Couverture de LMJ_221

Article de revue

La tragique Odyssée des enfants de Poitiers

Pages 162 à 175

Notes

  • [1]
    Le recensement d’octobre 1940 indique la date d’entrée en France et parfois d’installation dans la région. Nous avons pu relever de la sorte les plus anciennes familles juives vivant à Poitiers. Voir aussi l’annuaire des communautés juives de France, p.221, édition 1994-1995.
  • [2]
    Consistoire Central Israëlite de Paris, plusieurs échanges de correspondances entre Elie Bloch d’une part, et, le secrétaire général du consistoire, les Grands Rabbins Weil et Netter d’autre part, nous informent des conditions de cette évacuation de Metz à Poitiers.
  • [3]
    Archives Départementales de la Vienne, 104W40, état des Juifs présents dans le département établi par la préfecture de la Vienne, au 20 octobre 1940, ainsi que plusieurs documents concernant les évacués de la Gironde.
  • [4]
    ADV 104W32 et ADV 104W40, réquisition de terrains pour la construction du centre d’internement des Espagnols et lettre du préfet de la Vienne à l’inspection départemental de l’hygiène lui annonçant l’arrivée des Nomades.
  • [5]
    Ces dénominations sont utilisées dans les entêtes de lettres du camp, du début 1941 jusqu’à la fin de 1943. Nous les retrouvons dans les tampons désignant les différents services, l’infirmerie ou la censure par exemple, toujours précédés par la désignation de “camp de concentration”. Dans la correspondance du préfet, soit au directeur de ce camp, ou soit à la feldkommandantur, il est le plus souvent question du “camp de concentration”, même si de temps à autre il est appelé “camp de la route de Limoges”. Il s’agit bien d’un camp de concentration, rouage essentiel dans la déportation des Juifs du Poitou, avant leur extermination. Nous retrouvons là, le processus décrit par Raul Hilberg dans La Destruction des Juifs d’Europe. A sa création en 1939, camp d’internement pour les Espagnols, il devient au début de 1944, centre de séjour surveillé, les politiques et les droits communs sont désormais les plus nombreux dans le camp.
  • [6]
    ADV 104W6, rapport du rabbin Bloch au préfet de la Vienne, du 4 août 1941. Nous retrouvons également ce document bien connu dans les archives du YIVO.
  • [7]
    ADV 104W6 et 104W32, ainsi que les témoignages de Jean-Louis Bauer, Félicie Barbanel-Combaud, Michel Gluba et le père Fleury.
  • [8]
    CDJC-YIVO-Folder 24, échange de correspondance entre l’infirmière du camp madame Chitz et Marcelle Valensi.
  • [9]
    CDJC-YIVO-Folder 24, un rapport non daté de Marcelle Valensi, adressé de Poitiers, à David Rapoport. D’après son contenu, il a dû être rédigé en octobre 1941. La correspondance de Marcelle Valensi, très intéressante, n’est hélas souvent pas datée.
  • [10]
    CDJC-YIVO-Folder 24.
  • [11]
    Entretien avec Régine Breidick, devenue Rivka Dimant, Israël, août 1995.
  • [12]
    CDJC-YIVO-Folder 24, et Archives Centrales de l’Histoire du Peuple Juif de Jérusalem. Marcelle Valensi pousse le rabbin à retirer les enfants de cette maison, dont plusieurs rapports du service départemental d’hygiène souligne les carences dans ce domaine.
  • [13]
    Entretien avec David Amzel (Dan Amit).
  • [14]
    CDJC YIVO-Folder 17/56, lettre du secrétaire général de l’UGIF demandant au rabbin Bloch de s’intéresser au sort des enfants d’Angoulême, et témoignage de Robert Frank.
  • [15]
    Entretiens avec Charlotte Rosenbaum et Michel Gluba.
  • [16]
    ADV 104W2, lettre du préfet Bourgain au rabbin Bloch du 18 février 1942.
  • [17]
    ADV 104W38, échange de correspondance entre le rabbin et le préfet, puis entre ce dernier et la feldkommandantur. La réponse négative des Allemands est rendue cinq mois après les premières démarches entreprises par Elie Bloch.
  • [18]
    ADV 104W1, rapport du directeur du camp au préfet de la Vienne.
  • [19]
    ADV 104W38 et 104W1, liste des personnes libérées et correspondance de la feldkommandantur. Régine Breidick doit signer un bon de prise en charge et engager sa responsabilité personnelle.
  • [20]
    CCIP, les principaux dirigeants de l’UGIF, comme André Baur sont arrêtés et internés à Drancy. Les nombreuses interventions destinées à les libérer ne font que retarder leurs déportations vers Auschwitz. Pour cette raison Elie Bloch et sa famille resteront dix mois dans le camp de Drancy.
  • [21]
    CCIP.
  • [22]
    ADV 104W38, télégrammes envoyés au préfet de police de Paris et au directeur du camp de Drancy par le préfet de la Vienne. Témoignage de Charles Goldner.
  • [23]
    Dans ce transfert se trouvent d’autres bébés comme par exemple, Dembicer Jacques âgé de 5 mois, de nationalité française.
  • [24]
    ADV 104W38, liste des déportés du 26 mai 1943, avec leurs date et lieu de naissance.
  • [25]
    Serge Klarsfeld dans “Le calendrier des persécutions des Juifs de France”, présente la répartition des enfants dans les maisons de l’UGIF. Plusieurs témoignages recueillis auprès des personnes déjà citées.
  • [26]
    CDJC-YIVO-Folder 62.
  • [27]
    ADV 104W38, plusieurs correspondances sur l’internement des enfants et leur transfert à Paris entre la préfecture et la feldkommandantur de Poitiers.
  • [28]
    ADV 104W38, lettre adressée par le préfet au commandant de la gendarmerie de la Vienne, la veille du transfert des enfants.
  • [29]
    Témoignage de Paulette Hamersfeld.
  • [30]
    Témoignage d’Annette Ciechanowski.
  • [31]
    Témoignages de ces différentes personnes, recueillis au cours de l’année 1995, à Paris.
  • [32]
    Témoignage de Gérard Spiegel, Israël, août 1995.
  • [33]
    Paul Lévy, Un camp de concentration français : Poitiers 1939-1945, p.265, Paris, Sédes, 1995.
  • [34]
    Une dizaine de ces Justes poitevins ont été invités par l’Etat d’Israël à planter un arbre au mémorial de Yad Vachem. Celui du père Fleury se trouve, dès l’entrée, dans l’allée centrale.

1Poitiers, ainsi que le département de la Vienne n’abritent plus de Juifs depuis le XIVe siècle. A partir de 1870, une ou deux familles alsaciennes s’y installent. A la veille de la Grande Guerre il n’y a pas dix familles juives dans le Poitou, leur nombre augmente à partir de 1920, sans dépasser la vingtaine avant le second conflit mondial [1].

2Au cours de la “drôle de guerre”, l’Etat-Major procède à l’évacuation des populations civiles des zones frontalières sensibles, vers les régions de l’arrière. Parmi les 54 000 Lorrains évacués dans la Vienne, se trouvent 850 Juifs, originaires de la région de Metz, installés autour de quatre agglomérations : Poitiers, Châtellerault au nord, Civray au sud et Chauvigny à l’est. Rares sont ceux qui ont pu trouver un emploi, la plupart vivent de l’allocation de réfugié, ou de menues activités dans l’agriculture, les services ou le commerce. Ils ont à leur tête Elie Bloch ancien rabbin de la jeunesse de Metz, qui anime cette communauté improvisée, installée dans les départements de la région [2].

3A ce premier groupe s’adjoint, en décembre 1940, la population expulsée des régions côtières, par les Allemands. Environ 600 Juifs trouvent à leur tour refuge dans la Vienne. De la sorte, à la fin de l’année 1940, plus de 1 400 Juifs, évacués ou réfugiés, vivent dans ce département [3].

4Les enfants fréquentent les écoles et collèges de leurs communes. Ils représentent une part importante de la communauté avec 21 %, pour les moins de quinze ans, qui atteint près de 30 % si on retient les adolescents de 16 à 18 ans. Parmi la population juive les femmes forment, avec 44 %, un groupe important, aussi n’est-il pas rare de trouver des mères de familles seules, entourées de leur progéniture.

5Avec les lois anti-juives promulguées en octobre 1940, par le gouvernement de Vichy, et les mesures instituées par les Allemands, les Juifs du Poitou ne sont plus, ni des évacués, ni des réfugiés, les voilà transformés en population captive “assignée à résidence”, dont tous les faits et gestes sont contrôlés, tant par la gendarmerie française, que par la police allemande.

6Depuis septembre 1939, Poitiers dispose, route de Limoges, d’un camp d’internement où sont entassés des Républicains espagnols et leur famille, en vertu de dispositions édictées par Edouard Daladier, l’un des derniers présidents du conseil de la IIIe République. En décembre 1940 c’est au tour des Tsiganes d’y être “concentrés” sur ordre des Allemands [4]. Près de 450 y sont internés, lorsque le 15 juillet 1941, à leur tour les Juifs franchissent les barbelés.

7Muni au début d’une simple clôture, l’arrivée des Tziganes conduit au renforcement de l’enceinte du camp, qui sera doublée, puis surhaussée de deux miradors peu de temps après l’internement des Juifs. Cette évolution des structures se double d’un changement de dénomination du camp. Le camp d’internement des étrangers se transforme en “camp de concentration des Nomades” pour devenir enfin “camp de concentration des Nomades et des Juifs”. Une appellation officielle qui révèle la fonction prochaine de ce camp, une antichambre de la déportation [5].

Des enfants internés

8Les enfants représentent plus du quart (27 %) des Juifs internés dans le camp. A ses débuts, l’internement revêt un caractère assez souple. Les sorties sont autorisées sous condition, d’emploi pour les Espagnols et de courses en ville pour les Tsiganes. Les adultes juifs ne bénéficient pas de ces mesures, seuls de rares enfants peuvent quitter le camp, quelques heures seulement.

9N’ayant pas encore saisi la vraie nature de ce camp, un groupe de jeunes garçons juifs reste musarder dans les rues de Poitiers, avant de retourner au camp, quelques heures après l’appel du soir. Les sanctions prises par le directeur sont disproportionnées : coups de fouet, privation de nourriture, station debout en plein soleil, nous sommes au début d’août 1941. Ces punitions entraînent les vives protestations du rabbin Bloch qui se plaint de ces sévices inadmissibles auprès du préfet [6].

10Les baraquements de type Adrian étant surpeuplés (100 personnes dans un peu plus de 25 m2 utiles !), le plus souvent les enfants errent en groupes, dans les allées boueuses et nauséabondes du camp, les WC ne possédant aucun exutoire, leur trop plein se déverse à ciel ouvert.

11Le directeur régional de la famille attire pourtant l’attention du préfet sur la situation critique de ces enfants. Il lui propose de créer des dortoirs spécifiques afin de leur éviter des “promiscuités malsaines pour l’enfance”. Par manque de place ou par négligence, ces dispositions ne seront pas prises.

12Il est souvent question d’une école qui en fait ne sera ouverte qu’en octobre 1942, et restera réservée aux seuls enfants tsiganes. Jusqu’à cette date ce sont des internés qui assurent quelques cours dans un coin de baraquement. Une manière d’occuper les enfants, d’entretenir leurs connaissances en leur faisant réciter des règles de grammaire ou les tables de multiplication [7].

13Ces conditions de vie insupportables pour des enfants n’échappent pas aux associations communautaires juives. Sachant qu’il est difficile de libérer les adultes, elles vont tenter d’extraire de derrière les barbelés le plus de jeunes gens possible. Dès l’été 1941, le dispensaire “la mère et l’enfant”, le centre bien connu, de la “rue Amelot”, que dirige David Rapoport, envoie une assistante sociale Marcelle Valensi, visiter le camp de Poitiers. Les contacts lui sont facilités car en fait, elle possède la fonction plus officielle d’assistante sociale de la Croix-Rouge qui sert de couverture à la précédente [8].

14Elle contribue à améliorer l’ordinaire des internés par l’achat d’une nourriture de complément, comme par exemple des matières grasses ou des protéines. Elle les distribue elle-même lors de ses visites, les adresse directement aux intéressés le cas échéant, ou les fait parvenir par l’entremise du rabbin. En octobre 1941, elle organise avec ce dernier, la fête de Simhat-Thora qui marque la fin des célébrations religieuses du mois de Tichri. Ils en font une véritable fête des enfants avec chants, décors et un goûter copieux. Une journée émouvante qui redonne confiance “en la destinée des persécutés. C’est une adaptation merveilleuse aux nouvelles conditions de vie qui défie toute persécution”, écrit-elle à David Rapoport [9].

15Le domicile du rabbin Bloch lui sert de boîte aux lettres. Elle rencontre le directeur des affaires juives, le secrétaire général de la préfecture Hollweck, le directeur du camp de concentration Gilbert et l’infirmière Mme Chitz, ainsi que Mr Sabatier responsable du Secours National. Elle provoque des réunions de concertations destinées à trouver une solution pour extraire les enfants du camp. Elle semble déceler, parmi les membres de l’administration, une certaine compréhension.

16Le directeur du camp, très réticent, émet de fortes réserves afin de contrarier la libération des enfants, même lorsque leur mère se trouve à l’extérieur des barbelés. Après de longues discussions, tous finissent par s’accorder sur les modalités et le nombre de jeunes à extirper du camp. Les enfants peuvent être libérés s’ils sont accueillis dans des familles habitant Poitiers ou sa périphérie immédiate. Il est impossible d’en trouver une pour chacun d’entre eux, d’autant que dans chaque foyer où les ressources restent très modestes, cet hébergement supplémentaire représente une charge non négligeable.

17Outre ces questions de placement, il faut convaincre les mamans des plus petits de laisser sortir, sans elles, leurs enfants, et ce n’est pas une mince affaire. Malgré la force de persuasion de Marcelle Valensi, et toute l’autorité morale du rabbin Bloch, plusieurs mères se refusent à ce qu’elles considèrent comme un abandon.

18Finalement, une trentaine de places sont trouvées dans une maison d’enfants de Migné-Auxances, une petite commune distante de Poitiers de 7 kilomètres. En fait “La Sansonnerie” est une grande maison bourgeoise, dans laquelle Mr et Mme Roux accueillent des enfants en difficulté placés par les services sociaux de la région [10].

De difficiles libérations

19Les autres enfants, 36 en tout, sont hébergés dans des familles juives et non juives de Poitiers, Ligugé, Loudun, Mirebeau, Smarves, Neuville et Sanxay, moyennant une indemnité journalière de 10 francs qui couvre à peine les dépenses occasionnées.

20A “La Sansonnerie” les frais de pension sont bien plus élevés, 20 francs par jour et par enfant, avec la prise en charge du personnel supplémentaire nécessaire à leur encadrement. Pour cette raison le rabbin Bloch engage Régine Breidick, une jeune institutrice qui faute de poste, travaille comme secrétaire à l’usine Leclanché de Chasseneuil [11].

21Il faut beaucoup d’ingéniosité pour élaborer le financement d’une telle maison. Elie Bloch, qui est délégué de l’UGIF pour le Poitou, s’engage pour 5 000 francs, les services de la préfecture pour 8 000 à 9 000 francs et “la rue Amelot” pour le solde, environ 10 000 francs. De telles sommes permettraient d’accueillir deux fois plus d’enfants dans des familles. Aussi le home d’enfants de Migné-Auxances apparaît-il à tous comme une solution provisoire, dans l’attente de trouver de nouvelles familles d’accueil. D’ailleurs ils n’y resteront que jusqu’au 31 janvier 1942, date à laquelle ils seront à leur tour hébergés dans des familles [12].

22Du 24 au 28 novembre 1941, 66 enfants, âgés de moins de 14 ans, quittent “le camp de concentration des Nomades et des Juifs”, non sans être passés au préalable, à l’hôpital, pour être douchés et désinfectés avant qu’un médecin ne les examine. Régine Breidick se souvient que la plupart des enfants avaient les membres, et parfois le corps, couverts de grosses pustules infectées.

23En principe le 24 novembre les pensionnaires de la maison d’enfants sortent les premiers, suivis, selon la disponibilité des familles ou des transports, par leurs camarades. Le rabbin Bloch fait preuve d’une grande imagination pour loger tous ces jeunes. Certaines familles accueillent, pour le coucher, jusqu’à cinq enfants, qui se répartissent, dans la journée, dans d’autres familles, pour déjeuner ou dîner [13].

24Tous ces enfants fréquentent l’école de leur quartier ou de leur commune. Des circonstances exceptionnelles les amènent à changer parfois de domicile, il s’agit dans la plupart des cas, de l’arrestation des familles d’accueil lors des raffles qui précèdent les déportations. Il faut alors leur trouver, en catastrophe, de nouveaux hébergements qui deviennent, à partir du 18 juillet 1942, de plus en plus problématiques, justement en raison de la multiplication des déportations massives.

25Le père Fleury, l’aumônier des Nomades assure, grâce aux chrétiens qui l’entourent, et malgré les risques encourus, (il est formellement interdit de loger des enfants juifs), le concours de quelques familles non juives. Il semble bien que ce soit là le seul réseau organisé qui tout au long de la guerre ait apporté aux juifs du Poitou, aide et assistance. Par ces placements, de jeunes juifs se retrouveront à la campagne, gardant des moutons ou fabriquant du charbon de bois en forêt.

26Il faut également s’occuper des enfants d’Angoulême. Leurs familles raflées les 9 et 10 octobre 1942, enfermées dans la salle Philharmonique de la ville, seront déportées quelques jours plus tard. Aussitôt, l’œuvre du père Le Bideau leur offre l’hospitalité. Bien vite, certains grands enfants, incommodés par des pratiques religieuses trop contraignantes et parfois ambiguës, écriront au rabbin pour qu’il les retire de cette institution catholique. Plusieurs d’entre eux gagneront Poitiers [14].

27Parfois, faute de trouver un lieu d’hébergement, il ne reste plus au rabbin Bloch qu’à recueillir chez lui les enfants sans famille. Ainsi à la veille de son arrestation, le 11 février 1943, sept garçons et jeunes filles vivent à son domicile, 1 bis, rue des maillochons à Poitiers. Dans l’oratoire qu’il a installé à l’étage, il poursuit, contre vents et marées, l’instruction religieuse des jeunes gens dont il célèbre régulièrement la barmitswa[15].

Des libérations plus rares

28Sitôt les premières libérations obtenues, Marcelle Valensi tente d’arracher les plus de 14 ans de derrière les barbelés. Elle propose au préfet d’élargir les jeunes gens âgés de 14 à 18 ans, afin qu’ils suivent un enseignement professionnel. Elle lui soumet une liste de 27 noms. Les services de la préfecture se montrent hésitants, alors que le directeur du camp est franchement hostile à toute libération d’adolescents, craignant qu’ils ne franchissent la ligne de démarcation. Son avis finit par l’emporter, le préfet refusera la scolarisation et par voie de conséquence la libération des plus de 14 ans [16].

29Une autre tentative est entreprise par le rabbin Bloch. Muni de certificats d’embauche, établis souvent par des non juifs, il demande que quatre jeunes filles assurées de trouver un emploi puissent sortir du camp. Il présente une liste précise de personnes dont la naturalisation ancienne ne risque pas de soulever d’objections. Le préfet s’abritera, cette fois-ci, derrière le refus des autorités allemandes [17].

30Nous voilà arrivés en octobre 1942, les déportations se font de plus en plus fréquentes. L’inquiétude d’Elie Bloch est à son comble. Il intervient auprès de l’administration, et notamment auprès du préfet-délégué Holweck qui fut son professeur de lettres au collège de Barr. Il obtiendra finalement la libération de 10 personnes, dont 7 enfants le 14 octobre, la veille du cinquième transfert vers Drancy, et surtout la libération, le lendemain, de 19 enfants, alors que le même jour 231 Juifs prennent la direction de Drancy [18].

31De la sorte, 26 enfants échappent à une déportation immédiate. Avec le soutien du père Fleury ils seront placés dans de nouvelles familles de la région.

32Les pressions conjointes du rabbin et du curé s’intensifient, à tel point que l’intendant de police leur concède la libération de 11 enfants, âgés de 5 à 15 ans, en raison de leur nationalité française. A leur tour, ils sont accueillis dans des familles. Nous sommes le 12 novembre, jour du 6e transfert vers Drancy, de 91 internés du camp de concentration de Poitiers.

33Avec le temps qui s’écoule les libérations se font plus rares, au début de l’année 1943, seuls trois enfants sont autorisés, le 7 janvier, à quitter le camp, parce que “de nationalité française arrêtés avec leurs parents de nationalité étrangère”. Il s’agit de Benderski Raphaël, Bialek Henri et Ida, les derniers enfants libérés du camp [19].

34La position du rabbin Bloch devient plus délicate. L’administration de Vichy ainsi que la police allemande supportent de plus en plus difficilement ses interventions incessantes. En outre, elles redoutent l’autorité morale qu’il exerce sur les populations juives, devenues plus rares il est vrai, encore présentes dans le Poitou. Mais avant tout, elles appréhendent ses liens étroits avec les autres communautés, comme le démontrent ses relations privilégiées et chaleureuses avec le R.P. Fleury.

35Sous un prétexte quelconque, la Gestapo arrête sa femme le 22 janvier 1943, puis à son tour, il est interné le 11 février avec sa fille Myriam, âgée de 5 ans, dans le camp de concentration de la route de Limoges. Tous les trois sont transférés, par un train spécial, à Drancy le 24 février où ils séjourneront jusqu’au 17 décembre, date de leur voyage sans retour à Auschwitz [20].

36Grâce au courage opiniâtre d’Elie Bloch, en quatre vagues, 106 enfants ont été libérés du camp de concentration de Poitiers :

24/28 novembre 194166
8/9 octobre 194226
12 novembre 194211
7 janvier 19433

37Parmi ces 106 enfants, nous ne le rappellerons jamais suffisamment, nombreux sont ceux qui ont été hébergés par des familles non juives. Celles-ci, malgré les risques encourus, les Allemands interdisaient formellement aux non juifs d’accueillir des Juifs, ont accepté d’offrir aux enfants juifs libérés la chaleur d’un nouveau foyer. Nous devons relever que la plupart d’entre elles appartiennent aux milieux catholiques du Poitou que le père Fleury avait mobilisés pour ces circonstances exceptionnelles.

Sous la protection de l’UGIF

38Sur les conseils du rabbin, sa secrétaire Régine Breidick, est désignée, le 2 mars, pour le remplacer à la tête de la délégation poitevine de l’UGIF. En ce début d’année 1943, “le comité de la rue Amelot” de David Rapoport, étroitement surveillé, connaît de graves difficultés, ses dirigeants vont être bientôt arrêtés. Désormais, il appartient à “l’Union” de pourvoir pour l’essentiel aux secours destinés aux internés et à leurs enfants [21].

39A Poitiers, le 9e transfert vers Drancy se prépare. Les Allemands ordonnent de rassembler les enfants pour les placer dans les maisons gérées par l’UGIF, situées dans la région parisienne. Un choix qui semble satisfaire les familles et les responsables locaux, personne n’ose imaginer que ce placement pourrait un jour, se transformer en piège.

40Une liste de 70 enfants hébergés dans les familles du Poitou est dressée. Dès le 24 mai la police et la gendarmerie françaises les ramassent, pour les conduire au camp de concentration de la route de Limoges, d’où ils en avaient été extirpés, non sans peine, quelques mois auparavant. Certains d’entre eux, habitant des bourgs éloignés du chef-lieu, sont même enfermés, un ou deux jours, dans les commissariats locaux, comme c’est le cas à Châtellerault, avant de rejoindre la route de Limoges [22].

41La feldgendarmerie donne, à l’intendant de police, des instructions très strictes pour empêcher les enfants juifs de s’échapper “avant et pendant le transfert”. La gendarmerie française est chargée d’établir deux barrages, l’un à l’entrée du camp, l’autre à la gare de Poitiers. Une escorte de 10 hommes devra les convoyer jusqu’au moment, où ils seront remis aux responsables de “l’Union” qui les attendront en gare d’Austerlitz. Deux jeunes gens parviendront à s’évader du camp, ils sont aussitôt remplacés par deux autres que les gendarmes iront cueillir dans leur famille d’adoption.

42Le transfert est prévu le 26 mai. Dans ce même train 44 internés prennent place dans un wagon distinct, mais eux poursuivront leur route vers le camp de Drancy, et de là, vers le camp d’extermination d’Auschwitz. Parmi ces déportés se trouvent également 14 enfants, dont un bébé de… trois mois, Yahia Jacqueline née le 17 février à Poitiers, de nationalité française [23].

43Comme à l’accoutumée, le directeur du camp rend compte au préfet du bon déroulement de sa sinistre mission. Il nous apprend, avec une précision laconique, qu’au cours de la nuit du 26 mai 1943, “le transfert de 114 internés juifs commencé à 2 heures s’est terminé à 3 heures 40 sans incident”[24].

44Les 70 enfants destinés aux maisons de l’UGIF sont tous nés en France, 40 à Nancy, 22 à Metz, 7 dans les autres départements de l’Est, un seul est né à Paris. Ils possèdent tous la nationalité française, mais leurs parents sont généralement polonais.

45Ces enfants sont âgés de 4 ans à 16 ans. Les jeunes filles sont légèrement plus nombreuses, 37 pour 33 garçons, parmi elles se trouvent principalement les plus de 15 ans. La majorité des jeunes garçons – les deux tiers – est âgée de 10 à 15 ans, alors que la moitié des filles se situe entre 5 et 10 ans. De ce fait le tronc commun est occupé par les 10-15 ans.

46Ces différences d’âges expliquent dans une certaine mesure le placement futur dans les maisons d’enfants. S’ils arrivent tous rue Lamarck, les plus âgés sont placés à l’école de l’ORT de la rue des Rosiers afin de leur assurer une formation professionnelle, les plus jeunes au centre de La Varenne, les plus mal en point dans la maison de Louveciennes. La moitié de ces enfants demeure au centre Lamarck où vivent la plupart des 10-15 ans. Quelques exceptions à cette répartition, le maintien ensemble, chaque fois que cela est nécessaire, des frères et sœurs [25].

47De petits transferts sont opérés vers ces maisons en mai et juin 1943. Le 30 mai les enfants Vogel, Véra 12 ans, Joseph 10 ans et Rachel 9 ans, tous trois nés à Metz entrent rue Lamarck. Le 9 juin c’est au tour des jeunes Holz Jacques et Emmanuel, 10 ans et… 3 ans, nés à Nancy, de rejoindre leurs frères Joseph et Paul ainsi que leur soeur Myriam arrivés le 26 mai [26].

48De nouveaux transferts d’enfants se préparent. Le 23 juillet, 11 garçons et filles, raflés dans les communes du Poitou par la gendarmerie française, sont internés dans le camp de concentration de Poitiers, deux autres les rejoindront le lendemain.

49Parmi ces 13 enfants, certains sont nés dans la région où leurs parents ont été évacués dans les débuts de la guerre. La petite Kalinsky Sylvia est née le 29 septembre 1939 à Sanxay, dans la Vienne et la toute jeune Hochberg Monique le 15 janvier 1941 à Mouthiers, en Charente. La plupart des autres enfants sont originaires de Nancy, un seul de Metz et un dernier de Belfort. Les 14-16 ans forment la moitié de ce groupe, parmi lequel nous relevons la présence de tout jeunes bambins [27].

50Initialement ces enfants devaient être transférés dans les maison de l’UGIF vers le 24 juillet. Pour des raisons qui nous échappent, peutêtre par manque de moyens de transport, ils séjourneront au camp jusqu’au 19 août. Finalement la feldkommandantur ordonne au préfet leur transfert d’urgence. Ce dernier conseille aux gendarmes “pour éviter que les enfants ne s’échappent de garder le secret et de procéder rapidement au transfèrement”[28].

51Le 19 août 1943, “à 14 h 30”, ces 13 jeunes juifs, entourés d’un fort dispositif de gendarmerie, montent dans un wagon à bestiaux, sans provoquer “d’incident”. La plupart séjourneront au centre Lamarck, les grandes filles seront placées rue Vauquelin, et la plus jeune, âgée de 2 ans, à la pouponnière de Neuilly.

52Il s’agit là du dernier transfert d’enfants. Ainsi, sur les 106 jeunes qui ont pu être arrachés du camp de concentration de la route de Limoges, 88 d’entre eux se retrouvent désormais sous la protection de l’UGIF. Pourquoi ne pas l’avouer dès à présent, c’est par miracle que les 18 restant seront “oubliés” dans leurs familles d’accueil. L’une de ces dernières, souhaitant assurer à sa pensionnaire une sauvegarde plus efficace, décide, à la veille d’un transfert de convertir en grand secret la jeune Paulette en l’église Saint-Porchaire de Poitiers. Dès que le père Fleury est informé de cette conversion, il entre dans une grande colère, et s’en prend vivement à la famille coupable d’un acte qu’il juge indigne [29].

53Placés dans les centres d’accueil de l’UGIF, les enfants fréquentent, en raison de l’interdiction faite aux Juifs, des écoles ou lycées dont les classes ne sont assurées que par des enseignants juifs. Le jeune Goldner qui n’est pas autorisé à suivre les cours du lycée Ledru-Rollin, devenu aujourd’hui Jacques Decour, fait son entrée en 6e au centre de la rue Secrétan.

54A l’école de l’ORT les jeunes gens reçoivent une double formation. Le matin ils se rendent rue Claude Bernard où est assuré l’enseignement général, l’après-midi reste réservé, rue des Rosiers à la formation professionnelle. A midi les repas sont pris au centre de la rue Vauquelin. Inscrit en section menuiserie, Robert Frank pratique chaque jour ce périple, dans un Paris occupé.

55Quelques grandes filles, faute sans doute de formation adaptée, participent dans les centres au tâches domestiques essentielles. Une fois installée rue Vauquelin, Annette Ciechanowski, ne fréquente plus l’école de la rue Secrétan, assez éloignée de cette maison d’enfants [30].

56Tous ces mouvements sont étroitement contrôlés par la Gestapo qui vérifie régulièrement les listes des pensionnaires. Toutefois les jeunes gens, qui ont la chance de posséder encore quelque famille dans Paris, sont autorisés, le dimanche, à quitter leur centre. Charles Goldner rend visite chaque semaine à son oncle qui habite le boulevard Saint-Marcel, de même Michel Gluba à sa tante Lippe.

57Cette vie en apparence paisible est chargée de menaces. Les Allemands qui rencontrent de nombreux revers militaires se montrent nerveux. Ils se plaignent également de la lenteur du déroulement, en France, de la “solution finale”. Dès le début de l’année 1944 des responsables de centres tentent de mettre à l’abri, les enfants, en les sortant des circuits de l’UGIF. C’est ainsi que Robert Frank et les frères Amzel, David et Léon, seront pris en charge par “l’Entraide Temporaire”, une association multiconfessionnelle de la capitale.

58Le sauvetage de Charles Goldner est assuré par le CIMADE alerté par son père interné au camp de La Meyze, en Haute-Vienne. Pendant quelques jours, il est caché dans Paris par une famille protestante, il est dirigé par la suite, vers la maison de l’OSE du “Mas Golier” dans la Creuse. De là, une filière le conduit vers la Suisse, où il séjourna un an chez des Protestants du canton de Thurgovie, prés du lac de Constance.

59Michel et Sarah Gluba, ainsi que Félicia et Toptia Barbanel sont extraits de leurs centres grâce à des initiatives familiales. Les premiers quittent Paris avec leur tante, pour se réfugier dans le Périgord, où ils resteront reclus jusqu’à la fin de la guerre. Les secondes sont sauvées par leur père, résistant de la région de Toulouse, qui les conduits à Chalus, en Haute-Vienne, chez une cousine. Ensuite, grâce à une filière de l’OSE, elles se réfugient en Corèze, dans un pensionnat tenu par des religieuses, d’où l’aînée Félicia est placée dans une famille de Châteauroux, où elle demeure jusqu’à la fin de la guerre [31].

Plus de 500 enfants assassinés

60Vers le milieu de l’année 1944, les maisons de l’UGIF regroupent dans Paris environ 350 enfants. Le chef SS Brünner, convaincu d’une retraite prochaine de l’armée allemande, décide de les déporter. Plusieurs rafles sont organisées du 21 au 25 juillet 1944. Le 31 de ce même mois, 200 enfants sont internés à Drancy. Succédant à leurs parents ou à leurs frères et sœurs, ils partent à leur tour, pour un voyage sans retour. C’est le convoi n° 77, le dernier qui quitte Drancy et parvient à Auschwitz.

61Parmi les 70 enfants de Poitiers entrés rue Lamarck le 26 mai 1943, 43 font partie de ce convoi. Sur les 13 enfants transférés le 19 août, 10 sont de ce “voyage sans retour”. Du premier, seule survivra Nadel Eva, âgée de 16 ans. Du second un seul en échappera, Albert Roweck un garçon de 8 ans. Les deux frères Holz, arrivés à Paris le 9 juin, connaîtront le même sort que leurs aînés. Comme leurs parents, les cinq enfants périssent à Auschwitz, le plus jeune Emmanuel vient de fêter ses 5 ans.

62Rappelons l’aventure exceptionnelle de Spiegel Gérard. Son père étant prisonnier français dans des stalags allemands, par mesure de faveur il ne sera pas déporté à Auschwitz, mais à… Buchenwald. Malgré ses 9 ans, il survivra miraculeusement aux horreurs de ce camp de la mort [32].

63Sur les 88 enfants de Poitiers placés dans les maisons de l’UGIF, 53 sont assassinés à Auschwitz. Mais hélas ce bilan n’est pas clos. Il nous faut inventorier tous les enfants emportés dans les 12 transferts qui conduisent les internés du camp de Poitiers vers Drancy pour périr dans la Shoah.

64Bien qu’à cette époque l’âge légal de la majorité reste fixé à 21 ans, nous n’avons retenu pour notre tableau, que les jeunes au-dessous de 18 ans, estimant pour notre part, qu’au-delà il s’agit davantage d’adultes. Dans ce tableau nous vous présentons les dates de ces différents transferts, avec dans chacun d’entre eux, par tranches d’âges, le nombre d’enfants déportés [33].

65Transfert après transfert, 1596 Juifs sont déportés du camp de concentration de Poitiers vers Drancy d’abord, puis ensuite vers Auschwitz où ils sont assassinés. Parmi eux se trouvent 450 enfants. Un cinquième d’entre eux sont encore des bébés ! Plus de la moitié n’a pas atteint l’âge de 15 ans. A ces enfants martyrs s’ajoutent les 53 jeunes du dernier convoi, celui du 31 juillet 1944, ce qui porte à 503 les enfants de Poitiers victimes des nazis et du gouvernement de Vichy.

66Le bilan de “la destruction des Juifs” du Poitou demeure très lourd. Au total 1 649 personnes, évacuées ou réfugiées dans cette région, ont été déportées, bien peu en sont revenues. En juillet 1942, peu de temps avant le départ du premier train vers Drancy, la région administrative de l’époque, le Poitou-Charentes-Vendée compte 2 481 Juifs. Ainsi près des deux tiers ont été déportés à partir du camp de concentration de Poitiers.

figure im2

67D’autres déportations sont effectuées directement d’Angoulême. Des wagons venus de cette ville sont accrochés à ceux qui transportent les internés de Poitiers. Le 15 octobre 1942, 396 Juifs arrêtés dans la capitale des Valois, sont transférés de la sorte.

68Plus de 2 000 Juifs périssent dans la Shoah. Ce qui représente 80 % des Juifs assignés à résidence dans cette région. La “destruction des Juifs” du Poitou, plus forte que dans le reste de la France, s’explique par au moins trois raisons. L’étroite collaboration entre le préfet Bourgain et la Gestapo constitue le moteur essentiel de ce terrible bilan. Viennent ensuite deux facteurs qui s’interfèrent. Dans cette région où les Juifs sont pratiquement absents depuis Philippe-Auguste, des réseaux de sympathie active n’ont pu se constituer comme ce fut le cas ailleurs, et c’est bien souvent dans l’indifférence générale que sont opérés les 12 transferts de déportés. Ce qui ne donne que plus de mérite au père Fleury et à ses amis, ces “Justes des Nations” [34].


Date de mise en ligne : 03/01/2021

Notes

  • [1]
    Le recensement d’octobre 1940 indique la date d’entrée en France et parfois d’installation dans la région. Nous avons pu relever de la sorte les plus anciennes familles juives vivant à Poitiers. Voir aussi l’annuaire des communautés juives de France, p.221, édition 1994-1995.
  • [2]
    Consistoire Central Israëlite de Paris, plusieurs échanges de correspondances entre Elie Bloch d’une part, et, le secrétaire général du consistoire, les Grands Rabbins Weil et Netter d’autre part, nous informent des conditions de cette évacuation de Metz à Poitiers.
  • [3]
    Archives Départementales de la Vienne, 104W40, état des Juifs présents dans le département établi par la préfecture de la Vienne, au 20 octobre 1940, ainsi que plusieurs documents concernant les évacués de la Gironde.
  • [4]
    ADV 104W32 et ADV 104W40, réquisition de terrains pour la construction du centre d’internement des Espagnols et lettre du préfet de la Vienne à l’inspection départemental de l’hygiène lui annonçant l’arrivée des Nomades.
  • [5]
    Ces dénominations sont utilisées dans les entêtes de lettres du camp, du début 1941 jusqu’à la fin de 1943. Nous les retrouvons dans les tampons désignant les différents services, l’infirmerie ou la censure par exemple, toujours précédés par la désignation de “camp de concentration”. Dans la correspondance du préfet, soit au directeur de ce camp, ou soit à la feldkommandantur, il est le plus souvent question du “camp de concentration”, même si de temps à autre il est appelé “camp de la route de Limoges”. Il s’agit bien d’un camp de concentration, rouage essentiel dans la déportation des Juifs du Poitou, avant leur extermination. Nous retrouvons là, le processus décrit par Raul Hilberg dans La Destruction des Juifs d’Europe. A sa création en 1939, camp d’internement pour les Espagnols, il devient au début de 1944, centre de séjour surveillé, les politiques et les droits communs sont désormais les plus nombreux dans le camp.
  • [6]
    ADV 104W6, rapport du rabbin Bloch au préfet de la Vienne, du 4 août 1941. Nous retrouvons également ce document bien connu dans les archives du YIVO.
  • [7]
    ADV 104W6 et 104W32, ainsi que les témoignages de Jean-Louis Bauer, Félicie Barbanel-Combaud, Michel Gluba et le père Fleury.
  • [8]
    CDJC-YIVO-Folder 24, échange de correspondance entre l’infirmière du camp madame Chitz et Marcelle Valensi.
  • [9]
    CDJC-YIVO-Folder 24, un rapport non daté de Marcelle Valensi, adressé de Poitiers, à David Rapoport. D’après son contenu, il a dû être rédigé en octobre 1941. La correspondance de Marcelle Valensi, très intéressante, n’est hélas souvent pas datée.
  • [10]
    CDJC-YIVO-Folder 24.
  • [11]
    Entretien avec Régine Breidick, devenue Rivka Dimant, Israël, août 1995.
  • [12]
    CDJC-YIVO-Folder 24, et Archives Centrales de l’Histoire du Peuple Juif de Jérusalem. Marcelle Valensi pousse le rabbin à retirer les enfants de cette maison, dont plusieurs rapports du service départemental d’hygiène souligne les carences dans ce domaine.
  • [13]
    Entretien avec David Amzel (Dan Amit).
  • [14]
    CDJC YIVO-Folder 17/56, lettre du secrétaire général de l’UGIF demandant au rabbin Bloch de s’intéresser au sort des enfants d’Angoulême, et témoignage de Robert Frank.
  • [15]
    Entretiens avec Charlotte Rosenbaum et Michel Gluba.
  • [16]
    ADV 104W2, lettre du préfet Bourgain au rabbin Bloch du 18 février 1942.
  • [17]
    ADV 104W38, échange de correspondance entre le rabbin et le préfet, puis entre ce dernier et la feldkommandantur. La réponse négative des Allemands est rendue cinq mois après les premières démarches entreprises par Elie Bloch.
  • [18]
    ADV 104W1, rapport du directeur du camp au préfet de la Vienne.
  • [19]
    ADV 104W38 et 104W1, liste des personnes libérées et correspondance de la feldkommandantur. Régine Breidick doit signer un bon de prise en charge et engager sa responsabilité personnelle.
  • [20]
    CCIP, les principaux dirigeants de l’UGIF, comme André Baur sont arrêtés et internés à Drancy. Les nombreuses interventions destinées à les libérer ne font que retarder leurs déportations vers Auschwitz. Pour cette raison Elie Bloch et sa famille resteront dix mois dans le camp de Drancy.
  • [21]
    CCIP.
  • [22]
    ADV 104W38, télégrammes envoyés au préfet de police de Paris et au directeur du camp de Drancy par le préfet de la Vienne. Témoignage de Charles Goldner.
  • [23]
    Dans ce transfert se trouvent d’autres bébés comme par exemple, Dembicer Jacques âgé de 5 mois, de nationalité française.
  • [24]
    ADV 104W38, liste des déportés du 26 mai 1943, avec leurs date et lieu de naissance.
  • [25]
    Serge Klarsfeld dans “Le calendrier des persécutions des Juifs de France”, présente la répartition des enfants dans les maisons de l’UGIF. Plusieurs témoignages recueillis auprès des personnes déjà citées.
  • [26]
    CDJC-YIVO-Folder 62.
  • [27]
    ADV 104W38, plusieurs correspondances sur l’internement des enfants et leur transfert à Paris entre la préfecture et la feldkommandantur de Poitiers.
  • [28]
    ADV 104W38, lettre adressée par le préfet au commandant de la gendarmerie de la Vienne, la veille du transfert des enfants.
  • [29]
    Témoignage de Paulette Hamersfeld.
  • [30]
    Témoignage d’Annette Ciechanowski.
  • [31]
    Témoignages de ces différentes personnes, recueillis au cours de l’année 1995, à Paris.
  • [32]
    Témoignage de Gérard Spiegel, Israël, août 1995.
  • [33]
    Paul Lévy, Un camp de concentration français : Poitiers 1939-1945, p.265, Paris, Sédes, 1995.
  • [34]
    Une dizaine de ces Justes poitevins ont été invités par l’Etat d’Israël à planter un arbre au mémorial de Yad Vachem. Celui du père Fleury se trouve, dès l’entrée, dans l’allée centrale.

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