Couverture de LIG_793

Article de revue

L'Arc Atlantique : une macro-région inachevée ?

Pages 79 à 93

Notes

  • [1]
    Article 174 du Traité de Lisbonne modifiant le traité sur l'Union européenne et le traité instituant la Communauté européenne, signé à Lisbonne le 13 décembre 2007.
  • [2]
    L'information mise à jour sur ces programmes peut se retrouver sur le site d'INTERACT : http://www.interact-eu.net/.
  • [3]
    Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, Comité économique et social européen et au Comité des régions – Une politique maritime intégrée pour l'Union européenne {COM (2007) 574 final)}.
  • [4]
    Sauf les comparaisons réalisées par les services de la Commission Européenne dans le cadre des explications des nouveaux règlements structurels, dont les présentations sont citées dans les références.
  • [5]
    Centre d'études de politique internationale (Italie) : http://www.cespi.it/.
  • [6]
    European Council « Presidency conclusions, Brussels European Council 14 December 2007 » Bruxelles, 14 février 2008 16616/1/07 REV 1.
  • [7]
    Commission Européenne « Rapport de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité Économique et Social Européen et au Comité des Régions concernant la stratégie de l'Union européenne pour la région de la mer Baltique » Bruxelles le 10.6.2009 – COM (2009) 248 final.
  • [8]
    Cette absence est connue comme « la règle des trois non »
  • [9]
    Commission Européenne « Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions concernant la stratégie de l'Union européenne pour la région de la mer Baltique » Bruxelles, le 23.3.2012 COM (2012) 128 final.
  • [10]
    Commission Européenne « Rapport de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité Économique et Social Européen et au Comité des Régions concernant la gouvernance des stratégies macro-régionales » Bruxelles 20/05/2014 COM (2014) 284 final.
  • [11]
    Commission Européenne « Rapport de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité Économique et Social Européen et au Comité des Régions concernant la valeur ajoutée des stratégies macro régionales » Bruxelles, le 27.6.2013 COM (2013) 468 final (p. 3).
  • [12]
    Eur-Lex « Règlement (UE) n ° 1303/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 portant dispositions communes relatives au Fonds européen de développement régional, au Fonds social européen, au Fonds de cohésion, au Fonds européen agricole pour le développement rural et au Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche, portant dispositions générales applicables au Fonds européen de développement régional, au Fonds social européen, au Fonds de cohésion et au Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche, et abrogeant le règlement (CE) n ° 1083/2006 du Conseil » publié au Journal officiel de l'Union européenne, Bruxelles 20.12.2013.
  • [13]
    Ibid., note 8 (p. 2).
  • [14]
  • [15]
    http://www.arcatlantique.org.
  • [16]
  • [17]
  • [18]
  • [19]
    http://ec.europa.eu/dgs/maritimeaffairs_fisheries/consultations/atlantic_ocean/non_paper_fr.pdf.
  • [20]
    European Commission « Public consultation on an integrated maritime policy for the EU Atlantic Ocean sea-basin report of outcomes » Bruxelles, décembre 2010.
  • [21]
    Commission européenne « Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions : Définir une stratégie maritime pour la région atlantique » Bruxelles, le 21.11.2011 COM (2011) 782 final.
  • [22]
    Il faut noter qu'une « Communication » n'a pas de valeur juridique. Ce type de document se limite à énoncer les principes et la nécessité d'une initiative particulière auprès des instances communautaires.
  • [23]
    Site de la Direction générale politique maritime de la Commission européenne : http://ec.europa.eu/maritimeaffairs/policy/sea_basins/atlantic_ocean/atlanticforum/events/index_fr.htm.
  • [24]
    Commission européenne, « Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions : Plan d'action pour une stratégie maritime dans la région atlantique Pour une croissance intelligente, durable et inclusive » Bruxelles, le 13.5.2013 COM (2013) 279 final.
  • [25]
  • [26]
    Ibid., note 12.
  • [27]
    Fonds européens structurels et d'investissement.
  • [28]
    European Commission « Commission Staff Working Document : Elements for a Common Strategic Framework 2014 to 2020 the European Regional Development Fund the European Social Fund, the Cohesion Fund, the European Agricultural Fund for Rural Development and the European Maritime and Fisheries Fund » Brussels, 14.3.2012 SWD (2012) 61 final.
  • [29]
    Définie comme la capacité d'obtenir des objectifs avec l'asignation appropiée de moyens, en évitant le gaspillage.
  • [30]
  • [31]
    Commission Européenne « Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité Économique et Social Européen et au Comité des Régions : concernant la stratégie de l'Union européenne pour la région de l'Adriatique et de la mer Ionienne

1 La cohésion territoriale est aujourd'hui insérée dans les traités européens à côté de la cohésion économique et sociale [1], signe de son importance croissante. Ainsi, la coopération territoriale européenne a expérimenté des évolutions significatives depuis les premiers pilotes des programmes INTERREG en 1989-1990 et de la publication du SDEC – schéma de développement de l'Espace communautaire – en 1999 (Perrin, 2011 p. 3).

2 Un quart de siècle après sa création, INTERREG est actuellement décliné en 53 programmes transfrontaliers (le volet A), 13 programmes transnationaux (le volet B dédié aux grands ensembles contigus) et un programme interrégional (le volet Europe où toutes les régions sont incluses). Par ailleurs, ces programmes sont accompagnés par trois autres initiatives dites « de mise en réseau » : ORATE (le réseau d'observation du développement territorial), URBACT (le mécanisme de coopération urbaine) et INTERACT (l'instrument de coordination des différentes initiatives) [2].

3 Afin de favoriser la tangibilité et l'efficacité de ces mécanismes, des formes nouvelles de coopération sont apparues. L'exemple plus connu étant les GECT (groupement européen de coopération territoriale) un instrument qui permet de créer des entités morales.

4 Ces instances sont capables de gérer la coopération transfrontalière entre les collectivités qui y sont représentées. Il peut s'agir de villes (l'Eurométropole Lille-Kortrijk-Tournai) ou des régions (l'euro-région Galice-Portugal). Autrement, les macro-régions apparaissent comme un nouvel instrument transnational. En 2009, la mer Baltique voit naître une stratégie macro-régionale qui vise à coordonner les fonds européens autour de ses enjeux. En parallèle, le livre bleu [3] « Une politique maritime intégrée pour l'Union européenne » a consolidé la notion de bassin, délimitant de nouveaux ensembles géographiques de coopération. Ainsi, certains d'entre eux comme l'Atlantique ou la Méditerranée ont fait l'objet d'initiatives aux objectifs similaires à ceux des macro-régions. Ces dernières sont connues sous le nom de stratégies intégrées maritimes.

5 Cet article vise à déterminer la relation entre ces deux concepts (macro-région et stratégie maritime) à partir des cas de la mer Baltique et de l'Arc Atlantique. Dans ce cadre et à partir des sources communautaires (règlements, directives, communications…), l'analyse se penchera sur l'évolution historique de ces deux initiatives, ainsi que sur les facteurs et les processus qui ont mené à leur mise en place. De plus, cette analyse s'appuie sur une observation participante de l'auteur, en tant que coordinatrice de la Conférence des Villes de l'Arc Atlantique (CVAA). Cette méthode s'avère opportune dans la mesure où la question ne s'est pas encore posée dans la littérature [4]. Néanmoins, les positions particulières de la CVAA sont facilement identifiables dans le texte.

1.  Qu'est-ce qu'une macro-région ? La Stratégie de la mer Baltique comme point de départ

6 Andrea Stochiero (2010, p. 3) définit une stratégie macro-régionale comme « une approche pragmatique envers la nécessité de trouver de nouvelles formules pour que la politique publique devienne plus efficace dans un large espace transfrontalier multi-niveaux, avec une meilleure coordination des institutions et ressources existantes » Par ailleurs, l'auteur du CESPI [5] considère que cette initiative est aussi une « expérience politique innovante », car elle crée un « nouveau niveau de gouvernance, placé entre l'État-nation et la communauté supranational ».

7 Depuis l'approbation de la Stratégie de la Baltique en 2009 dans le cadre de la présidence suédoise de l'Union européenne, le terme macro-région est devenu courant dans la littérature sur la coopération territoriale européenne. Ainsi, Carsten Schymik (2011, p. 11) place l'origine de la Stratégie Baltique dans la « résolution du Parlement européen pour une dimension du nord », qu'il perçoit comme le résultat de la mobilisation des acteurs du territoire.

Figure 1

Zones de coopération de l'UE-28 : Mer Baltique

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Zones de coopération de l'UE-28 : Mer Baltique

© Eurogeographics association

8 Ce document avait été présenté par l'intergroupe parlementaire Mer Baltique en 2005 afin de proposer « une stratégie spéciale pour la région ». Dans ses conclusions de décembre 2007, le Conseil européen [6] demande à la Commission de préparer un projet de stratégie pour la Mer Baltique, dans un délai maximum de dix-huit mois. Or, après une période d'analyse et consultation, la Commission européenne publie sa communication « concernant la stratégie de l'Union européenne pour la région de la mer Baltique » [7] autour de certains principes qui serviront plus tard de fondement à la mise en place des macro-régions :

9

  • ­ l'identification d'un espace territorial qui traverse plusieurs États (membres ou non de l'UE) affectés par des problèmes communs ;
  • ­ la volonté de mettre en place une coopération territoriale renforcée dans un nombre limité de domaines, visant à des économies d'échelle entre les niveaux de gouvernance et les différents programmes et fonds ;
  • ­ la mise en œuvre d'un accord souple, caractérisé par l'absence de nouvelles sources de financement, de nouvelles institutions ou de législation [8].

10 Dans le cadre d'une « meilleure coordination et une utilisation plus stratégique des programmes communautaires », les objectifs de cette nouvelle forme de coopération territoriale devaient se regrouper autour de « quatre défis majeurs » comme :

11

  • ­ créer un environnement durable ;
  • ­ accroître la prospérité de la région ;
  • ­ améliorer l'accessibilité et l'attractivité des territoires ;
  • ­ garantir la sécurité de la région.

12 Ces objectifs seront mis en œuvre à travers un « Plan d'action » organisé autour de domaines thématiques spécifiant les défis majeurs et de projets phare d'une envergure supérieure aux projets de coopération territoriale traditionnels.

13 En 2012, dans la communication sur la mise en œuvre de la Stratégie de la Mer Baltique [9], la Commission européenne a également souligné quelques éléments clés pour la réussite d'une stratégie macro-régionale :

14

  • ­ l'engagement politique de tous les niveaux impliqués : du local aux institutions communautaires ;
  • ­ la coordination opérationnelle entre les différentes politiques, des programmes et des sources de financement concernant les enjeux identifiés avec une prise en charge par un système de suivi ;
  • ­ un système de gouvernance ouvert, piloté par la Commission européenne en tant que pilote, soutenue par les contacts nationaux et les coordinateurs thématiques de chaque projet.
  • ­ la participation significative de toutes les parties prenantes, notamment la société civile et le secteur privé.
  • ­ le concours de tous les pays de l'UE, en insistant particulièrement sur le rôle du Conseil Européen en tant qu'animateur ;
  • ­ l'utilisation des plates-formes et réseaux existants, notamment les organisations internationales déjà présentes dans la région ;
  • ­ des campagnes de sensibilisation pour permettre le transfert de capacités, pour stimuler l'adhésion et pour favoriser l'appropriation de la démarche pat les citoyens.

15 Ces points seront d'ailleurs repris dans le rapport sur la gouvernance des macro-régions [10] publié par la Commission européenne en 2014. En 2013, dans son rapport sur la valeur ajoutée de ces initiatives [11], la Commission européenne fait une analyse étendue de leurs critères et de leur portée. Comme éléments de base, le document évoque « un sentiment d'identité régionale, un désir de planification commune et une volonté de mettre les ressources en commun ». Ainsi, ce texte identifie des principes comme le partenariat, l'intégration d'objectifs, la coordination de politiques et ressources, la coopération renforcée et la gouvernance multi-niveaux. Aujourd'hui, dans son site officiel, la Commission Européenne reprend les dispositions des nouveaux règlements [12] des fonds structurels 2014-2020 et définit les stratégies macro-régionales comme « un cadre intégré, approuvé par le Conseil européen, qui peut être pris en charge par les Fonds structurels européens et d'investissement entre autres, pour relever les défis communs rencontrés par une zone géographique définie concernant les États membres et les pays tiers situés dans la même zone géographique, qui bénéficient ainsi du renforcement de la coopération et contribuent à la réalisation de la cohésion économique, sociale et territoriale ».

Figure 2

Espaces géographiques des macro-régions et des bassins maritimes

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Espaces géographiques des macro-régions et des bassins maritimes

Carte réalisée par le programme INTERACT (24/09/2014) p. 5.

16 Actuellement, trois macro-régions sont déjà opérationnelles : la Baltique, le Danube et l'Adriatique-Ionienne. L'initiative dédiée aux territoires alpins a été lancée en juin 2015. En observant les cartes de ces différentes initiatives, il faut remarquer que la dimension externe, c'est-à-dire, l'inclusion d'états qui ne sont pas membres de l'Union européenne, semble aussi un facteur déterminant. C'est le cas pour la Russie (mer Baltique), l'Albanie (Adriatique-Ionienne), la Bosnie, le Monténégro, la Serbie (Danube et Adriatique-Ionienne), la Croatie, la Moldavie, l'Ukraine (Danube) ainsi que la Suisse et le Liechtenstein pour la macro-région alpine.

17 Dans le rapport sur la gouvernance des macro-régions [13], la Commission européenne explique qu'elles « permettent de répondre à des problèmes tels que :

18

  • ­ la dégradation de l'état écologique de la mer Baltique ;
  • ­ le potentiel non exploité en matière d'amélioration de la navigabilité et de la qualité des eaux afin de renforcer l'attractivité de la région du Danube ;
  • ­ la diversité et la fragmentation économiques, sociales et environnementales dans la région de l'Adriatique et de la mer Ionienne ;
  • ­ les déséquilibres territoriaux, économiques et sociaux entre les villes et les régions rurales dans l'espace alpin ».

2.  La longue course de la Stratégie atlantique

19 Pour l'Arc Atlantique, les synergies régionales se développent en parallèle avec la coopération territoriale européenne. Ainsi, l'organisation qui regroupe les régions atlantiques, la Commission Arc Atlantique (CAA), est née à l'intérieur de la Conférence de régions périphériques et maritimes [14] (CRPM) en 1989 (Auffray, 1998, p. 11).

20 La CAA [15] est devenue ensuite le moteur de programmes européens comme Arcantel, mis en œuvre entre 1990 et 1993 ou Atlantis, réalisé entre 1993 et 1995. Tandis que le premier se limitait à un système de guidage maritime, le deuxième représentait déjà l'ambition de développer une stratégie multidimensionnelle. Cette volonté a été ensuite traduite dans le premier INTERREG IIC « Atlantique » qui s'est déroulé de 1994 à 1999. Le succès de cette initiative encouragea les villes atlantiques à créer leur propre association en 2000, la Conférence des villes de l'Arc Atlantique [16] (CVAA). De même, les conseils économiques et sociaux créent le Réseau transnational atlantique [17] en 2003. Les territoires sont restés actifs dans la coopération transnationale et cette année devrait voir le démarrage d'INTERREG VB.

Figure 3

Zones de coopération de l'UE-28 : Espace atlantique

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Zones de coopération de l'UE-28 : Espace atlantique

© Eurogeographics association

21 Dans ce contexte, les progrès de la Stratégie de la mer Baltique ont immédiatement inspiré les autres espaces de coopération territoriale de l'Union européenne tels que le bassin méditerranéen, l'espace alpin ou l'Arc Atlantique. Dans ce dernier cas, les débats sont animés depuis 2008 par les organisations transnationales citées plus haut.

22 Ainsi, les réseaux atlantiques ont marqué cette volonté de s'inscrire dans la démarche macro-régionale en publiant très tôt des documents de positionnement, comme la déclaration finale de l'assemblée générale de la Commission Arc Atlantique en 2009 ou dans l'édito du bulletin publié par la CVAA la même année, intitulé « La Stratégie baltique : un miroir pour l'Atlantique ».

23 Ces documents sont le point de départ des discussions menées par ces deux associations avec la future présidence espagnole de l'Union européenne en septembre 2009 [18] autour d'une macro-région pour l'Arc Atlantique.

24 Comme cela avait été le cas pour la stratégie Baltique, la future macro-région devait être « parrainée » par un état atlantique. Cela servirait à obtenir l'accord du Conseil Européen pour lancer institutionnellement l'initiative. En conséquence, la présidence espagnole (premier semestre 2010) était une fenêtre d'opportunité unique.

25 Fruit de ces débats, la présidence espagnole porta l'idée d'une stratégie atlantique auprès du Conseil européen. Celle-ci fut approuvée, mais pas en tant que macro-région. Or, les conclusions du Conseil de l'Union européenne de Juin de 2010 invitèrent la Commission Européenne à « présenter une stratégie de l'Union Européenne pour la Région de l'Atlantique dans le cadre de la politique maritime intégrée » et non dans le cadre de la coopération territoriale comme pour la Stratégie Baltique.

Figure 4

La vulnérabilité des côtes atlantiques au changement climatique 2010.

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La vulnérabilité des côtes atlantiques au changement climatique 2010.

Service Études & Info Géo de la Région Basse-Normandie juin 2010

26 En même temps, la CAA et la CVAA avaient publié des « Orientations pour une stratégie intégrée pour l'Arc Atlantique » (CAA, 2010) où les deux organisations proposaient une approche macro-régionale comme la plus apte à relever les défis de développement de l'Arc Atlantique, affirmation qu'ils ont maintenue par la suite. Ce texte défendait le besoin de « préserver et promouvoir les territoires atlantiques » afin de :

27

  • ­ répondre aux enjeux des territoires atlantiques ;
  • ­ faciliter une meilleure gouvernance des politiques ;
  • ­ préparer les futures politiques européennes.

28 Plus concrètement et à travers d'une série de cartes et d'analyses « forces, faiblesses, opportunités et menaces » (FFOM), ce document d'orientations identifiait aussi les thématiques auxquelles une stratégie macro-régionale atlantique devrait s'attaquer, comme :

29

  • ­ les énergies marines ;
  • ­ les transports et l'accessibilité ;
  • ­ l'environnement et le changement climatique ;
  • ­ la recherche, l'innovation et la formation ;
  • ­ la pêche ;
Figure 5

Analyse FFOM sur la recherche, l'innovation et la formation en Arc Atlantique

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Analyse FFOM sur la recherche, l'innovation et la formation en Arc Atlantique

Commission Arc Atlantique/Conférence des villes de l'Arc Atlantique juin 2010

30 Suite à la demande du Conseil, dans le dernier semestre de 2010, la Commission a distribué un « document informel [19] : L'UE et l'océan Atlantique ». Ce non-paper a été suivi d'une consultation publique en ligne [20], s'appuyant sur un document d'orientation.

31 Comme résultat et après une résolution favorable du Parlement européen, la Commission européenne [21] a publié en novembre 2011 une communication [22] afin de « définir une stratégie maritime pour la région atlantique » à partir des priorités suivantes :

32

  • ­ la mise en œuvre de l'approche écosystémique ;
  • ­ la réduction de l'empreinte carbonique de l'Europe ;
  • ­ l'exploitation durable des ressources naturelles des fonds marins de l'Atlantique ;
  • ­ une meilleure réponse aux menaces et aux situations d'urgence ;
  • ­ une croissance ouverte à tous.

33 Cette communication annonçait un « Forum » Atlantique qui eut lieu entre 2012 et 2013, consistant en une série d'ateliers thématiques et une consultation écrite. Le suivi était assuré par des instances supranationales : un leadership group (niveau politique) et un comité de pilotage (niveau technique) coordonnés par la Direction Générale Politique Maritime de la Commission européenne.

34 Les cinq ateliers (un par pays de l'Arc Atlantique) ainsi que la consultation écrite avaient pour but d'interroger les parties prenantes sur les thématiques identifiées dans ladite communication, afin de déterminer si elles étaient pertinentes pour la Stratégie ou si celles-ci devaient être modifiées. Les thématiques de ces ateliers étaient les suivantes :

35

  • ­ ressources côtières et hauturières ;
  • ­ l'innovation au service d'une économie sobre en carbone ;
  • ­ services océaniques et atténuation du changement climatique dans le cadre de l'approche éco-systémique ;
  • ­ réduire l'empreinte carbonique et promouvoir une croissance ouverte à tous ;
  • ­ recherche et innovation, et présentation du plan d'action.

36 Par ailleurs ces événements devaient servir à « mieux faire connaître le forum atlantique et les procédures relatives aux financements européens, alimenter le plan d'action pour l'Atlantique et aider les acteurs concernés à présenter des projets bien préparés [23]. »

37 Né de ces démarches et parmi les activités de la présidence irlandaise de l'Union européenne, le plan d'action de la Stratégie Atlantique fut dévoilé en mai 2013 [24]. Dans le cadre de la politique maritime intégrée de l'Union européenne, cette initiative propose de concentrer les efforts sur :

38

  • ­ la promotion de l'entrepreneuriat et l'innovation ;
  • ­ la protection, la sécurisation et la valorisation de l'environnement marin et côtier ;
  • ­ l'amélioration de l'accessibilité et la connectivité ;
  • ­ la création d'un modèle socialement inclusif et durable du développement régional.

39 Le Plan, qui a été mis en marche en 2014, compte actuellement avec un « mécanisme d'assistance » qui est assuré par un cabinet d'études. Ce prestataire communique des informations sur la Stratégie atlantique, ses priorités de recherche et d'investissement ainsi que sur les outils de financement possibles [25]. Basé à Bruxelles, le mécanisme compte aussi sur un représentant (point focal) par pays afin d'assurer la participation des acteurs et l'organisation de deux événements par État.

3.  Le jeu des différences : stratégies macro-régionales et de bassin maritime

40 Ces deux instruments de coordination entre programmes européens peuvent traduire la primauté de la cohésion territoriale par rapport aux objectifs sectoriels de l'Union européenne, primauté reconnue par l'article 174 du traité de Lisbonne. Dans ce sens, les règlements [26] des fonds structurels 2014-2020 les définissent ainsi :

41

  • ­ (Une) « stratégie macro-régionale » (est) un cadre intégré approuvé par le Conseil européen, qui peut être soutenu par les Fonds ESI [27] entre autres, dont l'objectif consiste à s'attaquer à des problèmes communs rencontrés au sein d'une zone géographique définie, qui concernent des États membres et des pays tiers situés dans la même zone géographique, qui bénéficie de ce fait d'une coopération renforcée contribuant à la réalisation de la cohésion économique, sociale et territoriale ;
  • ­ (Une) « stratégie spécifique au bassin maritime », (est) un cadre structuré de coopération relatif à une zone géographique donnée, élaboré par les institutions de l'Union, les États membres, leurs régions et, le cas échéant, les pays tiers partageant un bassin maritime ; la stratégie spécifique au bassin maritime prend en considération les spécificités géographiques, climatiques, économiques et politiques du bassin maritime ;

42 Ainsi, le cadre stratégique commun [28] qui accompagnait la proposition des règlements des fonds structurels, énumérait des possibilités pour présenter des projets combinant divers fonds structurels (FEDER, FSE…) entre eux et avec les fonds sectoriels (Horizon 2020, LIFE +). Il ne faut pas oublier que cette possibilité de coordonner des fonds est une des conditions de la mise en œuvre tant d'une macro-région que d'une stratégie maritime.

43 Ces définitions ainsi que la lecture des différents documents des institutions européennes, montrent, au niveau de la mise en œuvre, des parallèles significatifs entre la Stratégie de la Mer Baltique et la Stratégie Maritime Atlantique. Toutes les deux identifient un territoire concret dans lequel existent des coopérations fonctionnelles entre les collectivités et les acteurs autour de problèmes communs. Les deux stratégies présentent des propositions novatrices afin de promouvoir une approche intégrée de développement territorial.

44 Tant en Baltique qu'en Atlantique, la demande des collectivités territoriales d'aller vers un cadre plus concret témoigne d'un certain échec par rapport à « l'efficience [29] » des initiatives et à l'engagement politique autour de celles-ci.

45 L'alignement des fonds, politiques et institutions autour des objectifs communs vise à combler le manque d'efficience. Le but est d'éviter les doublons ainsi que de favoriser les économies d'échelle. Pour l'engagement politique, l'installation d'une stratégie macro-régionale ou maritime provoque un renouvellement de l'intérêt des acteurs. Tel que mentionné plus haut, cet engagement peut se traduire dans une coopération renforcée. Par contre, des nuances persistent par rapport aux critères du Traité d'Amsterdam concernant ce type d'initiative interétatique. Par exemple, l'absence de traduction juridique, notamment dans le cas de l'Arc Atlantique.

46 Néanmoins, il existe aussi des différences substantielles entre les deux programmes. La première et plus significative est la portée. Tandis que la stratégie Baltique cible des priorités dans une approche générale de développement durable, la Stratégie Atlantique se limite à la politique maritime intégrée. En conséquence, les initiatives macro-régionales sont piloté(e)s par la Direction générale politique régionale et urbaine de la Commission européenne alors que les stratégies maritimes (comme l'Atlantique ou la Méditerranée) sont gérées par la Direction générale de la mer.

47 Une autre différence réside dans les porteurs de l'initiative. Même si la Stratégie Atlantique compte sur un « Groupe de Haut Niveau » composé par les états, tout comme les stratégies macro-régionales, la différence s'établit au niveau du terrain. Dans le cas des macro-régions, ce sont les agents du territoire les responsables de la mise en œuvre. En conséquence, les collectivités territoriales sont devenues les pilotes de projets phare et/ou de domaines thématiques. En revanche, le Plan d'Action de la stratégie Atlantique a délégué le rôle d'animation à un prestataire privé et confiné les plateformes de coopération territoriale à un statut consultatif occasionnel. Pour ce qui concerne l'appropriation de la démarche par les citoyens, les groupes de soutien local sont absents dans la rédaction du Plan d'Action Atlantique et donc la participation directe semble très restreinte. S'agissant d'initiatives issues de la mobilisation politique des collectivités, cela semble refléter une interprétation différenciée du principe de subsidiarité, par rapport à la politique régionale dans un cas et à la politique maritime intégrée dans l'autre.

48 Il semblerait que la troisième différence réside dans la dimension externe. Si la stratégie Baltique compte la Russie parmi les états impliqués, l'Arc Atlantique ne fait pas partie de la politique de voisinage. D'où l'intérêt de définir cet espace en tant que « bassin ouvert » et prendre compte des coopérations déjà existantes avec des pays comme le Maroc, le Cap-Vert (les Canaries font partie de l'Arc Atlantique) voire des pays plus éloignés comme les États-Unis. Dans ce sens, un protocole de coopération a été signé avec le Canada en 2013, lançant l'Alliance pour la recherche dans l'Océan Atlantique [30].

49 Toutefois, même si ces différences peuvent paraître déterminantes, il existe encore une opportunité d'évolution pour la stratégie maritime atlantique. L'installation d'une initiative macro-régionale pourrait être proposée si lors de l'évaluation à mi-parcours des politiques structurelles prévue en 2017 les institutions européennes détectent un manque d'efficience. Sachant que celle-ci est un requis fondamental des règlements 2014-2020, cette différence factice (bassin maritime/macro-région) pourrait disparaître pour faire évoluer l'Arc Atlantique et d'autres stratégies maritimes dans une macro-région. Cela a été d'ailleurs le cas pour le bassin Adriatique-Ionien. Née en 2012 en tant que stratégie maritime, la macro-région Adriatique-Ionienne [31] a été adoptée le 17 juin 2014.

Bibliographie

Bibliographie

  • Ágh A. et alt (éd.) (2010), « Europeanization of the Danube Region : The Blue Ribbon Project » Toghether for Europe Series Blue Ribbon Research Centre King Sigismund College, Budapest.
  • Auffray D. (1998), « L'Arc Atlantique. Réalité historique et renaissance des années 1990. Son avenir pour le xxie siècle », Norois. N° 180, L'Atlantique et les géographes. p. 609- 615Commission Arc Atlantique (2009), « Déclaration finale. Assemblée générale de la Commission Arc Atlantique » – Santander
  • Commission Arc Atlantique (2013), « Contribution de la Commission Arc Atlantique de la CRPM à l'appel à suggestions de la Commission européenne concernant les priorités du Plan d'Action de la Stratégie Atlantique » Approuvée par le Bureau politique de la Commission Arc Atlantique réuni à Nantes (Pays de la Loire-France).
  • Commission Arc Atlantique et Conférence des Villes de l'Arc Atlantique (2010), « Propositions d'orientations pour une stratégie intégrée pour l'Arc Atlantique » Rennes.
  • Comité économique et social européen « Avis sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions – Plan d'action pour une stratégie maritime dans la région atlantique – Pour une croissance intelligente, durable et inclusive ».
  • Conférence des Villes de l'Arc Atlantique (2013), « Contribution des villes atlantiques à l'appel à suggestions sur les priorités clés d'investissement et recherche – Forum Atlantique » Secrétariat Général de la Conférence des villes de l'Arc Atlantique. Rennes
  • Conférence des Villes de l'Arc Atlantique (2010), « Réponse de la Conférence des Villes de l'Arc Atlantique à la Consultation publique de la Commission européenne sur une politique maritime intégrée pour le bassin de l'Océan Atlantique » Secrétariat général de la Conférence des villes de l'Arc Atlantique, Rennes.
  • Dubois A. et al (2009), « EU macro-regions and macro-regional strategies – A scoping study » Nordregio Electronic Working Paper 2009 :4 ISSN 1403-2511
  • Dühr S. (2011), « Baltic Sea, Danube and MacroRegional Strategies : A Model for Transnational Cooperation in the EU ? » Studies & Research 86 Notre Europe. September
  • Parlement européen (2012), « Résolution du 13 septembre 2012 sur la stratégie pour la région atlantique dans le cadre de la politique de cohésion de l'Union (2011/2310 (INI) »
  • Perrin Th. (2011), « L'institutionnalisation de la coopération transfrontalière en Europe. Durand M.-F. et Lequesne C., Ceriscope. Les Frontières. CERI/Presses de Science Po, publication en ligne http://ceriscope.sciences-po.fr, 2011. < halshs-00575641 >Schymik C. (2011), « Blueprint for a Macro-Region. EU Strategies for the Baltic Sea and Danube Regions » SWP Research Paper RP10 2011, Berlin ISSN 1863 1053
  • Stocchiero A. (2010) « Macroregiones de Europa : ?`Vino Viejo en una Botella Nueva ? » CESPI Rome, Working Papers 65/2010
  • Sites web consultés (en novembre 2014) :

Notes

  • [1]
    Article 174 du Traité de Lisbonne modifiant le traité sur l'Union européenne et le traité instituant la Communauté européenne, signé à Lisbonne le 13 décembre 2007.
  • [2]
    L'information mise à jour sur ces programmes peut se retrouver sur le site d'INTERACT : http://www.interact-eu.net/.
  • [3]
    Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, Comité économique et social européen et au Comité des régions – Une politique maritime intégrée pour l'Union européenne {COM (2007) 574 final)}.
  • [4]
    Sauf les comparaisons réalisées par les services de la Commission Européenne dans le cadre des explications des nouveaux règlements structurels, dont les présentations sont citées dans les références.
  • [5]
    Centre d'études de politique internationale (Italie) : http://www.cespi.it/.
  • [6]
    European Council « Presidency conclusions, Brussels European Council 14 December 2007 » Bruxelles, 14 février 2008 16616/1/07 REV 1.
  • [7]
    Commission Européenne « Rapport de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité Économique et Social Européen et au Comité des Régions concernant la stratégie de l'Union européenne pour la région de la mer Baltique » Bruxelles le 10.6.2009 – COM (2009) 248 final.
  • [8]
    Cette absence est connue comme « la règle des trois non »
  • [9]
    Commission Européenne « Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions concernant la stratégie de l'Union européenne pour la région de la mer Baltique » Bruxelles, le 23.3.2012 COM (2012) 128 final.
  • [10]
    Commission Européenne « Rapport de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité Économique et Social Européen et au Comité des Régions concernant la gouvernance des stratégies macro-régionales » Bruxelles 20/05/2014 COM (2014) 284 final.
  • [11]
    Commission Européenne « Rapport de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité Économique et Social Européen et au Comité des Régions concernant la valeur ajoutée des stratégies macro régionales » Bruxelles, le 27.6.2013 COM (2013) 468 final (p. 3).
  • [12]
    Eur-Lex « Règlement (UE) n ° 1303/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 portant dispositions communes relatives au Fonds européen de développement régional, au Fonds social européen, au Fonds de cohésion, au Fonds européen agricole pour le développement rural et au Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche, portant dispositions générales applicables au Fonds européen de développement régional, au Fonds social européen, au Fonds de cohésion et au Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche, et abrogeant le règlement (CE) n ° 1083/2006 du Conseil » publié au Journal officiel de l'Union européenne, Bruxelles 20.12.2013.
  • [13]
    Ibid., note 8 (p. 2).
  • [14]
  • [15]
    http://www.arcatlantique.org.
  • [16]
  • [17]
  • [18]
  • [19]
    http://ec.europa.eu/dgs/maritimeaffairs_fisheries/consultations/atlantic_ocean/non_paper_fr.pdf.
  • [20]
    European Commission « Public consultation on an integrated maritime policy for the EU Atlantic Ocean sea-basin report of outcomes » Bruxelles, décembre 2010.
  • [21]
    Commission européenne « Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions : Définir une stratégie maritime pour la région atlantique » Bruxelles, le 21.11.2011 COM (2011) 782 final.
  • [22]
    Il faut noter qu'une « Communication » n'a pas de valeur juridique. Ce type de document se limite à énoncer les principes et la nécessité d'une initiative particulière auprès des instances communautaires.
  • [23]
    Site de la Direction générale politique maritime de la Commission européenne : http://ec.europa.eu/maritimeaffairs/policy/sea_basins/atlantic_ocean/atlanticforum/events/index_fr.htm.
  • [24]
    Commission européenne, « Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions : Plan d'action pour une stratégie maritime dans la région atlantique Pour une croissance intelligente, durable et inclusive » Bruxelles, le 13.5.2013 COM (2013) 279 final.
  • [25]
  • [26]
    Ibid., note 12.
  • [27]
    Fonds européens structurels et d'investissement.
  • [28]
    European Commission « Commission Staff Working Document : Elements for a Common Strategic Framework 2014 to 2020 the European Regional Development Fund the European Social Fund, the Cohesion Fund, the European Agricultural Fund for Rural Development and the European Maritime and Fisheries Fund » Brussels, 14.3.2012 SWD (2012) 61 final.
  • [29]
    Définie comme la capacité d'obtenir des objectifs avec l'asignation appropiée de moyens, en évitant le gaspillage.
  • [30]
  • [31]
    Commission Européenne « Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité Économique et Social Européen et au Comité des Régions : concernant la stratégie de l'Union européenne pour la région de l'Adriatique et de la mer Ionienne
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