Matthieu Poirier. – À quelle période et de quelle manière s’amorce dans votre œuvre un dialogue entre la peinture et l’architecture ?Felice Varini. – En 1978, j’ai mis fin à une expérience de six années de scénographie de théâtre afin de commencer un travail personnel. J’arrive ainsi à Paris avec la ferme intention de peindre, mais je décide également de ne plus peindre sur une surface bidimensionnelle dans mon atelier pour faire des objets « définitifs ». Ainsi, je veux absolument intégrer l’espace et en faire le lieu de mes réflexions et de ma peinture.MP. – Pourquoi vous installer alors à Paris ?FV. – Je me méfiais de l’oisiveté de Rome. À l’époque, des gens comme Luciano Castelli, Salomé, etc. s’installaient à Berlin. Même si cette ville donnait beaucoup de possibilités, les peintres de cette scène artistique ne m’attiraient pas vraiment. En revanche, Paris donnait d’infinies possibilités culturelles et artistiques, et il y avait aussi la Faculté de Vincennes et sa section Arts plastiques.MP. – Vous êtes originaire de Suisse. Des piliers de l’abstraction géométrique comme Bill ou Lohse vous ont-ils marqué ?FV. – Ils m’ont certainement influencé dans ma jeunesse, mais de manière moins décisive que Fontana.MP. – Qu’est-ce qui vous a marqué chez Fontana ? En regard de votre œuvre, sa série concetto spaziale vient immédiatement à l’esprit…FV. – J’ai redécouvert le concetto spaziale à vingt ans à Genève et cela a déterminé mon parcours. Mais avant cela, l’année de mes dix ans, alors que je me promène à Locarno, une ville de dix mille habitants, je découvre la Galerie Flaviana qui est dirigée par Rinaldo Bianda qui fait des expositions avec la “crème” de l’époque : Fontana, Manzoni… tous les italiens mais aussi Gerhard Richter ; dans les années 1966-67 elle présente même des performances…