LEGICOM 1999/3 N° 19

Couverture de LEGI_019

Article de revue

L'information financière du public et ses sanctions juridiques

Pages 11 à 26

Notes

  • [1]
    Cf. Fleuriot (P.), “L’information financière, instrument de confiance”, Bulletin COB n° 300, mars 1996, p. 7 ; cf. également COB et Commission bancaire, “la transparence financière”, décembre 1998, p. 5.
  • [2]
    Le règlement n° 98-07, homologué par arrêté du 22 janvier 1999, publié au Journal officiel de la République française du 2 mars 1999, remplace le règlement n° 90-02 de la COB, qui est abrogé ; les termes de ce nouveau règlement sont toutefois quasi identiques à ceux du règlement 90-02, seule étant précisée la notion d’instruments financiers par référence à la loi n° 96- 597 du 2 juillet 1996.
  • [3]
    Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française, 2e édition par Alain Rey, ed. Le Robert, 1988, V° “Exact”.
  • [4]
    Fleuriot (P.), op. et loc. cit.
  • [5]
    Fleuriot (P.), op. et loc. cit.
  • [6]
    Cf. Communiqué relatif à l’information diffusée par LAGARDÈRE GROUPE le 27 avril 1995, Bulletin COB n° 290, avril 1995, p. 9.
  • [7]
    Cf. notamment la lettre du président de la COB au président de la société SCHNEIDER SA, publiée au Bulletin COB n° 266, février 1993, p. 6.
  • [8]
    Cf. “L’information donnée sur les pactes d’actionnaires”, Rapport annuel de la COB, 1997, p. 65.
  • [9]
    Cf. Rapport annuel de la COB, 1996, p. 89.
  • [10]
    Cf. “Projet de recommandation relative à la diffusion sur Internet d’informations financières par les sociétés dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé”, Bulletin COB n° 329, novembre 1998 ; voir également “À l’heure d’Internet”, par Helman le Pas de Sécheval, chef du service des opérations et de l’information financière de la COB, Banque magazine, février 1999, p. 33.
  • [11]
    Cf. notamment règlement n° 98-01 relatif à l’information à diffuser lors de l’admission aux négociations sur un marché réglementé d’instruments financiers et lors de l’émission d’instruments financiers dont l’admission aux négociations sur un marché réglementé est demandée.
  • [12]
    Cf. notamment règlement n° 98-08 relatif à l’offre au public d’instruments financiers.
  • [13]
    Cf. notamment règlement n° 95-01 relatif à l’information à diffuser à l’occasion d’opérations réalisées sur le Nouveau Marché.
  • [14]
    Cf. articles 217-2 et 217-10 de la loi du 24 juillet 1966 modifiés par la loi n° 98-546 du 2 juillet 1998.
  • [15]
    Cf. “Présentation des règlements n° 98-02 et 98-03”, et “Les nouveaux règlements relatifs au rachat d’actions n° 98-02 et 98-03”, Bulletin COB n° 327, septembre 1998, p. 13 et 19.
  • [16]
    Cf. Rapport annuel de la COB, 1991, p. 184.
  • [17]
    Cf. décision de la COB du 1er juin 1995, Affaire WELCOM, Bulletin COB n° 292, juin 1995.
  • [18]
    Cf. Rapport annuel de la COB, 1991, p. 185.
  • [19]
    Cf. Rapport annuel de la COB, 1991, p. 186.
  • [20]
    Cf. Rapport annuel de la COB, 1990, p. 191.
  • [21]
    Cf. décision de sanction de la COB du 1er juin 1995, Affaire WELCOM, Bulletin COB n° 292, juin 1995 ; décision confirmée par la cour d’appel de Paris, arrêt du 23 janvier 1996, Bulletin COB n° 299, février 1996.
  • [22]
    Cf. Rapport annuel de la COB, 1991, p. 187.
  • [23]
    Cf. lettre adressée au rédacteur en chef d’Euromoney le 18 avril 1994 par le président de la COB, Bulletin COB n° 280, mai 1994, p. 35.
  • [24]
    Cf. intervention de Me Dominique Borde, Forum du droit et des affaires, 8 et 9 mars 1995.
  • [25]
    Cf. décision de sanction de la COB, 10 décembre 1991, affaire CONCEPT.
  • [26]
    Cf. supra, note n° 25, même décision.
  • [27]
    Cf. cour d’appel de Paris, 17 mars 1993, Affaire Dehaye, Bulletin COB n° 270, septembre juin 1993, JCP E 1993, Pan n° 1286 ; Chronique Droit des sociétés, par Viandier (A.) et Caussain (J.-J.), JCP E 1993, n° 250 p. 269 ; pour la décision de sanction de la COB, cf. Bulletin Joly Bourse et produits financiers 1993, p. 57, et Decoopman (N.), “Sanctions de la COB : violation du règlement n° 90-02 relatif à l’obligation d’information du public”, Bulletin Joly Bourse et produits financiers 1993, p. 67.
  • [28]
    Cf. décision de sanction de la COB du 30 juin 1992, affaire VEV, Revue de droit bancaire et de la Bourse 1992, p. 212 (cette décision a néanmoins été annulée par la cour d’appel de Paris dans un arrêt du 15 janvier 1993 pour violation des garanties de la défense et de la présomption d’innocence, JCP E 1993, II, n° 414, p. 71 ; Revue de droit bancaire et de la Bourse 1993, p. 93 ; JCP G, 1993, II, p. 414 ; Dalloz 1993, p. 273, avec les observations de M. Dubkine ; Dalloz 1993, jurisprudence p. 273, note C. Ducouloux-Favard).
  • [29]
    Cf. arrêt de la cour d’appel de Paris du 10 septembre 1996, Affaire Oury, cité dans le Bulletin COB n° 308, décembre 1996, p. 51 (l’arrêt de la cour d’appel de Paris a été cassé par un arrêt de la Cour de cassation en date du 1er décembre 1998, pour non-respect de la présomption d’innocence affirmée par l’article 6 § 1 et 2 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, cf. JCP E 1999, p. 372).
  • [30]
    Cf. décision de sanction de la COB du 1er juin 1995, Affaire Welcom, Bulletin COB n° 292, juin 1995.
  • [31]
    Cf. Rapport annuel de la COB, 1991, p. 187, affaire Technomed.
  • [32]
    Cf. Vatel (D.), “Aspects judiciaires et juridictionnels du pouvoir de sanction de la COB”, Revue des sociétés 1994, p. 25.
  • [33]
    Cf. ordonnance n° 67-833 du 28 septembre 1967 instituant une COB et relative à l’information des porteurs de valeurs mobilières et à la publicité de certaines opérations de Bourse.
  • [34]
    Cf. décision de sanction de la COB à l’encontre de M. Bernard Tapie en date du 12 avril 1994, Bulletin COB n° 279, avril 1994 ; le recours formé par M. Tapie contre cette décision a été rejeté par la cour d’appel de Paris dans un arrêt du 30 novembre 1994, Bulletin Joly Bourse et produits financiers 1995, p. 31.
  • [35]
    Cf. Cass. Com., 14 novembre 1995, Bulletin Joly Bourse et produits financiers 1996, p. 111, avec les observations de P. Le Cannu ; “Définitions des personnes tenues par l’information due par les sociétés cotées” ; cf. également Bulletin COB n° 301, avril 1996.
  • [36]
    Cf. cour d’appel de Paris, chambre économique et financière, 14 mars 1997, Affaire Anjou, Dalloz Affaires 1997, n° 24, p. 754 ; Revue des sociétés 1997, p. 827, note H. Le Nabasque ; voir également Bulletin Joly Bourse et produits financiers 1997, p. 646, avec les observations de N. Rontchevsky ; “L’application du principe de la personnalité des poursuites et des sanctions aux sanctions administratives prononcées à l’encontre des personnes morales” ; Dalloz 1998, Somm. p. 67, observations Y. Reinhard, et p. 137, observations M-L. Niboyet.
  • [37]
    Cf. Communiqué relatif à l’information diffusé par LAGARDERE GROUPE le 27 avril 1995, publié dans le Bulletin COB n° 290, avril 1995, p. 9.
  • [38]
    Cf. lettre du président de la COB adressée au président de la société SCHNEIDER SA, Bulletin COB n° 266, février 1993, p. 6.
  • [39]
    Cf. Les Echos, mardi 12 janvier 1999, p. 21 ; cf. également, La Tribune, 13 janvier 1999.
  • [40]
    Cf. Rapport annuel de la COB, 1991, p. 187.
  • [41]
    Cf. Rapport annuel de la COB, 1991, p. 185.
  • [42]
    Cf. Rapport annuel de la COB, 1991, p. 185.
  • [43]
    Cf. décision n° 89-260 DC du 28 juillet 1989 relative à la COB.
  • [44]
    Cf. Cour européenne des droits de l’homme, 23 octobre 1995, Gradinger c/ Autriche, commentaire R. Koering-Joulin à la Revue de science criminelle 1996, p. 197.
  • [45]
    Cf. Ducouloux-Favard (C.) et Rontchevsky (N), “Infractions boursières : délits boursiers, manquements administratifs”, éd. Joly 1997, n° 174 ; cf. également R. Koering-Joulin, observations sous CEDH 25 octobre 1995, Revue de Science criminelle, p. 487.
  • [46]
    Cf. Cass. Crim. 20 juin 1996, Bull. Crim. n° 268.
  • [47]
    Cf. Article 64 de la Convention européenne des droits de l’homme, qui autorise les États à formuler des réserves lors de la ratification d’une disposition particulière de la Convention, dès lors que cette réserve ne revêt pas un “caractère général” et qu’elle est précédée d’un “bref exposé” de la loi interne non conforme à la disposition de la Convention.
  • [48]
    Cf. décision n° 96-378 DC du 23 juillet 1996 relative à la loi de régulation des télécommunications.
  • [49]
    Cf. décision de sanction de la Commission à l’encontre de M. Olivier Debus du 21 juillet 1998, Bulletin COB n° 327, septembre 1998.
  • [50]
    Cf. à cet égard Stasiak (F.), “Les cumuls de sanctions en droit boursier” Bulletin Joly Bourse et produits financiers, mars-avril 1997, p. 191.
  • [51]
    Cf. Crim. 6 juin 1998, Bull. Crim. n° 186.
  • [52]
    Cf. loi n° 96-597 du 2 juillet 1996 de modernisation des activités financières.
  • [53]
    Cf. décret n° 90-263 du 23 mars 1990 relatif aux injonctions et sanctions administratives prononcées par la COB et aux recours contre les décisions de la Commission relevant de la compétence du juge judiciaire ; cf. également Canivet (G.), “Les garanties de procédure applicables à la procédure de sanction de la COB” Dalloz Affaires, 1996, n° 3, p. 63.
  • [54]
    Cf. décret n° 97-774 du 31 juillet 1997 ; sur cette réforme, voir notamment Dezeuze (E.), “La réforme de la procédure de sanction administrative de la COB (À propos du décret n° 97-774 du 31 juillet 1997)”, JCP E, 1997, n° 48, p. 495 ; voir également Ducouloux-Favard (C.) et Rontchevsky (N.), “La procédure de sanction administrative des infractions boursières après le décret n° 97-774 du 31 juillet 1997”, Bulletin Joly Bourse, mars-avril 1998, p. 107 ; voir également Bucher (F.), “Vers un progrès des droits de la défense devant la COB”, Revue des sociétés 1997, p. 481 ; voir encore Reinhard (Y.), “La COB doit se prononcer de manière impartiale selon une procédure garantissant l’égalité des armes et le respect de la présomption d’innocence”, Dalloz 1998, somm. p. 77.
  • [55]
    Cf. cour d’appel de Paris, chambre économique et financière, 7 mai 1997, Affaire Oury, Bulletin Cob n° 314, juin 1997, p. 68 ; JCP E, I, n° 676, § 14, observations A. Viandier ; Revue de droit bancaire et de la bourse 1997, p. 119, observations M-A. Frison-Roche et M. Germain ; Dalloz 1997, IR, p. 142.
  • [56]
    Cf. assemblée plénière de la Cour de cassation, 5 février 1999, Dalloz Affaires, 11 mars 1999, n° 152, p. 410 ; Petites Affiches, 10 février 1999, n° 29, p. 3 et 14 ; JCP G, 1999, II, 10060, note H. Matsopoulou.
  • [57]
    Cf. Ducouloux-Favard (C.), “La COB et les droits de l’homme (à propos de l’arrêt de l’assemblée plénière de la Cour de cassation du 5 février 1999)”, Petites Affiches, 10 février 1999, n° 29, p. 14 ; cf. également P. M, “Droit boursier : l’arrêt de l’assemblée plénière du 5 février 1999”, Petites Affiches, 10 février 1999, n° 29, p. 3.
  • [58]
    Cf. décision de la COB du 1er juin 1995, Bulletin COB n° 292, juin 1995, et arrêts de la cour d’appel relatifs aux recours formés par la société WELCOM et M. Wood du 23 janvier 1996, Bulletin COB n° 299, février 1996.
  • [59]
    Cf. note précédente.
  • [60]
    Cf. affaire WELCOM, citée supra (l’article 3 du règlement n° 98-07 reprend à l’identique les dispositions de l’article 3 du règlement n° 90-02 aujourd’hui abrogé.
  • [61]
    Cf. décision de sanction de la COB à l’encontre de M. Bernard Tapie du 12 avril 1994, Bulletin COB n° 279, avril 1994.
  • [62]
    Cf. note précédente.
  • [63]
    Cf. Rapport annuel de la COB, 1991, p. 185.
  • [64]
    Cf. décision citée supra.
  • [65]
    Cf. notamment Decoopman (N.), “De l’inefficacité de la délégation en matière d’information du public”, note sous cour d’appel de Paris (1re chambre section COB), 30 novembre 1994, Affaire Tapie, Bulletin Joly Bourse et produits financiers, 1995, p. 31.
  • [66]
    Cf. décision de sanction de la COB, 2 septembre 1993, affaire CONSO, Bulletin COB n° 271, juillet-août 1993 ; cf. également cour d’appel de Paris, 6 avril 1994, JCP E 1994, Pan, n° 538.
  • [67]
    Cf. le marché hors-cote a été supprimé par l’article 34 de la loi n° 96-597 du 2 juillet 1996 et le décret n° 97-1050 du 14 novembre 1997 ; il est aujourd’hui remplacé par le “Marché Libre – OTC” (Ouvert à toute cession).
  • [68]
    Cf. “L’information relative aux opérations sur le marché hors cote” instruction d’application du règlement n° 92-02 relatif à l’offre au public de valeurs mobilières, Bulletin COB n° 292, juin 1995.
  • [69]
    Cf. “La réforme de la COB et le cumul des pouvoirs normatif, de sanction et d’investigation”, par Raphaël Ramette, Bulletin Joly Bourse et produits financiers, 1995, p. 487.
  • [70]
    Cf. “Recommandation de la COB sur l’information financière relative aux risques liés à la situation en Asie”, Bulletin COB n° 321, février 1998 ; cf. également recommandation n° 98-02 relative aux problèmes informatiques soulevés par le passage à l’an 2000.
  • [71]
    Cf. “Communication financière et passage à l’euro”, Rapport annuel de la COB 1997, p. 70 ; cf. également projet de recommandation relative à la diffusion d’informations financières sur Internet par les sociétés dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé, Bulletin COB n° 329, novembre 1998, p. 149 ; “Les huit recommandations de la COB concernant la diffusion d’informations financières sur Internet par les sociétés cotées”, Les Echos, 1er février 1999, p. 1.

1FONDEMENT essentiel de la confiance, destinée à assurer l’égalité des intervenants sur le marché et à permettre une formation optimale des cours, l’information financière est au cœur des préoccupations des acteurs et des régulateurs des marchés d’instruments financiers  [1]. L’inégalité des acteurs face à l’information sape le mécanisme même du marché, permettant aux opérateurs privilégiés, ou aux acteurs les moins scrupuleux, de miser en connaissant le résultat des jeux ; l’imperfection de l’information, dans son contenu ou dans sa diffusion, entame la foi des investisseurs en la rationalité des marchés et de leurs choix et peut les inciter à des réorientations de leurs placements. Ainsi, à l’image des sociétés politiques, les acteurs des marchés boursiers aspirent à plus de transparence et d’égalité. Comme le citoyen moderne, l’épargnant contemporain exige lumière pour ses choix, considération pour sa personne, et sanction pour ses dupeurs. On comprend donc le souci des pouvoirs publics ou des autorités de marché français, de forger, dans leur législation et leur réglementation, les outils d’une telle protection de l’actionnariat. Souci louable, mais également prudent, tant l’internationalisation et la volatilité accrue des flux de capitaux, la multiplication et la concurrence des places financières, vouent aux chants de sirènes étrangères des investisseurs aussi soucieux du degré de transparence et de sécurité des marchés qu’ils choisissent, que de la rentabilité de leurs placements.

2 Le droit français veille à la rigueur de l’information financière, en combinant prévention et répression, éducation et punition. Héritière des scandales financiers qui ont agité notre histoire, notre législation incrimine traditionnellement la diffusion d’informations fausses ou trompeuses par les sociétés faisant appel public à l’épargne ; l’article 10-1 de l’ordonnance du 28 septembre 1967 en est l’actuelle illustration. Mais c’est principalement la Commission des opérations de Bourse (COB), législateur, gendarme et juge des marchés boursiers, qui a défini les règles s’imposant aux sociétés cotées, qui en a affiné les contours, qui en a débusqué et sanctionné les ignorants ou les transgresseurs.

3 La norme et l’arme de la Commission reposent sur son règlement n° 98-07  [2], relatif à l’obligation d’information du public, dont l’article 2 pose en principe : « L’information donnée au public doit être exacte, précise et sincère », et dont l’article 3 menace : « Constitue pour toute personne, une atteinte à la bonne information du public, la communication d’une information inexacte, imprécise ou trompeuse. Constitue également une atteinte à la bonne information du public sa diffusion faite sciemment ».

4 Exactitude, précision, sincérité. Le sens des mots qualifiant la qualité de l’information financière ne soulève pas de difficulté : l’adjectif “exact” s’applique à tout ce qui est “fait avec soin, avec ponctualité, en observant rigoureusement les règles prescrites, les normes données”, ou à ce qui “reproduit fidèlement la réalité”  [3] ; la “précision” s’entend de ce qui “ne laisse place à aucune indécision dans l’esprit”, de ce qui “est nettement défini”, qui “correspond à une notion repérable”  [4] ; la “sincérité”, enfin, désigne ce qui est “authentique, non truqué”  [5]. De ces qualités requises de l’information, la Commission a été conduite à mieux cerner les contours, son œuvre pédagogique procédant tout à la fois de la diffusion de sa doctrine que de décisions de sanction. Ainsi, les modalités de l’information financière peuvent être retracées à la lumière des nombreuses illustrations que nous offre la Commission (I) . La sanction des pratiques irrégulières mérite également l’attention, tant elle est significative du rôle à la fois répressif et pédagogique de la Commission, mais aussi de l’un des particularismes controversés de notre droit (II).

I – LES MODALITÉS DE L’INFORMATION FINANCIÈRE

5 L’information financière que doivent diffuser les émetteurs peut intervenir à différentes étapes de la vie de la société (A), et doit revêtir certaines caractéristiques (B).

A/ L’OCCASION DE L’INFORMATION

6 L’information délivrée par les émetteurs peut intervenir à différents stades de la vie sociale, qu’il s’agisse de l’information périodique (1), de l’information permanente (2), de l’information délivrée à l’occasion d’une opération financière (3), de l’information non obligatoire (4), d’une information publiée dans une note confidentielle (5), d’une information ayant une incidence sur les cours et dont la société n’est pas en mesure de préserver la confidentialité (6), ou encore d’une information révélée dans le cadre de déclarations publiques (7).

7 1. L’information délivrée par les sociétés peut ainsi être périodique.

8 Les sociétés doivent en effet publier au Bulletin des annonces légales obligatoires (BALO) un certain nombre d’informations :

9

  • les comptes sociaux provisoires, les comptes consolidés (s’ils sont disponibles) et le projet d’affectation des résultats, dans les quatre mois suivant la clôture de l’exercice et, en tous cas, quinze jours avant l’assemblée générale des actionnaires ;
  • les comptes approuvés et certif iés par les commissaires aux comptes et la décision d’affectation des résultats (si toutefois ceux-ci sont identiques aux comptes provisoires, une insertion au BALO le précise), dans les quinze jours suivant l’assemblée générale des actionnaires ;
  • l’information comptable semestrielle (tableau d’activité et de résultat avec un rapport) dans les quatre mois suivant la fin du semestre ;
  • les chiffres d’affaires trimestriels depuis le début de l’exercice comparés à ceux de l’exercice précédent, dans les quinze jours suivant ceux de l’exercice précédent ;
  • les convocations aux assemblées générales.

10 L’information périodique délivrée au public par les sociétés peut également prendre la forme d’un communiqué de presse diffusé dans la presse nationale économique et financière.

11 2. Les sociétés sont également tenues de diffuser une information permanente. Aux termes de l’article 4 du règlement n° 98-07 de la COB :

12 « Tout émetteur doit, le plus tôt possible, porter à la connaissance du public tout fait important susceptible, s’il était connu, d’avoir une incidence significative :

13

  • sur le cours d’un instrument financier ;
  • ou sur le cours d’un contrat à terme ou de l’instrument financier admis aux négociations sur un marché réglementé mentionné à l’article 1er.

14 Toutefois, il peut prendre la responsabilité de décider de différer la publication d’une information de nature à porter atteinte à ses intérêts légitimes s’il est en mesure d’en assurer la confidentialité ».

15 L’information permanente revêtant souvent la forme d’un communiqué, la COB a rappelé : « tout communiqué concernant une information susceptible d’avoir une incidence sur le cours d’un titre doit être exact, précis et exhaustif »[6].

16 Si la diffusion effective et intégrale d’un communiqué officiel émanant de l’émetteur constitue pour la COB le mode normal de diffusion de toute information susceptible d’avoir une influence sur le cours  [7], la Commission précise : « afin d’assurer un égal accès du public à l’information, il est souhaitable que la diffusion effective et intégrale de ce communiqué intervienne hors des heures d’ouverture de la Bourse ». Et c’est au dirigeant de la société qu’il appartient d’assurer une communication financière préservant l’égalité d’information du public et le bon fonctionnement du marché.

17 Par exemple, la Commission  [8] considère, au titre de l’information permanente, que lorsqu’un pacte d’actionnaires, quels que soient les contractants, comporte des modalités susceptibles d’avoir une incidence sur le cours de bourse d’une société cotée, cette information doit être rendue publique, conformément aux articles 4 et 8 du règlement n° 90-02 de la COB.

18 La mise en place d’une Banque télématique des communiqués est saluée par les autorités de marché  [9], qui mettent en exergue le nombre croissant d’entreprises ayant recours à ce service. Permettant une diffusion instantanée et intégrale des informations émanant des différents émetteurs, cette banque participe à l’évolution souhaitée vers une amélioration de la communication des sociétés.

19 Outre cette banque des communiqués, la diffusion des informations peut intervenir via Internet. Accompagnant cette évolution technologique, la COB  [10] rappelle qu’une société ouvrant un site sur Internet est tenue de respecter les principes généraux liés à l’obligation d’information du public et, qu’à ce titre, l’information présentée sur le site doit être exacte, précise et sincère. S’agissant de la diffusion proprement dite, la Commission précise toutefois que toute information susceptible d’avoir une incidence significative sur le cours de Bourse doit faire l’objet d’une diffusion effective et intégrale par communiqué avant d’être disponible sur Internet.

20 3. La réalisation d’une opération financière par la société est également l’occasion d’une diffusion particulière d’information. Qu’il s’agisse d’une introduction en Bourse  [11], d’une émission de titres par appel public à l’épargne  [12], d’une offre publique (d’achat, d’échange, de vente ou de retrait) ou d’une fusion, scission, apport partiel d’actifs, la ou les sociétés concernées devront diffuser une note tendant à informer le public  [13]. Le contenu et les modalités de l’information, qui varient en fonction de chaque type d’opération financière (prospectus, document d’information, document E, communiqué officiel), sont définies par des textes législatifs et par des règlements de la Commission des opérations de bourse.

21 Le régime du rachat par les sociétés de leurs propres actions, récemment assoupli par le législateur  [14], a notamment conduit la COB à adopter un règlement  [15] tendant à enrichir l’information donnée aux actionnaires et au marché. À la fois préalable (note d’information) et consécutive au programme de rachat, l’information donnée aux actionnaires est ainsi améliorée.

22 4. L’information émanant d’une société peut également intervenir dans un cadre non “obligatoire”, plus “spontané”, pour dissiper – par exemple – une rumeur influant sur le cours de Bourse des titres de l’émetteur.

23 La communication engagée par la société ne doit pas être, dans ce cas, l’occasion d’une diffusion d’informations fausses ou trompeuses. Tel fut ainsi le cas d’une société de services informatiques, ASYTEL  [16], dont le président, quelques semaines avant la déclaration de l’état de cessation des paiements de l’entreprise, avait publié un communiqué dans lequel il précisait que la situation de la société était redevenue fondamentalement saine. Dans le cadre de ses investigations, la COB a mis en exergue les informations fausses et trompeuses diffusées par l’émetteur sur sa situation financière et ses perspectives d’évolution. La Commission a dès lors transmis son rapport d’enquête au procureur de la République aux fins de poursuites sur le fondement des alinéas 1 à 4 de l’article 10-1 de l’ordonnance du 28 septembre 1967, et sur le fondement de l’article 437-2 de la loi du 24 juillet 1966 relatif à la présentation de bilan inexact.

24 Relevons que la décision de l’émetteur de diffuser une information en dehors de toute obligation légale ou réglementaire ne le dispense en aucun cas de délivrer une information conforme aux exigences des autorités de marché. Comme l’a affirmé la COB dans l’affaire WELCOM :

25 « Dès lors que la société [...] a pris l’initiative, malgré l’absence d’obligation légale ou réglementaire, d’entrer en communication avec le public, elle devait lui délivrer une information précise, exacte et sincère »[17].

26 5. L’information diffusée par un émetteur dans une note confidentielle doit être tout aussi exacte, précise et sincère. Il ne saurait en effet s’agir, pour le président d’une société, de conseiller l’achat des titres de son entreprise, nonobstant sa connaissance du caractère erroné des prévisions diffusées.

27 Tel fut notamment le cas du président de la société NCM COMMUNICATION  [18] qui avait, dans plusieurs numéros d’une lettre confidentielle publiée par le groupe, conseillé l’achat du titre de sa société. Ayant constaté que les articles concernés faisaient état de faits faux et de perspectives d’évolution trop optimistes, la COB a transmis le dossier au Parquet aux fins de poursuites.

28 6. La Commission des opérations de bourse veille en outre à une diffusion rapide et large de l’information, dès lors que celle-ci est susceptible d’influer sur le cours de Bourse.

29 L’article 4 alinéa 2 du règlement n° 98-07 reprend les termes du règlement n° 90-02 qui disposait : « l’émetteur peut prendre la responsabilité de différer la publication d’une information de nature à porter atteinte à ses intérêts légitimes s’il est en mesure d’en assurer la confidentialité ».

30 Dans le cadre d’une enquête portant sur le marché des actions de la société MICHELIN  [19], la COB a tenu à préciser : « il incombe à une société cotée de rendre publique toute information ayant une incidence sur les cours et dont elle n’est pas en mesure de préserver la confidentialité ».

31 L’enquête de la Commission avait en effet révélé que la société MICHELIN avait organisé une réunion d’analystes financiers destinée à les informer des résultats de l’entreprise (pertes de 2,4 milliards de francs), sans organiser simultanément la diffusion d’un communiqué avant l’ouverture de la séance de Bourse, et en tous cas avant le début de la réunion. Des lacunes dans la diffusion de l’information furent ainsi mises en évidence, puisque le montant des pertes fut finalement donné au marché avant que la société n’en prenne l’initiative.

32 7. Enfin, l’information diffusée peut également se concrétiser à l’occasion de déclarations publiques des dirigeants de la société ou de ses principaux actionnaires, comme l’illustre l’exemple suivant : ayant constaté que les déclarations publiques du groupe PELEGE  [20], actionnaire de référence de la Société auxiliaire d’entreprises (SAE), avaient été largement démenties par les faits, la COB – qui n’a pu engager aucune poursuite au regard de l’antériorité des faits sur la publication du règlement n° 90-02 (aujourd’hui remplacé par le règlement n° 98-07) – a invité les dirigeants du groupe PELEGE à ne pas reproduire de tels errements.

B/ LA NATURE DE L’INFORMATION

33 Nécessairement exacte, précise et sincère, l’information financière doit être entière (1), quand bien même elle s’appliquerait à des données prévisionnelles (2). En aucun cas elle ne doit être tardive (3).

34 1. L’information diffusée par la société doit être complète, sans que puissent être omis des éléments importants.

35 Comme l’a rappelé la COB dans l’affaire WELCOM  [21] :

36 « Le règlement n° 90-02 relatif à l’information du public ne tolère pas d’omission de la part des responsables de la diffusion d’une information publique et [...] il leur incombe de donner toute information significative dès lors qu’ils entrent en communication avec le public, afin que celui-ci bénéficie d’une information exacte, précise et sincère ».

37 Dans cette espèce, la société développant une activité d’offre télévisée – lequel était son principal secteur d’activité – ne pouvait ignorer les difficultés d’interprétation d’application et d’évolution de la réglementation. Aussi, et selon la COB, ce contexte juridique aurait dû être présenté en toute objectivité dans le prospectus d’information afin que le public dispose d’une information exacte et précise sur le principal secteur d’activité de la société.

38 Une société ne peut, dans le cadre de son introduction en Bourse, se prévaloir d’un contrat dont elle n’est pas encore bénéficiaire. Ainsi, la société COM 1  [22], qui avait fait état, dans sa note de présentation, d’un important contrat conclu avec la société FRANCE TÉLÉCOM – alors même que ce contrat n’avait pas été attribué, a dû publier un communiqué rectificatif.

39 L’omission de faits importants est en effet contraire aux prescriptions du règlement n° 90-02 – et aujourd’hui du règlement n° 98-07 – de la COB, comme l’a rappelé incidemment son président dans une lettre adressée au rédacteur en chef de la revue Euromoney pour protester contre les inexactitudes et omissions d’un article publié dans cette revue :

40 « L’article signé d’Andrew Rozenbaum paru sous le titre “Life in the slow lane” dans l’édition d’Euromoney d’avril 1994 contient un certain nombre d’affirmations qui, si elles avaient été faites à l’occasion d’une négociation de valeurs mobilières auraient certainement été considérées comme contraires à la règle 10 b-5 américaine ou à son équivalent français (le règlement n° 90-02) dans la mesure où elles omettent des faits importants »[23].

41 L’omission de faits importants dans le cadre de la diffusion d’informations est donc susceptible de constituer, du point de vue de la COB, un manquement aux dispositions du règlement n° 98-07.

42 Prolongement de l’omission, la dissimulation ne saurait être davantage tolérée d’une société informant le public. Tenu de délivrer une information sincère, l’émetteur ne peut être admis à dissimuler certains faits de nature à influer sur la perception de l’information.

43 2. L’information dont font état les émetteurs peut avoir trait aux résultats financiers ou aux perspectives de résultats desdits émetteurs  [24]. Les éléments annoncés par la société doivent dans ce cas être caractérisés avec suffisamment de précision pour être pris en compte. La référence à des éléments conditionnels ou éventuels doit, dans ce cas, être accompagnée de réserves afin de ne pas induire en erreur le destinataire de l’information.

44 Ainsi, une société ne saurait faire état de résultats positifs intégrant des abandons de créances hypothétiques, sans être en mesure d’établir un accord quelconque avec son créancier sur une telle mesure. Pour la COB, une telle information nécessiterait, pour être exacte, précise et sincère, l’expression de “réserves”  [25].

45 De même, lorsqu’une fusion-absorption est simplement envisagée, la société délivrant l’information ne peut : « intégrer les conséquences financières favorables du projet envisagé dans les résultats annoncés au public sans tenir compte également des aspects négatifs du projet de fusion et sans informer le public du caractère conditionnel de la mesure annoncée »[26].

46 La diffusion de communiqués inexacts présentant comme imminent l’aboutissement de négociations portant sur la cession du contrôle ou d’une participation significative dans le capital de la société, qui a maintenu artificiellement le cours de Bourse à un niveau élevé, justifie ainsi une sanction administrative de la COB  [27]. L’annonce de résultats prévisionnels ne saurait également intégrer des plus-values de cessions purement éventuelles, de nature à induire en erreur le public sur les résultats envisagés de la société  [28].

47 Conf irmant une décision de sanction de la COB, la cour d’appel de Paris a considéré que le manquement du dirigeant de société était caractérisé, relevant : « le résultat annoncé par la société avait été majoré en raison de la prise en compte prématurée du bénéfice de la cession (envisagée) à laquelle aucune allusion n’était faite dans le communiqué et que les circonstances avancées dans ce texte pour étayer les prévisions ainsi publiées étaient à elles seules insusceptibles de permettre à la société d’atteindre ce résultat »[29].

48 3. Pour être exacte, l’information financière des émetteurs ne peut pas être tardive et doit intervenir dès sa connaissance par les dirigeants de la société. La COB a donné plusieurs illustrations à ce principe.

49 Dans l’affaire WELCOM  [30], des prévisions optimistes de chiffre d’affaires avaient été communiquées par la société quelques semaines avant son inscription sur le marché hors-cote. Nonobstant un écart négatif de 12,3 % entre le chiffre d’affaires prévu et le chiffre d’affaires effectivement réalisé, la société n’avait pas cru devoir faire état de cette information avant son inscription définitive sur le marché hors-cote. La COB a, dans cette espèce, considéré que le prospectus d’information, achevé avant que cette information ne soit connue des dirigeants, aurait dû être rectifié au plus tard lors de l’inscription sur le marché hors-cote.

50 Dans une autre espèce  [31], une société avait donné, avant son introduction au second marché de la Bourse de Paris, des prévisions très favorables de résultat et de chiffre d’affaires. Ces prévisions optimistes ont dû être remises en cause par la société elle-même moins de quatre mois après, pour que le résultat attendu soit finalement réduit de moitié. L’enquête menée par la COB a permis de révéler que les dirigeants de la société avaient eu, en réalité, connaissance de ces informations plus d’un mois avant qu’elles ne fussent révélées au public. Si la société et ses dirigeants n’ont pu être poursuivis, s’agissant de faits antérieurs à la publication du règlement n° 90-02, il n’en demeure pas moins que la diffusion de l’information doit, pour satisfaire aux prescriptions de ce règlement, intervenir dès après la découverte de l’événement.

51 Si les textes et la pratique des autorités de marché ont encadré l’information financière dans des modalités relativement précises, les manquements demeurent sévèrement sanctionnés.

II – LA SANCTION DE L’INFORMATION

52 L’auteur d’une information ne respectant pas les critères imposés par le règlement n° 90-02 et repris par le règlement n° 98-07 de la COB s’expose à deux catégories distinctes et cumulables de sanctions (A). La rigueur de ce cumul, contesté en doctrine, n’est pas atténuée par la jurisprudence qui n’admet que peu de causes d’atténuation de la sanction encourue (B).

A/ LA DUALITÉ DES SANCTIONS

53 La répression à laquelle s’expose l’émetteur oublieux de ses devoirs d’information revêt un aspect double. Elle peut s’exercer par la voie administrative, la COB prenant l’initiative de poursuites et pouvant aller jusqu’à infliger une sanction  [32]. Elle peut également suivre la voie pénale, le manquement au devoir d’information étant susceptible d’être pénalement incriminé. Le constat de la dualité des sanctions pouvant frapper l’émetteur (1) serait assez banal, si cette nature double n’aboutissait pas à la possibilité d’un cumul des sanctions administrative et pénale (2).

54 1. La COB dispose du pouvoir de sanctionner pécuniairement les auteurs de manquements aux règles posées par ses règlements.

55 Aux termes de l’article 9-1 de l’ordonnance du 28 septembre 1967  [33], modif iée par la loi du 2 août 1989 :

56 « La COB peut ordonner qu’il soit mis fin aux pratiques contraires à ses règlements, lorsque ces pratiques ont pour effet de :

57

  • fausser le fonctionnement du marché ;
  • procurer aux intéressés un avantage injustifié qu’ils n’auraient pas obtenu dans le cadre normal du marché ;
  • porter atteinte à l’égalité d’information et de traitement des investisseurs ou à leurs intérêts ;
  • faire bénéficier les émetteurs et les investisseurs des agissements d’intermédiaires contraires à leurs obligations professionnelles ».

58 Gardienne du respect scrupuleux des règles qu’elle édicte, la Commission peut, conformément aux dispositions de l’article 9-2, sanctionner les manquements : « À l’encontre des auteurs des pratiques visées à l’article précédent, la COB peut, après une procédure contradictoire, prononcer les sanctions suivantes :

59

  • 1° une sanction pécuniaire qui ne peut excéder 10 millions de francs ;
  • 2° ou, lorsque des profits ont été réalisés, une sanction pécuniaire qui ne peut excéder le décuple de leur montant.

60 Le montant de la sanction pécuniaire doit être fonction de la gravité des manquements commis et en relation avec les avantages ou les profits tirés de ces manquements.

61 [...]

62 La Commission des opérations de bourse peut également ordonner la publication de sa décision dans les journaux ou publications qu’elle désigne. En cas de sanction pécuniaire, les frais sont supportés par les intéressés.

63 [...] ».

64 La personne poursuivie au titre d’un manquement à l’obligation d’information peut être le dirigeant personne physique de la société émettrice de l’information ou la personne morale elle-même.

65 Ainsi, poursuivi au titre de manquements au règlement n° 90-02, en sa qualité de représentant légal de la société TESTUT  [34], M. Bernard Tapie avait soutenu, devant la Commission, que la procédure n’avait pas été engagée contre l’auteur des faits reprochés. Selon lui, la note d’information litigieuse, diffusée par la société TESTUT, avait été établie par cette société. Seule ladite société pouvait donc, selon M. Tapie, être poursuivie. Ayant rappelé qu’en vertu de l’article 9-2 de l’ordonnance du 28 septembre 1967, la COB pouvait prononcer une sanction à l’égard de toute personne physique ou morale, dès lors que cette personne est l’auteur d’une pratique mentionnée à l’article 9-1 de ladite ordonnance, la Commission a énoncé que les dispositions de l’article 3 du règlement n° 90-02 – reprises à l’identique par le règlement n° 98-07 – s’appliquaient à toute personne portant atteinte à la bonne information du public sans qu’il y ait lieu de rechercher si ladite personne a agi ou non pour son propre compte.

66 Considérant notamment que M. Tapie avait, en sa qualité de représentant légal, signé la note d’information, qu’il avait déclaré que les données de cette note étaient conformes à la réalité, la Commission en a conclu qu’il avait engagé en toute connaissance de cause sa responsabilité. La Cour de cassation  [35] a confirmé cette analyse en précisant que les sanctions prises en vertu des articles 9-1 et 9-2 de l’ordonnance du 28 septembre 1967 étaient applicables aux dirigeants de sociétés anonymes, le terme personne du règlement n° 90-02 désignant une personne physique, une personne morale ou un dirigeant de celle-ci et l’ordonnance ne limitant pas le cercle des personnes soumises au règlement précité.

67 Pour autant, une personne – physique ou morale – ne pourra être sanctionnée que si les faits répréhensibles lui sont imputables. En effet, dès lors que la société auteur du manquement a fait l’objet d’une scission en entités juridiques nouvelles, ces dernières ne sauraient être, en vertu du principe de la personnalité des peines et des sanctions  [36], sanctionnées au motif d’une prétendue continuité économique de l’entité préexistante par reprise des moyens matériels et humains ayant concouru au manquement.

68 Outre les sanctions pécuniaires proprement dites, la COB peut condamner les manquements des émetteurs par un rappel à l’ordre et/ou par la publication d’un communiqué. C’est ainsi, par la publication d’un communiqué dans son Bulletin, que la COB a indiqué avoir rappelé à la société LAGARDÈRE GROUPE : « tout communiqué contenant une information susceptible d’avoir une incidence sur le cours d’un titre doit être exact, précis et exhaustif »[37].

69 C’est en revanche par une lettre que la COB a rappelé au président de la société SCHNEIDER  [38] : « toute information concernant un fait important susceptible d’avoir une incidence significative sur le cours d’un titre doit être portée par l’émetteur à la connaissance du public le plus tôt possible par un communiqué (articles 4 et 8 du règlement 90-02 de la COB et que, par ailleurs, cette information doit être exacte, précise et sincère (règlement COB 90-02 articles 2 et 3) ».

70 C’est également par une correspondance adressée à M. Asher Edelman  [39] que la COB a regretté les conditions dans lesquelles celui-ci avait rendu publiques ses offres sur la SOCIÉTÉ DU LOUVRE à un moment où celles-ci traduisaient une simple intention formulée en des termes les privant de portée juridique. Au regard de la très forte progression des cours du titre de la SOCIÉTÉ DU LOUVRE et de sa maison mère, M. Edelman a été invité à attacher la plus grande attention aux risques d’une communication inappropriée qui viendrait troubler le fonctionnement normal du marché. Ce rappel à l’ordre ne s’est cependant accompagné d’aucune procédure dans la mesure où la Commission n’a pas considéré que les agissements de M. Asher Edelman avaient été contraires aux dispositions légales et réglementaires.

71 La COB peut encore sanctionner les manquements à ses règlements en invitant les émetteurs à publier un communiqué de presse. Tel fut notamment le cas de la société COM 1  [40] qui, après avoir fait état d’informations inexactes dans une note de présentation en vue de son introduction en bourse, a “dû” publier un communiqué rectificatif. Telle fut encore la nature de la sanction choisie envers la société ORCA à laquelle la COB a fait injonction, en application de l’article 9-1 de l’ordonnance du 28 septembre 1967, de porter à la connaissance des actionnaires et du public certaines informations, et ce, sous la forme d’un communiqué de presse  [41].

72 À ces sanctions de nature administrative prononcées par la COB font également pendant des sanctions pénales.

73 2. L’article 10-1 alinéa 3 de l’ordonnance n° 67-833 du 28 septembre 1967 dispose en effet :

74 « Sera punie des peines prévues au 1er alinéa [emprisonnement de deux mois à deux ans et amende de 6 000 francs à 10 millions de francs, dont le montant peut être porté au-delà de ce chiffre, jusqu’au décuple du profit éventuellement réalisé, sans que l’amende puisse être inférieure à ce même profit, ou l’une de ces deux peines seulement] toute personne qui aura sciemment répandu dans le public par des voies et moyens quelconques des informations fausses ou trompeuses sur les perspectives ou la situation d’un émetteur de titres ou sur les perspectives d’évolution d’une valeur mobilière, d’un produit financier coté ou d’un contrat à terme négociable, de nature à agir sur le cours ».

75 Ainsi, la COB, sans préjudice de son pouvoir propre de sanction, doit transmettre au Parquet, conformément à l’article 40 du code de procédure pénale, le résultat de ses investigations aux fins de poursuites pénales, si le manquement constaté est susceptible de caractériser le délit incriminé par l’article 10-1 de l’ordonnance de 1967.

76 La Commission a ainsi mis en œuvre son devoir de transmission dans l’affaire NCM COMMUNICATION  [42], dont le dirigeant avait fait état de faits faux et de perspectives d’évolution très optimistes de l’activité. Considérant que le dirigeant de la société ne pouvait ignorer la situation critique où celle-ci se trouvait en réalité, la Commission a transmis le dossier au Parquet.

77 Cette dualité de nature des sanctions propres à l’information financière pose tout naturellement la question de leur cumul dans le cadre d’une même affaire.

B/ LE CUMUL DES SANCTIONS

78 Les sanctions prononcées par la COB et par les juridictions pénales sont susceptibles de se cumuler, ce qui suscite – du point de vue juridique – des interrogations.

79 1. Ainsi qu’il a été exposé ci-dessus, l’ordonnance n° 67-833 du 28 septembre 1967 permet qu’un comportement unique donne lieu à poursuite – et à sanction – par la COB, au regard d’un manquement au règlement n° 98-07 relatif à l’obligation d’information du public, dans le cadre de la procédure de sanction administrative prévue à l’article 9-2 de l’ordonnance, et par les juridictions pénales, pour le délit prévu à l’article 10-1, alinéa 3, de ladite ordonnance. Or, le Conseil constitutionnel a affirmé, dans une décision du 28 juillet 1989  [43], que le principe selon lequel une même personne ne peut être punie deux fois pour les mêmes faits n’a pas vocation à s’appliquer au cas de sanctions pénales et administratives.

80 Néanmoins, le protocole n° 7 à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales – auquel a adhéré la France et qui constitue une norme supranationale intégrée dans l’ordre juridique interne – dispose, en son article 4 § 1 :

81 « Nul ne peut être poursuivi ou puni pénalement par les juridictions du même État à raison d’une infraction pour laquelle il a été acquitté ou condamné par un jugement définitif conformément à la loi et à la procédure pénale de cet État ».

82 Or, dans des termes exempts de toute équivoque, la Cour européenne des droits de l’homme  [44] a condamné, dans un arrêt Gradinger du 23 octobre 1995, la possibilité pour l’État d’engager à l’encontre d’une même personne une double poursuite, administrative et pénale, à raison des mêmes faits. Saisie par un requérant sanctionné tant pénalement qu’administrativement, la Cour, après avoir constaté que les dispositions en cause se distinguaient non seulement sur le plan de l’appellation des infractions mais aussi sur celui, plus fondamental de leur nature et de leur but, en avait conclu néanmoins, pour affirmer la violation de l’article 4 du protocole n° 7, que les deux décisions litigieuses se fondent sur le même comportement.

83 Ainsi, les plus éminents auteurs affirment la contrariété du cumul de sanctions – administrative et pénale – au protocole n° 7  [45].

84 La France a certes, lors de son adhésion au protocole n° 7 susvisé, émis la réserve suivante : « seules les infractions relevant en droit français de la compétence des tribunaux statuant en matière pénale doivent être regardées comme des infractions ». La Cour de cassation s’est appuyée sur cette réserve pour considérer que le protocole n° 7 n’interdit pas le cumul de sanctions pénales et f iscales en cas de fraude à l’impôt  [46]. Cependant, la réserve émise par la France est de même nature – tant sur le fond que sur la forme – que celle émise par l’Autriche, laquelle a été invalidée  [47] par la Cour européenne des droits de l’homme dans l’affaire Gradinger.

85 La licéité du cumul de sanctions, affirmée par la Cour de cassation en matière fiscale, peut donc être sujette à caution. Les doutes sur cette licéité peuvent d’ailleurs être accentués par une décision du Conseil constitutionnel postérieure à celle relative à la COB. Dans une décision du 23 juillet 1996  [48], le Conseil constitutionnel a en effet affirmé :

86 « [...] la loi peut sans qu’il soit porté atteinte au principe de la séparation des pouvoirs, doter une autorité administrative indépendante de pouvoirs de sanction dans la limite nécessaire à l’accomplissement de sa mission. [...] il appartient toutefois au législateur d’assortir l’exercice de ces pouvoirs de sanction de mesures destinées à sauvegarder les droits et libertés constitutionnellement garantis ; [...] en particulier une sanction administrative de nature pécuniaire ne peut se cumuler avec une sanction pénale ».

87 La COB  [49], quant à elle, a néanmoins affirmé la légalité du cumul de sanctions, considérant qu’eu égard à la réserve émise par la France lors de la ratification du protocole n° 7, cette norme supranationale n’a pas vocation à s’appliquer et, estimant que la décision du Conseil constitutionnel du 23 juillet 1996 maintient le principe d’indépendance des procédures pénales et administratives, seuls les effets du cumul étant tempérés pour ce qui concerne le montant des sanctions pécuniaires.

88 La question de la licéité du cumul d’une sanction pénale avec une sanction administrative demeure cependant posée avec acuité  [50], en dépit du maintien par la chambre criminelle de la Cour de cassation  [51] de sa jurisprudence refusant l’application du protocole n° 7 à cette question du cumul de sanctions.

89 2. Cette rigueur du cumul des sanctions administrative et pénale est quelque peu modérée par la réforme de l’ordonnance du 28 septembre 1967 et de la procédure de sanction administrative de la COB. L’article 9-3 de l’ordonnance du 28 septembre 1967, issu de la loi du 2 juillet 1996  [52], dispose en effet : « lorsque la COB a prononcé une sanction pécuniaire avant que le juge pénal ait statué définitivement sur les mêmes faits ou des faits connexes, celui-ci peut ordonner que la sanction pécuniaire s’impute sur l’amende qu’il prononce ».

90 En outre, le décret du 23 mars 1990  [53] réglementant la procédure de sanction de la Commission a fait l’objet d’aménagements récents  [54] tendant à renforcer le caractère contradictoire de la procédure, en prévoyant notamment la communication du rapport d’enquête de la Commission avec la notification des griefs, la désignation du rapporteur dès l’ouverture de la procédure et la communication de son rapport écrit à la personne mise en cause concomitamment à sa convocation devant le collège en charge du prononcé de la sanction.

91 Il n’est néanmoins pas certain, au regard de la jurisprudence de la cour d’appel de Paris  [55], et surtout de l’arrêt rendu par l’Assemblée plénière de la Cour de cassation le 5 février 1999  [56], que cette réforme règle l’ensemble des interrogations soulevées par la procédure de sanction administrative de la COB. La Cour de cassation a en effet condamné de manière très nette la participation du rapporteur de la Commission lors du délibéré, et la question de la confusion des organes de poursuite et de constatation de la culpabilité demeure également posée  [57].

92 3. Nombre de sociétés ou de leurs dirigeants ont tenté, dans le cadre de procédures de sanction, de s’exonérer de leur responsabilité – ou d’obtenir une diminution de la sanction – en invoquant diverses excuses. Leurs efforts n’ont guère été couronnés de succès.

93 a) Ainsi certains émetteurs ont tenté d’opposer à la COB le jeune âge de la société ou de ses dirigeants. L’inexpérience avouée était ainsi invoquée comme de nature à écarter toute responsabilité dans le cadre d’un manquement aux règles de l’information financière.

94 Avancée dans l’affaire WELCOM  [58], cette excuse n’a pas été retenue par la Commission qui a considéré que le jeune âge et l’inexpérience ne constituent pas une cause exonératoire de responsabilité, le règlement n° 90-02 visant toute personne sans distinction. Néanmoins, et s’agissant de l’appréciation de la sanction, la Commission a tenu compte, pour fixer le montant de la condamnation pécuniaire, de l’inexpérience d’une jeune entreprise.

95 b) Toujours dans l’affaire WELCOM  [59], était invoqué : le caractère raisonnable des prévisions de chiffre d’affaires – qui se sont révélées erronées par la suite – au moment de leur établissement, compte tenu de l’activité antérieure de la société, ainsi que la faiblesse des inexactitudes. La Commission n’a pas retenu ces moyens de défense, considérant que l’écart négatif entre le chiffre d’affaires prévu et le chiffre d’affaires réalisé était de 12,3 %, et que les dirigeants de la société n’avaient pas rectifié leur prospectus dès qu’ils avaient eu connaissance du chiffre d’affaires effectivement réalisé.

96 c) L’existence d’une information publique disponible par ailleurs, et permettant en quelque sorte de corriger l’information erronée diffusée par les émetteurs, ne peut les exonérer de leur responsabilité.

97 L’affaire WELCOM illustre une nouvelle fois notre propos.

98 La COB ayant relevé que le prospectus d’information de la société WELCOM étant muet sur l’environnement juridique de l’activité d’offre télévisée, principal secteur d’activité de la société, les dirigeants avaient invoqué l’étude financière réalisée par une société de Bourse à leur demande. Mais ayant relevé que la description du contexte réglementaire opérée par cette étude était inexacte et que la société WELCOM ne pouvait ignorer les difficultés d’interprétation d’application et d’évolution de la réglementation, la Commission a considéré que ce contexte juridique devait être présenté en toute objectivité dans le prospectus d’information afin que le public dispose d’une information exacte et précise sur le principal secteur d’activité de la société.

99 d) L’absence d’obligation d’informer, au moment où l’information est donnée par la société, a également été avancée comme excuse dans l’affaire WELCOM. La communication spontanée émanant d’un émetteur hors de toute obligation légale était arguée pour solliciter l’indulgence de la COB.

100 Celle-ci n’a pas répondu aux attentes des défendeurs, en considérant que, dès lors que la société a pris l’initiative, malgré l’absence d’obligation légale ou réglementaire, d’entrer en communication avec le public, elle devait lui délivrer une information précise, exacte et sincère.

101 e) La bonne foi de l’informateur ne constitue pas non plus une excuse en cas de diffusion d’une information inexacte, imprécise ou trompeuse.

102 Comme l’a en effet affirmé la COB dans la même affaire, la mauvaise foi n’est pas nécessaire pour que soit constituée une infraction à l’article 3, premier alinéa du règlement n° 90-02  [60].

103 La Cour d’appel de Paris, dans son arrêt du 23 janvier 1996, a confirmé cette analyse, en considérant que l’absence de dissimulation d’informations est inopérante : M. Bernard Tapie  [61], poursuivi en sa qualité de représentant légal de la société TESTUT dont les informations contenues dans la note d’information lors de l’émission d’un emprunt obligataire s’étaient révélées inexactes, avait également tenté d’opposer – indirectement – sa bonne foi. La COB lui a rappelé qu’en ses qualités de président et de principal actionnaire des sociétés concernées, il ne pouvait ignorer cet état de fait.

104 f) La publication d’un rectificatif destiné à corriger l’inexactitude, l’imprécision ou le caractère trompeur d’informations déjà diffusées est-elle de nature à exonérer l’émetteur de sa responsabilité ? Force est en tous cas de constater que le reproche est souvent fait aux sociétés par la COB de n’avoir pas publié rapidement un communiqué révisant les prévisions initiales de résultats.

105 La Commission a ainsi relevé, dans l’affaire Tapie  [62], qu’aucune correction des informations délivrées n’était intervenue et n’avait été communiquée.

106 Le même reproche fut formulé par la COB à l’encontre de la société VEV  [63], celle-ci n’ayant pas informé le public sur la gravité de sa situation, et notamment, n’ayant pas révisé ses prévisions de résultats avant la suspension de la cotation de ses titres, alors qu’elle disposait d’éléments faisant apparaître l’ampleur des pertes.

107 g) D’autres émetteurs ont essayé de soutenir que l’information qu’ils avaient délivrée était exacte et précise au moment de sa publication.

108 M. Bernard Tapie  [64] a ainsi affirmé que les informations qu’il avait délivrées étaient exactes, précises et sincères à la date à laquelle elles ont été publiées, et que ce n’est que postérieurement qu’elles se sont révélées inexactes. La Commission a opposé une fin de non-recevoir à ce moyen de défense, considérant que les informations ne s’étaient pas révélées inexactes postérieurement à leur publication, mais qu’elles l’étaient déjà au moment de leur présentation.

109 h) La délégation de pouvoir  [65] ne saurait être invoquée par le signataire d’une note d’information pour s’exonérer de toute responsabilité. En effet, dès lors qu’il signe la note d’information, le représentant légal de la société en assume l’entière responsabilité au regard de l’autorité boursière. Cette analyse est conforme à la jurisprudence pénale, qui écarte tout effet exonératoire de la délégation de pouvoir, dès lors que le délégant a personnellement commis l’acte critiqué.

110 i) Le moyen de défense tiré du secret des affaires est tout aussi inopérant.

111 Dans le cadre de poursuites engagées par la Commission des opérations de bourse à l’encontre d’un dirigeant de société auquel était reproché de n’avoir pas fait état, dans sa diffusion d’information, de l’existence d’engagements d’achats de titres, ce dirigeant avait invoqué la notion de secret des affaires  [66]. La Commission a considéré que : « s’il est concevable que l’argument tiré du secret des affaires puisse être invoqué pour ce qui concerne le nom des sociétés sur lesquelles portent les engagements d’achats de titres, il ne peut l’être en ce qui concerne des engagements dont le montant est, au regard du patrimoine de l’entreprise, susceptible d’influencer le jugement que les destinataires de l’information peuvent porter sur la situation financière et les résultats de la société. [...] On ne peut soutenir qu’une information qui passe sous silence de tels engagements est conforme aux exigences d’exactitude, de sincérité et de précision, requise par l’article 2 du règlement n° 90-02. [...] Il s’ensuit que l’argument tiré de la confidentialité de ces opérations est inopérant ».

112 j) Si la plupart des moyens d’exonération soulevés devant la COB ont été déclarés inopérants, l’inexactitude de certaines informations diffusées sur une société a pu, dans une hypothèse particulière, ne pas engager la responsabilité des dirigeants de la personne morale. Il est cependant probable que cet exemple ne revête qu’un intérêt historique  [67].

113 En effet, en cas d’inscription d’une société sur le marché hors-cote à l’initiative d’un actionnaire minoritaire, le candidat à la cession était susceptible de ne pas disposer de toutes les informations utiles à la rédaction du prospectus mis à la disposition du public. La COB  [68] a dès lors jugé souhaitable que les dirigeants de la société inscrite sur le marché hors cote en soient informés, et qu’ils disposent de la faculté d’insérer, dans le prospectus, les observations qu’ils souhaiteraient formuler. S’ils usaient de cette possibilité, la Commission précise que leur responsabilité ne pourra être recherchée dans la mesure où la responsabilité de l’opération revient aux cédants des titres signataires du prospectus simplif ié.

114 Composante de l’éthique du marché et lien fondamental entre les actionnaires et les émetteurs, l’information financière constitue une préoccupation constante des autorités de marché.

115 Si le règlement n° 90-02 de la Commission des opérations de bourse relatif à l’obligation d’information du public (aujourd’hui remplacé par le règlement n° 98-07) avait reçu, lors de son homologation, un accueil mitigé en raison de l’imprécision de ses règles  [69], la Commission n’a eu de cesse d’en préciser les contours à travers ses interventions publiques, recommandations, communiqués ou décisions de sanctions.

116 L’adoption dans sa droite continuité du règlement n° 98-07, éclairée par une pratique et une jurisprudence dont on a pu constater la richesse, confirme, qu’il s’agisse d’informations porteuses de craintes  [70] ou d’espoirs  [71], que la Commission se montre ainsi soucieuse d’une diffusion rapide, efficace et complète aux actionnaires et au marché.

Notes

  • [1]
    Cf. Fleuriot (P.), “L’information financière, instrument de confiance”, Bulletin COB n° 300, mars 1996, p. 7 ; cf. également COB et Commission bancaire, “la transparence financière”, décembre 1998, p. 5.
  • [2]
    Le règlement n° 98-07, homologué par arrêté du 22 janvier 1999, publié au Journal officiel de la République française du 2 mars 1999, remplace le règlement n° 90-02 de la COB, qui est abrogé ; les termes de ce nouveau règlement sont toutefois quasi identiques à ceux du règlement 90-02, seule étant précisée la notion d’instruments financiers par référence à la loi n° 96- 597 du 2 juillet 1996.
  • [3]
    Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française, 2e édition par Alain Rey, ed. Le Robert, 1988, V° “Exact”.
  • [4]
    Fleuriot (P.), op. et loc. cit.
  • [5]
    Fleuriot (P.), op. et loc. cit.
  • [6]
    Cf. Communiqué relatif à l’information diffusée par LAGARDÈRE GROUPE le 27 avril 1995, Bulletin COB n° 290, avril 1995, p. 9.
  • [7]
    Cf. notamment la lettre du président de la COB au président de la société SCHNEIDER SA, publiée au Bulletin COB n° 266, février 1993, p. 6.
  • [8]
    Cf. “L’information donnée sur les pactes d’actionnaires”, Rapport annuel de la COB, 1997, p. 65.
  • [9]
    Cf. Rapport annuel de la COB, 1996, p. 89.
  • [10]
    Cf. “Projet de recommandation relative à la diffusion sur Internet d’informations financières par les sociétés dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé”, Bulletin COB n° 329, novembre 1998 ; voir également “À l’heure d’Internet”, par Helman le Pas de Sécheval, chef du service des opérations et de l’information financière de la COB, Banque magazine, février 1999, p. 33.
  • [11]
    Cf. notamment règlement n° 98-01 relatif à l’information à diffuser lors de l’admission aux négociations sur un marché réglementé d’instruments financiers et lors de l’émission d’instruments financiers dont l’admission aux négociations sur un marché réglementé est demandée.
  • [12]
    Cf. notamment règlement n° 98-08 relatif à l’offre au public d’instruments financiers.
  • [13]
    Cf. notamment règlement n° 95-01 relatif à l’information à diffuser à l’occasion d’opérations réalisées sur le Nouveau Marché.
  • [14]
    Cf. articles 217-2 et 217-10 de la loi du 24 juillet 1966 modifiés par la loi n° 98-546 du 2 juillet 1998.
  • [15]
    Cf. “Présentation des règlements n° 98-02 et 98-03”, et “Les nouveaux règlements relatifs au rachat d’actions n° 98-02 et 98-03”, Bulletin COB n° 327, septembre 1998, p. 13 et 19.
  • [16]
    Cf. Rapport annuel de la COB, 1991, p. 184.
  • [17]
    Cf. décision de la COB du 1er juin 1995, Affaire WELCOM, Bulletin COB n° 292, juin 1995.
  • [18]
    Cf. Rapport annuel de la COB, 1991, p. 185.
  • [19]
    Cf. Rapport annuel de la COB, 1991, p. 186.
  • [20]
    Cf. Rapport annuel de la COB, 1990, p. 191.
  • [21]
    Cf. décision de sanction de la COB du 1er juin 1995, Affaire WELCOM, Bulletin COB n° 292, juin 1995 ; décision confirmée par la cour d’appel de Paris, arrêt du 23 janvier 1996, Bulletin COB n° 299, février 1996.
  • [22]
    Cf. Rapport annuel de la COB, 1991, p. 187.
  • [23]
    Cf. lettre adressée au rédacteur en chef d’Euromoney le 18 avril 1994 par le président de la COB, Bulletin COB n° 280, mai 1994, p. 35.
  • [24]
    Cf. intervention de Me Dominique Borde, Forum du droit et des affaires, 8 et 9 mars 1995.
  • [25]
    Cf. décision de sanction de la COB, 10 décembre 1991, affaire CONCEPT.
  • [26]
    Cf. supra, note n° 25, même décision.
  • [27]
    Cf. cour d’appel de Paris, 17 mars 1993, Affaire Dehaye, Bulletin COB n° 270, septembre juin 1993, JCP E 1993, Pan n° 1286 ; Chronique Droit des sociétés, par Viandier (A.) et Caussain (J.-J.), JCP E 1993, n° 250 p. 269 ; pour la décision de sanction de la COB, cf. Bulletin Joly Bourse et produits financiers 1993, p. 57, et Decoopman (N.), “Sanctions de la COB : violation du règlement n° 90-02 relatif à l’obligation d’information du public”, Bulletin Joly Bourse et produits financiers 1993, p. 67.
  • [28]
    Cf. décision de sanction de la COB du 30 juin 1992, affaire VEV, Revue de droit bancaire et de la Bourse 1992, p. 212 (cette décision a néanmoins été annulée par la cour d’appel de Paris dans un arrêt du 15 janvier 1993 pour violation des garanties de la défense et de la présomption d’innocence, JCP E 1993, II, n° 414, p. 71 ; Revue de droit bancaire et de la Bourse 1993, p. 93 ; JCP G, 1993, II, p. 414 ; Dalloz 1993, p. 273, avec les observations de M. Dubkine ; Dalloz 1993, jurisprudence p. 273, note C. Ducouloux-Favard).
  • [29]
    Cf. arrêt de la cour d’appel de Paris du 10 septembre 1996, Affaire Oury, cité dans le Bulletin COB n° 308, décembre 1996, p. 51 (l’arrêt de la cour d’appel de Paris a été cassé par un arrêt de la Cour de cassation en date du 1er décembre 1998, pour non-respect de la présomption d’innocence affirmée par l’article 6 § 1 et 2 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, cf. JCP E 1999, p. 372).
  • [30]
    Cf. décision de sanction de la COB du 1er juin 1995, Affaire Welcom, Bulletin COB n° 292, juin 1995.
  • [31]
    Cf. Rapport annuel de la COB, 1991, p. 187, affaire Technomed.
  • [32]
    Cf. Vatel (D.), “Aspects judiciaires et juridictionnels du pouvoir de sanction de la COB”, Revue des sociétés 1994, p. 25.
  • [33]
    Cf. ordonnance n° 67-833 du 28 septembre 1967 instituant une COB et relative à l’information des porteurs de valeurs mobilières et à la publicité de certaines opérations de Bourse.
  • [34]
    Cf. décision de sanction de la COB à l’encontre de M. Bernard Tapie en date du 12 avril 1994, Bulletin COB n° 279, avril 1994 ; le recours formé par M. Tapie contre cette décision a été rejeté par la cour d’appel de Paris dans un arrêt du 30 novembre 1994, Bulletin Joly Bourse et produits financiers 1995, p. 31.
  • [35]
    Cf. Cass. Com., 14 novembre 1995, Bulletin Joly Bourse et produits financiers 1996, p. 111, avec les observations de P. Le Cannu ; “Définitions des personnes tenues par l’information due par les sociétés cotées” ; cf. également Bulletin COB n° 301, avril 1996.
  • [36]
    Cf. cour d’appel de Paris, chambre économique et financière, 14 mars 1997, Affaire Anjou, Dalloz Affaires 1997, n° 24, p. 754 ; Revue des sociétés 1997, p. 827, note H. Le Nabasque ; voir également Bulletin Joly Bourse et produits financiers 1997, p. 646, avec les observations de N. Rontchevsky ; “L’application du principe de la personnalité des poursuites et des sanctions aux sanctions administratives prononcées à l’encontre des personnes morales” ; Dalloz 1998, Somm. p. 67, observations Y. Reinhard, et p. 137, observations M-L. Niboyet.
  • [37]
    Cf. Communiqué relatif à l’information diffusé par LAGARDERE GROUPE le 27 avril 1995, publié dans le Bulletin COB n° 290, avril 1995, p. 9.
  • [38]
    Cf. lettre du président de la COB adressée au président de la société SCHNEIDER SA, Bulletin COB n° 266, février 1993, p. 6.
  • [39]
    Cf. Les Echos, mardi 12 janvier 1999, p. 21 ; cf. également, La Tribune, 13 janvier 1999.
  • [40]
    Cf. Rapport annuel de la COB, 1991, p. 187.
  • [41]
    Cf. Rapport annuel de la COB, 1991, p. 185.
  • [42]
    Cf. Rapport annuel de la COB, 1991, p. 185.
  • [43]
    Cf. décision n° 89-260 DC du 28 juillet 1989 relative à la COB.
  • [44]
    Cf. Cour européenne des droits de l’homme, 23 octobre 1995, Gradinger c/ Autriche, commentaire R. Koering-Joulin à la Revue de science criminelle 1996, p. 197.
  • [45]
    Cf. Ducouloux-Favard (C.) et Rontchevsky (N), “Infractions boursières : délits boursiers, manquements administratifs”, éd. Joly 1997, n° 174 ; cf. également R. Koering-Joulin, observations sous CEDH 25 octobre 1995, Revue de Science criminelle, p. 487.
  • [46]
    Cf. Cass. Crim. 20 juin 1996, Bull. Crim. n° 268.
  • [47]
    Cf. Article 64 de la Convention européenne des droits de l’homme, qui autorise les États à formuler des réserves lors de la ratification d’une disposition particulière de la Convention, dès lors que cette réserve ne revêt pas un “caractère général” et qu’elle est précédée d’un “bref exposé” de la loi interne non conforme à la disposition de la Convention.
  • [48]
    Cf. décision n° 96-378 DC du 23 juillet 1996 relative à la loi de régulation des télécommunications.
  • [49]
    Cf. décision de sanction de la Commission à l’encontre de M. Olivier Debus du 21 juillet 1998, Bulletin COB n° 327, septembre 1998.
  • [50]
    Cf. à cet égard Stasiak (F.), “Les cumuls de sanctions en droit boursier” Bulletin Joly Bourse et produits financiers, mars-avril 1997, p. 191.
  • [51]
    Cf. Crim. 6 juin 1998, Bull. Crim. n° 186.
  • [52]
    Cf. loi n° 96-597 du 2 juillet 1996 de modernisation des activités financières.
  • [53]
    Cf. décret n° 90-263 du 23 mars 1990 relatif aux injonctions et sanctions administratives prononcées par la COB et aux recours contre les décisions de la Commission relevant de la compétence du juge judiciaire ; cf. également Canivet (G.), “Les garanties de procédure applicables à la procédure de sanction de la COB” Dalloz Affaires, 1996, n° 3, p. 63.
  • [54]
    Cf. décret n° 97-774 du 31 juillet 1997 ; sur cette réforme, voir notamment Dezeuze (E.), “La réforme de la procédure de sanction administrative de la COB (À propos du décret n° 97-774 du 31 juillet 1997)”, JCP E, 1997, n° 48, p. 495 ; voir également Ducouloux-Favard (C.) et Rontchevsky (N.), “La procédure de sanction administrative des infractions boursières après le décret n° 97-774 du 31 juillet 1997”, Bulletin Joly Bourse, mars-avril 1998, p. 107 ; voir également Bucher (F.), “Vers un progrès des droits de la défense devant la COB”, Revue des sociétés 1997, p. 481 ; voir encore Reinhard (Y.), “La COB doit se prononcer de manière impartiale selon une procédure garantissant l’égalité des armes et le respect de la présomption d’innocence”, Dalloz 1998, somm. p. 77.
  • [55]
    Cf. cour d’appel de Paris, chambre économique et financière, 7 mai 1997, Affaire Oury, Bulletin Cob n° 314, juin 1997, p. 68 ; JCP E, I, n° 676, § 14, observations A. Viandier ; Revue de droit bancaire et de la bourse 1997, p. 119, observations M-A. Frison-Roche et M. Germain ; Dalloz 1997, IR, p. 142.
  • [56]
    Cf. assemblée plénière de la Cour de cassation, 5 février 1999, Dalloz Affaires, 11 mars 1999, n° 152, p. 410 ; Petites Affiches, 10 février 1999, n° 29, p. 3 et 14 ; JCP G, 1999, II, 10060, note H. Matsopoulou.
  • [57]
    Cf. Ducouloux-Favard (C.), “La COB et les droits de l’homme (à propos de l’arrêt de l’assemblée plénière de la Cour de cassation du 5 février 1999)”, Petites Affiches, 10 février 1999, n° 29, p. 14 ; cf. également P. M, “Droit boursier : l’arrêt de l’assemblée plénière du 5 février 1999”, Petites Affiches, 10 février 1999, n° 29, p. 3.
  • [58]
    Cf. décision de la COB du 1er juin 1995, Bulletin COB n° 292, juin 1995, et arrêts de la cour d’appel relatifs aux recours formés par la société WELCOM et M. Wood du 23 janvier 1996, Bulletin COB n° 299, février 1996.
  • [59]
    Cf. note précédente.
  • [60]
    Cf. affaire WELCOM, citée supra (l’article 3 du règlement n° 98-07 reprend à l’identique les dispositions de l’article 3 du règlement n° 90-02 aujourd’hui abrogé.
  • [61]
    Cf. décision de sanction de la COB à l’encontre de M. Bernard Tapie du 12 avril 1994, Bulletin COB n° 279, avril 1994.
  • [62]
    Cf. note précédente.
  • [63]
    Cf. Rapport annuel de la COB, 1991, p. 185.
  • [64]
    Cf. décision citée supra.
  • [65]
    Cf. notamment Decoopman (N.), “De l’inefficacité de la délégation en matière d’information du public”, note sous cour d’appel de Paris (1re chambre section COB), 30 novembre 1994, Affaire Tapie, Bulletin Joly Bourse et produits financiers, 1995, p. 31.
  • [66]
    Cf. décision de sanction de la COB, 2 septembre 1993, affaire CONSO, Bulletin COB n° 271, juillet-août 1993 ; cf. également cour d’appel de Paris, 6 avril 1994, JCP E 1994, Pan, n° 538.
  • [67]
    Cf. le marché hors-cote a été supprimé par l’article 34 de la loi n° 96-597 du 2 juillet 1996 et le décret n° 97-1050 du 14 novembre 1997 ; il est aujourd’hui remplacé par le “Marché Libre – OTC” (Ouvert à toute cession).
  • [68]
    Cf. “L’information relative aux opérations sur le marché hors cote” instruction d’application du règlement n° 92-02 relatif à l’offre au public de valeurs mobilières, Bulletin COB n° 292, juin 1995.
  • [69]
    Cf. “La réforme de la COB et le cumul des pouvoirs normatif, de sanction et d’investigation”, par Raphaël Ramette, Bulletin Joly Bourse et produits financiers, 1995, p. 487.
  • [70]
    Cf. “Recommandation de la COB sur l’information financière relative aux risques liés à la situation en Asie”, Bulletin COB n° 321, février 1998 ; cf. également recommandation n° 98-02 relative aux problèmes informatiques soulevés par le passage à l’an 2000.
  • [71]
    Cf. “Communication financière et passage à l’euro”, Rapport annuel de la COB 1997, p. 70 ; cf. également projet de recommandation relative à la diffusion d’informations financières sur Internet par les sociétés dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé, Bulletin COB n° 329, novembre 1998, p. 149 ; “Les huit recommandations de la COB concernant la diffusion d’informations financières sur Internet par les sociétés cotées”, Les Echos, 1er février 1999, p. 1.
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