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Article de revue

Entre polémique et vision syncrétique : les héritiers de Ronsard au cours du premier XVIIe siècle

Pages 95 à 107

Notes

  • [1]
    Cl. Faisant, Mort et Résurrection de la Pléiade, Paris, Champion, 1998.
  • [2]
    N. Boileau, Art poétique, chant I, v. 131-162.
  • [3]
    Je pense notamment au volume collectif Pour des Malherbe, dir. L. Himy-Pieri et Ch. Liaroutzos, Caen, Presses Universitaires de Caen, 2008 (avec plusieurs contributions de première importance), ou à l’ouvrage d’E. Mortgat-Longuet, Clio au Parnasse, Naissance de l’histoire littéraire française aux XVIe et XVIIe siècles, Paris, Champion, 2006.
  • [4]
    Voir par exemple le parallèle entre M. le Prince (Condé) et M. de Longueville dans les Mémoires du cardinal de Retz, éd. S. Bertière, Paris, Garnier, 1987, t. I, p. 372.
  • [5]
    J.-L. Guez de Balzac, Les Entretiens (1657), « Entretien XXXI », éd. B. Beugnot, Paris, Didier / STFM, 1972, t. II, p. 412. Cette prise de position critique a essentiellement trait au problème de l’imitation.
  • [6]
    J. Rousset, L’Intérieur et l’extérieur, Paris, J. Corti, 1976, p. 57 sq.
  • [7]
    Dans Arcadies malheureuses (Paris, Champion, 1998), Fr. Lavocat distingue deux grands types de romans pastoraux : la pastorale académique, selon le modèle inauguré par les italiens, et la pastorale de cour.
  • [8]
    M. Cauchie, « Les églogues de Nicolas Frénicle et le groupe littéraire des Illustres Bergers », Revue d’histoire de la philosophie et d’histoire générale de la civilisation, fasc. 30, avril-juin 1942, p. 115-133.
  • [9]
    Son pseudonyme d’Ergaste vient probablement de L’Astrée. Ergaste est ce personnage qui, au livre X de la Ière partie, renonce à son amour pour Bellinde après avoir compris qu’elle était amoureuse de Célion.
  • [10]
    Ce « premier cercle » réunit plutôt les poètes évoqués par la Vie de Malherbe par Racan, ceux aussi dont les œuvres (poèmes ou lettres) accompagnent celles du maître dans les différentes versions des recueils collectifs publiés par Toussainct du Bray (Recueils des plus beaux vers de ce temps, Délices de la Poésie française, « Recueil Faret » de 1627) : Maynard, Racan, Coulomby, Molière d’Essertines, Yvrande, etc
  • [11]
    Racan est d’ailleurs extrêmement fier de cet anagramme, et relate dans quelles conditions il l’a inventé dans la Vie de Malherbe : voir notre édition des Œuvres complètes, Paris, Champion, 2009, p. 951 sq. Il signale à cette occasion que le nom d’Arcas lui a déjà servi de pseudonyme bucolique.
  • [12]
    Sur la requête du procureur Molé, le décret du 11 juillet 1623 émanant de la Cour du Parlement ordonnait que Théophile, Colletet et Frénicle fussent emprisonnés à la Conciergerie. La peine fut commuée en 9 années de bannissement du royaume pour Colletet (ce qui resta purement théorique) et Frénicle fut simplement soumis à un complément d’information.
  • [13]
    Théophile de Viau, « Élégie à une Dame », v. 71-72, Œuvres poétiques, Ière partie, éd. G. Saba, Paris, Garnier, 2008, p. 116.
  • [14]
    Id., Élégie « Souverain qui régis l’influence des vers », v. 21-22, Œuvres poétiques, IIe partie, éd. cit., p. 208.
  • [15]
    Frénicle, en publiant un recueil complet d’élégies, fait ostensiblement le choix d’un genre « anti-malherbien », et au contraire très « théophilien » ! Voir Les Premières Œuvres poétiques du sieur Frénicle, Paris, Toussainct du Bray, 1625 ; La seconde partie des Élégies de Frénicle pour la belle Isis, Paris, Charles Hulpeau, 1627.
  • [16]
    Il ne s’agit pas là d’un simple revirement transitoire : Frénicle a rédigé un psautier complet, qui compte parmi les plus virtuoses de toute la production de l’époque au plan de l’expérimentation strophique : « Ses cent cinquante psaumes offrent cent vingt-quatre combinaisons métriques dont cent vingt-trois formes strophiques différentes. C’est un record » (P. Leblanc, Les Paraphrases françaises des Psaumes à la fin de la période baroque (1610-1660), Paris, PUF, 1960, p. 220).
  • [17]
    Voir Fr. Lavocat, « Jeux et joutes des bergers. De l’Arcadia de Sannazar (1504) à l’Entretien des Illustres bergers de Nicolas Frénicle (1634) », Elseneur, n° 20, 2005, p. 189-203.
  • [18]
    N. Frénicle, L’Entretien des Illustres Bergers, Paris, J. Dugast, 1634, p. 404-408.
  • [19]
    Quintilien, Institution oratoire, XII, 10, § 58-64.
  • [20]
    Voir Le Doux aux XVIe et XVIIe siècles. Écriture, esthétique, politique, spiritualité, dir. M.-H. Prat et P. Servet, Genève, Droz (« Cahiers du GADGES »), 2003 ; et notamment l’article de D. Denis, « La douceur, une catégorie critique au XVIIe siècle », p. 232-260.
  • [21]
    Cl. Garnier, Églogue pastorale sur le baptême de Monseigneur le Dauphin Louis, Paris, 1607 [cote BnF : Ye 23040], p. 14.
  • [22]
    « Il était grand et bien fait ; mais il crachotait toujours ; ce qui faisait dire au Cavalier Marin, qu’il n’avait jamais vu un homme si humide, ni un Poète si sec » (Racan, La Vie de M. de Malherbe, Œuvres complètes, éd. cit., p. 944).
  • [23]
    E. Mortgat-Longuet, « Fabriques de Malherbe dans l’historiographie des Lettres françaises », dans Pour des Malherbe, op. cit., p. 39.
  • [24]
    J.-L. Guez de Balzac, Le Socrate chrétien, discours X, cité par L. Lalanne, Œuvres complètes de Malherbe, t. I, p. XLVI. Signalons d’ailleurs que cette réflexion s’applique à l’Ode à la Reine Mère du Roi, sur sa venue en France, dans laquelle Malherbe utilise à peu de distance le mot doute (v. 15) et l’expression l’an climatérique (v. 19). Les propos de Balzac, par cette allusion transparente, gagnent en force ironique. Ménage cite d’ailleurs un extrait des Diverses remarques sur divers écrits, dans lequel Balzac évoque directement ces vers de Malherbe : « Feu M. le Cardinal de La Valette, qui avait le goût excellent en prose et en vers, ne pouvait goûter cet an climatérique de l’éternelle Fleur de Lys : et je vous dirai, qu’il m’engagea un jour à soutenir son opinion en public, après me l’avoir persuadée dans son cabinet. À la vérité, depuis ce temps-là j’ai changé d’avis ; mais avec connaissance de cause, et sans violer le respect que je dois à une mémoire qui m’est si chère » (Les Poésies de M. de Malherbe, avec les observations de M. Ménage, Paris, L. Billaine, 1666, p. 358-359).
  • [25]
    J.-Fr. Castille, « La pratique malherbienne de l’hétérométrie », dans Pour des Malherbe, op. cit., p. 147-160.
  • [26]
    E. Mortgat-Longuet, art. cit., p. 41.
  • [27]
    De même, E. Mortgat-Longuet s’étonne de ce que la Vie de M. de Malherbe ne cherche pas davantage à instituer l’image du grand réformateur que fut Malherbe (Clio au Parnasse, op. cit., p. 257 sq.).

1Il peut sembler bien imprudent, dans l’espace d’un simple article, de prétendre s’interroger sur l’héritage de Ronsard au cours des premières décennies du XVIIe siècle : les importants travaux de Claude Faisant [1] ont montré qu’il s’agissait d’une question singulièrement complexe, qui oblige à envisager conjointement le point de vue des poètes de l’époque et celui des premières grandes plumes de la critique littéraire française. Encore ces avis, dont nous n’avons souvent que des traces bien lacunaires, ne sont-ils que la première couche figurant sur le palimpseste de notre histoire littéraire et cela ajoute naturellement à la difficulté : il est difficile pour nous d’évoquer Ronsard en faisant abstraction du jugement si célèbre de Boileau (« Enfin, Malherbe vint... [2] »), cristallisant une opposition assurément bien réelle mais simplifiant aussi les termes d’une querelle ancrée dans les premières années du siècle et dont plusieurs études récentes ont montré toute la complexité [3]. Pour se replacer (même de façon fantasmatique) dans l’esprit des contemporains, il faudrait pouvoir écarter les vieux réflexes que toute une tradition scolaire – au moins depuis la IIIe République – a durablement ancrés dans notre conscience de lecteurs. Comment être certain de bien mesurer l’importance des relais (Desportes, Bertaut, Du Perron, etc.) qui tirent un trait d’union entre ces deux figures majeures de la poésie d’Ancien Régime ? Comment retracer avec toute l’exactitude requise le parcours sinueux de certains auteurs dont les positions évoluent parfois jusqu’à l’auto-contradiction ? Quelles garanties avons-nous de bien comprendre la vie littéraire du premier XVIIe siècle, habitée par des individualités puissantes mais aussi organisée autour de petits groupes, coteries ou académies dont nous connaissons encore si mal les contours ? Nous nous contenterons donc ici d’esquisser quelques lignes de force, en risquant tout de même une hypothèse : l’opposition entre Malherbe et Ronsard, pour structurante qu’elle soit, admet le plus souvent un certain nombre de nuances. Dans les temps forts de la querelle comme dans ses temps faibles, il ne semble pas impossible de déceler une forme de syncrétisme qui prépare peut-être assez tôt le moment de son dépassement.

2La pensée critique, on le sait, aime raisonner par couples : Homère et Virgile (chez Scaliger par exemple), Ronsard et Malherbe (chez Guez de Balzac, Chapelain ou Boileau), Corneille et Racine (chez La Bruyère déjà), Racine et Shakespeare (chez Stendhal), etc. Elle reproduit en cela le geste d’un exercice littéraire d’un autre ordre, qui a trait à l’écriture historique ou biographique, celui du parallèle (à la manière de Plutarque, ou du cardinal de Retz qui se réclame à l’occasion du précédent [4]). Ce rapprochement peut paraître incongru, mais le parallèle « à la Plutarque » a bien lui aussi pour objet l’exercice du jugement. Surtout, dans son principe même, il implique le même mouvement, double et contradictoire, de la pensée.

3La première caractéristique du parallèle est d’accentuer les contrastes : la confrontation n’a en effet d’intérêt que s’il se dégage un vainqueur clair, et cette première caractéristique est d’autant plus marquée que le parallèle s’inscrit dans un contexte polémique et/ou que le texte est court. Mais paradoxalement, l’art du parallèle implique aussi art de la nuance : on imagine mal un premier volet entièrement « noir » et un second entièrement « blanc ».

4Naturellement, Guez de Balzac, dans ses propos les plus critiques à l’égard de Ronsard et les plus louangeurs envers Malherbe, se montre particulièrement sévère et semble laisser libre cours à une lecture foncièrement unilatérale :

5

Ce Poëte si celebre et si admiré a ses defauts & ceux de son Temps, comme j’ay dit autresfois d’un grand Personnage. Ce n’est pas un Poëte bien entier, c’est le commencement & la matiere d’un Poëte. On voit, dans ses Œuvres, des parties naissantes, & à-demi animées, d’un corps qui se forme & qui se fait, mais qui n’a garde d’estre achevé. C’est une grande source, il le faut avoüer ; mais c’est une source trouble & boueuse ; une source où non seulement il y a moins d’eau que de limon, mais où l’ordure empesche de couler l’eau. [5]

6À l’évidence, la critique est frontale, singulièrement féroce. Le principal reproche que Balzac adresse à Ronsard est celui d’une trop grande servilité dans l’imitation des anciens, doublée de l’usage d’un idiome devenu archaïque. Ces critiques méritent toutefois d’être relues dans le contexte de l’époque, à plus ou moins grande échelle : on constatera ainsi que ce sont là les deux axes habituels de la critique anti-ronsardienne au XVIIe siècle. Les propos de Balzac s’inscrivent dans un contexte de discussions extrêmement suivies et les points qu’il aborde ont été amplement débattus. L’on sait notamment que Chapelain est beaucoup plus mesuré dans son admiration pour Malherbe et qu’il se fait à l’occasion (non sans quelques réserves) l’avocat des poètes de la Pléiade. Il perçoit en eux un héritage dont il serait regrettable de se couper totalement. Il y a très probablement dans les propos de Balzac une part de virulence qui fait écho à cette prudence de Chapelain, avec lequel il entretient une correspondance suivie à ce sujet. À quelques années de distance seulement, dans le Socrate chrétien, on retrouve le même talent polémique de Balzac, mais il s’agit cette fois de critiquer la pensée trop vétilleuse de Malherbe, le poète-grammairien ! La source pure du vers malherbien n’est pourtant pas subitement devenue, elle aussi, bourbeuse…

7Malgré la virulence de sa critique, on trouve chez Balzac lui-même l’argument de la force de l’inspiration ronsardienne, qui correspond précisément à ce que peut être la ligne de défense des partisans du Vendômois : la source est bouchée, le courant est mal canalisé, mais il est puissant… On trouvera chez les détracteurs de Malherbe les critiques inverses : l’eau est admirablement pure, mais ce n’est plus là qu’un petit filet. C’est entre ces deux pôles que se développe la polémique qui, pour près d’un siècle, occupe les esprits : la querelle de la métaphore dont a parlé Jean Rousset [6], la querelle de la pointe, la querelle du goût explorent des régions bien proches de cette ligne de partage originelle.

8On est tenté, lorsqu’on brosse un tableau sur un tel fond de polémique, d’accentuer les différences : mettre en avant les particularismes de caractère, les conflits individuels, se régaler de violence polémique (Régnier contre Malherbe, par exemple), autant de tentations naturelles – surtout en un siècle où les plumes sont particulièrement aiguisées. Il ne faut pourtant pas trop accentuer ce qui l’est déjà suffisamment par le choix des genres, les postures que l’on défend coûte que coûte, ou les effets de mode. Je voudrais au contraire montrer que les premières décennies du siècle, fussent-elles hantées par la polémique, furent aussi celles d’une pensée plus nuancée et non moins féconde.

9Pour entrer dans ce détail des débats d’époque, je souhaiterais m’intéresser au cas d’un groupe de poètes relativement oublié aujourd’hui, mais qui compta dans ses rangs des figures dont l’importance, nous le verrons, ne fut pas totalement négligeable : je veux parler des « Illustres Bergers », rendus célèbres par un petit roman de Nicolas Frénicle, L’Entretien des Illustres Bergers, paru en 1634 chez Jacques Dugast.

10Ce texte a été étudié notamment par Françoise Lavocat, qui y voit à juste titre le modèle du roman pastoral académique à la française [7] : le voile de la fiction, ici, n’est pas totalement opaque puisque sous les pseudonymes des bergers se dissimulent plusieurs poètes de l’époque, qui comme les personnages du roman se réunissaient au pied du château de Saint-Germain. Sans doute n’avaient-ils pas exactement le même costume que leurs doubles, ni même les mêmes passe-temps rustiques. Mais lorsque les bergers interrompent leurs activités pastorales ou leur devis amoureux pour disserter de points de doctrine littéraire, il y a fort à parier que leurs entretiens font directement écho aux prises de positions, bien réelles celles-là, de leurs modèles. Un article du grand érudit Maurice Cauchie [8] a permis d’élucider un certain nombre de clés : Frénicle lui-même prend le surnom d’Aminte (qui était déjà le sien dans ses précédents recueils d’églogues ou d’élégies), quand Colletet, Mauduit, Godeau, Villeneuve ou Malleville sont respectivement Cérilas, Mélinte, Ergaste, Tarcis et Damon. Conrart apparaît sous le nom de Philandre, Germain et Philippe Habert sous ceux de Lyris et Lizidor. Ménalque représente Richelet, Cléophon masque Frédéric Morel, et Méléandre Cotignon de la Charnaye. Le « docte Argis », enfin, est probablement le double de Jacques Deslandes, ami très proche de Frénicle, mais qui n’a pas connu une carrière littéraire brillante. Les autres figures de l’Entretien des Illustres Bergers masquent probablement des personnes réelles, mais leur identité n’a pas été établie avec certitude.

11L’un des grands intérêts de ce groupe littéraire est qu’il réunit des auteurs que tout devrait normalement séparer. D’un côté, on trouverait le vieux Malherbe (qui fait quelques timides apparitions sous les traits du vieillard Sylvan, un peu en marge du groupe) mais surtout Antoine Godeau, le futur évêque de Vence [9] : sans faire partie directement du cercle des intimes de Malherbe [10], il s’était signalé dans les années 1630, comme nous l’avons vu, en signant le très remarqué Discours sur les Œuvres de M. de Malherbe. Il faudrait ajouter le berger Arcas, dans lequel Cauchie propose de voir un double d’Ogier, mais que nous serions plutôt tenté d’identifier à Racan : dans L’Entretien des Illustres Bergers mais aussi déjà dans le recueil d’églogues paru dans les Œuvres de Frénicle en 1629, Arcas courtise une certaine Arthénice, et l’on sait que c’est là le pseudonyme sous lequel Racan chantait Catherine de Termes, dont il était tombé amoureux [11]. C’est là une présence tout à fait significative, puisque Racan était considéré (à parts égales avec Maynard) comme le principal disciple du poète-grammairien, au point que Marie de Gournay le surnommait cruellement « le singe de Malherbe ».

12En face, on trouve les plus virulents défenseurs de la mémoire de Ronsard : Claude Garnier, ou le vieux Richelet, éditeur des œuvres du Vendômois. Pour arbitrer les débats, les deux chefs de file du groupe littéraire des Illustres Bergers, Guillaume Colletet et Nicolas Frénicle : tous d’eux sont d’anciens libertins, sévèrement compromis à l’occasion du procès de Théophile [12]. Cela n’est d’ailleurs pas indifférent, car Théophile fait partie de ces figures qui, sans avoir ignoré le prestige ni les qualités de Malherbe, ont refusé toute allégeance à une poétique jugée trop contraignante. Il manifeste fièrement son indépendance (« Imite qui voudra les merveilles d’autrui : / Malherbe a très bien fait, mais il a fait pour lui [13] ») et tient une égale balance entre Ronsard et Malherbe (« Je me contenterai d’égaler en mon art / La douceur de Malherbe ou l’ardeur de Ronsard [14] »).

13Avant de reparler du roman de Frénicle, autorisons-nous une parenthèse. Des personnalités comme celles des deux chefs de file des Illustres Bergers sont particulièrement intrigantes pour le lecteur du XXIe siècle et le laissent immanquablement perplexe. Comment Colletet peut-il être à la fois l’un des membres les plus doués de la petite académie de Piat-Maucors, qui se signale par des prises de position d’un purisme intransigeant, et revendiquer dans le même temps la liberté d’inspiration d’un Théophile ? Comment Frénicle, cet ancien libertin dont on peut penser qu’il n’a pas totalement renié son passé [15], peut-il brutalement renoncer à l’inspiration profane et consacrer exclusivement sa fin de carrière à la veine religieuse [16] ? Peut-être appartenait-il justement à ces esprits si portés à la complexité de fédérer malherbiens et ronsardisants : le syncrétisme peut être une autre facette de cette liberté constamment revendiquée et parfois portée jusqu’à la contradiction…

14La seconde partie de L’Entretien des Illustres Bergers se structure autour d’un moment privilégié : nos pasteurs se regroupent auprès d’un temple dédié à Ronsard pour célébrer la mémoire du Vendômois. Ils s’affrontent sous forme de joutes poétiques ou de compétitions sportives (course, natation), selon le modèle des jeux funèbres organisés par Achille en mémoire de Patrocle (chant XXIII de l’Iliade) – motif relayé dans la littérature pastorale par l’Arcadia (1504) de Sannazar (proses I et XI), le Renaud amoureux (1562) du Tasse ou L’Astrée (1607, livre II de la Ière partie) [17]. L’intérêt ici est de détourner cet épisode en en faisant, sous un voile fictionnel devenu bien transparent, l’instrument de la célébration d’une figure littéraire bien réelle. De façon complémentaire mais moins développée, les bergers se livrent également à une discussion touchant à des questions de littérature et de style, qui sont pour notre propos d’un intérêt capital (on nous pardonnera donc la longueur relative de cette citation) :

15

Melinte [i.e. Mauduit] soustenoit qu’il ne falloit pas bannir les vieux mots de notre langage ; qu’ils avoient plus d’énergie que les nouveaux ; qu’ils rendoient le discours grave, & plein de majesté, & qu’il n’étoit pas raisonnable de condamner ce que plusieurs siècles avaient approuvé : Ergaste [i.e. Godeau] disoit au contraire que c’étoit une loy de la nature que toute chose devoit prendre fin ; que le temps ravissoit la force aux plus belles dictions, & que comme les arbres reprennent tous les ans des feuilles nouvelles que de même l’usage abolissoit peu à peu les mots anciens, & en remettoit d’autres à la place de qui la nouveauté agreable avoit l’applaudissement, & l’approbation des peuples ; que les Poëtes, & les Orateurs ne s’étoient pas servis de toutes les paroles de ceux qui les avoient precedez, que Virgile avoit evité plusieurs termes d’Ennius, & qu’encore que l’antiquité lui fust venerable, il avoit toutefois estimé qu’il luy étoit plus honnorable de rechercher quelque nouvelle perfection que de s’arrester par un respect trop scrupuleux à ce que les anciens avoient commencé d’ébaucher ; ils se firent l’un à l’autre plusieurs repliques sur ce sujet là, tant que Menalque [i.e. Richelet] voulant empescher que leur dispute ne passast plus avant que la bien-seance ne le permettoit les interrompit, & leur fit entendre qu’à la verité il falloit avoir un grand soing de l’élocution, & que les belles paroles donnoient un grand ornement à un discours, que neantmoins ce n’étoit rien quand elles n’étoient pas accompagnees de belles sentences, & de conceptions relevées, & que pour bien écrire il étoit besoin d’avoir beaucoup de science : les mots, adjouta Cérilas [i.e. Colletet], dependent de la fantaisie des hommes ; les uns affectent des façons de parler que les autres rejettent, mais en toute sorte de langues il y a des choses qui sont toujours bonnes, & generalement approuvées, comme la facilité d’exprimer ses pensées, la pureté du stile, le bel ordre, l’abondance, la richesse des inventions, & la dexterité de clore si bien toutes les periodes que l’on n’y puisse rien désirer ; c’est ce qui est de plus considerable, dit Aminte [i.e. Frénicle], & qui importe davantage ; ce sont des reigles sans lesquelles personne ne sçauroit bien écrire, le choix des paroles flatte les oreilles, et d’abord fait parestre quelque chose de grand, mais le plus souvent quand on y regarde de près, on n’y treuve rien qu’une vaine pompe une apparence trompeuse, & des fantosmes qui se reduisent en fumée ; la contrainte qui se rencontre en de tels ouvrages empesche les mouvemans de l’esprit de parestre avecque toutes leurs forces, & ne produit que de l’obscurité ; il vaut mieux n’estre pas si élevé, & se rendre plus intelligible ; j’aime que les écris soient fluides, & que la maniere de s’exprimer y semble si aysée que tous ceux qui les lisent croyent que sans difficulté ils en pourroient faire autant, & que toutefois il s’en treuvent beaucoup éloignez quand ils le voudront entreprendre : c’est à dire, reprit Menalque, que le jugemant y doit régner par tout, que les extremitez sont vicieuses, & que toutes choses doivent estre tellement compassées qu’il n’y ait rien d’affecté, & que la science n’ait pas moins d’éclat que les paroles. [18]

16On retrouve là bien sûr des positions attendues : que les ronsardisants (Mauduit ou Richelet) défendent les « vieux mots » ou l’importance de la « science » et que Godeau, le malherbien de service, prône la rupture et la modernisation du langage, cela n’est guère surprenant. Mais il faudrait peut-être insister sur l’esprit de conciliation dont cette page semble être habitée. Même Richelet, « pur » ronsardisant, a le souci d’éviter que la dispute littéraire ne s’envenime, et il lui appartient de conclure le débat, sur une position propre à rallier tous les suffrages. Les deux autres maîtres-d’œuvre de cette vision syncrétique du style ne sont autres que Colletet et Frénicle, les deux principaux acteurs de notre petite académie littéraire. Le premier rappelle des principes assez généraux (la pureté du style, l’ordre naturel des mots, l’abondance, l’art de la clausule) qui ne dépareraient pas sous la plume d’Aristote ou de Cicéron au moment de décrire les virtutes dicendi (qualités générales du style) : s’en tenir à la généralité, justement, est un bon moyen d’éviter les querelles partisanes !

17Le propos de Frénicle-Aminte, lui, est essentiellement articulé à la notion de fluidité. Il faudrait ici rappeler que la fluidité s’associe volontiers, dans la théorie rhétorique des niveaux de style, au genre moyen : Quintilien [19] prend d’ailleurs pour décrire ce style intermédiaire l’image d’un fleuve coulant tranquillement entre deux rives ombragées. Les rhéteurs, il faut bien l’avouer, sont parfois bien en peine de décrire ce style moyen : s’il est facile de caractériser le style élevé (lexique spécialisé, abondance de figures spectaculaires, syntaxe complexe) et son antithèse stricte, le style bas (lexique ordinaire, rareté des figures, syntaxe économe), il est plus difficile de décrire précisément ce qui n’est qu’un « entre-deux ». D’où probablement le choix de faire appel à des catégorisations transversales, comme la notion de douceur (récupérée du style glaphyros décrit par Démétrios de Phalère [20]) ou les métaphores des fleurs (style « floride ») ou du miel (style « melliflux » – et l’on retrouve ici notre notion de fluidité).

18Il s’agit là, sous une apparence anodine, d’une chose absolument cruciale. D’une part parce que le style moyen autorise par nature la conciliation des contraires, mais aussi parce que ces deux notions sœurs de fluidité et de douceur constituent deux véritables fantasmes culturels et esthétiques tout au long du XVIIe siècle, de Desportes et saint François de Sales à Fénelon. Il y a là une façon de célébrer la douceur de mœurs à laquelle aspirent les Français et dans laquelle ils se reconnaissent ; une façon aussi de s’affirmer face au prestige de l’Italie – quelle meilleure arme contre les « faux brillants » ou « le clinquant du Tasse » que cette douceur sans cesse célébrée ?

19Il me semble aussi, pour ce qui nous occupe, que mettre l’accent sur ces notions permet d’oblitérer la querelle entre Ronsard et Malherbe. Même si l’on peut reprocher à Ronsard lui-même la rudesse de son langage (c’est, nous l’avons dit, un axe fondamental de la critique formulée par ses adversaires), il n’y a pas d’incompatibilité de principe entre l’héritage qu’il a laissé et cette exigence stylistique : Desportes, que l’on peut considérer comme l’héritier officiel du Vendômois, est précisément célébré pour sa douceur. Claude Garnier, thuriféraire du Vendômois, peut même pousser ce goût jusqu’à l’obsession :

20

Dous est le miel qui file aus ruches des avettes,
Dous est le dous parfum de rozes nouvelettes,
Dous est le chant d’un Cynne & le poil des aigneaus,
Et dous l’objet des prez au lever des Jumeaus,
Plus douce est la chanson de ta douce muzette,
Et bien que le regret & le soin qui t’alette
Luy forment ses acors lamentables sur tous,
Ils nous sont toutesfois agreables & dous. [21]

21Inversement, on célèbre aussi la douceur de Malherbe. Il faut à ce propos bien distinguer le défaut d’inspiration, qui a souvent été reproché au poète normand (il écrivait peu, ce qui lui valut une saillie ironique du cavalier Marin [22]), du résultat obtenu : à ce propos au contraire, on souligne souvent les qualités de fluidité et de douceur du vers malherbien, comme le fait, nous l’avons vu, Théophile.

22Le second point défendu par Aminte-Frénicle, directement lié au précédent, est qu’« il vaut mieux n’être pas si élevé, et se rendre plus intelligible ». La question a à voir avec l’exigence de correction de la langue et de netteté, mais pas uniquement : conformément à la théorisation rhétorique du style moyen, Frénicle établit un lien direct entre une inspiration « moyenne » et l’exigence (ou le sentiment) de fluidité. Cela n’est pas indifférent si l’on rapproche cette notation du cadre dans lequel elle s’inscrit : relevant théoriquement du style simple, le genre pastoral, au moins depuis L’Astrée, semble avoir vocation à s’aventurer un peu au-delà, au point que l’on considère aujourd’hui la prose romanesque pastorale comme un exemple privilégié de la promotion du style moyen au XVIIe siècle.

23Les études récentes ont également bien montré que l’image de Malherbe comme poète avait commencé à se dégrader sérieusement à partir du milieu du siècle :

24

il pâtit notamment de diverses formes de réactions contre un certain purisme auquel on l’associe ; en outre, le temps passant, il est facile, à ceux qui y ont intérêt, de le présenter comme relevant d’un âge désormais révolu. [23]

25On retient le censeur plus que le poète, et même Balzac, l’ardent défenseur, ironise sur les arguties grammaticales de l’austère réformateur :

26

Vous vous souvenez du vieux pédagogue de la cour que l’on appelait autrefois le tyran des mots et des syllabes, et qui s’appelait lui-même, lorsqu’il était en belle humeur, le grammairien en lunettes et en cheveux gris. N’ayons point dessein d’imiter ce que l’on conte de ridicule de ce vieux docteur. Notre ambition se doit proposer de meilleurs exemples. J’ai pitié d’un homme qui fait de si grandes affaires entre pas et point ; qui traite l’affaire des participes et des gérondifs comme si c’était celle de deux peuples voisins l’un de l’autre et jaloux de leurs frontières. Ce docteur en langue vulgaire avait accoutumé de dire que depuis tant d’années il travaillait à dégasconner la cour et qu’il n’en pouvait venir à bout. La mort l’attrapa sur l’arrondissement d’une période, et l’an climatérique l’avait surpris délibérant si erreur et doute étaient masculins ou féminins. Avec quelle attention voulait-il qu’on l’écoutât quand il dogmatisait de l’usage et de la vertu des particules ? [24]

27À l’inverse, on valorise de plus en plus le talent de Racan, l’élève moins rigoureux mais dont le génie parvient plus facilement à séduire ; ainsi font Rapin ou La Fontaine. La veine facile de Voiture séduit également, même si le poète mondain ne peut se targuer d’une élévation semblable à celle de Malherbe : au moins a-t-il pour lui la grâce d’un langage plus moderne et une verve pleine d’esprit et de naturel. Cette évolution du goût, assez nette dans l’infléchissement du discours critique, valorise de plus en plus les valeurs de naturel, de douceur et de fluidité, et les auteurs qui incarnent cette tendance connaissent un succès d’estime croissant. Ces faits sont désormais acquis, et nous ne reviendrons pas sur des démonstrations qui ont été faites et bien faites : celle de Jean-François Castille soulignant que le vers de Malherbe, par son goût parfois trop marqué pour les monosyllabes, n’est pas sans dureté [25] ; celle d’Emmanuelle Mortgat-Longuet, resituant le fameux « Enfin Malherbe vint… » dans son contexte et expliquant qu’il constitue une « restauration du schéma de la structure malherbienne », « entreprise dans le contexte polémique d’une réaction contre certains aspects de la poésie mondaine, alors en plein essor [26] ».

28Il faudrait, à partir de vérités aussi importantes, tenter de retourner vers l’amont : en éditant le texte de Racan, j’ai été sensible à la façon dont ce disciple réputé servile avait souligné certains points de désaccord avec son maître dans sa Vie de M. Malherbe : il lui reproche notamment d’être trop vétilleux sur certaines rimes, trop peu musicien lorsqu’il s’agit de placer des pauses rythmiques dans les dizains. Les indications récurrentes et assez peu amènes sur le caractère acariâtre de Malherbe ont des résonances suspectes dans un texte d’hommage [27]. Certes, il ne faut pas non plus pousser jusqu’à la caricature : l’homme qui, se jugeant indigne de rivaliser, intègre les deux paraphrases de Malherbe à son propre psautier ne saurait être véritablement un ennemi. Le sentiment presque filial de Racan envers son maître, qu’attestent tous les témoignages d’époque, interdirait également une telle lecture. Pourtant, il existe assurément une position moyenne, parfois difficile à percevoir, mais indiscutablement possible. Le psautier de Racan, qui constitue par son ampleur un terrain d’analyse de premier choix, montre que le poète s’est volontiers affranchi des règles qu’il trouvait trop contraignantes – et on ne peut le soupçonner de les avoir méconnues, puisque c’est lui-même qui les a retranscrites et transmises à la postérité ! Il me semble donc que ces zones de résistance que la fin du siècle a perçues et soulignées se trouvent déjà, de façon peut-être plus diffuse ou moins affirmée, chez les auteurs de la première moitié du siècle : à des titres divers et sous des formes différentes, Théophile ou Racan, déjà, reprochent à Malherbe d’être trop censeur et pas assez poète.

29Qu’il y ait encore des ronsardisants en 1634 n’est pas non plus indifférent. À ce titre, il n’était peut-être pas inutile de relire Frénicle : on a trop souvent tendance, sans doute, à se laisser aveugler par la virulence des propos tenus lors des premières années de la polémique. Les outrances de Marie de Gournay ou de Claude Garnier ne doivent pas masquer qu’il y avait d’autres voies pour continuer d’admirer les poètes de la Pléiade et prolonger leurs leçons. Les Illustres Bergers n’offrent pas seulement au Vendômois un tombeau littéraire et un enterrement de première classe, ils permettent surtout à son héritage de demeurer vivace. Les traces ne sont pas toujours manifestes : ainsi la langue d’un Frénicle ou d’un Colletet renonce-t-elle sans regret aux adjectifs composés qui sont la marque distinctive des « vrais » ronsardisants ou des « attardés » : leur poésie repose sur une langue résolument moderne (celle de Frénicle me paraît étonnamment neuve !) qui anticipe largement sur les réalisations de l’esthétique classique. Mais leur refus de l’esprit partisan, leur attachement à la mémoire du passé, leur attirance pour des voies moyennes (au plan stylistique aussi) fait d’eux des héritiers tout à fait dignes, qui ont su conserver cet esprit de syncrétisme qui est la marque d’un certain humanisme.

Notes

  • [1]
    Cl. Faisant, Mort et Résurrection de la Pléiade, Paris, Champion, 1998.
  • [2]
    N. Boileau, Art poétique, chant I, v. 131-162.
  • [3]
    Je pense notamment au volume collectif Pour des Malherbe, dir. L. Himy-Pieri et Ch. Liaroutzos, Caen, Presses Universitaires de Caen, 2008 (avec plusieurs contributions de première importance), ou à l’ouvrage d’E. Mortgat-Longuet, Clio au Parnasse, Naissance de l’histoire littéraire française aux XVIe et XVIIe siècles, Paris, Champion, 2006.
  • [4]
    Voir par exemple le parallèle entre M. le Prince (Condé) et M. de Longueville dans les Mémoires du cardinal de Retz, éd. S. Bertière, Paris, Garnier, 1987, t. I, p. 372.
  • [5]
    J.-L. Guez de Balzac, Les Entretiens (1657), « Entretien XXXI », éd. B. Beugnot, Paris, Didier / STFM, 1972, t. II, p. 412. Cette prise de position critique a essentiellement trait au problème de l’imitation.
  • [6]
    J. Rousset, L’Intérieur et l’extérieur, Paris, J. Corti, 1976, p. 57 sq.
  • [7]
    Dans Arcadies malheureuses (Paris, Champion, 1998), Fr. Lavocat distingue deux grands types de romans pastoraux : la pastorale académique, selon le modèle inauguré par les italiens, et la pastorale de cour.
  • [8]
    M. Cauchie, « Les églogues de Nicolas Frénicle et le groupe littéraire des Illustres Bergers », Revue d’histoire de la philosophie et d’histoire générale de la civilisation, fasc. 30, avril-juin 1942, p. 115-133.
  • [9]
    Son pseudonyme d’Ergaste vient probablement de L’Astrée. Ergaste est ce personnage qui, au livre X de la Ière partie, renonce à son amour pour Bellinde après avoir compris qu’elle était amoureuse de Célion.
  • [10]
    Ce « premier cercle » réunit plutôt les poètes évoqués par la Vie de Malherbe par Racan, ceux aussi dont les œuvres (poèmes ou lettres) accompagnent celles du maître dans les différentes versions des recueils collectifs publiés par Toussainct du Bray (Recueils des plus beaux vers de ce temps, Délices de la Poésie française, « Recueil Faret » de 1627) : Maynard, Racan, Coulomby, Molière d’Essertines, Yvrande, etc
  • [11]
    Racan est d’ailleurs extrêmement fier de cet anagramme, et relate dans quelles conditions il l’a inventé dans la Vie de Malherbe : voir notre édition des Œuvres complètes, Paris, Champion, 2009, p. 951 sq. Il signale à cette occasion que le nom d’Arcas lui a déjà servi de pseudonyme bucolique.
  • [12]
    Sur la requête du procureur Molé, le décret du 11 juillet 1623 émanant de la Cour du Parlement ordonnait que Théophile, Colletet et Frénicle fussent emprisonnés à la Conciergerie. La peine fut commuée en 9 années de bannissement du royaume pour Colletet (ce qui resta purement théorique) et Frénicle fut simplement soumis à un complément d’information.
  • [13]
    Théophile de Viau, « Élégie à une Dame », v. 71-72, Œuvres poétiques, Ière partie, éd. G. Saba, Paris, Garnier, 2008, p. 116.
  • [14]
    Id., Élégie « Souverain qui régis l’influence des vers », v. 21-22, Œuvres poétiques, IIe partie, éd. cit., p. 208.
  • [15]
    Frénicle, en publiant un recueil complet d’élégies, fait ostensiblement le choix d’un genre « anti-malherbien », et au contraire très « théophilien » ! Voir Les Premières Œuvres poétiques du sieur Frénicle, Paris, Toussainct du Bray, 1625 ; La seconde partie des Élégies de Frénicle pour la belle Isis, Paris, Charles Hulpeau, 1627.
  • [16]
    Il ne s’agit pas là d’un simple revirement transitoire : Frénicle a rédigé un psautier complet, qui compte parmi les plus virtuoses de toute la production de l’époque au plan de l’expérimentation strophique : « Ses cent cinquante psaumes offrent cent vingt-quatre combinaisons métriques dont cent vingt-trois formes strophiques différentes. C’est un record » (P. Leblanc, Les Paraphrases françaises des Psaumes à la fin de la période baroque (1610-1660), Paris, PUF, 1960, p. 220).
  • [17]
    Voir Fr. Lavocat, « Jeux et joutes des bergers. De l’Arcadia de Sannazar (1504) à l’Entretien des Illustres bergers de Nicolas Frénicle (1634) », Elseneur, n° 20, 2005, p. 189-203.
  • [18]
    N. Frénicle, L’Entretien des Illustres Bergers, Paris, J. Dugast, 1634, p. 404-408.
  • [19]
    Quintilien, Institution oratoire, XII, 10, § 58-64.
  • [20]
    Voir Le Doux aux XVIe et XVIIe siècles. Écriture, esthétique, politique, spiritualité, dir. M.-H. Prat et P. Servet, Genève, Droz (« Cahiers du GADGES »), 2003 ; et notamment l’article de D. Denis, « La douceur, une catégorie critique au XVIIe siècle », p. 232-260.
  • [21]
    Cl. Garnier, Églogue pastorale sur le baptême de Monseigneur le Dauphin Louis, Paris, 1607 [cote BnF : Ye 23040], p. 14.
  • [22]
    « Il était grand et bien fait ; mais il crachotait toujours ; ce qui faisait dire au Cavalier Marin, qu’il n’avait jamais vu un homme si humide, ni un Poète si sec » (Racan, La Vie de M. de Malherbe, Œuvres complètes, éd. cit., p. 944).
  • [23]
    E. Mortgat-Longuet, « Fabriques de Malherbe dans l’historiographie des Lettres françaises », dans Pour des Malherbe, op. cit., p. 39.
  • [24]
    J.-L. Guez de Balzac, Le Socrate chrétien, discours X, cité par L. Lalanne, Œuvres complètes de Malherbe, t. I, p. XLVI. Signalons d’ailleurs que cette réflexion s’applique à l’Ode à la Reine Mère du Roi, sur sa venue en France, dans laquelle Malherbe utilise à peu de distance le mot doute (v. 15) et l’expression l’an climatérique (v. 19). Les propos de Balzac, par cette allusion transparente, gagnent en force ironique. Ménage cite d’ailleurs un extrait des Diverses remarques sur divers écrits, dans lequel Balzac évoque directement ces vers de Malherbe : « Feu M. le Cardinal de La Valette, qui avait le goût excellent en prose et en vers, ne pouvait goûter cet an climatérique de l’éternelle Fleur de Lys : et je vous dirai, qu’il m’engagea un jour à soutenir son opinion en public, après me l’avoir persuadée dans son cabinet. À la vérité, depuis ce temps-là j’ai changé d’avis ; mais avec connaissance de cause, et sans violer le respect que je dois à une mémoire qui m’est si chère » (Les Poésies de M. de Malherbe, avec les observations de M. Ménage, Paris, L. Billaine, 1666, p. 358-359).
  • [25]
    J.-Fr. Castille, « La pratique malherbienne de l’hétérométrie », dans Pour des Malherbe, op. cit., p. 147-160.
  • [26]
    E. Mortgat-Longuet, art. cit., p. 41.
  • [27]
    De même, E. Mortgat-Longuet s’étonne de ce que la Vie de M. de Malherbe ne cherche pas davantage à instituer l’image du grand réformateur que fut Malherbe (Clio au Parnasse, op. cit., p. 257 sq.).
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