L’allocution du professeur A. Steg
1ALORS que bientôt trente années nous en séparent, le soulèvement du ghetto de Varsovie évoque toujours en nous la même émotion et la même tristesse. A cette émotion et à cette tristesse se mêlent depuis quelques années une profonde amertume. Que voilà des sentiments bien surprenants à l’évocation d’un combat marqué par tant de bravoure. L’on s’attendrait plutôt, en ce jour solennel où nous commémorons leur révolte, que nous proclamions notre admiration devant les combattants du ghetto ou notre fierté devant leur force d’âme. En réalité, le drame fut trop atroce pour qu’à son évocation nous puissions céder à quelque enthousiasme ou à la dithyrambe. Le soulèvement du ghetto de Varsovie représente sans aucun doute l’un des épisodes les plus dramatiques et les plus glorieux de l’histoire juive et peut-être même de toute l’histoire des hommes. Mais rien ne saurait atténuer notre aff1iction au souvenir du combat, sublime certes, mais hélas! mortel de tant de milliers de nos frères. Rien ne saurait nous faire oublier que leur extraordinaire révolte suicidaire marque l’anéantissement d’un des foyers les plus lumineux de la spiritualité juive. Non, rien ne saurait nous faire oublier qu’avec la destruction du ghetto de Varsovie disparaissait toute une jeunesse merveilleuse et un centre juif millénaire. « Nulle part au monde », nous rappelle A. Rudnicki, « le vendredi soir, ne brûlaient autant de bougies dans des chandeliers d’argent dressés sur des tables ornées de serviettes brodées du Sabbat ». Voilà qui explique notre émotion, voilà qui explique notre tristesse. Mais pourquoi de l’amertume ? Parce que vingt-huit ans après le sacrifice des révoltés du ghetto, nous sommes obligés de nous demander si le monde n’a pas délibérément étouffé le message que par delà l’holocauste ils nous ont transmis.
2Que voulaient en effet ces révoltés, quel esprit animait leur combat? Certes, ce qu’ils désiraient avant tout, c’était combattre, mourir en combattant, tuer leur bourreau en se tuant et par leur lutte et leur courage affirmer leur dignité d’homme face à la bête nazie. Mais, outre cette farouche détermination, un souci majeur a inspiré leur révolte, c’était celui de porter témoignage. Il fallait coûte que coûte que le monde soit mis au courant. Or, ils savaient par expérience de quel peu de poids serait une proclamation ou un simple message qu’ils adresseraient au monde libre. Non, le seul langage qui peut-être allait leur permettre d’alerter les hommes c’était celui de la violence, du combat, de la résistance, de l’héroïsme. Alors, le combat, ils l’ont mené mieux que personne, leur résistance fut plus vaillante que celle d’aucun autre et leur héroïsme le plus éclatant qu’on ait connu.
3Mais pourquoi se sont-ils ainsi acharnés au prix de leur vie à réveiller l’univers?
4Ce n’était certes pas qu’ils espéraient un quelconque secours pour eux-mêmes, ils savaient bien que tous allaient mourir.
5Mais c’était d’abord et surtout pour rompre l’intolérable silence qui entourait le massacre des Juifs et qui les humiliait plus même que l’inhumanité des SS. Eux que l’on traitait comme des rats, ils étouffaient de rage devant l’implacable conjuration du silence dont ils étaient l’objet. Ils crevaient de rage, il n’y a pas d’autre terme, de se rendre compte, comme l’a dit André Neher, qu’à Varsovie comme à Auschwitz — tout se déroulait, s’accomplissait, se consommait durant des semaines, des mois, des années, « dans le silence absolu à l’écart et à la dérive de l’histoire ». Il fallait donc, coûte que coûte, briser ce silence.
6Ensuite, ils pouvaient espérer que les alliés alertés par leur révolte allaient peut-être réagir et allaient peut-être entreprendre quelque action pour tenter d’épargner leurs frères des autres ghettos ou des camps.
7Mais surtout, bien au delà même de cet espoir, ils voulaient témoigner devant l’histoire, convaincus que lorsque plus tard le monde apprendra ce qu’avait été leur martyre et ce qu’avait été leur combat, le bouleversement et le retentissement seraient tels que plus jamais de semblables monstruosités ne pourraient se reproduire. Ainsi donc, ce qui, par dessus tout animait ces hommes, au moment de leur sacrifice — et après qu’ils aient pendant des années éprouvé dans leur corps et dans leur âme quels abysses pouvaient atteindre la sauvagerie de l’homme — C’était une foi suprême et insensé en l’homme et la dignité humaine.
8Et c’est ce qui explique l’incroyable acharnement des habitants du ghetto à tout mettre en œuvre pour préserver les témoignages. C’est ce qui explique l’œuvre surhumaine accomplie dans les conditions que l’on sait par Emmanuel Ringelblum et son équipe.
9C’est ce qui explique qu’au moment même des ultimes combats un des soucis essentiels ait été d’enterrer les documents. Mais écoutez, écoutez donc comme le demande Michaël Borwicz ce qu’écrit un jeune garçon de dix-neuf ans, David Graber, en plein combat, le jour même où il va mourir: « Avec quelle joie n’avonsnous pas recueilli chaque pièce nouvelle. Nous sentions notre responsabilité. Non, nous n’avions pas craint les risques étant conscients de perpétuer tout un morceau d’Histoire et cela vaut bien plus cher que la vie d’un particulier… », et quelques heures plus tard, alors même qu’il va mourir: « La rue voisine est déjà envahie, nous nous préparons au pire, nous nous dépêchons, nous allons creuser le dernier trou, ah! pourvu que nous réussissions à les enterrer ! ». Vous entendez! ce jeune garçon, cet adolescent de dix-neuf ans, traité par les Allemands comme de la vermine, torturé, humilié, avili, il se sentait responsable! Responsable devant les hommes, responsable devant l’histoire! Quel extraordinaire exemple d’espoir en l’homme !…
10Mais aujourd’hui, vingt-huit ans plus tard, quel extraordinaire exemple aussi d’espoir bafoué et trahi!
11Pendant des années, nous avons pu croire que le message du ghetto avait été entendu. Pendant près de vingt-cinq ans, les antisémites se sont terrés. Et puis, il y a eu 1967. Il y a eu la guerre des Six jours, et d’un coup, la bête s’est réveillée. Que les Juifs aient eu du courage, un courage surhumain à Varsovie, que les Juifs aient eu un comportement héroïque, on voulait bien l’admettre, on voulait bien le proclamer puisqu’ils étaient morts. Mais qu’un même courage, un même héroïsme aboutisse non a leur massacre mais à la victoire des laits, voilà qui était proprement insupportable et qui explique le déchaînement furieux de l’antisémitisme sous tonne d’antisionisme.
12Seulement, voilà, si le monde entier oubliant Varsovie, refuse le message des révoltés, si le monde occidental, loin de tenter de se racheter, refuse de reconnaitre sa responsabilité et par là même sans doute se condamne à sa propre des truction, nous, Juifs, nous ne les trahirons pas, nous n’oublierons pas les leçons du soulèvement.
13La première leçon que nous en avons tirée c’est que plus jamais nous ne nous laisserons faire. Qu’on n’attende de nous devant la moindre provocation ni pudeur, ni tolérance, ni compréhension. De toutes nos forces, sans faiblesse, nous dénonçerons l’ignominie.
14Nous n’admettrons plus qu’on exalte le sacrifice des héros de Varsovie pour mieux souligner par contraste la soi-disant passivité des autres martyrs juifs des camps.
15Nous n’admettrons plus qu’on magnifie les morts pour mieux accabler les survivants et pour mieux en préparer la destruction.
16Nous n’admettrons plus la dérision qui consiste, pour les dirigeants polonais, ceux-là même qui en expulsant, emprisonnant les Juifs de leur pays parachèvent la « solution finale », à faire visiter le ghetto ou à évoquer la révolte sans mentionner que ce sont des Juifs qui y ont combattu et qui y sont morts. De même que nous n’admettrons pas que les Russes commémorent Babi Yar en interdisant toute mention aux Juifs qui y furent massacrés.
17Nous n’admettrons plus qu’on fasse semblant de pleurer six millions de martyrs et qu’on traite les survivants de « Nazis ». Il y a des limites au sacrilège. Honte à ceux qui supportent sans réagir de telles abominations! Maudits soient ceux qui les profèrent !
18Une deuxième leçon nous est enseignée par le ghetto de Varsovie et par l’Holocauste, c’est qu’il nous faut veiller à ne plus jamais être dupes des manœuvres de nos ennemis.
19Tout ce qui s’est accompli durant le Hourban n’a pu l’être que parce que des mois et des années, les Juifs n’ont pas voulu imaginer l’inimaginable, ils n’ont pas voulu croire l’incroyable, ils n’ont pas voulu croire que l’homme pouvait atteindre un tel degré de monstruosité et surtout ils ont eu la faiblesse de se fier à la parole de leurs ennemis:
« Montez, montez dans les wagons, emportez tous vos biens, il ne s’agit que de vous réinstaller dans des camps de travail ». Et les Juifs sont montés.
« Entrez, entrez dans la douche, voilà votre savonnette », et les Juifs sont entrés, hommes et femmes, vieillards et enfants, ils sont entrés dans la douche, les tout petits enfants…
21Au ghetto même, alors que s’étaient déjà répandus les détails sur le sort réservé aux « transports », les Juifs refusaient encore d’y croire. En mars 1943, vous entendez, en mars 1943, un mois a peine avant la destruction du ghetto, une proclamation était affichée sur les murs: « Ouvriers juifs, partez dans les camps, là-bas vous pourrez vivre en attendant tranquillement la fin de la guerre. Emmenez femmes et enfants, ils seront également l’objet de nos soins! »…
22Et l’on voudrait après cela que nous ayons confiance, l’on voudrait que nous ne soyions par méfiants. L’on voudrait que nous ne soyions pas particulièrement méfiants, alors qu’est en jeu la survie des survivants du nazisme, alors qu’est en jeu la survie d’Israël qui, par son existence même, nous évite seul de tomber dans le désespoir qui nous envahit lorsque nous constatons le renouveau de la haine antisémite. Israël, notre fierté, Israël, notre espoir, Israël, notre consolation, est menacée de tous côtés, mais parce que nous avons assimilé la leçon de Varsovie nous ne nous laisserons pas abuser par ses ennemis.
23Nous dénoncerons le scandale qui consiste à accabler Israël parce qu’il hésite à baisser la garde sous l’effet de paroles, de simples paroles de ses plus furieux ennemis.
24Nous dénoncerons ceux qui se présentent aujourd’hui en doux agneaux pacifiques et qui sont ceux-là même qui voulaient l’annihiler.
25Nous refuserons de suivre ceux qui veulent nous faire croire que les proclamations sanguinaires des dirigeants et de la foule égyptienne de 1967 n’étaient que de simples « excès de langage ». Nous avons payé trop cher pour oublier que ceux qui proclament leur volonté de tuer les Juifs réalisent leurs projets pour peu qu’on leur en laisse la possibilité.
26Nous nous éléverons avec indignation contre la tolérance dont on fait preuve en Occident en général, et dans notre pays en particulier à l’égard de ces fanatiques.
- Que signifient ces brevets de bonne conduite que régulièrement l’on décerne à ces dirigeants, qui, il y a quatre ans à peine, proclamaient leur détermination d’égorger tout Israël?
- Pourquoi ces manifestations de sympathie et de compréhension envers les dirigeants qui sont ceux-là même qui, il y a deux ans, apportaient leur hurlante et hystérique approbation à la proclamation de Nasser annonçant qu’il allait noyer Israël « dans une mer de feu et de sang », se délectant d’avance de la vision même que le bourreau de Varsovie Stroop avait décrite: « Une lumière rouge recouvre l’ancien ghetto » ?
- Que signifient ces félicitations adressées par des gouvernements libéraux et laïques à des dirigeants qu’il y a si peu de temps appelaient à la « guerre sainte » pour « purifier Jérusalem de la souillure juive » ?
- C’est à ces dirigeants animés d’un fanatisme délirant qu’on décerne des brevets de sagesse et d’humanisme et tout ceci pour mieux accabler qui? Pour mieux accabler ces provocateurs Israéliens qui n’ont pas voulu se laisser massacrer en 1967, qui ont eu le tort impardonnable de ne pas vouloir jouer le rôle de victimes qu’on leur avait si universellement imparti, qui ont le tort de ne pas vouloir croire à la seule parole de ceux qui l’ont déjà trahi et qui ont le tort de ne pas vouloir se fier à des promesses de garantie des puissances même qui les leur ont déjà données et les ont tout simplement bafouées.
28Et bien nous, tirant la leçon du ghetto de Varsovie, nous comprenons et nous approuvons cette méfiance. Oui, que jamais plus les Juifs ne soient dupes!
29Il y a vingt-huit ans, nos frères du ghetto de Varsovie en pleine Apocalypse ont détendu à la face du monde l’honneur des Juifs et la dignité des hommes.
30L’espérance en l’homme qu’exprimait leur sacrifice est aujourd’hui trahie, mais nous, Juifs mes frères, et vous amis non Juifs, qui êtes notre consolation et que nous bénissons, nous n’oublierons jamais, nous n’oublierons jamais ni tout ce qu’ils ont subi avec touts les martyrs juifs, ni ce qu’ils ont accompli avec touts les héros juifs, Et, en ce jour qui leur est consacré, nous les pleurons. Nous pleurons ces enfants et vieillards, ces jeunes filles et jeunes gens qui sont tombés par les armes. Nous les pleurons et gardons à jamais leur souvenir en notre cœur. C’est leur martyre, leur lutte, et leur sacrifice qui pour nous tous constituent la toile de fond de notre conscience. C’est eux qui hantent notre jardin intérieur! Et nous n’y pouvons rien si ce jardin n’a rien d’agréable, si notre « jardin caché » est une ville en mines jonchée des cadavres des plus beaux enfants d’Israël, baignée du sang de tout un peuple.
31Et cette obsédante vision intérieure ne nous incite certes, ni à la vengeance, ni à la haine, mais par contre, forge notre volonté de ne plus jamais subir l’ignominie et de tout faire pour que plus jamais de telles abominations ne puissent se reproduire. C’est ainsi seulement que nous aurons la certitude d’être fidèles aux combattants du ghetto de Varsovie et grâce à cette fidélité peut-être serons-nous consolés, ainsi qu’il est écrit: « Comme une mère console son fils, ainsi moi, votre Dieu, je vous consolerai, et c’est dans Jérusalem que vous serez apaisés ».
Le professeur Adolphe Steg, président du D.R.I.F., prononce son allocution.
Le professeur Adolphe Steg, président du D.R.I.F., prononce son allocution.
La foule pendant la cérémonie à la crypte.
La foule pendant la cérémonie à la crypte.
L’allocution de M. Simon Epstein
34QUELS mots exprimeront jamais ce que ressent la jeunesse juive au souvenir de l’Holocauste ? Comment dire cette douleur qui prend à la gorge, ces poings qui se serrent de rage impuissante ?
35Mais une simple douleur qui ne débouche pas sur le combat est stérile. Et la jeunesse juive a choisi d’honorer la mémoire des Martyrs de notre peuple en marchant dans la voie que ceux-ci ont tracée et dans le respect de leurs enseignements.
Le premier enseignement de l’Holocauste est qu’aux heures de péril, le peuple juif ne peut compter que sur lui-même.
37Six millions de Juifs furent exterminés parce que les dirigeants des pays en lutte contre l’Allemagne refusèrent de leur porter secours. La Grande-Bretagne avait fermé les portes de la Palestine. Les Etats-Unis avaient réduit les contingents d’immigration à des chiffres ridicules. La Suisse était entourée d’un véritable cordon sanitaire contre les réfugiés juifs. Dans les proclamations alliées, aucune mention n’était faite du génocide. Au Vatican régnait le silence hypocrite de celui qui se lave les mains. En Pologne, la complicité active de la population était la règle. C’était le temps où la radio anglaise émettait vers l’Europe, dans tous les dialectes possibles: sauf en yiddish. C’était le temps où les voies ferrées qui conduisaient à Auschwitz et à Tréblinka ne méritaient pas l’attention des bombardiers alliés. C’était le temps où un million de Juifs hongrois ne valaient pas quelques camions.
38Et l’on voudrait qu’aujourd’hui Israël fit reposer sa sécurité sur des engagements internationaux, auxquels souscriraient ces mêmes puissances qui restèrent indifférentes à l’extermination du peuple juif? Et l’on voudrait de nouveau faire du juif un être spécial qui, sous couvert de « neutralité » ou de « garanties internationales », remettrait sa survie au bon vouloir d’autrui?
39Nul n’a le droit de demander à l’Etat juif de sacrifier les exigences de sa sécurité à d’illusoires promesses! Et le combat du gouvernement d’Israël, pour une paix juste et durable dans des frontières sûres et négociées, s’inspire au plus haut degré des tragiques enseignements de notre Histoire.
Le second enseignement des combattants du ghetto est que la lutte armée est la seule voie de l’honneur et de la libération du peuple juif.
41Pendant la seconde guerre mondiale, près de 2 millions de soldats juifs ont combattu dans les armées anglaise, américaine, soviétique, dans les forces françaises et dans tous les maquis d’Europe. La brigade juive de Palestine, elle aussi, s’est illustrée sur tous les fronts de la lutte contre les nazis.
42Mais le combat des Juifs du ghetto est d’une autre nature: c’est la révolte de ceux qui n’ont plus rien à perdre, de ceux qui se battent pour mourir debout, de ceux qui écrivent une page nouvelle dans l’histoire millénaire de l’héroïsme juif.
43En Union Soviétique, aujourd’hui, les Juifs se battent. A Riga, & Kiev, à Moscou des jeunes Juifs ont levé bien haut l’étendard de la Révolte. Ils en ont assez de ces manuels d’histoire soviétiques où l’on omet soigneusement de parler des 6 millions de Juifs assassinés. Ils en ont assez de savoir qu’à Bobi Yar, aucune stèle ne commémore le souvenir des dizaines de milliers de Juifs qui y furent massacrés.
44Les Juifs d’URSS ont décidé de briser le génocide culturel qui les étouffe — leur but est simple: ils veulent rejoindre Israël, la patrie historique du peuple juif — lors de l’effroyable procès de Léningrad, en décembre dernier, le gouvernement soviétique a tenté de mettre fin par la terreur au combat des Juifs d’URSS. — Le sursaut de la conscience universelle a sauvé de la mort Dymshytz et Kousnetsov. — Mais combien sont-ils dans les prisons à attendre d’être jugés, dans les camps à purger leurs lourdes peines, dans les hôpitaux psychiatriques a souffrir le martyre ? Et combien sont-ils qui attendent avec ferveur la reconnaissance de leur droit légitime à émigrer massivement vers Eretz-lsraël?
45Cette même oppression, cette même ferveur, on les retrouve en Irak et en Syrie où quelques milliers de Juifs vivent dans la crainte permanente du pogrome.
46A deux reprises, dans ce Mémorial, où nous sommes aujourd’hui rassemblés, des jeunes Juifs ont fait la grève de la faim, pour exprimer leur soutien indéfectible aux Juifs du Silence devenus les Juifs du Courage.
47Ils ont agi unis, par-delà toutes les divergences.
48Et c’est le troisième enseignement de la Révolte du Ghetto: dans la lutte, la jeunesse juive est unie.
49A Varsovie, tous combattaient ensemble. Jadis, bien sûr, certains s’étaient moqués des pauvres idéalistes qui partaient défricher le sol de la Palestine. Beau coups avaient dit: « Restez ! » à ceux des Juifs de Pologne qui, avant 1939, voulaient partir les rejoindre. Mais en 1943, toutes les forces juives, unies sous la direction des mouvements sionistes, se sont présentées en bloc face à l’ennemi.
50De même de nos jours, la jeunesse juive, celle qui combat pour la libération des Juifs d’URSS et des pays arabes, celle qui combat pour Israël, que souvent d’ailleurs elle s’apprête à rejoindre, est unie dans la lutte. Et la froide résolution qui l’anime sait exclure tout fanatisme.
51Mais l’unité s’avère d’autant plus nécessaire que cette année, a Paris, le fascisme a relevé la tête. Un meeting nazi a été organisé à grand fracas. Des dizaines de milliers d’affiches ont recouvert Paris de cette hideuse Croix Celtique, la version française de la Croix Gammée. Nous l’avons dit et nous le redirons: il faut écraser dans l’œuf la peste brune d’Ordre Nouveau!
52Face au nazisme qui renaît, face aux criminels de guerre impunis, face à l’antisémitisme d’où qu’il vienne, face à l’inconscience de ceux qui veulent « oublier », la jeunesse juive unie n’a qu’une seule devise: « Lo 1ichkoahh velo lisloahh » — Ni oublier, ni pardonner!
53Car à Varsovie, lors de la Révolte, un Drapeau bleu et blanc a été hissé. Et il flotte, et il flotte haut dans le ciel, ce drapeau bleu et blanc de la libération nationale du peuple juif!