La réémergence récente de l’idée de planification est-elle le signe d’une perception dans la société qu’il n’est plus temps de s’en remettre au marché pour affronter l’incertitude ? Car la crise pandémique, mais aussi, au-delà, l’accélération des effets du changement climatique (incendies d’ampleur continentale, fonte bien plus rapide qu’anticipé de la banquise arctique, ouragans plus intenses et destructeurs, etc.), montrent à quel point les marchés sont démunis face à l’incertitude. Nicholas Stern n’a-t-il pas qualifié le changement climatique de « plus grande défaillance de marché de tous les temps » ?
Or la vertu de la planification française apparaissait comme « l’anti-hasard » selon l’expression du Commissaire du Plan Pierre Massé au début des années 1960, en accord avec le Président de Gaulle qui faisait du Plan « une ardente obligation ». Il est donc utile de comprendre la logique originale de la planification française, avant de réfléchir à la manière dont une planification stratégique pourrait être adaptée aux défis de notre temps.
La planification française est issue du programme du Conseil national de la Résistance, adopté à l’unanimité le 15 mars 1944. Après la Libération, les réformes structurelles se sont imposées dès le début de 1946 sous l’égide du gouvernement provisoire. Les nationalisations dans les secteurs clés de l’énergie, des transports publics et de la finance ont été des moyens pour éradiquer le pouvoir des lobbies sur la direction de l’économie…