1DANS l’histoire d’un peuple une période de 5 ans ou de 10 ans ne compte guère, en général. Mais elle compte beoucoup pour une génération. Elle peut la marquer pour la vie. Les dix dernières années ont laissé des traces indélébiles sur notre génération. Les événements catastrophiques auxquels elle assista l’ont surprise. Ils l’ont trouvée non préparée, malgré les quelques voix vaticinantes qui se sont fait entendre. Même celles-ci n’ont pas pu imaginer dans leur ampleur les horreurs qui se préparaient.
2Les survivonts n’ont su qu’après la guerre ce qui s’est passé en réalité. Quelques-uns, comme les fondateurs du C.D.J.C., ont eu le pressentiment qu’il se passait des choses qu’on n’a pas le droit d’oublier et qu’il fallait tout faire pour qu’elles ne soient pas oubliées. Les dix années de leurs efforts ont prouvé qu’ils avaient raison. La tendance à oublier, à passer même l’éponge sur un passé récent, tout au moins « désagréable » pour la conscience humaine, s’accentue de plus en plus. Même ceux qui ont souffert directement ou indirectement cherchent un refuge dans l’oubli, ne veulent pas revenir même en pensée sur les temps vécus.
3Le sentiment général chez les Juifs tout de suite après la guerre était celui d’un abattement, d’un désespoir profond. Et il y avoit vraiment de quoi être abattu et désespéré. On cherchait dans les sombres événements vécus une lueur, un fait qui redonnerait un peu d’espoir. L’héroïque soulèvement du ghetto de Varsovie en devint le symbole. Sa commémoration permet de communier avec les morts « sans sépulture », avec les morts « pour rien », en ayant la conviction que le Judoïsme n’a pas été écrasé complètement, qu’il a su sortir de l’épreuve, au moins moralement, non vaincu. Depuis dix ans la célébration du soulèvement de Varsovie est entrée dans les mœurs juives et est en passe de prendre une place de choix dans le calendrier du peuple.
4Cinq ans plus tard une autre date mémorable est entrée dans les annales juives. Il s’agissait cette fois d’un événement réjouissant sans réserves, de la réalisotion miraculeuse d’un rêve millénaire, d’un fait d’une portée incalculable pour l’histoire juive, de la fondation d’un Etat juif indépendant. Un des rescapés des ghettos et des camps de concentration, le Dr Dvorzecki formula alors la prière suivante : « Dieu, donne-moi la force de me réjouir ». Il exprima ainsi l’état d’âme de toute sa génération meurtrie, déprimée à tel point que toute joie lui semblait interdite.
5Cependant le soulèvement du ghetto de Varsovie n’a pa épuisé tout le courage du peuple juif, pas même celui des combattants effectifs. Il est un fait que quelques-uns parmi les rescapés des batailles de Varsovie prirent une part, les ormes à la main, à la lutte que l’Etat d’Israel mena contre les agresseurs qui voulaient le tuer « dans l’œuf ». C’est ainsi que ces deux événements se rottachent l’un à l’autre par des liens autres que symboliques.
6Dix ans après le soulèvement du ghetto de Varsovie. Cinq ans de l’existence de l’Etat d’Israel. Cette année, ces dates ont presque coïncidé dans le calendrier juif. Un terme et un commencement. Une époque révolue, engloutie par le sang et le feu, éclairée por un soubresaut d’héroïsme, d’un côté. De l’autre, le début d’une ère nouvelle, née elle aussi dans le sang et le feu. Comme le prédisait un poète moderne : « La Judée est tombée dans le sang et dans le feu. La Judée se relève par le sang et par le feu. » Mais comme pour le ghetto, ainsi que pour l’Etat, ce n’est qu’un épisode imposé par les circonstances. Leur gloire est ailleurs, dans cette force qui permet de résister aux adversités et de continuer la route vers l’avenir. Le ghetto avec tous ses antécédents gordoient la flamme éternelle du peuple et la préservaient de l’extinction. Il ne lui a été donné de la voir briller d’un nouvel éclat. Il fut écrasé par la force brutale. Il a réussi pourtant a transmettre à temps le flambeau entre les moins des continuateurs sur la route historique. C’est pourquoi on pense porfois que l’Etat est un monument suffisant à la gloire de l’ « Europa Judaica » presque disparue de la carte du monde, un monument digne de la mémoire de ses victimes et de ses martyrs.
7Il reste non moins vrai que les rescapés du massacre, en dehors de l’Etat ont le droit à un lieu de recueillement, ont le devoir de dresser devant le monde un monument de rappel et d’avertissement, une preuve tangible que la véritable force humaine et sa gloire ne résident pas dans le glaive. « Celui qui tire l’épée périra par l’épée. » Dix ans après le ghetto de Varsovie, cinq ans après l’avènement de l’Etat, la pose de la première pierre du TOMBEAU DU MARTYR JUIF INCONNU vient rappeler au monde où mène la haine entre les hommes et lui montrer du doigt, par delà de la mer, ce que peut faire un travail pacifique.
Erratum
Nous nous en excusons vivement auprès de M. Banda dont la générosité et l’attachement à la cause juive sont unanimement connus, et appréciés à leur juste valeur par la belle communauté de Metz.
Nous reproduisons ci-dessous la liste complète du Comité en question, telle qu’elle nous a été communiquée par M. Fuhrman, son Président :
Président : M. Fuhrman.
Vice-Présidents : Dr. Bravinsky, Rabbin Heiselbeck.
Trésorier : M. Banda.
Secrétaire : M. B. Wang.
Membres : MM. Rubinstein, J. Lilienbaum, S. Rottenberg, Rubel, Othon Thau.
Date de mise en ligne : 04/01/2021