la pratique, qu’elle se revendique de Pierre Bourdieu, d’Anthony Giddens ou d’autres, a de fait dépassé les révisionnismes des années 1980 et 1990 et fournit une base théorique susceptible de guider l’histoire sociale des années à venir  [22]. Elle permet en effet de combler la division entre micro et macro-histoire. Débarrassée d’un matérialisme qui a attribué à différentes dimensions de la société diverses mesures des « structures » et des « pratiques » et est resté lié à une causalité unilatérale, cette approche s’intéresse sans distinction à toutes les sphères de la société perçues comme des « champs d’interaction sociale » entre des sujets signifiants, influencés à la fois par les « structures » et leurs pratiques. Ce sont les différents types d’institutions qui partagent la société moderne en sphères de l’entreprise et de ses marchés, mondes de vie (privés) hors de l’économie et domaine des organisations et de la politique. Il est encore possible d’identifier des relations causales mais elles peuvent fonctionner de plus d’une façon  [23].

11Ceci amène trois conséquences d’ordre méthodologique. Premièrement, il n’est plus possible de considérer les collectivités comme des entités allant de soi. C’est plutôt leur formation, à partir d’interactions entre sujets individuels, qui devient l’un des principaux domaines d’analyse. Les collectivités ne sont plus utilisées comme des éléments explicatifs, c’est leur constitution qui doit être étudiée, qui est à expliquer. L’« identité » et la « différence » apparaissent comme des éléments cruciaux pour la construction, par leurs membres, des groupes et mouvements sociaux. Aujourd’hui, l’histoire de la société se dirige donc vers une histoire de la « sociation » (Vergesellschaftung) au sens de Max Weber. Deuxièmement, il y a une différence entre les groupes et mouvements sociaux d’une part et les institutions de type organisations d’autre part. La théorie de la pratique sociale peut aider à comprendre la logique interne propre aux organisations et les processus par lesquels elles modèlent les réponses des systèmes à leurs environnements institutionnels. Enfin, mentalité et idéologie ne représentent plus le « contraire idéal » de la structure matérielle. L’interprétation et les pratiques signifiantes font partie intégrante des activités des sujets incluant la surveillance constante de l’interaction. Mentalité et idéologie se trouvent donc incorporées à la pratique. Il n’y a aucune raison valable d’opposer « société » et « culture » dans la mesure où il relève presque du truisme que le « social » est « culturel » et inversement  [24].

12Quel impact ces avancées théoriques et méthodologiques ont-elles eu ces dernières années sur la pratique d’écriture de l’histoire sociale du XIXe siècle ? L’affaiblissement de la théorie de la modernisation (et de son équivalent marxiste) a permis une réorientation vers des constellations complexes et une perspective qui privilégie à nouveau le synchronique sur le diachronique. Ceci ne veut cependant pas dire que l’histoire sociale ne s’intéresse plus au changement dans la durée. Au contraire, cette dernière approche est la seule qui permette de faire la distinction entre différents types de changements et de chronologies et d’en tenir compte. D’une part, les périodes de transformation rapide sont minutieusement étudiées dans le contexte d’une durée étendue, qui permet de dépasser la dichotomie entre « pré-moderne » et « moderne » introduite par la théorie de la modernisation. La Révolution française et la révolution de 1848 apparaissent ainsi comme des phases pendant lesquelles des modifications progressives d’identité se sont produites, des relations traditionnelles se sont chargées de significations nouvelles et un nouveau vocabulaire s’est fait l’écho d’expériences anciennes. Le « pré-moderne » n’est finalement pas si « traditionnel » et le passé est de toute façon marqué par la manière dont le phénomène « moderne » a pris forme. Une fois encore, c’est l’histoire du travail qui est le terrain privilégié de ce genre de recherche. D’autre part, l’histoire sociale a redécouvert « l’événement »  [25]. Il ne s’agit aucunement d’un retour en arrière vers « l’histoire événementielle » mais d’une tentative de théorisation de « l’événement » qui dans l’histoire sociale « classique » n’était rien d’autre qu’un appendice de la « structure »  [26]. Cette nouvelle approche des « événements » permet la prise en compte d’une multitude de facteurs qui produisent « le moment critique » évoqué par Pierre Bourdieu. De plus, la combinaison de la « durée » et de « l’événement » permet enfin de réintroduire la « contingence » historique dans l’analyse structurelle, ce qui va bien dans le sens d’une histoire sociale mettant l’accent sur les pratiques et la réconciliation entre micro- et macro-histoire  [27].

13Dans ce contexte, il devient possible de surmonter les problèmes d’unidimensionnalité précédemment rencontrés dans les analyses de « différence » et d’« identité ». L’histoire sociale dispose aujourd’hui des instruments théoriques permettant d’appréhender pleinement la complexité avec laquelle identités et différences, partielles et multiples, se recoupent, s’influencent ou se transforment l’une l’autre. Les influences du contexte contemporain et des arrangements institutionnels sur le modelage de ces « identités » présentent un intérêt particulier. L’anthropologie culturelle restera un point de référence utile dans ce domaine  [28]. En ce qui concerne l’histoire des genres, par exemple, l’étude des masculinités du XIXe siècle montre comment le fait de « s’affirmer comme un homme » n’établissait pas seulement des relations hiérarchiques entre les sexes mais fixait également des lignes de séparation entre les générations, intervenait dans la détermination des positions sociales et sous-tendait les revendications de citoyenneté complète, sur lesquelles il débouchait littéralement  [29]. De même qu’il était important de souligner les aspects politiques du « monde privé », il est maintenant important de mettre l’accent sur le « pré-politique » de l’explicitement « politique »  [30].

14Le « tournant culturel » a ouvert la voie à l’analyse socioculturelle des institutions économiques. Une attention considérable a été portée aux entreprises du XIXe siècle en tant que « champs d’interaction sociale » spécifiques au capitalisme. L’entreprise apparaît comme un univers social modelé par ses propres mondes symboliques et par une multitude de relations sociales. La théorie de la pratique sociale permet une analyse des ateliers et des usines perçus comme des réseaux complexes de communication et de coopération, de confiance et de méfiance, de relations de pouvoir et d’autonomie, de stratégie directoriale en opposition avec la « micro-politique » ouvrière. Ces dernières années, la recherche s’est surtout intéressée aux entreprises de la fin du XIXe siècle et aux industries lourdes  [31]. Il serait cependant utile de se repencher sur les débuts de l’industrialisation. La commercialisation des artisanats, les systèmes de sous-traitance et la transition vers l’usine méritent amplement d’être étudiés dans cette nouvelle perspective. Des recherches récentes ont également montré un intérêt renouvelé pour le « paternalisme » d’entreprise, ranimant la discussion des aspects culturels et des aspects économiques  [32]. L’étude socioculturelle des bureaux de direction, du travail administratif, des entreprises familiales et de leurs réseaux d’information transnationaux ou d’institutions de marché comme les banques et les bourses pourrait même déboucher sur l’exploration d’horizons nouveaux.

15L’orientation vers une « histoire totale des entreprises » a également favorisé la fusion qui aurait dû s’opérer bien plus tôt entre histoire des entreprises et histoire du travail. Les études sur l’histoire du travail et du lieu de travail se sont multipliées ces dernières années. Les chercheurs ont eu recours à toute une panoplie d’outils méthodologiques pour rendre justice à la complexité de ce champ éminemment moderne d’interaction sociale  [33]. Cette évolution correspond à deux intuitions. D’une part, il est apparu que l’histoire du travail ouvrier est forcément incomplète si elle n’est pas replacée dans le contexte socio-économique et culturel de l’entreprise au sens large. De même, l’histoire des entreprises ne peut être qualifiée de « totale » que si elle inclut le travail, les rapports de travail et les relations professionnelles. D’autre part, le contexte interentreprises est devenu un domaine de recherche à part entière, ce qui a assoupli les rapports par trop rigides entre histoire du travail et histoire du mouvement ouvrier. D’innombrables indications laissent à penser qu’il y a encore beaucoup à faire dans l’étude de l’organisation des travailleurs. Les liens entre ouvriers et syndicats se révèlent plus forts que ceux entre ouvriers et partis ouvriers ou socialisme. En bref, outre une riche typologie historique des relations interentreprises du XIXe siècle, on peut attendre des recherches menées dans ce champ une typologie des organisations ouvrières qui permette de mieux comprendre les mécanismes effectifs de leur formation selon les circonstances. Les études comparatives dans ce domaine ont montré que les différences de branche, de métier et de région ont eu une influence bien plus grande sur la formation des syndicats que les États-nations respectifs  [34].

16La perspective institutionnelle, tournée vers les sujets individuels et leur interaction signifiante, a également apporté du sang neuf à l’histoire du mouvement ouvrier. Ce sous-champ de l’histoire sociale, longtemps déserté, connaît un nouvel essor; ses conclusions peuvent s’avérer très enrichissantes pour les débats actuels à condition qu’elles réussissent à dépasser le cercle des spécialistes pour atteindre le grand public. A ce propos, deux développements notables peuvent être directement reliés aux avancées théoriques soulignées plus haut. D’abord, les organisations ouvrières comme les syndicats, les coopératives et les partis politiques ont été traitées comme des champs d’interaction sociale. Au lieu d’être rattaché aux conditions socio-éco-nomiques, le contexte institutionnel des pratiques sociales est devenu le centre d’attention. Que faisaient vraiment les membres de ces organisations lorsqu’ils se réunissaient ? Comment célébraient-ils les événements sociaux qu’ils mettaient si souvent en scène ? Dans quelle mesure les modèles de pratiques ainsi reconstitués tra-duisent-ils la façon dont ces membres pensaient ou s’exprimaient ? Jusqu’à quel point cette forme de culture du mouvement ouvrier était-elle masculine ? Ces questions ont été étudiées à propos d’un large éventail d’organisations ouvrières de part et d’autre des frontières nationales. Dans ce domaine également, il s’est avéré particulièrement fructueux d’ancrer l’idéologie dans les pratiques. Les études déjà produites sur le sujet forment un tableau particulièrement haut en couleurs de la camaraderie masculine et de la sociabilité dans la classe ouvrière du XIXe siècle  [35].

17Il n’y a bien sûr pas de raison de limiter ces innovations de l’histoire sociale aux organisations ouvrières. Ce sont justement la polyvalence et la comparabilité de l’approche institutionnelle qui permettent d’établir un lien entre des analyses de ce genre réalisées sur un large éventail social et institutionnel. C’est aussi un domaine où histoire sociale et histoire culturelle semblent enfin pouvoir converger, comme ce fut le cas récemment pour les histoires de la franc-maçonnerie  [36]. Grâce à la perspective institutionnelle, il a été facile d’élargir le champ au réseau des organisations formelles et des cercles et marchés informels constituant la culture politique du XIXe siècle  [37]. C’est un travail qui peut apporter une contribution précieuse à l’histoire très controversée de la « société civile » « d’en bas ».

18Tout cela a, finalement, débouché sur une vision nouvelle de la culture populaire contemporaine. Le champ de la culture de masse du XXe siècle s’est révélé un terrain fertile pour une recherche innovante : les intuitions de cette dernière peuvent à leur tour ouvrir sur une nouvelle vision de la culture populaire du XIXe siècle. Une fois encore, il faudra démêler les interrelations complexes entre traditions et développements nouveaux en évitant l’opposition binaire entre « pré-moderne » et « moderne ». Les histoires des pratiques de lecture populaire, des religions populaires, des sports, des salles de café et de la culture populaire urbaine ont rencontré des succès de librairie considérables et connaissent ainsi une certaine popularité  [38]. Une nouvelle histoire sociale, prenant en compte la dimension culturelle  [39], réussira peut-être à révéler la foisonnante diversité du XIXe siècle en présentant les thématiques dans une écriture accessible.

19Il apparaît aujourd’hui que l’histoire sociale du XIXe siècle est sur le point, sinon de réellement conquérir de nouveaux domaines de recherche, du moins de remodeler de façon fondamentale la vision que nous avons de certains pans du passé. De façon générale, c’est l’analyse des institutions historiques sous l’angle des interactions entre sujets sociaux qui semble être l’avenir de l’histoire sociale. Bien d’autres questions pourraient bien sûr se révéler intéressantes. L’histoire sociale et culturelle de la chose militaire vient par exemple d’être abordée dans le cadre de l’histoire des genres. L’histoire de la colonisation et des sociétés coloniales n’en est qu’aux balbutiements. Les mass media du XIXe siècle méritent également un regain d’attention. La liste est sans fin. L’histoire sociale du XIXe siècle a de fait un avenir et souhaitons que cet avenir sonne enfin le glas de la fausse dichotomie entre histoire « sociale » et histoire « culturelle ».

Notes

  • [*]
    Freie Universität, Berlin.
  • (1)
    T. JUDT, « A Clown in Regal Purple : Social History and the Historians », History Workshop Journal, 7,1979, p. 66-94.
  • (2)
    E. J. HOBSBAWM, « From Social History to the History of Society », Daedalus, 100,1971, p. 20-45.
  • (3)
    W. H. SEWELL, « Toward a Post-materialist Rhetoric for Labor History », in L. R. BERLANSTEIN (ed.), Rethinking Labor History. Essays on Discourse and Class Analysis, Urbana, University of Illinois Press, 1993, p. 16-38.
  • (4)
    J. KOCKA, Sozialgeschichte. Begriff-Entwicklung-Probleme, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 1986, p. 76 et suiv.
  • (5)
    C. TILLY, Big Structures, Large Processes, Huge Comparisons, New York, Russell Sage Foundation, 1984.
  • (6)
    H.-J. SIEGENTHALER, « Geschichte und Ökonomie nach der kulturalistischen Wende », Geschichte und Gesellschaft, 25,1999, p. 276-301.
  • (7)
    I. KATZNELSON, A.R. ZOLBERG (eds.), Working-Class Formation : Nineteenth Century Patterns in Western Europe and the United States, Princeton, Princeton University Press, 1986.
  • (8)
    F. DOSSE, L’histoire en miettes. Des Annales à la « nouvelle histoire », Paris, La Découverte, 1987.
  • (9)
    L. HUNT, Politics, Culture, and Class in the French Revolution, Berkeley, University of California Press, 1986; W. H. SEWELL Jr., Langages et révolutions, Paris, Aubier, 1983; L. HUNT (ed.), The New Cultural History, Berkeley et Los Angeles, University of California Press, 1989; J. REVEL, L. HUNT (eds.), Histories. French Constructions of the Past, New York, New Press, 1996.
  • (10)
    E. P. THOMPSON, La formation de la classe ouvrière anglaise, Paris, Gallimard-Seuil, 1988 (1963).
  • (11)
    M. KAMMEN (ed.), The Past Before Us, Ithaca, Cornell University Press, 1980.
  • (12)
    T. WELSKOPP, « Westbindung auf dem “Sonderweg”. Die deutsche Sozialgeschichte vom Appendix der Wirtschaftsgeschichte zur Historischen Sozialwissenschaft », in W. KÜTTLER et al. (Hg.), Geschichtsdiskurs, vol. 5, Francfort-sur-le-Main, Fischer Taschenbuch Verlag, 1999, p. 191-237.
  • (13)
    J. REVEL (dir.), Jeux d’échelles. La micro-analyse à l’expérience, Paris, Gallimard/Seuil, 1996.
  • (14)
    T. WELSKOPP, « Klasse als Befindlichkeit ? Vergleichende Arbeitergeschichte vor der kulturhistorischen Herausforderung », Archiv für Sozialgeschichte, 38,1998, p. 301-336.
  • (15)
    G. STEDMAN JONES, Languages of Class : Studies in English Working-Class History, 1832-1982, Cambridge, Cambridge University Press, 1983.
  • (16)
    J. W. SCOTT, Gender and the Politics of History, New York, Columbia University Press, 1988.
  • (17)
    H.-U. WEHLER, Geschichte als Historische Sozialwissenschaft, Francfort-sur-le-Main, Suhrkamp, 1973.
  • (18)
    G. ELEY, « Is All the World a Text ? From Social History to the History of Society Two Decades Later », in T. J. MC DONALD (ed.), The Historic Turn in the Human Sciences, Ann Arbor, University of Michigan Press, 1996, p. 193-243.
  • (19)
    U. DANIEL, Kompendium Kulturgeschichte. Theorien, Praxis, Schlüsselwörter, FrancfortsurleMain, Suhrkamp, 2001.
  • (20)
    H.-U. WEHLER, Die Herausforderung der Kulturgeschichte, Munich, C. H. Beck Verlag, 1998.
  • (21)
    T. WELSKOPP, « Die Sozialgeschichte der Väter. Grenzen und Perspektiven der Historischien Sozialwissenschaft », Geschichte und Gesellschaft, 24,1998, p. 169-194.
  • (22)
    M. A. CABRERA, « On Language, Culture, and Social Action », History and Theory, 40,2001, p. 82-100.
  • (23)
    T. WELSKOPP, « Die Dualität von Struktur und Handeln. Anthony Giddens’ Strukturierungstheorie als “praxeologischer” Ansatz in der Geschichtswissenschaft », in A. SUTER, M. HETTLING (Hg.), Struktur und Ereignis, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 2001, p. 99-119.
  • (24)
    T. MERGEL, T. WELSKOPP (Hg.), Geschichte zwischen Kultur und Gesellschaft. Beiträge zur Theoriedebatte, Munich, Beck, 1997.
  • (25)
    Voir par exemple : A. SUTER, « Histoire sociale et événements historiques. Pour une nouvelle approche », Annales H.S.S., mai-juin 1997, p. 543-567.
  • (26)
    J. REVEL, « Die Wiederkehr des Ereignisses-ein historiographischer Streifzug », in A. SUTER, M. HETTLING (Hg.), Struktur und Ereignis, op. cit., p. 158-174.
  • (27)
    R. HACHTMANN, Berlin 1848. Eine Politik- und Gesellschaftsgeschichte der Revolution, Bonn, J.H.W. Dietz, 1997.
  • (28)
    G. DUBY, M. PERROT (dir.), Histoire des femmes en Occident, Paris, Plon, 5 vol., 1991-1992.
  • (29)
    A. CLARK, The Struggle for the Breeches. Gender and the Making of the British Working Class, Berkeley, University of California Press, 1995.
  • (30)
    S. DUDINK, K. HAGEMANN, J. TOSH (eds.), Masculinities in Politics and War : Rewritings of Modern History, Londres, Routledge, 2002.
  • (31)
    C. WISCHERMANN et al. (Hg.), Unternehmenskommunikation im 19. und 20. Jahrhundert. Neue Wege der Unternehmensgeschichte, Dortmund, 2000; K. LAUSCHKE, T. WELSKOPP (Hg.), Mikropolitik im Unternehmen. Arbeitsbeziehungen und Machtstrukturen in Großbetrieben des 20. Jahrhunderts, Essen, Klartext, 1994.
  • (32)
    P. ROBERTSON (ed.), Authority and Control in Modern Industry : Theoretical and Empirical Perspectives, Londres, Routledge, 1999.
  • (33)
    R. BIERNACKI, The Fabrication of Labor. Germany and Britain, 1640-1914, Berkeley, University of California Press, 1995; K. CANNING, Languages of Labor and Gender : Female Factory Work in Germany, 1850-1914, Ithaca, Comell University Press, 1996; J. KOCKA, C. OFFE (Hg.), Geschichte und Zukunft der Arbeit, Francfort-sur-le-Main, Campus, 2000.
  • (34)
    T. WELSKOPP, Arbeit und Macht im Hüttenwerk. Arbeits- und industrielle Beziehungen in der deutschen und amerikanischen Eisen- und Stahlindustrie von den 1860er bis zu den 1930er Jahren, Bonn, J.H.W. Dietz, 1994.
  • (35)
    R. E. WEIR, Beyond Labor’s Veil. The Culture of the Knights of Labor, University Park, Pennsylvania State University Press, 1996; T. WELSKOPP, Das Banner der Brüderlichkeit. Die deutsche Sozialdemokratie zwischen Vormärz und Sozialistengesetz, Bonn, J.H.W. Dietz, 2000.
  • (36)
    S.-L. HOFFMANN, Die Politik der Geselligkeit. Freimaurerlogen in der deutschen Bürgergesellschaft 1840-1918, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 2000.
  • (37)
    J. VERNON, Politics and the People. A Study in English Political Culture, c. 1815-1867, Cambridge, Cambridge University Press, 1993; M. L. ANDERSON, Practicing Democracy. Elections and Political Culture in Imperial Germany, Princeton, Princeton University Press, 2000.
  • (38)
    R. CHARTIER, L’ordre des livres. Lecteurs, auteurs, bibliothèques en Europe entre le XIVe et le XVIIIe siècle, Aix-en-Provence, Alinéa, 1992; D. KALIFA, La culture de masse en France, t. I : 1860-1930, Paris, La Découverte, 2001; D. BLACKBOURN, Marpingen. Apparitions of the Virgin Mary in Bismarckian Germany, Oxford, Oxford University Press, 1994; C. EISENBERG, « English Sports » und deutsche Bürger. Eine Gesellschaftsgeschichte, Paderborn, Schoningh, 1999.
  • (39)
    Voir la contribution de A. KÖNER dans le présent numéro.
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