1L’information Géographique a été créée en 1936 pour apporter aux enseignants l’actualité scientifique la plus à jour et les outils pédagogiques nécessaires à une classe active, ouverte au monde. Au milieu de la décennie quatre-vingt, une rubrique didactique remplaçait la rubrique pédagogique, en accompagnant le mouvement de réflexivité portée à la nature et à la finalité de cet enseignement obligatoire, couplé à celui de l’histoire, qui fait l’originalité du système éducatif français. À partir des années 2000, les livraisons sont devenues de plus en plus thématiques. Cette évolution fut justifiée pour satisfaire au besoin de mise à jour des concepts et des catégories en usage. Il ne s’agissait pas tant de les reprendre en suivant l’évolution de la discipline, la rubrique didactique ayant pris en charge cet aspect. Il s’agissait plutôt de mettre en question l’actualité conceptuelle du monde en mouvement, cela pour une géographie capable de penser le changement et non plus dépositaire de la capacité à dresser l’impossible tableau géographique de la terre des hommes. Le texte d’Isabelle Lefort qui conclut le dossier de ce trimestre, replace dans une perspective historique et épistémologique ce type de glissement, qu’il soit conscient ou non.
2Au titre de l’actualité conceptuelle, le dossier consacré à l’inachèvement introduit une réflexion en évolution. Alors que les porteurs du projet Hovig Ter Minassian et Fabrizio Maccalia pointaient, pour commencer, les politiques publiques, les plans d’aménagement laissés en plan, la discussion qu’ils ont animée a pris le tour qu’elle devait sans doute nécessairement prendre. Tout reste toujours inachevé, jamais une fin ne peut être ponctuée. Bifurcations, changements de destination, subversions remettent toujours plus ou moins en cause les meilleurs plans matériels avec les idées qui les ont portés. Les chantiers abandonnés de la bulle immobilière espagnole à Seseña deviennent des motifs de visite (N. Baron). Les friches urbaines sont réorientées vers de nouveaux usages (Ph. Bachimon). Même les mobilisations sociales qui précédent, accompagnent, ou suivent la mutation de la vie et de la ville semblent rester toujours en suspens, en tout cas ne peuvent être déclarées achevées (C. Neveu). En marge de ce dossier mais bien dans sa ligne, les péripéties qui ont présidé à la protection de l’île aux Oiseaux montrent une variation de l’idée de nature et, partant, des controverses sur les usages et des dispositions qui en résultent (V. André et M. Mellac). De la même manière, les catégories géographiques sont-elles revues en suivant un mouvement qui n’est plus scandé mais perpétuel par une permanente reprise : retour à l’inachèvement scientifique (I. Lefort).
3Pourtant, l’actualité chaude peut réclamer que l’on s’y arrête, pour information. En fin de volume et avant les recensions, un texte témoignage d’Amin Eskander dresse le bilan provisoire de la désorganisation du système éducatif en Syrie.
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