Je suis reconnaissant envers Emmanuel Guy et Christophe Darmangeat pour leurs commentaires critiques qui vont nous permettre de préciser les enjeux de notre discussion concernant les rapports entre richesses et inégalités sociales. Le débat qui nous occupe peut se résumer dans les questions suivantes : si une société entreprend de stocker des ressources alimentaires sauvages plutôt que de les collecter continument au fil des saisons, l’existence de surplus va-t-elle entraîner la naissance de disparités de richesse entre ses membres ? Et ces inégalités économiques vont-elles engendrer des inégalités de statut social et de pouvoir ? Derrière ces questions, c’est le vieux problème des conditions et des causes de l’émergence des inégalités entre les hommes qui est en jeu. Les conditions économiques sont-elles primordiales pour expliquer la configuration inégalitaire des relations sociales ou devons-nous suspecter l’existence d’autres facteurs tout aussi déterminants, voire plus fondamentaux ?
En cette discussion, il est impératif de préciser ce que l’on a en tête quand on parle d’« inégalités », car ce terme peut désigner des réalités tout à fait hétérogènes. La vie rend les hommes inégaux sous toutes sortes de rapports : âge, sexe, force physique, caractère, etc. À ces inégalités, toutes les sociétés en ajoutent et en entremêlent d’autres, de sorte qu’il n’existe nulle part de société « égalitaire » : inégalités selon le genre, la classe d’âge, le statut donnant des accès distincts aux ressources, au savoir, au prestige et au pouvoir sur autrui…