Notes
- (*)
- (1)La Lorraine fut rattachée au Reich en novembre 1940 ; elle a formé avec la Sarre le Gau Westmark. Revue d’Histoire de la IIe Guerre mondiale n° 54 (1964), p. 10. Numéro spécial. Archives du C.D.J.C. (Paris), DXV-553.
- (2)P.G. Fascina, « Problème de l’étude du camp de Bergen-Belsen », Revue d’Histoire de la IIe Guerre mondiale n° 45, janvier 1962, p. 8.
- (3)Vittel (environ 4.000 habitants) est un chef-lieu de la commune de l’arrondissement de Neufchâteau sur le Petit-Vair (dans les Vosges).
- (4)Catalogue of Camps, Prisons in Germany occupied Territories, International Tracing Service, AROLSEN, 1949, p. 58.
- (5)Journal de Mary Berg. Le Ghetto de Varsovie. Recueilli par S.L. Schneiderman. Traduit par L. Baillon de Vailly. Editions Albin Michel, Paris, 1947, pp. 245-250 ; Ber Baskind, La Grande épouvante. Souvenirs d’un rescapé du ghetto de Varsovie. Traduits et adaptés par E. Brunet-Beresovski. Editions Calman-Lévy, Paris, 1945, pp. 126 et s.
- (6)Ibidem.
- (7)Le Journal tenu à Vittel par le poète Itzhak Katzenelson (Vittel Diary) est presque entièrement consacré à l’histoire dramatique du ghetto de Varsovie ; Le Journal de Mary Berg est en majeure partie consacré au même sujet.
- (8)Archives du Centre de Documentation Juive Contemporaine à Paris (par la suite : C.D.J.C.), XLVIa-56. Lettre de Brunner du 13 avril 1944.
- (9)Arch. C.D.J.C., X-62. Lettre de J.E. Schwarzenberg (du Comité international de la Croix-Rouge) (C.I.C.R.) à Genève du 24 février 1944 ; Arch. C.D.J.C., CC-65. Récit de Léon Schneersohn ; Nathan Eck, The Rescue of Jews With the Aid of Passeports and Citizenship Papers of Latin American States, publié dans Y ad Washem Studies 1, Jérusalem, 1957, p. 128.
A New York, le prix des « papiers sud-américains » était de 200 à 300 dollars.
(9a) Journal de Mary Berg, op. cit., pp. 175-185. - (10)N. Eck, op. cit., pp. 128, 144 et 145.
- (11)Arch. C.D.J.C., CCXIV-53. La lettre est signée aussi par les victimes des agissements malhonnêtes du consul cubain à Nice. M” J. Lubetzki agissait au nom de M. Jarblum, président de la Fédération des sociétés juives en France (dans la clandestinité).
- (12)N. Eck, op. cit., pp. 129 et 130 ; P.G. Fascina, op. cit., p. 22 ; Journal de Mary Berg, op. cit., pp. 175-185 et p. 236.
- (13)Le transport du 18 janvier 1943 n’était pas le premier à quitter la prison de Pawiak pour l’étranger. Des groupes d’étrangers avaient déjà été expédiés aux camps de Tittmoning et de Liebenau en Allemagne.
- (14)B. Baskind, op. cit., p. 108.
- (15)L’auteur était avant la guerre chef des Archives de la Communauté cultuelle juive à Varsovie, puis du Judenrat à Varsovie.
- (16)Hilel Zajdman, Le Journal du ghetto de Varsovie (yiddish), Buenos-Aires, 1947, p. 195.
L’auteur est ensuite parti, lui-même, à Vittel, en tant que sujet sud-américain. Il est l’un des rares survivants de Vittel. - (17)Ibidem, pp. 167-170.
- (18)Ibidem.
- (19)Procès Eichmann, doc. n° 1.164; audience n° 33 du 9 mai 1941 (copie aux Arch. C.D.J.C. à Paris) ; P.G. Fascina, op. cit., pp. 9 et 10, 38. Lettre en date du 5 mai 1943, signé Dr. Harter, S.S.-Brigadeführer et général-major de la police aux Pays-Bas ; Eberhard Kolb, Bergen-Belsen (1939-1945), Hanovre, 1962, pp. 49 et 50.
- (20)Procès Eichmann, doc. n° 1.592 ; Arch. C.D.J.C., DXXVI-1952. Note au dossier en date du 12 juin 1943.
- (21)
- (22)Arch. C.D.J.C., XLVI-XLVIa. Chemise G. ; Röthke demande des indications plus détaillées pour re trouver Gollob. Le 20 octobre 1943, Günther (R.S.H.A.) câble qu’il n’a pas d’autres informations, mais, si on le retrouve d’une quelconkue façon, il faut le déporter aussitôt à Auschwitz.
Voir aussi le Procès Eichmann, doc. n° 665, et le sténogramme de l’audience n° 33 du 9 mai 1961. - (23)Ernst Moes, fonctionnaire du Service IVB4 au R.S.H.A. (Berlin).
- (24)Procès Eichmann, doc. n° 611 ; Arch. C.D.J.C., DXV-611. Lettre du 8 avril 1944.
- (25)Arch. C.D.J.C., LIX-26. Télégramme n° 2358. Pour information : « Aux commandants de la Sipo/SD à Cracovie et à Paris ». Dans la note manuscrite figurant sur le télégramme, Röthke demande de lui communiquer le nombre de Juifs sud-américains au camp de Drancy.
- (26)Arch. C.D.J.C., XLIX-26. Télégramme n° 56185.
- (27)N. Eck, op. cit., p. 146 ; E. Kolb, op. cit., pp. 49 et 50.
- (28)Itzhak Katzenelson, Vittel Diary, Kibboutz Lohamei Haghetaoth, 1964, pp. 26 et 43.
- (29)B. Baskind, op. cit., pp. 119, 120 et 123.
- (30)Archives du Ministère des Anciens combattants et victimes de guerre à Paris (par la suite : Arch. M.A.C.), L-A ; n° 9085 - n° 9086 ; Arch. C.D.J.C., DLIX-I.
- (31)Le Journal de Mary Berg, op. cit., p. 250.
- (32)Arch. C.D.J.C., LXIX-17. Télégramme n° 48630 de Werner et télégramme n° 24085 de Rothke du 4 août 1943.
- (33)Arch. C.D.J.C., XLVI-56. Télégramme de Brunner au R.S.H.A.-IV B4 du 13 avril 1944.
- (34)Ibidem : Le Journal de Mary Berg, op. cit., pp. 255 et 265.
- (35)Le Journal de Mary Berg, op. cit., p. 266; I. Szmulewicz, Le Chemin de souffrance d’un savant juif (yiddish), Forward (New York) du 31 mai 1976.
- (36)B. Baskind, op. cit., p. 125. Ils sont partis de Varsovie le 11 novembre 1943. C’était M. Kenigel, connu pour sa collaboration avec la Gestapo de Varsovie.
- (37)A. Poirmeur, Compiègne (1939-1945), chez l’auteur, Compiègne, 1948, p. 136.
- (38)Journal de Mary Berg, op. cit., p. 274 ; Arch. C.D.J.C., DXV-553. Procès Eichmann ; B. Baskind, op. cit., p. 128.
- (39)Ministère de la Santé et de la Famille de Belgique. Liste alphabétique des personnes arrêtées par l’autorité occupante en tant qu’Israélites et Tziganes et déportées par les convois du camp de rassemblement de Malines entre le 4 août 1943 et le 31 juillet 1944.
- (40)Arch. C.D.J.C., X-59. Rapport de R.A. Haccius (du Comité international de la Croix-Rouge) en date du 23 décembre 1943. Le rapport est basé entre autres sur le témoignage de Benjamin Grad, citoyen britannique, rapatrié du camp de Vittel.
- (41)Jonas Turkow, La fin des illusions (yiddish), Hamenorah, Tel-Aviv, 1973 ; Jonas Turkow, « Unzer Wort » (Paris), n° 65 du 17 mars 1973 (yiddish).
- (42)La femme du poète, Benzikel et Benjamin étaient ses fils aînés. Ils sont tous morts à Treblinka (en été 1942 et au printemps 1943).
- (43)I. Katzenelson, Vittel Diary, op. cit., pp. 43-48.
- (44)Jehudit Kalman, Avec Itzhak Katzenelson dans un camp (yiddish), « Parizer Zeitschrift » (Paris), n° 9 (1955), pp. 130 et 131.
- (45)I. Katzenelson, Vittel Diary, op. cit., pp. 28-31, 37 et 39.
- (46)M. Neustadt, L’Extermination et l’insurrection des Juifs de Varsovie (yiddish), Tel-Aviv, 1948, pp. 628 et 629. Reproduction photographique de la carte postale.
- (47)Journal de Mary Berg, op. cit., p. 273. Les ressortissants de Palestine étaient considérés comme Britanniques.
- (48)Adam Rutkowski, « Déportation des Juifs de France vers Auschwitz-Birkenau et Sobibor », Le Monde Juif (Paris), n° 57-58 (1970), p. 72 ; Liste de déportation n° 72 (n° 411) aux Archives du C.D.J.C. à Paris.
Au camp de Drancy, Itzhak Katzenelson avait le numéro matricule 20204; Hefte von Auschwitz n° 7, p. 92. Chronique des événements rédigée par Danuta Czech ; I. Szmulewicz, op. cit. - (49)Arch. C.D.J.C., XLIX-26. Télégramme n° 56185. Brunner évalue à cent cinquante environ le nombre de Juifs de Varsovie ; J. Turkow, op. cit.
- (50)P.G. Fascina, op. cit., pp. 23 et 24.
- (51)J. Turkow, op. cit.
- (52)N. Eck, op. cit., pp. 147 et 148.
- (53)Arch. C.D.J.C., CDLXIX-60. Télégramme de Barou et Easterman (Londres) à Goldmann et Tartakower (New York) du 7 avril 1944.
A.L. Kubowitzki-Kulbovy (1896-1966) était, pendant la IIe Guerre mondiale, secrétaire général du Congrès Juif Mondial, dont le siège était à New York. Le Dr. N. Goldmann (né en 1895) était le président du Congrès, Easterman, Noah Barou (1889-1955), le Dr. Arie Tartakower (né en 1897) en étaient les chefs. Le Dr. Ignacy (Isaac) Schwarzbart (1888-1961) était alors membre du gouvernement polonais en exil à Londres (1940-1945). - (54)Arch. C.D.J.C., CDLXIX-60b. Télégramme de Kubowitzki aux Barou et Easterman.
- (55)Arch. C.D.J.C., CDLXIX-60a. Télégramme de Kubowitzki à Easterman du 24 avril 1944.
- (56)Arch. C.D.J.C., X-60. Lettre du 30 décembre 1943.
Mme Sternbuch a fait part à M. Schwarzenberg de la bienveillance avec laquelle le nonce apostolique à Berne, Mgr Bernardini, suivait l’affaire des internés juifs de Vittel, et lui a fait comprendre que le nonce attendait une lettre à ce sujet. - (57)Arch. C.D.J.C., X-60a. Copie de la lettre (en italien) du 6 janvier 1944.
- (58)Arch. C.D.J.C., 60 b. Copie dactylographie de la lettre de J.E. Schwarzenberg à Mgr Ph. Bernardini du 14 janvier 1944.
La copie de la liste nominative des internés dont il est question ne s’est pas conservée dans les archives du C.D.J.C. à Paris. - (59)Arch. C.D.J.C., X-60c. Copie dactylographiée de la note (en allemand) de Hans Bachmann, secrétaire général du Comité international de la Croix-Rouge, pour Hartmann du 17 janvier 1944.
- (60)Arch. C.D.J.C., X-61. Lettre de Hartmann à Bachmann.
- (61)Arch. C.D.J.C., X-60d et 60e. Copies des lettres.
- (62)Arch. C.D.J.C., X-60f. Copie.
- (63)Arch. C.D.J.C., X-60g.
- (64)Arch. C.D.J.C., 60h. Lettre du nonce apostolique Bernardini au président du Comité international de la Croix-Rouge à Genève.
- (65)J. Turkow, op. cit. Il paraît que ces certificats sont arrivés à Vittel mais trop tard, après le départ des internés de Vittel.
- (66)N. Eck, op. cit., p. 150.
- (67)P.G. Fascina, op. cit., p. 22, note I ; N. Eck, op. cit., p. 51.
- (68)Arch. C.D.J.C., Doc. CCI-65.
Le mémorandum était soumis environ une semaine avant le départ du premier convoi de Vittel vers Auschwitz via Drancy. - (69)La Persécution raciale dans la série « Crimes ennemis en France », Documents pour servir à l’histoire de la guerre, Service d’Information des crimes de guerre, Office français d’édition, enquête menée par Roger Berg, Paris, 1945, pages 154 ; I. Katzenelson, Vittel Diary, op. cit., p. 38 ; N. Eck, op. cit., p. 149.
- (70)Arch. C.D.J.C., Liste de déportation n° 72 du 29 avril 1944. I. Katzenelson figure sur cette liste nominative sous le n° 411 ; Hefte von Auschwitz (Oswiencim, Pologne), n° 7 (1964), p. 91.
- (71)La Persécution raciale, op. cit., p. 154.
- (72)J. Turkow, op. cit. ; P.G. Fascina, op. cit., pp. 22 et 23 ; N. Eck, op. cit., p. 151.
Le Dr. Nathan Eck et le Dr. Hilel Zajdman ont survécu, le premier est en Israël, l’autre aux Etats-Unis. - (73)Arch. C.D.J.C., CC-65.
- (74)N. Eck, op. cit., p. 150.
- (75)E. Kolb, op. cit., p. 92.
- (76)N. Eck, op. cit., p. 152 ; l’Espagne était la puissance protectrice des citoyens du Paraguay, la Suisse, de ressortissants nord-américains et britanniques.
- (77)Ibidem ; Vittel Diary de Itzhak Katzenelson, op. cit., p. 40.
- (78)Arch. C.D.J.C., doc. X-63. Copie.
- (1)E. Kolb, Bergen-Belsen (1939-1945), op. cit., pp. 88-91.
- (2)Arch. CDJC, LXXV-229, 229 a, b, c, d et e. Lettre de Delcker à Landhäuser du 30 janvier 1942 et lettres-rapports de Landhàuser des 13 et 15 février 1942. Ces rapports comprennent des listes nominatives de femmes sujettes britanniques internées à Vittel.
- (3)Rijksinstitut voor Oorlogsdocumentatie, Amsterdam (par la suite RvO) 174 c : Eberhard Kolb, Bergen-Belsen (1939-1945), Hanovre, 1962, p. 91.
- (4)Ibidem. Les critères de la sélection sont inconnus, mais il est pourtant évident que les Allemands n’ont pas voulu sélectionner des hommes en âge de porter des armes.
1Les autorités nazies ont créé en Allemagne et dans les pays occupés une multitude de camps de toutes sortes : camps d’extermination, camps de concentration, camps de travail forcé, camps disciplinaires de travail, camps de transit, camps de rassemblement, camps d’internés civils, camps pour adolescents et enfants, camps de rééducation, etc., sans parler des camps de prisonniers de guerre. Le camp de Vittel ne fait pas partie de ce catalogue des camps nazis. Il n’était pas un camp comme les autres.
2Le camp de Vittel et quelques autres camps comme Bergen-Belsen (près de Hanovre), Tittmoning (Bavière), Liebenau, Biberach et Saint-Denis (temporairement) avaient à jouer un rôle spécial dans le système concentrationnaire nazi. Ils étaient des camps d’internement des ressortissants de puissances belligérantes ; leurs effectifs devaient servir de monnaie d’échange contre des détenus civils allemands dans ces pays. Tous ces camps (à l’exception du camp provisoire à Saint-Denis) étaient situés en Allemagne, soit dans les territoires annexés à l’Allemagne pendant la Seconde Guerre Mondiale [1].
3On est frappé par la diversité des noms que ces camps ont reçu : « camp d’échange » (Austauchlager), « camp d’internement civil » (Zivilinternierungslager), « camp de séjour » (Aufenthaltslager), « camp de repos » (ou de convalescence » (Ruhe oder Erholungslager). Les appellations officielles sont d’ailleurs parfois — pour ne pas dire le plus souvent — trompeuses, et ce « pour des raisons tactiques ». Il est donc nécessaire d’établir pour chaque camp nazi son caractère réel en faisant abstraction de sa dénomination officielle actuelle. Voici une pièce à conviction : la circulaire de l’Office central de l’économie et de l’administration des S.S. (Wirtschafsverwaltungshauptamt, W.V.H.A.) du 29 juin 1943. « Pour des raisons tactiques (aus taktischen Gründen) la désignation du camp d’internement civil Bergen-Belsen devra faire place à la désignation de « Camp de séjour Bergen-Belsen » (Aufenthaltlager). » « Cette modification est nécessaire, les camps d’internement civil devant être accessibles, conformément à la Convention de Genève, aux visites de commissions internationales » [2]. Signalons qu’il s’agit en l’occurrence d’un camp d’échanges comme celui de Vittel.
4Le statut des internés dans ces camps d’échanges était évidemment différent (meilleur) de celui dans tous les autres camps nazis.
I. Création du camp d’échanges à Vittel (France)
5Le camp de Vittel a été créé dans une importante station thermale de la même dénomination, dans les Vosges, près de Nancy (à une demi-heure de trajet) [3]. Son appellation officielle allemande était : « Interniertenlager(Ilag) Vittel - Front Stalag 194 » [4].
6Le camp a été constitué par les autorités allemandes dans la deuxième moitié de l’année 1940. Au début, il n’y avait que des internés britanniques. Ils avaient été internés au lendemain de l’armistice avec la France (25 juin 1940). On les avait ensuite mis dans les casernes de Besançon, puis en 1942 on les avait transférés au camp de Vittel, d’où provient peut-être l’appellation initiale de « Front - Stalag 194 ».
7Au contraire de tous les camps nazis, le camp de Vittel n’était pas constitué de baraquements ; il comportait quelques hôtels de luxe, à savoir : l’Hôtel Central (appelé également Grand Hôtel), l’Hôtel de la Source, Le Continental, le Vittel-Palace, l’Hôtel de la Providence et le Cérès, le Nouvel Hôtel, le Beau Site. Le Grand Hôtel, le Vittel-Palace et le Cérès communiquaient entre eux, formant l’un des secteurs du camp, un énorme « bloc » situé dans un parc. Le parc était entouré d’une triple rangée de barbelés. A l’extérieur de cette enceinte, des sentinelles allemandes montaient la garde vingt-quatre heures sur vingt-quatre.
8Les hôtels Vittel-Palace, de la Source et Cérès étaient occupés (fin janvier 1943) par environ deux mille Britanniques. Le Grand Hôtel qui se trouvait de l’autre côté du camp était réservé aux citoyens des Etats-Unis d’Amérique du Nord. Les premiers internés nord-américains y sont arrivés en 1942. En janvier 1943, ils étaient encore peu nombreux. C’étaient pour la plupart des femmes dont les maris étaient internés au camp de Compiègne. Le premier convoi d’Américains de l’étranger est arrivé le 25 janvier 1943. C’étaient des Juifs de Pologne (hommes, femmes et enfants) ayant la citoyenneté des Etats-Unis.
9Le Nouvel-Hôtel qui était ouvert le 1er mars 1943, était destiné aux familles. On attendait en effet les hommes internés au camp de Tittmoning (en Allemagne) qui devaient rejoindre leurs femmes et leurs enfants.
10Les internés nord-américains et britanniques étaient des non-Juifs et des Juifs. Parmi ces ressortissants il y avait beaucoup d’internés qui ne parlaient pas l’anglais. Ils étaient bien nés en Angleterre ou dans un pays de l’Empire britannique, ou aux Etats-Unis, mais venus en France ou dans un autre pays occupé tout enfants, ils ne parlaient pas l’anglais.
11L’Hôtel de la Providence était réservé aux ressortissants sud-américains qui étaient à vrai dire des Juifs polonais, hollandais, belges, etc., détenteurs de passeports, de promesses de visa d’entrée ou d’autres papiers délivrés dans les années 40 pour la plupart, par les consulats de divers Etats latino-américains à Berne (Suisse). L’Hôtel de la Providence a été, en mai 1943, entouré de barbelés pour empêcher les autres internés de communiquer avec eux. C’était juste après l’arrivée d’un grand convoi de « Sud-Américains » de Pologne. Mais les fenêtres de l’Hôtel de Providence donnaient sur les jardins du Nouvel Hôtel ; c’est pourquoi, le jour même de l’arrivée du convoi, puis les jours suivants, eurent lieu, de fenêtre à fenêtre, d’interminables conversations. Les nouveaux arrivants étaient des témoins oculaires des événements dramatiques de Varsovie (la révolte et la liquidation définitive du ghetto en avril-mai 1943).
12L’Hôtel Continental était réservé aux personnes isolées, aux personnes âgées de plus de soixante ans, et aux religieuses anglaises et américains qui prenaient soin de ces dernières [5].
13Presque tous les « Sud-Américains », c’est-à-dire les anciens internés juifs de la prison Paviak à Varsovie, étaient logés au deuxième étage du Nouvel Hôtel.
14Le Vittel-Palace fut transformé en hôpital, le service médical y était excellent. Les médecins étaient des prisonniers de guerre français. L’Hôtel Cérès possédait une belle bibliothèque avec un grand choix de livres étrangers.
15Au rez-de-chaussée du Grand Hôtel étaient installés de nombreux magasins, d’ailleurs très mal approvisionnés. On pouvait y acheter des souliers à semelles de bois avec tickets, des aiguilles, du fil, des robes démodées, des cols, des fleurs artificielles et d’autres articles similaires. Les épingles portant l’inscription « Nous reviendrons », arborées par les Français, devenaient en quelque sorte des insignes patriotiques.
16Au milieu du parc il y avait un petit étang rond où nageait le cygne classique. Non loin de là se trouvait un pavillon où travaillaient plusieurs cordonniers qui étaient, eux aussi, des internés. Chaque détenu avait le droit de faire raccommoder ses chaussures une fois par mois.
17Les conditions de logement au camp de Vittel étaient excellentes : une ou deux personnes par chambre.
18La nourriture fournie par les autorités allemandes était cependant insuffisante. Les ressortissants britanniques et américains non juifs ne cessaient de se plaindre. En revanche, les ressortissants sud-américains, à quelques exceptions près, tous Juifs d’origine polonaise, ne se plaignaient pas, mais pour cela il fallait avoir souffert ce qu’ils avaient souffert dans le ghetto de Varsovie et dans d’autres ghettos. Toutefois, ce furent les colis de la Croix-Rouge qui les empêchèrent au camp de Vittel de mourir de faim.
19Les internés pouvaient écrire et recevoir des lettres (une carte-réponse par semaine et par personne).
20Le samedi et le dimanche, il y avait des séances de cinéma, on donnait la plupart du temps de vieux films français. Pendant la semaine, la salle de cinéma devenait une salle de théâtre, on y donnait des pièces, des revues et des concerts.
21Il y avait aussi, en 1943, une école. Presque tous les enfants étaient Juifs polonais (beaucoup d’entre eux étaient arrivés dans les deux derniers convois, après la liquidation du ghetto de Varsovie en avril et en mai 1943). Ils avaient appris très vite l’anglais et le français. Mary Berg dirigeait les cours d’art de deux classes [6].
22Les internés non juifs s’efforçaient de s’occuper en organisant toutes sortes de distractions, des clubs de sport, des cercles dramatiques, des groupes d’études. Les internés juifs venus de Pologne ne prenaient part à aucune de ces activités, et pour cause : en pensée, ils étaient toujours à Varsovie, à Cracovie, à Radom, à Bedzin… « Que se passe-t-il là-bas ? Comment pourrait-on envoyer une partie du colis de la Croix-Rouge à Varsovie ? » « Plus le temps passe, plus le souvenir des parents et des amis que j’ai laissés au ghetto me poursuit ; je revois leurs visages anxieux, et j’ai souvent des cauchemars » — note Mary Berg dans son journal à la date du 17 mars 1943.
23Par contre, pendant les deux jours de Roch Hachana 1943, ils prièrent dans une des chambres au Nouvel Hôtel. On avait disposé une table avec des bougies, comme on l’avait fait à la fameuse prison de Pawiak, à Varsovie. La cérémonie s’était déroulée avec solennité, dans une atmosphère de grande tristesse. Le 9 octobre, le jour du Grand Pardon (Yom Kippour) fut célébré solennellement. En 1943, la fête de Hanoucah coïncidait avec Noël. Les bougies de Hanoucah brûlaient dans les chambres occupées par des Juifs [7].
24Le commandant du camp de Vittel était le capitaine Landhaüser [8].
25Le groupe de ressortissants britanniques ainsi que celui des Nord-Américains étaient mixtes : ils étaient composés de chrétiens et de Juifs. Ils étaient logés dans les hôtels. Le groupe latino-américain était homogène, exclusivement juif. Quelques centaines de personnes (hommes, femmes, adultes et enfants) étaient détenteurs de passeports et d’autres papiers de divers Etats d’Amérique centrale et d’Amérique du Sud, à savoir : Bolivie, Costa-Rica, Equateur, Guatémala, Haïti, Honduras, Mexique, Nicaragua, Paraguay, Pérou, République Dominicaine, Salvador, Uruguay, etc. Les plus nombreux étaient les nationaux du Paraguay et du Honduras. Ils avaient des passeports, des titres de voyage, des promesses de visa, des certificats d’acquisition de terrains dans l’un de ces pays, et d’autres documents dont les détenteurs devaient être considérés comme citoyens de pays respectifs. Ils avaient obtenu ces papiers par différentes méthodes. La plupart de ces documents avaient été fournis par les consulats de pays latino-américains en Suisse. Il est à noter que les consuls de ces pays à Berne avaient en vue, non les effets pécuniaires, mais en premier lieu les effets humanitaires : le sauvetage d’êtres humains de la mort [9].
2. Passeports étrangers pour les Juifs à échanger
26Pour mieux comprendre l’histoire du camp de Vittel, il faut rappeler brièvement l’historique des Juifs ayant la citoyenneté de pays ennemis ou neutres résidant sur les territoires occupés par les Allemands lors de la dernière guerre mondiale.
27Les Juifs qui se trouvaient dans les territoires sous autorité soviétique entre 1939 et 1941 furent autorisés à les quitter lorsqu’ils étaient détenteurs de passeports, de visas d’entrée pour un pays neutre (par exemple Etats-Unis d’Amérique du Nord) ou de certificats d’immigration en Palestine (sous mandat britannique). Des milliers de Juifs réfugiés dans ces régions quittèrent l’U.R.S.S. et certains d’entre eux réussirent à atteindre l’Amérique, la Palestine et d’autres pays via Vladivostok et le Japon. Après le 22 juin 1941, début de la guerre entre l’Allemagne et l’U.R.S.S., toutes les issues se trouvaient soudainement bloquées. Les nazis exécutaient les Juifs dans les territoires occupés sans perdre leur temps à établir la citoyenneté de leurs victimes. [10]
28C’est en Galicie (« District Galizien » du Gouvernement Général) que l’on remarque le premier intérêt pour les détenteurs juifs de passeports étrangers et pour ceux qui possédaient une citoyenneté d’un Etat ennemi ou neutre. A Varsovie (Pologne), les citoyens des Etats-Unis d’Amérique, du Commonwealth britannique et de divers pays latino-américains furent enregistrés le 14 avril 1942 par les autorités allemandes. Le 15 juillet 1942, ils furent informés qu’ils devaient se présenter dans deux jours à la prison Pawiak (qui se trouvait dans le ghetto) pour être échangés contre des Allemands. Cinq jours avant le début de la grande déportation (22 juillet-21 septembre 1942) vers le camp d’extermination de Treblinka, des centaines de personnes furent internées à la prison de Pawiak. Leur internement était une mesure de précaution, leur détention devait les protéger du danger. C’est ainsi qu’était compris alors l’internement des « étrangers » par la population du ghetto de Varsovie : « Nous sommes tous condamnés. Les Allemands éloignent les étrangers pour qu’ils ne soient pas témoins de ce qui se prépare pour nous. »
29Après une vérification des documents dans la cour de la prison de Pawiak, les ressortissants des Etats-Unis et du Commonwealth furent conduits dans un bâtiment d’un étage où logeait autrefois le personnel de la prison. Les autres, les nationaux des pays d’Amérique du Sud, etc., furent enfermés dans les cellules de la prison, les hommes dans le bâtiment central, les femmes dans l’aile réservée aux prisonnières et dénommée la « Serbie » [11].
30Des groupes de « ressortissants américains » vinrent également de province. Le 17 décembre 1942 arriva à la Pawiak un groupe de Radom [12].
31Les représentants des autorités allemandes annoncèrent à plusieurs reprises le départ imminent des « étrangers ». Le 5 octobre 1942, l’un de ceux qui venaient parfois à la prison de Pawiak, annonça que, le 23 octobre, les femmes seraient expédiées au camp de Liebenau près du lac de Constance et les hommes au camp de Laupen en Allemagne. Mais ce n’est que le 18 janvier 1943, que les internés étrangers à la prison de Pawiak partirent. Des cars les transportèrent vers le train qui n’était pas à la gare, mais sur une voie de garage, à une certaine distance de la ville. Environ deux cents personnes, dont quinze non-Juifs de ce convoi, arrivèrent le 20 janvier 1943 à Vittel. C’était le premier transport d’Américains qui soit arrivé au camp de Vittel de l’étranger [13].
32Les lettres arrivées du camp de Vittel, adressées à leurs parents et amis dans le ghetto de Varsovie ou bien cachées et camouflées hors du ghetto, étaient très rassurantes : elles vantaient le paradis terrestre de Vittel (hôtel de luxe, colis alimentaires de la Croix-Rouge, correspondance avec des amis à l’étranger, etc.). Les nouvelles réconfortantes parvenues de Vittel d’une part, et d’autre part la difficulté chaque jour plus grande de trouver un refuge sûr hors du ghetto et de le conserver, incitèrent à cette époque un certain nombre de Juifs à sortir d’une clandestinité extrêmement dangereuse pour eux-mêmes et pour ceux qui leur portaient assistance. Nombre d’entre les rescapés de la grande déportation (plus de trois cent mille déportés entre le 22 juillet et le 21 septembre 1942) s’efforcèrent alors d’obtenir des passeports étrangers ou des promesses de visas. Des milliers de papiers étrangers adressés aux Juifs de Varsovie et d’autres villes, retirés du courrier postal par les autorités policières allemandes, se trouvaient entre les mains de la Gestapo. Pratiquement aucun de ceux auxquels ces documents étaient destinés ne vivait plus. La tâche de rechercher des acheteurs de ces papiers fut confiée à des intermédiaires juifs (Adam Zurawin, Léon Skosowski, Kenigel, Wlodarski, Adolf Finkel, Josef Erlich et autres). Leur quartier général était au début à l’Hôtel Royal (rue Chmielna à Varsovie), puis à l’Hôtel Polsi (31, rue Dluga à Varsovie).
33Le prix d’un document étranger était très élevé, il variait de cinq cents à mille cinq cents dollars américains. Ber Baskind (mort en 1981 à Paris) paya le 20 juin 1943 mille dollars pour une promesse et les pièces d’identité au nom de M. Bretsztein pour aller devenir de cette manière citoyen du Paraguay. Quelques semaines plus tard, son ami paya pour de tels papiers cent mille zlotiss, c’est-à-dire l’équivalent à l’époque de mille cinq cents dollars [14].
34Le Dr. Hilel Zajdman, auteur du Journal du ghetto de Varsovie, inscrivit à la date du 3 janvier 1943 : « Aujourd’hui est venu chez moi Monsieur Aron Blumenkopf de la rue Mila. Il a un fils en Suisse, un docteur en médecine. Celui-ci lui a envoyé un papier cacheté du consul du Paraguay à Berne comme quoi lui, Aron Blumenkopf et sa famille, étaient reconnus citoyens du Paraguay […]. Voici le texte du document : « Faisant suite aux démarches de vos parents, vous êtes reconnus citoyens du Paraguay. Signé : R. Higli ». Je regarde le cachet : « Consul général de la République du Paraguay ». Nous tous, présents alors aux Archives du Judenrat [15], avons regardé ce papier. Nous l’avons lu plusieurs fois. Et nous enviâmes ces personnes : elles au moins étaient sauvées, elles seraient échangées contre des Allemands en Amérique » [16].
35Il va de soi que la plupart d’entre ces « nationaux sud-américains » n’avaient jamais mis le pied dans ces Etats. Les autorités allemandes étaient évidemment au courant, mais elles voulaient augmenter le nombre de personnes échangeables contre des citoyens allemands séjournant dans les pays en guerre de l’hémisphère occidental. [17]
36Il était clair pour tout le monde que l’opération « Passeports étrangers pour des Juifs » était montée par les autorités allemandes. Les chefs du Judaïsme de Varsovie étaient d’ailleurs au courant d’un précédent en la matière. Au début de décembre 1942, cinquante-quatre certificats d’entrée en Palestine étaient arrivés pour les Juifs du ghetto de Varsovie. Les certificats envoyés par l’Office d’émigration en Palestine à Constantinople (Turquie) étaient accompagnés des photos des destinataires. Et malgré tout, les autorités policières allemandes questionnées à ce sujet conseillèrent d’envoyer des « remplaçants » : personne n’ira contrôler qui est qui ? Un comité fut créé pour désigner les personnalités juives les plus importantes et les plus émérites, mais il n’en fut rien : les Allemands retirèrent tous les certificats [18].
37Il convient de signaler que Himmler, dès décembre 1942, donna l’ordre à Heinrich Müller, chef de la section IV (Gestapo) à l’Office Central de Sécurité du Reich (Reichssischerheitshauptamt, R.S.H.A.), de « concentrer les Juifs qui se trouvent encore en France et aussi des Juifs belges, hollandais, hongrois et roumains qui ont des parents influents aux Etats-Unis dans un camp spécial ». Il s’agit évidemment des personnes à échanger contre des Allemands. Il y est question, sans aucun doute, du futur camp d’échange de Bergen-Belsen. Himmler indiquait entre autres : « Ces Juifs devront y travailler mais à condition qu’ils soient bien portants et qu’ils puissent rester en vie ; ces Juifs sont pour nous des otages d’une grande valeur, et je pense que leur nombre atteindra environ dix mille » [19].
38Eberhard von Tadden, chef du groupe Inland II au Ministère des Affaires étrangères du IIIe Reich, qui était chargé des échanges de citoyens des puissances belligérantes, et Rudolf Kröning, du R.S.H.A., coopérèrent à l’élaboration du règlement de ces futurs camps nazis, qui devaient être des camps hors série, des camps destinés aux Juifs sélectionnés pour l’échange. Von Tadden avait, comme il ressort de la note confidentielle du 12 juin 1943, des objections tant au sujet de la dénomination des camps d’internés civils, que de l’affectation et de la mise au travail de ces Juifs. Il craignait que les conditions d’existence dans ces camps ne soient pas trop mauvaises pour permettre aux internés de survivre, parce que le but poursuivi était : « avoir à sa disposition des objets adéquats pour des négociations concernant un échange éventuel » contre des Allemands » [20].
39Le 26 juin 1943, Adolf Eichmann expliquait à Zöpf, chef de la section IV B4 de la Sipo/SD (Sicherheitspolizei/Sicherheitsdienst) aux Pays-Bas, qu’il fallait tout de même (« quelque indésirable que ce soit ») renoncer « pour des raisons de politique extérieure à la déportation de ceux des Juifs qui obtiennent une « nationalité » valable d’un pays neutre. Par contre, les Juifs qui tentent d’acquérir une nouvelle nationalité, doivent être déportés vers l’Est par priorité. » Les fonctionnaires de la Sipo/SD n’ont pas de mal à détecter ces Juifs [21]. Lors de la censure du courrier, les passeports provenant de Suisse ne furent pas remis à leurs destinataires, mais furent confisqués.
40Le même Eichmann, le 23 septembre 1943, envoyait un câble au chef de la section IV B4 de la Sipo/SD en France lui demandant d’arrêter le Juif Max Gollob pour lequel des tiers essaient d’obtenir en Suisse un passeport sud-américain de complaisance et de l’expédier à Auschwitz [22]. Il est indéniable qu’Eichmann avait appris cette nouvelle confidentiellement. Une preuve de plus de la supervision de l’opération « Passeports étrangers pour Juifs » par les autorités allemandes est fournie par la lettre adressée en avril 1944 par la Sipo/SD aux Pays-Bas au R.S.H.A. (IV B4) à Berlin. Nous y lisons entre autres : « Les envois retirés du courrier contiennent des passeports de complaisance pour Juifs établis par les consulats sud-américains en Suisse. A l’instigation du S.S.-Hauptsturmführer Moes [23] du R.S.H.A. lors de son séjour aux Pays-Bas en janvier 1944, ces envois recommandés contenant des passeports de complaisance n’ont pas été remis aux Juifs concernés » [24].
41Et enfin encore une pièce à conviction que les responsables nazis des affaires juives dans les pays occupés étaient au courant de cet état des choses. Le 23 août 1943, Aloïs Brunner (Service IV B de la Sipo/SD à Paris) télégraphiait à Eichmann qu’au camp de Vittel se trouvent « environ cent cinquante Juifs originaires de Varsovie qui se sont procuré les nationalités fictives des Etats ennemis sud-américains d’une façon irrégulière moyennant finances. Les consulats sud-américains sont occupés pour la plupart par des Juifs et ils ont délivré ces nationalités irrégulières » [25]. Eichmann était bien entendu au courant de tout puisqu’il était l’un des principaux auteurs et promoteurs de l’opération « Passeports étrangers pour Juifs ».
42Von Tadden a tiré au clair ce problème dans son témoignage daté de 1947. « Les autorités allemandes (Ministère des Affaires étrangères du Reich et R.S.H.A.) savaient très bien que ces passeports étaient faux ou bien de complaisance. Nous voulions néanmoins les reconnaître à condition que les Etats sud-américains les reconnaissent valables. Nous nous sommes donné de la peine pour réunir le plus grand nombre possible de candidats juifs en vue d’un échange. Lorsque les Etats sud-américains, lors des pourparlers avec nous, ont refusé de prendre en considération les détenteurs de tels passeports comme personnes à échanger contre des Allemands, ces Juifs ne constituaient désormais pour nous aucune valeur. Nous n’étions pas non plus intéressés à les renvoyer dans les ghettos » [26].
43On les a déportés alors au camp d’extermination d’Auschwitz.
44Le consul du Honduras délivrait des promesses de visas gratuitement. Il était au courant du danger couru par les Juifs sous l’occupation allemande, et il voulait sincèrement prendre part à l’œuvre de sauvetage. Le représentant de l’Agoudat Israël était en contact avec lui. M. Mandel-Mantello, haut fonctionnaire au consulat de San-Salvador à Berne, délivrait des papiers et payait de sa propre poche une partie des frais. Le Dr. Abraham Silberschein (Suisse) envoyait ces passeports et promesses de visas aux personnalités publiques juives (chefs politiques, rabbins, écrivains, journalistes, comédiens, artistes, etc.) de différents pays occupés par Hitler, avec lesquels ils était en relations personnelles ainsi qu’à la demande des organisations juives (Comité de secours de l’Agence Juive, The Palestine Rescue Committee, The Galician Jews Organisation, Congrès Juif Mondial, Ichoud, Poale-Sion, Hitachdouth, Conseil des Travailleurs Juifs aux Etats-Unis, Agoudat Israël, etc.). Le Dr. Silberschein dirigeait alors en Suisse le « Hilfskomitee zur Hilfleistung für die durch den Krieg betroffene jüdische Bevölkerung ». Toutes ces organisations s’efforçaient d’envoyer aux Juifs dans les ghettos de Pologne, aux Pays-Bas, en Belgique et en autres pays occupés des documents pouvant sauver les malheureux de la déportation vers les camps d’extermination. Les détenteurs de ces papiers ont pu, par la suite, obtenir des autorités d’occupation allemandes d’être considérés comme des sujets de pays ennemis et placés dans les camps d’internés civils et d’échanges contre les détenus civils allemands.
45Les Juifs de la zone sud en France s’efforçaient également de quitter le pays sous la domination des Allemands et de leurs acolytes de Vichy. Ils voulaient partir, entre autres, pour Cuba. Mais le consul cubain à Nice était, par contre, beaucoup moins généreux que ses collègues, les consuls latino-américains à Berne. Au début de l’année 1942, cent à cent cinquante Juifs étrangers avaient décidé de quitter la France. Ils demandèrent au consul de Cuba à Nice, M. José Alberni, des visas, soit de transit, soit de touristes, soit d’entrée définitive. Ce consul avait décidé de commercialiser la remise des visas. Il se chargeait lui-même d’obtenir les garanties exigées par son gouvernement. Il se faisait remettre en moyenne une somme de cinq cents dollars américains pour chaque visa accordé. Cette somme représentait la prime qu’une assurance ou une banque demandait pour garantir auprès du gouvernement cubain les moyens d’existence des immigrants. Au lieu de dollars, que peu de personnes possédaient, le consul exigeait une somme de soixante-quinze mille francs français (cent cinquante francs par dollar). Il a délivré dans ces conditions un certain nombre de visas.
46Après un mois, le gouvernement cubain interdit l’entrée de son pays aux ressortissants allemands et aux ressortissants des pays occupés par l’Allemagne. Les personnes qui avaient remis au consul les sommes exigées, lui demandèrent de leur restituer la partie de la somme qui représentait l’indemnité versée pour la garantie auprès du gouvernement cubain. Le consul Alberni s’y refusa et déclara qu’il ne restituerait rien. Il mit même violemment à la porte les personnes qui lui avaient adressé de telles réclamations.
47Le 1er juillet 1942, Me J. Lubetzki, au nom de tous les intéressés, s’adressa au ministre des Affaires étrangères de Vichy. « Je vous prie de bien vouloir demander aux représentants français à La Havane (Cuba) de faire une démarche auprès du gouvernement cubain afin que celui-ci donne des ordres formels et exprès à son consul à Nice pour qu’il restitue les sommes qu’il détient indûment ».
3. Transports juifs entrés au camp de Vittel
48Le 5 mai 1943, le Dr. Kröning, Oberregierungsrat, chargé au R.S.H.A. - II B de la question d’échange des étrangers contre des Allemands, s’adressa au chef de la Sipo/SD à Varsovie et demanda de transférer au camp d’internement de Vittel (et non à Liebenau) les Juifs sud-américains, dans la mesure où ils pouvaient être regroupés par familles ou bien dans la mesure où il s’agissait de femmes seules. « Les hommes isolés devaient être transférés dans le camp d’internement de Laupen ». Kröning demanda à passer outre aux objections de l’Abwehr qui pouvaient être soulevées à propos de l’échange de ces personnes parce que des raisons de politique étrangère du Reich entraient en ligne de compte. Il attira encore une fois l’attention sur la « nécessité pour les Juifs de nationalité étrangère, d’être tenus dans l’ignorance qu’ils peuvent être l’objet d’un échange » [27].
49En effet, dans la deuxième moitié du mois de mai 1943, un groupe de soixante personnes (hommes, femmes et enfants), des ressortissants sud-américains internés à la prison de Pawiak à Varsovie, étaient acheminés sur Vittel. Le convoi arriva au camp le 22 mai 1943. Parmi les nouveaux arrivants il y avait entre autres : le grand poète Itzhak Katzenelson (avec son fils cadet Zwi), l’ingénieur Alexandre Landau (avec sa famille) et Mme Schorr, la femme du grand-rabbin de Varsovie, le prof. Mojzesz (Mosché) Schorr [28].
50Néanmoins la majeure partie des Juifs étrangers de Varsovie étaient dirigés sur le camp de Bergen-Belsen. Le 5 juillet 1943, un convoi d’environ mille trois cents personnes y fut acheminé. Le convoi suivant, de près de cinq cents personnes, devait y partir le 13 juillet. Des officiers de la Gestapo procédèrent alors à un contrôle des documents, et cent seize internés seulement furent reconnus comme étant en règle. Les autres furent emmenés dans les ruines du ghetto et fusillés. Les 27 et 28 juillet et 21 septembre 1943, trois convois de soixante-quatre personnes chacun, quittèrent Varsovie pour Bergen-Belsen [29].
51Sauf le transport d’environ deux cents personnes qui arriva de Varsovie au camp de Vittel le 20 janvier 1943, et celui de soixante personnes arrivées de Varsovie en mai 1943, nous avons enregistré, sur la base de documents, quelques autres convois partis d’autres endroits. Le 28 janvier 1943 est arrivé par exemple, un groupe de seize personnes, dont sept ayant des certificats d’émigration en Palestine ; elles étaient transférées du camp de Drancy [30]. Au mois de mars 1943, un groupe de ressortissants nord-américains internés à Gleiwitz (Silésie) ést arrivé à Vittel ; ceux-ci devaient y rejoindre leurs familles après une longue séparation [31]. Il se peut que d’autres transports de Haute-Silésie soient également arrivés à l’époque au camp de Vittel. En fait, le 28 juillet 1943, le commandant de la Sipo/SD aux Pays-Bas s’adressait à la Sipo/SD en France et lui demandait le transfert au camp de Vittel des Juifs étrangers internés au camp de Westerbork (Pays-Bas). Il s’agissait de dix-neuf personnes, dont six Britanniques (dont les conjoints se trouvaient déjà à Vittel), de deux ressortissants mexicains (un couple), de deux nationaux du Nicaragua (un couple), de quatre sujets du Honduras (une famille) et de deux personnes (un couple) du Pérou. Heinz Röthke, chef du Service IV B4 de la Sipo/SD en France, lui répondit alors que le camp de Vittel était déjà surpeuplé et qu’il attendait dans les jours à venir d’importants transports des Juifs évacués de la Haute-Silésie. Il ne pouvait pas encore prévoir si ces Juifs, possédant la citoyenneté des pays ennemis, américaine, pourraient être internés à Vittel [32].
52A cette occasion on apprenait de sources allemandes compétentes que les Juifs internés étaient classés en trois groupes : catégorie I — ressortissants des puissances belligérantes ennemies (Etats-Unis d’Amérique du Nord, Grande-Bretagne, etc.) ; catégorie II — peronnes dont la nationalité d’une puissance belligérante ennemie était douteuse; catégorie III — apatrides [33].
53Le commandant du camp de Vittel, le capitaine Landhäuser, demanda aux autorités allemandes intéressées de lui envoyer uniquement des Juifs de la catégorie I (citoyens de pays ennemis) parce que, pendant le transfert des internés juifs de Vittel au camp de Drancy, la puissance protectrice se mêlait et intervenait, bien que ces Juifs n’eussent pas la citoyenneté d’un pays en état de guerre avec l’Allemagne.
54Vers la fin du mois de mai 1943, des femmes et des enfants qui étaient au camp de Liebenau arrivèrent à Vittel. Le 15 juillet 1943 arriva de Varsovie un certain M. R., il avait fait le voyage seul, sans escorte. On le soupçonnait, à tort ou à raison, d’avoir des accointances avec les Allemands [34]. Le 6 août 1943, un groupe d’hommes internés au camp de Titmoning (Allemagne) arriva à Vittel. Ils étaient venus rejoindre leurs femmes et leurs enfants. Le Dr. Nathan Eck avec sa femme et sa fille étaient du nombre. Il y avait beaucoup de femmes et d’enfants, qui, depuis deux ans, attendaient toujours leurs maris et pères [35]. Vers mi-novembre 1943 deux hommes (Ber Baskind en compagnie du mystérieux ingénieur) arrivèrent de Varsovie à Vittel [36]. Une trentaine d’internés du camp de Compiègne (pour la plupart des femmes) furent transférés le 23 novembre 1943 au camp de Vittel. Vers la fin de novembre 1943 arriva à Vittel le premier convoi de prisonniers de guerre italiens [37].
55Dans le courant de janvier 1944, un groupe de femmes juives, ressortissantes soviétiques, furent transférées du camp de Bergen-Belsen à Vittel. Cette information concernant le séjour au camp de Vittel nous parvient non seulement de témoignages de codétenues, mais aussi de documents allemands. Entre autres, le Dr. Kröning (du service IV 4 du R.S.H.A.) communiquait le 18 août 1944 au Ministère des Affaires étrangères du Reich que Francia Ring, Juive soviétique, déportée de Prague vers l’Est avec ses parents adoptifs Jacob et Margarette Mueller, Juifs apatrides, avait dû être transférée au camp de Vittel, parce que « les Juifs américains et britanniques mariés et leurs femmes, les femmes soviétiques juives et leurs enfants, ainsi que les enfants juifs de nationalité ennemie au-dessus de 15 ans — doivent être internés au camp de Vittel » [38].
56Deux transports de Juifs ont été dirigés sur Vittel par le commandant du camp de Malines (Belgique), l’un le 23 février, l’autre le 20 juin 1944. Trente-et-un convois au total sont partis du camp de rassemblement des Juifs de Malines (Caserne Dossin). Vingt-sept de ces convois ont été acheminés vers Auschwitz-Birkenau, un convoi a été dirigé vers Buchenwald et Ravensbrück, un autre vers le camp de Bergen-Belsen et deux convois ont été dirigés vers le camp de Vittel. L’effectif de ces deux groupes nous est inconnu [39].
57Selon les renseignements recueillis par Benjamin Grad auprès de ses codétenus avant son départ du camp de Vittel, il y avait, à la mi-octobre 1943, quelque trois cents adultes et cent enfants juifs [40], sans compter évidemment les détenus non juifs et les Britanniques et Américains du Nord, Juifs. Selon d’autres sources, au début de l’année 1944, il y avait au camp de Vittel 67 familles juives, soit au total 248 personnes (hommes, femmes, enfants). Ces chiffres sont à peu près du même ordre.
4. Le poète Itzhak Katzenelson (11-5-1884 - 1-5-1944) au camp de Vittel (22-5-1943 - 18-4-1944)
58Comme nous l’avons mentionné, le poète, pédagogue et dramaturge Itzhak Katzenelson était interné au camp de Vittel. Il y était arrivé le 22 mai 1943 de Varsovie avec un groupe de soixante personnes. [41]
59« Le 22 mai 1943. Mon fils et moi-même sommes maintenant à Vittel » — note le poète dans son journal tenu à Vittel. Nous sommes arrivés avec un petit groupe de Juifs ayant des nationalités de différents pays de l’Amérique du Nord et du Sud. Zwi (le fils du poète - A.R.) et moi-même étions citoyens du Honduras. Nous étions soixante, hommes et femmes […]. Je suis arrivé ici aujourd’hui sans ma femme et sans mes deux chers fils. Le monde autour de moi est ici sombre et désolé. Si seulement Hannah (la femme du poète - A.R.) était avec moi [42]. Si seulement Benzikel et Benjamin étaient ici (…). C’est mon premier jour ici et je crains que ma solitude ne me rende fou. La présence ici de Zwi seulement ne me suffit pas (…). Quelques-uns sont d’avis qu’il n’est pas exact que notre statut à l’égard de différents pays n’est pas encore clarifié. En conséquence, nous, détenus en Allemagne, serons traités comme des prisonniers allemands en Eretz (Palestine d’alors - A.R.). Les hommes qui ont été envoyés aux camps de travail de Compiègne et de Tittmoning vont retourner d’ici peu. J’ai appris que les parties concernées étaient parvenues à quelque accord à ce sujet (…) Ici à Vittel, aucune épée de Damoclès n’est suspendue sur la tête (…) [42].
60La mention qui suit dans le Journal a été faite seulement le 21 juillet 1943, à la veille du premier anniversaire de la grande déportation du ghetto de Varsovie au camp de la mort de Treblinka. A partir de cette date tristement mémorable, Katzenelson parle dans son Journal uniquement de ce drame ; la dernière mention porte la date du 16 septembre 1943.
61Après une fouille des bagages et un enregistrement (précédé d’une vérification des documents et d’une enquête) Katzenelson et son fils furent logés à l’Hôtel Providence, dans la chambre n° 107. La pièce comprenait une table, un placard, deux lits, deux chaises et un lavabo. Le poète avait trouvé le moyen de se procurer une Bible et un volume des œuvres du grand poète hébreu, classique, Haïm Nachman Bialik. Il y avait autour de Katzenelson à Vittel un groupe de ses amis fidèles : le Dr. Nathan Eck, Mme Alexandre Landau, Jehudit Kalman, Dr. Hilel Zajdman, Abraham Schlomo (Anvers), Itzhak Jacobowski (Bruxelles), Miriam Novitch. Le poète était tout à fait indifférent à sa vie actuelle, il vivait et revivait le récent passé tragique de sa famille et de son peuple tout entier. Cette pensée travaillait constamment l’esprit du poète, âgé à l’époque de cinquante-sept ans. Il tenait son Journal dans lequel il décrivait la liquidation du ghetto de Varsovie, il écrivait des pièces, il faisait des cours d’hébreu à quelques jeunes. L’une des pièces écrites à Vittel était intitulée : « Habal ». Elle était consacrée à la destruction de Carthage, cela devait symboliser la destruction de la Judée.
62Le 28 février 1944, Katzenelson avait fini le second et commencé le troisième acte d’une pièce de théâtre intitulée « Les quartiers généraux du commandement suprême » [43].
63Le 3 octobre 1943 (4 Tichri 5704) il commença à écrire son célèbre poème : « Le chant du peuple juif assassiné ». Il lisait à ses amis, de temps en temps, quelques extraits de poème. Il a achevé son œuvre le 18 janvier 1944. Ce fut, peut-être, une coïncidence, peut-être pas. Le 18 janvier 1943 eut lieu, comme on le sait, la première résistance armée du ghetto de Varsovie, animée et dirigée par l’Organisation Juive de Combat et son commandant Mordekhaï Anielewicz. Toujours est-il que le poète était le témoin oculaire de cet événement qui l’a profondément impressionné. [44]
64Le poète, lui-même, fit de sa fine écriture sur un petit papier spécialement obtenu par ses amis, des copies de ce poème. Quelques-unes des copies furent enterrées dans le parc de Vittel, d’autres copies furent transportées en contrebande par divers chemins chez des amis. Miriam Novitch (actuellement au Kiboutz Lohamé Haguetaoth en Israël) a fait sortir du camp de Vittel en fraude une copie du Journal et d’autres écrits grâce à Mme Françoise Rabichon qui venait au camp faire la lessive. Les originaux et les copies furent expédiés, en fin de compte, à Tel-Aviv. Le poème sur le peuple juif assassiné constitue à ce jour la plus grande et la plus sublime œuvre littéraire consacrée à la tragédie du peuple juif sous l’occupation nazie [45].
65Une carte postale, écrite par le poète en novembre 1943, en allemand, et adressée au Bureau de liaison de la Histadrouth (Centrale syndicale juive en Palestine) dans un pays neutre, reflète l’atmosphère de panique qui régnait alors au camp de Vittel. Il nous a paru opportun de citer intégralement ce texte chiffré, court, mais très caractéristique. La carte postale comporte trois lignes de Katzenelson, deux lignes de Nathan Eck et deux lignes d’Alexandre Leib Landau.
66« Mon cher cousin, moi et mon fils Zwi sommes en bonne santé. Nous ne savons pas seulement comme tu vas ? Pourquoi ne nous écris-tu rien de ton Aliya ? Qu’elle nous écrive aussitôt. Salutations à tous nos parents, en particulier à Chaïm Baskana et à Goldin » [46].
67A cette époque (fin 1943) une épée de Damoclès était à nouveau suspendue sur la tête du poète et de tous les ressortissants sud-américains venus de divers ghettos de Pologne. Une commission spéciale allemande arriva à Vittel, tous les documents étrangers lui furent remis. Selon les bruits qui couraient, les autorités allemandes ne reconnaissaient plus les passeports délivrés par les Etats d’Amérique latine (Honduras, Paraguay, Costa-Rica, etc.), mais elles acceptaient les certificats d’émigration en Palestine (sous mandat britannique à l’époque). « Aliya » (hébreu) veut dire émigration en Palestine. « Chaïm Baksana » veut dire « notre vie est en danger ». Le Dr. I. Goldin était alors le chef de l’Office de la Palestine à Constantinople. Autrement dit, Katzenelson, le Dr Eck et l’ingénieur Landau avaient demandé de leur envoyer immédiatement des certificats d’entrée en Palestine, pour eux et leurs familles, parce qu’ils étaient en danger de mort. Les certificats n’ont pas été envoyés à temps. Dans la deuxième moitié de novembre 1943 eut lieu le premier échange de détenus britanniques (malades, personnes âgées, etc.) contre les internés civils allemands [47].
68Le 18 avril 1944, le poète fut transféré au camp de Drancy, d’où il fut déporté le 29 avril 1944 à Auschwitz. Le 1er mai 1944, lui et son fils Zwi, furent tués dans la chambre à gaz, dès leur arrivée au camp [48].
69Le 23 août 1943, le S.S.-Hauptsturmführer Aloïs Brunner (Sipo/SD - IV B4 à Paris) s’adressait à Adolf Eichmann (Berlin) et lui demandait d’envoyer à Vittel des spécialistes pour vérifier les documents des internés juifs d’origine polonaise. Il était d’avis qu’ils n’avaient pas la nationalité des Etats sud-américains ennemis. « Il faut absolument montrer ici à la Suisse (puissance protectrice) que les criminels juifs ne sauraient être extraits du Reich à l’aide de nationalités fictives obtenues en Suisse par fraude » [49]. Le 8 septembre 1943, une commission allemande composée d’experts du Ministère des affaires étrangères du Reich et du R.S.H.A., arriva à Vittel pour examiner tous les documents en possession des internés. Elle contrôla en premier lieu les passeports et autres documents des ressortissants sud-américains d’origine polonaise. Tous les documents furent, par le commandant du camp, le capitaine Lanhäuser, réunis et remis à la commission allemande. Des rumeurs troublantes étaient parvenues à Vittel au sujet de la déportation des internés juifs, citoyens sud-américains, du camp de Bergen-Belsen vers Auschwitz [50].
70En effet, au mois d’août 1943, une commission allemande sous la direction du S.S.-Hauptsturmführer, Dr. Seidl, se livra à l’examen méticuleux des documents et des internés du camp de Bergen-Belsen. Quelque temps après, mille huit cents internés furent déportés à Auschwitz. Ce convoi fut suivi par un second et un troisième convoi. Quelques centaines de détenus étrangers seulement restèrent au camp de Bergen-Belsen [50].
71Les autorités allemandes ne reconnaissaient pas non plus les passeports des Juifs, transférés du camp de Westerbork (Pays-Bas) et de Theresienstadt (Tchécoslovaquie).
72Dans un des avis du R.S.H.A. (Berlin) à ce sujet, il est dit, entre autres : « Les passeports des Etats d’Amérique latine (Honduras, Equateur, Paraguay, etc.) délivrés aux Juifs ne sont pas valables, parce qu’il s’agit de passeports de complaisance » [51].
5. Les interventions auprès des gouvernements sud-américains en faveur des internés de Vittel
73En Suisse, on n’était pas encore au courant de ce renversement de la situation, on continuait à délivrer et à expédier de pareils passeports par centaines et par milliers dans les pays occupés où ils étaient retirés du courrier postal et retenus par les autorités allemandes compétentes.
74Par l’intermédiaire du rabbin Dr. Schulmann de Lausanne et de représentants du clergé catholique et protestant qui venaient de temps en temps au camp de Vittel, les internés juifs firent connaître la nouvelle situation à leurs amis et aux grandes organisations juives et internationales à l’étranger. Ils firent appel entre autres au Congrès Juif Mondial et au Joint aux Etats-Unis, au Comité International de la Croix-Rouge à Genève, au Haut Commissariat pour les réfugiés à Londres, etc. Il est inutile de signaler que toutes les lettres expédiées du camp de Vittel étaient censurées. Il est donc vraisemblable que les autorités allemandes désiraient réellement la reconnaissance de la validité par les gouvernements sud-américains des passeports en possession des internés juifs de Vittel. Elles voulaient avoir le plus grand nombre possible de Juifs à échanger contre des Allemands.
75Les efforts pour faire connaître par les Etats sud-américains la validité de ces passeports et promesses de visas commencèrent vers la fin de 1943. Ces efforts se reflètent dans des rapports, des lettres et d’autres documents du Congrès Juif Mondial, du Comité de secours de l’Agoudath Israël, du Comité international de la Croix-Rouge (C.I.C.R.), de l’Office des réfugiés de guerre (le War Refugee Board), créé par le président Roosevelt, du Haut Commissariat pour les réfugiés à Londres, etc. [52].
76Par suite des demandes énergiques et persistantes de la délégation de rabbins, entreprises au nom de l’Agoudath Israël, Cordell Hull et Henry Morgenthau, membres du gouvernement des U.S.A., agissaient afin d’obtenir la reconnaissance de la validité des papiers sud-américains. En décembre 1943, le Dr. Arieh Tartakower (Congrès Juif Mondial) alla de New York à Londres où il devait faire exercer une pression par les gouvernements en exil (Pologne, Pays-Bas, Belgique, Tchécoslovaquie, etc.) sur les Etats sud-américains et presser le Comité intergouvememental pour les réfugiés en vue de la reconnaissance des passeports délivrés par les consulats des pays sud-américains. M. Herbert Emeran, représentant britannique de ce comité, se chargea personnellement de cette affaire. Les télégrammes envoyés à cette époque par les chefs du Congrès Juif Mondial à New York et à Londres (Dr. Nahum Goldmann, A.L. Eastermann, Dr. Arieh Tartakower, Dr. Kubowitzki-Kubovy, Noah Barou, Dr. Ignacy Schwarzbard) prouvent qu’ils étaient conscients de la gravité de la situation des internés de Vittel et qu’ils entreprirent tout ce qui leur était possible. Ils essayèrent de faire intervenir le département d’Etat des U.S.A. et le gouvernement britannique ainsi que les gouvernements alliés en exil, l’Office des réfugiés, la Croix-Rouge internationale et autres organisations internationales en vue d’une intervention spéciale auprès des gouvernements des républiques sud-américaines pour insister, par l’intermédiaire des puissances protectrices, afin de sauvegarder leurs nationaux dans le camp de Vittel [53].
77Les chefs du Congrès Juif Mondial qui se rendaient compte des arguments susceptibles d’être valables pour les autorités allemandes, demandèrent aux gouvernements des puissances protectrices (Suisse, Suède, Espagne, etc.) de faire savoir qu’ils considéraient les internés juifs de Vittel et d’autres camps similaires (Bergen-Belsen, Tittmoning, etc.) comme une monnaie d’échange, et qu’ils avaient entrepris des mesures afin de se procurer du matériel d’échange (des Allemands internés) [54].
78Pour convaincre et rassurer les gouvernements sud-américains, le Congrès Juif Mondial proposa aux gouvernements des Pays-Bas et de Belgique de leur confirmer leurs garanties qu’après la guerre les nationaux de ces pays internés à Vittel retourneraient aux Pays-Bas et en Belgique. Etant donné le danger de mort, on demanda à la puissance protectrice, en l’occurrence l’Espagne, d’accorder à tout prix sa protection aux internés juifs de Vittel [55]. Des démarches analogues furent faites auprès des gouvernements en exil d’autres pays (Pologne, Tchécoslovaquie, etc.) dont les citoyens étaient internés à Vittel et qui étaient détenteurs de passeports de pays d’Amérique latine.
79Le Comité international de la Croix-Rouge (C.I.C.R.) et le Vatican agirent par leurs moyens propres afin d’arriver au même but.
80Le 28 décembre 1943, le professeur Carl J. Burckhardt, du C.I.C.R. (il est devenu le président du C.I.C.R. le 1er janvier 1945 lorsque Max Huber (à l’âge de 70 ans) il abandonna la présidence de la Croix-Rouge internationale), eut un entretien téléphonique avec le nonce apostolique en Suisse, Mgr Philippo Bemardini au sujet d’une intervention auprès « de certains gouvernements à l’égard de la question des Juifs auxquels les autorités allemandes viennent de confisquer les passeports délivrés par des consulats de pays d’Amérique latine ».
81La réponse était rassurante puisque, deux jours après, Johannes Schwarzenberg, chef de la Division d’assistance spéciale du C.I.C.R., adressa au nonce apostolique une lettre dans laquelle il demandait qu’une intervention du Vatican auprès du gouvernement du Paraguay précède celle de la Croix-Rouge en faveur « des quelque trente familles israélites auxquelles des passeports paraguayens ont été délivrés et qui se trouvaient au camp de Vittel ». Ajoutons que J. Schwarzenberg était un prince autrichien de nationalité suisse. Il était diplomate autrichien jusqu’à l’Anschluss. En mai 1940, il arriva à Genève où il devint membre du C.I.C.R.). M. Schwarzenberg parle évidemment d’un échange des internés juifs. Il demande également l’opinion du nonce apostolique au sujet d’une requête analogue du Vatican auprès des gouvernements d’autres pays entrant en ligne de compte : le Honduras, le Pérou, l’Equateur, le Costa-Rica, le Nicaragua, Haïti, le Chili et le Venezuela [56].
82Quelques jours après, le nonce apostolique le remercia de la lettre, exprimant sa satisfaction que le Comité International de la Croix-Rouge travaille pour sauver les Juifs de Vittel qui se trouvaient en danger de mort, l’assurait que le Vatican ferait tout son possible pour apporter son aide en la matière. Il proposait également au C.I.C.R. de s’adresser directement au Comité allemand de la Croix-Rouge à Berlin, où « les activités du Vatican sont presque nulles », afin d’apprendre quelle était l’attitude des autorités allemandes compétentes au sujet des internés du camp de Vittel [57].
83Le Comité International de la Croix-Rouge (C.I.C.R.), conscient de la gravité de la situation et de son urgence, fit savoir au nonce apostolique que les démarches éventuelles auprès de la Croix-Rouge allemande tendant à faire suspendre les mesures contre les internés juifs de Vittel n’auraient de chance d’aboutir que si les gouvernements des pays sud-américains reconnaissaient la nationalité de ces personnes. « Si, en effet, une telle déclaration ne parvenait pas au gouvernement allemand, l’intervention du C.I.C.R. à Berlin risquerait, non seulement de ne pas aboutir, mais peut-être même d’aggraver la situation déjà précaire de ces malheureux Juifs. » Le Comité demandait si le Vatican estimait pouvoir intervenir auprès des différents gouvernements sud-américains. A la lettre était jointe la liste des Juifs internés à Vittel avec l’indication des pays dont ils détenaient des passeports [58].
84Néanmoins, conformément à la suggestion du nonce apostolique, le Pr C.J. Burckhardt, du C.I.C.R., adressa une lettre à la Croix-Rouge à Berlin. Après un bref résumé de l’historique des internés juifs à Vittel, Burckhardt demandait à la Croix-Rouge allemande de faire des démarches auprès des autorités allemandes afin de laisser ces internés dans les camps où ils se trouvent jusqu’à la clarification définitive de la question de leur nationalité et de leur échange. Il soulignait que la Croix-Rouge internationale agissait en cette matière dans un but purement humanitaire [59].
85La réponse de la Croix-Rouge allemande du 15 mars 1944 était évidemment négative. Elle répétait seulement la position des autorités allemandes à l’égard des internés juifs à Vittel. « Les services compétents ne sont pas en mesure d’accorder de traitement privilégié ni en particulier l’émigration à des Juifs probablement pour la plupart de nationalité ex-polonaise qui se seraient procuré d’une façon ou de l’autre des passeports dits de complaisance d’Etats d’Amérique centrale ou du Sud. » Les autorités allemandes refusèrent même d’attendre le résultat des interventions du Comité International de la Croix-Rouge auprès des gouvernements latino-américains jusqu’à ce que la question de la reconnaissance de nationalité soit tirée au clair. La décision négative des autorités allemandes, selon les informations de la Croix-Rouge allemande, était définitive [60].
86Les démarches du Vatican auprès des gouvernements latino-américains semblaient avoir une espèce de succès seulement dans un cas. Toujours est-il que, le 26 janvier 194, le nonce apostolique Bernardini communiquait à la Croix-Rouge internaitionale les premières nouvelles parvenues du Vatican à ce sujet. Le cardinal Maglione, secrétaire d’Etat au Vatican, lui faisait savoir que, « suivant une communication de la Nonciature apostolique du Paraguay, les passeports des Juifs polonais réfugiés à Vittel, avaient été reconnus par ce gouvernement ». Quant aux Juifs espagnols, le cardinal, secrétaire d’Etat, informait la Nonciature apostolique à Madrid de leur sort [61].
87Le 7 février 1944, le cardinal Maglione fit savoir, par l’intermédiaire du nonce apostolique Bernardini, les nouvelles suivantes obtenues d’Amérique latine. Le ministre des Affaires étrangères du Chili assurait « avoir déjà donné des ordres à son représentant à Berne (Suisse) pour les cas analogues, de vérifier les personnes et de reconnaître les passeports accordés ». Le ministre de l’Intérieur d’Uruguay « est disposé à considérer chaque cas isolément afin de connaître les résultats, la date et les conditions de la concession des visas aux passeports en question ». Les gouvernements de Haïti et du Pérou « disent ne pas pouvoir reconnaître ces passeports parce que accordés d’une façon tout à fait illégale ». Le gouvernement de Cuba dit « ne pas pouvoir reconnaître ces passeports parce que les gouvernements anglais et des Etats-Unis d’Amérique s’y opposent ». Le cardinal Bernardini ajoutait, et pour cause : « Cette dernière raison me surprend un peu, car elle est en contradiction avec les assurances données par ces deux pays » [62].
88Les réponses des gouvernements d’autres pays arrivèrent quelques jours plus tard. Les gouvernements du Guatémala et du Salvador « regrettaient devoir répondre négativement » à la démarche du nonce apostolique. Le gouvernement du Nicaragua était disposé à reconnaître les passeports de huit familles au maximum, mais au préalable il désirait savoir d’une manière concrète quelles étaient les familles ou les individus en question afin que le gouvernement puisse envoyer les autorisations aux consulats. Et enfin une réserve : « Si ces familles ne sont pas des familles d’agriculteurs ou d’industriels, elles ne pourront pas rester après la guerre » au Nicaragua. Le gouvernement était, paraît-il, bien disposé, d’après le nonce apostolique, mais il voulait savoir les antécédents et les professions des Juifs signalés [63].
89Le 15 février 1944, le secrétaire d’Etat du Vatican fit savoir que le gouvernement de Costa-Rica « était disposé à accepter le même nombre de familles juives polonaises que le Nicaragua (c’est-à-dire huit - A.R.) ayant des passeports délivrés par ses consulats » [64].
90Sur la base de communications transmises par le secrétaire d’Etat du Vatican, le Comité international de la Croix-Rouge décida, le 11 février 1944, d’intervenir auprès de l’Union panaméricaine à Washington afin que celle-ci transmette aux gouvernements latino-américains concernés le vœu du Comité international de la Croix-Rouge de faire reconnaître les passeports délivrés aux Juifs polonais, hollandais et belges.
91Parallèlement, le Congrès Juif Mondial et d’autres organisations juives ne cessaient de faire des démarches auprès des gouvernements des Etats-Unis et de Grande-Bretagne afin de faire pression sur les gouvernements latino-américains en faveur des internés de Vittel en danger de mort.
92Le Comité des réfugiés de guerre intervenait pour sa part auprès des autorités gouvernementales des Etats-Unis. Toutes les organisations intéressées faisaient pression sur les chefs des gouvernements américain et britannique.
93Pour calmer les esprits des internés paniqués, un représentant du gouvernement suisse (la Suisse représentait les intérêts britanniques) se rendit à Vittel. Tous les Juifs, détenteurs des papiers sud-américains, demandèrent à être mis sur la liste palestinienne. Le délégué gouvernemental déclara qu’il n’avait pas obtenu l’autorisation de faire des échanges à destination de la Palestine. Les internés ont alors (le 19 mars 1944) alerté M. Weigart à Montreux (Suisse) et ont demandé qu’on leur envoie aussitôt des certificats d’émigration en Palestine qui, seuls, pouvaient leur sauver la vie [65].
94Le Comité interaméricain pour la défense politique (Inter-American Advisory Committee for Political Defense) résolut :
- de mettre en garde le gouvernement allemand;
- de demander aux gouvernements sud-américains de reconnaître les passeports ;
- de proposer un échange des internés civils sur une base collective afin d’assurer la libération des détenus de Vittel.
96Le 10 avril 1944, le représentant des Etats-Unis à Berne (Suisse) remit au Ministère des Affaires étrangères de Suisse un mémorandum dans lequel il demandait de faire des protestations à Berlin et d’exiger la reconnaissance des passeports latino-américains des internés de Vittel et d’autres camps d’échange. De surcroît, le gouvernement nord-américain fit connaître qu’il avait décidé d’inclure les détenteurs de ces passeports dans le prochain échange de détenus civils. On ignore la réponse du gouvernement allemand à cette démarche des Etats-Unis [66].
97Les efforts conjugués ont été en fin de compte couronnés de succès, mais hélas trop tard… La reconnaissance officielle des passeports des Etats sud-américains fut obtenu le 31 mai 1944. A cette date la tragédie des internés juifs de Vittel était consommée [67].
98Rappelons encore une fois qu’il était question alors de permettre l’entrée dans quelques pays latino-américains de deux cent cinquante personnes d’origine juive en tout et pour tout ! Mais n’anticipons pas.
6. Déportations du camp de Vittel vers Auschwitz via Drancy
99Le 28 février 1944, l’hôtel Providence, où étaient logés les Juifs d’origine polonaise et hollandaise, fut brusquement fermé et cerné par une garde allemande renforcée. Le commandant du camp, le capitaine Landhäuser, annonça qu’il avait reçu l’ordre de les transférer dans un autre camp. Un groupe d’environ cent soixante-dix personnes fut extrait de cet hôtel et fut dirigé sur l’hôtel Beau-Site qui se trouvait à l’extérieur du camp central de Vittel. L’hôtel était entouré des soldats allemands, le parc était fermé, et toute communication avec les internés était interdite. Le commandant du camp annonça un départ imminent des internés vers une destination inconnue [68].
100Le 18 avril 1944, cent soixante-treize personnes en possession de passeports de pays d’Amérique du Sud et d’Amérique centrale furent embarquées à la gare de Vittel en trois wagons et expédiées au camp de Drancy. Le poète Itzhak Katzenelson et son fils Zwi étaient du nombre. Le jour du départ de Vittel, il y eut quatre suicides et plusieurs dizaines de tentatives de suicide. Mme Schorr, la femme du grand-rabbin de Varsovie, s’est suicidée. M. et Mme Baumgarten se sont aussi suicidés ; ils ont été enterrés le 18 avril 1944 au cimetière de Vittel. Deux internés réussirent à s’évader dans la nuit : Szulim Dudelczak et Félix Ajzensztadt, de Varsovie [69].
101Au début du mois de mai 1944, un groupe de Palestiniens fut transféré de Drancy à Vittel. Ils racontèrent que les Juifs polonais, détenteurs de passeports d’Etats sud-américains, avaient été reconnus par les Allemands comme apatrides et déportés de Drancy à Auschwitz. Les internés de Vittel firent partie du convoi de mille déportés qui est parti de Drancy le 29 avril 1944 et qui est arrivé à Auschwitz le 1er mai 1944. Dès l’arrivée du convoi, neuf cents personnes (le poète Katzenelson et son fils entre autres) ont été tuées dans les chambres à gaz. Cinquante-deux femmes et quarante-huit hommes seulement ont été sélectionnés, enregistrés et laissés provisoirement au camp [70].
102Quatre semaines après le premier départ du camp de Vittel, le 16 mai 1944, eut lieu le second départ. Soixante Juifs (hommes, femmes et enfants), dont des malades hospitalisés dans les hôpitaux, ont été expédiés au camp de Drancy, d’où ils furent ensuite déportés à Auschwitz. Il s’agissait également des ressortissants sud-américains d’origine polonaise. Au début du mois d’août 1944, le dernier groupe d’une trentaine de nationaux latino-américains fut transféré de Vittel à Drancy, pour suivre le chemin de leurs prédécesseurs vers le camp d’Auschwitz [71].
103Il est à noter que le Dr. Nathan Eck et Adam Zurawin se sont évadés de trains de déportation entre Vittel et Drancy. Nous ne connaissons pas les noms d’autres évadés. Le Dr. Hilel Zajdman qui absorba une importante dose de teinture d’iode avant le départ, fut reconnu intransportable par les Allemands ; il a été hospitalisé et il a survécu.
104Tous les déportés du camp de Vittel ont été exterminés à Auschwitz.
105Après le dernier départ au début d’août 1944, il y avait au camp de Vittel quatorze internés juifs, détenteurs de passeports sud-américains (dont trois femmes au point d’accoucher, des grands malades, etc.) [72].
106Il importe de noter, qu’après la libération du camp par les armées alliées, on trouva, paraît-il, dans le bureau du commandant du camp les réponses officielles de certains gouvernements sud-américains confirmant la nationalité pour quarante personnes environ [73].
107Les déportations dramatiques de Vittel eurent lieu cette fois-ci ouvertement sous les yeux de centaines de détenus non-juifs, américains, britanniques, canadiens, etc., au vu et au su du monde entier. Les détenus de Vittel ont maintenu un contact régulier avec leurs parents et avec les organisations internationales à l’extérieur. La Croix-Rouge internationale et les puissances protectrices (la Suisse, la Suède, l’Espagne) avaient le camp de Vittel pour ainsi dire sous leur surveillance, et étaient, elles-mêmes, informées de tout ce qui s’y passait. C’est pourquoi le commandant du camp a tenu tellement à expliquer aux détenus non juifs de Vittel que les autorités allemandes compétentes avaient patiemment attendu pendant six mois après que les documents des Juifs sud-américains d’origine polonaise se fussent révélés non valables. Les internés et leurs amis au dehors avaient eu, prétendait-il, assez de temps pour. faire reconnaître la validité de ces documents, mais les Etats concernés n’avaient pas voulu les reconnaître. Etant donné que le camp de Vittel était destiné exclusivement à des étrangers, citoyens de pays ennemis, les autorités allemandes n’avaient pas pu garder ces apatrides plus longtemps. Pour cette raison, ceux-ci ont été transférés dans un autre camp. Telle était la version officielle allemande du drame de Vittel [74].
108Le drame de Vittel trouva, entre autres, son écho dans un rapport intitulé : « L’activité du Comité international de la Croix-Rouge en faveur des Israélites pendant la Seconde Guerre mondiale », paru dans la Revue de la Croix-Rouge internationale (n° 348 de décembre 1947). Il nous a paru opportun de citer intégralement le paragraphe consacré à ce sujet, d’autant plus que le texte n’est pas long. Il est cependant bourré d’inexactitudes, d’erreurs et de contre-vérités.
109« Les Israélites de Pologne ayant obtenu en France un visa d’entrée aux Etats-Unis furent considérés comme Américains par les autorités allemandes d’occupation. Ces autorités acceptèrent en outre de reconnaître la validité d’environ trois mille passeports délivrés à des Juifs par les consulats de pays d’Amérique du Sud. Les internés furent placés à Vittel dans les camps réservés aux Américains. Quand en 1942, l’Allemagne et les Etats d’Amérique du Sud entamèrent des négociations en vue d’échange d’internés, il apparut que la plupart des internés de Vittel, étaient porteurs de passeports de complaisance ; ces internés se trouvèrent en conséquence menacés d’être déportés. Le Comité international de la Croix-Rouge intervint en leur faveur par l’entremise de sa délégation à Berlin et obtint qu’ils soient maintenus à Vittel. Quelques-uns seulement furent déportés » (p. 957).
110Voici les résultats d’une analyse critique de ce texte (dans l’ordre chronologique) :
- Les Juifs de Pologne ont obtenu sur place des visas d’entrée aux Etats-Unis et aux Etats d’Amérique latine, et c’est en tant que ressortissants d’une puissance belligérante ennemie qu’ils ont été transférés au camp de Vittel, lequel était un camp d’échange.
- Les autorités allemandes n’ont pas « reconnu » mais « fait semblant de reconnaître » la validité d’environ trois mille passeports sud-américains. Ces trois mille passeports étaient en possession de nombreux internés dans différents camps d’échange (Bergen-Belsen, Tittmoning, Laufen, Liebenau, Biberach, Vittel) et non seulement de ceux de Vittel (environ 250 personnes).
- A Vittel, il n’y avait pas qu’un seul camp d’internement et d’échange, et celui-ci n’était pas réservé uniquement aux Américains. Il y avait là des Nord-Américains, des Britanniques, des Sud-Américains et des ressortissants d’autres puissances belligérantes. Seuls les Sud-Américains étaient logés dans des hôtels à part.
- Les pourparlers des autorités allemandes avec les autorités sud-américaines ont eu lieu fin 1943.
- Le Comité international de la Croix-Rouge intervint en faveur des internés juifs sud-américains par l’entremise de sa délégation à Berlin mais il n’a rien obtenu. Tous les Sud-Américains, sauf quatorze, au nombre de deux cent trentetrois ont été déportés à Auschwitz. Les quatorze personnes, détenteurs de passeports latino-américains, ont eu la vie sauve seulement après la libération du camp par les Alliés le 12 septembre 1944.
112Dans la nuit du 29 au 30 juin 1944, un groupe de deux cent vingt-deux Juifs est parti de Bergen-Belsen pour la Palestine via Vienne. A Vienne, un groupe de soixante Juifs de Vittel a rejoint ce convoi. Ils sont arrivés le 10 juillet 1944 à Haïfa. Il s’agissait évidemment de personnes munies de visas d’entrée en Palestine [75].
113Néanmoins, grâce à la reconnaissance, le 31 mai 1944, des passeports sud-américains en possession des internés d’autres camps d’échange nazis, plusieurs centaines de détenus juifs ont été sauvés. Il s’agit en l’occurrence de détenus du camp de Tittmoning (hommes), de Liebenau (femmes), de Bieberach et de Bergen-Belsen. En janvier 1945, par exemple, environ deux cent cinquante Juifs hollandais internés à Bergen-Belsen furent échangés. Ils ont été expédiés en Suisse, d’où ils ont été dirigés vers le camp de Philippeville en Afrique du Nord.
114Il est impossible de répondre, à l’heure actuelle, sans ambiguïté, à cette question : Pourquoi les autorités allemandes ont-elles déporté et exterminé les internés juifs sud-américains de Vittel, et ont-elles laissé en vie et échangé quelques centaines d’internés de la même catégorie dans d’autres camps d’échange ?
115Deux questions troublantes viennent à l’esprit à propos du sort tragique des « Sud-Américains » de Vittel. Elles concernent la date exacte de la reconnaissance formelle par les gouvernements des Etats latino-américains de la validité des passeports et la date exacte de la transmission de cette décision par les gouvernements des puissances protectrices aux autorités allemandes [76].
116Le camp de Vittel fut libéré par les armées alliées le 12 septembre 1944. Il fut définitivement liquidé vers le milieu d’octobre 1944 [77].
117Le chapitre « Les internés juifs sud-américains d’origine polonaise à Vittel » n’en était pas pour autant terminé. Leur recherche en est à son début. Le 15 janvier 1945, quatre mois après la libération du camp, la légation des Etats-Unis à Berne (Suisse) s’adressait au Comité international de la Croix-Rouge à Genève et lui demandait des renseignements détaillés sur le sort de 262 personnes déportées de Vittel (46 à Bergen-Belsen et 216 vers des directions inconnues en Allemagne). Elle joignait les listes nominatives de ces personnes. « Le Départements d’Etat et la Légation U.S.A. à Berne (…) apprécieraient grandement que le Comité international de la Croix-Rouge veuille bien transmettre ces listes à ses délégués en Allemagne avec la demande qu’ils tentent de savoir où se trouvent ces personnes, et qu’ils fassent des rapports sur leur identité et leur état de santé » [78].
118Que faut-il admirer en premier lieu : l’ignorance ou la naïveté des autorités américaines ? Elle nous paraît étrange cette naïveté et cette ignorance, vers la fin de la Seconde Guerre mondiale, à l’égard des Juifs en particulier. Les autorités américaines s’attendaient à obtenir de la part des délégués de la Croix-Rouge internationale des rapports détaillés sur l’identité, le lieu de séjour et la santé des Juifs déportés de France vers les camps de concentration en Allemagne.
119Toujours est-il que le Comité international de la Croix-Rouge, conscient de la perplexité dans ce domaine, donnait aux autorités américaines une réponse évasive : il va comparer les listes transmises par les autorités américaines avec les informations comprises dans ses fichiers et fera de son mieux.
120Et, pour terminer, il faut dire, à l’honneur des représentants en Suisse de la plupart des Etats concernés et des chefs des grandes organisations internationales et juives en particulier, qu’ils s’efforcèrent activement d’intervenir en faveur de quelque deux cent cinquante internés juifs sud-américains et que leur concours fut dicté par des motifs humanitaires, mais hélas, leurs efforts furent inefficaces et vains.
121A. R.
Les échanges germano-palestiniens pendant la IIe guerre mondiale
122Les échanges germano-palestiniens occupent une place à part. A première vue, la place privilégiée dans des échanges des Juifs palestiniens contre des Allemands palestiniens peut paraître paradoxale en raison de la politique par excellence pro-arabe et anti-sioniste du IIIe Reich hitlérien. Les chefs du gouvernement allemand étaient contre toute émigration de Juifs en Palestine, même d’enfants en danger de mort.
123Mais Heinrich Himmler, rappelons-le, est à la fois Reichsführer des S.S. et Reichskommissar für die Festigung des deutschen Volkstums (Commissaire du Reich à, la consolidation du germanisme), c’est-à-dire qu’il s’intéressait beaucoup au sort d’environ deux mille Allemands en Palestine. Un certain nombre d’entre eux avaient fait leur service militaire en Allemagne, ceux qui y étaient sous les drapeaux à la veille de la Seconde Guerre mondiale y sont restés. Leurs parents se sont adressés au gouvernement allemand et ont demandé de faire venir leurs familles internées en Palestine et en Australie par les autorités britanniques.
124Le ministre des Affaires étrangères allemand présenta alors un projet d’échange des Allemands en Palestine contre des Juifs de Palestine ou en possession de certificats d’entrée en Palestine qui se trouvaient dans les territoires occupés par le IIIe Reich. Le projet fut approuvé par Himmler.
125Le Dr Rudolf Kröning (Oberregierungsrat du R.S.H.A. - II B) fut délégué en Pologne occupée par les Allemands, pour y trouver des Juifs échangeables et en 1941 eut lieu le premier échange germano-palestinien. Bientôt le deuxième échange fut effectué. En juillet 1942, environ six cents Allemands palestiniens arrivèrent en Allemagne ; deux cents d’entre eux étaient dans la Wehrmacht. Le 13 novembre 1942, un troisième groupe d’Allemands palestiniens arrivait à Vienne [1].
126Le nombre des Allemands palestiniens internés était supérieur à celui des Juifs de Palestine dans les ghettos et les camps sous l’autorité allemande. C’est pourquoi le ministre des Affaires étrangères du Reich envisageait, fin janvier 1942, d’étendre le cercle de femmes à échanger, de prendre en considération non seulement les personnes originaires de Palestine, mais aussi d’autres sujets britanniques, originaires d’Egypte, d’Inde, de Ceylan, de Nouvelle-Zélande, etc., afin de rendre possible le « rapatriement » des femmes allemandes de Palestine sur une échelle plus large.
127Le 30 janvier 1942, le chef de la circonscription administrative militaire de Dijon (France) auprès du chef de l’état-major administratif militaire en France occupée, adressait au capitaine Landhäuser, alors commandant adjoint du camp de Vittel, une lettre dans laquelle il lui expliquait l’importance de l’échange des internés contre les Allemands et lui demandait de procéder à une enquête dans son camp.
128De deux rapports de Landhàuser (des 13 et 15 février 1942) il résulte qu’il y avait alors au total trente ressortissantes britanniques, dont huit originaires de Palestine décidées à partir pour la Palestine. De la note, rédigée vraisemblablement à Dijon à la suite d’une conversation téléphonique avec Vittel, il ressort qu’il y avait au camp, paraît-il, encore vingt-cinq autres Juives qui n’étaient pas décidées à aller en Palestine [2].
129Dans cet état de choses, il est clair que la nationalité palestinienne était recherchée par les Juifs internés ou camouflés dans les pays occupés par l’Allemagne. De surcroît, les autorités allemandes reconnaissaient non seulement les passeports palestiniens, mais également les certificats d’entrée en Palestine et les listes palestiniennes. On pouvait donc faire sortir de cette façon et sauver un grand nombre de Juifs des pays occupés par le IIIe Reich ; mais hélas, le gouvernement britannique délivrait à l’époque un nombre très restreint de certificats d’entrée en Palestine.
130Les échanges germano-palestiniens continuèrent jusqu’à la fin de l’occupation en France, et jusqu’à la fin de la guerre dans d’autres pays. Le chef de la Sipo/SD en France (BdS) ordonna, fin janvier 1944, que tous les « ressortissants palestiniens en France, qui entrent en ligne de compte comme matériel à échanger, soient réunis le 4 février 1944 au camp de Vittel. Ils doivent s’y rendre avec trente kilogrammes de bagages, avec leurs bijoux et objets de valeur en quantité appropriée ».
131Le chef de la Sipo/SD à Paris informa son homologue à La Haye que les Palestiniens aux Pays-Bas entrant en ligne de compte devaient être également transférés à Vittel [3].
132A ce moment-là, tous les Juifs hollandais prévus pour l’échange germano-palestinien, étaient d’ores et déjà au camp de Bergen-Belsen où, le 25 avril 1944, eut lieu le tristement célèbre appel spécial, au cours duquel le commandant du camp, en présence d’un fonctionnaire du R.S.H.A., donna lecture de la liste de deux cent soixante-douze personnes désignées pour être échangées. Le R.S.H.A. avait sélectionné ces personnes à partir de sept listes (mille trois cents détenteurs de papiers palestiniens) [4].
Annexes (Documents et témoignages)
- Lettre de Röthke, chef du Service IV B 4 de la Sipo/SD en France du 4 août 1943 adressée au chef du Service IV B 4 de la Sipo/SD aux Pays-Bas. Refus du transfert des Juifs hollandais au camp de Vittel à cause de la prochaine arrivée de transports de Juifs des pays occupés de l’Est.
- Lettre de Brünner, chef du Service IV B 4 de la Sipo/SD en France du 13 avril 1944 au R.S.H.A. (Berlin), concernant le transfert des Juifs apatrides du camp de Westerbork (Pays-Bas) au camp d’internement de Vittel (France).
- Lettre de Me J. Lubetzki, conseiller juridique de la Fédération des Sociétés Juives en France (dans la clandestinité), adressée aux Juifs français qui avaient versé au Consul de Cuba d’importantes sommes pour obtenir des visas d’entrée à Cuba.
- Témoignage de Léon Schneersohn (Paris), ancien interné du camp de Vittel.
- Texte de la carte postale, envoyée par le poète I. Katzenelson du camp de Vittel.
- Note (secrète) au dossier du 12 juin 1943 au sujet des instructions de Kröning 5 R.S.H.A. (Berlin) concernant les camps d’échange (les Allemands internés contre les Juifs internés).
- Lettre du chef du Service IV B 4 de la Sipo/SD en France du 6 avril 1944 adressée au Service IV B 4 du R.S.H.A. (Berlin) au sujet des passeports de complaisance des Etats sud-américains délivrés aux Juifs.
N° 1
134IV B - BdS - SA 331
135Paris, den 4.August 1943
136An dem
137Befehlshaber des Sicherheitspolizei und des SD
138Den Haag
139Abt. IV B 1 e
140Betr. : Ueberstellung von internierten Juden nach dem Internierungslager Vittel.
141Vorg. : Dort.FS Nr 24085 vom 28.7.1943.
142Das Internierungslager Vittel ist z. Zt. schon stark belegt. In den nächsten Tagen kommen weitere grössere Transporte aus O.S.Es löst sich z.Zeit daher nicht übersehen, ob die von dort abzuschiebenden Juden mit dem Staatsangehörigkeit von amerikanischen Feindstaaten nach in Vittel untergebrach werden könen. Ich werde in einigen Wochen Mitteilung über die Aufnahmfahigkeit des Lagers Vittel machen.
143I.A.
144(Röthke)
145SS-Obersturmführer
1462. Wvlg. am 21.8.1943.
147Arch. C.D.J.C. (Paris), Doc. N° XLIX-17.
N° 2
148IV B 4 - BdS - Br./Ne
149Paris, den 13 April 1944
150I. Fernschreiben.
151An
152das Reichssicherheits hauptamt
153IV B 4
154Betr. : Ueberstellung von staatenlosen Juden aus dem Lager Westerburg in das Internierungslager Vittel.
155Vorg. : Dort. FS vom 25.3.1944 Nr. 27 598.
156Der Leiter des Internierungslagers Vittel, Hauptmann Landhäuser, teilte anlässlich eines dienstlichen Aufenthaltes in Vittel, SS-Hauptsturmführer Dr. Iller mit, dass aus den Lager Westerburg wiederum Juden eingeliefert wurden, welche nach den Uberprüfungen des Hauptsturmführer Moes teilweise in die Kategorie III, (staatenlose Juden) und Kategorie II, (Juden deren Feindstaatsangehörigkeit noch fraglich ist), angehören würden.
157Hauptmann Landhäuser bittet, in Hinkunft nur Juden mit Feindstaatsangehörigkeit in das Internierungslager Vittel zu überstellen ; denn bei einer Uebernahme vom Juden aus Vittel nach Drancy schaltet sich immer wieder die Schutzmacht ein und interveniert, obwohl die Juden nicht die Feindstaatsangehörigkeit besitzen.
158BdsS — Referat IV B 4, im Auftrage : SS-Hauptsturmführer Brunner.
159I. AA. :
160(Brunner)
161Arch. C.D.J.C. (Paris), Doc. N° XLVIa-56.
N° 3
162Monsieur,
163Nous avons appris que vous aviez l’intention de vous rendre à la Havane. Vous avez obtenu à cet effet un visa du Consul de Cuba à Nice et vous lui avez déposé une garantie assez importante.
164L’entrée à la Havane est actuellement impossible. Aucune réponse favorable n’a jusqu’à présent été donnée aux organisations qui font des démarches pour faire lever cette interdiction.
165Le Consul de Nice a, sans doute, refusé le remboursement de la garantie que vous lui avez versée.
166Nous avons été saisis par plusieurs personnes du soin de réclamer à ce Consul les sommes versées.
167Nous venons vous demander si vous voulez vous joindre à elles.
168Dans l’affirmative, nous vous prions de nous fournir les renseignements les plus exacts sur votre cas, toutes les précisions sur votre identité, le montant des sommes versées, la date à laquelle elles l’ont été, etc.
169Nous ne vous demandons aucune rémunération pour les démarches mais naturellement nous ne vous donnons aucune garantie qu’elles seront couronnées de succès.
170Veuillez agréer, Monsieur, l’assurance de nos sentiments distingués.
171(Cachet)
172Pour M.M. Jarblum
173Ex-Président de la F.S.J.F.
174J. Lubetzki
17568, rue de la Joliette (58) Marseille.
176Archives du CDJC (Paris), Doc. N° CCXIV-55.
177F.S.J.F. : Fédération des Sociétés Juives en France.
178J. Lubetzki, avocat, conseilleur juridique de la F.S.J.F
N° 4
179den 8. April 1944.
180IV B 4 e — B.-Nr. 11451/44
181An
182das Reichssicherheitshauptamt
183IV B 1 — z.Hd. con -Stubaf. Günther
184in Berlin.
185Betrifft : Gefälligkeitspässe süd-amerikanischer Staaten für Juden.
186Von der Abwehrstelle Niederlande wurde eine grosse Anzahl Einschreich-Sendungen mit Gefalligkeitspässen für Juden, die durch süd-amerikanische Konsulate in der Schweiz ausgestellt waren, aus dem Postverkehr gezogen und der hiesigen Dienstelle zugeleitet. Auf Veranlassung von “-Hstuf. Moes vom Reichssicherheitshauptamt bei seiner Anwesenheit in den Niederlanden im Januar 1944 wurden diese Einschreib-Sendungen mit den Gefalligkeitspässen den betreffenden Juden nicht ausgehändigt. Die Passe befinden sich teils auf der hiesigen Dienststelle, teils im Lager Westerbork. Die Juden wurden bereits den Lagern Bergen-Belsen, Theresienstadt und Auschöitz eingewiesen.
187Sovvohl vom Bahnpostamt I in München als auch vom Generalkommissar für Finanz und Wirtschaft, Abtlg. Post- und franmeldewesen, Arnheim, liegen Nachfragen nach dem Verleib der B-Sendungen vor, in welchen die Schweizer Post-verwàltung auf Grund von Anfragen der Absender bittet, Nachierschungen über die B-Sendungen anzustellen. Um die Schweizer Postverwaltung endgültig aufklären zu können, bittet der Herr Präsident der Reichspostdirektion wünchen um Mitteilung, ob und wenn damit gerechnet werden kann, dass die angehaltenen B-Sendungen wieder in den freien Verkehr gesetzt werden oder ob die Absender auf Grund ihrer Nachfrage bei Beschlagnahme verständigt werden können. Falls diese B-Sendungen eingezogen bleiben, wird um Bericht gebeten, ob Einverständnis zur Zahlung der Schadenersatzsumme an die Schweizerische Postverwaltung besteht. Wie hier bekannt geworden ist, soll die Ersatzsumme pro E-Sendung ca. sfrs. 3 bis 400.betragen.
188Es wird um Mitteilung gebeten, in welcher Form dem Bahnpostamt 1 in München, sowie dem Generalkommissar für Finanz und Wirtschaft über die Bechlagnahme der E-Sendungen geantwortet werden soll. Soll dem Absender die Beschlagnahme der Sendungen mitgeteilt werden oder wird Zahlung der Ersatzsumme an die Schweizer Postverwaltung genehmigt ? Welche Dienstelle ist anzuweisen, die Zahlung des Schadenersatzes bei jeweiliger Reklamation vorzunehmen.
189Da die Angelegenheit eilt, wird um umgehende Entscheidung durch das RSHA. gebeten.
190Im Auftrage :
1912.) I C austragen und absenden.u.zurück an IV B 4 (Slottke)
192Arch. C.D.J.C. (Paris), Doc. N° DXV-611.
Récit de M. Léon Schneersohn (Paris), ancien interné du camp Vittel
195Les arrestations de sujets britanniques (et, par conséquent, des sujets palestiniens), en France, ont commencé aussitôt après l’armistice, en juin 1940 et ne visaient — au début — que les hommes de 16 à 60 ans. Ils furent d’abord internés dans différents petits camps ; en septembre 1940, ils furent concentrés dans deux camps près de Paris : à la Caserne de Saint-Denis (près de 2.800 internés), et à Drancy (près de 700 internés).
196Bientôt, à titre disciplinaire, 600 internés de Saint-Denis furent transférés à Drancy. Presque tous les internés juifs (85 % environ) furent envoyés à Drancy où se trouvaient également les équipages des navires commerciaux saisis par les Allemands, au sujet desquels on ignorait s’ils étaient prisonniers de guerre ou internés civils. L’attitude des Allemands était, à ce moment, relativement correcte, surtout par comparaison avec les autres camps. La Croix-Rouge britannique, à partir de janvier 1941, ravitaillait remarquablement bien les internés (1 colis toutes les 2-3 semaines, ensuite un colis une fois par semaine). Il faut noter que l’ordinaire des camps était très mauvais.
197En novembre 1940, commencèrent les arrestations de femmes, concentrées à Besançon (caserne Vauban) d’où les Allemands venaient d’évacuer les prisonniers de guerre français. Près de 5.500 femmes furent ramassées partout en France. Les casernes n’étaient pas du tout préparés pour en recevoir un tel nombre, et la situation devint désastreuse dès le début. Ainsi, il n’y avait en tout que 6 w.-c. La nourriture était telle que 50 décès survinrent en 2 jours (empoisonnement).
198En 1941, après intervention de la Croix-Rouge et sur l’insistance du gouvernement britannique (menaces de représailles), les femmes furent transférées à Vittel et concentrées dans les hôtels. Au début de 1942, les Allemands procédèrent à un « regroupement familial », envoyant à Vittel tous les maris, fils, filles, pères des internés de Vittel, se trouvant ailleurs. Les jours où arrivaient des convois, les Allemands donnaient des fleurs aux internés attendant leurs parents, photographiant et filmant l’arrivée : Vittel était un camp de propagande.
199Sans en donner les raisons, les Allemands opposaient toutes sortes d’empêchements au regroupement familial des Juifs, et seulement après maintes interventions des Comités de camp et de la Croix-Rouge, cette disposition fut étendue aux Juifs. Personnellement, et bien que ma femme se trouvait à Vittel, je n’y suis arrivé que fin 1942, après maintes démarches et insistances.
200Au début de 1943, arriva un premier transport de Pologne : 15 chrétiens et 180 Juifs. La plupart des Juifs possédaient des certificats ou des photocopies de titres d’acquisition de terrains, de pays de l’Amérique Centrale ou du Sud et, de ce fait, devaient être considérés comme citoyens de ces pays. (Il est à noter que les sujets palestiniens habitant la Pologne, ne firent pas partie de ce groupe. Ils furent, en effet, tous envoyés directement à Auschwitz).
201Quelques mois plus tard, après la démolition du ghetto de Varsovie, arriva un deuxième transport. Les membres de celui-ci avaient été témoins de la destruction du ghetto. Cette circonstance explique sans doute pourquoi certaines mesures spéciales furent prises à leur égard par les Allemands. Ils furent concentrés dans un hôtel isolé et éloigné, avec des sentinelles à toutes les portes et avec interdiction absolue de tout contact avec le reste du camp. Ce n’est qu’après intervention et protestation du Comité du Camp et à la veille d’une visite imminente d’une délégation du Comité d’Information de la Croix-Rouge, qu’ils furent intégrés dans la vie du camp.
202Ces deux transports comprenaient 350 personnes environ. Il faut dire que les documents étaient généralement douteux, mais les Allemands n’étaient pas très stricts, désireux sans doute de disposer de « monnaie d’échange ».
203Quand se posa la question de la reconnaissance de la validité de ces titres par les pays en cause, question qui, à une ou deux exceptions près — fut malheureusement résolue par la négative, les Allemands isolèrent à nouveau ces internés, dans l’hôtel Beau-Site, et les déportèrent en deux convois successifs. Aucun d’eux n’y a survécu. Furent exceptés quelques titulaires de passeports réguliers, et quelques malades se trouvant à l’hôpital.
204Entre cette deuxième isolation et le départ des convois, plusieurs semaines s’écoulèrent : entretemps, toutes sortes de mesures furent entreprises légalement par la Croix-Rouge, clandestinement — par l’envoi en Suisse d’informateurs « aryens », ainsi que de 2 internés auxquels une évasion fut facilitée et qui, en Suisse, furent à nouveau internés par les autorités fédérales.
205Ces deux derniers messagers écrivirent à Genève à M. Morgenstern et M. Silberschein, avec demande de venir les voir d’urgnce au sujet de la catastrophe menaçant les Juifs polonais internés à Vittel — mais, ni l’une ni l’autre de ces personnalités ne se dérangèrent suffisamment vite : les 8-10 journées perdues furent fatales. Il importe de noter qu’après la libération de Vittel par les armées alliées on trouva, dans les bureaux du commandant du camp Landesmann [erreur : Landhäuser - A.R.] les réponses officielles de certains de ces pays sud-américains, confirmant la nationalité des intéressés, pour 40 personnes environ. En ce qui concerne les autres pays, le délégué du Comité international de la Croix-Rouge fit malheureusement savoir que leurs gouvernements et leurs représentants à Genève refusaient de le reconnaître officiellement.
206A l’honneur des représentants à Genève de la majorité de ces pays, il faut dire qu’ils s’efforcèrent activement d’intervenir en faveur des internés, et que leurs concours, infficace hélas, fut gratuit et dicté par des motifs humanitaires. La réexpédition en Pologne des convois s’explique par le fait que la proportion des internés dont la citoyenneté fut reconnue par les pays en question (c’est-à-dire les 40 personnes ci-dessus), n’était pas assez forte ; en conséquence, on les renvoya tous en bloc. Ainsi, le manque d’empressement de la majorité des pays fut fatal à cette collectivité dans son ensemble.
207Le jour de la déportation, il y eut une douzaine de suicides : empoisonnements, sauts par les fenêtres… Les internés, évidemment, n’ignoraient rien du sort qui les attendaient… Les dates fatales furent : celle de l’isolation (avril 1944) ; celles des départs des convois vers Auschwitz (fin mai et commencement juillet 1944).
208Un dernier épisode : le jour où la nouvelle isolation fut annoncée, tombait la veille du Pessach. Dans d’attente du départ, qu’on croyait imminent, une partie des hommes ne dormit pas, et passa la nuit à cuire des Mazoth…
209Arch. du CDJC (Paris), Doc. N° CCI-65.
210REMARQUE. — L’auteur de ce témoignage M. Léon Schneersohn, mort il y a quelques années, était le fils cadet d’Isaac Schneersohn (1879-1969), fondateur et président du Mémorial du Martyr Juif Inconnu et du Centre de Documentation Juive Contemporaine à Paris.
211Le récit de M. Schneersohn comprend quelques inexactitudes, il doit être traité avec la prudence d’usage due à tous les récits et témoignages.
Bibliographie
Bibliographie
- I. Baskind Ber, La grande épouvante. Souvenirs d’un rescapé du ghetto de Varsovie. Traduits et adaptés par E. Brunet-Beresovski. Ed. Calman-Lévy, Paris, 1945.
- Ghetto de Varsovie. Journal de Mary Berg. Recueilli par S.L. Schneiderman. Traduit par L. Baillon de Wailly. Editions Albin Michel, Paris, 1947.
- La Persécution raciale, Documents pour servir à lhistoire de la guerre. Crimes ennemis en France. Service d’Information des crimes de guerre. Préface de Jacques Billet. Enquête menée par Roger Berg. Office Français d’édition, Paris, 1947.
- International Tracing Service H.Q. Catalogue of Camps and Prisons in Germany and German-Occupied Terrotories. Sept. I et 1939 - May 8 th. 1945. AROLSEN, Juluy 1949 (Ilag Vittel).
- Fascina P.G., Problème de l’étude du camp de Bergen-Belsen, publié dans la « Revue d’Histoire de la IIe Guerre mondiale », n° 45, janvier 1962.
- Kolb Eberhard, Bergen-Belsen (1939-1945), Hanovre, 1962.
- Eck Nathan, The Rescue of Jews With the Aid of Passeports and Citizenship Papers of Latin Afmerican States, publié dans « Yad Vashem Studies », I, Jérusalem, 1957.
- Hefte von Auchwitz n° 7 (1964). Chronique des événements rédigée par Danuta Czech.
- Poirmeur A., Compiègne (1939-1945), chez l’auteur, Compiègne, 1948.
- Rutkowski Adam, « Déportations des Juifs de France vers Auschwitz et Sobibor », publié dans « Le Monde Juif » (Paris) n° 57-58, Paris, 1970.
- Katzenelson Itzhak, Vittel Diary (22-5-1943 - 16-9-1943), Kiboutz Lohamei Haguetaoth, Tel-Aviv, 194.
- Turkow Jonas, « La Tragédie de Vittel », publié dans le quotidien « Unzer Wort » (Paris), yiddish, n° 65 du 17 mars 1973.
- Turkow Jonas, La fin des illusions (yiddish), Hamenorah, Tel-Aviv, 1973.
- Neustadt Majlech, Holocauste et révolte des Juifs à Varsovie (yiddish), Tel-Aviv, 1948.
- Kalman Jehudit, « Avec Itzhak Katzenelson dans un camp » (yiddish), publié dans « Pariser Zeitschrift » (Paris), n° 9 (1955).
- Zajdman Hilel, Le Journal du ghetto de Varsovie (yiddish), Buenos-Aires, 1947.
Mise en ligne 03/01/2021
Notes
- (*)
- (1)La Lorraine fut rattachée au Reich en novembre 1940 ; elle a formé avec la Sarre le Gau Westmark. Revue d’Histoire de la IIe Guerre mondiale n° 54 (1964), p. 10. Numéro spécial. Archives du C.D.J.C. (Paris), DXV-553.
- (2)P.G. Fascina, « Problème de l’étude du camp de Bergen-Belsen », Revue d’Histoire de la IIe Guerre mondiale n° 45, janvier 1962, p. 8.
- (3)Vittel (environ 4.000 habitants) est un chef-lieu de la commune de l’arrondissement de Neufchâteau sur le Petit-Vair (dans les Vosges).
- (4)Catalogue of Camps, Prisons in Germany occupied Territories, International Tracing Service, AROLSEN, 1949, p. 58.
- (5)Journal de Mary Berg. Le Ghetto de Varsovie. Recueilli par S.L. Schneiderman. Traduit par L. Baillon de Vailly. Editions Albin Michel, Paris, 1947, pp. 245-250 ; Ber Baskind, La Grande épouvante. Souvenirs d’un rescapé du ghetto de Varsovie. Traduits et adaptés par E. Brunet-Beresovski. Editions Calman-Lévy, Paris, 1945, pp. 126 et s.
- (6)Ibidem.
- (7)Le Journal tenu à Vittel par le poète Itzhak Katzenelson (Vittel Diary) est presque entièrement consacré à l’histoire dramatique du ghetto de Varsovie ; Le Journal de Mary Berg est en majeure partie consacré au même sujet.
- (8)Archives du Centre de Documentation Juive Contemporaine à Paris (par la suite : C.D.J.C.), XLVIa-56. Lettre de Brunner du 13 avril 1944.
- (9)Arch. C.D.J.C., X-62. Lettre de J.E. Schwarzenberg (du Comité international de la Croix-Rouge) (C.I.C.R.) à Genève du 24 février 1944 ; Arch. C.D.J.C., CC-65. Récit de Léon Schneersohn ; Nathan Eck, The Rescue of Jews With the Aid of Passeports and Citizenship Papers of Latin American States, publié dans Y ad Washem Studies 1, Jérusalem, 1957, p. 128.
A New York, le prix des « papiers sud-américains » était de 200 à 300 dollars.
(9a) Journal de Mary Berg, op. cit., pp. 175-185. - (10)N. Eck, op. cit., pp. 128, 144 et 145.
- (11)Arch. C.D.J.C., CCXIV-53. La lettre est signée aussi par les victimes des agissements malhonnêtes du consul cubain à Nice. M” J. Lubetzki agissait au nom de M. Jarblum, président de la Fédération des sociétés juives en France (dans la clandestinité).
- (12)N. Eck, op. cit., pp. 129 et 130 ; P.G. Fascina, op. cit., p. 22 ; Journal de Mary Berg, op. cit., pp. 175-185 et p. 236.
- (13)Le transport du 18 janvier 1943 n’était pas le premier à quitter la prison de Pawiak pour l’étranger. Des groupes d’étrangers avaient déjà été expédiés aux camps de Tittmoning et de Liebenau en Allemagne.
- (14)B. Baskind, op. cit., p. 108.
- (15)L’auteur était avant la guerre chef des Archives de la Communauté cultuelle juive à Varsovie, puis du Judenrat à Varsovie.
- (16)Hilel Zajdman, Le Journal du ghetto de Varsovie (yiddish), Buenos-Aires, 1947, p. 195.
L’auteur est ensuite parti, lui-même, à Vittel, en tant que sujet sud-américain. Il est l’un des rares survivants de Vittel. - (17)Ibidem, pp. 167-170.
- (18)Ibidem.
- (19)Procès Eichmann, doc. n° 1.164; audience n° 33 du 9 mai 1941 (copie aux Arch. C.D.J.C. à Paris) ; P.G. Fascina, op. cit., pp. 9 et 10, 38. Lettre en date du 5 mai 1943, signé Dr. Harter, S.S.-Brigadeführer et général-major de la police aux Pays-Bas ; Eberhard Kolb, Bergen-Belsen (1939-1945), Hanovre, 1962, pp. 49 et 50.
- (20)Procès Eichmann, doc. n° 1.592 ; Arch. C.D.J.C., DXXVI-1952. Note au dossier en date du 12 juin 1943.
- (21)
- (22)Arch. C.D.J.C., XLVI-XLVIa. Chemise G. ; Röthke demande des indications plus détaillées pour re trouver Gollob. Le 20 octobre 1943, Günther (R.S.H.A.) câble qu’il n’a pas d’autres informations, mais, si on le retrouve d’une quelconkue façon, il faut le déporter aussitôt à Auschwitz.
Voir aussi le Procès Eichmann, doc. n° 665, et le sténogramme de l’audience n° 33 du 9 mai 1961. - (23)Ernst Moes, fonctionnaire du Service IVB4 au R.S.H.A. (Berlin).
- (24)Procès Eichmann, doc. n° 611 ; Arch. C.D.J.C., DXV-611. Lettre du 8 avril 1944.
- (25)Arch. C.D.J.C., LIX-26. Télégramme n° 2358. Pour information : « Aux commandants de la Sipo/SD à Cracovie et à Paris ». Dans la note manuscrite figurant sur le télégramme, Röthke demande de lui communiquer le nombre de Juifs sud-américains au camp de Drancy.
- (26)Arch. C.D.J.C., XLIX-26. Télégramme n° 56185.
- (27)N. Eck, op. cit., p. 146 ; E. Kolb, op. cit., pp. 49 et 50.
- (28)Itzhak Katzenelson, Vittel Diary, Kibboutz Lohamei Haghetaoth, 1964, pp. 26 et 43.
- (29)B. Baskind, op. cit., pp. 119, 120 et 123.
- (30)Archives du Ministère des Anciens combattants et victimes de guerre à Paris (par la suite : Arch. M.A.C.), L-A ; n° 9085 - n° 9086 ; Arch. C.D.J.C., DLIX-I.
- (31)Le Journal de Mary Berg, op. cit., p. 250.
- (32)Arch. C.D.J.C., LXIX-17. Télégramme n° 48630 de Werner et télégramme n° 24085 de Rothke du 4 août 1943.
- (33)Arch. C.D.J.C., XLVI-56. Télégramme de Brunner au R.S.H.A.-IV B4 du 13 avril 1944.
- (34)Ibidem : Le Journal de Mary Berg, op. cit., pp. 255 et 265.
- (35)Le Journal de Mary Berg, op. cit., p. 266; I. Szmulewicz, Le Chemin de souffrance d’un savant juif (yiddish), Forward (New York) du 31 mai 1976.
- (36)B. Baskind, op. cit., p. 125. Ils sont partis de Varsovie le 11 novembre 1943. C’était M. Kenigel, connu pour sa collaboration avec la Gestapo de Varsovie.
- (37)A. Poirmeur, Compiègne (1939-1945), chez l’auteur, Compiègne, 1948, p. 136.
- (38)Journal de Mary Berg, op. cit., p. 274 ; Arch. C.D.J.C., DXV-553. Procès Eichmann ; B. Baskind, op. cit., p. 128.
- (39)Ministère de la Santé et de la Famille de Belgique. Liste alphabétique des personnes arrêtées par l’autorité occupante en tant qu’Israélites et Tziganes et déportées par les convois du camp de rassemblement de Malines entre le 4 août 1943 et le 31 juillet 1944.
- (40)Arch. C.D.J.C., X-59. Rapport de R.A. Haccius (du Comité international de la Croix-Rouge) en date du 23 décembre 1943. Le rapport est basé entre autres sur le témoignage de Benjamin Grad, citoyen britannique, rapatrié du camp de Vittel.
- (41)Jonas Turkow, La fin des illusions (yiddish), Hamenorah, Tel-Aviv, 1973 ; Jonas Turkow, « Unzer Wort » (Paris), n° 65 du 17 mars 1973 (yiddish).
- (42)La femme du poète, Benzikel et Benjamin étaient ses fils aînés. Ils sont tous morts à Treblinka (en été 1942 et au printemps 1943).
- (43)I. Katzenelson, Vittel Diary, op. cit., pp. 43-48.
- (44)Jehudit Kalman, Avec Itzhak Katzenelson dans un camp (yiddish), « Parizer Zeitschrift » (Paris), n° 9 (1955), pp. 130 et 131.
- (45)I. Katzenelson, Vittel Diary, op. cit., pp. 28-31, 37 et 39.
- (46)M. Neustadt, L’Extermination et l’insurrection des Juifs de Varsovie (yiddish), Tel-Aviv, 1948, pp. 628 et 629. Reproduction photographique de la carte postale.
- (47)Journal de Mary Berg, op. cit., p. 273. Les ressortissants de Palestine étaient considérés comme Britanniques.
- (48)Adam Rutkowski, « Déportation des Juifs de France vers Auschwitz-Birkenau et Sobibor », Le Monde Juif (Paris), n° 57-58 (1970), p. 72 ; Liste de déportation n° 72 (n° 411) aux Archives du C.D.J.C. à Paris.
Au camp de Drancy, Itzhak Katzenelson avait le numéro matricule 20204; Hefte von Auschwitz n° 7, p. 92. Chronique des événements rédigée par Danuta Czech ; I. Szmulewicz, op. cit. - (49)Arch. C.D.J.C., XLIX-26. Télégramme n° 56185. Brunner évalue à cent cinquante environ le nombre de Juifs de Varsovie ; J. Turkow, op. cit.
- (50)P.G. Fascina, op. cit., pp. 23 et 24.
- (51)J. Turkow, op. cit.
- (52)N. Eck, op. cit., pp. 147 et 148.
- (53)Arch. C.D.J.C., CDLXIX-60. Télégramme de Barou et Easterman (Londres) à Goldmann et Tartakower (New York) du 7 avril 1944.
A.L. Kubowitzki-Kulbovy (1896-1966) était, pendant la IIe Guerre mondiale, secrétaire général du Congrès Juif Mondial, dont le siège était à New York. Le Dr. N. Goldmann (né en 1895) était le président du Congrès, Easterman, Noah Barou (1889-1955), le Dr. Arie Tartakower (né en 1897) en étaient les chefs. Le Dr. Ignacy (Isaac) Schwarzbart (1888-1961) était alors membre du gouvernement polonais en exil à Londres (1940-1945). - (54)Arch. C.D.J.C., CDLXIX-60b. Télégramme de Kubowitzki aux Barou et Easterman.
- (55)Arch. C.D.J.C., CDLXIX-60a. Télégramme de Kubowitzki à Easterman du 24 avril 1944.
- (56)Arch. C.D.J.C., X-60. Lettre du 30 décembre 1943.
Mme Sternbuch a fait part à M. Schwarzenberg de la bienveillance avec laquelle le nonce apostolique à Berne, Mgr Bernardini, suivait l’affaire des internés juifs de Vittel, et lui a fait comprendre que le nonce attendait une lettre à ce sujet. - (57)Arch. C.D.J.C., X-60a. Copie de la lettre (en italien) du 6 janvier 1944.
- (58)Arch. C.D.J.C., 60 b. Copie dactylographie de la lettre de J.E. Schwarzenberg à Mgr Ph. Bernardini du 14 janvier 1944.
La copie de la liste nominative des internés dont il est question ne s’est pas conservée dans les archives du C.D.J.C. à Paris. - (59)Arch. C.D.J.C., X-60c. Copie dactylographiée de la note (en allemand) de Hans Bachmann, secrétaire général du Comité international de la Croix-Rouge, pour Hartmann du 17 janvier 1944.
- (60)Arch. C.D.J.C., X-61. Lettre de Hartmann à Bachmann.
- (61)Arch. C.D.J.C., X-60d et 60e. Copies des lettres.
- (62)Arch. C.D.J.C., X-60f. Copie.
- (63)Arch. C.D.J.C., X-60g.
- (64)Arch. C.D.J.C., 60h. Lettre du nonce apostolique Bernardini au président du Comité international de la Croix-Rouge à Genève.
- (65)J. Turkow, op. cit. Il paraît que ces certificats sont arrivés à Vittel mais trop tard, après le départ des internés de Vittel.
- (66)N. Eck, op. cit., p. 150.
- (67)P.G. Fascina, op. cit., p. 22, note I ; N. Eck, op. cit., p. 51.
- (68)Arch. C.D.J.C., Doc. CCI-65.
Le mémorandum était soumis environ une semaine avant le départ du premier convoi de Vittel vers Auschwitz via Drancy. - (69)La Persécution raciale dans la série « Crimes ennemis en France », Documents pour servir à l’histoire de la guerre, Service d’Information des crimes de guerre, Office français d’édition, enquête menée par Roger Berg, Paris, 1945, pages 154 ; I. Katzenelson, Vittel Diary, op. cit., p. 38 ; N. Eck, op. cit., p. 149.
- (70)Arch. C.D.J.C., Liste de déportation n° 72 du 29 avril 1944. I. Katzenelson figure sur cette liste nominative sous le n° 411 ; Hefte von Auschwitz (Oswiencim, Pologne), n° 7 (1964), p. 91.
- (71)La Persécution raciale, op. cit., p. 154.
- (72)J. Turkow, op. cit. ; P.G. Fascina, op. cit., pp. 22 et 23 ; N. Eck, op. cit., p. 151.
Le Dr. Nathan Eck et le Dr. Hilel Zajdman ont survécu, le premier est en Israël, l’autre aux Etats-Unis. - (73)Arch. C.D.J.C., CC-65.
- (74)N. Eck, op. cit., p. 150.
- (75)E. Kolb, op. cit., p. 92.
- (76)N. Eck, op. cit., p. 152 ; l’Espagne était la puissance protectrice des citoyens du Paraguay, la Suisse, de ressortissants nord-américains et britanniques.
- (77)Ibidem ; Vittel Diary de Itzhak Katzenelson, op. cit., p. 40.
- (78)Arch. C.D.J.C., doc. X-63. Copie.
- (1)E. Kolb, Bergen-Belsen (1939-1945), op. cit., pp. 88-91.
- (2)Arch. CDJC, LXXV-229, 229 a, b, c, d et e. Lettre de Delcker à Landhäuser du 30 janvier 1942 et lettres-rapports de Landhàuser des 13 et 15 février 1942. Ces rapports comprennent des listes nominatives de femmes sujettes britanniques internées à Vittel.
- (3)Rijksinstitut voor Oorlogsdocumentatie, Amsterdam (par la suite RvO) 174 c : Eberhard Kolb, Bergen-Belsen (1939-1945), Hanovre, 1962, p. 91.
- (4)Ibidem. Les critères de la sélection sont inconnus, mais il est pourtant évident que les Allemands n’ont pas voulu sélectionner des hommes en âge de porter des armes.