Parlant du conflit israélo-palestinien, les historiens Shlomo Ben Ami et Élie Barnavi, l’un et l’autre militant pour la paix depuis un long temps déjà, ont parfois évoqué la tragédie grecque. Dans la tragédie grecque, s’il y a tragédie, c’est que les hommes parlant de droits légitimes ne peuvent donner reconnaissance aux droits légitimes de l’autre. Il y a collision entre deux légitimités, dont aucune n’a l’intention de céder sur son absolu. Dans une conférence récente, l’écrivain Amos Oz, lui aussi militant pour la paix de la première heure, a encore repris ce thème d’une « pure tragédie » pour caractériser ce conflit : « Parce qu’il s’agit d’un heurt entre “un droit et un droit” - entre une très forte vindicte sur une terre et une autre non moins forte vindicte portant sur la même terre. La Palestine est la terre foyer des Palestiniens dans le sens exact où la Grèce est la terre foyer des Grecs, et les Israéliens sont en Israël “pour exactement la même raison”. » La métaphore de la tragédie grecque peut ainsi être une bonne propédeutique pour appréhender le conflit israélo-palestinien. De cette façon de concevoir seulement son droit propre comme un absolu qu’elle met en scène, elle nous a enseigné qu’elle est passion aveugle de l’âme, et se nomme hybris.
« La tragédie grecque s’adressait aux hommes “moins comme membres de la collectivité politique que comme appartenant à cette collectivité nullement politique qu’est le genre humain, ou pour lui donner son nom tragique la “race des mortel…