Notes
-
[1]
Starck (Boris), “Essai d’une théorie générale de la responsabilité civile considérée en sa double fonction de garantie et de peine privée”, thèse, 1947, p. 359 : « la peine privée n’est pas une survivance, un fantôme du passé, mais l’une des forces vives de la responsabilité civile » Carval (Suzanne), La responsabilité civile dans sa fonction de peine privée , LGDJ, coll. Bibliothèque de Droit privé, 1995, 417 pages ; Kayser (Pierre), La protection de la vie privée par le Droit, 3e éd., 1995, n° 197 : l’auteur observe que l’indemnisation a une double fonction, compensatoire et pénale, relevant : « longtemps considéré comme une survivance du passé, la peine privée se révèle vivace dans le Droit contemporain » ; pour un avis contraire à la notion de peine privée : Agostinelli (Xavier), la protection civile de la vie privée, Librairie de l’Université d’Aix-en-Provence, 1994, p. 380 et 387 ; pour un avis partagé : Malaurie (Philippe), Aynes (Laurent), Les personnes, 3e éd., Cujas, 1994-95, n° 329 : « Aujourd’hui, il semble que l’indemnité se détache complètement du préjudice ; qu’elle se fonde sur une idée de peine privée../..pour que le système soit efficace, il ne serait pas mauvais que les dommages-intérêts fussent porportionnels au bénéfice tiré par leur auteur » et n° 342 : « procédant cas par cas, la jurisprudence est parfois arbitraire : pourquoi ici la saisie et non là ? Pourquoi des dommages-intérêts ici et non là ? Pourquoi des dommages-intérêts substantiels, et là un franc symbolique ? Ce droit est menacé d’arbitraire ».
-
[2]
Pour ne pas être censuré par la Cour de cassation dont le dogme est que les dommages-intérêts sont destinés à réparer le préjudice et ne doivent pas varier en fonction de la gravité de la faute commise : civ. (2e ch.), 8 mai 1964, Gaz. Pal., 1964, 2, p. 223. Starck (Boris), par Rolland et Boyer, Droit civil, n° 1036 : « il y a des vérités que le juge ne peut pas énoncer sous peine d’encourir la cassation de sa décision » ; ibid. : Boré (Louis), “la défense des intérêts collectifs par les associations devant les juridictions administratives et judiciaires”, LGDJ, 1997, p. 311 et 314.
-
[3]
C’est ce que relève Jacques Ravanas, la protection des personnes contre la réalisation et la publication de leur image, LGDJ, Bibliothèque de Droit privé, 1978, p. 396 : « la gravité de la faute étant, dans la plupart des cas, proportionnelle au préjudice, il suffit dès lors aux juges du fond de proportionner les dommages-intérêts au préjudice, pour les proportionner en même temps et indirectement à la faute ». Pour un avis similaire, Kayser, op. cit., p. 370 ; Raymond Lindon suggérait également une méthode proportionnant les dommages-intérêts au tirage de la publication jugée illicite : note ss Paris, 26 avril 1983, D. 1983, p. 376.
-
[4]
Le Roy (Max), L’évaluation du préjudice corporel, Litec, 13e éd., 1996, 231 pages et not. annexe III : barème fonctionnel indicatif des incapacités en droit commun.
-
[5]
Derieux (Emmanuel), Gras (Frédéric), “Vie privée et liberté d’informer : le rôle du juge”, Légipresse, 1998-I, p. 1 à 10.
-
[6]
Préface de Geneviève Viney, in Carval (Suzanne), La responsabilité civile dans sa fonction de peine privée , LGDJ, coll. Bibliothèque de Droit privé, 1995, p. XV, cf. également les développements de l’auteur sur les droits de la personnalité et la notion de peine privée, p. 23 à 43.
-
[7]
Chiffres obtenus auprès de la présidence de la chambre. Nos remerciements vont à M. Xavier Raguin.
-
[8]
Certains dépassent toutefois cette moyenne : 86 000 F en moyenne par affaire sur 36 contentieux pour une première personnalité ; 75 000 F. par affaire sur 16 actions pour une seconde.
-
[9]
Données obtenues auprès de la présidence de la 1re chambre. Nos remerciements vont à M. Alain Lacabarats.
-
[10]
Kayser, op. cit., p. 370, note 232 : nombreuses références de décisions proportionnant les dommages-intérêts à la diffusion de la publication de presse.
-
[11]
Civ. (1re ch.), 31 janvier 1989, Bull., n° 47.
-
[12]
On retrouverait ici l’un des critères de la bonne foi exonératoire de responsabilité en cas de diffamation. Pour une application jurisprudentielle s’agissant de révélations sur la vie privée d’un artiste à l’occasion de la publication d’une autobiographie : TGI Paris, 4 février 1988, JCP 1988, n° 21 107, note Agostini.
-
[13]
Mazier (Christine), “Le principe de réparation médiatique”, mémoire de DEA de Droit privé, Université Paris X, année 1987-1988, 32 pages ; Caballero (Francis), Droit de la drogue, Dalloz, 1989, p. 173.
-
[14]
Caballero, op. cit., p. 173.
-
[15]
Mazier, op. cit., p. 16 ; Semmel (Eric), Les dommages-intérêts punitifs en Droit de la presse, mémoire de DEA de Droit de la communication, Université Paris II, année 1993-1994, 100 pages.
-
[16]
Dareau, Traité des injures dans l’ordre judiciaire, Paris, Prault, 1775, p. 476.
-
[17]
Carbasse (Jean Marie), Introduction historique au Droit pénal, PUF, coll. Droit fondamental, 1990, p. 76-78 : la Loi salique connaissait effectivement le principe du Wergeld ; Beignier (Bernard), “L’honneur et le Droit”, LGDJ, Bibliothèque de Droit privé, 1995, p. 217 : l’auteur plaide pour une réhabilitation aménagée (1/3 à la victime ; 2/3 à des œuvres) de cette institution de préférence à l’incorporation de la notion anglo-saxonne de punitive damages.
-
[18]
Derieux (Emmanuel), Gras (Frédéric), op. cit.
-
[19]
Cons. constit., 10-11 octobre 1984, entreprises de presse, 181 DC in , Favoreu (Philip), Les grandes décisions du conseil constitutionnel, Dalloz, 8e éd., 1995, p. 574 et s. ; Droit de la communication. Jurisprudence, Victoire éd., 2e éd., p. 43.
-
[20]
À titre d’ex. : Paris, 25 octobre 1982, D. 1983, p. 363 et s.
-
[21]
Serna (Marie), L’image des personnes physiques et des biens, Economica, 1997, p. 161 ; pour une critique de la notion de “punitive damages” procédant à une “commercialisation” des sentiments : Beignier (Bernard), L’honneur et le Droit, LGDJ Bibliothèque de Droit privé, 1995, p. 214 à 217.
1 « Mes idées sont mes catins » disait Diderot. En prolongement de cet aphorisme, on relèvera que certaines sont fort lucratives. Ainsi en est-il de la notion de peine privée en matière d’indemnisation des atteintes à la vie privée réalisées en violation des dispositions de l’article 9 du code civil.
2 En effet, toute atteinte à la vie privée consistant en une violation des dispositions de l’article 9 du code civil, elle expose, de facto, le contrevenant à indemniser la victime de cette violation au regard du préjudice subi.
3 L’examen de la jurisprudence permet par ailleurs de constater que les juges civils, dans leur indemnisation du préjudice moral subi du fait de l’atteinte à la vie privée, vont emprunter une logique de peine privée approuvée par la Doctrine [1] et qui n’est pas étrangère à la logique anglo-saxonne des “punitive damages” ou “exemplary damages”.
4 Ainsi, ils évaluent, sans le dire [2], le montant des dommages-intérêts en fonction d’une logique rétributive et non réparatrice par volonté de dissuasion d’actes jugés antisociaux.
5 Ceci se comprend d’autant plus aisément que, en matière de préjudice extrapatrimonial, le dommage apparaît difficilement quantifiable sauf à le proportionner à la gravité de la faute sanctionnée [3]. À l’importance de la faute est ainsi indissolublement liée l’importance des dommages-intérêts ou « donnez-moi la faute, je vous donnerai le préjudice ».
6 Dès lors, il n’est pas sans intérêt de tenter de discerner les critères de quantification du montant des dommages-intérêts, ce au regard de la pratique des premières chambres des tribunaux de grande instance de Paris et de Nanterre, afin d’envisager une évaluation semblable à celles mises en œuvre en matière de préjudice corporel [4].
I – LE SILENCE DE LA LOI SUR LA QUANTIFICATION DU PRÉJUDICE
7 Comme on a pu déjà l’observer [5], l’article 9 du code civil ne prévoit aucun barème de référence pour l’indemnisation de l’atteinte à la vie privée. Aucune institution semblable n’existe a fortiori pour l’atteinte au droit sur l’image, d’origine prétorienne.
8 On retrouve ici un principe classique du droit de la responsabilité civile qui veut que le dommage soit apprécié et chiffré in concreto en fonction du préjudice subi par la victime en l’espèce. Cette moins grande rigueur est d’ailleurs louée par certains membres de la Doctrine au motif que la sanction civile est « moins strictement bridée par le principe de légalité » [6].
9 Dès lors, les conséquences pécuniaires d’une atteinte à la vie privée ou au droit sur l’image peuvent varier selon une grande amplitude. La territorialité de l’action aura, sur ce point, une incidence puisque l’examen de la jurisprudence parisienne laisse apparaître qu’elle est moins généreuse que celle de Nanterre dans le montant des sommes attribuées à titre de dommages-intérêts.
A/ LA PRATIQUE JUDICIAIRE DE QUANTIFICATION À NANTERRE
10 Ainsi, en 1998, sur 167 jugements rendus par la 1re chambre du tribunal de grande instance de Nanterre [7], les dommages-intérêts moyens ont représenté un montant de 77 400 F [8] par affaire, hors article 700 du nouveau code de procédure civile (le montant alloué sur ce fondement étant généralement de 10 000 F).
11 Par delà cette moyenne :
- 14 % des jugements prononçaient un rejet des demandes ou ordonnaient le versement d’un franc de dommages-intérêts ;
- 32 % condamnaient à des dommages-intérêts supérieurs ou égaux à 100 000 F ;
- les jugements prononçant des dommages-intérêts supérieurs ou égaux à 200 000 F représentant, quant à eux, 6 % du volume, le montant maximal des dommages-intérêts obtenus par un plaignant ayant été de 250 000 F.
13 À ce titre, il est intéressant de constater que, en 1998, sur les 12 934 000 F de dommages-intérêts prononcés par la 1re chambre du tribunal de grande instance de Nanterre, 8 174 000 F. l’ont été par la 1re chambre A qui a traité essentiellement trois catégories d’atteintes à la vie privée : celles de la famille régnante de la Principauté de Monaco, celle de Claire Chazal, celle de Patrick Poivre d’Arvor.
14 Enfin, il importe de relever que la publication judiciaire, ordonnée dans 32 % des décisions rendues en 1998, est pensée comme un complément d’indemnisation en ce qu’elle vient stigmatiser la publication de presse contrevenante. C’est la raison pour laquelle cette publication judiciaire sera ordonnée en 1re de couverture si l’atteinte à la vie privée était grave et réalisée sur la page de couverture. À défaut de ces deux critères cumulatifs, la publication judiciaire sera plutôt ordonnée en 3e page intérieure.
B/ LA PRATIQUE JUDICIAIRE DE QUANTIFICATION À PARIS
15 Pour ce qui concerne la 1re chambre du tribunal de grande instance de Paris, un catalogue raisonné de jurisprudence a été constitué auprès de la bibliothèque du tribunal depuis 1996, incluant 59 décisions pour 1996, 31 décisions pour 1997, 12 décisions pour 1998 et 23 décisions pour 1999 [9].
16 Les dommages-intérêts moyens ont représenté un montant par affaire de 31 746 F en 1996, 24 355 F en 1997, 33 333 F en 1998 et 26 130 F pour 1999 hors article 700 du nouveau code de procédure civile (le montant alloué sur ce fondement étant généralement de 6 000 F). Quant au maximum des dommages-intérêts obtenus, il était de 150 000 F pour 1996, 100 000 F pour 1997, 150 000 F pour 1998 et 120 000 F pour 1999.
17 À l’opposé, sur les 59 décisions sélectionnées en 1996, 6 ont abouti à une décision de rejet, 4 à un franc de dommages-intérêts. Ces chiffres sont respectivement, en 1997 de 7 et 4, en 1998 de 5 et 0, en 1999 de 5 et 2.
18 Enfin, s’agissant des publications judiciaires ordonnées, elles étaient 22 sur 59 décisions en 1996 (37 %), 4 sur 31 en 1997 (13 %), 1 sur 12 en 1998 (8 %), 3 sur 23 en 1999 (13 %).
19 Par delà ces statistiques partielles (donc partiales) qui reflètent néanmoins une disparité de situations et de jugement, il importe de tenter de dégager les critères fondant ces diverses mesures ordonnées par les juridictions une fois l’atteinte à la vie privée caractérisée.
II – UN ESSAI DE QUANTIFICATION PRATIQUE
20 Dans leur détermination du montant des dommages-intérêts dus en raison de l’atteinte au droit extrapatrimonial à la vie privée, les magistrats vont apprécier le préjudice subi à la fois in abstracto et in concreto.
1. Les modalités judiciaires de quantification
21 In abstracto, il y aura toujours un préjudice subi du fait même de la violation de la loi qui garantit un droit absolu à la vie privée. Viendra ensuite l’appréciation du préjudice in concreto, soit en fonction de la nature de l’atteinte. Existent alors des facteurs d’aggravation ou de minoration.
22 Parmi les facteurs d’aggravation, on trouve :
- la mise en perspective de l’atteinte à la vie privée, soit la mise en page de l’information : la première de couverture n’a pas la même incidence que le milieu de publication ;
- le harcèlement, soit le fait de se retrouver systématiquement pendant des mois sur les pages de couverture des magazines people ;
- la traque, soit les poursuites de paparazzis et les photos au téléobjectif ;
- l’atteinte à la vie privée des enfants sauf complaisance passée.
24 Quant aux facteurs de minoration, il s’agira :
- de la complaisance passée ;
- de la banalité de l’information ;
- de la notoriété de l’information ;
- du caractère tardif de l’action du demandeur.
26 Par ailleurs, on observera que le volume textuel de la motivation variera en fonction du montant des dommages-intérêts attribués. Si ce dernier se situe dans la moyenne, aucune motivation particulière ne figurera dans le jugement. C’est uniquement en cas de minoration ou de majoration des dommages-intérêts attribués que la motivation se fera plus importante.
27 À ces listes tirées de la pratique judiciaire, peuvent être ajoutés les paramètres suivants pour apprécier le montant des dommages-intérêts dus :
- évaluation de la diffusion de la publication de presse [10] et localisation du préjudice subi [11] ;
- légitimité de l’atteinte au regard d’affirmations publiques ou d’indiscrétions diffusées antérieurement par la personne visée [12].
29 Cette quantification empirique par le juge des dommages-intérêts à allouer pour atteinte à la vie privée rejoint ainsi le concept de “principe de réparation médiatique” qui proportionne la réparation médiatique à l’agression médiatique [13]. Ce principe, appliqué à la lutte contre le tabagisme, veut que : « toute infraction aux dispositions de la loi entraîne le paiement automatique d’une somme égale à celle illégalement dépensée dans les médias et affectée à la lutte contre le tabagisme » [14]. De la même façon, la gravité de l’atteinte à la vie privée et son emplacement dans la maquette de la publication de presse emporteront une réparation plus importante.
30 Le droit de la responsabilité civile appliqué au secteur de la communication publicitaire abandonne ici le principe de la réparation intégrale, difficilement mesurable, au profit de la réparation médiatique, aisément quantifiable [15]. En somme, un retour, non pas à l’ancien droit, qui retenait le principe de la réparation intégrale [16], mais à la Loi salique [17].
2. Les conséquences de la quantification judiciaire
31 Comme on avait d’ores et déjà pu le relever [18], cette affirmation d’un droit absolu à la vie privée a pour conséquence d’inverser en ce domaine le principe constitutionnel de liberté de la presse. Ainsi, contrairement à l’affirmation du Conseil constitutionnel selon laquelle : « les lecteurs sont au nombre des destinataires essentiels de la liberté proclamée par l’article 11 de la déclaration de 1789 » [19], la théorie des dommages intérêts punitifs et dissuasifs permet à la partie civile choisissant la voie civile de soumettre l’information diffusée à son sujet à son consentement préalable. À défaut, le principe absolu posé à l’article 9 du code civil lui permettra d’exercer son pouvoir de rétorsion [20].
32 Mais c’est paradoxalement ici que le juge judiciaire retrouve sa fonction de gardien des libertés par le pouvoir de minoration des dommages-intérêts qui lui est accordé dans le silence voulu de la loi quant à la quantification du montant de l’indemnité allouée. En accordant 1 franc de dommages-intérêts sans article 700, il empêche le demandeur d’abuser du droit à la vie privée que lui reconnaît la loi de façon absolue.
33 Il n’en demeure pas moins que la peine privée participe au mouvement d’ores et déjà identifié [21] de patrimonialisation des droits de la personnalité, ce qui nous renvoie à notre propos introductif sur les idées, le droit et l’argent.
Notes
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[1]
Starck (Boris), “Essai d’une théorie générale de la responsabilité civile considérée en sa double fonction de garantie et de peine privée”, thèse, 1947, p. 359 : « la peine privée n’est pas une survivance, un fantôme du passé, mais l’une des forces vives de la responsabilité civile » Carval (Suzanne), La responsabilité civile dans sa fonction de peine privée , LGDJ, coll. Bibliothèque de Droit privé, 1995, 417 pages ; Kayser (Pierre), La protection de la vie privée par le Droit, 3e éd., 1995, n° 197 : l’auteur observe que l’indemnisation a une double fonction, compensatoire et pénale, relevant : « longtemps considéré comme une survivance du passé, la peine privée se révèle vivace dans le Droit contemporain » ; pour un avis contraire à la notion de peine privée : Agostinelli (Xavier), la protection civile de la vie privée, Librairie de l’Université d’Aix-en-Provence, 1994, p. 380 et 387 ; pour un avis partagé : Malaurie (Philippe), Aynes (Laurent), Les personnes, 3e éd., Cujas, 1994-95, n° 329 : « Aujourd’hui, il semble que l’indemnité se détache complètement du préjudice ; qu’elle se fonde sur une idée de peine privée../..pour que le système soit efficace, il ne serait pas mauvais que les dommages-intérêts fussent porportionnels au bénéfice tiré par leur auteur » et n° 342 : « procédant cas par cas, la jurisprudence est parfois arbitraire : pourquoi ici la saisie et non là ? Pourquoi des dommages-intérêts ici et non là ? Pourquoi des dommages-intérêts substantiels, et là un franc symbolique ? Ce droit est menacé d’arbitraire ».
-
[2]
Pour ne pas être censuré par la Cour de cassation dont le dogme est que les dommages-intérêts sont destinés à réparer le préjudice et ne doivent pas varier en fonction de la gravité de la faute commise : civ. (2e ch.), 8 mai 1964, Gaz. Pal., 1964, 2, p. 223. Starck (Boris), par Rolland et Boyer, Droit civil, n° 1036 : « il y a des vérités que le juge ne peut pas énoncer sous peine d’encourir la cassation de sa décision » ; ibid. : Boré (Louis), “la défense des intérêts collectifs par les associations devant les juridictions administratives et judiciaires”, LGDJ, 1997, p. 311 et 314.
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[3]
C’est ce que relève Jacques Ravanas, la protection des personnes contre la réalisation et la publication de leur image, LGDJ, Bibliothèque de Droit privé, 1978, p. 396 : « la gravité de la faute étant, dans la plupart des cas, proportionnelle au préjudice, il suffit dès lors aux juges du fond de proportionner les dommages-intérêts au préjudice, pour les proportionner en même temps et indirectement à la faute ». Pour un avis similaire, Kayser, op. cit., p. 370 ; Raymond Lindon suggérait également une méthode proportionnant les dommages-intérêts au tirage de la publication jugée illicite : note ss Paris, 26 avril 1983, D. 1983, p. 376.
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[4]
Le Roy (Max), L’évaluation du préjudice corporel, Litec, 13e éd., 1996, 231 pages et not. annexe III : barème fonctionnel indicatif des incapacités en droit commun.
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[5]
Derieux (Emmanuel), Gras (Frédéric), “Vie privée et liberté d’informer : le rôle du juge”, Légipresse, 1998-I, p. 1 à 10.
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[6]
Préface de Geneviève Viney, in Carval (Suzanne), La responsabilité civile dans sa fonction de peine privée , LGDJ, coll. Bibliothèque de Droit privé, 1995, p. XV, cf. également les développements de l’auteur sur les droits de la personnalité et la notion de peine privée, p. 23 à 43.
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[7]
Chiffres obtenus auprès de la présidence de la chambre. Nos remerciements vont à M. Xavier Raguin.
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[8]
Certains dépassent toutefois cette moyenne : 86 000 F en moyenne par affaire sur 36 contentieux pour une première personnalité ; 75 000 F. par affaire sur 16 actions pour une seconde.
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[9]
Données obtenues auprès de la présidence de la 1re chambre. Nos remerciements vont à M. Alain Lacabarats.
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[10]
Kayser, op. cit., p. 370, note 232 : nombreuses références de décisions proportionnant les dommages-intérêts à la diffusion de la publication de presse.
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[11]
Civ. (1re ch.), 31 janvier 1989, Bull., n° 47.
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[12]
On retrouverait ici l’un des critères de la bonne foi exonératoire de responsabilité en cas de diffamation. Pour une application jurisprudentielle s’agissant de révélations sur la vie privée d’un artiste à l’occasion de la publication d’une autobiographie : TGI Paris, 4 février 1988, JCP 1988, n° 21 107, note Agostini.
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[13]
Mazier (Christine), “Le principe de réparation médiatique”, mémoire de DEA de Droit privé, Université Paris X, année 1987-1988, 32 pages ; Caballero (Francis), Droit de la drogue, Dalloz, 1989, p. 173.
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[14]
Caballero, op. cit., p. 173.
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[15]
Mazier, op. cit., p. 16 ; Semmel (Eric), Les dommages-intérêts punitifs en Droit de la presse, mémoire de DEA de Droit de la communication, Université Paris II, année 1993-1994, 100 pages.
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[16]
Dareau, Traité des injures dans l’ordre judiciaire, Paris, Prault, 1775, p. 476.
-
[17]
Carbasse (Jean Marie), Introduction historique au Droit pénal, PUF, coll. Droit fondamental, 1990, p. 76-78 : la Loi salique connaissait effectivement le principe du Wergeld ; Beignier (Bernard), “L’honneur et le Droit”, LGDJ, Bibliothèque de Droit privé, 1995, p. 217 : l’auteur plaide pour une réhabilitation aménagée (1/3 à la victime ; 2/3 à des œuvres) de cette institution de préférence à l’incorporation de la notion anglo-saxonne de punitive damages.
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[18]
Derieux (Emmanuel), Gras (Frédéric), op. cit.
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[19]
Cons. constit., 10-11 octobre 1984, entreprises de presse, 181 DC in , Favoreu (Philip), Les grandes décisions du conseil constitutionnel, Dalloz, 8e éd., 1995, p. 574 et s. ; Droit de la communication. Jurisprudence, Victoire éd., 2e éd., p. 43.
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[20]
À titre d’ex. : Paris, 25 octobre 1982, D. 1983, p. 363 et s.
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[21]
Serna (Marie), L’image des personnes physiques et des biens, Economica, 1997, p. 161 ; pour une critique de la notion de “punitive damages” procédant à une “commercialisation” des sentiments : Beignier (Bernard), L’honneur et le Droit, LGDJ Bibliothèque de Droit privé, 1995, p. 214 à 217.