L’écriture, dit Mallarmé : « qui l’accomplit intégralement se retranche. » De quoi ? De « l’universel reportage ». Mais aussi de la convivialité courante : solitude concrète. Armée d’un savoir : « nous ne sommes pas au monde » (sans pour autant pouvoir être d’un autre monde : il n’y en a pas). Et assurée que la communauté est impossible (sauf que nul n’existe sans participer d’un lien).
Voici une pandémie menaçante pour les corps, vertigineuse pour la penséee, perturbante pour la civilité. Elle nous « confine » : hop, retranchés ! Mais pour adhérer plus : au monde, à la communauté, au « reportage ». Chacun : en tête-à-tête avec soi – mais invité, vu que branché à des réseaux prolixes, à participer à tout. Et à avoir, sur tout, une opinion. C’est difficile. Rend bavard. Ou hagard. Ou les deux. En tout cas malheureux. Effaré par la légèreté des euphories « progressistes », la perversion des jouissances apocalyptiques, la confusion des savoirs, la fragilité des dispositifs sociaux et, nonobstant leurs carences, l’éreintante arrogance de ceux qui font profession de nous gérer politiquement la vie. Chance, pour l’auto-confiné que je suis couramment : retranché d’avance car au travail sur de nouvelles aventures de Chino. Pendant le confinement : rien écrit d’autre. Peu pensé à côté. Lu que de l’utile au texte en cours. Voire à peine vécu : insensibilisé aux signaux du dehors par l’hyperesthésie interne requise de qui écrit. Gribouille, en somme. Autruche : tête dans le sable, la plum…