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Article de revue

Les Amours tragiques de Pyrame et Thisbé : le théâtre du monde à l’heure de la fiction

Pages 119 à 131

Notes

  • [1]
    Je reprends ici la conception de l’épistémè due à Michel Foucault et la distinction qu’il pose entre épistémè analogique et épistémè vraisemblable : voir Les Mots et les choses, Paris, Gallimard, 1966, chap. 1 et 2.
  • [2]
    Voir A.-É. Spica, Symbolique humaniste et emblématique : l’évolution et les genres (1580-1700), Paris, Champion, 1996.
  • [3]
    Voir Fr. Yates, L’Art de la mémoire [1966], trad. D. Arasse, Paris, Gallimard, 1994 ; L. Bolzoni, La cultura della memoria, Bologne, Il Mulino, 1992.
  • [4]
    B. Lamy, La Rhétorique ou l’art de parler [1675], Amsterdam, Marret, 1712, p. 122.
  • [5]
    A. Surgers, « Quand les allégories étaient vivantes. Scénographie, salle, décors, costumes du Ballet de la Delivrance de Renaud », dans La Delivrance de Renaud. Ballet dansé par Louis XIII en 1617, éd. G. Garden, Turnhout, Brepols, 2011, p. 85-130.
  • [6]
    P. Pasquier, La Mimèsis dans l’esthétique théâtrale, Paris, Klincksieck, 1995, p. 60-68 et 169-177.
  • [7]
    Voir Fr. Yates, Theatre of the World, Londres, Routledge et Kegan Paul, 1969 ; G. Navaud, Persona. La pensée du théâtre de Socrate à Shakespeare, Genève, Droz, 2009.
  • [8]
    M. de Montaigne, Les Essais [1595], « De la physionomie », III, 12, éd. P. Villey, Paris, Puf, 1975, p. 1046.
  • [9]
    Voir notamment G. Saba, Théophile de Viau, un poète rebelle, Paris, Puf, 1999.
  • [10]
    La fable ovidienne est moralisée par différents récits et notamment par l’Ovide moralisé en prose (voir Ovide moralisé en prose, éd. C. de Boer [1915], Vaduz Sändig, H. R. Wohlwend, 1968, vol. 2, l. IV, v. 224 et passim) et par une moralité de 1535, qui, elle, explicite le sens allégorique de l’intrigue par la voix de deux bergers qui commentent la scène (É. Picot, « Moralité nouvelle de Pyrame et Thisbé », Bulletin du Bibliophile et du Bibliothécaire, n° 1, 1901, p. 1-35). Cette moralisation se retrouve également dans Le Murieur de Jean-Antoine de Baïf (composé vers 1552). Pour plus de détails sur la réception d’Ovide, voir. E. Baumgartner, Pyrame et Thisbé, Narcisse, Philomena : trois contes du XIIe siècle français imités d’Ovide, Paris, Gallimard, « Folio classique », 2000 ; É. Deschellette, « Le récit ovidien de Pyrame et Thisbé revu par le Moyen Âge », Camenulae, n° 6, 2010, http://www.paris-sorbonne.fr/IMG/pdf/Deschellettes_revu-2.pdf (consulté le 18 septembre 2016).
  • [11]
    Voir C. Harvey, The School of the Heart, or the heart of it self gone away from God, brought back again to him and instructed by him in 47 emblems, Londres, Lodowick Lloyd, 1676.
  • [12]
    L. Marin, De la représentation, Paris, Gallimard, 1994, p. 292-293.
  • [13]
    A. Riffaud, « Lecture d’un lieu tragique : paysage avec Pyrame et Thisbé », Papers of Seventeenth Century Literature, n° 47, 1997, p. 353-372.
  • [14]
    Le Mémoire de Mahelot, éd. P. Pasquier, Paris, Champion, 2005, p. 244. L’image porte ce commentaire : « Il faut au Milieu du théâtre un Mur de Marbre et pierre fermé de ballustres, il faut aussy de chasque costé deux ou trois Marches, pour monter, a un des costez du theatre un Murier, un Tombeau entouré de Piramides, Des fleurs, une Eponge, du sang, un poignard, un Voile un Antre d’ou sort un lion, du costé de la fontaine, et un autre Antre a l’autre bout du theatre, ou il rentre » (p. 245).
  • [15]
    « Qu’as-tu fait de Thisbé, qu’as-tu fait de ton âme ? » (Th. de Viau, Pyrame et Thisba, v. 1013, Œuvres poétiques, éd. G. Saba, Paris, Garnier, 2008, p. 473).
  • [16]
    Ibid., v. 110-111, p. 475.
  • [17]
    Ibid., v. 656, p. 458.
  • [18]
    Ibid., v. 422-423, p. 446.
  • [19]
    « Donna vecchia, brutta e pallida, il corpo sia sciutto, con gl’occhi biechi, vestita del colore della ruggine » et encore « L’esser magra e di color livido dimostra che il livore nasce communemente da freddo e l’Invidia è fredda et ha spento in sè ogni fuoco et ardore di charità » [« Femme vieille, laide et pâle, le corps asséché, les yeux sinistres, habillée couleur de rouille », « Le fait d’être maigre et livide montre que la méchanceté naît communément du froid et que l’envie est froide et a éteint en elle tout feu et ardeur de charité »] (C. Ripa, Iconologia overo Descrittione d’Imagini delle Virtù, Vitii, Affetti, Passioni humane, Corpi celesti, Mondo e sue parti, Padoue, Tozzi, 1611, p. 261-262 ; notre traduction).
  • [20]
    La mise en scène de Benjamin Lazar a été étudiée et commentée dans le cadre du colloque Pyrame et Thisbé ou la mort des amants : l’éternelle jeunesse de la tragédie (Université de Montpellier III, 9-10 novembre 2011).
  • [21]
    Par exemple Le Bourgeois Gentilhomme de Molière, production créée en 2005.
  • [22]
    Benjamin Lazar dit s’être servi, pour reconstituer ce répertoire gestuel, à la fois des traités de rhétorique (comme l’Art de bien prononcer un discours de Bary, 1679) et des traités d’imagologie. Voir F. Siaud, Les Amours tragiques de Pyrame et Thisbé, mise en scène de Benjamin Lazar, Cahier dramaturgique, 2009, p. 64.
  • [23]
    Ibid., p. 60.
  • [24]
    Ibid., p. 55.
  • [25]
    Ibid.
  • [26]
    Ibid., p. 63.
  • [27]
    « Le sentiment d’étrangeté peut être un sentiment de modernité, si la modernité est un choc qui vient percuter le réel établi » (ibid., p. 61).
  • [28]
    « Je suis touché quand certains adultes viennent me voir en me disant qu’ils ont retrouvé, à travers le spectacle, une émotion première d’émerveillement face au théâtre » (ibid., p. 65). 
  • [29]
    Ibid., p. 62.
  • [30]
    Ibid., p. 55.
  • [31]
    Ibid., p. 56.
  • [32]
    Ibid., p. 55.
  • [33]
    Ibid., p. 56.
  • [34]
    Ibid., p. 58.

1 La distance qui sépare les attentes du public contemporain des attentes du public baroque affecte la transmission du répertoire dramatique du XVIe et du XVIIe siècles. Les pièces de la première modernité supposent la connaissance de motifs et de fables que le public contemporain ignore le plus souvent. Plus essentiellement, elles impliquent une conception différente de l’image théâtrale. Sous l’Ancien Régime, la scène n’est pas seulement le lieu d’une fiction vraisemblable, qui duplique le réel pour donner à voir une image feinte, mais aussi le lieu d’une image analogique. C’est en ce sens que la distance qui sépare le public baroque du public contemporain est, avant tout, une distance « épistémique [1] » : ce sont les conditions mêmes de la construction et de l’interprétation de l’image dramatique qui changent, en dépit de la permanence illusoire des dialogues et des didascalies.

2 Je voudrais montrer ici que la scène baroque repose, du moins en partie, sur la logique de l’analogie : toute image représentée se comprend à partir d’un réservoir d’images connues qui manifeste d’emblée la polysémie de la scène et permet au public de généraliser la fable représentée. Or cette conception de la scène, tout comme celle d’un théâtre du monde qui cherche par l’analogie à signifier le sens de l’existence, n’est pas accessible au public contemporain. Celui-ci ignore les implications idéologiques et morales des images représentées et n’est généralement pas appelé à considérer le théâtre comme le lieu de l’analogie – où chaque image est polysémique et ambiguë – mais davantage comme le lieu de la fiction – où l’image représente ou redouble la réalité.

3 À partir de l’analyse des Amours tragiques de Pyrame et Thisbé, il s’agira de montrer en quoi la conception pré-moderne du spectacle affecte l’interprétation de la pièce. J’analyserai ensuite les adaptations contemporaines, et notamment la mise en scène de Benjamin Lazar, afin de saisir comment transmettre ou recréer la polysémie foncière du théâtre de la première modernité.

L’analogie au fondement du théâtre de la première modernité

4 La critique a relevé l’extrême polysémie des textes et des images de la première modernité. Le sens littéral des fables se double d’autres significations qui tirent d’événements narratifs des enseignements spirituels et moraux. La tradition des emblèmes [2] et l’art de la mémoire [3] sont des exemples de cette polysémie, dans un contexte où les images et les récits se chargent d’un sens allégorique, au sens où l’entend Bernard Lamy, pour qui « l’allégorie de fait [opère] lorsqu’en parlant on semble dire tout autre chose que ce que l’on dit en effet [4] ». La présence de discours « allégoriques » rend compte d’un mode interprétatif qui persiste au XVIe siècle, mais qui paraît aussi affecter la scène du début du XVIIe siècle, comme l’ont relevé Anne Surgers [5] et Pierre Pasquier [6]. Le théâtre devient alors le lieu privilégié de l’analogie, via la métaphore du théâtre du monde [7]. Si le monde est un théâtre, le théâtre est le lieu qui expose le mieux le monde et condense en ses représentations le sens des images mondaines. C’est ainsi que Montaigne et ses contemporains cherchent à comprendre « en la fable des Theatres la montre des jeux tragiques de l’humaine fortune [8] ». L’allégorie est donc à la fois le fruit d’un savoir – le public du XVIe siècle connaît les multiples significations des images – et le fait d’une pratique – les textes et les images ne sont pas seulement compris comme imitations de la réalité, mais aussi comme analogies d’une vérité spirituelle ou morale qui en dépasse l’apparence mimétique, voire qui vient contredire leur sens premier.

5 La tragédie de Théophile de Viau, Les Amours tragiques de Pyrame et Thisbé, s’inscrit dans cette épistémè analogique, du simple fait que Théophile de Viau la compose à partir d’un matériau bien connu par son public. Si sa pièce entend manifester une prise de position de l’auteur, comme la critique a tendance à l’affirmer [9], cette prise de position ne peut se faire qu’à partir des attentes de son public, c’est-à-dire à partir de la polysémie foncière de la fable qu’il met en scène. La tragédie de Théophile se positionne d’abord par rapport à la tradition de l’intrigue qu’elle adapte. Le sens premier de la fable est celui que relatent les Métamorphoses d’Ovide. Deux jeunes Babyloniens s’aiment contre l’avis de leurs parents, et cet amour impossible est couronné par la mort. Mais le récit ovidien reçoit, dans la tradition médiévale, une moralisation qui double le sens littéral d’une signification allégorique : l’amour impossible des amants vient alors signifier l’amour entre l’âme (Thisbé) et son Dieu (Pyrame). Le mur qui sépare les amants renvoie à la limite infranchissable entre la contingence terrestre et le bonheur céleste ; le lion représente le diable de l’Apocalypse, qui rôde pour empêcher l’âme de réaliser son désir de Dieu. La mort de Pyrame signifie la mort du Christ, qui permet enfin la réconciliation entre l’âme et Dieu, mais seulement dans l’au-delà. La fable ovidienne est ainsi interprétée par la typologie. Le sens allégorique fait de l’amour entre Pyrame et Thisbé l’image de l’amour entre l’âme et le Christ ; le sens spirituel comprend le désir des héros comme le désir de l’homme de se libérer de la contingence pour jouir de l’amour divin. Enfin, suivant le sens anagogique, la passion funeste des amants signifie l’impossibilité du salut dans ce monde : le mal qui l’habite empêche l’homme de poursuivre et de réaliser son aspiration au salut [10].

6 Ce réseau complexe de significations, que l’Ovide moralisé déploie, rend compte de la richesse herméneutique qu’assume la fable de Pyrame et Thisbé à l’orée de la modernité. Les amours malheureuses des deux Babyloniens deviennent le lieu d’une méditation sur la possibilité de réaliser sur terre l’aspiration à un amour absolu. La représentation de Hans Baldung Grien, peinte vers 1530 et conservée à Berlin, se lit de même comme une allégorie (Fig. 1). Le tableau rend compte de la fin de la fable : Thisbé revient sur ses pas et découvre Pyrame mort, au pied de la source où ils s’étaient donné rendez-vous. Mais certains éléments du tableau font signe vers une autre interprétation possible de l’image. La proximité de Pyrame avec la fontaine et la croix, que l’on distingue dans le fond, réactive l’interprétation christique. Pyrame est le Christ sacrifié, qui répand l’eau vive du baptême et du salut. Thisbé, au lieu de se poignarder, semble contempler le corps mort de son amant, les mains jointes, comme en prière. Le lion, qui apparaît à l’arrière-plan entre les deux figures, manifeste le pouvoir du mal qui sépare les amants, alors que l’ange, au sommet de la fontaine, rappelle la nature divine de l’amour. Le ciel sombre signifie l’égarement des personnages, que dissipent les rayons de lumière venant de la droite pour exprimer la possibilité du salut. Le caractère statique et hautement symbolique du tableau n’est pas sans rappeler les emblèmes conventionnels de l’amour, dont sont repris ici quelques motifs, comme la fontaine et le ciel nuageux [11].

7 Une autre représentation de la mort des amants, plus tardive, est peinte par Poussin dans son tableau Paysage orageux avec Pyrame et Thisbé de 1651, conservé à Francfort (Fig. 2). La complexité du tableau risque d’égarer le spectateur contemporain, qui a du mal à saisir le lien entre la scène représentée au premier plan – Thisbé retrouvant Pyrame mort –, la scène pastorale qui se joue au plan moyen et la scène cosmique à l’arrière-plan. Louis Marin [12] et Alain Riffaud [13] ont commenté la complexité de la scène. Si le sens littéral de la fable ovidienne occupe le premier plan, avec d’un côté la grotte et de l’autre le voile ensanglanté de Thisbé, au second plan se joue une scène qui n’est pas du ressort d’Ovide. Un homme à cheval cherche à chasser un lion pour défendre son troupeau et ses brebis. Dans cette scène, donc, le lion qui a empêché l’union entre les amants devient le fauve qui terrasse le troupeau, évoquant, dans l’allégorie, le Malin, qui détruit le travail de l’homme et disperse les brebis. Si le premier plan rend compte de l’impossibilité de l’amour des amants, les figures au second plan expliquent cette impossibilité en termes spirituels : le Malin menace l’homme et disperse les brebis en quête de salut. Enfin, l’arrière-plan manifeste la nature cosmique de ce déchirement : la Création est ici menacée par un orage qui risque de détruire l’harmonie se reflétant dans les eaux du lac. Les différents plans de ce tableau révèlent ainsi le lien qui unit malheur individuel des amants, malheur de l’humanité et désordre dans la Création.

8 À partir de ces diverses représentations de la fable de Pyrame et Thisbé, il est intéressant de considérer la scénographie de la tragédie de Théophile, telle qu’elle est représentée dans le Mémoire de Mahelot par le dessin généralement attribué à Georges Buffequin (Fig. 3) [14]. Il s’agit d’une mise en scène tardive (1629), mais elle nous permet toutefois de considérer l’horizon d’attente du public des années 1620-1630. Les amours des protagonistes ne se jouent pas dans un espace limité qui change avec l’action – comme dans la scène à l’italienne – mais évoluent dans un espace global qui vient ainsi représenter la totalité du monde. On reconnaît au fond la ville et le mur qui sépare les amants, et au devant de la scène, le tombeau de Ninus côté cour et la grotte côté jardin. La scène ainsi disposée contribue à complexifier le sens de l’action. Comme dans le tableau de Poussin, l’arrière-plan représente la ville, espace du social et du politique, alors que le premier plan représente le lieu plus sauvage où se retrouvent les amants et où circule un lion. Mais dans ce lieu sauvage les éléments du décor acquièrent une valeur symbolique qui n’est pas sans rappeler la disposition de la scène au Moyen Âge. Côté cour, le mûrier, le tombeau et la fontaine prennent un sens spirituel pour signifier à la fois la mort et la renaissance dans une nature bienveillante. Côté jardin, la grotte où entre le lion évoque symboliquement les Enfers, tels qu’ils étaient représentés dans les mystères. Cette figuration vient souligner la valeur diabolique du Lion et renforce l’impression que la scène représente l’espace symbolique de la vie mondaine, entre les Enfers et la possibilité d’une rédemption après la mort.

9 Ces diverses représentations – narratives et figuratives – de l’histoire de Pyrame et Thisbé nous permettent de comprendre le contexte épistémique à partir duquel Théophile compose sa pièce et de relever ainsi l’originalité de sa démarche. D’une part, Théophile se réfère à la tradition de l’intrigue, probablement à partir du poème Le Mûrier de Jean-Antoine Baïf, composé avant 1573. Pyrame appelle Thisbé, son « âme [15] », à la fois pour indiquer le caractère exclusif de sa passion et pour renvoyer discrètement à l’interprétation « moralisée » de l’intrigue. De même, il souligne la portée cosmique et universelle du malheur des amants : leur trépas n’est point le simple fait d’un malheur personnel, mais davantage un « tonnerre, et [un] gouffre, et [la] mort » qui viennent troubler l’ordre des « parents, du Ciel, de la nature [16] ». La cité des hommes, la Création, la Providence sont ainsi les trois « théâtres » où se trouve représenté le malheur des amants, qui prend une signification différente dans l’ordre de la société, du monde et de Dieu, comme plus tard dans le tableau de Poussin.

10 D’autre part, Théophile retravaille l’intrigue par l’introduction d’éléments absents de la trame ovidienne. Le songe de la mère de Thisbé ainsi que la figure du tyran qui désire posséder Thisbé sont des ajouts faits par le poète, sans doute pour conformer l’intrigue ancienne au canon tragique. Mais si le songe et le tyran sont bien des éléments de la tradition tragique, ils manifestent également l’interprétation que Théophile donne de l’histoire de Pyrame. Le songe souligne la valeur allégorique de l’intrigue. La mère de Thisbé rêve de sa fille aux Enfers. Le lion, qui en garde la porte, révèle sa nature véritablement infernale et Thisbé, qui se réjouit d’avoir, dans la mort, retrouvé Pyrame, évoque l’impossibilité de tout amour absolu sur terre. Le songe exprime ainsi une forme de pessimisme : la vie dans le monde empêche la réalisation des aspirations les plus pures et les plus absolues. La figure du tyran ajoute un nouvel obstacle à l’amour et, par analogie, au bonheur spirituel et mystique des amants. Des signes textuels révèlent la polysémie de ce personnage incarnant le pouvoir politique : Thisbé se détourne de lui « ainsi qu’elle aurait fait d’un serpent qu’elle eût vu [17] ». Le roi devient ainsi à son tour une image du Malin, qui voudrait pousser Thisbé à se détourner de sa vocation amoureuse. De même, la nourrice, Bersiane, qui incarne traditionnellement dans la tragédie la figure du conseiller, constitue un obstacle à l’amour des héros et représente le pouvoir des parents sur les enfants. Comme pour le tyran, l’analogie souligne et généralise l’action du personnage : elle est décrite par Pyrame comme

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Un pauvre corps usé qui n’est que pourriture,
Une vieille à qui l’âge a séché les humeurs,
À qui les sens gâtés ont perverti les mœurs,
Un sang gros et pesant, toujours froid comme glace [18]

12 par une figuration qui rappelle les emblèmes et notamment celui de l’envie tel qu’il est décrit par Ripa [19]. La nourrice est en effet accusée – ainsi que le roi – d’envier l’amour des amants.

13 Théophile s’empare dès lors de la force analogique de l’intrigue ancienne pour souligner certains aspects de l’histoire : un amour parfait – amour humain au sens littéral, amour divin dans l’allégorie – n’est pas seulement entravé sur terre par la présence du Malin, mais il est également empêché par l’ordre politique, qui fait du pouvoir un moyen de domination, et par les liens sociaux et familiaux, qui contraignent la liberté de l’amour. Or, si l’analogie pouvait éclairer les conditions de composition et de réception de ces pièces aux yeux du public de l’époque, le public contemporain est aujourd’hui dans l’incapacité d’en saisir la polysémie. L’entreprise de médiation engagée par certaines adaptations contemporaines fournira quelques pistes de réflexion quant à la transmission de ces pièces au XXIe siècle.

Transmissions ou recréations contemporaines

14 La tragédie de Théophile a fait l’objet d’un nombre réduit de mises en scène au cours de ces dernières décennies. On retiendra notamment celle d’Antoine Girard au Théâtre National de Strasbourg en 1992 et celle de Benjamin Lazar, représentée à Caen en 2009, à Paris en 2010 et à Rouen en 2013. C’est cette mise en scène que je voudrais commenter, parce que Benjamin Lazar, conscient de la richesse du texte ancien, y manifeste la volonté de la transmettre au public contemporain [20]. Dans cette pièce, comme dans d’autres pièces créées sous l’Ancien Régime qu’il a reprises [21], le metteur en scène habille ses comédiens de costumes d’époque, cherche à restaurer la diction rhétorique en usage au théâtre au XVIIe siècle et restitue les gestes signifiants qui accompagnent les propos du rhéteur. Ses acteurs n’ont donc pas un jeu réaliste, mais un jeu stéréotypé à la gestuelle emblématique qui vient appuyer et illustrer par une actio convaincante le propos énoncé [22]. C’est ainsi que Pyrame, pour exprimer la souffrance, pose la main droite sur son cœur et de la main gauche se couvre le visage (Fig. 4). L’éclairage de la pièce se fait à la bougie, comme au début du XVIIe siècle, et ceci, d’après Lazar, pour la qualité de la lumière et du clair-obscur qui en découle, ainsi que pour la liberté et l’expressivité conférées à l’acteur par une scène plus sombre, à éclairage fixe [23]. La scène en revanche ne présente ni compartiment ni toile peinte, mais reste relativement vide, afin de mettre en avant la qualité « poétique » de la langue de Théophile, qui, d’après Lazar, s’affranchit des contraintes scéniques pour créer un monde expressif, et « pour ne pas opposer à la liberté du poète, et donc du spectateur, une réalisation matérielle trop présente [24] ». Il reste des compartiments « l’idée que, selon les lieux d’entrées des personnages, on est dans un autre espace ; l’espace de Thisbé et de sa maison seront localisés côté jardin, l’espace de Pyrame et de son père côté cour [25] ».

15 La mise en scène de Benjamin Lazar est intéressante, parce qu’elle n’entend pas reconstituer par un souci d’érudition une pièce ancienne, mais qu’elle cherche davantage à recréer les émotions et les effets qu’une pièce pouvait susciter sous l’Ancien Régime. Lazar affirme travailler « non pas dans un but de reconstitution, mais dans un but de compréhension [26] ». Il ne s’agit donc pas de tenter de restaurer les conditions de représentation et de réception de l’époque baroque, mais plutôt de considérer ce qui a été perdu pour chercher à recréer, par des moyens différents, l’intention des effets voulus par Théophile et des émotions éprouvées par son public. Ce qui a été perdu, c’est le réservoir de significations qu’une conception théologique du monde permettait au public de mobiliser. La façon d’approcher et d’interpréter le théâtre baroque est également perdue : si le public de Théophile définissait la qualité d’une pièce dramatique en fonction de son « utilité » morale, ce critère n’est plus de mise et c’est davantage le « plaisir » ou encore la « vérité » du texte – une vérité qui se donne par généralisation et non par allégorie – qui fonde les critères d’évaluation poétique depuis Fontenelle.

16 Benjamain Lazar ne déplore pas ces « pertes » mais recherche des moyens pour rendre ce manque signifiant et pour le combler. C’est ainsi que le recours à l’éclairage à la bougie et à la déclamation entend moins reconstituer un jeu périmé que susciter chez le public un sentiment d’« étrangeté [27] ». La beauté des images qu’il produit vise à transformer l’étrangeté en « émerveillement [28] », pour que le public se laisse entraîner à pénétrer dans « un autre monde » qui n’est pas seulement le monde baroque, mais davantage le monde du théâtre, un monde « où il se passe des choses […] qu’on ne voit jamais dans la vie […] un miroir qui offre des jeux de reflets complexes qui nous éloignent d’une simple relation d’égalité entre la scène et le monde [29] ». L’émerveillement du public sert donc à détourner ses attentes d’une scène vraisemblable, qui serait le miroir du monde, pour l’initier à une scène de l’étrangeté, qui n’imite pas la réalité mais vise à constituer un autre monde. En ce sens, la mise en scène de Benjamin Lazar cherche à faire pénétrer le lecteur dans le monde de l’analogie et l’invite à considérer la scène comme un mystère, habité de lumière et d’ombres, qu’il ne peut pas comprendre sans interpréter les mots et les gestes, qui dépassent la logique de la passion – telle que nous l’a léguée le romantisme – pour induire une réflexion sur la valeur plus vaste et plus universelle du désir amoureux.

17 Cette mise en scène se donne comme un symbole qui appelle l’interprétation du public. Or ce symbole n’est pas de l’ordre de l’allégorie, comme pouvaient l’être le tableau de Baldung Grien ou celui de Poussin. La sobriété stylisée de la scène, qui est très sombre, habitée seulement par la lumière des bougies qui descendent du plafond ou qui composent un fleuve de lumière, ne donne pas à voir au spectateur un « théâtre du monde », mais plutôt un « lieu imaginaire [30] » ou encore un « lieu mental [31] ». Les lieux de la fable – le mur, la grotte, la tombe de Ninus, le lion – n’ont pas de présence sur scène, mais « surgissent dans l’imagination par la seule force de la langue [32] ». Le caractère abstrait de la scène contribue sans doute à son efficacité : le public est saisi par la puissance des images qui se détachent d’un fond noir par l’éclat doré de la flamme des bougies. Plus qu’une action, les personnages représentent une situation existentielle : le travail sur la diction et sur les gestes qui vise à restituer la dimension rhétorique du théâtre baroque, dans le clair-obscur de la scène, assume une autre signification. Le spectateur a l’impression de pénétrer dans l’intimité des personnages, qui porteraient à la scène des états intérieurs et des conflits symboliques. C’est ce déplacement du théâtre du monde vers le théâtre de l’intériorité qui permet à la mise en scène de « passer » et de toucher le public contemporain. Lui-même avoue d’ailleurs que ce trait du théâtre humaniste où les personnages

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viennent exposer pleinement ce qu’ils sont […] est théâtralement très fort et en même temps très contemporain comme procédé : dans le théâtre contemporain, il y a beaucoup de personnages qui viennent en scène pour dire : je suis cela, je fais cela. Je pense au théâtre de Bernard-Marie Koltès par exemple. [33]

19 En ce sens, la dernière scène entre Pyrame et Thisbé, menacés par un lion invisible, s’apparente à l’échange énigmatique qui a lieu dans La Solitude des champs de coton. Le spectateur a la liberté de situer et de comprendre à sa guise le dialogue impossible entre les amants qui se fuient sans se rencontrer et de donner au lion, à la source, à la grotte, une valeur symbolique. Le lion pourrait alors représenter les peurs qui empêchent Thisbé de s’unir à son amant et laisser ainsi advenir à la scène les angoisses de chaque spectateur, confronté à l’expérience de la souffrance amoureuse.

20 La mise en scène de Benjamin Lazar recrée le monde de l’allégorie par une symbolique de la subjectivité. Son Pyrame et Thisbé parvient ainsi à évoquer le mystère et la polysémie de la pièce de Théophile, mais au prix d’un déplacement qui rend cette polysémie et ce mystère accessibles à un public qui est désormais étranger à l’imaginaire baroque. La pièce est alors polysémique, parce qu’elle fait de l’image scénique un support pour la subjectivité du spectateur, alors qu’au temps de Théophile, l’image dramatique faisait signe vers une compréhension de l’universel. Si la mise en scène de Benjamin Lazar pousse le public à créer un sens singulier, la pièce de Théophile suppose un engagement collectif du public qui reconstruit le sens de l’intrigue à partir d’un fond commun d’images et de significations. Si la mise en scène engage une recherche psychologique, la pièce de Théophile pousse alors à rechercher un sens spirituel. De la sorte, la mise en scène de Benjamin Lazar entend produire un défoulement ou une objectivation de l’angoisse, alors que la pièce de Théophile cherchait à induire, chez le spectateur, un apprentissage éthique.

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22 On peut se demander si cet écart entre scène baroque et scène contemporaine est indépassable, ou si une autre mise en scène pourrait mieux recréer la polysémie propre à l’allégorie. C’est une question qui dépasse mes compétences, mais que je voudrais poser en guise de conclusion. Comment traduire, par les moyens dramaturgiques actuels, la polysémie propre au théâtre baroque ? Benjamin Lazar affirme qu’il a lui-même recherché d’autres moyens de mise en scène, afin de toucher autrement le spectateur : il a notamment déclamé les scènes tragiques en les accompagnant de la musique de Couperin [34]. Peut-être que le recours à la musique et au chant, voire à la danse et à l’image, permet au public de s’engager davantage et autrement dans la pièce, et de comprendre sa symbolique de manière collective et spirituelle, en considérant moins la scène comme un théâtre de la subjectivité qu’un théâtre du monde. Il se pourrait alors que l’esthétique de l’œuvre d’art totale recrée la symbolique complexe de la scène baroque et la rende accessible au public contemporain, au prix d’un déplacement du régime de l’allégorie vers l’imaginaire post-romantique. Si elle ne permet pas de confirmer ces pistes, la mise en scène des Amours tragiques de Pyrame et Thisbé par Benjamin Lazar a le mérite de questionner le mystère de la scène baroque et de proposer une réponse possible à ce souci de recréer, au pays de la fiction, l’imaginaire polysémique du théâtre du monde.

Fig. 1. Hans Baldung Grien, Pyrame et Thisbé, vers 1530, huile sur bois, Berlin, Staatliche Museen. © Web Gallery of Art

Fig. 1. Hans Baldung Grien, Pyrame et Thisbé, vers 1530, huile sur bois, Berlin, Staatliche Museen. © Web Gallery of Art

Fig. 1. Hans Baldung Grien, Pyrame et Thisbé, vers 1530, huile sur bois, Berlin, Staatliche Museen. © Web Gallery of Art

Fig. 2. Nicolas Poussin, Paysage orageux avec Pyrame et Thisbé, 1651, huile sur toile, Francfort, Stadel Kunstinstitut. © Web Gallery of Art

Fig. 2. Nicolas Poussin, Paysage orageux avec Pyrame et Thisbé, 1651, huile sur toile, Francfort, Stadel Kunstinstitut. © Web Gallery of Art

Fig. 2. Nicolas Poussin, Paysage orageux avec Pyrame et Thisbé, 1651, huile sur toile, Francfort, Stadel Kunstinstitut. © Web Gallery of Art

Fig. 3. Georges Buffequin, Décor de Pyrame et Thisbé, dans le Mémoire de Mahelot, vers 1630, dessein, Paris, Bibliothèque nationale de France, Ms. Fr. 24330

Fig. 3. Georges Buffequin, Décor de Pyrame et Thisbé, dans le Mémoire de Mahelot, vers 1630, dessein, Paris, Bibliothèque nationale de France, Ms. Fr. 24330

Fig. 3. Georges Buffequin, Décor de Pyrame et Thisbé, dans le Mémoire de Mahelot, vers 1630, dessein, Paris, Bibliothèque nationale de France, Ms. Fr. 24330

Fig. 4. Benjamin Lazar (Pyrame) © Nathaniel Baruch

Fig. 4. Benjamin Lazar (Pyrame) © Nathaniel Baruch

Notes

  • [1]
    Je reprends ici la conception de l’épistémè due à Michel Foucault et la distinction qu’il pose entre épistémè analogique et épistémè vraisemblable : voir Les Mots et les choses, Paris, Gallimard, 1966, chap. 1 et 2.
  • [2]
    Voir A.-É. Spica, Symbolique humaniste et emblématique : l’évolution et les genres (1580-1700), Paris, Champion, 1996.
  • [3]
    Voir Fr. Yates, L’Art de la mémoire [1966], trad. D. Arasse, Paris, Gallimard, 1994 ; L. Bolzoni, La cultura della memoria, Bologne, Il Mulino, 1992.
  • [4]
    B. Lamy, La Rhétorique ou l’art de parler [1675], Amsterdam, Marret, 1712, p. 122.
  • [5]
    A. Surgers, « Quand les allégories étaient vivantes. Scénographie, salle, décors, costumes du Ballet de la Delivrance de Renaud », dans La Delivrance de Renaud. Ballet dansé par Louis XIII en 1617, éd. G. Garden, Turnhout, Brepols, 2011, p. 85-130.
  • [6]
    P. Pasquier, La Mimèsis dans l’esthétique théâtrale, Paris, Klincksieck, 1995, p. 60-68 et 169-177.
  • [7]
    Voir Fr. Yates, Theatre of the World, Londres, Routledge et Kegan Paul, 1969 ; G. Navaud, Persona. La pensée du théâtre de Socrate à Shakespeare, Genève, Droz, 2009.
  • [8]
    M. de Montaigne, Les Essais [1595], « De la physionomie », III, 12, éd. P. Villey, Paris, Puf, 1975, p. 1046.
  • [9]
    Voir notamment G. Saba, Théophile de Viau, un poète rebelle, Paris, Puf, 1999.
  • [10]
    La fable ovidienne est moralisée par différents récits et notamment par l’Ovide moralisé en prose (voir Ovide moralisé en prose, éd. C. de Boer [1915], Vaduz Sändig, H. R. Wohlwend, 1968, vol. 2, l. IV, v. 224 et passim) et par une moralité de 1535, qui, elle, explicite le sens allégorique de l’intrigue par la voix de deux bergers qui commentent la scène (É. Picot, « Moralité nouvelle de Pyrame et Thisbé », Bulletin du Bibliophile et du Bibliothécaire, n° 1, 1901, p. 1-35). Cette moralisation se retrouve également dans Le Murieur de Jean-Antoine de Baïf (composé vers 1552). Pour plus de détails sur la réception d’Ovide, voir. E. Baumgartner, Pyrame et Thisbé, Narcisse, Philomena : trois contes du XIIe siècle français imités d’Ovide, Paris, Gallimard, « Folio classique », 2000 ; É. Deschellette, « Le récit ovidien de Pyrame et Thisbé revu par le Moyen Âge », Camenulae, n° 6, 2010, http://www.paris-sorbonne.fr/IMG/pdf/Deschellettes_revu-2.pdf (consulté le 18 septembre 2016).
  • [11]
    Voir C. Harvey, The School of the Heart, or the heart of it self gone away from God, brought back again to him and instructed by him in 47 emblems, Londres, Lodowick Lloyd, 1676.
  • [12]
    L. Marin, De la représentation, Paris, Gallimard, 1994, p. 292-293.
  • [13]
    A. Riffaud, « Lecture d’un lieu tragique : paysage avec Pyrame et Thisbé », Papers of Seventeenth Century Literature, n° 47, 1997, p. 353-372.
  • [14]
    Le Mémoire de Mahelot, éd. P. Pasquier, Paris, Champion, 2005, p. 244. L’image porte ce commentaire : « Il faut au Milieu du théâtre un Mur de Marbre et pierre fermé de ballustres, il faut aussy de chasque costé deux ou trois Marches, pour monter, a un des costez du theatre un Murier, un Tombeau entouré de Piramides, Des fleurs, une Eponge, du sang, un poignard, un Voile un Antre d’ou sort un lion, du costé de la fontaine, et un autre Antre a l’autre bout du theatre, ou il rentre » (p. 245).
  • [15]
    « Qu’as-tu fait de Thisbé, qu’as-tu fait de ton âme ? » (Th. de Viau, Pyrame et Thisba, v. 1013, Œuvres poétiques, éd. G. Saba, Paris, Garnier, 2008, p. 473).
  • [16]
    Ibid., v. 110-111, p. 475.
  • [17]
    Ibid., v. 656, p. 458.
  • [18]
    Ibid., v. 422-423, p. 446.
  • [19]
    « Donna vecchia, brutta e pallida, il corpo sia sciutto, con gl’occhi biechi, vestita del colore della ruggine » et encore « L’esser magra e di color livido dimostra che il livore nasce communemente da freddo e l’Invidia è fredda et ha spento in sè ogni fuoco et ardore di charità » [« Femme vieille, laide et pâle, le corps asséché, les yeux sinistres, habillée couleur de rouille », « Le fait d’être maigre et livide montre que la méchanceté naît communément du froid et que l’envie est froide et a éteint en elle tout feu et ardeur de charité »] (C. Ripa, Iconologia overo Descrittione d’Imagini delle Virtù, Vitii, Affetti, Passioni humane, Corpi celesti, Mondo e sue parti, Padoue, Tozzi, 1611, p. 261-262 ; notre traduction).
  • [20]
    La mise en scène de Benjamin Lazar a été étudiée et commentée dans le cadre du colloque Pyrame et Thisbé ou la mort des amants : l’éternelle jeunesse de la tragédie (Université de Montpellier III, 9-10 novembre 2011).
  • [21]
    Par exemple Le Bourgeois Gentilhomme de Molière, production créée en 2005.
  • [22]
    Benjamin Lazar dit s’être servi, pour reconstituer ce répertoire gestuel, à la fois des traités de rhétorique (comme l’Art de bien prononcer un discours de Bary, 1679) et des traités d’imagologie. Voir F. Siaud, Les Amours tragiques de Pyrame et Thisbé, mise en scène de Benjamin Lazar, Cahier dramaturgique, 2009, p. 64.
  • [23]
    Ibid., p. 60.
  • [24]
    Ibid., p. 55.
  • [25]
    Ibid.
  • [26]
    Ibid., p. 63.
  • [27]
    « Le sentiment d’étrangeté peut être un sentiment de modernité, si la modernité est un choc qui vient percuter le réel établi » (ibid., p. 61).
  • [28]
    « Je suis touché quand certains adultes viennent me voir en me disant qu’ils ont retrouvé, à travers le spectacle, une émotion première d’émerveillement face au théâtre » (ibid., p. 65). 
  • [29]
    Ibid., p. 62.
  • [30]
    Ibid., p. 55.
  • [31]
    Ibid., p. 56.
  • [32]
    Ibid., p. 55.
  • [33]
    Ibid., p. 56.
  • [34]
    Ibid., p. 58.
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