Couverture de LMJ_003

Article de revue

Extraits de l’exposé introductif de Robert Jackson, délégué des U.S.A

Pages 4a à 7

Notes

  • [1]
    Le Centre de Documentation Juive Contemporaine 2 édité la traduction française intégrale de ce rapport sous le titre « La bataille du ghetto de Varsovie, vue et racontée par les Allemands ».

1…Les Nazie n’ont jamais eu de divergences de vues entre eux sur les éléments de l’opposition. Ceux-ci ont été caractérisés le 11 décembre 1938 d’une façon précise par l’un d’eux, le général von Fritsch, comme suit :

2« Peu après la première guerre mondiale, je suis arrivé à la conclusion qu’il nous fallait remporter trois victoires pour que l’Allemagne redevienne puissante :

3

  • 1° Contre les ouvriers ; Hitler a déjà remporté cette victoire.
  • 2° Contre l’Eglise catholique.
  • 3° Contre les Juifs. »

4La lutte contre ces groupes n’a jamais cessé.

5……………………………………………….

Crimes contre les juifs

6Les crimes les plus sauvages et les plus nombreux ont été commis par les Nazis contre les Juifs. On en comptait en Allemagne environ 500.000 en 1933. La plupart s’étaient créé des situations et avaient acquis des fortunes qui excitaient la jalousie et la convoitise des Nazis. Les Juifs étaient trop peu nombreux pour pouvoir se défendre et pourtant assez nombreux pour qu’on les considère comme de dangereux opposants.

7……………………………………………….

8Il est dans mon intention de démontrer le plan et le dessein, suivis fanatiquement par tous les Nazis, de détruire tout le peuple juif. Ces crimes furent organisés et conçus par la Direction du Parti, exécutés par les organisations nazies et nous vous en convaincrons par les ordres écrite de la Gestapo.

9La persécution des Juifs fut conduite d’une façon continue et délibérée. Elle était dirigée aussi bien contre les autres nations que contre les Juifs eux-mêmes. L’antisémitisme devait diviser et aigrir les nations démocratiques et diminuer leur résistance à l’agression nazie. C’est ainsi que Robert Ley déclarait dans « Der Angriff » du 14 mai 1944 : « La seconde arme secrète allemande est l’antisémitisme, car, s’il est constamment continué en Allemagne’, il deviendra un problème mondial avec lequel toutes les nations seront obligées de compter. »

10L’antisémitisme fut aussi très justement appelé « pierre de touche de la terreur ». Le ghetto était un laboratoire servant à expérimenter les mesures répressives. La fortune juive fut la première expropriée, mais ensuite des mesures similaires furent appliquées contre les antinazis allemands, polonais tchèques, français et belges. L’extermination des Juifs a permis aux nazis d’entreprendre d’une main expérimentée celle des Polonais, des Serbes et des Grecs. La condition faite aux Juifs était une menace constante pour les éléments antinazis de la population européenne : pacifistes, conservateurs, communistes, catholiques, protestants, socialistes. C’était en réalité, une menace pour toute opinion opposée et pour tout régime non nazi.

11La persécution des Juifs a commencé par des mesures non-violentes dirigées contre leur religion et leur activité économique. Mais, rapidement, on a organisé des violences massives, l’isolement dans les ghettos, la déportation, le travail forcé et l’extermination. Le gouvernement les organes du parti, la Gestapo, l’armée, les associations privées et semi-publiques, les mouvementé « spontanés » de la foule qui étaient soigneusement inspirés par les sources officielles, ont tous participé à cette persécution. Elle n’était pas dirigée individuellement contre les Juifs impopulaires ou mauvais citoyens. Le dessein essentiel était l’extermination complète du peuple juif considéré comme un but en soi, aussi bien que comme mesure préparatoire à la guerre et moyen de discipliner les peuples conquis. Le plan d’extermination des Juifs a été appliqué avec une telle méthode que, malgré la défaite et l’écrasement des nazis, ces derniers ont atteint quand même le but qu’ils s’étaient proposé. Il ne reste en Allemagne, dans les pays occupés, satellites ou collaborateurs, que les vestiges de la population juive européenne. De 9.000.000 de Juifs vivant dans les pays occupés par les nazis, 60 % ont péri, 5.700.000 Juifs sont portés disparus des pays où ils vivaient auparavant. L’histoire ne connaît pas de crimes dirigés contre autant de victimes et commis avec autant de cruauté calculée.

12Il vous sera tout aussi difficile qu’à moi de lire sur les visages de ces accusés qu’ils ont été capables, au XXe siècle, d’infliger à leurs propres compatriotes et aux ennemis prétendus « inférieurs » des souffrances comme celles dont nous allons vous apporter ici les preuves. Une certaine catégorie de crimes ainsi que les responsabilités que ces crimes ont entraînées pour les accusés seront traités par le Procureur général de l’Union Soviétique, pour autant qu’ils ont été commis à l’Est et par le représentant de la République Française pour autant qu’ils ont été commis à l’Ouest. Je n’en fais mention que pour montrer leur importance, pour prouver que tous les accusée ont poursuivi sciemment un but commun et ont conçu un vaste plan officiel d’extermination des Juifs. Cette persécution fut continue, depuis l’origine jusqu’à la chute du régime nazi. Nul n’a pu participer, même partiellement, à l’action nazie, sans approuver cet article le plus important de leur programme.

13L’acte d’accusation comprend lui-même un grand nombre de preuves à l’appui en ce qui concerne les persécutions antisémitiques. L’accusé Streicher était, parmi les nazie, le chef de la clique antisémite. Dans un article paru dans « Der Stiirmer », le 19 mars 1942, il regrettait que l’enseignement chrétien eût empêché « la solution raciale du problème juif en Europe » et notait avec enthousiasme, comme digne du XXe siècle, la déclaration du Fûhrer du 24 février 1942 disant que « le Juif sera exterminé ». Le 4 novembre 1943, Streicher déclarait, dans « Der Sturmer », que « les Juifs avaient disparu d’Europe et que le réservoir de l’Est d’où la peste juive a déferlé sur l’Europe pendant des siècles, avait cessé d’exister ». Et maintenant, Streicher a l’audace de nous raconter qu’il n’est qu’un sioniste et qu’il n’a voulu que le retour des Juifs en Palestine. Maie le 7 mai 1942, il écrivait dans « Der Sturmer » :

14

« Ce n’est pas seulement un problème européen ! Le problème juif est un problème mondial ! L’Allemagne ne sera pas en sécurité tant qu’un seul Juif vivra en Europe. La question juive ne pourra être résolue en Europe tant qu’il y aura encore des Juifs dans le monde. »

15L’accusé Hans Frank, un avocat de profession, comme je dois le constater avec honte, résumait ainsi en 1944, dans son journal intime, la politique nazie : « Les Juifs sont une race qu’il faut éliminer ; chaque fois que nous en attrapons un, c’est sa mort. » (Document 2233-PS. Vol. IV, 1944, p. 26.) Alors qu’il était encore gouverneur général de la Pologne, il marquait la phrase suivante dans son carnet : « Il m’est évidemment impossible d’exterminer toute la vermine et les Juifs en une seule année. » Je pourrais m’étendre indéfiniment sur des déclarations nazies de ce genre, mais je laisse à l’accusation spéciale le soin de nous entretenir des résultats qu’on eus toutes ces pensées perverses.

16Les mesures les plus sévères contre les Juifs ne reposaient sur aucune loi, mais la loi elle-même a, jusqu à un certain degré, servi de prétexte. II y a eu les infâmes lois de Nuremberg du 15 septembre 1935 (« Reichsgesetz-blatt », 1935, T. I p. 1146). Les Juifs ont été enfermés dans des ghettos et astreints à des travaux forcés ; on leur a confisqué leur fortune ; on leur a défendu de continuer à exercer leur profession, on leur a défendu toute activité culturelle, la presse, le théâtre et les écoles. La surveillance des Juifs a été confiée au S.D. (Sicherkeits-dients : Service de Sécurité). C’était une sinistre surveillance, comme le montre l’ordre suivant extrait du « Traitement de la Question Juive » :

17« La compétence du Chef de la Police de Sécurité et du Service de Sécurité, chargé de résoudre le problème juif en Europe, est étendue aux provinces occupées de l’Est…

18« Il n’est pas nécessaire d’intervenir en cas de violences commises par la population civile contre les Juifs, à condition qu’elles n’affectent pas la sécurité de troupes combattantes…

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« Le premier but poursuivi par les mesures allemandes doit être la séparation de la juiverie du reste de la population. Pour cela, il faut avant tout recenser la population juive… »

20Immédiatement, l’on oblige les Juifs à porter un signe distinctif, l’étoile jaune, et toute liberté leur est retirée. Ils doivent être placés dans des ghettos et séparés selon les sexes. L’exécution de ces prescriptions est facilitée par l’existence de véritables colonies juives en Biélorussie et en Ukraine. De plus, la main-d’œuvre juive doit être utilisée en cas de besoin. Toute propriété juive doit être saisie et confisquée à l’exception d’un minimum indispensable à la vie. Les ordres doivent être aussitôt donnés pour empêcher les Juifs de disposer de leur propriété, afin que toute aliénation devienne impossible.

21« Toute activité culturelle sera interdite aux Juifs. Sent également proscrits les écoles, la presse et les théâtres juifs.

22« L’abatage rituel des animaux doit être également défendu… » (212-PS.)

23La campagne anti-juive en Allemagne a atteint son paroxysme après l’assassinat à Paris du conseiller de l’ambassade allemande von Rath.

24Le chef de la Gestapo Heydrich, envoya à tous les services de la Gestapo et du S.D., par télétype, des instructions afin de provoquer des actions « spontanées » dans les nuits du 9 et du 10 novembre 1938, dans le but rie hâter la destruction du patrimoine juif. L’on a rarement vu un document plus cynique. Un rapport du chef de brigade S.S. Dr Stahlecher à Himmler relate :

25« …Les milieux antisémites indigènes furent encouragés à commencer les pogroms contre les Juifs, bien que cet encouragement se fût révélé fort difficile.

26« En exécution des ordres reçus, la police du S.D. est décidée à régler la question juive par tous les moyens et avec la fermeté nécessaire. Comme il fallait cependant que les policiers du S.D. n’entrent pas tout de suite en action, car ils auraient pu, par leurs mesures de représailles, inquiéter les milieux allemands eux-mêmes, nous avons pris les dispositions pour démontrer à l’opinion publique que c’est la population elle-même qui a fait les premiers gestes…

27« …En prévoyant l’extension du champ d’action et de nombreuses tâches incombant à la Police de Sécurité, nous avons de suite envisagé d’obtenir la coopération de la population dans la lutte contre la vermine, c’est-à-dire les Juifs et les communistes. La population doit entreprendre sous notre direction l’action de « auto-épuration », et les hommes dignes de confiance seront appointés en tant que membres auxiliaires de la Police de Sécurité.

28«… Kowno… A notre surprise, il n’a pas été facile de déclencher un pogrom contre les Juifs. Klimatis, chef d’un groupe de partisans, a réussi à déclencher un pogrom suivant les conseils donnés par un petit détachement allemand avancé. Mais l’instigation allemande n a pas été remarquée. Au cours du premier pogrom, dans la nuit du 25 au 26 juin les partisans lithuaniens ont tué plus de 1.500 Juifs, ont brûlé et détruit plusieurs synagogues et ont mis feu au quartier juif composé de soixante maisons. La nuit suivante, 2.300 Juifs furent mis hors d’état de nuire. Le reste du pays a suivi l’exemple de Kowno, en attaquant les Juifs et aussi les communistes.

29« Ces actions d’ « auto-épuration » se sont bien déroulées grâce à l’armée, qui a montré beaucoup de compréhension pour ce genre de procédure. Mais il était évident que l’occasion d’organiser des pogroms ne pouvait se présenter que dans les premiers jours de l’occupation. L’action d’ « auto-épuration » dut cesser après le désarmement des partisans.

30« II a été beaucoup plus difficile de déclencher une épuration semblable en Lettonie…

31«…On pouvait prévoir dès le début que le problème juif dans l’Est ne pouvait être résolu uniquement par des pogroms. Cependant, selon les ordres reçus, l’activité de la Police de Sécurité tendait vers la destruction complète des Juifs…

32« Le nombre total des Juifs exterminés en Lithuanie est de 71.105… » (L. 180.)

33Il est évident maintenant que toutes ces « émeutes » ont été fomentées par le gouvernement et le parti nazis. Même si nous devions en douter, il nous suffirait de relire le mémorandum de Streicher du 14 avril 1939, où il déclare : « L’action antisémitique n’est pas sortie spontanément du peuple… Une partie de l’appareil du parti nazi a été chargée de cette besogne. » (406-PS.) Lee Juifs ont été contraints à payer un milliard de R.-M. à titre d’amende. Ils ont été exclus de la vie commerciale, on leur a même confisqué les sommes payées par les compagnies d’assurances pour leurs propriétés incendiées, tout cela en exécution d’un arrêté de l’accusé Goering. (Reichsgesetzblatt, 1938, T. I, pp. 1579-1582.)

34Les synagogues ont été l’objet d’une vengeance particulière. Le 10 novembre 1938, l’ordre suivant fut publié : « Selon l’ordre du chef de brigade, toutes les synagogues qui se trouvent dans le secteur de la brigade 50 sont à faire sauter ou à incendier… Cet ordre est à exécuter non en uniforme, mais en civil… Le résultat devra être communiqué immédiatement au service dirigeant… » (1721-PS.)

35Un grand nombre de documents que nous allons vous présenter montreront avec quelle sauvagerie les Juifs ont été persécutés en Allemagne pendant ces terribles nuits de novembre. Des formations de S.S. furent lâchées sur eux et la Gestapo avait le contrôle. Les biens juifs furent détruits. La Gestapo a ordonné l’arrestation de vingt à trente mille Juifs. On les a mis dans les camps de concentration surtout les Juifs bien portants, aptes au travail.

36La campagne contre les Juifs s’est encore aggravée avec l’extension des frontières allemandes pendant la guerre. Le plan nazi était d’appliquer les mesures d’extermination aux Juifs dans toute l’Europe et, si possible dans le monde entier. A l’Ouest, les Juifs furent assassinés et leurs biens confisqués. Maie c’est à l’Est que la campagne a atteint son point culminant de bestialité. Les Juifs de l’Est eurent à subir des persécutions qu’aucun peuple n’a jamais eu à endurer. Des projets spéciaux ont été établis en vue de leur extermination.

37Si j’avais à décrire ces atrocités, vous ne me croiriez point. Heureusement, il me suffit de me’ servir de ce qu’ont raconté les Allemands eux-mêmes. Nous n’avons qu’à jeter un coup d’œil sur les innombrables rapports, ordonnances et instructions qui sont tombés entre nos mains. Par exemple, le rapport de 1’ « Einsatzgruppe A » du 15 octobre 1941, se vante d’avoir encouragé la population des Etats Baltes à organiser les pogroms dans les heures qui ont suivi l’occupation. On y lit entre autres :

38

« On pouvait prévoir, dès le début, que le problème juif dans l’Est ne pouvait être résolu uniquement par des pogroms. Cependant, selon les ordres reçus, l’activité de la Police de Sécurité tendait vers la destruction complète des Juifs. Des détachements spéciaux, renforcés par des unités soigneusement choisies (unités de partisans en Lithuanie, unité de police auxiliaire en Lettonie) ont procédé à des exécutions massives dans les villes et dans les campagnes. Ces opérations se sont déroulées sans incidents.
« Le nombre total des Juifs exterminés en Lithuame est de 71.105. Pendant les pogroms, 3.800 Juifs furent « éliminés » à Kowno et 1.200 dans les villes de moindre importance.
« En Lettonie, 30.000 Juifs ont été exécutés jusqu’à présent. Cinq cents furent « éliminés » lors des pogroms à Riga. » (L. 180.)

39Voici un rapport du commissaire de Sluzk du 20 octobre 1941 qui décrit la scène avec plus de détails. On y lit:

40

« …Le lieutenant a déclaré que le bataillon de police a reçu l’ordre d’effectuer l’extermination des Juifs de la ville de Sluzk en deux jours… Je l’ai prié de faire retarder l’action d’un jour. Il a rejeté ma demande en me faisant remarquer qu’il devait continuer sa mission partout et dans toutes les villes et qu’on ne lui a accordé que deux jours pour Sluzk. Pendant ces deux jours, la ville de Sluzk devait être débarrassée de Juifs par tous les moyens… Tous les Juifs sans exception furent sortis de leurs boutiques et déportés. Une partie fut envoyée dans le ghetto, mais beaucoup d’entre eux furent chargé i sur des camions et immédiatement exterminés en dehors de la ville.. Je dois constater avec un profond regret que l’opération a tourné au sadisme. La ville offrait un spectacle horrible. Les deux officiers de police allemands et les partisans lithuaniens ont arraché avec une brutalité indescriptibles des Juifs et aussi des Blancs-Russiens ds leurs demeures. De tous les côtés, l’on entendait des coups de feu et les cadavres s’amoncelaient dans les rues. Et comme si cette manière terriblement barbare ne suffisait pas encore, des Blancs-Russiens ont pris part au massacre avec leurs matraques en caoutchouc et leurs mitraillettes. Ils n’ont même pas réfléchi qu’il y avait aussi des ouvriers parmi les Juifs. Il n’était plus question d’opération contre les Juifs. Cela ressemblait davantage à une révolution… » (1104-PS.)

41D’autres rapports donnent tout simplement le nombre de massacrés. En Esthonie, tous les Juifs ont été incarcérés dès l’arrivée de la Wehrmarcht.

42Hommes et femmes âgés de plus de seize ans ont été astreints à des travaux forcés. Tous les biens juifs ont été confisqués. Deux jours après, tous les hommes juifs de plus de seize ans étaient exécutés à l’exception des médecins. Seuls, cinq cents sur les quatre mille cinq cents que représentait la population totale’ ont survécu à ces massacres.

43La police du S.D. a exécuté 37.180 personnes en Russie Blanche pendant le seul mois d’octobre.

44Dans une autre ville, 337 femmes Juives ont été assassinées parée qu’elles avaient fait preuve « d’une attitude provocante ». Ailleurs, 380 Juifs ont été fusillés pour « propagande pernicieuse ».

45Et le rapport continue, passant en revue toutes les villes où des centaines de Juifs étaient massacrés.

46A Witebsk, 3.000 Juifs ont été exterminés, « à cause du danger des épidémies ».

47A Kiew, 33.771 Juifs ont subi le même sort les 29 et 30 septembre, en représailles pour quelques coups de feu tires en ville.

48A Jitomir , 3.145 Juifs « étaient à fusiller » parce qu’ils étaient considérés, d’après l’expérience, comme porteurs de propagande bolcheviste.

49A Kherson, 410 Juifs ont été exécutés en représailles pour des actes de sabotage.

50Dans les territoires à l’Est du Dnieper, le problème juif a été « résolu » en exécutant 4.891 Juifs et en groupant les survivants dans les bataillons de travail de plus de 1.000 personnes. (R. 102.)

51Les autres récits montrent jusqu’à quel degré de bassesse sont tombés les bourreaux nazis. Par exemple, nous allons produire un rapport adressé à l’accusé Rosenberg sur l’activité de l’armée et des S.S. dans la zone soumise à la juridiction de Rosenberg. On y lit les lignes suivantes :

52

« En présence des S.S., un dentiste juif devait extraire toutes les dents en or de la bouche des Juifs allemands et russes, avant leur exécution. »

53Hommes, femmes et enfante sont enfermés dans les granges et brûlés vivants.

54Paysans, femmes et enfants sont fusillés sous le prétexte d’appartenir aux bandes. (R. 135.)

55Nous autres Occidentaux, nous avions entendu parler des chambres à gaz dans lesquelles les Juifs et les adversaires politiques des nazis étaient asphyxiés. Nous ne pouvions pas y croire. Mais voici le rapport du 16 mai 1942 de l’officier S.S. Becker à son supérieur à Berlin :

56« Lee véhicules à gaz du groupe C étaient dirigés sur le lieu de l’exécution situé en général à 10 à 15 km. de la grand’route.

57

« Les véhicules à gaz du groupe D étaient camouflés en voitures-bains, mais la population les connaissait et les appelait « véhicules de la mort ».

58L’auteur de la lettre, Becker, a ordonné à tous ses hommes de se tenir aussi loin que possible pendant les exécutions par le gaz. Après l’opération, la vue de véhicules pleins de cadavres « produisait un atroce effet physique et moral », et certains hommes étaient dispensés de participer à un tel travail. » (501-PS.)

59Je ne voudrais pas quitter ce sujet sans mentionner un document encore plus repoussant qui met en évidence le caractère systématique des persécutions contre les Juifs. J’ai lu un récit écrit avec la précision allemande .illustré par des photographies pour authentifier le texte presque incroyable le tout magnifiquement relié en cuir. C’est le rapport original du général de brigade S.S. Stroop, chargé de la destruction du ghetto de Varsovie, et la première page porte l’inscription suivante : « Il n’y a plus de quartier juif à Varsovie ! » Il est caractéristique de constater que les photos se rapportant à la déportation do « bandits » juifs ne montrent presque exclusivement que des femmes et de petits enfants. On y lit également un compte rendu journalier de tueries organisées par les S.S. Mais laissons parler le général Stroop :

60« La résistance des Juifs et des bandits ne pouvait être brisée que par une action énergique menée par nos troupes nuit et jour. Le Reichsführer S.S. a ordonné en conséquence, le 23 avril 1943, de nettoyer le ghetto de Varsovie avec la plus grande sévérité et une inlassable persévérance. C’est pourquoi je me décidai à détruire par le feu le ghetto tout entier, y compris les usines d’armement. Ces usines furent systématiquement démantelées et brûlées. Habituellement, les Juifs quittaient leurs abris, mais parfois restaient dans les maisons en feu et sautaient par les fenêtres quand la chaleur devenait intenable. Les os brisés, ils essayaient de ramper à travers la rue pour gagner les maisons qui n’étaient pas incendiées. Parfois, ils changeaient de cachette au cours de la nuit et se réfugiaient dans les ruines des maisons déjà brûlées. Le séjour dans les égouts avait cessé d’être agréable après les premiers huit jours. Souvent, nous entendions des éclats de voix venant des bouches d’égout. Courageusement, les S.S. et les policiers s’y faufilaient pour capturer les Juifs. Il n’était pas rare qu’ils se heurtent à des cadavres ou bien qu’ils essuient des coups de feu. Des bombes lacrymogènes furent jetées par les bouches d’égouts poour forcer les Juifs à sortir. D’innombrables Juifs ont été tués dans les égouts et les abris qu’on fit sauter. Plus la résistance durait, plus les hommes des S.S., de la Police et de la Wehrmacht s’endurcissaient. Ils accomplissaient leur devoir d’une manière exemplaire. Souvent, l’on a pu exterminer les Juifs essayant, la nuit, de compléter leur stock de vivres ou de communiquer avec les groupes voisins…

61

« …Grâce à cette action l’on a pu éliminer avec certitude un total de 56.065. Il y faut ajouter ceux qui ont été tués par les déflagrations, les incendies, etc., et qui n’ont pu être dénombrées. »  (1)

62Tous les accusés ici présents ont été complices de l’accomplissement de ce plan nazi qui prévoyait l’extermination totale de la race juive. Je sais que plusieurs de ces hommes ont entrepris des démarches personnelles pour soustraire quelques Juifs de leur connaissance au sort terrible qui les attendait. Quelques-uns déclarèrent que ces atrocités étaient excessives et dépassaient les directives générales. Quelques-uns ont essayé de faire des exceptions à l’extermination totale. Mais aucun des accusés n’a jamais songé à s’opposer au principe même de l’extermination, de la faire cesser ou seulement d’en atténuer la rigueur.

63Il existait beaucoup de divergences entre les accusée au point de vue politique intérieure, mais il n’en est aucun parmi eux qui n’ait appliqué le cri de ralliement nazi : « Allemagne, réveille-toi, et toi, Israël, crève ! »


Date de mise en ligne : 04/01/2021

Notes

  • [1]
    Le Centre de Documentation Juive Contemporaine 2 édité la traduction française intégrale de ce rapport sous le titre « La bataille du ghetto de Varsovie, vue et racontée par les Allemands ».

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