Notes
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[1]
Mercure galant, août 1680 (Paris, Au Palais), p. 332-333.
-
[2]
Ibid., septembre 1680, p. 346.
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[3]
Sur ce sujet vaste, voir notamment les travaux de M. Poirson, et plus particulièrement Spectacle et économie à l’âge classique (XVIIe-XVIIIe siècles), Paris, Classiques Garnier, 2011.
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[4]
Il importe de préciser que le terme événement, dès lors qu’il est employé dans la presse périodique, pose un problème théorique et historiographique, car son usage actuel dépasse celui qui lui était attribué au XVIIe siècle . S’il réfère à une « aventure remarquable » (Dictionnaire de l’Académie française, 1694) ou à des « choses grandes, surprenantes et singulières qui arrivent dans le monde » (Dictionnaire universel de Furetière, 1690), l’événement s’inscrit aussi et surtout dans une dynamique d’actualités permanentes et figure au cœur d’un discours de médiatisation en train d’émerger. L’événement peut renvoyer à un épisode d’actualité qui laisse une trace, si infime soit-elle. Ainsi, la réception des spectateurs au théâtre permet de décrire la soirée théâtrale comme un événement, puisqu’elle a un impact immédiat, visible et transmissible. Pour approfondir ces questions, voir notamment Que se passe-t-il ? Événements, sciences humaines et littérature, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2004.
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[5]
Dès la fin des années 1680, la chronique théâtrale du Mercure galant occupe une place de moins en moins significative, comme l’ensemble de l’actualité culturelle publiée dans le périodique. Il faudra attendre la fin des années 1710 (direction de François Buchet) pour voir réapparaître une critique dramatique suivie. À partir de la création du Mercure de France en 1724, le relevé de l’actualité théâtrale devient même une rubrique divisée par salles de spectacle et présente dans la table des matières sous l’intitulé « spectacles ».
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[6]
Le périodique est également ponctué de remarques sur la Comédie-Italienne et l’Opéra, sur les représentations jouées dans les collèges jésuites et sur les fêtes privées qui accueillent des spectacles.
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[7]
Cette expression est employée en analyse du discours pour décrire les « conditions qui président à un acte de langage ». Dans le cas des critiques de Donneau de Visé, ces conditions sont extralinguistiques, c’est-à-dire que les énoncés produits renvoient à un univers de référence qui existe en dehors du discours et qui est, dans ce cas, un environnement de connaissances partagées entre le rédacteur et le lecteur du mensuel : voir P. Charaudeau et D. Maingueneau (dir.), Dictionnaire d’analyse du discours, Paris, Éd. du Seuil, 2002, p. 533 sq.
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[8]
On notera que le terme spectateur n’est pas employé.
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[9]
La condamnation des figures du censeur et du satirique est illustrée par ailleurs dans le mensuel, notamment en février 1678 dans un poème allégorique, Relation du combat de la louange et de la satyre (p. 269 sq.).
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[10]
Mercure galant, janvier 1685 (Lyon, Th. Almaury), p. 234-235.
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[11]
Les rares exceptions où il est question d’un individu concernent des personnalités politiques ou des « spécialistes » de la littérature dramatique, mais pas de la représentation ; c’est notamment le cas d’une remarque sur l’estime de Pellisson pour la tragédie Zélonide Princesse de Sparte de l’abbé Genest (juillet 1682).
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[12]
Cette pièce ne sera pas programmée en 1691. Elle sera finalement jouée une seule fois en janvier 1696 sous le titre L’Aventurière.
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[13]
Mercure galant, octobre 1691 (Paris, Luyne, Girard et Guérout), p. 298-299.
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[14]
Aristote, Organon. V : Topiques, trad. J. Tricot, Paris, Vrin, 1990, p. 16.
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[15]
Avant la création du Théâtre-Français, on compte quatre registres journaliers : La Grange (1659-1685), La Thorillière (1663-1665), Hubert (1672-1673) et Guénégaud (1673-1680).
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[16]
Ces informations sont aléatoirement complétées par des données sur la distribution, sur la présence exceptionnelle de personnalités curiales, urbaines ou étrangères, ou encore sur les débuts d’acteurs. À partir de la saison 1757-1758, les dépenses seront définitivement consignées dans un registre à part, et à partir de 1765 la distribution sera systématiquement notée dans le registre des feux. Tous ces registres sont numérisés et consultables à l’adresse suivante : http://cfregisters.org/fr/registres/index.html.
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[17]
Les registres La Grange, en revanche, sont demeurés dans la famille de ce dernier jusqu’en 1785. Voir à ce sujet S. Chevalley, Note sur La Grange et son registre, Genève, Minkoff, 1972.
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[18]
Certaines comédies en trois actes sont jouées en début de soirée, alors que d’autres se voient octroyer la place de la grande pièce. La majorité des comédies en trois actes qui sont créées en tant que grandes pièces se retrouve généralement dans le répertoire des petites pièces une fois la période de création passée.
-
[19]
Les reprises ne sont que très exceptionnellement annoncées. Dans la période sondée, c’est le cas de deux pièces avec divertissement : L’Inconnu (septembre 1680) et Andromède (juillet 1682). Si ces pièces comprennent des ornements qui peuvent justifier le commentaire, le nom des auteurs (Th. Corneille et J. Donneau de Visé d’une part, P. Corneille d’autre part) paraît constituer un indice plus plausible : la critique élogieuse renvoyant à une célébration du cercle resserré des auteurs et rédacteurs en lien avec le périodique.
-
[20]
Sur les comédiens-poètes à la Comédie-Française, voir les travaux de J.-M. Hostiou, notamment « Le théâtre mineur d'une institution majeure : la production des comédiens-poètes à la Comédie-Française (1680-1743) », dans R. Jomand-Baudry et Chr. Bahier-Porte (dir), Écrire en mineur au XVIIIe siècle, Paris, Desjonquères, 2009, p. 349-375.
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[21]
La moyenne est de 569 livres pour la décennie 1680 et 742 livres pour la décennie 1690.
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[22]
L’Homme à bonnes fortunes, comédie en cinq actes (2200 livres, janvier 1686), La Coquette et la FaussePrude, comédie en cinq actes (2085 livres, décembre 1686).
-
[23]
LeCarnaval de Venise, comédie héroïque (2763 livres, décembre 1690), La Foire Saint-Germain, comédie en un acte avec divertissement (2026 livres, janvier 1696), La Famille à la mode, comédie en cinq actes (2085 livres, décembre 1699), Les Curieux de Compiègne, comédie en un acte avec divertissement (2085 livres, octobre 1698).
-
[24]
Polyxène, tragédie en 5 actes (4431 livres, février 1696).
- [25]
-
[26]
En 1695, un maçon gagne 15 sous par jour, ce qui équivaut à 195 livres par année s’il travaille 5 jours sur 7.
-
[27]
En août 1682, il est pourtant mentionné dans le même périodique que le Grand Dauphin est allé à la Foire Saint-Laurent avant d’assister à la reprise d’Andromède de P. Corneille (Mercure galant, août 1682, p. 187).
-
[28]
Voir la Préface du Nouveau Mercure galant, décembre 1677.
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[29]
Le prix des places varie beaucoup sur la période. Dans les années 1680-1690, au simple, c’est-à-dire au prix normal, un billet individuel au parterre coûte 15 sous, une place sur le théâtre ou une place individuelle dans les premières loges coûte 3 livres. Au double, la place au parterre est 1.10, la place sur le théâtre revient à 5.10 et les premières loges sont généralement louées entières au prix de 44 livres.
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[30]
Il s’agit de deux pièces avec divertissement, Les Curieux de Compiègne (octobre 1698) et La Foire Saint-Germain (janvier 1696), et d’une comédie en 5 actes, La Famille à la mode (décembre 1699).
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[31]
LeChevalier à la mode (octobre 1687), L’Été des coquettes (juillet 1690), Les Bourgeoises à la mode (novembre 1692), Le Tuteur (juillet 1695), Les Vendanges de Suresnes (octobre 1695), Le Moulin de Javelle (juillet 1696), Les Vacances (octobre 1696), Le Mari retrouvé (octobre 1698).
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[32]
En terme de contenu et d’intérêt, Le Chevalier à la mode, premier grand succès public du jeune sociétaire, est la seule pièce qui attire véritablement l’attention avec un long commentaire élogieux au moment de la création en octobre 1687 et par des remarques attestant le succès continu de la pièce et renvoyant à cette réussite initiale, lorsqu’une nouvelle pièce du même auteur est créée en janvier 1688.
Vous serez surprise quand je vous dirai que les deux troupes de comédiens français, ayant eu ordre du roi de se joindre ensemble, ceux de l’Hôtel ont cédé leur lieu aux Italiens, et jouent présentement tous les jours sur le Théâtre du Faubourg S. Germain avec ceux de Guénégaud. Cette union ne peut qu’augmenter les nombreuses assemblées qu’on y a vues depuis fort longtemps. [1]
2Cette courte dépêche du Mercure galant datée du 31 août 1680 montre que le périodique de Jean Donneau de Visé entend tenir une chronique théâtrale au plus près de l’actualité : l’injonction du roi aux comédiens date en effet du 18 août et la première représentation de cette « nouvelle » troupe a eu lieu le 25 août. Ainsi insérée dans le flot continu des nouvelles mensuelles, cette annonce traite la fusion des théâtres parisiens comme une circonstance aussi étonnante pour le public que bénéfique pour l’avenir du Théâtre Guénégaud. Pour être brève, cette déclaration n’est pas moins symptomatique de la manière dont a pu être perçue la création de la première institution théâtrale française. Présentée comme un fait marquant en raison de la surprise qu’elle suscite auprès des lecteurs du mensuel et par-delà des amateurs des spectacles parisiens, la réunion des acteurs est décrite comme une entreprise susceptible d’augmenter la participation du public et, implicitement, les recettes du théâtre. La Comédie-Française se voit d’emblée légitimée par la presse périodique et soutenue par la réaction immédiate et quantifiable des spectateurs du théâtre. Ce que confirme le second commentaire en septembre 1680 :
L’unique troupe des Comédiens-Français continue à jouer tous les jours, et les grandes assemblées qu’elle attire au Théâtre de Guénégaud font assez voir combien elle est estimée. [2]
4Fort instructifs, ces passages du Mercure galant invitent à considérer le caractère événementiel d’une soirée théâtrale et la dimension économique [3] qui y est associée comme critères d’évaluations des productions scéniques. Comme semble l’indiquer Donneau de Visé, ces critères paraissent indissociables d’un imaginaire qui envisage les spectateurs comme un instrument de valeur et de mesure. Cette hypothèse semble d’autant plus riche que l’on observe, dès la seconde moitié du XVIIe siècle en France, la présence d’une critique théâtrale justifiée par le goût particulier et l’impression individuelle. Est-ce à dire qu’au moment où l’on assisterait à l’émergence d’une subjectivité critique fondée sur une appréciation qualitative et singulière se profilerait par ailleurs une critique d’abord guidée par la présence d’une assemblée nombreuse qui devient le préalable à une interprétation de la valeur d’un spectacle ? Afin d’apprécier la plausibilité de cette hypothèse, je procéderai à la lecture de deux types de corpus qui répercutent les créations de la Comédie-Française à ses débuts à partir d’une réception où l’évaluation paraît être une affaire de probabilité : le Mercure galant et les registres journaliers du théâtre.
5Observer le traitement du spectateur dans le Mercure galant et dans les registres journaliers suppose au préalable d’interroger la nature même de ces corpus. Comment les objectifs propres à ces archives nous permettent-ils en effet de les considérer sous l’angle d’une production liée à l’émergence d’une critique non théoricienne ? La presse et les registres portent les traces de la réception d’une pièce au plus près de l’événement ; la place du spectateur y est centrale ; ce dernier est moins un sujet d’énonciation – ce serait le cas pour les œuvres à vocation mémorielle comme les mémoires ou les correspondances privées – qu’une preuve au sein d’un discours informatif et critique (c’est le cas dans la presse périodique) ou un élément descriptif permettant de produire des calculs, autrement dit un élément minimal de description – une donnée chiffrée. Cette manière de se servir du public laisse percevoir la mise en œuvre d’un système de valeurs en train de se constituer autour de l’événement [4] que représente une soirée théâtrale et du potentiel économique qui y est associé. Envisagés ainsi, ces corpus témoignent d’ambitions critiques au sens minimal, c’est-à-dire qu’ils portent la trace d’une manière de lire et de restituer un spectacle et ses résultats.
L’assemblée théâtrale dans le Mercure galant : entre stratégies discursives et preuve factuelle
6Dès sa création, le Mercure galant intègre aux nouvelles variées de l’actualité militaire, académique et curiale, des chroniques de la vie mondaine et culturelle dans lesquelles prennent place des commentaires sur les divertissements théâtraux. Ces passages, qui ne forment pas une rubrique suivie et tendent même à disparaître au fil des ans [5], portent sur les pièces jouées à la Comédie-Française et, plus particulièrement sur les créations [6]. Inscrite dans un programme éditorial qui s’institue sous la tutelle de la galanterie, l’actualité théâtrale se soumet à un modèle normatif qui exige modération et célébration. Le commentaire sur les spectacles doit aussi répondre à la logique de fidélisation qui innerve l’ensemble des nouvelles de la presse. Orientée au surplus par les circonstances de l’histoire et des événements autant que par les impératifs de la périodicité, la critique s’insère dans une dynamique éditoriale qui impose des modalités de communication stéréotypées et tactiques. Dans cet ensemble, le public théâtral sert à scénographier l’information et les remarques.
7L’on rencontre deux types de discours dans la presse au sujet des créations théâtrales : l’annonce prochaine d’une représentation et les premières réactions à un spectacle. Cette seconde catégorie s’accompagne parfois d’un commentaire plus ou moins élaboré. Dans l’un et l’autre cas, le Mercure galant se sert du public comme d’un capteur d’attention qui permet de « visualiser » l’information : « on dit qu’elle est remplie de spectacle d’une invention très singulière » (sur La Pierre philosophale de Thomas Corneille et Donneau de Visé, 1681) ; « on a couru en foule voir Mr Baron » (sur la Cléopâtre de La Chapelle, 1681) ; « l’on n’a rien vu depuis longtemps qui ait eu un aussi grand succès » (sur Andronic de Campistron, février 1685) ; « on y rit depuis le commencement jusques à la fin » (sur L’Usurier, février 1685) ; « Plus on voit cette pièce, plus on la veut voir » (sur LeChevalier à la Mode de Dancourt, octobre 1687) ; « [cette pièce a] tiré des larmes à quantité de beaux yeux » (sur Cléopâtre, 1681). Par l’emploi répété du on inclusif, par l’usage quasi systématique des verbes d’action et de sensation (rire, dire, voir, pleurer, applaudir) et par le recours à des expressions telles que « faire du bruit », Donneau de Visé met en scène des réactions sommaires et stéréotypées qui placent le public en situation de communication [7]. Cette voix plurielle et abstraite désignée par quelques syntagmes [8], dont « l’assemblée » (le terme le plus fréquent) et « Paris » (employé par métonymie), agit comme un élément de médiation et d’autorité.
8Traité comme un acteur central du monde théâtral et comme un auteur de commentaires généraux, le public neutralise ce que pourrait avoir de trop singulier la voix du critique galant qui s’oppose explicitement à l’attitude chagrine du censeur [9]. Les cas nombreux où Donneau de Visé annonce ou commente ses propres créations indiquent que la médiation le protège peut-être des accusations de partialité et d’intérêt personnel. La voix publique paraît répondre à l’exigence de construire un discours crédible. Au sujet de la comédie de L’Usurier, dont il est l’auteur avec Thomas Corneille, Donneau de Visé affirme au moment de l’annonce de la pièce :
le hasard m’a fait trouver à une lecture que l’auteur en a faite ; mais l’on y découvre, sans choquer personne, et en marquant seulement les vices en général, tous les secrets de la banque, c’est-à-dire, à l’égard de ceux qui prêtent, et qui empruntent de l’argent à usure ; car à l’égard de ce qui touche le commerce, on n’en parle point du tout. [10]
10En cachant son intérêt personnel par une nouvelle mise en scène collective qui l’exclut comme auteur pour l’inclure comme l’un des récepteurs présents à une lecture publique, le rédacteur ne fait que confirmer la méthode stratégique qu’il emploie, celle de dissimuler sa voix derrière la pluralité. Ce retrait passe au surplus par un jeu d’identification entre le lectorat visé par la presse et le public mis en scène.
11Au cours des premières années de parution du Mercure galant, Donneau ne cesse de recourir à des stratégies destinées à provoquer l’adhésion, qu’il décline à partir d’un jeu d’identification entre son ethos et celui de ses lecteurs. La critique théâtrale s’inscrit tout naturellement dans cette dynamique, comme le montrent les scénographies inclusives imaginées par le rédacteur. Celles-ci fabriquent de la complicité ou du désir autour d’un événement, celui de la soirée théâtrale, et permettent aux lecteurs du mensuel de s’identifier à ce moment et d’adhérer au discours qui le produit. À partir des réactions spontanées des spectateurs entendus collectivement [11] se cristallisent ainsi quelques arguments topiques justifiés par ce jeu d’identification entre le public, le rédacteur et les lecteurs qui forment une même communauté. L’autorité incontestable de cette voix publique a donc toute légitimité pour désigner les causes d’un succès et, par opposition, d’un échec. Ainsi pensé comme un élément de captation, de crédibilité et d’identification, le public ne vient pas seulement valider le bien-fondé d’un jugement critique ; il en révèle de surcroît la dynamique normative. Dans cette perspective, il apparaît bien comme un enjeu du discours argumentatif, car il crée l’illusion d’une distanciation objective de la part du critique.
12Le long commentaire par lequel Donneau de Visé annonce en 1691 sa pièce L’Aventurier [12] éclaire la valeur accordée au public théâtral au sein du périodique :
Je suis même persuadé qu’on ne peut faire d’ouvrages qui soient applaudis généralement. Chacun de ceux qui paraissent, étant faits selon le genre particulier de son auteur, ne peut être que d’un goût, et rien n’est plus différent que les goûts d’une nombreuse assemblée. Ainsi ceux dont les ouvrages ont un grand succès ne doivent pas croire pour cela qu’ils aient une approbation générale. Cependant ils ont gain de cause, parce que la pluralité des voix l’emporte dans les tribunaux du public, comme dans ceux de la justice, où lorsque cette pluralité de voix se rencontre, les juges sont obligés de signer un arrêt, quoiqu’ils aient été d’un sentiment opposé ; ou si vous voulez, il en est des ouvrages de théâtre comme de l’or qu’on est obligé de peser. S’il fait trébucher d’un grain, il doit avoir cours comme étant de poids. On peut dire la même chose lorsque la pluralité de voix se trouve pour un ouvrage. Il est reçu du public, et passe dans l’empire des Lettres comme un ouvrage qui a cours. [13]
14Le rédacteur opère dans cet extrait une distinction essentielle entre le jugement particulier et l’approbation générale. En reconnaissant d’abord l’hétérogénéité constitutive d’une assemblée théâtrale pour mieux affirmer le pouvoir, même relatif, de la pluralité, Donneau de Visé fait preuve de lucidité et il explique ainsi pourquoi il donne pleine autorité à la voix collective. Par l’exemple du tribunal, il associe la valeur critique du public au jugement d’opinion qui constitue l’une des formes du probable, au sens rhétorique et aristotélicien du terme. Au sein d’une entreprise de persuasion, les vérités d’opinion fondent le raisonnement dialectique et font partie de la construction d’une preuve vraisemblable. Dans les Topiques, Aristote affirme que « sont probables les opinions qui sont reçues par tous les hommes ou par la plupart d’entre eux ou par les sages, et parmi ces derniers soit par tous, soit par la plupart, soit par les plus notables et les plus illustres [14] ». Cette méthode de raisonnement est au service d’un discours dialogique et spontané comme la conversation entre honnêtes hommes qui est l’« hypergenre » du mensuel. La réponse à la diversité, c’est donc la doxa, comme critère de jugement plausible et parfaitement adapté à la dynamique conversationnelle et au lecteur du Mercure galant. Cette logique s’oppose du reste à l’impression et à l’appréciation singulière, puisque le jugement d’opinion sert de preuve au sein d’un système vraisemblable. La métaphore monétaire choisie corrobore cette proposition, en ceci qu’elle vient illustrer comment la valeur d’une œuvre se construit par accumulation des voix. Cette longue glose sur L’Aventurier apparaît donc comme une clef de lecture pour comprendre la vision instrumentalisée du public dans le Mercure galant. Ainsi fondée sur la probabilité, la critique du mensuel montre qu’elle s’appuie sur l’autorité du sens commun. Or, si le public se confond avec un marqueur de plausibilité raisonnable dans la presse et conserve une dimension qualitative, il devient dans les registres journaliers la principale composante d’un calcul quantitatif.
De la preuve à la donnée : les registres journaliers de la Comédie-Française
15Les registres journaliers de la Comédie-Française s’inspirent des manuscrits tenus par les quelques comédiens qui dans les décennies précédentes avaient décrit les affaires courantes et la vie quotidienne de leur troupe [15]. Ces documents appartiennent à l’origine à une pratique d’écriture journalière et personnelle, et ne souscrivent pas à un modèle autorisé. Ces registres de comédiens, dont le plus célèbre est celui de La Grange, semblent revêtir trois fonctions, qui semblent encore nécessaires au moment de la fusion des troupes en 1680 : justifier l’existence d’un corps de métier par un témoignage portant quasi exclusivement sur des éléments pratiques et administratifs ; conserver une trace précise des données comptables afin d’avoir des preuves matérielles et objectives en cas de litiges ; inscrire l’activité théâtrale et la vie de la troupe au sein d’un calendrier suivi. Le contenu des registres journaliers de la Comédie-Française montre du reste que la valeur testimoniale et juridique de ces documents repose sur des enjeux économiques, puisque le registre consigne les recettes par catégories de places et les dépenses par poste, du moins pendant la période qui nous occupe [16]. Si les registres journaliers suivent les traces des registres des comédiens, ils ne répondent plus à une initiative personnelle et privée [17]. Ils témoignent plutôt d’une démarche collective qui vise à se munir d’une protection juridique, laquelle est indissociable d’une volonté de contrôler la gestion des spectacles et la programmation saisonnière à partir d’une évaluation chiffrée au quotidien. Ces dossiers administratifs ont ainsi un impact direct sur les choix de pièces et la constitution du répertoire. Plus qu’une donnée brute, le registre journalier sert donc des ambitions commerciales qui, outre le fait qu’elles sont déterminantes pour l’institution théâtrale, nous permettent de mesurer l’importance d’une conception du spectateur comme consommateur de spectacles.
16L’analyse du traitement des créations dans les deux archives sélectionnées passe initialement par une description chiffrée de l’une et l’autre source. Les registres nous apprennent d’abord que la période 1680-1700 enregistre 195 créations réparties assez équitablement entre les petites pièces – comédies en un acte et en trois actes – et les grandes pièces – comédies en trois [18] ou cinq actes et tragédies (Annexe I). Sur ces 195 pièces, 34 créations sont commentées dans le Mercure galant, ce qui représente seulement 17 % de la production nouvelle [19] et 80 % des commentaires sont publiés dans la décennie 1680-1690. En outre, 85 % de la chronique du périodique porte sur les grandes pièces (Annexe II), qui, elles, ne représentent que 57 % des créations de cette période. Sur les 24 créations entre 1680 et 1700 qui seront programmées plus de 200 fois, on compte une seule tragédie, l’Andronic de Campistron, pour 11 comédies d’ouverture et 12 divertissements de clôture, dont plus de 60 % sont produits par des comédiens de la troupe (Dancourt, Hauteroche, Baron) [20]. Sur cet ensemble de succès au long cours, 25 % des pièces seulement sont annoncées ou commentées dans le Mercure galant et ne correspondent jamais à des pièces courtes avec divertissement, c’est-à-dire agrémentées de musique et de danse (Annexe III). Quant aux représentations qui reçoivent une approbation publique immédiate et distinctive par des recettes supérieures à 2000 livres, c’est-à-dire trois fois plus élevées que la moyenne à cette période [21], les chiffres confirment le succès du registre comique et des pièces courtes avec ornements : deux pièces de Michel Baron [22], quatre pièces de Dancourt [23] et une seule tragédie, celle d’Antoine de La Fosse d’Aubigny [24]. Au sujet de ces réussites publiques, le Mercure galant ne propose qu’un long développement sur la seconde soirée d’ouverture : Polyxène de La Fosse en 1696, tragédie combinée avec La Foire Saint-Germain. Ces deux dernières pièces ne résisteront pas au temps, mais elles sont produites autour de circonstances d’actualité non seulement propices à une réussite immédiate, mais aussi pertinentes pour le rédacteur du Mercure galant, qui reprend ponctuellement sa critique théâtrale au sujet de la Comédie-Française après des années de silence quasi total.
Coup de projecteur sur la soirée du 5 février 1696
17La soirée réunissant Polyxène et LaFoire Saint-Germain présente la recette la plus élevée des deux décennies, soit 4431 livres. Ce chiffre a de quoi surprendre, si l’on considère que la recette moyenne sur ces vingt ans est d’environ 650 livres. La consultation des registres fournit une première explication, car à l’emplacement où l’on trouve en règle générale les deux titres successifs est indiqué : « Monseigneur nous a honorés de sa présence à Polyxène et LaFoire Saint-Germain et a donné cent louis d’or à la compagnie [25] ». L’intitulé du feuillet montre que la présence du Grand Dauphin constitue le principal événement de cette séance. Ce cadeau de 1400 livres permet à chaque membre de la troupe (26 comédiens) de toucher 151 livres pour le 5 février 1696 uniquement [26]. La présence de cette personnalité royale justifie, par ailleurs, la description de cette soirée dans la presse. On nous apprend que la salle est décorée pour sa venue et le compliment de Dancourt préparé pour l’occasion est cité dans son intégralité. Le rédacteur prend même la peine de souligner qu’il s’agit de la première visite du Grand Dauphin à la Comédie-Française [27] et il précise que jusqu’à cette date le Dauphin avait plutôt privilégié l’invitation fréquente des comédiens de la troupe à Versailles. Le déplacement du seul héritier légitime du royaume au théâtre n’est évidemment pas anodin pour le théâtre parisien en général, ni pour les rédacteurs du Mercure galant en particulier. Le fils du roi cherche alors à affirmer son autorité en matière de politique culturelle dans la capitale, à un moment où son père a délaissé les spectacles urbains. Symptomatiquement, c’est à cette période qu’est relancée provisoirement la critique théâtrale du mensuel, aussi bien que l’activité de poète dramatique de Donneau de Visé et de son associé Thomas Corneille : après une pause de près de dix ans, ils proposent quatre pièces à la Comédie-Française en 1695-1696.
18Cet exemple montre combien la chronique théâtrale du périodique, voire la production théâtrale des deux associés, a pu être fluctuante et sur certains points contradictoire. Dans la décennie 1670 et au début des années 1680, la critique des spectacles est fréquente au point de tendre vers une rubrique normative suivie et bien encadrée par des lieux communs et des stéréotypes propres aux discours de médiatisation. Or, à la fin des années 1680 et tout au long des années 1690, le commentaire se raréfie et il se tourne le plus souvent vers les spectacles musicaux. L’actualité théâtrale paraît répondre plus ostensiblement à des opportunités ou à des impératifs politiques et économiques à peine camouflés : on sait notamment que le Grand Dauphin, dès 1677 protecteur désigné du périodique [28], est grand amateur d’opéras, de ballets et de tragédies lyriques. La représentation du 5 février 1696 éclaire cette dynamique à l’œuvre dans le Mercure galant, puisque la présence de ce grand personnage réactive ponctuellement la critique des pièces du Théâtre-Français. Ces observations font aussi ressortir à quel point le mensuel répond à une approche stratégique et ponctuelle qui n’est pas sans lien avec la carrière polygraphique des principaux rédacteurs. En comparaison, la mention de la présence exceptionnelle du Grand Dauphin dans le registre se trouve soigneusement consignée et relève d’une information qualitative qui aura une incidence immédiate sur la programmation de la troupe : le registre nous apprend que le 28 février les comédiens sont invités à Versailles pour renouveler la représentation du 5 février.
19Ce type de circonstances exceptionnelles scande la saison, pendant la période qui nous occupe et au-delà, mais ce sont les données quantitatives quotidiennes qui forment le baromètre objectif de la programmation. C’est en effet en fonction d’une moyenne à respecter et d’un équilibre à trouver entre le répertoire d’origine, les nouvelles productions et les théâtres concurrents que l’institution théâtrale construit sa logique de programmation. Dans cette optique, l’élément descriptif que représente le public à travers les recettes journalières constitue une information de première importance. En témoigne la carrière de Florent Carton, dit Dancourt, qui incarne objectivement un auteur à succès.
Florent Carton dit Dancourt : une valeur sûre
20Les registres journaliers permettent de souligner que dès la naissance de l’institution, la bien-nommée « Maison de Molière » valorise le registre comique produit par des comédiens-poètes. Les chiffres des registres témoignent en outre de l’attention portée aux pièces avec ornements. Celles-ci paraissent favoriser l’adhésion du public et permettent de concurrencer les autres salles, dont l’Opéra, la Comédie-Italienne et la Foire. Au reste, ces divertissements courts et fréquemment créés à partir d’un canevas simple permettent de multiplier les créations. Ce faisant, la troupe répond, même superficiellement, à l’appel de la nouveauté et se donne les moyens de louer plus fréquemment l’espace entier des premières loges, dont le coût peut s’élever pour une production nouvelle [29]. Dans la période sondée, les productions de Dancourt soutiennent cette dynamique. Avec un total de 35 créations, dont 57 % de divertissements en un acte, ce comédien-poète arrive loin devant les deux autres auteurs de productions nouvelles les mieux représentés, Michel Baron (8 créations) et Jean-Galbert de Campistron (10 créations). Le sociétaire est également le seul poète à réaliser des recettes de créations dépassant les 2000 livres avec plusieurs pièces [30], et 30 % de ses créations de la période sont jouées plus de 200 fois jusqu’en 1793 avec une large majorité de pièces en un acte (80 %) [31]. Pendant les années 1680-1700, la production du poète, qui débute pourtant sa carrière dans la troupe en 1685 seulement, s’impose avec des créations majoritairement courtes qui viennent considérablement grossir les recettes saisonnières (Annexe IV) au point de suivre de près les vedettes du répertoire patrimonial (Annexe V).
21Les dossiers administratifs du Théâtre-Français éclairent la situation favorable de Dancourt en témoignant d’une adhésion immédiate, continue et massive de la part des spectateurs. Matériellement aussi bien que symboli-quement, le poète-comédien apparaît comme un héritier légitime de Molière. La critique du Mercure galant rend d’ailleurs justice à cette réussite publique et institutionnelle. En faisant apparaître à six reprises le nom du dramaturge, le rédacteur du mensuel accorde en effet, dans la période 1680-1700, près de 35 % de ses remarques à cet auteur [32]. En comparaison, les pièces de Donneau et de Thomas Corneille représenteront 25 % de la chronique théâtrale du périodique. L’on remarque cependant qu’à la différence de la critique des pièces de Dancourt, celles des deux polygraphes du Mercure galant seront plus longuement commentées, alors qu’aucune des créations de ces deux auteurs ne dépasse les vingt représentations (Annexe V) dans les années 1680-1700. C’est dire à quel point le jugement d’opinion dans le Mercure galant ne résiste pas dans les faits à l’intérêt personnel.
22Le Mercure galant se construit autour d’une volonté de définir une critique théâtrale qui s’autorise du jugement d’opinion ; les registres quant à eux forment un ensemble de données quantitatives et sérielles qui reposent sur le calcul. On voit clairement qu’entre les deux sources la probabilité rhétorique évolue vers la probabilité mathématique. Le recours à ce modèle argumentatif dans le Mercure galant s’applique à la logique même du périodique qui dépend objectivement de l’adhésion du public. Comparable au lecteur avec qui il est confondu, le public est imbriqué dans une stratégie de légitimation de la presse et de l’activité critique qu’elle accueille. La voix du plus grand nombre dissimule ainsi la présence singulière et intéressée du rédacteur derrière une communauté globale et englobée par le discours. Dans les registres, le calcul des spectateurs permet plutôt de visualiser des résultats et d’orienter la programmation de l’institution. Donnée chiffrée permettant des évaluations objectives, le public devient un élément déterminant pour les choix esthétiques privilégiés par la troupe. Ainsi, le registre apparaît en quelque sorte comme un dossier de consultation, capable de justifier un jugement critique pragmatique et empirique. Cette instrumentalisation du public qui progresse en abstraction et en précision dans les registres de la Comédie-Française apparaît donc comme un moyen de rationaliser la critique dramatique non théoricienne par l’établissement d’un système de valeur dans lequel la règle est remplacée par le probable, plutôt que par l’impression et l’appréciation subjective.
Annexe I
Annexe II
Annexe III
Annexe IV
Annexe V
Notes
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[1]
Mercure galant, août 1680 (Paris, Au Palais), p. 332-333.
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[2]
Ibid., septembre 1680, p. 346.
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[3]
Sur ce sujet vaste, voir notamment les travaux de M. Poirson, et plus particulièrement Spectacle et économie à l’âge classique (XVIIe-XVIIIe siècles), Paris, Classiques Garnier, 2011.
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[4]
Il importe de préciser que le terme événement, dès lors qu’il est employé dans la presse périodique, pose un problème théorique et historiographique, car son usage actuel dépasse celui qui lui était attribué au XVIIe siècle . S’il réfère à une « aventure remarquable » (Dictionnaire de l’Académie française, 1694) ou à des « choses grandes, surprenantes et singulières qui arrivent dans le monde » (Dictionnaire universel de Furetière, 1690), l’événement s’inscrit aussi et surtout dans une dynamique d’actualités permanentes et figure au cœur d’un discours de médiatisation en train d’émerger. L’événement peut renvoyer à un épisode d’actualité qui laisse une trace, si infime soit-elle. Ainsi, la réception des spectateurs au théâtre permet de décrire la soirée théâtrale comme un événement, puisqu’elle a un impact immédiat, visible et transmissible. Pour approfondir ces questions, voir notamment Que se passe-t-il ? Événements, sciences humaines et littérature, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2004.
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[5]
Dès la fin des années 1680, la chronique théâtrale du Mercure galant occupe une place de moins en moins significative, comme l’ensemble de l’actualité culturelle publiée dans le périodique. Il faudra attendre la fin des années 1710 (direction de François Buchet) pour voir réapparaître une critique dramatique suivie. À partir de la création du Mercure de France en 1724, le relevé de l’actualité théâtrale devient même une rubrique divisée par salles de spectacle et présente dans la table des matières sous l’intitulé « spectacles ».
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[6]
Le périodique est également ponctué de remarques sur la Comédie-Italienne et l’Opéra, sur les représentations jouées dans les collèges jésuites et sur les fêtes privées qui accueillent des spectacles.
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[7]
Cette expression est employée en analyse du discours pour décrire les « conditions qui président à un acte de langage ». Dans le cas des critiques de Donneau de Visé, ces conditions sont extralinguistiques, c’est-à-dire que les énoncés produits renvoient à un univers de référence qui existe en dehors du discours et qui est, dans ce cas, un environnement de connaissances partagées entre le rédacteur et le lecteur du mensuel : voir P. Charaudeau et D. Maingueneau (dir.), Dictionnaire d’analyse du discours, Paris, Éd. du Seuil, 2002, p. 533 sq.
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[8]
On notera que le terme spectateur n’est pas employé.
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[9]
La condamnation des figures du censeur et du satirique est illustrée par ailleurs dans le mensuel, notamment en février 1678 dans un poème allégorique, Relation du combat de la louange et de la satyre (p. 269 sq.).
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[10]
Mercure galant, janvier 1685 (Lyon, Th. Almaury), p. 234-235.
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[11]
Les rares exceptions où il est question d’un individu concernent des personnalités politiques ou des « spécialistes » de la littérature dramatique, mais pas de la représentation ; c’est notamment le cas d’une remarque sur l’estime de Pellisson pour la tragédie Zélonide Princesse de Sparte de l’abbé Genest (juillet 1682).
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[12]
Cette pièce ne sera pas programmée en 1691. Elle sera finalement jouée une seule fois en janvier 1696 sous le titre L’Aventurière.
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[13]
Mercure galant, octobre 1691 (Paris, Luyne, Girard et Guérout), p. 298-299.
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[14]
Aristote, Organon. V : Topiques, trad. J. Tricot, Paris, Vrin, 1990, p. 16.
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[15]
Avant la création du Théâtre-Français, on compte quatre registres journaliers : La Grange (1659-1685), La Thorillière (1663-1665), Hubert (1672-1673) et Guénégaud (1673-1680).
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[16]
Ces informations sont aléatoirement complétées par des données sur la distribution, sur la présence exceptionnelle de personnalités curiales, urbaines ou étrangères, ou encore sur les débuts d’acteurs. À partir de la saison 1757-1758, les dépenses seront définitivement consignées dans un registre à part, et à partir de 1765 la distribution sera systématiquement notée dans le registre des feux. Tous ces registres sont numérisés et consultables à l’adresse suivante : http://cfregisters.org/fr/registres/index.html.
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[17]
Les registres La Grange, en revanche, sont demeurés dans la famille de ce dernier jusqu’en 1785. Voir à ce sujet S. Chevalley, Note sur La Grange et son registre, Genève, Minkoff, 1972.
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[18]
Certaines comédies en trois actes sont jouées en début de soirée, alors que d’autres se voient octroyer la place de la grande pièce. La majorité des comédies en trois actes qui sont créées en tant que grandes pièces se retrouve généralement dans le répertoire des petites pièces une fois la période de création passée.
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[19]
Les reprises ne sont que très exceptionnellement annoncées. Dans la période sondée, c’est le cas de deux pièces avec divertissement : L’Inconnu (septembre 1680) et Andromède (juillet 1682). Si ces pièces comprennent des ornements qui peuvent justifier le commentaire, le nom des auteurs (Th. Corneille et J. Donneau de Visé d’une part, P. Corneille d’autre part) paraît constituer un indice plus plausible : la critique élogieuse renvoyant à une célébration du cercle resserré des auteurs et rédacteurs en lien avec le périodique.
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[20]
Sur les comédiens-poètes à la Comédie-Française, voir les travaux de J.-M. Hostiou, notamment « Le théâtre mineur d'une institution majeure : la production des comédiens-poètes à la Comédie-Française (1680-1743) », dans R. Jomand-Baudry et Chr. Bahier-Porte (dir), Écrire en mineur au XVIIIe siècle, Paris, Desjonquères, 2009, p. 349-375.
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[21]
La moyenne est de 569 livres pour la décennie 1680 et 742 livres pour la décennie 1690.
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[22]
L’Homme à bonnes fortunes, comédie en cinq actes (2200 livres, janvier 1686), La Coquette et la FaussePrude, comédie en cinq actes (2085 livres, décembre 1686).
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[23]
LeCarnaval de Venise, comédie héroïque (2763 livres, décembre 1690), La Foire Saint-Germain, comédie en un acte avec divertissement (2026 livres, janvier 1696), La Famille à la mode, comédie en cinq actes (2085 livres, décembre 1699), Les Curieux de Compiègne, comédie en un acte avec divertissement (2085 livres, octobre 1698).
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[24]
Polyxène, tragédie en 5 actes (4431 livres, février 1696).
- [25]
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[26]
En 1695, un maçon gagne 15 sous par jour, ce qui équivaut à 195 livres par année s’il travaille 5 jours sur 7.
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[27]
En août 1682, il est pourtant mentionné dans le même périodique que le Grand Dauphin est allé à la Foire Saint-Laurent avant d’assister à la reprise d’Andromède de P. Corneille (Mercure galant, août 1682, p. 187).
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[28]
Voir la Préface du Nouveau Mercure galant, décembre 1677.
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[29]
Le prix des places varie beaucoup sur la période. Dans les années 1680-1690, au simple, c’est-à-dire au prix normal, un billet individuel au parterre coûte 15 sous, une place sur le théâtre ou une place individuelle dans les premières loges coûte 3 livres. Au double, la place au parterre est 1.10, la place sur le théâtre revient à 5.10 et les premières loges sont généralement louées entières au prix de 44 livres.
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[30]
Il s’agit de deux pièces avec divertissement, Les Curieux de Compiègne (octobre 1698) et La Foire Saint-Germain (janvier 1696), et d’une comédie en 5 actes, La Famille à la mode (décembre 1699).
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[31]
LeChevalier à la mode (octobre 1687), L’Été des coquettes (juillet 1690), Les Bourgeoises à la mode (novembre 1692), Le Tuteur (juillet 1695), Les Vendanges de Suresnes (octobre 1695), Le Moulin de Javelle (juillet 1696), Les Vacances (octobre 1696), Le Mari retrouvé (octobre 1698).
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[32]
En terme de contenu et d’intérêt, Le Chevalier à la mode, premier grand succès public du jeune sociétaire, est la seule pièce qui attire véritablement l’attention avec un long commentaire élogieux au moment de la création en octobre 1687 et par des remarques attestant le succès continu de la pièce et renvoyant à cette réussite initiale, lorsqu’une nouvelle pièce du même auteur est créée en janvier 1688.