Notes
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[1]
Julie Van Bogaert remercie la Belgian American Educational Foundation (BAEF) de lui avoir accordé une bourse de la Fondation Francqui, lui permettant de passer une année à l’Université de Californie à Santa Barbara. Pour Patrick Dendale, cette étude s’inscrit dans le projet TOP-BOF-2005 « Intertextualiteit en informatiestromen » [Intertextualité et flux d’information], financé par l’Université d’Anvers.
-
[2]
Par type de justification, Anderson (1986 : 274) entend ce que le locuteur perçoit (visuellement, auditivement...), ce qu’il infère à partir d’indices ou à partir d’autre chose, ou ce à quoi il peut raisonnablement s’attendre.
-
[3]
Guentchéva (1996 : 12) et Plungian (2001 : 350) parlent de « sémantique » ; Lazard (2001 : 360) de “semantic-pragmatic content”.
-
[4]
Cf. Dendale (1991, 1993) ; Kronning (2002) ; Provôt-Olivier (2011), description récemment mise en cause par Rossari (2009).
-
[5]
Pour être plus précis, pour Kronning le conditionnel est un marqueur « mixte », à la fois évidentiel (médiatif) et de modalisation zéro (refus de prise en charge).
-
[6]
Pour des références, voir Dendale (2001b).
-
[7]
Plus tard, la classe des verbes parenthétiques a été élargie à d’autres types de verbes, comme les verbes de communication (on dit, on dirait...) et les verbes d’apparence (sembler, paraître).
-
[8]
Merci à Nancy Decloux de nous avoir fourni cet exemple provenant de son corpus de textes de journaux congolais, réunis dans le cadre du projet TOP-BOF-2005, mentionné en note 1.
1 Depuis l’introduction dans le lexique linguistique anglophone des termes evidential et evidentiality à la fin des années 40 et leur consécration dans les années 80 (cf. Dendale & Tasmowski, 2001 : 339-340), on assiste à une multiplication des études sur le phénomène de l’évidentialité. Malgré – ou en raison de – cet engouement, il n’y a guère de consensus sur les critères à retenir pour accorder à une unité langagière le statut de marqueur évidentiel. Le but de cet article est d’examiner, à la lumière d’une étude récente de K. Boye et P. Harder (2009), les critères de définition d’un marqueur évidentiel proposés dans la littérature et les problèmes qu’ils posent. À travers une sélection limitée d’analyses d’unités linguistiques en français, nous présenterons un aperçu structuré des problèmes auxquels un linguiste est confronté lorsqu’il réfléchit à la constitution du paradigme d’unités et de stratégies langagières susceptibles de relever de l’évidentialité et de recevoir le statut de marqueur évidentiel. Au terme de ce survol, nous argumenterons en faveur d’une définition relative aux objectifs spécifiques du type de recherche envisagée [1].
1. DÉFINITION ET IDENTIFICATION D’UN ÉVIDENTIEL
2 L. Anderson (1986 : 274-275) propose la définition suivante d’un marqueur évidentiel :
- Evidentials show the kind of justification for a factual claim which is available to the person making that claim [...].
- Evidentials are not themselves the main predication of the clause, but are rather a specification added to a factual claim ABOUT SOMETHING ELSE.
- Evidentials have the indication of evidence [...] as their primary meaning, not only as a pragmatic inference.
- Morphologically, evidentials are inflections, clitics, or other free syntactic elements (not compounds or derivational forms).
4 Cette définition combine des critères d’identification de deux types : un critère conceptuel (a), à savoir qu’un évidentiel est une unité langagière qui marque le « type de justification » [2] dont dispose le locuteur pour une assertion, et trois autres critères, qui ont trait au statut grammatical du marqueur évidentiel (d), au mode d’expression (sémantique ou pragmatique) (c) et au statut, discursif, informationnel ou « énonciatif », de l’évidentiel par rapport au contenu prédiqué de l’énoncé (b).
5 Il semble y avoir consensus dans la littérature pour prendre comme critère premier de définition de l’évidentialité et d’identification d’un marqueur évidentiel, une caractérisation conceptuelle [3] comme celle sous (a) – ou l’une de ses variantes (cf. § 2.1) – (Boye & Harder, 2009 : 11). Il y a moins de consensus, comme nous verrons (cf. § 3-5), sur les trois autres critères.
2. LE CRITÈRE CONCEPTUEL : INDICATION DU TYPE DE SOURCE D’INFORMATION
2.1. Évidentialité au sens large et au sens restreint
6 Le critère premier pour qualifier de marqueur évidentiel telle ou telle unité langagière est qu’elle indique ce que L. Anderson appelle le « type de justification » pour l’assertion. La plupart des auteurs préfèrent parler de « source de l’information » (Bybee 1985 ; Palmer 1986) ; d’autres, de « base » (grounds) (Frawley, 1992 : 409), « type de source épistémique » (Kronning, 2003 : 134), « sources du savoir » (Dendale & Tasmowski 1994), « modes de savoir » (Chafe, 1986 : 263), « opération de création d’information » (Dendale, 1994 : 25), « type ou mode d’accès au savoir » (Dendale, 2000 : 160 ; Kronning ce volume), « manière d’acquérir de l’information » (Aikhenvald, 2004 : 3, 63-64), ou plus généralement d’“evidence” ou “type of evidence” (Anderson, 1986 : 274), terme difficile à traduire simplement en français.
7 Ce consensus sur la partie conceptuelle de la définition du marqueur évidentiel ferait presque oublier que le concept désigné par le terme d’évidentialité est loin d’avoir les mêmes frontières chez tous les auteurs, au point que nombreux sont ceux (cf. Dendale 1991 ; Dendale & Tasmowski 2001 ; Willett 1988) qui proposent de distinguer évidentialité au sens restreint et évidentialité au sens large. L’évidentialité au sens restreint correspond à l’indication de la source de l’information au sens strict. L’évidentialité au sens large peut être illustrée par la façon dont des auteurs comme M. Mithun (1986) ou W. Chafe (1986) définissent et délimitent le phénomène, qui englobe notamment la fiabilité de la source de l’information (et donc la modalité épistémique). Dans ce qui suit, nous parlerons d’évidentialité au sens restreint.
2.2. Frontières externes de la catégorie et sous-notions évidentielles
8 Définir un marqueur évidentiel en termes « génériques » comme « moyen de justification », « type de source d’information », etc. ne donne pas d’idée précise de l’extension concrète de la catégorie. Or, la notion d’évidentialité s’articule en « sous-notions » ou sous-catégories, qui désignent toutes un type de source d’information. Différentes classifications de ces sous-notions évidentielles ont été proposées (cf. Willett 1988 ; Frawley 1992 ; Aikhenvald 2004). Elles permettent de définir l’évidentialité par énumération des types de sources d’information qui existent et situent ces sources d’information les unes par rapport aux autres : directes (i.e. attestées par les sens) ou indirectes (rapportées ou inférées).
9 Cependant, si l’énumération et la classification des sous-notions évidentielles clarifient la notion générique d’évidentialité, elle génère aussi de nouveaux problèmes pour l’identification comme évidentielle ou non de telle ou telle unité langagière.
2.2.1. Les marqueurs inférentiels
10 Par rapport à la catégorie de l’inférence notamment, on peut se demander, avec E. Ifantidou (2001 : 5), s’il faut qualifier un mot comme donc (en anglais : so, therefore) de marqueur évidentiel de type inférentiel, au même titre par exemple que devoir épistémique, qui a été décrit comme un marqueur évidentiel d’inférence (Dendale 1994 ; Dendale & De Mulder 1996 ; Desclés & Guentchéva 2001 ; Rossari et al. 2007). Catégorisé le plus souvent comme un marqueur de consécution (Zenone 1982, 1983 ; Rossari 1996), donc est catégorisé par certains comme marqueur de « déduction naturelle » (Berrendonner 1981), de « raisonnement inférentiel » (Ferrari & Rossari 1994) ou d’« inférence abductive » (Vlemings 2003), trois instances possibles de la catégorie “Inferring” dans la classification de T. Willett (1988) :
12 La question est de savoir sur la base de quelle différence au niveau de l’inférence ou de son marquage devoir serait un marqueur évidentiel, mais donc non. Parfois, devoir épistémique et donc sont utilisés en combinaison, comme le montre (2a) :
b. il doit être possible de les observer de les décrire, de les classer et [...].
c. il est donc possible de les observer de les décrire, de les classer et [...].
14 Les variantes forgées sous (2bc) suggèrent au moins une différence essentielle entre donc et devoir épistémique : donc signale que l’affirmation faite au moyen de la phrase qui le contient est le résultat d’une inférence qui se fonde sur les éléments apportés dans le cotexte qui précède ; doit en (2b) signale que l’affirmation faite au moyen de la phrase qui contient ce verbe est le résultat d’une inférence qui se fonde sur des éléments qui ne sont pas nécessairement ceux apportés dans le cotexte qui précède. Combiné avec devoir, donc garde en (2a) sa fonction de lien avec la phrase qui précède et semble laisser à devoir la fonction de signaler l’opération d’inférence qui est effectuée à partir d’une règle générale et/ou la marge d’erreur que se réserve le locuteur dans sa conclusion.
15 Dans la conception de l’évidentialité de K. Boye et P. Harder (2009), donc serait exclu des marqueurs évidentiels sur la base de sa « portée ». Un marqueur évidentiel doit avoir sous sa portée une proposition, une unité dotée d’une valeur de vérité (op. cit. : 16). Or, donc, à la différence de devoir épistémique, étant un connecteur, n’a pas de proposition dans sa portée.
2.2.2. Les marqueurs de reprise
16 Le même problème d’intégration à la classe des évidentiels se rencontre pour le marquage de la reprise à autrui. Pour le français, le conditionnel a été décrit comme un marqueur évidentiel de reprise à autrui ou d’ouï-dire [4]. Mais il existe des marqueurs, dits « de polyphonie » (Ducrot 1984) ou « de dialogisme » (Bres 1999), dont la spécificité sémantique est de renvoyer d’une façon ou d’une autre au point de vue, à la « voix », d’autrui. Tel est le cas, entre autres, de la négation « polémique », censée réfuter l’affirmation d’autrui (Ducrot, op. cit. : 115) :
18 Si la négation polémique est un marqueur qui renvoie à la « voix » d’autrui, sa valeur première et sa fonction principale n’ont absolument rien à voir avec l’expression de la source d’information et celle-ci n’intervient donc dans le sémantisme de cette unité que comme un élément de sens accessoire.
3. LE STATUT DU CONCEPT DE « SOURCE D’INFORMATION » À L’INTÉRIEUR DU SÉMANTISME D’UNE UNITÉ
19 Nous venons de traiter le premier critère de définition de L. Anderson, sur lequel il y a consensus. Le problème vient toutefois des autres critères, pour lesquels le consensus est moins large. Nous commencerons par examiner le critère (c), qui stipule qu’un évidentiel ait l’indication de la source d’information comme « sens premier, plutôt que comme implication pragmatique ».
3.1. « Source d’information » comme l’une des valeurs propres d’une unité polysémique : l’exemple du conditionnel
20 La plupart des unités d’une langue dont le sémantisme a été mis en rapport avec l’évidentialité sont des unités à plusieurs valeurs, parfois fort différentes. La valeur qui a trait à la source d’information y côtoie très souvent des valeurs qui n’ont rien à voir avec la source d’information. La question qui se pose à propos de ces unités polysémiques est de savoir sous quelles conditions elles peuvent être considérées comme des marqueurs évidentiels. Regardons à titre d’exemple le conditionnel.
21 On attribue généralement au conditionnel trois grandes valeurs (cf. Dendale 2001a) : une valeur de futur du passé, une valeur d’éventualité et une valeur que nous appellerons épistémique, illustrée par (4) :
23 C’est uniquement la valeur épistémique qui intéresse les « évidentialistes », car c’est elle qui a été qualifiée d’évidentielle (Dendale 1991, 1993). Il est clair que l’étiquette « évidentiel » ne peut concerner le conditionnel « en entier », mais uniquement l’une de ses trois valeurs. De surcroît, il est plus que vraisemblable que la valeur épistémique du conditionnel ne constitue qu’une valeur secondaire dans la totalité de ce morphème. Il existe, en effet, plusieurs hypothèses concurrentes concernant le rapport entre les trois valeurs du conditionnel et leur hiérarchie : certains auteurs retiennent la valeur temporelle comme fondamentale (Wilmet 2001 ; Bres 2010), d’autres la valeur d’éventualité (Korzen & Nølke 2001 ; Rossari 2009), d’autres encore la valeur de non prise en charge, composante de la valeur épistémique (Abouda 2001). Cependant, aucune des trois hypothèses n’a fait l’unanimité jusqu’ici.
24 De plus, le conditionnel soulève un problème supplémentaire : la nature de la valeur dite « épistémique » est décrite différemment selon les linguistes. Pour P. Dendale (1991, 1993), elle s’analyse en trois traits sémantiques : « reprise à autrui » (trait évidentiel), incertitude (trait épistémico-modal) et non-prise en charge(trait aléthique). Cet auteur donne le trait « évidentiel » comme trait principal de la valeur épistémique du conditionnel. Or, depuis, d’autres hypothèses ont été avancées, qui promeuvent l’un ou l’autre des autres traits au statut de trait principal de la valeur épistémique du conditionnel (cf. infra).
25 Le problème est donc double avec le conditionnel : il a d’autres valeurs que sa valeur épistémico-évidentielle, et on ne sait pas si le trait évidentiel est le trait principal de l’emploi épistémique. Ce problème se pose d’ailleurs aussi pour devoir épistémique (cf. Dendale 1994 ; Barbet (ce volume) ; Vetters (ce volume), Saussure (ce volume)).
26 La question est alors de savoir si l’existence d’une valeur à interprétation évidentielle suffit pour faire d’une unité un marqueur évidentiel. Différentes réponses sont possibles :
- La plus radicale consisterait à dire qu’une unité ne peut être considérée comme un marqueur évidentiel que si elle ne contient que des valeurs relatives au marquage de la source d’information. Nous n’avons pas connaissance de linguistes qui tiennent cette position. Tous semblent tenir compte de la polysémie des unités.
- La plus libérale consisterait à dire qu’une unité peut être considérée comme un marqueur évidentiel dès qu’une de ses valeurs est liée au concept de « source d’information » et ce quelle que soit l’importance de cette valeur dans la polysémie de l’unité.
- Une réponse intermédiaire consisterait à dire qu’une unité peut être qualifiée de marqueur évidentiel si, dans sa polysémie, la valeur liée au concept de « source d’information » est la valeur première ou la valeur prototypique de l’unité. C’est une des façons d’interpréter le critère (c) de L. Anderson, selon lequel les évidentiels ont comme sens premier l’indication de la source d’information et ne la communiquent pas simplement par inférence pragmatique.
28 Le problème de cette position est qu’elle suppose résolus ou résolubles pour toute unité plusieurs problèmes méthodologiques qui ont occupé de nombreux linguistes depuis de longues années :
- Comment peut-on déterminer de façon sûre la nature des valeurs d’une unité ?
- Comment faut-il concevoir et représenter linguistiquement la multiplicité de valeurs d’une unité : faut-il la concevoir comme un réseau (hiérarchisé ou non) de valeurs dans lequel chaque valeur garde son identité et sa description individuelle, ou comme valeur abstraite, qui couvre toutes les valeurs concrètes en discours, mais dont la description (par le linguiste) est souvent si éloignée des valeurs concrètes qu’il est parfois difficile de saisir son rapport avec le concept de « source d’information » ?
- Sur la base de quels critères (diachroniques ou synchroniques ? saillance ? fréquence ? autres ?) déterminera-t-on laquelle des valeurs est la valeur de base ?
30 Les réponses différentes qui sont données à ces questions méthodologiques expliquent les divergences de traitement du conditionnel épistémique (et d’autres unités). C’est ainsi que L. Abouda (2001) et C. Rossari (2009) ne considèrent pas le conditionnel comme un évidentiel. L. Abouda parce que la valeur épistémique du conditionnel n’est pas fondamentalement centrée sur le concept de « source de l’information », mais sur celui de « non prise en charge » ; C. Rossari, parce qu’elle subsume la valeur épistémique sous la valeur d’éventualité. Pour F. Palmer (1986 : 73), P. Dendale (1991, 1993) et H. Kronning (2002, 2012) en revanche, le conditionnel est un évidentiel dans son emploi « épistémique » [5].
3.2. « Source d’information » comme valeur pragmatique dérivée : l’exemple du futur conjectural
31 Les unités telles que le conditionnel se caractérisaient par une polysémie lexicale, dans laquelle une des valeurs propres de l’unité mettait en jeu le concept de « source de l’information » comme concept descriptif d’une seule des valeurs. Un autre cas concerne des unités qui ont une interprétation évidentielle qui ne correspond à aucune des valeurs propres de l’unité, mais qui est une valeur pragmatiquement dérivée d’une valeur propre non évidentielle. Prenons comme exemple le futur dit conjectural ou épistémique [6].
32 Le futur conjectural est souvent mis en rapport avec devoir épistémique. Les deux, en effet, s’utilisent dans des contextes similaires et avec une valeur globale comparable (cf. Dendale 2001b) :
a. Ce sera le facteur.
b. Ça doit être le facteur.
34 En raison de cette proximité de valeur, certains ont voulu traiter le futur conjectural de la même façon que devoir épistémique, comme un marqueur inférentiel (Squartini 2001, 2005). Or, si on regarde de plus près la valeur propre du futur conjectural, on peut dire, avec R. Martin (1983 : 129) ou A. Schrott (1997 : 294) que la « futurité » dans le cas du futur conjectural a trait non au plan de re, mais au plan de dicto (Martin, 1987 : 117 ; Vet, 1983 : 202). Le futur indique qu’un énoncé sur un état de choses ne sera définitivement pris en charge, vérifié, que dans l’avenir, d’où on conclura que l’état de choses (présent ou passé) ne peut être observé dans le présent et ne peut donc faire l’objet que de conjectures, d’inférences. Le futur conjectural ne contient pas, parmi ses valeurs propres, de valeur évidentielle. Cette valeur est un effet de l’interprétation, donc une valeur pragmatique (cf. Saussure, ce volume).
35 Le critère (c) de la définition de L. Anderson exclut comme marqueurs évidentiels des unités comme le futur conjectural, mais certains auteurs, comme K. Boye et P. Harder (2009 : 30), rejettent la pertinence du critère (c) sur la base de l’argument qu’il n’est pas souhaitable de faire une distinction rigide entre le sens sémantique et le sens pragmatique, parce que le sens inférentiel du futur relève également du domaine conceptuel de la source d’information. Pour eux, le futur conjectural serait considéré comme évidentiel.
4. STATUT DISCURSIF DE L’INDICATION DU TYPE DE SOURCE D’INFORMATION : PRÉDICATION OU COMMENTAIRE DE PRÉDICATION
36 Le critère (b) de la définition de L. Anderson a à voir avec le statut discursif ou informationnel que doit avoir la mention de la source d’information dans la phrase. Ce critère oppose l’indication de la source comme objet ou contenu même de la prédication à son indication comme commentaire sur le contenu de la prédication. Dans le dernier cas, on parlera, en linguistique française, de « double énonciation » : l’indication de la source d’information est comme une seconde couche d’information dans l’énoncé, une couche « méta », qui se superpose à une première couche, celle de la transmission de l’information sur un état de choses.
4.1. Les verbes parenthétiques
37 Nous reprendrons ici comme exemple la double interprétation discursive ou informationnelle des verbes dits parenthétiques, dont K. Boye et P. Harder (2009 : 23 sqq.) se servent pour commenter le critère (b) de L. Anderson.
38 Un verbe parenthétique est un verbe qui porte sur une proposition et qui peut être intégré aussi bien dans la proposition principale que dans une proposition en incise d’une phrase complexe. Chez J. Urmson (1952) – de même que chez É. Benveniste (1966) – les verbes parenthétiques sont des verbes d’opinion [7], dont la particularité est que la plupart du temps ils ne sont pas utilisés pour prédiquer que le locuteur a telle ou telle opinion, mais pour exprimer une attitude du locuteur vis-à-vis de la proposition qu’ils accompagnent. Pour É. Benveniste (1966 : 264), la véritable proposition d’une construction parenthétique est la proposition qui constitue l’argument du verbe parenthétique, non la proposition principale, qui fonctionne comme « indicateur de subjectivité ».
39 Bien que tous les auteurs reconnaissent l’emploi parenthétique de ces verbes, tous acceptent l’idée qu’ils peuvent à l’occasion prendre aussi le devant de la scène et constituer la prédication principale (Hooper 1975), i.e. prédiquer que le locuteur a telle ou telle croyance ou a effectué tel ou tel acte d’énonciation. D. Willems et C. Blanche-Benveniste (2008) appellent cet emploi des verbes parenthétiques leur « emploi fort ». Il s’oppose à leur emploi « à rection faible ». L’interprétation d’un verbe parenthétique est fonction du poids informationnel qui est donné respectivement au verbe parenthétique et à la proposition complément. Ceci est dû au fait que quand une proposition est intégrée dans une autre, les deux propositions “compete for attention” (Boye & Harder, 2009 : 26).
40 C’est à cette double interprétation des constructions à verbe parenthétique que renvoie, entre autres, le critère (b) de la définition de L. Anderson. Pour être un évidentiel, un verbe parenthétique ne peut, selon ce critère, constituer lui-même la prédication principale de la phrase, mais doit constituer un commentaire sur la prédication principale. Dans le dernier cas, le verbe parenthétique aura un statut informationnel secondaire, non primaire (Boye & Harder, op. cit. : 24). Ainsi, dans (6), c’est la proposition Dieu est partout qui a un statut discursif primaire, car c’est sur cette proposition, et non sur le verbe parenthétique, qu’enchaîne la proposition qui suit. On trouve le contraire dans l’exemple (7) :
4.2. Les « phrases évidentielles »
43 Un cas extrême de prédication à propos d’une source d’information ou de « prédication évidentielle » est illustré par l’extrait (8) [8] :
45 Cet extrait contient une phrase (en italique) dont la prédication porte spécifiquement sur la façon dont le locuteur a obtenu une information apportée dans une autre phrase de l’extrait. En voici encore quelques exemples forgés :
47 Ces exemples ont en commun d’être des phrases autonomes qui prédiquent quelque chose à propos de la source ou du type de source d’une information apportée dans une autre phrase. Tous contiennent un verbe (voir, supposer, dire, etc.), qui exprime la façon dont le locuteur a pu obtenir son information, ou un substantif qui qualifie le statut évidentiel de l’information apportée ailleurs (un emprunt en (8)). Tous contiennent aussi une expression anaphorique qui renvoie au contenu d’une proposition précédente (l’ en (8)). Nous appelons ces unités, de forme phrastique, qui apportent, à leur façon, une indication sur la source d’information des phrases évidentielles. Il est clair que les phrases évidentielles, du fait que l’indication de la source y constitue la prédication principale, ne répondent pas aux critères (b) ni (d) de la définition d’un marqueur évidentiel de L. Anderson.
5. MARQUAGE GRAMMATICAL VERSUS LEXICAL
5.1. L’évidentialité comme catégorie grammaticale
48 Dans de nombreuses études sur l’évidentialité, le marquage de la source d’information est considéré comme une catégorie grammaticale (Aikhenvald, 2003 : 1 & 2007 : 209 ; Lazard, 2001 : 360 ; Plungian, 2010 : 15). Pour ces auteurs, il y a lieu de ne pas confondre la catégorie grammaticale de l’évidentialité avec son expression lexicale. Leur position exclurait, par exemple, les parenthétiques du domaine de l’évidentialité parce que ce sont des unités lexicales, qui ne relèvent donc pas de l’évidentialité grammaticale.
49 C’est donc non seulement en vertu du critère (b) de L. Anderson que les parenthétiques sont exclus comme marqueurs évidentiels, mais également en vertu du critère (d) (statut grammatical) (Aikhenvald, 2004 : 10). Cette position n’est pas partagée par K. Boye et P. Harder (2009), qui argumentent contre l’exclusion de l’évidentialité lexicale et font des constructions parenthétiques leur cheval de bataille. Leur argument est qu’une unité lexicale peut finir par s’intégrer dans le système grammatical, à travers son emploi.
5.2. Usage versus système
50 Si la distinction entre statut grammatical et statut non grammatical (lexical) est d’une autre nature que celle entre statut discursif primaire et statut discursif secondaire, elle dépend de la dernière, comme le montrent K. Boye et P. Harder (op. cit.). Le statut discursif secondaire est un phénomène d’usage, de discours, mais dès que l’on donne régulièrement à une expression fréquemment utilisée un statut discursif secondaire, cette unité a des chances de finir par appartenir au système et de devenir grammaticale.
51 La conséquence du lien entre les deux distinctions est que si on élimine le statut discursif secondaire comme critère définitoire de l’évidentialité et si on établit une relation entre le statut discursif secondaire d’une expression (critère (b) d’Anderson) et le statut grammatical de l’expression (critère (d)), on peut minimiser également l’importance du statut grammatical comme critère de définition d’un marqueur évidentiel.
52 Les arguments que K. Boye et P. Harder (op. cit. : 17 sqq.) avancent contre ceux qui refusent de donner le statut de marqueur évidentiel à des valeurs codées lexicalement sont typologiques et diachroniques. Ils concernent l’évolution, dans une série de langues, des verbes de perception, de communication, d’apparence et de cognition. Ils montrent que ces verbes peuvent suivre deux voies d’évolution : aboutir à des unités indéniablement grammaticales, par exemple des particules marquant la reprise d’information à partir de verbes signifiant « dire », ou aboutir à des adverbes de phrase, traditionnellement considérés comme des unités lexicales.
53 Les verbes parenthétiques français montrent, eux aussi, cette double évolution. Certains auteurs ont observé qu’ils ressemblent, en effet, plus à des adverbiaux qu’à des verbes, surtout quand ils sont utilisés comme incises médiane ou finale (Thompson & Mulac 1991).
6. CONCLUSIONS : QUELLE DÉFINITION POUR UN MARQUEUR ÉVIDENTIEL ?
54 Nous avons voulu donner ici un aperçu des principales questions soulevées par la définition, et, subséquemment, par l’identification d’un marqueur évidentiel dans une langue comme le français. La définition de L. Anderson (1986) propose quatre critères définitoires de l’évidentialité : un critère conceptuel et trois critères de nature autre que conceptuelle.
55 Nous avons vu que, si on met de côté les linguistes qui affichent une conception très large de l’évidentialité, il y a consensus sur la partie « conceptuelle » de la définition de L. Anderson, à savoir que l’évidentialité est le marquage linguistique de la source d’information. Les problèmes d’identification d’un évidentiel proviennent des trois autres critères dans la définition de L. Anderson.
56 Le premier problème était l’exigence que, pour être considérée comme un évidentiel, une expression ait le marquage de la source d’information comme son sens premier. Cette exigence se prête à deux interprétations. Premièrement, une expression polysémique (comme le conditionnel épistémique) doit avoir comme valeur première ou prototypique la valeur liée à la source d’information (§ 3.1) ; deuxièmement, une expression doit avoir la valeur liée à la source d’information comme sa valeur propre et non comme une extension ou une dérivation pragmatique d’une valeur non évidentielle (comme c’est le cas du futur conjectural) (§ 3.2).
57 Un deuxième problème de la définition de L. Anderson était l’exigence que l’indication de la source d’information ne soit pas elle-même l’objet d’une prédication, mais qu’elle soit un commentaire sur une prédication portant sur autre chose (§ 4.1). Les verbes parenthétiques constituent un bon exemple d’expressions qui posent ce problème, du fait de leur double interprétation. Un cas extrême de ce problème est celui de ce que nous avons appelé les « phrases évidentielles » (§ 4.2), où l’indication de la source d’information ne porte pas sur le contenu propositionnel de la phrase, mais est le contenu propositionnel de la phrase.
58 Un troisième point de litige concerne le critère qui exige que l’évidentiel ait un statut grammatical et non lexical. Les verbes parenthétiques illustrent également ce problème.
6.1. La position « libérale » de Boye & Harder
59 Si la définition de L. Anderson est acceptée et suivie par de nombreux auteurs, elle ne fait toutefois pas l’unanimité, et certains auteurs préconisent une position plus libérale, tels justement K. Boye et P. Harder (2009). Ces deux auteurs évaluent les quatre critères de L. Anderson et rejettent comme non pertinents (b) à (d), basés respectivement sur les dichotomies prédication principale / spécification ou commentaire de prédication (b), sens sémantique / sens pragmatique (c) et statut grammatical / statut lexical (d). Pour eux, l’évidentialité doit être définie, conformément à des principes en vigueur en linguistique cognitive et en typologie du langage, au moyen d’un critère fonctionnel-conceptuel qui soit indépendant de ces trois dichotomies.
60 Pour l’évaluation du critère (b), K. Boye et P. Harder prennent l’exemple des constructions avec verbes parenthétiques. L’ambigüité que montrent ces constructions a à voir avec le statut discursif du verbe parenthétique – primaire ou secondaire – et n’affecte en rien le contenu conceptuel de ces expressions. La question du statut discursif d’une expression est pour eux une question toute autre que celle de savoir si une expression est un marqueur évidentiel ou non. Ce qu’ils considèrent, en revanche, comme définitoire de l’évidentialité est la notion de portée (scope) : un marqueur évidentiel doit avoir dans sa portée une proposition qui a une valeur de vérité par elle-même (op. cit. : 16).
61 Par rapport au critère (c) de la définition de L. Anderson, K. Boye et P. Harder posent qu’il n’y a pas de différence essentielle entre la réalisation sémantique (codée) d’un concept fonctionnel général et sa réalisation pragmatique (calculée). Pour eux, une valeur évidentielle peut parfaitement résulter de connaissances du monde, sans faire partie du code de la langue.
62 Dans leur critique du critère (d), K. Boye et P. Harder soulignent la relation dynamique entre langue et discours/parole, entre système et mise en œuvre du système (usage). Ce qui, à un moment donné, relève de la mise en œuvre du système peut faire partie du système plus tard (cf. parenthétiques, § 5.1). Ils concluent qu’il n’est pas souhaitable de refuser le statut de marqueur évidentiel aux morphèmes lexicaux, parce que ces derniers expriment le même contenu conceptuel que les morphèmes grammaticaux.
6.2. Pour une définition relativiste d’un marqueur évidentiel
63 L. Anderson (1986) d’une part et K. Boye et P. Harder (2009) d’autre part défendent donc concernant la définition de la notion d’évidentialité deux positions antagonistes. On peut défendre une troisième position : relativiste.
64 Si on examine les différentes études dans lesquelles la notion d’évidentialité est utilisée, on en arrive à la conclusion que l’extension de la notion et ses critères de définition sont relatifs au type d’étude et ne peuvent que varier d’un auteur à l’autre.
65 Le statut donné à une expression qui désigne la source d’information, et la définition donnée de l’évidentialité, nous paraissent ainsi tributaires, premièrement de l’objet d’étude du linguiste et des objectifs qu’il s’est fixés et, deuxièmement, du paradigme linguistique dans lequel il s’inscrit. Nous illustrerons ce point en évoquant ici trois types d’études.
66 La recherche de linguistes tels que L. Anderson (1986) ou A. Aikhenvald (2004) étant typologique et portant donc sur un grand nombre de langues, ils peuvent difficilement faire autrement que de limiter d’une façon ou d’une autre le nombre d’expressions étudiées dans chaque langue. Ils se focalisent, pour ce faire, sur la grammaire, liste close et limitée d’unités, et excluent le lexique. Leur définition de l’évidentialité s’en trouve nécessairement restreinte.
67 À l’opposé, les études de textes à visée plus pragmatique que grammaticale utilisent la notion d’évidentialité, à côté de celle de modalité épistémique, pour décrire la variété de moyens mis en œuvre par exemple par un journaliste pour régler ce que H. Kronning (ce volume) appelle « la responsabilité épistémico-énonciative ». Comme de telles études partent d’une fonction (pragmatique) et cherchent les unités linguistiques qui la réalisent, il semble parfaitement acceptable que dans ce type d’études, on prenne en compte la plus grande variété de moyens d’expressions, tant lexicales que grammaticales, i.e. unités dont la valeur évidentielle résulte d’une inférence pragmatique et unités dont c’est la valeur inhérente.
68 Le type d’étude linguistique peut aussi influencer autrement la définition de l’évidentialité. On constate que la notion d’évidentialité est souvent convoquée dans des études se focalisant sur telle ou telle expression isolée (lexicale ou grammaticale) dans une langue donnée (cf. études sur le conditionnel, sur devoir, etc.). L’avantage à recourir à la notion d’évidentialité dans des études de détail d’expressions est que cela fait entrer ces expressions dans le champ d’étude de l’évidentialité et les associe à des expressions « plus légitimement évidentielles », avec lesquelles elles sont souvent en concurrence paradigmatique.
69 Que le type de définition de l’évidentialité que l’on propose soit fonction aussi du paradigme linguistique dans lequel s’inscrit le linguiste est montré clairement par les positions respectives de G. Lazard d’un côté et de K. Boye et P. Harder de l’autre, et par la position d’une linguiste comme E. Ifantidou. G. Lazard est un linguiste de la langue (saussurienne), pour qui le système est le véritable objet de la linguistique. Il est normal qu’il privilégie d’un côté le système grammatical et de l’autre la valeur première, la valeur en langue, d’une expression et non ses valeurs pragmatiquement dérivées. On peut s’attendre à ce que sa définition de l’évidentialité soit proche de celle de L. Anderson. Une linguiste de la pertinence comme E. Ifantidou, en revanche, pour qui le sens peut s’exprimer aussi bien pragmatiquement que sémantiquement, adhérera logiquement à une définition large de l’évidentialité. K. Boye et P. Harder, enfin, qui s’affichent comme des linguistes cognitivistes, adhèrent tout naturellement à une définition de l’évidentialité dans laquelle le critère conceptuel a la plus haute ou l’unique importance.
70 Pour conclure, il n’y a pas de bonne et de mauvaise définition de l’évidentialité. Il y a plusieurs définitions, plus ou moins larges ou étroites, et le débat sur la définition de la notion doit être mis en relation avec les objectifs et le type d’étude linguistique qui a recours (accessoirement ou essentiellement) à la notion. Les positions de L. Anderson et de K. Boye et P. Harder présentées ici constituent des extrêmes entre lesquels de nombreuses autres positions peuvent être relevées. Plutôt donc que de discuter de la définition la plus adéquate, il serait à recommander que tout linguiste, qui utilise la notion d’évidentialité pour ses analyses, indique explicitement comment il utilisera la notion, justifiant éventuellement telle ou telle décision sur la délimitation.
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Mots-clés éditeurs : évidentialité, futur conjectural, conditionnel épistémique/journalistique, donc, polysémie, identification & définition d’un évidentiel
Date de mise en ligne : 07/05/2012
https://doi.org/10.3917/lf.173.0013Notes
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[1]
Julie Van Bogaert remercie la Belgian American Educational Foundation (BAEF) de lui avoir accordé une bourse de la Fondation Francqui, lui permettant de passer une année à l’Université de Californie à Santa Barbara. Pour Patrick Dendale, cette étude s’inscrit dans le projet TOP-BOF-2005 « Intertextualiteit en informatiestromen » [Intertextualité et flux d’information], financé par l’Université d’Anvers.
-
[2]
Par type de justification, Anderson (1986 : 274) entend ce que le locuteur perçoit (visuellement, auditivement...), ce qu’il infère à partir d’indices ou à partir d’autre chose, ou ce à quoi il peut raisonnablement s’attendre.
-
[3]
Guentchéva (1996 : 12) et Plungian (2001 : 350) parlent de « sémantique » ; Lazard (2001 : 360) de “semantic-pragmatic content”.
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[4]
Cf. Dendale (1991, 1993) ; Kronning (2002) ; Provôt-Olivier (2011), description récemment mise en cause par Rossari (2009).
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[5]
Pour être plus précis, pour Kronning le conditionnel est un marqueur « mixte », à la fois évidentiel (médiatif) et de modalisation zéro (refus de prise en charge).
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[6]
Pour des références, voir Dendale (2001b).
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[7]
Plus tard, la classe des verbes parenthétiques a été élargie à d’autres types de verbes, comme les verbes de communication (on dit, on dirait...) et les verbes d’apparence (sembler, paraître).
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[8]
Merci à Nancy Decloux de nous avoir fourni cet exemple provenant de son corpus de textes de journaux congolais, réunis dans le cadre du projet TOP-BOF-2005, mentionné en note 1.