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Article de revue

Un temps de querelles

Pages 5 à 22

Notes

  • [1]
    C’est-à-dire la période qui s’étend, en dates rondes, du milieu du XVIe siècle jusqu’à la Révolution française. Les historiens l’appellent « Ancien Régime » ou « Époque moderne », mais les dates sont un peu différentes, et l’appellation ici retenue prend en compte des faits culturels avérés.
  • [2]
    S.-A. Irailh, Querelles littéraires ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la République des Lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours, Paris, Durand, 1761, 4 t. en 2 vol. ; réimpr. Genève, Slatkine, 1967.
  • [3]
    Ces distinctions sont résumées de façon plus complète, et limpide, dans la contribution d’O. Mostefai au présent volume.
  • [4]
    Publié en 1751, dans le t. II. Cette référence a été donnée par K. Tunstall dans une contribution inédite au travail collectif indiqué plus loin ; certaines références lexicales qui suivent aussi ; qu’elle soit ici remerciée de cette communication.
  • [5]
    A. Viala, Naissance de l’écrivain. Sociologie de la littérature à l’âge classique, Paris, Éd. de Minuit, 1985.
  • [6]
    H. Merlin, Public et littérature en France au XVIIe siècle, Paris, Les Belles Lettres, 1994.
  • [7]
    G. Ferreyrolles (dir.), Littératures classiques, n° 59 (« La polémique au XVIIe siècle »), 2006.
  • [8]
    M. Bombart, Guez de Balzac et la querelle des Lettres : écriture, polémique et critique, Paris, Champion, 2007.
  • [9]
    L. Godard de Donville (éd.), D’un siècle à l’autre : Anciens et Modernes, Marseille, CMR 17, 1987.
  • [10]
    La Querelle des Anciens et des Modernes (XVIIe-XVIIIe siècles), anthologie éd. par A.-M. Lecocq, précédée de « Les Abeilles et les araignées » par M. Fumaroli, postface de J.-R. Armogathe, Paris, Gallimard, « Folio », 2001. Voir également M. Fumaroli, Le Sablier renversé. Des Modernes aux Anciens, Paris, Gallimard, « Tel », 2012.
  • [11]
    Voir notamment le n° 25 de Mil neuf cent. Revue d’histoire intellectuelle, Paris, 2007 (en partic. l’art. d’A. Lilti, « Querelles et controverses : les formes du désaccord à l’époque moderne », p. 13-28) et l’ouvrage de S. Van Damme, L’Épreuve libertine. Morale, soupçon et pouvoirs dans la France baroque, Paris, CNRS Éd., 2008.
  • [12]
    En 1996, dans un séminaire en Sorbonne consacré aux querelles littéraires au XVIIe siècle. Y participaient notamment M. Bombart, D. Blocker, M. Rosellini, J. Shin et D. Ribard, dont les apports ont contribué à nourrir, de diverses façons, ce volume ou les travaux qui l’ont préparé ; qu’elles en soient ici remerciées.
  • [13]
    On trouvera tous les détails sur le projet, son équipe et ses travaux sur le site : www.agon.paris-sorbonne.fr/
  • [14]
    Sur les discriminations à l’égard des femmes en ce domaine, voir la contribution de S. Vasset. Pour ce qui est des « harengères », voir P. Ronzeaud, « De la harangère à la “harangueuse” : étude d’un stéréotype polémique forgé au XVIIe siècle », dans Ouverture et dialogue. Mélanges offerts à Wolfgang Leiner, Tübingen, Narr, 1988, p. 739-753.
  • [15]
    Voir ci-après la contribution d’A. Cantillon.
  • [16]
    Voir dans ce recueil la contribution de M. Roussillon.
  • [17]
    Là aussi, voir la bibliographie ; mais on signale ici qu’il va de soi que travailler sur des conflits a impliqué de revoir les réflexions de G. Bouthoul et de Clausewitz avant les classiques de la rhétorique et de la pragmatique et leurs applications techniques dans l’analyse des discours.
  • [18]
    Certes l’écrit se donne parfois comme transcription d’une action orale, mais le seul fait de la transcrire la modifie selon les contraintes de l’écrit : en de pareil cas, on ne perdra donc pas de vue ces effets de scripturarisation de la parole.
  • [19]
    D’où le recours à un outil de collecte et analyse numérique, en forme de banque de données : voir les détails sur le site AGON susmentionné.
  • [20]
    Voir, entre autres et notamment – parce qu’ouvrant sur des détails de la démarche –, Les Règles de l’art, Paris, Éd. du Seuil, 1992, p. 107 et 351.
  • [21]
    Pour le cas de l’institution théâtrale, voir la contribution de J.-M. Hostiou.
  • [22]
    Je me permets de renvoyer ici à A. Viala, Lettre sur l’intérêt littéraire, Paris, Puf, 2006.
  • [23]
    Voir dans ce volume l’article d’A. Tadié ; voir aussi celui de A.-L. Rey pour des débats scientifiques entre Angleterre, Allemagne, France et Suisse, et celui de O. Mostefai déjà cité pour un autre cas de querelle transfrontalière.
  • [24]
    Et il est bon de rappeler qu’une part de la production se fait alors en latin, ce qui rend cette circulation internationale encore plus aisée : voir dans ce volume le cas de Thomas More, examiné par R. Scholar.
  • [25]
    Voir dans ce volume le cas de la querelle des Suppositi de l’Arioste examiné par J. Steigerwald, et l’interrogation sur la circulation des modèles italien, espagnol et français de la comédie.
  • [26]
    Pour des raisons pratiques, dans une première phase de la recherche, a été mis en avant, comme domaine de comparaison, l’espace constitué par la France et la Grande-Bretagne ; il s’agit d’une ouverture, à élargir.
  • [27]
    Voir en particulier dans ce volume les contributions de L. Stambul pour les Satires et de L. Andriès pour le genre du dialogue des morts et son évolution, notamment dans des débats de plus en plus politiques.
  • [28]
    Voir la contribution de C. Gallien sur la querelle de l’« orientalisme ».
  • [29]
    Voir la contribution de I. Maclean où il apparaît, à propos d’un épisode de la « querelle des Femmes » que les enjeux politiques possibles – la régence de Marie de Médicis – sont peut-être secondaires par rapport aux opérations de librairie.
  • [30]
    Ou de Rabelais : voir la contribution de M. Bernard.
  • [31]
    Voir H. Merlin, op. cit. ; A. Viala, La France galante, Paris, Puf, 2008, p. 259 sq.
  • [32]
    Voir la contribution d’O. Mostefai pour le cas de Rousseau.
  • [33]
    Voir la contribution d’A. Cantillon pour le cas de Pascal.
  • [34]
    Là encore, je me permets de renvoyer pour une analyse plus détaillée à la Lettre sur l’intérêt littéraire (op. cit.).
  • [35]
    On verra à cet égard la contribution de P. Fièvre sur le cas de Racine, et celle de G. Forestier et C. Bourqui sur la façon dont Molière joue de la « querelle de L’École des femmes » pour gagner en visibilité dans l’espace public.
  • [36]
    Voir la contribution d’A.-L. Rey sur la primeur de l’invention du calcul infinitésimal et ses retombées.
  • [37]
    Voir la contribution de S. Vasset sur les revendications du droit à l’exercice médical.
  • [38]
    Voir la contribution de D. Ribard sur les méthodes d’arpentage qui firent querelle jusqu’à l’Académie des sciences.

1Partons d’une observation empirique commune. Qui fréquente un tant soit peu l’histoire de la vie culturelle de la première modernité [1] ne peut manquer d’être frappé par l’abondance de disputes, querelles et controverses qui la traversent. Ainsi l’histoire culturelle la plus courante fera certainement mention de la querelle des Anciens et des Modernes, comme l’histoire littéraire de la querelle du Cid, l’histoire des sciences et de la philosophie de la querelle du vide, celle des arts de la querelle du dessin et du coloris, et celle de la musique, de la querelle des Bouffons… La moindre observation un peu plus attentive suggère que ces exemples-là ne sont que quelques pointes émergentes d’un iceberg bien plus vaste (ceci pour employer une métaphore commode quoique, on le verra, peut-être assez peu adéquate en fait). Et si certes il y a eu des querelles, disputes et controverses avant (ainsi la querelle des Universaux) et ensuite (ainsi la Bataille d’Hernani), il semble à tout le moins que l’activité disputante a été très intense durant la première modernité, que celle-ci fut un temps singulier de querelles.

2 De l’intuition empirique à quelques lectures. En 1761, l’abbé Simon-Augustin Irailh publie ses Querelles littéraires, ouvrage qu’il présente comme une histoire propre à éclairer l’ensemble de l’évolution et des « révolutions » de la « République des Lettres depuis Homère jusqu’à [son temps] [2] ». En 1790, Kant publie la Critique du jugement où il éprouve le besoin de construire une opposition entre la dispute, débat argumenté qui peut conduire les philosophes à la vérité, et la querelle, conflit d’opinions agressif et sans issue [3]. Affirmation d’une importance cruciale chez l’un, effort d’expulsion d’une partie des combats d’idées et de mots chez l’autre, les deux ensemble donnent le sentiment que les querelles tendaient bien à envahir tout l’espace des discussions, bien au-delà de celui des questions d’esthétique littéraire ; le sentiment aussi que les gens de ce temps avaient conscience de l’importance de telles pratiques ; et enfin la certitude qu’ils savaient en jouer avec humour. Ainsi, en amont des deux précédents, ce petit texte :

3

Le capuchon fut autrefois l’occasion d’une grande guerre entre les cordeliers. L’ordre fut divisé en deux factions, les frères spirituels et les frères de communauté. Les uns voulaient le capuchon étroit, les autres le voulaient large. La dispute dura plus d’un siècle avec beaucoup de chaleur et d’animosité, et fut à peine terminée par les bulles de quatre papes, Nicolas IV, Clément V, Jean XXII, et Benoît XII. Les religieux de cet ordre ne se rappellent à présent cette contestation qu’avec le dernier mépris.
Cependant, si quelqu’un s’avisait aujourd’hui de traiter le Scotisme comme il le mérite, quoique les futilités du docteur subtil soient un objet moins important encore que la forme du coqueluchon de ses disciples, je ne doute point que l’agresseur n’eût une querelle fort vive à soutenir et qu’il ne s’attirât bien des injures.

4 Ces lignes réjouissantes sont de Diderot, dans l’article « Capuchon » de l’Encyclopédie[4]. Elles indiquent, ma foi, bien des choses en somme. Notamment, bien sûr, que les querelles peuvent advenir sur toutes sortes de choses et puis aussi que le risque qu’il en éclate au présent est patent, mais peut-être également une possible différence entre un « autrefois » où survenaient des « disputes » et le présent des Lumières où l’on « querelle » ; mais les disputes de jadis sont ici comparées ironiquement à de « grandes guerres », menées « avec beaucoup de chaleur et d’animosité » tandis que le présent n’expose qu’à « une querelle fort vive ». Bref, sans davantage égrener les exemples, il apparaît que les lectures tendent à confirmer l’intuition de l’abondance des querelles, en même temps qu’elles dessinent des questions de lexique et de terminologie.

5 Passons de l’empirie et des lectures à l’expérience. Expérience personnelle : comme beaucoup, sinon comme un chacun, j’ai été confronté aux querelles, disputes et controverses quand j’ai étudié la situation du champ littéraire à l’âge classique [5]. Cela remonte à quasiment une génération… Expérience commune : il y a eu depuis lors nombre de travaux de recherche importants qui ont touché à cette question. Dans le domaine littéraire, à propos de l’idée de « public » et du rôle capital joué par des querelles dans son évolution [6] ou des formes et pratiques de l’écriture polémique [7] ou sur tel cas particulier, celui des Lettres de Guez de Balzac par exemple [8] ; à propos de la querelle des Anciens et des Modernes, dans ses multiples dimensions [9] et dans son extension européenne [10], mais aussi dans l’histoire de la vie intellectuelle dans son ensemble [11], etc., on verra un état plus complet de la question dans le dossier bibliographique de ce volume. L’expérience montre à tout le moins qu’il y a là un terrain ouvert et large, qui excède les compétences et moyens individuels. Une entreprise collective s’impose donc. Un premier stade en avait été engagé jadis [12], une reprise plus ample se fait aujourd’hui dans le programme de recherche AGON, qui a pour but d’étudier les disputes, querelles et controverses dans la première modernité [13]. Le présent volume en expose quelques premières perspectives, offertes à la communauté à des fins de collaboration et, bien entendu, de débats, y compris de disputes, de controverses et même, qui sait, de querelles. En tout cas, il s’agit ici, sans capuchon ni large ni étroit, d’indiquer les observations premières que ces perspectives permettent, les hypothèses qu’elles induisent et le choix de démarche qu’elles imposent.

Objets

6Mais de quoi parle-t-on quand on parle de « querelles, controverses et disputes » ? L’histoire littéraire française s’est accoutumée à faire un usage assez extensif du terme de « querelle », plus fréquent que dans d’autres pays : le mot quarrel est par exemple moins présent dans la critique de langue anglaise. La question se pose alors de savoir s’il s’agit là d’habitudes langagières propres à un pays ou à une discipline, ou si au contraire cette fréquence signale un phénomène historique identifiable, qui signifierait que l’on a querellé davantage en France qu’ailleurs. Bonne question sans doute, mais sur laquelle nous n’anticiperons pas ici.

7 Restons donc français, pour l’instant du moins. L’article « Capuchon » montre qu’il existait un vocabulaire complexe, où voisinaient les termes de dispute et de querelle mais aussi ceux de contestation et de guerre. De fait, l’enquête lexicale s’avère vite source de perplexité : elle conduit à un bloc sémantique tout à fait mal démêlé et assez indémêlable. Ainsi – en faisant défiler ces données de façon brève – voit-on que le mot querelle est défini dans le Dictionnaire universel de Furetière (1690) par les synonymes « contestation, dispute, combat », dans celui de l’Académie française (1694) par « différend, démêlé, dispute avec aigreur et animosité ». De querelle à dispute donc, par synonymie, et bien sûr retour, car évidemment pour dispute l’Académie donne « débat, contestation » et Furetière « querelle, contestation ». Passons donc à contestation qui semble le terme commun ; mais à « Contestation » on trouve « dispute, querelle, procès » chez Furetière, et dans le Dictionnaire de l’Académie « dispute, débat sur quelque chose ». Si, essayant d’un autre biais, on prend appui sur différend, cela donne « débat, contestation, querelle »… On tourne en rond. Essayons d’un autre, le Dictionnaire français de Richelet (1680). Il dit, joliment :

8

Querelle : Prononcez Krelle quand vous parlez, mais en vers le mot querelle fait trois syllabes. Il signifie prise qu’on a avec quelqu’un, soit de paroles, ou autrement. Démêlé qu’on a à vider avec quelqu’un.

9 Outre le détail de prononciation, cela semble faire avancer avec l’apparition du mot de prise, mais prise renvoie au conflit en général ; quant à démêlé, que l’Académie signale aussi, il induit un autre retour par synonymie, puisque le Richelet le définit par « querelle » (et l’Académie, de même, par « querelle, contestation, brouillerie »).

10 Le constat s’impose donc qu’il y a là un « paquet » verbal, ou une nébuleuse, et que les définitions ne garantissent pas des distinctions nettes. Et le fait que les dictionnaires du français vivant de l’époque, eux-mêmes concurrents, rivaux et issus de querelles, disputes et contestations, convergent ainsi assure que cette indécision dans les distinctions est bien un phénomène du temps. Ce qui impose de prendre en compte tous les cas où apparaissent de tels termes, sans opérer de sélection à priori comme le faisait Kant. Il est de fait qu’une démarche normative et prescriptive comme la sienne ne peut être celle d’une recherche qui accepte au contraire de plonger au fond de l’empirie pour y trouver des connaissances. Il convient donc ici d’adopter une autre épistémologie, une philosophie qui tente de penser le désordre et non de le réduire, qui vise non pas à poser des concepts pour juger les realia, mais à se demander comment ces realia peuvent informer de possibles concepts (selon le principe élémentaire qu’une théorie ou un concept vaut ce que vaut le corpus, les realia, sur lequel ils se fondent). Autrement dit, entre Kant et Diderot, le choix s’impose de suivre Diderot. D’autant qu’au fond Kant lui donne raison : s’il éprouve le besoin de réduire d’emblée l’espace de réflexion à la « dispute » et au « conflit », c’est bien le signe que le vocabulaire était mêlé et avec lui les realia, les pratiques, comme le suggère l’article « Capuchon » par sa gamme lexicale remarquable (en si peu de lignes : guerre, dispute, animosité, contestation, agresseur, querelle et injures…). L’analyse doit porter sur l’ensemble de telles pratiques telles qu’elles ont pu être désignées à l’époque, selon les critères endogènes, et sans instaurer d’entrée de jeu des catégories autres, qui du coup occulteraient les vrais jeux et enjeux.

11 Y compris et d’abord celui des hiérarchies dans ces pratiques. Car après tout Andromède a longtemps été appelée « nébuleuse » jusqu’à ce qu’une observation suffisante la voie comme une galaxie. Prenons donc la nébuleuse comme telle pour commencer, et voyons si des distinctions ne sont pas à exclure pour autant. De fait, il en apparaît au sein même du lexique de l’époque, dès lors qu’on y prend en compte les références à des pratiques. Ainsi le Richelet est plus restrictif que les deux autres pour le terme de dispute, qu’il définit comme : « combat d’esprit entre de savants hommes sur quelque matière de science, comme de Théologie, de Philosophie, etc. Contestation. » De même, Furetière et l’Académie introduisent sous le sens général de dispute des spécifications selon les pratiques : « il se dit aussi des actions qui se font dans les Écoles pour agiter des questions » (Académie) ; « Dispute : dans les Collèges est une contestation qu’ont les écoliers pour les places, pour les prix ou pour leurs exercices. On fait de longues disputes dans les Écoles de Théologie, de Médecine, etc. » (Furetière) ; « Disputer […] se dit aussi en choses spirituelles et morales. Les Théologiens ont de tout temps disputé entre eux sur les questions de la grâce. On dispute aujourd’hui en Sorbonne, pour dire, on y soutient quelque thèse » (Furetière).

12 Commence à se dessiner donc une répartition à partir du bloc commun. La dispute correspond en particulier à une pratique du débat contradictoire et ordonné, en forme d’argumentation raisonnée, entre lettrés. À certains égards, elle peut donc être proche de la « controverse ». En effet, l’Académie définit celle-ci par « débat, contestation » mais précise aussitôt : « il signifie plus ordinairement, la dispute qui se fait sur les points de la foi, entre les Catholiques et les Hérétiques, principalement les Calvinistes ». Plus catégorique, Richelet limite le sens du mot à son emploi spécialisé : « Discours où l’on parle sur quelques points contestés entre les Catholiques Romains et les gens de la Religion ». Un peu plus large mais précis, Furetière : « Terme dogmatique. Dispute sur une chose qui n’est pas certaine. Les Astronomes ne sont plus en controverse sur le mouvement de la Terre ; il est hors de controverse. […] Se dit maintenant en un sens plus étroit des disputes qui se font contre les Hérétiques modernes. » « Controverse » peut donc être un terme général, et la controverse n’est donc pas que religieuse, mais le terme tend à se spécialiser (« en un sens plus étroit ») pour désigner cet usage, et les « controversistes » sont gens d’Église. On voit que repérer les cheminements de telles spécialisations peut être un des enjeux d’une recherche.

13 Pour sa part, querelle suit une tendance inverse. L’Académie le connotait par l’« aigreur » et l’« animosité », et les deux autres rejoignent cette notation en définissant le verbe se quereller : « se dire des injures, se dire des choses désobligeantes » (Richelet), et « attaquer, offenser quelqu’un. On commence à se quereller par des paroles et puis on en vient aux coups. Les femmes, les harengères, se querellent souvent. »… No comment pour le dernier exemple [14] mais commentaire évident : la querelle est agressive, et elle inclut la mise en cause personnelle, une pratique où l’on « s’attire des injures » (Diderot, art. « Capuchon »).

14 Se dessinent donc des différences dans les façons de mener les conflits. Mais en retour on ne peut perdre de vue un point commun qui se dessine aussi. « Paroles », fussent-elles des « injures », dit Furetière pour les querelles, et « soit en paroles ou autrement » dit Richelet ; pour la controverse, « discours », et pour controversiste : « qui a écrit, qui a prêché la controverse » (Furetière) ; pour la contestation, « débat » (Académie, Richelet), et débattre, c’est « contester de paroles » (Richelet). Ainsi, querelles, disputes, contestations et controverses sont associées à la pratique verbale, orale d’abord, mais aussi de plus en plus sensiblement, écrite (voir « Controversiste » chez Furetière, et l’on peut entendre dans le « ou autrement » de Richelet aussi bien le recours à l’écrit que l’emploi de la force). Il s’agit donc bien dans tous ces cas d’action par le discours oral ou écrit.

15 Une autre spécification de cette action apparaît dans certains emplois particuliers, que signale Furetière, de « querelle [comme] terme de jurisprudence ». Elle vient alors dans la synonymie avec contestation, qui peut signifier « procès », comme contester peut signifier « plaider ». Une dimension juridique point ainsi. Elle fait écho à l’étymologie latine, que Furetière mentionne sans autre détail : querellare et querella ou querela. Or en latin, querela signifie « plainte ». C’est le « France, France, réponds à ma triste querelle » des Regrets du latinisant Du Bellay. En latin, le sème « plainte » de querela mène aussi à « reproche » et plus particulièrement « plaintes publiques » ; c’est alors la « querelle » de Don Diègue (Le Cid, I, 6 : « Misérable vengeur d’une juste querelle ») et de là : « accusation, plainte en justice ». La plainte implique ainsi qu’il y a eu un abus, soit de liberté, soit d’autorité [15] : querelle implique transgression et protestation contre cette transgression – fût-ce au prix d’une transgression en retour par rupture d’un statu quo.

16 Par implication logique, et parfois pratique, l’action suppose donc appel à une instance de jugement. Or on sait que l’usage de la disputatio dans les collèges, en particulier dans les « académies » que les jésuites organisaient dans les leurs, supposait que sur une question donnée les élèves parlent en pour et en contre et que le maître soit en position de juge. On sait que la pratique des « académies » publiques, comme celle du Bureau d’adresses de Renaudot ou l’Académie des Orateurs de Richesource, fonctionnait de même. On sait aussi que dans les salons s’est pratiqué le « jeu des questions d’amour », où sur un sujet donné, par exemple – pour en prendre un qui a donné un texte de Sarasin assez célèbre en son temps – « Faut-il qu’un jeune homme soit amoureux [16] ? » ; les membres du cercle étaient invités à proposer leurs réponses et ensuite l’assemblée en élisait une comme la mieux venue… Il y a donc un ensemble de pratiques, scolaires, juridiques et sociales, qui fonde un schéma assez net : idéalement, la dispute, contestation ou même querelle suppose un procès où l’on parle en pro et contra avec appel à un jugement, et la querelle se spécifie comme une plainte portée devant une instance de jugement, qui peut être le public (« plaintes publiques ») sans autre précision. Il va de soi que le jugement n’a pas toujours été prononcé, et puis que l’une des parties a pu récuser le juge, etc.

17 Ainsi, en dépassant, comme bien évidemment il se doit, les seuls indices lexicaux pour inclure dans l’analyse les pratiques, on constate qu’on ne peut prendre pour querelle ou dispute tout texte de caractère polémique mais que l’analyse doit se porter vers les cas où il y a bien contestation, affrontement d’au moins deux propos contradictoires, et appel à un jugement, fût-il idéal ou fantasmatique. Et on constate aussi que les querelles, disputes, etc. s’inscrivent dans des ensembles de pratiques qui pour une part les codifient (leur donnent des modèles de bien-faire) et d’autres part les incluent (une action en justice, une action de controverse, etc.). C’est, dès lors, à travers des corpus concrets, des intertextes, que les querelles ou disputes, etc., peuvent se saisir, et éventuellement se distinguer les unes des autres ou non. Car il arrive bien entendu que des disputes ou controverses constituées comme telles dérivent en querelles (on pense ici à l’affaire des Provinciales par exemple), ou qu’elles jouent à se désigner comme querelles, ou encore que des querelleurs se donnent les dehors de « disputants ». Et à travers de tels corpus, apparaissent des contextes dans lesquels ces affrontements prennent leur signification.

18 Car, de plus, l’exploration montre aussi très vite qu’outre les termes déjà cités, foule d’autres apparaissent au fil des textes et documents. Ainsi, avec ceux de guerre et de bataille déjà signalés, on trouve des mots qui fleurent le conflit violent, tels que discord et troubles, d’autres d’apparence plus neutre, comme critique ou remontrance et réponse, et d’autres qui suggèrent la pacification, comme conférence (par exemple, la Conférence académique sur le différend des Belles-Lettres de Narcisse et Phyllarque de Jean-Pierre Camus en 1630) et jugement. Plus encore quelques termes qui semblent en cours d’évolution, comme esclandre et scandale, voire affaire. La liste n’est pas close. Elle suggère certes une opposition possible entre ce qui relèverait de la « dispute », entendue comme échange d’arguments raisonnés, et qui peut prendre la forme d’une « conférence » (y inclus l’étymon premier qui renvoie à la mise en comparaison) et aboutir à un « jugement », donc une pratique qui met en ordre et crée de l’ordre, et une pratique du désordre comme la « guerre », le « discord », les « troubles » qui relèveraient de la querelle. Mais les modes de discours tels que les « remontrances », « critiques » et autres « réponses », apparaissent aussi bien comme des moyens de l’une et l’autre sorte de débats, et sitôt que des spécifications s’esquissent, d’autres traits viennent les remettre en cause.

19 Il convient donc d’accepter cet état de confusion comme le fait même dont il faut rendre compte. À cet égard, il faut plonger sans réserve dans la quête des catégories endogènes. Ce qui n’évacue pas les concepts exogènes, les notions externes qui servent d’outils. Il va de soi que des théories d’aujourd’hui, ou d’hier, de la polémologie à la pragmatique [17], de la rhétorique à la sociologie de l’action, fournissent en foule des notions utiles pour l’analyse du passé. Mais il va de soi aussi que ces outils doivent rester comme le carbone 14 utilisé en archéologie : des moyens techniques d’observation et de compréhension. C’est pourquoi nous ne poserons pas en catégories prédéfinies le polémique (qui est un registre utile pour l’analyse et le classement des textes) ou la concurrence (qui est un phénomène social général dont les formes sont applicables aux disputes et querelles). Pour une description aussi serrée que possible du passé en tant que passé, pour mieux savoir comment il permet d’interroger le présent, nous garderons au départ l’ensemble des disputes, controverses et querelles en leur état en quelque sorte brut. Avec une difficulté qui en résulte : l’histoire littéraire française a pris l’habitude de désigner par le mot de querelle des faits qui n’ont pas été nommés ainsi en leur temps ; revenir aux termes d’époque aidera à démêler les éventuelles confusions que cela peut induire.

20 Ainsi, du taillis touffu du lexique se dégagent quelques idées qui dessinent les objets à prendre en compte. La première est qu’il convient d’envisager l’ensemble des faits qui relèvent, selon les termes du temps, de disputes, controverses et querelles. La deuxième est le constat que des distinctions sont possibles et nécessaires, mais selon la façon dont elles apparaissent au sein du corpus et non comme un à priori. La troisième est l’idée qu’il s’agit de pratiques où il y va d’une action et d’une interaction : action de lutte, que celle-ci soit une compétition ou un combat, action qui donc relève de la logique agonistique. Et enfin, il s’agit d’actions verbales ; or pour celles-ci, quand il s’agit du passé, on ne dispose que d’écrits : ce sont donc des actions des écrits qu’il s’agira d’analyser [18].

21 À partir de tels constats, prennent forme des hypothèses logiques.

Hypothèses

22Cinq hypothèses principales, à mettre à l’épreuve et même à la géhenne. La première, la plus simple et manifeste, est que s’il y a abondance de querelles, disputes et controverses, il faut d’abord évaluer cette abondance. Donc inventorier ces objets. Mais ce premier travail quantitatif est en son projet même paradoxal. Pour peu que l’on s’y plonge, le plus empiriquement qu’il se peut, il apparaît bien vite qu’il y a plus de cas à analyser qu’on ne le pouvait prévoir. Les « pointes émergentes de l’iceberg » ne sont pas celles de la réalité empirique de l’histoire, mais celles de l’histoire littéraire et des perceptions qu’elle a façonnées, de l’habitude qui s’est établie de repérer quelques disputes retentissantes, et de rejeter dans l’oubli ou de réduire au rang de simples circonstances ou de contexte anecdotique nombre de polémiques et affrontements. Au lieu de parties émergées d’un iceberg, l’enquête fait vite apparaître qu’il s’agit en fait d’une vaste flotte de glaciers qui restaient masqués par les brumes de l’historiographie. L’inventaire ne peut donc qu’être ouvert, et jusqu’à nouvel ordre extensible [19]. Cela étant, l’enquête constate du moins très vite qu’il y a donc bien abondance et que ce seul fait est en lui-même signifiant.

23 Mais signifiant de quoi ? La deuxième hypothèse, qui fait passer du quantitatif à l’historique, serait que l’abondance des affrontements signale un champ intellectuel en train de se structurer en plusieurs champs spécifiques. Ce qui induit un redoublement de conflits : conflits de frontière entre les disciplines ou spécialités d’une part, et d’autre part conflits à l’intérieur de chacun de ces champs, pour s’en assurer le contrôle ou du moins des positions hégémoniques. Le premier cas serait illustré, par exemple, par la querelle qui opposa en 1658-1659 Furetière, avec sa Nouvelle allégorique des derniers troubles survenus au royaume d’Éloquence, et Sorel qui riposta avec sa Relation véritable de ce qui s’est passé au royaume de Sophie : « Sophie » renvoie bien sûr à la philosophie, dont Sorel affirme la préséance sur l’ensemble des Lettres, tandis que Furetière en décrivant le « royaume d’Éloquence » donne à voir un domaine proprement littéraire. Le second cas pourrait être illustré par la querelle des Bouffons, où il y va de la définition de la « bonne » musique. Les « révolutions de la République des Lettres » qu’envisage Irailh trouveraient là leur forme moderne. Cette hypothèse est au fond des plus classiques et on peut ici reprendre les formulations de Bourdieu quand il envisage un « champ » comme un « champ de forces », un espace de luttes pour la définition légitime de la pratique qui le fonde [20]. Le lien entre la fondation et la multiplication d’institutions de la vie intellectuelle et artistique en France [21], en particulier les académies nationales au XVIIe siècle et les académies de province au XVIIIe, et l’intensité des querelles est une facette importante de cette hypothèse.

24 En liaison avec cette hypothèse, une autre peut se nourrir de la lecture d’Irailh encore, et de Diderot et du vocabulaire qu’il emploie pour parler des affaires de capuchons. S’il y a constamment des phénomènes que l’on peut appeler, ne serait-ce que métaphoriquement, des « guerres », et qui ont pu évoluer de la « dispute » à la « querelle » (voyez l’article « Capuchon »), ce changement de termes peut signaler un changement de supports et de pratiques. Pour une part, les lieux de la discussion orale se multiplient dans la période ici considérée. À côté des espaces traditionnels qu’en sont « la chaire et le barreau », les lieux de la controverse religieuse et du conflit juridique, la multiplication de lieux tels que les collèges et les « académies » qui s’y pratiquent, mais aussi les Académies au sens plein, officielles ou privées, et les salons, répandent les usages de la confrontation d’arguments, et suscitent peut-être un possible habitus disputeur. Mais pour une autre part et surtout, le passage de l’oral à l’écrit et plus précisément à l’écrit imprimé et publié est une caractéristique majeure de la période. Le support imprimé et sa diffusion marchande a facilité la circulation de textes qui échappent à la discussion en face-à-face, sortent du cercle des spécialistes ou d’un public sélectionné et se trouvent lancés dans les hasards de la lecture hors de contrôle : ils deviennent eux-mêmes de moins en moins contrôlés [22], et donc potentiellement de plus en plus querelleurs. L’extension des espaces de l’échange, elle-même liée à la croissance des publics concernés, est peut-être ce qui fait de cette période un temps singulier de querelles.

25 Dans cette logique, apparaît une quatrième hypothèse de travail, qui concerne les domaines de la vie intellectuelle où se jouent disputes et querelles. Elle demande quelque détail, alors revenons à Kant. Lorsque celui-ci distingue dispute et querelle, il se fonde sur un critère qui tient à la nature des propositions et à leur véridicité. La dispute convient, selon lui, à des sujets pour lesquels existe la possibilité d’une démonstration certaine, scientifique et philosophique, tandis que la querelle relève du domaine de l’opinion. Mais dans le vocabulaire de l’époque, lorsque Furetière définit la « controverse », il la désigne comme une « dispute sur une chose qui n’est pas certaine », et il l’applique au domaine scientifique aussi bien qu’au religieux. De sorte que, même si la réflexion théorique a de longue date – et sans doute à la suite de Kant – relevé que l’avancée des savoirs scientifiques se fait par conflit, confrontation, dispute, cette façon de voir est délicate à appliquer à la période ici considérée. Les liens entre religion et sciences, y compris et surtout dans leurs conflits, montrent à l’évidence que ce qui aurait pu s’inscrire dans la dispute objective et objectivante s’est souvent trouvé pris dans des débats d’un autre ordre. L’affaire Galilée en témoigne assez, et le Monde de Descartes, puis son Discours de la Méthode aussi : l’héliocentrisme n’a pas été qu’un débat scientifique. En retour, la querelle des Anciens et des Modernes engage bien des questions de littérature et d’art, mais aussi de sciences et de religion… On pourrait multiplier les exemples. D’où il appert que les objets ici concernés pouvaient participer de plusieurs domaines de débat à la fois. Chose point étonnante dans un temps où les « Lettres » peuvent désigner tous les savoirs. Il est donc manifeste que la perspective ne peut être que pluridisciplinaire ou interdisciplinaire, que ces objets d’étude relèvent aussi bien de la philosophie que de l’histoire des religions et des sciences, de l’histoire de l’art que des divers aspects des études littéraires. Plus précisément encore, comme les interpénétrations sont nombreuses et constantes, il ne convient pas de les aborder sur le mode de la mosaïque des compétences : si les philosophes étudient les controverses philosophiques, les historiens des sciences les disputes scientifiques et les littéraires les querelles de poétique, le résultat sera une juxtaposition qui a toutes les chances de manquer l’essentiel, c’est-à-dire, justement, ces interpénétrations.

26 De même, cinquième hypothèse, il apparaît dans bien des cas que les débats ne sont pas bornés à un espace national. Les discussions sur l’héliocentrisme parcourent la République des Lettres aussi bien en Italie et en Allemagne qu’en France ; la querelle des Anciens et des Modernes s’est jouée dans des disputes italiennes, des « guerres » françaises et dans la Battle of the Books britannique, avec à chaque fois des spécificités [23], etc. Là aussi, les exemples sont légion [24]. D’autant qu’en retour, certaines querelles engagent des enjeux internationaux par compétitions entre pays et cultures : qu’on pense encore à la querelle des Bouffons [25]. Une perspective comparatiste s’impose donc, pour mesurer ces circulations mais aussi pour évaluer les enjeux et effets des opérations relevant de la translatio studii et de la translatio imperii, en un temps où la France conquiert une position de première puissance du continent européen, et où donc on peut soupçonner que certains débats jouent un rôle soit de moyens pour elle d’étendre son influence, soit, pour d’autres, d’y résister [26].

27 Qui entre dans une forêt peut chercher du bois, d’œuvre ou de chauffage, du gibier ou des baies sauvages et des champignons, ou simplement vouloir en recenser les essences (au sens premier et propre de ce terme) ou en relever la topographie, ou encore tout cela à la fois. Devant le taillis des querelles, aucune des hypothèses qui précèdent n’est donc à exclure ou à privilégier.

28 Reste à tracer les chemins d’exploration.

Démarche

29Comme disputes et querelles, contestations et controverses sont toujours affaires de discours, d’actions de paroles orales ou écrites, s’impose une démarche aussi simplement évidente que contraignante : partir toujours des textes. En cela, les débats de tous ordres sont bien affaires de littéraires. Il va donc de soi que toutes les ressources de la rhétorique (y compris la pragmatique) et de la poétique sont à mobiliser, que les genres et modes de discours de confrontation sont à inventorier, que les registres polémique (on s’affronte), épidictique (on loue ceux qui partagent une vue et on blâme les autres), délibératif (on entreprend de désigner le bon et le mauvais, le bien et le mal) et didactique (le but est aussi de diffuser des savoirs que l’on estime fondés) y sont à l’œuvre. Et paradoxalement, alors même qu’il peut y aller d’un jugement, le judiciaire est souvent minoré, parce que, justement, il ne s’agit pas de domaines où il puisse y avoir des choses certaines. En matière de genres, il est frappant que toutes les catégories puissent avoir été mises à contribution, de la poésie – par exemple, les Satires de Boileau – au roman – par exemple la forme narrative adoptée par François de Callières dans son Histoire poétique de la guerre nouvellement déclarée entre les Anciens et les Modernes, et de la comédie – par exemple dans la querelle de L’École des femmes – aux essais, diatribes et autres libelles, en passant par ceux qui semblent en être les genres-vedettes, la Lettre (par exemple, bien sûr, dans le cas des Provinciales) et son corollaire, la Réponse, ou encore le dialogue [27]. Ce caractère crucial des substrats littéraires relève des évidences qui ne demandent pas je pense à être plus longuement argumentées.

30 Mais si de telles évidences indiquent bien des outils à employer et des protocoles à respecter – entre autres, de ne pas aller tout droit à des idées débattues mais de regarder de près dans quelles formes et quelles énonciations elles sont énoncées –, elles ne suffisent pas pour orienter l’exploration. Aussi le choix engagé ici a été de privilégier une problématique : celle de la création.

31 Très souvent, en effet, disputes, querelles et controverses surgissent en réaction à une création. Création littéraire, dans des cas comme la querelle du Cid ou celle de La Princesse de Clèves, mais aussi création scientifiques, dans les querelles de l’héliocentrisme, du vide ou du calcul infinitésimal. Dans de tels cas, les créations concernées font bouger les lignes, les codes, les frontières à l’intérieur d’un domaine et le conflit entre partisans de l’existant et promoteurs de la nouveauté. Analyser les débats donne donc un angle d’observation privilégié pour voir en quoi le nouveau était perçu comme nouveau, et de quoi les forces de résistance étaient significatives.

32 Souvent aussi telles ou telles querelles, disputes ou controverses apparaissent comme des soubresauts dans des conflits qui s’étendent sur une longue durée. Ainsi de la controverse entre catholiques et protestants, bien sûr, ainsi encore des épisodes des « querelles des Femmes ». Les étudier est alors un moyen de jalonner l’histoire d’une question, donc de construire l’histoire des idées dans sa dynamique contradictoire. Les disputes ne sont donc pas un épiphénomène de la création, elles sont un des chemins par lesquels celle-ci se fait place, et parfois le moyen de dessiner une nouvelle discipline [28].

33 Ces deux formes de relation entre combats de mots et de plumes et création sont évidentes, mais une autre forme, tout aussi évidente, de la relation entre querelles et création réside dans le fait que les querelles en elles-mêmes nourrissent la création. Et ce, d’au moins deux façons. D’une part, elles suscitent des textes, elles sont un stimulant de production. Quelquefois même, il apparaît que l’un des enjeux premiers est de stimuler la production et la vente d’imprimés : l’esclandre fait vendre, les « affaires » font faire des affaires [29]. Mais d’autre part, elles suscitent aussi, par la dynamique propre de l’affrontement, des façons de penser : il advient en effet que des prises de position se radicalisent, voire prennent une forme de système, dans le feu des discords. En ce sens, la polémique fait avancer la pensée – « avancer » ne signifiant pas nécessairement ici un progrès attesté, mais une « poussée en avant ». On peut ainsi estimer que la pensée de Rousseau s’est précisée et systématisée dans son rejet de la modernité au fil des querelles dans lesquelles il s’est trouvé engagé, autant que l’inverse.

34 Pour ce qui concerne les textes produits par les querelles, disputes et controverses, il est patent que nombre d’entre eux ne sont pas passés à une immortelle postérité. Lestés de références à des circonstances, fortement ancrés dans leur contexte de production et de circulation, ils deviennent vite difficiles à lire quand ce contexte s’éloigne et quiconque a réalisé, ou simplement utilisé, des éditions modernes de tels textes sait combien ils requièrent de notes et de gloses. En cela, ils s’opposeraient à des textes plus aisés à « désancrer » de leur contexte premier pour passer à la postérité et que l’un des sens usuels du mot création, en sa plus noble connotation, tient pour les seuls qui importent. Mais les choses sont un peu plus nuancées. En effet, certains textes de disputes et querelles figurent dans le « canon ». Ainsi Les Provinciales de Pascal, L’Art poétique de Boileau ou la Lettre à d’Alembert de Rousseau. Ce qui oblige, il est vrai, à les lire comme les textes de querelle qu’ils sont, ce qui n’a pas toujours été l’habitude, notamment pour le deuxième. Et par ailleurs, les effets de querelles et disputes se nichent souvent dans le cœur même de textes devenus canoniques. Ainsi dans le cas du Cid, pour ne reprendre que celui-là, il est manifeste que les polémiques ont du lien avec les retouches que Corneille a apportées à son œuvre. Et au-delà, foule d’autres textes canoniques se sont construits sur une dynamique de disputes et conflits : que l’on songe par exemple aux œuvres de Cyrano ou aux Entretiens sur la pluralité des mondes de Fontenelle par exemple, sans parler de tant des ouvrages de Voltaire [30]

35 Enfin, et peut-être surtout, les querelles, disputes et controverses créent d’une autre façon : elles créent de l’opinion. L’exemple frappant est celui de la querelle de La Princesse de Clèves, où le débat circule dans des textes et dans le journal Le Mercure galant[31], et touche directement à la question de l’espace de l’opinion. Cette production d’opinion est particulièrement forte, en un phénomène historique bien connu depuis les travaux d’Habermas, dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, mais elle existe avant, en des terrains de dimension parfois plus restreinte mais qui sont malgré tout ceux de l’opinion des groupes sociaux qui comptent au sein d’un champ, qu’il s’agisse de cercles savants ou du public plus mondain des salons. Ce lien avec l’opinion se manifeste notamment en ce que les querelles, attaques personnelles, engagent l’image publique des personnes concernées, qu’il s’agisse d’image matérielle, de portrait [32] ou d’image fantasmée, qui dote un auteur de qualités de « querelleur » spécifiques [33]. À tous égards, ce lien à la formation de l’opinion constitue un domaine à encore étudier.

36 Pour cela, il faudra en particulier prendre en compte le statut des textes concernés, et celui de leurs auteurs. Il n’en va pas de même pour un auteur qui est controversiste de profession, par exemple comme auteur mandaté par son ordre religieux ou simplement par son titre et son rang dans l’une ou l’autre Église, et un auteur qui intervient dans un débat religieux de sa propre initiative et en son nom particulier, comme Desmarets de Saint-Sorlin, ou encore l’abbé de Prades. Il n’en va pas de même non plus selon que ces auteurs le font sous leur nom ou sous l’anonyme ou le pseudonyme, ou encore qu’ils sont construits en personae par un groupe qui estime utile de mobiliser leur nom et leurs écrits hors de leur contrôle personnel. Il n’en va pas de même non plus selon les ordres de textes produits.

37 Il faut sans doute le rappeler [34], il s’agit ici de textes qui tous s’inscrivent dans des logiques de communication différée. Ces logiques concernent aussi bien les textes de science, que de droit et de religion, et puis ceux qu’on range aujourd’hui sous le nom de littérature : ils ont tous en commun, à la différence des énoncés usuels du quotidien, de pouvoir circuler au-delà de leur énonciation immédiate. Et pour cela, ils reposent tous sur des destinations qui les justifient et sur des fondements qui les autorisent. Les textes de sciences s’adressent, dans leur principe, à tous et en tous temps. Les textes de droit, à tous ceux qui vivent dans l’espace concerné par leur juridiction, et ils restent valides aussi longtemps que la loi qu’ils énoncent n’est pas abrogée. Les textes de religion se déclarent universels et s’adressent à la communauté des croyants. Cependant, leur fondement d’autorité n’est pas de même nature. Les textes de sciences se fondent sur une vérité attestée par l’expérience. Les textes de droit sur une force incarnée par l’appareil de police et de justice. Les textes de foi, sur la force de celle-ci, possiblement sur la crainte de l’au-delà ou de l’excommunication, et sur des condamnations éventuellement incarnées en des appareils de violence physique, d’inquisition et de bûchers. Ces différences recoupent à l’évidence certaines des distinctions proposées par Kant dans la Critique du jugement que nous avons vues tout à l’heure : les énoncés scientifiques, qui s’inscrivent bien dans une logique de vérité qui se prouve, sont en principe hors de querelle. Mais on a vu que ce n’était pas la règle, loin de là, et que du coup, ils se trouvent pris dans les mêmes pratiques que les autres. Pour ces autres, il existe en principe des codes de gloses et d’adaptations aux situations ; pour le droit, la jurisprudence, pour les religions, la pratique conciliaire et la casuistique. Or elles aussi sont en ce temps couramment débordées par les conflits.

38 Reste donc la quatrième sorte de textes, que j’avais ici laissée un instant en réserve. Ces textes qui n’ont aucune force extérieure, ni de vérité d’expérience ni de l’une ou l’autre forme de violence. Ces textes qui n’étant autorisés par rien d’autre à priori qu’eux-mêmes, y compris le cas échéant pour ce qui concerne le nom de leur auteur, leur sujet et leur propos, ne peuvent miser que sur des qualités intrinsèques pour attirer l’intérêt de leurs lecteurs et le fixer. Mais ces textes qui, par leur art, sont capables de créer de l’adhésion. Car c’est bien en ce sens que les disputes et querelles sont des générateurs d’opinion. Que les sujets qu’ils traitent aient déjà fixé par ailleurs l’intérêt des lecteurs et que la dispute vienne se greffer sur une attention déjà en éveil ou qu’au contraire ils suscitent cette attention et créent un nouveau foyer de curiosité est une variante certes importante, mais qui ne modifie pas la donnée fondamentale, à savoir qu’il s’agit bien de produire de l’adhésion, donc de l’opinion. Sur laquelle on rappellera sans plus d’ambages qu’opiner désigne l’acte de donner un avis sur un sujet qui est en débat et doit être jugé. De la dispute et querelle comme pratique d’une forme élémentaire de démocratie.

39 Dès lors, les autres sortes d’actions avec lesquelles ces textes se trouvent liés, action de justice, actions politiques, ou actions de carrière des auteurs, de la rivalité pour le prestige et le succès [35] à la lutte pour la définition de l’esthétique ou de la pensée dominantes, d’un protocole épistémologique et de ses implications [36], ou encore de la légitimité d’exercice d’une profession [37] ou des codes de celle-ci jusque dans leurs implications politiques [38], toutes se trouvent elles-mêmes liées à l’action même de mener querelle ou dispute ; ce qui conduit aussi à lire ces actions elles-mêmes autrement que du seul point de vue de l’histoire politique, juridique, religieuse, littéraire, etc., et de s’interroger notamment sur leurs relations aux publics concernés – ce qui ouvre vers une histoire qui est encore largement à faire.

40 Autant d’hypothèses à mettre à l’épreuve, à la torture, à mettre, on le redit bien sûr, en débats, ou en disputes, voire en querelles.

41 Restait à voir comment commencer à les mettre à l’épreuve. Choix de méthode : commencer par des études précises de cas limités. Le présent recueil en propose une petite collection – dont chacun pourra voir qu’on y a évité les querelles très connues qui ont déjà une large bibliographie, pour regarder plutôt des cas ou des aspects plus inhabituels. Elle y est ordonnée selon une répartition simple. Ordonnée, car égrener les articles en suivant l’ordre chronologique eût donné l’illusion de dessiner une histoire, alors qu’il s’agit ici de baliser et jalonner le taillis des contestations et pas davantage. Aussi nous avons adopté une logique de rangement qui désigne deux sortes majeures d’interrogations, qui partent toutes deux du principe susdit de commencer toujours par l’analyse des textes eux-mêmes. Ainsi, en un plan des plus simples, on a distingué des contributions qui répondent avant tout à la question « comment ils se sont disputés », qui donc mettent en lumière des modalités textuelles de la querelle ; et d’autres qui mettent plutôt en lumière des enjeux de querelles, le « pourquoi ils se sont disputés ». Il s’agit bien évidemment de dominantes et non d’exclusives, car on ne parle pas des enjeux sans parler des modalités et réciproquement.

42 On n’a donc pas classé les contributions ni selon les spécialités de leurs auteurs (ainsi des historiens du livre voisinent avec des experts en gender studies ou en philosophie), ni non plus selon les pays concernés (ainsi des spécialistes de l’histoire du théâtre français voisinent avec des experts de l’orientalisme en Grande-Bretagne). L’un et l’autre rangement aurait malmené le souci d’interdisciplinarité. En revanche, il était évidemment sage de ranger, à l’intérieur des deux grandes sections retenues, les communications selon la chronologie. Mais, on le redit avant de laisser la place à la lecture et consultation du recueil, il ne s’agit ni d’une histoire ni d’un balisage complets, plutôt de leurs prolégomènes à mi-cours de l’enquête.

Notes

  • [1]
    C’est-à-dire la période qui s’étend, en dates rondes, du milieu du XVIe siècle jusqu’à la Révolution française. Les historiens l’appellent « Ancien Régime » ou « Époque moderne », mais les dates sont un peu différentes, et l’appellation ici retenue prend en compte des faits culturels avérés.
  • [2]
    S.-A. Irailh, Querelles littéraires ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la République des Lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours, Paris, Durand, 1761, 4 t. en 2 vol. ; réimpr. Genève, Slatkine, 1967.
  • [3]
    Ces distinctions sont résumées de façon plus complète, et limpide, dans la contribution d’O. Mostefai au présent volume.
  • [4]
    Publié en 1751, dans le t. II. Cette référence a été donnée par K. Tunstall dans une contribution inédite au travail collectif indiqué plus loin ; certaines références lexicales qui suivent aussi ; qu’elle soit ici remerciée de cette communication.
  • [5]
    A. Viala, Naissance de l’écrivain. Sociologie de la littérature à l’âge classique, Paris, Éd. de Minuit, 1985.
  • [6]
    H. Merlin, Public et littérature en France au XVIIe siècle, Paris, Les Belles Lettres, 1994.
  • [7]
    G. Ferreyrolles (dir.), Littératures classiques, n° 59 (« La polémique au XVIIe siècle »), 2006.
  • [8]
    M. Bombart, Guez de Balzac et la querelle des Lettres : écriture, polémique et critique, Paris, Champion, 2007.
  • [9]
    L. Godard de Donville (éd.), D’un siècle à l’autre : Anciens et Modernes, Marseille, CMR 17, 1987.
  • [10]
    La Querelle des Anciens et des Modernes (XVIIe-XVIIIe siècles), anthologie éd. par A.-M. Lecocq, précédée de « Les Abeilles et les araignées » par M. Fumaroli, postface de J.-R. Armogathe, Paris, Gallimard, « Folio », 2001. Voir également M. Fumaroli, Le Sablier renversé. Des Modernes aux Anciens, Paris, Gallimard, « Tel », 2012.
  • [11]
    Voir notamment le n° 25 de Mil neuf cent. Revue d’histoire intellectuelle, Paris, 2007 (en partic. l’art. d’A. Lilti, « Querelles et controverses : les formes du désaccord à l’époque moderne », p. 13-28) et l’ouvrage de S. Van Damme, L’Épreuve libertine. Morale, soupçon et pouvoirs dans la France baroque, Paris, CNRS Éd., 2008.
  • [12]
    En 1996, dans un séminaire en Sorbonne consacré aux querelles littéraires au XVIIe siècle. Y participaient notamment M. Bombart, D. Blocker, M. Rosellini, J. Shin et D. Ribard, dont les apports ont contribué à nourrir, de diverses façons, ce volume ou les travaux qui l’ont préparé ; qu’elles en soient ici remerciées.
  • [13]
    On trouvera tous les détails sur le projet, son équipe et ses travaux sur le site : www.agon.paris-sorbonne.fr/
  • [14]
    Sur les discriminations à l’égard des femmes en ce domaine, voir la contribution de S. Vasset. Pour ce qui est des « harengères », voir P. Ronzeaud, « De la harangère à la “harangueuse” : étude d’un stéréotype polémique forgé au XVIIe siècle », dans Ouverture et dialogue. Mélanges offerts à Wolfgang Leiner, Tübingen, Narr, 1988, p. 739-753.
  • [15]
    Voir ci-après la contribution d’A. Cantillon.
  • [16]
    Voir dans ce recueil la contribution de M. Roussillon.
  • [17]
    Là aussi, voir la bibliographie ; mais on signale ici qu’il va de soi que travailler sur des conflits a impliqué de revoir les réflexions de G. Bouthoul et de Clausewitz avant les classiques de la rhétorique et de la pragmatique et leurs applications techniques dans l’analyse des discours.
  • [18]
    Certes l’écrit se donne parfois comme transcription d’une action orale, mais le seul fait de la transcrire la modifie selon les contraintes de l’écrit : en de pareil cas, on ne perdra donc pas de vue ces effets de scripturarisation de la parole.
  • [19]
    D’où le recours à un outil de collecte et analyse numérique, en forme de banque de données : voir les détails sur le site AGON susmentionné.
  • [20]
    Voir, entre autres et notamment – parce qu’ouvrant sur des détails de la démarche –, Les Règles de l’art, Paris, Éd. du Seuil, 1992, p. 107 et 351.
  • [21]
    Pour le cas de l’institution théâtrale, voir la contribution de J.-M. Hostiou.
  • [22]
    Je me permets de renvoyer ici à A. Viala, Lettre sur l’intérêt littéraire, Paris, Puf, 2006.
  • [23]
    Voir dans ce volume l’article d’A. Tadié ; voir aussi celui de A.-L. Rey pour des débats scientifiques entre Angleterre, Allemagne, France et Suisse, et celui de O. Mostefai déjà cité pour un autre cas de querelle transfrontalière.
  • [24]
    Et il est bon de rappeler qu’une part de la production se fait alors en latin, ce qui rend cette circulation internationale encore plus aisée : voir dans ce volume le cas de Thomas More, examiné par R. Scholar.
  • [25]
    Voir dans ce volume le cas de la querelle des Suppositi de l’Arioste examiné par J. Steigerwald, et l’interrogation sur la circulation des modèles italien, espagnol et français de la comédie.
  • [26]
    Pour des raisons pratiques, dans une première phase de la recherche, a été mis en avant, comme domaine de comparaison, l’espace constitué par la France et la Grande-Bretagne ; il s’agit d’une ouverture, à élargir.
  • [27]
    Voir en particulier dans ce volume les contributions de L. Stambul pour les Satires et de L. Andriès pour le genre du dialogue des morts et son évolution, notamment dans des débats de plus en plus politiques.
  • [28]
    Voir la contribution de C. Gallien sur la querelle de l’« orientalisme ».
  • [29]
    Voir la contribution de I. Maclean où il apparaît, à propos d’un épisode de la « querelle des Femmes » que les enjeux politiques possibles – la régence de Marie de Médicis – sont peut-être secondaires par rapport aux opérations de librairie.
  • [30]
    Ou de Rabelais : voir la contribution de M. Bernard.
  • [31]
    Voir H. Merlin, op. cit. ; A. Viala, La France galante, Paris, Puf, 2008, p. 259 sq.
  • [32]
    Voir la contribution d’O. Mostefai pour le cas de Rousseau.
  • [33]
    Voir la contribution d’A. Cantillon pour le cas de Pascal.
  • [34]
    Là encore, je me permets de renvoyer pour une analyse plus détaillée à la Lettre sur l’intérêt littéraire (op. cit.).
  • [35]
    On verra à cet égard la contribution de P. Fièvre sur le cas de Racine, et celle de G. Forestier et C. Bourqui sur la façon dont Molière joue de la « querelle de L’École des femmes » pour gagner en visibilité dans l’espace public.
  • [36]
    Voir la contribution d’A.-L. Rey sur la primeur de l’invention du calcul infinitésimal et ses retombées.
  • [37]
    Voir la contribution de S. Vasset sur les revendications du droit à l’exercice médical.
  • [38]
    Voir la contribution de D. Ribard sur les méthodes d’arpentage qui firent querelle jusqu’à l’Académie des sciences.
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