Notes
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[1]
Sur l’histoire du mouvement analytique, Paris, Gallimard, 1991, p. 33 ; « Mes vues sur la sexualité dans l’étiologie des névroses », Résultats, Idées, Problèmes, I, Paris, PUF, 1984, p. 116-117 ; Sigmund Freud présenté par lui-même, Paris, Gallimard, 1984, p. 57.
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[2]
Sur l’histoire du mouvement analytique, p. 31 : « Lorsque cette étiologie s’effondra, victime de sa propre invraisemblance et de sa contradiction avec des circonstances qu’on pouvait solidement établir, je me trouvai d’abord à un stade de complète perplexité ».
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[3]
Sur le détail de ce parcours, cf. L. Kahn, Freud 1897-1904, Paris, PUF, 2000 et « L’excitation de l’analyste », in Le fantasme, une invention ?, éd. APF, 2000.
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[4]
Sur l’histoire du mouvement analytique, p. 32.
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[5]
La question de l’analyse profane, OCF/P, XVIII, p. 17.
-
[6]
Ce que Freud affirme haut et fort dans L’avenir d’une illusion et Malaise dans la civilisation concernant le savoir et le savoir-faire de l’humanité face aux forces de la nature et leur domination, mais qu’il décrit aussi à propos de « la conjonction entre guérir et chercher » dans la « Postface » à La question de l’analyse profane, op. cit., p. 85.
-
[7]
Sur tous ces points, je renvoie au livre de F. Gil, La conviction, Paris, Flammarion, 2000.
-
[8]
L’avenir d’une illusion, OCF/P, XVIII, p. 165 et 170.
-
[9]
Ce savoir partagé, qui avait valeur de consensus – ce dont témoignent les Études sur l’hystérie –, explique sans doute la constante référence de Freud à Breuer lorsqu’il doit faire l’historique de la découverte.
-
[10]
Sur l’histoire du mouvement analytique, p. 31.
-
[11]
Pour autant que l’imagination est la « faculté » qui permet non seulement la cohabitation des contraires mais leur synthèse.
-
[12]
S. Freud, « Constructions dans l’analyse », Résultats, Idées, Problèmes, II, 1985, Paris, PUF, p. 279-280.
-
[13]
S. Freud, Freud présenté par lui-même, Paris, Gallimard, 1984, p. 88.
-
[14]
Conférences d’introduction à la psychanalyse, Paris, Gallimard, 1999, p. 33, 64-66, 86-87.
-
[15]
« Manuscrit H », 24 janvier 1895, La naissance de la psychanalyse, Paris, PUF, 1969, p. 101.
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[16]
Lettre à Fliess du 15 octobre 1897.
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[17]
« L’inconscient », OCF/P, XIII, p. 210.
-
[18]
J. Laplanche, Nouveaux fondements pour la psychanalyse, Paris, PUF, 1987, passim.
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[19]
Hypothèse développée par O. Mannoni dans Freud, Le Seuil, Paris, 1968, p. 60-61.
-
[20]
Comment oublier, dans les démêlés cliniques de Freud avec les preuves de la séduction paternelle, ne serait-ce que cette remarque, datant du 12 juin 1897 : « Dans le cas présent, le Tout-Puissant s’est montré assez bienveillant pour faire mourir le père avant que l’enfant ait atteint ses onze mois, mais deux des frères de la patiente, dont l’un était de trois ans son aîné, se sont tiré une balle »?
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[21]
Lettre du 7 juillet 1897.
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[22]
Préface de J. Starobinski (p. VIII) à E. Jones, Hamlet et Œdipe, Gallimard, 1967.
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[23]
La profondeur de l’adhésion de Freud aux théories de Fliess et l’importance de ses contributions chiffrées sont la source d’un réel étonnement lorsque l’on découvre la correspondance complète (cf., rien que pour cette époque précise, les lettres des 3 mars, 30 mai, 6 et 17 décembre 1896, des 24 janvier, 12 avril et 25 mai 1897). Si je parle de raréfaction, c’est que, dans la suite de la lettre du 21 septembre, n’apparaissent plus que deux ou trois occurrences de concordances périodiques concoctées par Freud.
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[24]
Lettres du 20 mars et du 20 avril 1895.
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[25]
Ce sur quoi insiste Freud lorsqu’il interprète le souvenir d’enfance de Goethe : c’est sur la part de la haine dans la fabrication du « souvenir » qu’il attire notre attention, faisant de celle-ci le noyau refoulé et actif de l’expérience, qui devient expérience du souvenir lui-même. C’est alors la notion même d’expérience vécue qui est déroutée de la fonction que lui attribuait Goethe.
Pas de sol pour l’inconscient, seulement une effectivité : telle est la découverte de Freud après l’abandon de sa neurotica. En deçà du réel de l’événement, la parole – dans la théorie comme dans la cure – construit la vérité du désir et de son fantasme.
1Démêler l’histoire de l’invention psychanalytique de l’histoire personnelle de son inventeur est chose impossible. De cet enchevêtrement, dont il dit qu’il a duré aussi longtemps que dura le splendide isolement, Freud fait le principe de plus d’une présentation de sa découverte : en 1914, dans Sur l’histoire du mouvement analytique, en 1925, dans l’Autoprésentation, mais dès 1905, dans « Mes vues sur la sexualité dans l’étiologie des névroses ». Chaque fois, « le rôle que joue [sa] personne » dans le développement théorique place au premier plan le cheminement intime de la création. La correspondance avec Fliess, correspondance privée s’il en est – Freud ne s’inquiète-t-il pas, lors de la publication de Psychopathologie de la vie quotidienne, du dévoilement de tous ces privata qui n’étaient initialement adressés qu’à « l’unique autre » ? –, témoigne de ce que fut ce laboratoire transférentiel, premier atelier des hypothèses, de leur assertion aussi bien que de leur effondrement. Tâtonnements, remaniements, analyse de fragments cliniques, déclarations d’amour, silences douloureux, expérimentation des calculs périodiques de Fliess, tout se mêle dans la fièvre de l’échange, et c’est dans cette effervescence que Freud rédige la lettre du 21 septembre 1897. Lettre inaugurale qui défait le maillage historique de la compréhension du symptôme et fraye la voie, irrévocablement, à la dimension d’une vérité qui ne pourra se déterminer dans la concordance avec la réalité des événements matériels.
2Lorsque Freud s’interroge, trente ans plus tard, sur le dosage qu’il convient d’établir entre présentation objective et présentation subjective dans la narration de sa découverte, la question ne peut donc être imputée à une simple figure de style qui voudrait affirmer sa « priorité » absolue dans l’invention. Certes, Freud ne fait jamais explicitement allusion à la lettre décisive, mais l’empreinte de ce temps intime et personnel apparaît dans les écrits ultérieurs et, me semble-t-il, toujours sous la même forme : régulièrement, il mentionne « l’erreur » la plus significative parmi celles qu’il a commises à ses débuts et qui aurait pu devenir « fatale » à la jeune science, « l’erreur à laquelle il a succombé pendant un certain temps et qui a failli avoir des répercussions désastreuses sur tout [son] travail » [1]. Or, à n’en pas douter, l’assise de cette erreur est subjective. En prenant des « fictions mnésiques » pour la marque d’événements réels, elle a consisté à adhérer à la certitude des patients : comme eux, Freud était persuadé de la réalité des souvenirs que ceux-ci se remémoraient en séance. « J’ajoutai foi à ces récits », insiste Freud, expliquant comment il pensait alors avoir trouvé dans ces expériences de séduction sexuelle de l’enfance la cause première de la névrose. Et que, dans quelques cas, de telles relations au père, à l’oncle ou à un frère aîné se soient maintenues jusque dans un temps de remémoration assurée, ne fit que le « renforcer dans sa croyance ». Croyance dont il lui fallut se déprendre, mais reste « l’erreur » qui est comme la cicatrice de la croyance.
3Dans la révélation du grand secret – « Je ne crois plus à ma neurotica » –, sans doute convient-il d’accorder à « croire » autant de poids qu’à la théorie abandonnée. Car avec la croyance, la découverte analytique s’inscrit d’entrée de jeu dans l’horizon d’un doute qui, une fois éveillé, ne s’apaisera plus. Ce doute, qui ne cesse de soutenir le trouble de l’écoute et l’élan de la quête théorique, est au principe même de l’invention pour autant que l’énigme psychique et sa construction ont maille à partir d’une manière insoluble avec la fiction. De ce point de vue, s’en tenir à la lecture qui voit dans l’abandon de l’hypothèse de la séduction sexuelle la fondation de la réalité psychique demeure insatisfaisant. Car cela équivaut à traiter cette nouvelle réalité, dont le paradoxe est que justement elle n’appartient pas à la réalité, qu’elle relève davantage de l’effectivité (ce que Freud appelle le Wirkliches) que de l’être du réel (ce que Freud appelle le Reales), cela équivaut à la traiter comme un nouveau sol. Or le propre de l’abandon de la neurotica, et de son corollaire immédiat, la découverte du fantasme, est qu’avec eux le sol lui-même soudain se dérobe. Ce qu’affirme avec la plus grande netteté le troisième argument développé par Freud dans la lettre du 21 septembre 1897, « la notion certaine que, dans l’inconscient, il n’y a pas d’indice de réalité, de sorte qu’on ne peut distinguer la vérité d’une fiction investie d’affect ». Mais qui est redit dans un autre ton en 1925 lorsque, à propos de la foi accordée aux scènes racontées, Freud note : « Si quelqu’un allait hocher la tête en me soupçonnant de crédulité, je ne pourrais pas lui donner tout à fait tort ; mais je ferais valoir que c’était l’époque où je faisais délibérément violence à mon sens critique afin de rester impartial et réceptif aux nombreuses nouveautés qui se présentaient tous les jours ». En somme, il fallait être crédule pour pouvoir ne plus croire.
4Ou plus exactement il fallait que l’exercice du jugement critique soit précédé par le temps de son suspens pour que se défasse le savoir consensuel – ou relativement consensuel – qui consistait à envisager les causes dans le champ du réel. Il fallait à Freud pouvoir être saisi par la donation directe des choses avant d’examiner, par un retour indirect, le statut de leur existence. La fonction critique, tour à tour investie, désinvestie, réinvestie, apparaît comme la ligne de crête du retournement de perspective effectué en 1897. La vacillation du jugement de réalité est la cheville ouvrière de l’audace et du renversement, dans la cure comme dans la théorie. Ce qui seul explique la fierté de Freud à la fin de la lettre du 21 septembre, alors qu’il vient d’avouer « ne plus du tout savoir où il en est » : « Si j’étais maussade, confus, exténué, de tels doutes seraient probablement à interpréter comme des manifestations de faiblesse. Comme je suis dans l’état inverse, je dois les reconnaître comme le résultat d’un travail intellectuel honnête et énergique, et être fier qu’après un tel approfondissement, je sois encore capable d’une telle critique. »
5Une fois de plus, le mot « approfondissement » ne rend pas compte de ce que dit son équivalent en allemand, Vertiefung. C’est bien d’enfoncement, de l’enfoncement dans la résistance, qu’il est ici question, cela même que Freud évoquera comme le temps essentiel de la perlaboration dans la cure : s’enfoncer le plus profondément possible dans le refus de perdre le sol de ses références, administrer aussi loin que possible un traitement rationnel aux observations qui entérinent les certitudes déjà bâties, explorer l’impasse, la lacune, la contradiction [2], et pour ce faire les laisser occuper tout le champ de la pensée, pour que soudain la fausse certitude se délie et laisse place à une autre conviction.
6Mais en 1897, la difficulté réside justement en ce que Freud échange un fait contre une fiction, un événement contre une inférence, un réel admis contre un objet construit, produit par hypothèse, impalpable, – au sens où l’inconscient n’est pas palpable : seuls le sont ses effets. Et l’opération est redoublée : car si la « scène » perd sa consistance historique pour gagner le poids de l’effectivité du fantasme – de sa productivité (production du symptôme) et de sa puissance d’action (la puissance d’action inextinguible étant cela qui définit la réalité psychique) –, dans le même moment le caractère fictif de la métapsychologie cesse justement de ruiner la valeur théorique de celle-ci. « Dans cet écroulement de toutes les valeurs, seule la psychologie est restée intacte. Le rêve est là, tout à fait sûr, et mes débuts dans le travail métapsychologique n’en ont que gagné plus de prix. »
7Soit, Freud va emprunter le détour par le rêve pour atteindre le noyau dur du fonctionnement psychique. C’est par ce cheminement qui, de la névrose, va vers « le livre du rêve » pour faire retour sur le fantasme, que le paradigme hallucinatoire de la réalisation du désir inconscient et le paradigme chimique des désagrégation, recomposition, déliaison et amalgame qui aboutissent aux formes déformées, vont permettre la construction du logos inconscient [3]. Mais cette description correspond précisément à ce que Freud nomme la présentation objective. Du point de vue subjectif, l’effondrement de la croyance et le déplacement de la certitude vers la conviction engagent une transformation très profonde du rapport à l’objet. On pourrait encadrer cette transformation par deux remarques. La première appartient au regard rétrospectif que porte Freud sur l’envie de « tout lâcher » qui le gagna en 1897 : « J’en vins finalement à penser qu’on n’a pas le droit de se décourager du seul fait qu’on a été trompé dans ses attentes, mais qu’il faut réexaminer ses attentes » [4]. La seconde s’adresse à l’interlocuteur de L’analyse profane qui demande de quoi est fait l’appareil psychique : peu importe, répond Freud, « la valeur d’une telle “fiction” (…) dépend de ce qu’on peut en faire » [5].
8Que la théorie imagine et que l’invention ait maille à partir avec la croyance, ne disqualifie donc pas l’activité théorique ; la qualité de celle-ci dépend de son efficience [6]. D’ailleurs, cette disposition, nous ne la tenons pas de notre humanité mais de notre animalité : la croyance animale « imagine » l’ennemi même en son absence, elle « théorise » sa présence, et ceci est le premier modèle de l’évitement du danger. La valeur de la théorie s’attestera donc dans l’effectivité de la pratique, c’est-à-dire dans la rencontre relativement adéquate entre la construction, l’intelligibilité qu’elle octroie et le changement qu’elle permet, et dans le pouvoir qu’elle donne de poursuivre la démarche heuristique en élargissant le champ de savoir [7]. Mais la complication humaine tient au fait que le sujet, poussé hors de lui-même vers quelque chose d’inconnu, est immédiatement confronté au poids de ses attentes subjectives dont Freud, depuis l’Esquisse, n’a cessé de souligner combien elles menacent toujours de dérouter le jugement. Certes, la conviction se rattache à un objet fondé et reconnu. Mais si la conviction, ou plus exactement « le sentiment de conviction », est le mode subjectif du vrai, ses accointances avec le « croire » se trameront nécessairement dans l’attente que soit, directement ou indirectement, satisfait le désir.
9Tant que la conviction s’ordonne dans une vision du monde qui a reçu un relatif aval de la communauté humaine, le traitement des données s’inscrit dans le cadre d’un capital de connaissances existant préalablement. L’enfant croit sur parole, qu’il puisse vérifier – par exemple que la ville de Constance est sur les rives du Bodensee –, ou qu’il ne puisse pas vérifier – par exemple que la terre est ronde [8]. Chaque fois, ces savoirs admis se présentent sous la forme de « dogmes », mais ceci ne les disqualifie pas en soi : cela indique seulement le dispositif d’une adhésion qui fait constamment se croiser la croyance et la conviction. La complication réside dans le moment où un dogme ne se donne pas comme un « précipité de l’expérience ». C’est alors qu’on peut le soupçonner d’être une illusion, une illusion qui est illusion du vrai puisque croire au faux est contradictoire dans les termes. C’est la part du désir dans l’erreur qui est la marque de l’illusion. Et ce désir peut être de plusieurs natures : il peut être souhait de cohérence, ce qui amène à « forcer » les faits ; il peut être désir de soumission, ce qui se traduit par l’adhésion à la pensée du maître ou de la communauté ; il peut relever de l’accomplissement d’un désir inconscient parfaitement méconnu du sujet.
10Si nous croyons qui nous aimons et si c’est de là que l’interprétation de l’analyste tire en partie sa force, Freud n’évite pas d’interroger l’alliance de l’amour et de la suggestion. Or la butée de l’outil pratique qu’est le transfert positif dans la cure se révèle pleinement lorsque nous bâtissons les théories elles-mêmes. Ce que Freud développe dans L’avenir d’une illusion en montrant comment la terre d’origine des théories religieuses est l’inconscient. Mais qu’il disait déjà dans le dernier chapitre de Psychopathologie de la vie quotidienne à propos de la perception endopsychique projetée sur le monde par le paranoïaque. Disons que le cas de la croyance religieuse donne la mesure de la précarité du consensus pour asseoir la valeur d’une connaissance. La cause qui impulse l’adhésion vient alors sur le devant de la scène de l’attente.
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13Si, dans l’ordre de la découverte, la dimension de réalisation hallucinatoire du désir dans le rêve fut la première conception accessible à Freud, peut-être est-ce dû en partie au fait que la fonction de l’hallucination onirique avait déjà été entrevue, ce dont témoigne Freud à propos des travaux de Fechner et de Griesinger et Radestock. La dimension hallucinatoire du souvenir qui n’en est pas un, – qu’il s’agisse du souvenir-écran ou du fantasme –, et la fonction d’accomplissement de désir du symptôme ne s’inscrivaient, elles, dans aucun savoir préexistant. Or, « avoir été trompé dans ses attentes » concerne précisément le cadre du savoir partagé par quelques-uns, sur lequel était bâtie la théorie quantitative de la décharge dans le symptôme [9]. Théorie économique déjà fictive, certes, mais qui trouvait néanmoins dans la mise au jour de l’événement provocateur de l’excès d’excitation, son fondement dans la réalité. Réexaminer ses attentes a supposé non seulement de renoncer à cette assise réelle malgré la valeur de l’observation des faits, mais plus encore de supporter de bâtir seul, sans aucun appui consensuel, un nouveau paradigme pour l’entendement. Ce que Freud indique en situant « le fait nouveau » dans le pas décisif mais troublant qu’il franchit, qui allait des « traumatismes inventés » par les patients à l’invention par lui du fantasme ; et qu’il souligne en insistant sur le fait que ces remémorations « provenant d’analyses correctement menées » se révélaient pourtant « sans vérité » : « On avait donc perdu le sol de la réalité » [10].
14Entre croire et critiquer, l’abandon de la neurotica amène Freud au plus près du péril contenu dans l’acte théorique qui, d’être de toute nécessité imaginaire [11], se redouble dans le risque d’un ajustement trop heureux entre un objet imaginaire et le modèle qui permet d’en rendre compte. Or, avec le réexamen des attentes, le changement de camp de l’invention impose le changement de sol de la vérité. L’invention du fantasme suppose non seulement que perception et compréhension abandonnent l’espoir d’exhumer l’objet enseveli et de combler ainsi la lacune, mais que soit radicalement modifiée la notion même de reste. Chaque présentation objective décrit ce temps essentiel du recentrement de la vie psychique sur le concept de travail. Mais, du point de vue de la présentation subjective, c’est un Freud solitaire qui abandonne la certitude en principe garantie par les faits, qui fait violence à son sens critique en affrontant la question de sa propre croyance, et qui déboute la référence au monde d’une position légitimée depuis fort longtemps par le consensus rationnel.
15Il en résultera la troublante parenté entre la théorie et le délire dont Freud fera la matière d’un de ses derniers textes, convoquant et interrogeant l’analogie entre les délires des malades et les constructions que nous bâtissons [12]. Mais auparavant, en 1909, ce trouble est déjà évoqué, fortement, avec les accents de l’aveu personnel : « Ce fut comme l’accomplissement d’un rêve diurne invraisemblable lorsque je montai à la chaire de Worcester afin d’y donner les “Cinq leçons sur la psychanalyse”. La psychanalyse n’était donc plus une formation délirante, elle était devenue une part précieuse de la réalité » [13]. Entre perdre le sol de la réalité et le retrouver, il y a, objectivement, l’écart d’une révolution scientifique et, subjectivement, le chemin parcouru par une pensée solitairement « divergente » jusqu’à la refondation d’une nouvelle « convergence » de la communauté.
16Est-ce ce séisme qui guide Freud dans la discussion des Conférences d’introduction à la psychanalyse ? En 1917, aux prises avec le problème de la conviction et de la démonstration en psychanalyse, il n’évite aucun des aspects du doute. Procéder par inférences, souligne-t-il, et travailler sur de menus indices comme nous le faisons se rapproche dangereusement de la paranoïa combinatoire [14]. Et nous ne pouvons compter ni sur l’adhésion à notre propre construction ni sur le gain narcissique qui en résulte pour débouter la menace délirante : « Ces malades aiment leur délire comme ils s’aiment eux-mêmes », écrivait-il dès 1895 [15]. Ce qui caractérise la conviction délirante est précisément l’énergie qui soutient l’adhésion au contenu cru, une énergie fournie à la croyance par la puissance libidinale du fragment de vérité psychique engagé dans la construction. Traiter des signes de faible intensité comme des manifestations chargées d’une forte signification, passer de l’indice considéré comme un signe à l’indice ayant valeur de preuve, ne protège donc en rien l’activité analytique du risque d’avoir, au moyen de la projection, introduit des éléments refoulés dans la réalité extérieure et sa description. Cela indique seulement comment le délire emporte la conviction par le fait de la toute-puissance de la pensée et comment le leurre animiste est encouru chaque fois que nous bâtissons le monde. Lorsque Freud, au plus vif de l’auto-analyse, en appelle à « la force de preuve de ces coïncidences concordantes » [16], une telle concordance ne peut donc à elle seule conférer à l’interprétation force de légitimité. La force peut aussi bien être, ici comme ailleurs, celle qui transporte la pensée lorsque, nommant les choses, elle croit avoir maîtrisé leur force d’action. Ce péril animiste, Freud n’hésite pas à le présenter comme au centre de l’élaboration du concept d’inconscient : on sait dans quel débat sur l’inférence et ses doubles fonds Freud est finalement amené à enraciner l’hypothèse de l’inconscient au plus profond du fonctionnement primitif de la pensée [17]. Et l’on sait aussi comment il en appelle à la scientificité pour faire face au danger d’une telle position. Mais nous retournons là dans le champ de la part objective de la découverte psychanalytique. S’agissant du « Je ne crois plus à ma neurotica », je voudrais rester, cette fois, arrimée à la croyance.
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19Tenons-nous en à l’assertion selon laquelle c’est la parcelle de vérité contenue dans l’énoncé qui emporte la conviction, et admettons que « perdre le sol de la réalité », c’est ne plus savoir où s’insère ce fragment vrai : on est alors mis en demeure de se demander quelle était la parcelle de vérité contenue dans la neurotica qui a entraîné Freud dans son adhésion à la croyance de ses patients concernant l’existence des scènes de séduction. L’hypothèse de Jean Laplanche est que cette parcelle de vérité, parcelle qui, avec le cataclysme de 1897, est occultée puis refoulée, est la découverte que la source de l’excitation n’est pas endogène mais bien exogène. Ou plus exactement cette source est exogène-endogène pour autant qu’il y a eu intromission d’un message désémantisé, énigmatique, sexuel et ininterprétable, dans la sphère psychique de l’infans, laquelle se différencie sous le choc de la séduction et du refoulement originaires. Le fragment de vérité contenu dans la neurotica renvoie à cette action occulte du désir de l’autre en soi. Il aurait donc fallu que Freud approfondisse la théorie de la séduction restreinte en la généralisant et qu’il prenne en compte l’essentielle passivité du nourrisson et l’essentielle énigme de la séduction elle-même [18].
Mais une telle vérité était doublement inappropriable pour Freud : d’une part, parce que sa reconnaissance supposait que le mécanisme du refoulement et du retour du refoulé ait été auparavant élucidé et, d’autre part, parce que sa théorisation supposait que le bouleversement de la notion même de référence soit déjà accompli. Or l’un et l’autre, loin d’être des prémisses, vont être les premières conséquences de l’effondrement de la neurotica. C’est l’impossibilité de généraliser l’accusation de tous les pères d’être pervers et l’échec final et toujours renouvelé de l’enquête mnésique (même dans le cas des délires les plus profonds) qui font basculer le champ d’application du jugement de réalité. On voit d’ailleurs comment la théorie de l’objet-source développée par Jean Laplanche est elle-même forgée sur l’effondrement de la première théorie du trauma, lorsqu’on prend en compte le fait que le message énigmatique suppose le démembrement de toute référence à un événement réel. Sans le renoncement à la neurotica, comment aurait pu être arraché le plan de l’effectivité au plan du réel ? Comment aurait pu être déplacée la conception du fait au point qu’elle puisse se ramasser dans celle de l’effet, maillon capital dans l’établissement de l’écart entre contenu manifeste et contenu latent ? Et comment aurait pu être prise la mesure de la partie qui se joue silencieusement entre le langage et le sexuel à l’orée du désir ? Le message énigmatique est le postulat d’un événement qui n’accède jamais au statut d’événement. C’est un événement non-événementiel, scellé dans la matière psychique, dont l’avènement ne se présente que sous une forme déformée, transformée par les déplacements d’accentuation, toujours dissimulée dans le labyrinthe des affects. Or le problème soulevé par le « croire » freudien concerne très précisément la créance qu’il est permis d’accorder à ce qui est postulé, l’agent actif et invisible, contre ce qui se présente, l’expression manifeste.
Il me semble que le questionnement de cette créance ne peut, subjectivement, être désolidarisé des démêlés transférentiels de Freud avec les théories fliesséennes ; ou plus exactement de la combinaison complexe du deuil et du transfert. Faisons l’hypothèse que la théorie du trauma a servi de défense contre la connaissance de l’Œdipe [19], – ce que traduit l’analyse du rêve « Hella » où Freud préfère penser que le désir réalisé par le rêve est le constat que le père est effectivement le promoteur de la névrose plutôt que d’envisager la révélation d’un désir éprouvé par lui pour sa fille Mathilde. L’attente de Freud de voir confirmer sa théorie apparaît alors comme l’ultime barrage contre la représentation inconsciente du désir incestueux, en même temps que le fragment de vérité qui fait adhérer Freud à la croyance de ses patients se révèle être le nœud crucial du vœu œdipien.
En septembre 1897, Freud a perdu son père depuis un an et c’est durant cette année de deuil que l’on assiste au formidable développement de la théorie de la séduction en même temps qu’il en appelle à une « religion du diable ultra-primitive ». Que le diable soit le père et que Freud soit confronté à l’excitation provoquée par le deuil, c’est ce que nous indique le défi lancé à cette « haute figure » de l’enfance. Mais c’est aussi ce que confirme le premier accès à l’efficience du fantasme comme source du symptôme : c’est à propos des motions hostiles des enfants à l’égard des parents, et de leur destin en cas de deuil – reproches mélancoliques ou bien autopunition hystérique par identification à l’état du mourant, avec idée de rachat –, que Freud, dans l’article « Impulsions » du « Manuscrit N », se demande pour la première fois si les symptômes peuvent émaner directement des fantasmes. Et de conclure : « La formation de symptômes par identification est nouée aux fantasmes, c’est-à-dire au refoulement de ceux-ci dans l’inconscient. »
L’attente de Freud, cela même qu’il lui fallut réexaminer, aurait-elle été que la preuve soit faite de la culpabilité du père, ce qui disculperait la réalisation du vœu de mort [20] ? Du point de vue de la présentation subjective, celle qui affronte la menace de la croyance délirante, plusieurs choses permettent de penser, en tout cas, que le prélude au réexamen s’accomplit sur le sol même de la relation avec Fliess. Tout d’abord le fait que, dans le retour de ce « quelque chose venu des profondeurs abyssales de sa propre névrose », Freud saisit l’implication de Fliess, l’impossibilité d’écrire qui l’affecte « étant destinée à inhiber leur échange » [21]. Ensuite la petite erreur de citation, dans la lettre du 21 septembre 1897, des paroles de Hamlet : « To be in readiness, » écrit Freud pour signifier combien il se tient prêt pour faire front aux conséquences de l’effondrement de la neurotica. A ceci près que les mots de Hamlet sont : « The readiness is all. », et Hamlet les prononce avant le duel « involontairement » meurtrier avec Laërte, le frère ennemi [22]. Enfin, comme en écho, la brève phrase qui vient à la fin de la lettre adressée à Fliess, trois semaines plus tard, le 15 octobre : « Ce que je te raconte sur l’extrémité psychique de ce monde trouve en toi un critique compréhensif, et ce que tu me communiques au sujet de son extrémité astrale n’éveille en moi qu’un étonnement infructueux ». Ces éléments convergent en un point, la réserve grandissante que Freud éprouve à l’égard de Fliess, laquelle n’est pas dite mais se mesure à la soudaine raréfaction des contributions de Freud aux données chiffrées qui devraient démontrer la vérité des « théories périodiques » [23]. Tout se passe comme si l’effort immense de Freud pour refouler sa haine contre l’ami coupable de l’erreur opératoire – ce qui était au cœur du rêve de « l’Injection faite à Irma » –, et pour n’en conserver que la figure réconfortante et estimée, – celle qui, évoquée dans les associations autour du rêve, contraint à la « discrétion » et à l’interruption de l’interprétation –, butait maintenant sur le doute le plus grave au sujet de la pertinence des théories de Fliess. Freud en 1895, protégeant son ami des railleries des médecins viennois, n’en finissait pas de le disculper, oscillant entre le désarroi, – « je suis inconsolable » – et la dénégation, – « je ne veux rien te reprocher » [24]. En 1897, « l’étonnement infructueux » dit déjà la perplexité incrédule.
L’impact du deuil du père et des vœux de mort sur le trajet théorique de Freud a été magnifiquement analysé par Didier Anzieu à partir de la correspondance. Mais lorsqu’on examine de près l’édition complète de celle-ci, aujourd’hui disponible, on s’aperçoit que les doutes concernant la réalité des événements de séduction sont absolument contemporains de ceux concernant la pertinence des périodes fliesséennes : quand les premiers s’aggravent au point de ne plus pouvoir croire à la neurotica, les secondes se révèlent indéfendables et incapables d’emporter la conviction. L’« étonnement infructueux » manifeste ce premier dégagement transférentiel. Mais ce que dit « extrémité astrale » va au-delà de ce détachement naissant. Mieux que toute autre expression, celle-ci indique le risque que Freud a soudain entrevu. La projection au ciel de la bisexualité est une croyance céleste et délirante, et seul l’amour de transfert explique qu’il ait pu y adhérer. Dans le maillage transférentiel entre le père et « l’unique autre », dans la tenaille entre amour et haine, séduction et meurtre, soumission et indocilité, se joue la vacillation du « Je ne crois plus… », tandis que se découvre le noyau de vérité endopsychique de l’illusion.
Du point de vue de la présentation subjective, c’est donc la remise en jeu du jugement de réalité sur un terrain – celui, biologique, des théories de Fliess – qui permit son suspens sur un autre terrain – celui, psychique, des remémorations. Du désaccordement et du choc de ces deux territoires émerge le sol « irréel » du fantasme. On saisit alors comment ce moment de retournement préfigure le moment constitutif du champ transférentiel. La fondation du cadre analytique procède d’un premier jugement de réalité ferme et énergique émis par l’analyste, lequel ne reconnaît dans la relation affective du patient à sa personne rien qui puisse s’expliquer par des circonstances réelles. Tenant pour « irréel » ce qui est néanmoins « véritable », l’amour de transfert, il découpe le territoire d’une vérité dont le procès demeurera en marge des jugements concernant le réel, pour ne se déployer que sous l’impulsion de l’effectivité constamment aimantée par les représentations-buts inconscientes.
En 1897, Freud, en appui sur le jugement de réalité concernant la validité et, surtout, l’ancrage des théories fliesséennes, effectue la « correction » grâce à laquelle le fils séduit, le patient séduit, l’ami séduit rapatrient dans l’espace intrapsychique la vérité passionnée d’une fiction vraie. De la menace qui a pesé sur ce temps, adhérer au délire par amour, il reste la cicatrice d’une « erreur ». Il reste aussi la violente querelle qui devait éclater quelques années plus tard à propos de la bisexualité et de sa « priorité » conceptuelle. Mais, plus que tout, il reste la veine infiniment audacieuse qui, des écrits théoriques aux écrits techniques, interroge le sentiment de conviction justement en tant que mode subjectif du vrai, et ne cesse de penser l’entretissage transférentiel de la perlaboration et de la suggestion. Car si c’est à la suggestion que l’analyste doit de pouvoir « influencer » le patient, la conviction ne peut se soutenir du seul transfert positif. Celui-ci permet seulement que le patient accepte d’être atteint par l’action de la parole de l’autre. En ce sens, « croire sur parole » participe essentiellement du dispositif infantile réactualisé par le transfert.
Mais admettons que l’analyste s’en tienne à cette croyance. Au mieux, la croyance ne durera que le temps du lien à l’objet passager du transfert, le traitement s’apparentant alors à l’hypnose. Au pire, l’analyste, se présentant comme maître ou comme sauveur, reconduira le verrouillage de l’économie narcissique du lien. La croyance, entée sur la « puissante figure » de l’analyste qui s’offre comme idéal, court-circuite l’élaboration en empruntant toutes les voies offertes par l’identification narcissique. Lorsque Freud souligne que la conviction s’écarte de l’illusion parce qu’elle se rattache à un objet fondé et reconnu, il réintroduit de fait, dans l’espace psychique, un sol, celui de l’expérience et de ses précipités. Mais cette expérience vécue ne se résume plus dans l’évocation du souvenir. C’est sur le trouble concernant la nature même du souvenir que se bâtit le nouveau sol. Un trouble généré par l’affect refoulé dont la reviviscence donne sa consistance véritable à la remémoration [25]. Un trouble qui, tôt ou tard, engage le jugement.
La conviction s’acquiert dans le désordre de la haine et sur le sol du conflit. C’est au refus de croire, – à cette incrédulité accomplissant d’un seul tenant l’insoumission et le défi, et dont Freud fait l’un des ressorts à la fois de la résistance et de la réalisation transférentielles –, c’est à ce refus que la conviction doit in fine sa force et son indépendance vis-à-vis de l’objet. Ce que redit Freud tout à la fin de sa vie lorsque, dans l’Abrégé et à propos de la menace que font peser sur la cure les états de transfert amoureux et haineux excessifs, il écrit : « Ce que le patient a vécu sous la forme d’un transfert, jamais plus il ne l’oublie et il y attache une conviction plus forte qu’à tout ce qu’il a acquis par d’autres moyens. » N’est-ce pas sur ce sol, celui de la haine mêlée à l’amour, plus encore celui de la si pénible reconnaissance des vœux hostiles contre « l’unique autre », que, dans la relation à Fliess, se brisent pour Freud la réciprocité narcissique et le partage de leurs croyances respectives ? Du point de vue de la présentation subjective, la lettre du 21 septembre inaugure, dans l’analyse, la fracture entre croyance et conviction.
Notes
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[1]
Sur l’histoire du mouvement analytique, Paris, Gallimard, 1991, p. 33 ; « Mes vues sur la sexualité dans l’étiologie des névroses », Résultats, Idées, Problèmes, I, Paris, PUF, 1984, p. 116-117 ; Sigmund Freud présenté par lui-même, Paris, Gallimard, 1984, p. 57.
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[2]
Sur l’histoire du mouvement analytique, p. 31 : « Lorsque cette étiologie s’effondra, victime de sa propre invraisemblance et de sa contradiction avec des circonstances qu’on pouvait solidement établir, je me trouvai d’abord à un stade de complète perplexité ».
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[3]
Sur le détail de ce parcours, cf. L. Kahn, Freud 1897-1904, Paris, PUF, 2000 et « L’excitation de l’analyste », in Le fantasme, une invention ?, éd. APF, 2000.
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[4]
Sur l’histoire du mouvement analytique, p. 32.
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[5]
La question de l’analyse profane, OCF/P, XVIII, p. 17.
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[6]
Ce que Freud affirme haut et fort dans L’avenir d’une illusion et Malaise dans la civilisation concernant le savoir et le savoir-faire de l’humanité face aux forces de la nature et leur domination, mais qu’il décrit aussi à propos de « la conjonction entre guérir et chercher » dans la « Postface » à La question de l’analyse profane, op. cit., p. 85.
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[7]
Sur tous ces points, je renvoie au livre de F. Gil, La conviction, Paris, Flammarion, 2000.
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[8]
L’avenir d’une illusion, OCF/P, XVIII, p. 165 et 170.
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[9]
Ce savoir partagé, qui avait valeur de consensus – ce dont témoignent les Études sur l’hystérie –, explique sans doute la constante référence de Freud à Breuer lorsqu’il doit faire l’historique de la découverte.
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[10]
Sur l’histoire du mouvement analytique, p. 31.
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[11]
Pour autant que l’imagination est la « faculté » qui permet non seulement la cohabitation des contraires mais leur synthèse.
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[12]
S. Freud, « Constructions dans l’analyse », Résultats, Idées, Problèmes, II, 1985, Paris, PUF, p. 279-280.
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[13]
S. Freud, Freud présenté par lui-même, Paris, Gallimard, 1984, p. 88.
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[14]
Conférences d’introduction à la psychanalyse, Paris, Gallimard, 1999, p. 33, 64-66, 86-87.
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[15]
« Manuscrit H », 24 janvier 1895, La naissance de la psychanalyse, Paris, PUF, 1969, p. 101.
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[16]
Lettre à Fliess du 15 octobre 1897.
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[17]
« L’inconscient », OCF/P, XIII, p. 210.
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[18]
J. Laplanche, Nouveaux fondements pour la psychanalyse, Paris, PUF, 1987, passim.
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[19]
Hypothèse développée par O. Mannoni dans Freud, Le Seuil, Paris, 1968, p. 60-61.
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[20]
Comment oublier, dans les démêlés cliniques de Freud avec les preuves de la séduction paternelle, ne serait-ce que cette remarque, datant du 12 juin 1897 : « Dans le cas présent, le Tout-Puissant s’est montré assez bienveillant pour faire mourir le père avant que l’enfant ait atteint ses onze mois, mais deux des frères de la patiente, dont l’un était de trois ans son aîné, se sont tiré une balle »?
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[21]
Lettre du 7 juillet 1897.
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[22]
Préface de J. Starobinski (p. VIII) à E. Jones, Hamlet et Œdipe, Gallimard, 1967.
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[23]
La profondeur de l’adhésion de Freud aux théories de Fliess et l’importance de ses contributions chiffrées sont la source d’un réel étonnement lorsque l’on découvre la correspondance complète (cf., rien que pour cette époque précise, les lettres des 3 mars, 30 mai, 6 et 17 décembre 1896, des 24 janvier, 12 avril et 25 mai 1897). Si je parle de raréfaction, c’est que, dans la suite de la lettre du 21 septembre, n’apparaissent plus que deux ou trois occurrences de concordances périodiques concoctées par Freud.
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[24]
Lettres du 20 mars et du 20 avril 1895.
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[25]
Ce sur quoi insiste Freud lorsqu’il interprète le souvenir d’enfance de Goethe : c’est sur la part de la haine dans la fabrication du « souvenir » qu’il attire notre attention, faisant de celle-ci le noyau refoulé et actif de l’expérience, qui devient expérience du souvenir lui-même. C’est alors la notion même d’expérience vécue qui est déroutée de la fonction que lui attribuait Goethe.