Depuis la mouvance des bio-artistes débutée dans les années 1990, le geste artistique ne peut plus se contenter de métaphores autour du monde vivant. En s’appuyant sur les biotechnologies ou bien sur une « biologie open source », la cellule, la molécule, le micro-organisme, l’ADN, voire l’atome, deviennent un programme de création. Au-delà du recours à la manipulation du vivant ou à l’auto-expérimentation – habituellement mises en avant dans le champ du bio-art – ces nouvelles pratiques bouleversent également notre vision de l’image. Celle-ci se présente désormais comme un artefact vivant. En effet, créer avec les plus petites formes de vie, engendre un nouveau type d’images que nous qualifions ici de « vivantes » car réalisées grâce à des micro-organismes vivants. Ici, l’apport du monde microscopique et des techniques de microbiologie permet de questionner l’image et ses frontières. Comment les postures bio-artistiques peuvent-elles contrôler le monde vivant observé au microscope et dans le même temps le réenchanter ? Quel rôle joue le hasard dans ce croisement entre art et microbiologie ? Comment ces nouvelles images « vivantes » nous incitent à envisager notre lien aux bactéries ? Par ailleurs, si l’œuvre dite vivante devient une sorte d’« observatoire » des micro-organismes, le « discours idéologique » de l’artiste, semble prendre le dessus sur la « narrativité » propre au vivant observé au microscope. En ce sens, la pandémie de Covid-19 incitera-t-elle les imaginaires bio-artistiques à s’affranchir d’un récit parfois trop anthropocentrique pour revenir au « savoir-voir » …